Afficher le menu
Information and comments (0)

Info:
Unfortunately no additional information has been added for this RP.

[RP] Un dernier souffle pour une ultime délivrance.

Judithe
La veille j’avais vue Diego. La veille je pouvais encore sentir les frémissements de l’enfant dans mon ventre. La veille je m’accrochais encore à la vie.
Mais hier était un autre jour qui me semblait désormais bien trop loin d’un aujourd’hui si différent.
Et pourtant, la réalité, aussi cruelle soit elle est là.
Si je faisais le bilan de mon existence, je n’avais jamais été réellement heureuse ; j’avais eu des moments de joie, mais le bonheur en lui-même n’avait jamais été accessible, et quand je pensais pouvoir l’effleurer du bout des doigts en fait il ne faisait que fuir plus loin encore.
En un an ma vie c’était écroulée, puisque j’avais perdu mes deux piliers : d’abord Manu, l’Écossais, l’ami le vrai comme on en rencontre un seul dans une vie et puis coup fatal du destin, ma jumelle qui avait décidé de le suivre dans la mort. J’avais lutté en vain.

Diego l’avait dit hier. Il m’avait dit de m’accrocher et de tout recommencer, de profiter de ma jeunesse pour tirer un trait sur mon passé, sur ce qui avait constitué jusque-là ma vie.
Il avait raison, passer son temps à onduler sensuellement dans des ballets de chairs interminables ne pouvait être sain et comme il l’avait fait remarquer ma beauté ne serait pas éternelle, un jour je me fanerai pour ne plus être qu’une vulgaire femme sans personne.
Mais tout recommencer ? Peut-être que par le passé j’aurai réussi. Mais aujourd’hui je n’avais plus personne pour me pousser en avant, et surtout je n’avais plus cette volonté.
Tout ce que j’avais réussi à accomplir, c’était gâcher ma vie et celle des autre avec.
Alors dans un jour comme celui-ci, dans ce jour si froid, dans ce jour ou le sang qui fait la vie s’écoule d’entre mes cuisses, ou les larmes ruissèlent sur mon visage et ou les bras de la mort me berçant sont mon seul réconfort, alors dans des jours comme celui-ci on pense que trop fortement que la vie est un échec et qu’il est temps de refermer son propre livre des destinés pour grimper vers ceux qui ont quitté ce monde avant nous. De les rejoindre. De les retrouver.

Diego est parti vivre sa vie avec ses femmes et nos enfants.
Niallan est parti alors qu’il devait être un père pour notre enfant, alors qu’il devait être là auprès de moi pour ma grossesse.
Mon frère est parti voilà bien trop longtemps pour que je pense sa promesse de revenir auprès de moi un jour réalisable.
Erilys est restée je ne sais ou dans un couvent, malade.
Manu est parti.
Liu est partie.
Et ici, il ne reste que moi, seule.
Je ne suis la femme de personne, je ne suis même plus mère et ne le serai plus jamais. Ses chances d’être un jour ces personnes je les ai eu. Je les ai eu et je les ai piétiné, j’en ai ri, je les ai dédaigné. Des deuxièmes chances aussi j’en ai eu, mais je n’ai pas su les saisir, juste les regarder passer insouciante quant à ce qu’il adviendrait.

Je fixe la tache sombre grandir sur ce draps quelques heures plutôt encore immaculé. C’est ma troisième chance qui s’enfuit par la plaie béante, c’est la vie tout simplement qui fuit mon corps et délaisse mon âme. C’était la dernière.
Alors que ma vue est brouillée par les larmes, je sens mes muscles s’engourdir lentement, ma tête se fait lourde et je perds le file de mes pensées.
Pourtant il faut que je repousse la mort encore un peu. Juste le temps d’écrire.
A Niallan pour lui dire qu’il ne verra jamais son enfant. A Diego pour m’excuser. A Mon fils, à ma fille pour qu’il sache à quel point leur mère aurait aimé en être réellement une pour eux.
Se délivrer, simplement par des mots. Expliquer le pourquoi du comment à tous ceux qui l’ignorent. Et enfin à Erilys, pour lui demander pardon de l’abandonner. Parce que Niallan, Diego et Erilys était les seuls qu’il me restait.
Je me lève difficilement serrant contre mon sein le tout petit nourrisson parti avant moi, attrapant du nécessaire à écrire m’asseyant ensuite sur un fauteuil, bébé dans un bras plume dans la main opposée.
D’abord pour une pour celle qui aura été l’unique amie.


Citation:
Ma parfaite,

Pardonne cette écriture indigne de tes prunelles.
Pardonne les tremblements de ma main qui ne veulent cesser.
Et pardonne tout simplement les mots qui vont suivre.
Peut-être que si la vie en avait décidé autrement, elle nous aurait au moins réuni une dernière fois, mais ça n’est pas le cas. A vouloir être aussi forte que toi je me suis fragilisée, jusqu’à ne plus être qu’un corps sans vie, une coquille vide. Je n’étais pas assez forte pour me battre comme tu le fais, pour défier le royaume d’un simple menton redressé fièrement. Alors aujourd’hui j’ai compris que j’étais trop fatiguée pour continuer ainsi. Ne te pose pas de questions, tu n’obtiendrais pas de réponses, car cette lettre est la dernière.
Je suis en train de mourir Erilys, mais ne pleure pas s’il te plait, puisque je pars en femme libérée. Ne mouille pas ton beau visage pour si peu, c’est mon choix. Je ne veux plus vivre et c’est ainsi.
Mais cette réalité m’effraie moins que de savoir que je pourrai encore vivre, la vie me fait et désormais j’ai toutes les clés pour m’enfuir là-haut retrouver ma jumelle et Manu.
Ne pense pas à un abandon Ma Parfaite ça n’en est pas un. Accueille ça comme une délivrance et dis-toi que je serai toujours un peu avec toi.
La beauté est éphémère Ma Belle et j’ai passé suffisamment d’années à me leurrer, aujourd’hui j’ai enfin compris. J’ai compris que j’avais gâché ce qui aurait dû être les plus belles années de ma jeunesse. Je suis belle, et c’est cette beauté même qui m’a détruite. Tu sais aussi à quel point tu es belle toi aussi. Peut-être même l’es-tu plus que moi. Ne fais pas les mêmes erreurs que j'ai commise, tu as un port digne des plus grande Reyne et l’esprit suffisamment fin pour accéder au haut de la pyramide.
Tu ne tomberas pas, je te tiendrai de là ou je suis.
Il est temps Erilys.
Saches que je pars et que j’emporte avec moi en morceau de toi, un souvenir, cette broche que tu m’avais offerte est piquée dans mes cheveux, magnifiquement.
Tu auras été l’unique amie que j’ai eue et la meilleure qu’il m’ait été donné d’avoir.
Je t’embrasse Ma Belle et veillerai sur toi depuis mon perchoir parmi les Déesses.
Dis-toi que je suis parmi les miens maintenant et je sais que ces mots te feront sourire.
Prend soin de toi.

Je t’aime.

Aphrodite.


La plume est posée quelques secondes le temps de rouler le vélin de le donner à un premier coursier tout en lui remettant une bourse bien remplie pour son silence.

Dans un couvent dans le Limousin tu la trouveras.
Erilys Corellio, rousse, magnifique tu pourras que la reconnaitre.

Bien Madame.
Maintenant sors et ne revient pas.

Le coursier est expédié, l’esprit sombre encore, livrant à chaque secondes un peu plus de terrain à la folie, repoussant la réalité. Un regard tendre est coulé vers le nourrisson grisonnant avant de recommencer à écrire.

Citation:
Diego,

Ne t’agace pas dès les premiers mots s’il te plait et lis jusque au bout.
Tout d’abord je tiens à m’excuser pour l'autre soir. Fais ce que tu veux de ces excuses mais sache qu’elles ont au moins le mérite d’être là et sincères. Je ne m’excuse pas seulement pour hier. Je m’excuse d’avoir tenté à plusieurs reprises de briser ton mariage. Je m’excuse de t’avoir causé tant de soucis et je m’excuse de t’avoir imposé des enfants dont ni toi ni moi ne voulions.
Je sais que tu ne veux plus entendre parler de moi et ton souhait aura été exaucé plus vite que prévu.
Notre histoire aura été un échec. Parce que je suis tombée amoureuse de toi. Parce qu’en voulant te retenir je t’ai éloigné de moi. Parce que j’ai fait l’inverse de ce que j’aurai du faire. J’aurai aimé que ça marche, parce que j’aurai aimé vivre ce que tu décrivais. Il faut croire que le conte de fée aura tourné au drame, j’ai laissé trop de plumes. Tu avais raison quand tu disais que nous étions trop semblables pour pouvoir nous accorder. C’est une réalité que j’intègre que bien trop tard malheureusement.
Hier tu m’as vue vivante, aujourd’hui je meurs.
Non Diego, ne te donne pas la peine de venir. Je ne veux pas que tu me vois ainsi. Et puis il sera trop tard, car alors même que je couche ses mots ici, je dois lutter car je la sens qui m’emporte.
Je te demande pardon pour tout.
J’aimerai que tu gardes cette lettre Diego, et que tu lises à nos enfants, tes enfants, quand ils en auront l’âge les mots qui vont suivre.

« Lucrezia et Manolito,

Je n’ai jamais été une mère pour vous. Mais je ne regrette rien car je sais que celle que vous appelez aujourd’hui « maman » aura mérité ce titre plus que moi.
Ce n’est pas votre pardon que je cherche à quêter par ses lignes, pour vous avoir lâchement abandonné. Il faut croire que j’étais suffisamment réaliste pour savoir que je serai incapable de m’occuper convenablement de vous.
Je me suis condamnée seule à la vie que j’ai eu et aujourd’hui j’ai payé pour mes pêchers.
Je sais que votre père a beaucoup de torts et ne fais pas les choses comme il faut parfois. Mais lui non plus n’était pas prêt à ce qui allait suivre et encore moins doublement. Pardonnez-lui ses erreurs, il fait de son mieux, puisque je l’ai piégé avec des enfants.
Il saura vous donner une éducation exemplaire et vous offrir une vie des plus agréables.

Lucrezia, je sais que tu seras belle, très belle. Quand tu liras ses mots, j’aimerai ensuite que tu demandes à ton père de t’expliquer pourquoi je suis morte, et de te parler de moi. Je sais qu’il comprendra.
Je ne regrette rien. On apprend de ses erreurs. »

Diego, n’oublie pas de leur faire lire cette partie qui leur est destinée, quand tu le jugeras bon, en attendant, je veux qu’ils grandissent en pensant qu’Eliance est leur mère.
Protège les, tu leur parleras de moi le moment venu ce sera une leçon pour Lucrezia.
Tu es une des meilleures choses qui me soit arrivée mais aussi une des pires.
J’aurai aimé une dernière étreinte avec toi.
Prend soin de toi et d’eux,

Aphrodite.


Un long frisson descend le long de mon dos, mes lèvres bleuies frémissent alors que des perles de sueurs glissent le long de mes tempes. Mon visage, je le sais est d’une extrême pâleur en cet instant je ne suis plus la juvénile déesse, mais une mourante, plus cadavre que beauté vivante. Je me lève tant bien que mal me tenant à tout ce que je trouve titubant jusqu’au lit pour poser délicatement le bébé retirant la robe tachée et poisseuse qui me recouvre avançant lentement vers le baquet dont je sais l’eau froide. L’eau perd de sa couleur bleuté pour accueillir une tinte rougeâtre.
Je grelotte, j’ai froid terriblement froid, mais je sais qu’il faut que je tienne encore quelques minutes, le temps de la mettre, le temps d’une dernière lettre la plus importante, pour Niallan. Mais avant, sa chemise est revêtit avant de prendre le petit emmitouflé dans une couverture et d’à nouveau m’asseoir pour écrire, l’ultime épitre, l’ultime délivrance.
Les dernières forces sont requises pour tenir un peu plus longtemps et arriver à aligner des mots cohérents entre eux.


Citation:
Niallan,

Je ne sais pas vraiment comment commencer cette lettre, je crois que … peut être tout ne sera pas compréhensible mais tu sais lire entre les lignes et tu sauras l’essentiel.
Ma main tremble Niallan et j’ai froid très froid.
Niallan, ou es tu ? J’avais besoin de toi. Tu avais dit que tu serais là, tu avais dit que tu viendrais. Mais je ne t’ai pas vue, tu n’étais pas là hier quand c’est arrivé. Tu te souvenais n’est-ce pas que que j’attendais ton bébé ? Dis-moi que t’avais pas oublié ? Où je ne sais pas peut être qu’il aurait mieux valu finalement.
J’étais enceinte de huit mois. Tu sais je n’ai pas fumé, je n’ai pas bu non plus pour être sûr qu’il soit en bonne santé. Mais même en essayant de bien faire j’ai pas réussi. Je n’y suis pas arrivée. Je n’arrive à rien.
C’était un garçon. Ton fils.
Je suis désolée Niallan. J’aurai aimé pouvoir te donner cet enfant.
Mais il est né trop. Il est né trop tôt et il n’y avait personne de qualifié pour m’entourer, j’étais seule Niallan.
Je ne te blâme pas, je pense que tu dois être en train de pleurer Alicina, elle est plus importante que moi.
Alors ce n’est pas grave.
On aura essayé. Deux fois. Ça n’a pas marché. Les autres y arrivent mais moi pas.
Il dort dans mes bras. Il est si beau, et si petit. Il a pleuré et s’est endormi hier soir contre mon sein. Il ne se réveillera jamais. C’est un ange, il est si paisible, ce fils qui ne vivra pas.
Moi aussi, Niallan je suis comme ce nourrisson, j’ai pleuré, j’ai crié mais mes appels sont restés vains, personne ne m’a entendu, personne n’est venu et aujourd’hui je vais m’endormir comme lui pour ne jamais rouvrir les yeux.
Ça n’est pas grave, tu sais, mon cœur s’est arrêté de battre le jour où elle est morte, aujourd’hui c’est mon corps, qui las de lutter à rendu les armes.
J’ai été fière de porter ton enfant, Fière d’être ta maitresse, ton amie, fière d’être tienne tout simplement.
Je t’aime tu sais. Pas comme une épouse aime son mari. Je t’aime comme l’ami que tu as été, ce compagnon qui savait me faire rire, cet homme qui m’a fait vivre l’ivresse, cet homme qui a pu me confondre avec une chèvre. Je t’aime comme l’amante que tu m’as fait devenir, au travers du souvenir impérissable de ses nuits chaudes et folles, de toute ses fois ou nous avons tutoyé ensembles les étoiles.
Je suis si fatiguée, je vais aller m’allonger avec le petit. Après on va monter rejoindre là-haut ce partis avant nous. J’emmène ta chemise avec moi il aura ton odeur avec nous. Je lui parlerai de toi, je lui dirai qu'il peut être fier de t'avoir pour père.
Quand je verrai Ali’ je lui dirai que tu l’aimes et qu’elle te manque plus que tout. Je lui demanderai pardon aussi.
Au revoir Beau Blond tu as été mon chevalier et le resteras ce jour où tu es venu me délivrer à Mimizan, je n’oublierai rien, jamais.

Prend bien soin de ta belle gueule.

Aphrodite.


Faiblement il est tendu au coursier, puis de m'adosser au fauteuil caressant la joue du petit en souriant doucement, me livrant entièrement à la mort qui m'emporte, sombrant plus loin, accordant mon dernier souffle à son étreinte glacée pour ne plus être qu'un pale cadavre dans une chambre vide de vie.
_________________
Diego_corellio
M’sieur Corellio ?
P’tain casse-toi abruti j’dors !
Une lettre pour vous m’sieur Corellio, c’t’important l’a dit la dame.
Boucle là j’arrive.

Je me dégage des bras de la bridée qui sommeille nue contre moi, chopant à la hâte mes braies, désireux de lire au plus vite cette lettre tant attendue, celle de La Nordique, cette lettre écrite quelques jours plus tôt. Ses mots se faisaient attendre, toujours avec la même angoisse insupportable qu’à chaque fois elle me dise que finalement elle préférait rester avec son fils et son mari.
C’est un rital les yeux pleins de sommeil qui ouvre la porte, torse nu, les cheveux en bataille saisissant le pli avec rapidité, avide de lire Ses mots. Je déplie le vélin avec fébrilité et relève les yeux sur l’homme encore présent.

T’attends quoi ? Ma bénédiction pour foutre le camp ?
Hors de ma vue, vite !


Toujours la même envie d’être seul pour lire Ses lettres. Pourtant celle-ci, comme je le découvre sitôt que mes yeux parcours l’écriture, n’est pas d’elle. De longs frissons me parcours, mon dos s’écrase avec brusquerie contre le mur avant que mon corps ne rejoigne le sol dans un bruit sourd. Le cœur se déchaine dans un poitrail malmené le souffle se fait court et je ravale les larmes que je sens monter.

La lettre à fait mal. La lettre a secoué un italien coupable.
La veille je l’avais vu et je l’avais rejeté alors qu’elle criait à l’aide. Je l’avais repoussé parce qu’encore elle me voulait et n’avait de cesse de faire des allusions à notre vie d’avant ou encore de tenter des gestes plus ou moins osés. Je savais très bien que si je laissais passer une caresse le reste suivrait et elle me prendrait tout, elle me sauterait dessus sans vergogne. J’avoue qu’à une époque ça me plaisait. Mais ce temps-là était révolu. Et je voulais coute que coute prouver à Maryah que j’étais capable de dire non à une femme et qu’elle seule suffisait à me combler, que les autres (excepté mes deux femmes qui elles, étaient au-dessus de tout) ne m’intéressaient encore moins qu’à l’accoutumé.

J’ai relu le vélin qui avait glissé de ma main pour embrasser le sol. J’avais d’autant plus mal car je savais qu’au fond elle n’était pas cette femme que les gens décrivaient. Je la connaissais, je savais que si elle avait tendance à être très extrême que ce soit dans ses sentiments ou sa conduite elle n’en restait pas moins une femme blessée et effrayée, cherchant à se protéger de ce que la vie pouvait lui réserver.
A cet instant j’ai ressenti le besoin intense de lui parler.
A cette amante qui avait enflammé mes nuits, à cette compagne que j’avais brisé, à cette mère que j’avais obligé, et enfin, à cette amie qui avait toujours demeuré.
Elle avait des torts inébranlables, mais jamais ses fautes n’avaient mérité comme prix l’ultime sacrifice, jamais elle n’aurait dû en finir. Parce que c’est ce qu’elle faisait, elle mettait fin à ses jours.
En revanche si j’étais sur de cette affirmation, le reste de l’histoire m’échappait et pour en savoir plus, une seule personne pouvait me répondre, le coursier que j’avais congédié. Mais il fallait que je sache, j’en avais besoin.

Les escaliers sont dévalés au pas de course la porte ouverte à la volée me retrouvant dehors dans le froid pied nus et court vêtu.
P’tain froid d’merde !
Je cours à en perdre haleine sur ce chemin de terre battue gelée par un hiver rigoureux. J’ai froid, j’ai mal mais c’est le juste prix de la vérité. Des hommes sont croisés, hélés sans courtoisie aucune, les secouant avec brusquerie, les pressant de répondre à mes interrogation, les yeux fous à l’idée de ne pas le retrouver.

Oh ! Arrête-toi là !
Hé ne me touchez pas vous là ! On n’a pas gardé les cochons ensembles mon petit.
Vrai, tu les gardes tout seul quand je vois ta femme. J’cherche un type, maigre, cheveux délavés avec en guise de coiffure une sorte de poulailler sur la tête et … ouai ben un peu comme tes … - la coiffure du sieur en question est désignée – ta … coiffure en fait …

Il ne m’attrape pas par le col vue que je n’ai pas de chemise, très pratique d’ailleurs mais je vois son gros poing se rapprocher dangereusement de mon visage avant de s’y écraser mémorablement. Je titube en arrière avant de reprendre ma course sonné et frigorifié marmonnant :
J’suppose que c’tait pas toi …
Quelques mètres plus loin je tombe sur le pauvre type que j’ai renvoyé chier ce matin je me plante devant lui, mains sur mes genoux essoufflé (vive la fumette).

Je... faut que … on … parle … v’nez …

Je me redresse et me remet à marcher en me tenant les côtes ne lui laissant pas le choix. J’ai l’impression de mettre des heures à passer la porte de la taverne m’écroulant devant la cheminée en grelottant, une couverture sur le dos et une bouteille à la main.

Dites-moi, dites-moi c’qui lui est arrivé.


Mon regarde est suppliant.
Ses mots me font l’effet d’un poignard remuant dans ma chair.
Il me dévoile tout, son accouchement qui tourne au drame, l’enfant d’abord vivant, mais trop faible ne survit quelques heures, il me parle d’elle, de quand elle lui a remis le courrier, de son air cadavérique et de ce nourrisson qu’elle tenait contre son cœur. Il n’omet rien et chacun de ses mots m’atteint, buvant à chaque phrase livrée, cherchant à rejoindre l’ivresse familière qui doit me délivrer de ce que je sais.
Le coursier est grassement payé avant de le laisser s’en aller.
Je la sais morte et pourtant je vais lui écrire. Je veux que de là où elle se trouve désormais elle sache à quel point je suis navré de tout ce que je lui ai fait. C’est une main engourdie qui se saisit de la plume, laissant les mots couler de source sur le vélin qui se noircit peu à peu d’encre.


Citation:
Aphrodite,

Je sais que de là ou tu es désormais, tu pourras lire ces quelques mots.
T’as vu, je ne me suis même pas agacé.
Je voudrai que tu saches, à quel point je suis désolé de tout ce qui est arrivé. Je n’ai jamais voulu que ça se passe comme ça, tu dois me croire, je m’en veux à un point …
Tout ce que j’ai fait, tout ce qui est arrivé est de ma faute et il est trop tard pour te demander de m’accorder ton pardon. Je t’ai brisé, je me suis joué de toi et c’est moi qui t’ai fait devenir ainsi.
J’aurai aimé que tu rencontres un homme qui soit digne de ton amour et non un qui se joue de celui-ci. Si tu as des torts, tu as été une des rares à ne jamais me tourner le dos, à être là quand le mal me rongeait et que je n’avais plus que toi.
Je me suis fermé à ta douleur et je t’ai tourné le dos pour une femme. De ça aussi j’en suis désolé.
Notre histoire n’a pas été un échec. Ou peut-être que si tout compte fait.
Nous avons tout fait trop vite. Nous rejetions une vie que nous trouvions trop banale, nous voulions plus, nous attentions tous deux trop de l’autre et c’est ce qui nous a perdu. Nous n’étions pas fait pour cet idéal. Tu étais si jeune, encore tellement bouleversée par cette vie dont tu peinais à te défaire. J’étais détruit d’avoir perdu mon amour d’avoir laissé filer Daeneryss. Alors pour essayer de fuir notre réalité on s’est jeté à corps perdu dans une relation passionnelle qui nous a fait plus de mal encore. On se trompait mutuellement, j’étais fou de voir ses hommes autour de toi te faire une cour empressée et toi, détestais ces femmes qui me faisaient les yeux doux. Ça nous plaisait et c’est en ça que ça n’a pas fonctionné. Je pense aussi, que l’alcool et l’opium nous rendait sur les nerfs et ont aggravé les choses.
Si je n’ai jamais eu d’amour pour toi, j’ai eu une réelle affection.
En ce qui concerne nos enfants, si au début je l’ai vécu tel que tu le décris aujourd’hui ils sont ce qui m’est arrivé de meilleur. Ce n’est pas moi qui m’occupe d’eux, ce sont eux qui s’occupent de moi. Eliance saura être une mère formidable pour eux et bien entendu je leur donnerai cette lettre en temps et en heure.
Je te souhaite un bon voyage parmi les anges ma puce, tu resteras l’ami dans mon cœur et la déesse aussi.
Je me souviens.
Je sais que tu comprendras et que cela te fera sourire.

A très vite.

Apollon.


Je sais qu’elle comprendra la fin de ma lettre et que d’ailleurs elle sera bien la seule. La signature parait narcissique pourtant ce surnom vient d’elle.
Le courrier ne sera pas donné à un quelconque coursier car je n’en connais aucun capable de voyager jusqu’aux Cieux. Alors il sera simplement relu avant d’être lu à haute voix pour elle et d’ensuite le bruler. Il faut croire que j’ai fini par croire aux sornettes que l’on raconte à propos de la fumée qui monte vers les morts et tout le tralala.
C’est dans des moments comme ceux-là que l’on croit à ce qui l’arrange pour apaiser la culpabilité qui nous ronge.
Et je sais que c’est cette culpabilité même que je vais expier sur le corps de la belle, la seule à être là auprès de moi.

_________________

Ban : JD Calyce
Niallan
[Je fais de mon mieux pour respirer maintenant
Mais il n'y a pas d'air dans mes poumons
Il n'y a personne ici à qui parler
Et la douleur à l'intérieur m'engourdit *]


[Début janvier]

Je savais que c'était notre dernière chance d'avoir un enfant à nous, un enfant qui enverrait au diable toutes les conventions sociales posées par les stupides bien-pensants. Un enfant né d'un amour puissant et libre, un enfant né d'une amitié indéfectible. Mais je ne pensais pas que cette dernière chance comptait autant pour la blonde, je croyais que le perdre ne lui ferait pas plus de mal que les autres fois. Aussi, quand j'ai reçu sa lettre, j'ai pensé qu'elle allait m'annoncer la perte du petit. Je me suis assis, j'ai débouché une bonne bouteille et je me suis préparé à prendre une claque.
Je me suis préparé à prendre une claque. Pas un milliard de coups de poignard.

« Ma main tremble Niallan et j'ai froid très froid ». Un long frisson remonte le long de mon échine, je serre les dents. A ce stade-là, je rejette le doute pernicieux qui s'empare de moi. Elle a froid parce que nous sommes en hiver et qu'elle doit être fatiguée par l'accouchement ou toute autre chose qui aurait mal tourné. Je poursuis ma lecture. « J'avais besoin de toi ». Un autre frisson, plus long, qui fait trembler ma main. J'inspire un grand coup pour me convaincre que l'emploi du passé signifie seulement que, désormais, elle n'a plus besoin de moi parce qu'elle va bien, qu'elle a réglé cette chose qui a mal tourné. « ...quand c'est arrivé », mais quoi ?! Qu'est-ce qui est arrivé, bordel ?! Mon palpitant s'emballe, j'accélère ma lecture. « Je n'y suis pas arrivée ». Elle a perdu le bébé, notre bébé. Je le savais, je m'y attendais. Mais je ne m'attendais pas à tous ses efforts pour le garder en bonne santé, tout comme je ne m'attendais pas à « j'étais seule Niallan ». Seule ?! Et son frangin, il était où son enfoiré de frangin tête à claques ? Et Erilys, elle était où ? Et Diego ? Et moi, ouais, j'étais où moi ? « en train de pleurer Alicina », en bon vieil égoïste que j'ai toujours été. Alors pourquoi est-ce qu'elle ne m'en veut pas ?! Pourquoi est-ce qu'elle dit que ce n'est « pas grave » ?!
Je ne la reconnais plus, j'ai l'impression de la perdre au fil des lignes. En fait, j'ai l'impression que si je continue à lire je vais la perdre définitivement, que la fin de la lecture marquera la fin de notre relation. Alors, lentement, je repose mon verre sur la table et le ressers. Cul sec. Je me ressers. Et je reprends.

« Il ne se réveillera jamais ». Une larme silencieuse roule sur ma joue. Mon fils, notre fils est mort alors-même qu'il avait poussé son premier cri. Il aurait pu vivre si elle n'avait pas été seule, si j'avais été là. Dents serrées, je me force à reprendre, m'éloignant peu à peu de la vision du cadavre d'un innocent chérubin pour me rapprocher d'une encore pire. « Aujourd'hui je vais m'endormir comme lui pour ne jamais rouvrir les yeux ». Le verre s'écrase au sol, mes larmes se mélangent à l'alcool sur le plancher. Et pourtant, je me refuse encore à l'évidence. Ce n'est pas possible, pas elle. Pas encore.
« J’ai été fière de porter ton enfant, Fière d’être ta maîtresse, ton amie, fière d’être tienne tout simplement. ». Ça y est, c'est terminé. Je ne peux plus me leurrer, je ne peux plus faire comme si les mots n'avaient que le sens rassurant que je voudrai leur donner. Je ne peux plus faire comme si je savais pas lire entre les lignes. Au « Je t'aime tu sais », je m'effondre littéralement et hurle toute ma rage. Cette douleur je ne pensais plus la ressentir, ce manque qui déchire le cœur je pensais que je n'en entendrai plus parler. Et pourtant. Les larmes inondant la lettre ne m'empêchent pas de poursuivre la lecture de celle-ci et au « cet homme qui a pu me confondre avec une chèvre » le rire se mêle aux larmes pour une courte durée. Oui, je me souviens de cette folle soirée. C'était le bon temps. Il n'y avait que Vector, Lexi, Aphro et moi. On était bien, on était heureux. Aujourd'hui mon meilleur pote est porté disparu, ma gamine est morte et mon amante...

Non. Non NON.

Je sais, c'est cliché, ce refus de la mort. Ce qui l'est peut-être encore plus ce sont mes poings qui s'écrasent contre le mur lorsque mes yeux embués de larmes tombent sur le « Je suis si fatiguée, je vais aller m’allonger avec le petit ». J'aurais tellement voulu être là, lui dire que ce n'était pas le moment de dormir, qu'elle pouvait se relever. Mais c'est trop tard. Le coursier a sûrement fait vite mais dans le meilleur des cas il s'est au moins passé cinq à six jours avant qu'il ne me donne la lettre. C'est trop. Trop pour espérer tomber sur autre chose que deux cadavres en allant là-bas. Et puis où, hein, où est-ce qu'elle est ? Où est-ce qu'ils sont ?
Le prénom « Ali » m'achève. La blonde et la rousse, je les imagine « en haut », me regarder de leurs magnifiques yeux dans lesquels je me suis si souvent noyé. Je les imagine si bien que mon cœur rate un battement lorsque, à travers mes larmes je crois distinguer des mèches rousses et blondes. Illusion d'un esprit malade. Les hommes ne sont pas censés pleurer, c'est mal vu, ça fait looser mais, croyez-le ou non, je m'en branle. L'illusion brisée me détruit, là et puis là aussi. Partout, toutes les parcelles qui avaient réussi à survivre aux morts successives de Lexi et Ali volent en éclats.
J'implose.

« Prend bien soin de ta belle gueule. » Je ne pourrai pas suivre ces recommandations, je le sais. J'ai l'affreuse certitude que les semaines et les mois à venir vont ressembler à ceux ayant suivi le décès de ma gosse et de la rousse avec un petit quelque chose en plus : la connaissance de ce qui me reste. Rien. Plus rien à perdre.


[Fin février]

C'est un homme au corps émacié qui pénètre dans la taverne et commande sa troisième bouteille de la journée. Son visage ravagé fait face à celui du tenancier qui n'y lit aucune émotion autre que la douleur. Des écus sont posés sur le comptoir, aucune information n'est demandée sur leur provenance. Le blond amaigri a toujours sa belle gueule, il a su garder ses clientes. Mais aujourd'hui, alors que l'alcool fort coule dans son gosier, lui vient une idée. La première depuis deux mois.
Il tourne la tête vers les quelques clients qui papotent et esquisse un sourire torve lorsque ceux-ci évoquent les combats d'hommes. Il ne sait pas se battre mais être payé pour servir de punching-ball lui convient autant que d'être payé pour baiser. Il a besoin d'avoir mal, besoin de sentir qu'il vit toujours. Ce soir, juste ce soir, il se fera casser la gueule et il aimera ça.


*Traduction paroles 3 Doors Down - Changes

_________________

Bannière réalisée par les grands soins de JD Calyce.
Erilys
Give me love like her,
Donne-moi de l'amour comme elle,
'cause lately I've been waking up alone,
Parce que dernièrement je me suis réveillé seul,

(Ed Sheeran - Give Me Love)

Le bruit des sirènes, c'est ce qu'aurait sûrement entendu la blonde à une autre époque, sûrement même qu'ils auraient pu la sauver, ces médecins d'un autre temps. Mais dans ce monde-là, c'est impossible. Les lettres comme celle que la rousse vient de recevoir signent la fin d'une vie et le début de la fin d'une autre.
Lorsque la nonne lui avait porté la lettre, elle avait bien insisté avant de la lui donner sur un seigneur qui n'est qu'amour et qui l'aiderait à surmonter sa perte. La rousse avait esquissé un sourire confiant qui ne l'était pas tant que ça et avait saisi la lettre, attendant qu'on lui rapporte la mort de Diego. Ou celle de Niallan. Tous deux avait une espérance de vie à court terme, elle le savait et était prête à surmonter leur décès. Mais la lettre n'était pas d'eux, elle était d'elle. Aphrodite. La seule amie qu'elle avait eu, la seule qui avait pu la comprendre, la seule en qui elle avait une confiance totale, la seule qu'elle avait aimé.

Le hurlement qu'elle avait ensuite poussé avait rameuté toutes les nonnes du couvent. Elle avait ressenti le besoin de tout envoyer valser autour d'elle. De tout briser comme cette lettre l'avait brisée elle. Elle avait commencé par défaire violemment son lit, ensuite elle s'était saisi de tous les objets présents dans la pièce, les fracassant tantôt contre le mur, tantôt contre les nonnes qui avaient le malheur de tenter de s'approcher d'elle. Enfin, elle avait cogné. La première nonne avait récolté un gnon, la deuxième s'était écrasée contre le mur et la troisième avait été rendue borgne par les ongles de la rouquine. Par la suite, c'est elle qu'on avait cogné. Des hommes étaient arrivés et l'avaient maîtrisée au sol. Elle s'était débattue en hurlant et l'oreille droite de l'un des hommes avait été arrachée par les dents féminines. Elle avait hurlé pendant longtemps. Elle hurlait encore quand ils l'avaient sanglée au lit, elle hurlait toujours quand ils lui avaient injecté une mixture censée la calmer. Pendant des jours, elle avait hurlé.

Elle hurlait parce qu'elle avait la haine. Et parce qu'elle avait mal. Elle hurlait parce que son amie lui avait demandé de ne pas pleurer. Les hurlements étaient tout ce qui lui restait pour exprimer ce qu'elle ressentait. Si elle avait survécu à la mort de son frère, c'était parce qu'entre eux, en plus de l'amour, il y avait de la haine, elle ne lui avait jamais pardonné. Mais Aphrodite, elle l'aimait. Et c'était tout. Elle l'avait aimée de bien des manières. Elle l'avait aimée comme l'amie à laquelle elle pouvait se confier au détour d'une chope, l'amie qui lui arrachait des sourires même devant la noirceur la plus totale. Elle l'avait aimée comme la sœur qu'elle n'avait jamais eu, celle qui la serrait dans ses bras quand elle en avait besoin, celle qui était toujours là pour elle. Elle l'avait aimée comme l'amante, celle qu'elle étreignait les soirs où la solitude ne semblait pas avoir de remède autre que ses bras. Elle l'avait aimée de toutes ses forces. De tout son être. Pour elle, elle serait morte sans hésiter. Mais personne ne lui avait proposé ce marché, pas même le diable auquel elle aurait pourtant vendu son âme sans hésiter.

Les hurlements avaient duré trois mois. Trois mois durant lesquels elle était restée sanglée sur son lit. Les médecins avaient diagnostiqué la folie, les prêtres la possession. Les premiers avaient tenté de la guérir par des remèdes pas franchement recommandables, les seconds avaient tenté plusieurs exorcismes.
Un jour, elle n'avait plus eu la force de crier. Alors que le printemps revenait, elle, elle s'était éteinte. Les sangles n'étaient plus nécessaires. Elle ne bougeait plus. Elle fixait obstinément la fenêtre et regardait le monde avancer sans elle. Elle regardait les oisillons réclamer leur mère en se disant qu'à cause de Jehan, jamais elle ne pourrait avoir d'enfant. Elle observait l'éclosion des bourgeons en se promettant que jamais plus elle ne s'ouvrirait pour qui que ce soit. Elle zyeutait les rayons du soleil sur sa table de chevet, se demandant si un jour quelque chose pourrait la réchauffer elle. Elle avait passé l'été dans le même état léthargique. Et puis l'automne était arrivé. Elle avait regardé les feuilles tomber au sol, en se disant qu'elles aussi elles étaient mortes. Comme Aphrodite. Et puis elle avait assisté à un départ. Celui d'un homme. Elle les avait entendus se disputer. Et elle avait compris.

Si elle pardonnait son abandon à Aphrodite, elle ne pardonnait pas le sien à Niallan. Ses caprices, son égoïsme et sa lâcheté. Si la blonde était morte, c'était uniquement à cause de lui. Il l'avait engrossée et il s'était barré. Comme à chaque fois. Il n'était pas là quand elle en avait eu besoin. Il n'était pas là pendant la grossesse, il n'était pas là pour la naissance de son propre enfant. Il n'était pas là pour l'empêcher d'y passer. Il n'était pas là. Il n'était jamais là. Il promettait et puis il disparaissait. Ensuite, il se noyait dans l'alcool et dans des paires de jambes. Pour oublier, soit-disant. Mais pour oublier quoi ? S'il avait été là, il n'y aurait rien à oublier. Aphrodite serait encore en vie et, elle, Erilys, elle serait marraine.
C'était de sa faute. Alors, en regardant les premiers flocons tomber, la rousse s'était juré qu'un jour ce serait lui, Niallan, qui tomberait. Elle le tuerait, comme il avait tué sa blonde.

Give a little time to me to burn this out,
Donne-moi un peu de temps pour m'en remettre,
We'll play hide and seek to turn this around,
Nous jouerons à cache-cache pour inverser la situation

Il lui avait fallu du temps, beaucoup de temps, pour faire croire aux prêtres et aux médecins qu'elle était guérie. Elle avait dû se confondre en boniments, en sourires et en prières pour les convaincre. Elle se forçait à rire, à manger et même à chanter. Elle mettait tout son cœur dans son mensonge. Et derrière chaque sourire, chaque rire, se cachait son désir brûlant de vengeance.
En avril, ils l'avaient laissée sortir. Et elle s'était mise en route, direction l'Anjou. Là où l'enflure blonde se terrait. Elle allait le lui faire payer. Chèrement.
_________________

By JD Diego.
Niallan


Une falaise, un blond -spoiler alert : il va pas sauter-, une bouteille de whisky. Et des cris, beaucoup de cris. Dans le vent, il se prend des vents.

Tu penses quoi toi ? Tu dis rien !*Parce que t'es morte, comme les autres. Vous m'avez tous laissés, bande d'enfoirés.
Je l'ai mauvaise, je crispe les doigts autour de la bouteille.
Je vais me marier, bordel. Je me marie demain et pas un seul de vous n'est là pour m'organiser un enterrement de vie de garçon.
Là je suis flippé. Alors je bois, beaucoup.
Il est où l'enlèvement ? Elles sont où les catins ? Elle est où la chèvre énigmatique du lendemain matin ? Et vous, vous êtes où, putain ?!
J'ai fait le plein d'émotions et, paradoxalement je suis pas assez plein. Je bois.
C'est pas comme ça que ça devait se passer, vous deviez être là. Vous pouvez encore vous pointer, là, maintenant, ce serait la moindre des choses après votre abandon foireux ! Ramenez-vous, bordel !

Je tourne la tête, piste un moment les environs. Rien, que dalle. Je culbute la bouteille, je zyeute toujours et toujours rien.
Putain les gars abusé, je vous demande pas qui a fini le thé -mais c'est une tapette-, juste de vous ramener.
Je regarde, je bois.
Personne ?
Je réplique le même schéma.
Non ?
Encore.
Ça va se payer.
Et encore.
Toujours personne ?

Afin de mettre fin à l'intense suspens qui plane, je vais vous répondre. Il n'y a personne. Du moins, il n'y a pas de Vec, pas d'Aphro, pas de Diego, pas d'Erilys. Ça me fout les boules, je balance un coup de pompe dans un rocher. J'ai mal, alors je bois.

Si vous êtes morts, y'a votre esprit quelque part. Enfin je crois. Alors j'en ai rien à secouer qu'il soit en train de mater deux jumelles qui couchent avec deux autres jumelles -hein Diego, hein Vec?-, en train de se faire dorer le lard par les sbires de Satan, ou qu'il bouffe des pommes dans un jardin. Je veux qu'il se ramène et qu'il m'écoute, j'ai besoin de causer.

D'abord, je cause à Aphrodite, peut-être parce que j'ai louché sur mon tatouage, peut-être parce que je procède par ordre alphabétique.
Te souviens-tu de moi, jusqu'au son de ma voix ?* Tu sais, j'aurais voulu soulager de tes doigts douleur et poussière mon ange et j'voudrai au voleur de ta voix plier chacune des phalanges.* Je vois venir la roukmoute, ouais, c'est peut-être de ma faute mais j'attends toujours que tu viennes me buter. En parlant de ça...
Je picole un coup avant de m'adresser au collectif.
Les gars, je me suis mis dans le pétrin. Mais genre bien, à fond de train. Et j'aurais besoin de votre soutien.

Attention, dans les prochains paragraphes, Niallan va raconter sa vie et passer pour un barjo en tapant la causette à quatre rochers stylisés. Si vous vous en tamponnez le coquillard mais êtes en revanche pressé de découvrir si quelqu'un répond à sa question, lisez la dernière ligne.

Je suis redevenu papa, et Vec...ta gueule avec tes histoires de gelée royale ! Elle s'appelle Anna, elle...elle est merveilleuse.
Je souris, trinque un coup à la santé de ma môme.
C'est sa mère que j'épouse demain. C'est pas pour avoir un fournisseur d'opium cette fois, c'est pour que la petite soit pas bâtarde. Et Diego, la ramène pas trop avec ton « bâtard queutard » qui n'est pas le surnom du siècle soit dit en passant, sinon je te donne les détails des virées bordel d'Eliance ! Bref, je l'aime. Pas Eliance, Vec ne fais pas ce genre de blague, ça va foutre Diego en boule, il va causer rital et on va plus rien biter. J'aime Alaynna. Le problème c'est que j'arrête pas de merder. Un jour elle en a eu assez de me pardonner, elle croyait qu'elle allait crever, elle s'est barrée. Je l'ai regrettée, je les ai pleurées, elles n'ont jamais arrêté de me manquer. Et puis...

Après une nouvelle entrée alcoolisée dans mon gosier, la suite des confidences peut sortir.

Je suis tombé amoureux d'une autre. Jusque-là, j'aurais pu gérer. Sauf que c'est ma Potesse, qu'elle est enceinte d'un pirate qui, quoi que boiteux, est sérieusement dangereux et que j'ai déjà reçu plusieurs menaces de mort dans le cas où, éventuellement, il serait fait état d'une poussée de cornes sur son front.
Petite pause pour qu'ils digèrent et que je me désaltère.
Je vous jure que j'ai vraiment essayé de résister cette fois. Ça fait des semaines, peut-être même des mois que je pense à elle. Parfois, ça a vraiment été compliqué de pas succomber à l'envie de l'embrasser, j'arrivais plus à penser. Tu vois je rêve encore penser plus vite, je peux pas, mais toi tu dis rien, tu oublies, tu penses à rien, tu souris ? * Hein, c'est comment là-haut ? Parce qu'en bas, c'est le foutoir. Je veux dire, elle m'a écrit qu'elle m'aimait. A partir de ce moment-là, j'étais foutu, perdu. J'ai pas eu l'esquive active, je lui ai dit que moi aussi.
Je flanque un coup de pompe à l'un des rochers.
Sérieux, Vec, la première choses que tu me demandes c'est si je l'ai « baisée » ? Parle meilleur, enfoiré. Et l'encouragez pas, vous autres ! Mais puisque vous insistez, oui, on a aheumé, comme dirait ta morue, Diego. C'était le pied, j'arrive pas à oublier.

Plus je cause, et plus je bois. Plus je bois, et plus je cause.

Le lendemain, l'italienne est revenue. Avec Anna. On s'est engueulés fort, entre autres. ET ARRETE DE ME POSER CETTE PUTAIN DE QUESTION. La réponse est oui. Ah ouais, puis t'as son ex-mari qui s'est ramené pour rien, si ce n'est me péter les burnes aussi littéralement que métaphoriquement. Comme si j'avais pas assez de tout l'équipage d'un navire, faut aussi que je me coltine le taré qui collectionne des scalps. Et vous, vous êtes pas là, j'y crois pas. J'ai jamais été autant dans la merde, et vous êtes pas là. Vous êtes vraiment à chier comme potes.
Mais ils me manquent, alors je rajuste la moustache sur le rocher n°3.
En résumé, je vais me marier et peut-être crever.

La réponse est, la réponse C.


*Paroles Louise attaque - Tu dis rien

_________________

Bannière réalisée par les grands soins de JD Calyce.
Diego_corellio
• Le 14 février 1466, quelque part dans un village


Ce matin en regardant le jour se lever, pour la première fois depuis qu’Eliance a épousé Tynop, j’ai hâte d’entamer la journée. Parce qu’aujourd’hui, c’est la fête de l’amour. Là, en effet, on pourrait se demander en quoi je devrai me réjouir, puisque la femme que j’aime roucoule dans les bras d’un autre (blond qui plus est) et que mon amour bis, Maryah, est on ne sait où, en train de vadrouiller.
Je m’extirpe du fauteuil dans lequel j’ai passé la nuit, m’étire longuement, engourdi par une nuit d’immobilité, proche de la rigidité cadavérique, me passe un peu d’eau sur le visage comme si celle-ci avait le divin pouvoir d’effacer une suite de nuits d’insomnie, et part à la recherche de Niallan d’un air guilleret qu’on ne m’a plus vu depuis un bout de temps.
Parce qu’aujourd’hui c’est la fête de l’amour. Et qu’aujourd’hui, on va honorer la vraie déesse de l’amour. L’unique remplaçante de la déesse Aphrodite, la seule aussi, qui aura su être, pour Niallan et moi, l’Amie, l’Amante, la compagne, la femme, et tous les rôles divers et inimaginables que peuvent incarner les femmes. Aujourd’hui, on a décidé de lui rendre hommage.

Elle est morte le 30 décembre 1463. La Blondie avait bien choisi son jour. En mourant, elle voulait qu’à jamais on se souvienne de cette date qui avait vu s’éteindre une étoile. Peut-être la plus lumineuse de toutes. Elle avait trouvé une date pour frapper fort, l’Aphro ne portait jamais les coups au hasard, et même si celui-ci n’avait pas été dicté par la raison, lui aura eu raison d’elle.
Elle était morte le 30 décembre 1463. Entre noël et la nouvelle année. Elle s’était assurée de gâcher nos fêtes à venir, en immisçant sont froid et beau fantôme dans les festivités. Mais surtout, elle m’avait légué un héritage qui me rappellerait à jamais combien elle m’avait offert le plus beau des cadeaux : une fille pour rendre grâce à sa beauté fanée, et un fils, savant mélange de nous deux. Ainsi, elle s’était assurée de perdurer au travers de ses enfants qui témoigneraient à jamais des étreintes brulantes et du feu destructeur qui nous avait consumés.

Qui nous avait tous consumés. Aussi bien Niallan, Erilys que moi. Avec elle, nous avions été le quatuor infernal. C’était elle qui nous avait lié les uns aux autres. Ensemble, tous les quatre, nous avions épuisé plus d’une lune à dévaster l’empire des sens de nos corps infatigables et bu plus d’un soleil à bruler la vie par les deux bouts. Elle était morte et, elle avait un peu tué chacun de nous, assassinant ce que nous avions été ensemble et ce que nous ne serions jamais plus. Parce qu’Erilys voulait nous tuer. Parce qu’Erilys ne se remettrait jamais du décès de la seule Amie qu’elle avait su aimer. Et parce que Niallan et moi ne pourrions jamais assez nous pardonner de lui avoir offert l’instrument qui conduirait au drame.

Mais aujourd’hui, il n’est plus temps de penser à tout ce qui a été et ne sera désormais plus. Aujourd’hui il est temps de penser à la manière d’honorer la divinité qui aura bercé nos vies d’une chaude lumière. La porte de la chambre d’auberge ou crèchent Niallan est Fleur est poussée, sans frapper, sans me formaliser de ce qu’éventuellement je pourrai y trouver, me cachant les yeux par précaution.

Non c’est pas le livreur de croissant ! Si vous êtes à poil, paniquez pas, j’ai une main pleine de doigts qui m’empêche de voir des horreurs dès le matin et de gerber sur votre superbe couvre lit. Merde, j’avais dit que j’y voyais rien.
Bref, Nial’ tu commences pas à râler que je t’emmerde de bon matin, tu te bouges le gras que tu n’as pas mais que t’es en train de prendre, oui oui, tu t’empâtes depuis le retour de Fleur, je conseille vivement et activement du sport de lit pour remédier à tout cela, et tu te grouilles à t’habiller, du genre vite vite, avant que je demande à la vieille du coin de te botter le derrière.


Le tout est débité rapidement, lui balançant au fur et à mesure de ma tirade, toutes les fringues qui ont le malheur de tomber sous mes doigts agités d’une frénésie que j’espère contagieuse pour notre cher blond.

Oups, scusa, j’crois que ça c’tait, hum… une robe et ça euh… un bas pas à toi.

Le nez se fronce quand le pied se met à frapper le sol d’un geste, non seulement agaçant, mais surtout impatient. Aujourd’hui, je suis pressé. C’est pas tous les jours qu’on a un truc intéressant à faire.
Après ces nombreuses péripéties du début de journée, nous voilà donc entre compères à chercher les idées les plus folles pour organiser une soirée mémorable à la princesse envolée.
Et en tant que rois des idées loufoques (et rois des cons faut pas l’oublier celle-là), c’est à peu près comme ça qu’on s’est retrouvés, en train d’écumer le marché à la recherche de LA perle rare. Sauf qu’au marché, on a réussi à trouver que des cons et des légumes. Finalement, on a pu établir un parallèle assez troublant entre les deux, du genre les légumes sont des cons parce que c’est connu c’est dégueulasse et les cons sont des légumes bah parce que s’il y avait des cons intelligents, ça se saurait quand même. En bref, on était en plein désespoir, à deux doigts de se suicider à coup de soupe, quand l’idée du siècle a pointé.
Elle s’est pointée sur deux jambes qu’on ne saurait encore dire si elles sont graciles ou non, adroitement ajustée dans une robe sublimissime. Le hic, c’est que l’ascension du regard, fait grimper le sourire jusqu’au drame, à la dégringolade : sa gueule, qui fait tache sur la robe.
Un coup de coude est vient agresser les côtes du blond avec humeur :

Putain, Niallan, r’garde l’aut’ morue qui se promène parée comme la reine soleil ! C’t’un crime, grosse faute de gout et… OH PUTAIN NIAL’ FAUT QU’ON LA FOUTE A POIL POUR LUI CHOURRER SA ROBE !

Je lui laisse pas vraiment le temps de répondre que déjà il se trouve entrainé à ma suite, ayant un regain d’énergie à revendre pour tout le royaume, suite à une longue période d’inactivité, qui reprendra ses droits dès demain. Ce n’est que devant elle, plantés comme deux idiots, que je me demande comment on va procéder. Non parce que la dessaper en plein milieu d’un marché, c’est quand même moyen moyen, surtout, qu’il a fort à parier pour qu’elle soit blindée, noble ou les deux. C’est comme ça qu’on est passé directement au plan B tout autant réfléchi que le plan A.
Ça s’est soldé par une main italienne qui s’est emparée d’une bouche baveuse, d’un bras qui s’est enroulé de manière tout sauf sensuelle autour de son buste et d’un blondinet qui lui a embarqué les jambes. Coup d’œil à droite et à gauche - pas pour vérifier qu’on va pas se faire écraser en traversant au passage piéton - mais histoire de voir que personne ne nous a vu, oh miracle, tout le marché nous regarde. Un sourire de type « à l’italienne » est décroché, sous-entendu par ces deux lèvres qui remontent en un « paniquez pas tout va bien c’est pas du kidnapping juste de l’emprunt » et on s’est tiré en vitesse grand V.
Bon bien évidemment, on va taire le moment, ou elle n’a rien compris, couplé à quelques cris, des pieds qui pédalent dans l’air mieux que si elle faisait du vélo et l’expression d’incompréhension totale qui s’est peint sur sa tronche. Aucune importance, tout ce qui compte c’est sa robe. Ni une ni deux, la voici en chemise. Trois secondes plus tard, elle est fichue dans la rue sans ménagement.

La robe est magnifique mais il lui manque un truc, elle est belle aux couleurs que préférait Aphro, un savant mélange de doré de blanc, ainsi que des fils argentés disséminés deçà delà. Mais ça manque de précieux, ça manque de perles, de parures et de bijoux. Aphro aimait qu’on la voit de loin, elle aimait briller et imposer le respect, elle voulait que les regards soient braqués sur elle dès qu’elle passait la porte d’une taverne, que les souffle se suspendent quelques instants et que les lèvres s’entrouvrent, comme pour murmurer à l’infini le « O » divin de son prénom.

Sa mère la pute ça pique cette enflure de truc ! Hanlala j’ai le doigt qui ressemble à un gruyère ! T’en es ou toi ? Oh putain, c’est la cata’ je croyais que tu cousais mal parce que c’était ma bidoche mais en fait j’vois que tu t’y prends aussi comme un manche hein.


On dira que c’est l’attention qui compte hein, parce que clairement, on est en train de faire du travail de goret. En même temps, demander de coudre des joyaux sur une robe de bal à deux boulets, c’est comme demander à un canard d’aboyer. Note à moi-même : écouter Eliance toutes les fois où elle a tenté de m’apprendre à repriser mes chaussettes. On va pas se mentir, c’est pas du grand art, mais, de loin, en se reculant bien et en plissant les yeux, on voit pas trop que c’est l’entreprise de la brantole qui a bricolé ça et que ça tient parce que c’est la mode.
La gorge se noue, les mains se mettent à trembler quand mes yeux vont de la robe à Niallan. Un très large sourire se peint sur mes lèvres. Là, tout de suite, maintenant, je peux l’imaginer remplir le corsage, tendre le tissu au niveau de ses hanches pleines, l’entendre rire de sa voix cristalline. Quelques instants encore, et j’ai l’impression qu’elle ne nous a jamais quitté. Surement parce qu’au fond, elle fera toujours partie de nous tous.
_________________

Ban : JD Calyce
Niallan
Des mois auparavant, une fête de l'amour amicalement préparée :

Si on m'avait dit que mon amour à moi m'abandonnerait cet été, j'aurais peut-être organisé autrement cette St Valentin et lui aurais offert plus qu'une rose et un ramassis de mensonges. Mais personne me l'a dit alors j'ai suivi et entraîné le rital dans moult conneries. Quand il s'est ramené, j'étais entre deux eaux, les mains s'aventurant sur le corps nu de ma compagne alors que les yeux n'avaient pas encore eu la force de s'ouvrir. La porte, elle, s'ouvre avec fracas, entraînant l'ouverture tout aussi brusque de mes yeux.

Non mais on vous a jamais dit de fra...

Reconnaissant l'intrus, je zappe l'inutile rappel des règles de politesse et préfère me planquer dans les courbes présentes devant moi, rabattant par la même occasion le drap sur nous. C'est pas que j'ai pas confiance en l'étanchéité de la main italienne pleine de doigts mais les réveils en fanfare m'ont jamais enthousiasmé. Pour toute réponse au monologue de l'ami, je marmonne depuis ma planque :

Ouais bah le sport de lit, on allait le pratiquer si tu t'étais pas ramené.

Loin d'exprimer des remords, Diego passe à l'offensive en envoyant des projectiles sur le lit. D'un mouvement rageur, je rejette la couverture sur Fleur et me redresse sur le lit. Pile à temps pour me prendre une robe dans la trogne. Je râle à nouveau et me décide à sortir du lit, enfilant les frusques m'appartenant distribuées on ne peut plus hasardeusement par le rital.

Je te conseille de pas maltraiter les frusques de madame si tu tiens pas à ce que ce soit ton derrière à toi qui soit botté ou ta bière bourrée de laxatifs.

Sur ce conseil avisé, je me fends enfin d'un sourire, la frénésie de l'ami ayant fini par me gagner. Aujourd'hui on rend hommage à la femme pour laquelle on a éprouvé toutes les formes d'amour bien qu'informelles. Elle nous a irrémédiablement marqués, aussi bien métaphoriquement que littéralement, comme en témoignent le A et le N entrelacés sur mon torse à l'emplacement du cœur. Sa mort m'avait brisé et m'avait ôté -temporairement- tout espoir en l'amour dont elle était la déesse. Elle a détruit notre quatuor qu'on pensait plus fort que tout et aujourd'hui encore, je ne passe pas une journée sans penser à elle et à toutes nos frasques. Mais ça, je peux clairement pas le dire à Fleur alors que je l'ai trompée un nombre incalculable de fois avec Aphrodite, incluant le jour de notre mariage et notre nuit de noces. Du coup, c'est avec un large sourire innocent que je dégaine ma plus belle excuse :

Je vais aller faire le tour des boutiques avec Diego pour te couvrir de cadeaux en ce jour placé sous le signe de l'amour. En attendant, méfies-toi des hommes en culotte avec un arc, ils vont essayer de te jeter dans les bras d'un autre.

J'embrasse tendrement ses lèvres, attrape ma besace et sors de la chambre avec le ritagnol. J'ai menti éhontément à celle que je veux épouser, tu m'étonnes qu'elle ait fini par me quitter. Pour le moment, à des lieues de penser aux représailles, je me laisse embarquer au marché des cons et légumes. Tout occupé à jongler avec des tomates, je ne vois pas la donzelle moche mais pas trop arriver. C'est le coup de coude de Diego qui me tire de mes pensées et provoque l'atterrissage forcé des tomates au sol. Je grimace en observant la purée qu'elles constituent désormais et sursaute quand il braille ce qui s'apparente presque à l'idée du siècle. Sans hésiter, je chope les jambes de la nana dans un sourire qui se veut rassurant, faisant fi des coups de pieds et chantant pour plus de style :

A la salade, je suis malade ! Au céleri, je suis guéri !
Et mes tomates ducon qui c'est qui va les payer ?!

Dans un « gloups » retentissant, je presse l'allure jusqu'à ce qu'on arrive à l'étape du déshabillage que j'émaille de « vous en faites pas, c'est pour les bonnes œuvres » ou d'un plus récurrent « là, là, ça va aller ». Une fois la robe obtenue, il faut que l'italien ait une autre brillante initiative qui me fait froncer les sourcils et tordre la bouche.

Euh t'es sûr que c'est une bonne idée ? Je te rappelle qu'il y a peu je voulais te recoudre avec des aiguilles de sapin...

Il a l'air de s'en battre les couettes et notre atelier couture se poursuit sur ses remarques peu encourageantes concernant ma progression. Aussi, j'ai vite fait d'arrêter d'essayer et de me contenter de lui passer les perles pour un résultat pas trop raté. Après une heure d'effort, j'applaudis bien fort et entraîne l'italien vers l'étape suivante : le bijoutier. Aphrodite ne se serait pas contentée d'une robe aussi belle soit-elle, elle l'aurait accompagnée d'accessoires offert par l'un de ses nombreux soupirants friqués. Comme nous sommes loin de l'être, on opte pour le vol à l'étalage. Je m'empare d'une paire de boucles d'oreilles en rubis pendant que Moustachouette fait la causette au vendeur, vantant les mérites de je ne sais quel orfèvre de son bled.

Pssst, on peut y aller, tu peux arrêter de parler pour rien dire.

Pour la réalisation de l'étape suivante les rôles sont inversés. Pendant que je cause raisins et récoltes avec un vigneron, le rital dérobe plusieurs bouteilles de vin d'un excellent cru à la robe de la même couleur que les bijoux précédemment volés. Une fois notre mission accomplie et après un check à notre sauce, on prend la direction des lieux de fête. Une colline est choisie et bien que l'ascension soit longue et fatigante, le résultat est à la hauteur de nos attentes. On surplombe la ville comme la blonde surpassait tout un chacun. C'est presque cérémonieusement qu'on étend la robe sur un rocher et je ne peux m'empêcher de sourire en pensant au nombre de fois où notre déesse avait été décrite comme un cœur de pierre. Les boucles d'oreilles sont posées sur le dessus, nos fessiers rejoignent l'herbe grasse et nous voilà à entamer la discussion en même temps que les bouteilles.

Salut beauté, t'as vu, on est au rendez-vous. A croire qu'on assure plus depuis que t'es passée de l'autre côté que de ton vivant.
Même qu'on te couvre de cadeaux, alors que de base, on était quand même vachement plus rodé pour tedéchirer tes fringues plutôt que t'en payer...
Diego s'est même abimé les mains pour coudre ta robe et vu le résultat je pense qu'on peut dire qu'il s'est trouvé une nouvelle vocation.
Han oui d'ailleurs à ce propos de vocation manqué, il se trouve qu'à cause de TOI, oui de toi Blondie, fais pas l'innoncente, je suis en train de perdre ma côte de virilité hein, à coudre des perles.Vraiment c'que tu nous f'ras pas faire pour tes beaux yeux !
[...]
Il t'aurait plu ce vin, le genre tellement cher que c'en est indécent. Dis, là où t'es, tu bois quoi ? T'as appris à transformer l'eau en vin comme l'autre zouave qui marche sur l'eau ou c'est plus de l'ambroisie comme sur l'Olympe ?
N'empêche que même si tu te bourres la gueule sans nous, au moins tu nous files une super excuse, à la fois pour picoler et en plus pour avoir chourré une bouteille -fin même voir plusieurs- d'un super vin qui fait frétiller les papilles pis... Pis tu nous donnes l'illusion qu'c'est un peu comme avant en vachement changé...
Tu t'es quand même foutrement foutue de notre tronche en te barrant sans nous pour de la super défonce à grand coup de sniffage de nuages et tout l'bordel... j'crois même qu'là on à l'droit d'dire que t'es un chouia égoiste d'pas nous faire profiter ! Ra-di-ne !

Ouais, ouais, moi je pense pareil que Moustachouette, c'est plus comme avant mais c'est pareil. Et t'es radine, ouais, j'me snifferai bien un cu-mu-lo-nim-bus. Et j'ai pas dit cu-nni-lin-gus, ah non non m'dame, je m'y connais en nuage !
J'ai juste pas franchement envie de galocher le rocher mais c'est ptet parce que ça manque de cheveux. Attends que j'y rajoute de la paille... Euh je suis pas en train de dire que tes cheveux étaient secs, hein, ils étaient si doux, si... Rha, Diego, tu t'en souviens ? Quand on s'y accrochait comme si notre vie en dépendait ?
Euh... je me souviens surtout que ses ch'veux c'tait sacré genre ...genre là Nial' t'es en train de t'enfoncer mais pour une fois c'est dans aucune femme et... merde ouais j'me souviens... même que t'as presque failli finir chauve... Dis, c'parce que t'avais peur qu'on abime tes magnifiques boucles blondes que t'as filé ?
Chhhhhhhhut, dis pas ça, j'ai changé, maintenant je suis un homme rangé bien que toujours dérangé. Enfin, sauf si t'étais encore là bien sûr, j'aurais brisé toutes mes promesses pour une nuit dans tes bras. Puis si t'as vraiment filé pour tes cheveux baaaah, on va faire un sacrifice capillaire pour t'invoquer !
[...]
Putain... -les yeux se plissent en scrutant la robe échouée sur le rocher- t'as pas perdu des seins Aphro ? dans mon souvenir ils étaient vachement plus... vachement moins... plats ?
Merde mais t'as raison !
Et vas-y que je tâte du rocher, sourcils froncés. Par contre quand elle pointe ça rigole pas, elle pourrait nous transpercer les paluches...
Elle se venge de toutes les fois ou on l'a transpercé et pas avec nos paluches ! N'sois pas rancunière Aphro tu a-do-rais ça !
Hinhinhin, tu te souviens de la fois où elle et Erilys nous avaient attachés pendant UNE semaine ?
Grands gestes avec les mains se voulant démonstratifs.Si on voulait manger, fallait qu'on assure et c'était assurément jouissif, rhaaa...
Mais du coup on a tellement assuré qu'on a fini engraissé comme pas possible à force de bouffer ... C'tait l'bon temps Nial'... On faisait vraiment des trucs... exceptionnellement fous !
Heureusement qu'on compensait par le sport de chambre, hein ! Mais putain, ouais... Je serais prêt à échanger trente ans à venir contre un seul de la belle époque.
[...]
Lucrezia, notre fille, ta fille te ressemble... Elle est.. c'est ton portrait Aphro... peut-être même qu'elle te surpassera ... Elle est... Quand je la regarde... Tu me manques...Tu nous manques à tous ... Même celles qui avaient la prétention de se croire tes rivales n'ont plus d'adversaire à ta mesure...
Parfois je me demande à quoi aurait ressemblé notre fils, s'il aurait eu tes yeux ou les miens, ce qui est sûr c'est qu'il aurait eu nos tifs. Il se passe pas un jour sans que je regrette de pas avoir été là, de...
Alors même qu'on est tous deux lancés dans un monologue personnel, mon bras se glisse autour des épaules italiennes sur lesquelles je prends appui.Tu nous manques tellement putain, putain de toi qui les as toutes rendues fades.
On a besoin de ta lumière Aphro, pour nous guider... savoir qu't'es l'étoile qui brille l'plus fort suffit pas ... rends nous ta chaleur généreuse, ton souffle ... ton éclat... Reviens per favore..
T'étais notre soleil, faut que tu reviennes, s'il te plaît... et même s'il te plaît pas... En tous cas, nous on reviendra pour te voir même si t'es plus là.



Dialogues écrits avec JD Diego.

_________________

Bannière réalisée par les grands soins de JD Calyce.
See the RP information
Copyright © JDWorks, Corbeaunoir & Elissa Ka | Update notes | Support us | 2008 - 2024
Special thanks to our amazing translators : Dunpeal (EN, PT), Eriti (IT), Azureus (FI)