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[RP] Pour le meilleur et surtout le pire

Daeneryss
- NOOOOOOOON...!!

Tout dans la pièce est balayé par l'ouragan. Un déchaînement des jumeaux qui ont décidé que c'était aujourd'hui le grand jour. Par grand jour, ce n'est pas du mariage qui se prépare dont je pourrais faire allusion - mon mariage en l’occurrence, et puis celui de Diego un peu quand même - mais bien du Jour où les Jumeaux ont choisi pour en faire la Saint Dae. Pas de confettis, on oublie aussi les grains de riz, en revanche on ajoute bien les cris. Des hurlements dans toute la chambre, des "boum", "paf", "aïïïïeuuuh" criés dans chaque recoin du dessous de lit, alors qu'une pré-guerre mondiale est en train de se dérouler. Autant vous dire que j'étais pas prête et que j'étais pas préparée à ce que les mini-Corellio se liguent pour me faire courir. La scène est merveilleuse et emprunte d'amour inconditionnel.

- Ezia, s'il te plaît ! Pas le voile ! Pas le voi... Calliiiiiiiiiiiiiiiiiie !!


Parce qu'il fallait qu'elles se liguent, les petites italiennes, à vouloir jouer les princesses. Et le bruit qui ressemble le plus à un déchirement de tissu et bien... ça en est bien un. Dans une dispute demie sororale, la loi du plus fort venait de frapper. Callie et Lucrezia au sol, c'est Mano qui brandit mon voile déchiré comme le trophée de la victoire, tandis que je tombe à plat ventre, le souffle coupé de me faire écraser par Romeo qui rentre dans la partie. Il faudrait que je parle à Diego : si on se marie une troisième fois, il est hors de question que je prenne les enfants avec moi pour la préparation. Tout ça c'était la faute de l'ours en peluche qui lui avait bousillé le corps ! Et même si je comprenais que l'Italien ne veuille pas que les petits voient ça, je me disais de plus en plus que c'était aussi une ruse pour se faire plus beau que moi. Sans conteste, je gagne haut la main !
Cheveux ébouriffés, toute la rousseur éparpillée sur mon front, c'est à peine si on distingue un peu mes yeux. De la façon la plus gracieuse qui soit, je souffle bruyamment sur ce qui ressemblait il y a peu à une coiffure structurée. Le bruit, bien évidemment, ne manque pas de faire éclater de rire Callie, petit ange aux éclats de rire irrésistibles qui venait de découvrir qu'être un démon était vraiment une activité à temps plein très distrayante.

- Mano, s'il te plaît, chéri, rends à Maman Dae. Si tu rends...
Vite, c'est maintenant qu'il faut avoir une idée.
...Papa t'offrira un vrai cheval pour aller chasser les dragons !

Quand je dis cheval, il faut bien entendu y entendre poney, parce que si je suis totalement désabusée par la situation, je ne suis pas non plus irréfléchie. La main tendue, l'air suppliant merveilleusement accentué par ce que les enfants comprennent, c'est-à-dire une moue exagérée, je me redresse à quatre pattes pour mettre un genou devant l'autre. Petit pas par petit pas, le reste du voile est à portée de mains.

- Voglio una spada ! *
- Una... si !

Là, par contre, je me maudis intérieurement d'avoir banni l'italien des langues que je devrais comprendre et ce n'est qu'en voyant les yeux ronds comme des olives de Romeo que je réalise que j'ai peut-être "si" un peu vite. Deuxième moue pour la forme, un froncement de nez en prime - prions pour que je n'arrive pas fripée - quand je me redresse pour aviser mon Corleone de fils.

- Quoi, j'ai dit quoi ?!
- Tu vas lui donner une épée à lui, et pas à moi !
- Mais... non enfin !
- Si, tu l'as dit !
- Siiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiii ! Siiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiii siiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiii !!!

Je voudrais mourir, là tout de suite, et même un peu avant si c'est possible. D'aussi loin que je me souvienne, j'ai l'impression que les champs de bataille lors des prises avec Gabriele me semblaient mille fois plus simple que ce mariage à venir. Est-ce que c'était une vengeance du ciel pour nous rappeler que nous n'avons pas été les plus pieux dans nos existences ? L'idée venait de germer : Celui qu'on appelle Dieu m'en veut suffisamment pour qu'il y ait toujours un truc qui déraille le jour où je dois dire "oui". Le mot doit être trop facile, du coup Il se dit "tiens, facile pour elle, on va compliquer la tâche !" Et moi, je suis là, à regarder ma chambre se faire retourner, à assister à cette Divine Comédie qu'est ma vie. L'option de tous les attacher à un arbre me tentait de plus en plus, d'autant qu'ils reprenaient tous en cœur une chanson entêtante, affublés d'un air bête.
Mano saute sur place, un kangourou n'en ferait pas moins. Romeo prend cet air désabusé que peuvent avoir les Corleone quand quelque chose coince ; et je maudis intérieurement les gênes d'être si fortes. Lucrezia peste sur Callie, qui elle veut juste jouer à la grande comme sa soeur. Et moi... c'est au bord de la couche que je finis par m'installer, dépitée de ce début de journée. Le clocher va sûrement bientôt sonner le milieu de journée et le capharnaüm se poursuit, au point même que l'aubergiste vienne cogner à la porte, sa voix rauque surprenant les petits dans la réalisation de leurs bêtises. Figés, ils le sont tous.

- J'ai une idée. Le premier qui arrive à faire fuir le gros monsieur a gagné. Les garçons, je compte sur vous. Ezia... ma princesse, sois toi-même.

Main déjà sur la poignée de la porte de chambre, à demie vêtue ou plutôt dévêtue, je jure solennellement que mes intentions sont mauvaises** et j'ouvre la lourde pour lâcher l’assaut plus sauvage qu'une cavalerie. Croche-pieds, cris stridents, encouragement de l'équipe à distance... A ce moment là, je suis fière d'eux et c'est une exagération du décolleté plus tard que je prêche mes excuses dans un " je suis désolée..." faux et bien sonnant au pauvre bougre qui hurle au Bon Dieu que ces enfants sont la progéniture du Démon. Mais non, mon bon monsieur, ils sont la représentation parfaite de ce qu'est la vie : pas facile, mais on s'y accroche tellement...

Pour le meilleur et surtout le pire. Dès le début je l'ai dit.



* Je veux une épée !
** Référence à Harry Potter
Daeneryss
Manolito
Romeo

_________________
Diego_corellio
It's a beautiful night, *
C'est une belle soirée
We're looking for something dumb to do
Nous cherchons quelque chose de bête à faire
Hey baby
Hey chérie,
I think I wanna marry you
Je crois que je veux t'épouser


C’était presque comme ça que ça s’était déroulé. Ou pas. La soirée n’était pas belle, il faisait trop chaud et je venais de me prendre une claque pour « abandon d’épouse et d’enfant ». Mais peut être que la plus grosse claque que je me suis pris ce soir-là, c’est quand elle m’a demandé une preuve de mon amour pour elle et que je me suis entendu lui répondre « Épouse moi ».
Il y a des gars qui ont du mal à prononcer ces mots-là. Et il y a moi. Moi je n’ai aucun soucis, ça devient limite comme dire « bonjour, vous allez bien ? », mais là ce serait plutôt « bonjour, vous m’épousez ? ».
Je vais avoir vingt-neuf ans et aujourd’hui sera mon quatrième mariage. Pourtant, après le troisième j’avais juré que plus jamais je n’aimerai de femmes, que je n’en toucherai. Que plus jamais je ne me marierai. Pour lui être fidèle, à Elle, à sa mémoire, à Nous. Aujourd’hui j’ai piétiné mes deux serments.

No. Je n’irai pas. Je ne peux pas. Si j’y vais, on va se marier, on va s’aimer un temps, se déchirer tout le temps et puis elle va finir cassée, brisée et moi, je vais regarder le fantôme de ce qu’elle sera devenue. Je ne peux pas.
Il faut que je parte. Pour la protéger de moi, comme je n’ai pas su le faire pour Eliance. Pour la préserver de mon amour indigne d’elle. Pour la mettre à l’abri des ténèbres qui obscurcissent mon cœur. Et de l’Ombre, qui désormais se dressera toujours entre nous. Entre moi et toutes les femmes.
Je ne dois pas y aller. Pour Callie. Pour qu’elle voit toujours sa maman heureuse. Il est encore temps, elle peut refaire sa vie, aimer encore. Aimer toujours.
No. Je ne veux pas. Je refuse qu’un autre puisse s’essayer à la rendre heureuse. Je refuse de savoir qu’elle pourrait porter un nom plus digne que le mien. Je refuse qu’elle devienne la femme d’un autre. Elle est mienne.

Don't say no, no, no, no-no;
Ne dis pas non, non, non, non-non
Just say yeah, yeah, yeah, yeah-yeah;
Dis juste ouais, ouais, ouais, ouais-ouais
And we'll go, go, go, go-go.
Et on y va, va, va, va-va
If you're ready, like I'm ready.
Si tu es prête, comme je suis prêt


Sauf que je ne suis pas comme le gars de cette chanson. Je ne suis absolument pas prêt. Et je suis très loin de l’être.
Assis nu dans mon fauteuil, un pli à la main, la pipe entre les lèvres, j’attends. Pas le dégel. J’attends Niallan. J’attends de trouver le courage d’enfiler ma tenue de cérémonie alors que je pressens un dérapage. Cette intuition s’est levée avec moi ce matin et depuis, elle me colle à la peau, sans que je puisse m’en débarrasser. Et puis j’attends Sa bénédiction.
Mes pensées sont à la hauteur de ma nudité, dans ma caboche c’est le bordel, et la haut non plus je ne suis pas du tout prêt.
Pourtant, au quatrième mariage on pourrait se dire que c’est simple, que c’est du déjà vu, qu’il n’y a pas d’inquiétudes à avoir. Moi j’ai l’impression que plus je me marie et plus ça empire. Plus les minutes défilent et plus l’angoisse grimpe en flèche et moins je me bouge.
J’entends, comme en écho au vacarme qui se déroule dans mon esprit, les enfants qui courent en criant. Je me sens un peu honteux d’avoir avancé l’excuse de mon état pour que Dae les garde. Ils m’ont vu pire que cela. La véritable raison, c’est que je voulais un dernier tête avec moi-même. Et puis avec Elle. Parce que j’ai peur qu’en renouvelant mes vœux avec la Nordique, Elle ne disparaisse. Qu’Elle s’efface et cesse d’exister en moi. Qu’Elle emporte ce que nous étions, pour libérer ce que je dois être.

Le claquement sec me tire de la dérive dans laquelle je me suis enfoncé. Niallan passe la porte tout sourire, comme toujours. Je crois qu’à ma gueule il comprend que ce n’est pas gagné. Probablement qu’il va renouveler sa proposition qu’on se casse tous les deux. Tout plaquer encore. Mais pour aller où ? Reconstruire quelque chose ailleurs ? A quoi bon ? No. Je ne veux pas. Je ne dois plus fuir.
Alors que je me perds irrémédiablement dans la contemplation des courbes que décrivent les volutes de fumées qui sortent de ma bouche, je cherche par où commencer. Parce qu’aujourd’hui c’est mon mariage. Parce qu’aujourd’hui, je me dois d’être honnête avec au moins une personne, et à défaut de ne pouvoir avouer à sa fiancée, c’est le meilleur ami qui a été désigné pour écouter les confidences d’un écorché vif.
Il n’a toujours pas parlé et moi non plus. Ou peut-être qu’il la fait et que je n’ai pas entendu. C’est même fort probable. Je commence par lui tendre l’épitre que j’ai gardé dans ma main. C’est un geste plus symbolique qu’autre chose, parce qu’il ne pourra pas la lire. L’écriture est pourtant soignée, les lettres forment de graciles courbes. La seule chose qu’il pourra comprendre de tout ce charabia italien c’est la date qui est inscrite, ainsi que le prénom ; « 19 luglio dell'anno di grazia ».

Je viens d’être père Niallan. Encore. Il s’appelle Diego.


Diego. Elle l’a appelé ainsi, pour qu’au moins un de nous deux restent près d’elle. Alama, cette ex-fiancée sans qui je ne serai pas là. Cette ex-fiancée qui, le jour de mon mariage m’annonce qu’elle vient de me donner un second fils. Qui m’écrit combien j’aurai dû l’épouser elle qui a su me donner des garçons.
Je lève la main pour qu’il ne m’interrompe pas sur ma lancée. Je veux tout lui dire. Tout. Même ce qu’à lui j’ai caché. S’il me coupe, je ne parlerai pas, je ne parlerai plus. Après avoir expié une nouvelle fois la fumée, je reprends d’un ton monocorde et sans nuance.

Il faut que je te dise. J’ai violé une femme. Une fille. Elle s’appelle Fallone Corleone.


A mes oreilles, le nom prononcé semble étrange, si lointain. Il me ramène dans cette chambre d’auberge ou j’ai commis l’irréparable. Il me ramène devant sa détresse que criaient ses yeux, pourtant si clair d’innocence. Il me ramène à cette enfant qui n’en sera plus jamais une.
Après une courte pause, les mots se déversent tel un flot impétueux, après qu’un barrage ait cédé. Ils se déversent, se répandent et emplissent la pièce. Ils tendent l’atmosphère déjà électrique. Ils apportent le doute, ils sèment le trouble.

C’était un accident. Je sais c’est pas une excuse. J’avais bu, trop fumé, et je venais de me faire cogner. J’étais sonné tu comprends ? Elle est arrivée et j’ai cru que c’était Aphro. Mais c’était pas elle Niallan. Tu sais comment elle était Aphro, elle avait des délires pervers des fois. Elle aimait la violence. J’ai cru que c’était Aphro.
Dis-moi qu’tu comprends Niallan … Dis-moi qu’tu comprends qu’c’était un accident… J’suis pas un violeur…


La voix se brise sur les dernières notes qui viennent refermer la parenthèse d’une histoire passée mais pas oubliée. J’attends que la sentence tombe, tel un couperet de la bouche Niallanesque. Les mots prononcés ont beau être sombres, j’ai l’impression de respirer plus librement. Est-ce l’opium qui commence enfin à me calmer, ou la délivrance d’un fardeau trop lourd à porter ? Je ne sais pas et ne le saurai probablement jamais.
Je me lève, soudain sujet à un regain d’énergie. Toujours nu, la dextre vient se perdre dans le fourbi de bouclettes brunes en contemplant le carnage sur mon corps. Surement pour faire diversion autant que par pure nécessité, je croise le regard du blond dans le miroir et lui lance :

Bordel Niallan va falloir qu’tu m’aides … j’sais pas si j’suis prêt… J’sais j’étais pas là pour ton mariage avec l’italienne… Mais … j’s’rai là pour ton prochain ! Promesso.


Et comme pour donner plus de poids à mes paroles, je me retourne et chope l’ami pour le secouer, au rythme des mots qui s’écoulent de mes lèvres par saccades :
Faut qu’tu m’aides Niallan, faut pas qu’elle file, tu comprends ? J’peux pas la perdre celle-là aussi … Dis-moi qu’on va y arriver …qu’on va pas s’planter encore.

Là je vous avoue, je ne sais pas bien si je parle de Dae et moi ou si je parle de Niallan et moi. C’est au choix ! Toujours est-il que si le blondinet n’était pas très réveillé, maintenant je crois qu’il l'est totalement, surtout avec les coups que je lui assène et qu’il va devoir digérer plus vite que la musique, ainsi que le nombre incalculable de choses que je lui demande de comprendre.
Pris d’une frénésie soudaine, je le lâche pour enfiler des braies noires, dans la précipitation m’entrave, tombe, sursaute en entendant le tissus émettre ce bruit caractéristique de déchirure. Peste, jette le vêtement dans un coin, en passe un autre, enfile des bottes neuves et lustrées, une chemise blanche impeccablement repassée, boutonne un gilet noir par-dessus, galère une bonne dizaine de minutes avec la boutonnière qui a décidé de faire des siennes… ajuster le tout et …

Oh putain Niallan, t’as vu ma gueule ?? Non mais ça va pas du tout ?! Pourquoi tu me l’as pas dit plutôt ?? Non faut que t’arranges ça !

La main, nerveuse est passée dans la chevelure sombre pour tenter un domptage, qui avorte sitôt les doigts retirés. Je réitère plusieurs fois le geste, avant d’abandonner et de plonger la tête dans un baquet d’eau et de retourner la chambre, tronche dégoulinante, à la recherche d’un peigne. Autant vous dire, que je vais pouvoir trouver une autre chemise parce que celle-ci est mouillée. Finalement je tombe sur une fourchette propre, regarde l’objet quelques secondes avant de décider - à l’unanimité avec moi-même - que ça fera l’affaire. Dès que j’ai l’impression que je suis venu à bout de la frisette, hop, elle se relève, et le cheveu reprend son pli naturel et, à les observer faire, j’ai l’impression qu’elles se foutent de ma gueule.
A défaut de me retrouver avec des cheveux lisses et coiffés, je me retrouve avec mes indémodables bouclettes peignées. Ça fera l’affaire hein. Jusqu’à ce qu’une idée germe dans la caboche en ébullition.

Des ciseaux. Il me faut des ciseaux Niallan. Vite. Vite !


Comme on n’est jamais mieux servi que par soi-même, je me mets en quête de l’objet précieux. Je crois d’ailleurs que vous avez tous comprit ce que je voulais faire. Je brandis tel Arthur quand il libéra excalibur, lesdits ciseaux et entame la découpe de quelques frisettes particulièrement récalcitrantes, avec l’aide du poto. Niallan et Diego coiffeurs. La barbe est ensuite taillée avec soin, et je me regarde en souriant.

Bon, de toute façon je peux pas faire mieux là…
Il est quelle heure ? Tu crois qu’on est en retard ?


Je saisis la pipe et tire avec empressement dessus. Je suis en retard c’est une certitude. Mais bon rien de mieux pour se détendre. Et puis merde, c’est mon mariage, donc de toute manière ils ne peuvent pas commencer sans moi.
Je glisse un bras sous celui du poto pour l’entrainer. Il est temps. Il est temps et mon pressentiment me taraude toujours. Aujourd’hui, je sens que « mariage » va rimer avec « carnage ».


* Bruno Mars, « Marry you ».

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Ban : JD Calyce
Niallan
[Do I wanna know ?
Est-ce que je veux vraiment savoir ?*]


En tant que témoin, je savais qu'il y aurait des questions et remise en question pré-cérémonie. Dans le doute, j'avais donc préparé trois sacs pour pallier à toutes les situations.
Le premier, plutôt léger contenait des affaires de rechange, des feuilles de menthe, des ciseaux, une lame, des parfums et un puissant aphrodisiaque à partager. Ça, c'était si tout se passait bien. De quoi aider le poto à se préparer. J'avais choisi une couleur criarde, dans les tons orange pour que ce soit ce sac qui attire éventuellement l'attention de Dae.
Le deuxième sac, un peu plus lourd, contenait de quoi boire et fumer, encore et toujours des feuilles de menthe pour faire passer la mauvaise haleine. Ça, c'était si le marié avait besoin d'un ou plusieurs remontants avant de faire le grand saut pour la énième fois. Je l'avais choisi marron, le style passe-partout qui va bien.
Le troisième s'apparentait plutôt à une besace. Légère, sombre et discrète. Celle-ci contenait une carte des royaumes, la somme d'écus que j'estimais propice à une fuite ainsi que des lettres pré-rédigées d'excuses en tout genre.

Vous comprenez donc qu'avec un tel chargement, j'ai mis du temps à me pointer au rendez-vous des préparatifs. En entrant, tout sourire, j'ai constaté que le premier sac pouvait servir dès à présent et j'ai commencé à déposer sur le lit son contenu, donnant quelques précisions au rital :
Normalement, les frusques sont à la bonne taille. Tu devrais attendre d'avoir fini de fumer pour la menthe. Ça c'est si t'as des poils récalcitrants, je compte pas te planter. Ça c'est si t'as pas eu le temps de te doucher. Oh et ça c'est si jamais t'as un problème pour satisfaire mada...

Il m'écoute pas le con, comme en témoigne la lettre qu'il me refourgue. Gné ? Qu'est-ce que ça dit ? Je hausse un sourcil dans la direction de l'ami.
Meuh.
C'était pour finir ma phrase, et aussi parce que je pige que dalle à son dialecte du sud. Quand il me fait la traduction, j'ouvre de grands yeux surpris et tente, sans succès aucun, de décrypter les palabres italiennes.
Ah ouais, il a dix-neuf ans. Ou alors il est né le 19 luglio...juillet ?
C'était le temps que je me remette de la nouvelle et que j'ouvre le deuxième sac pour en sortir une bouteille de whisky et une pipe déjà bourrée que je glisse entre ses doigts.
Tiens, prends ça, ça ira mieux. Et...félicitations mon vieux.

Marmonnant que la donzelle aurait pu être plus originale au niveau du prénom tout en dépliant les fringues que je lui ai emmené, je peine à me concentrer sur ce qu'il me dit.
Mmh, je t'écoute.
Même si je suis actuellement plus concentré sur le fil qui rebique sur la manche gauche de la chemise. C'est d'ailleurs à cause de ce fameux fil que j'entends pas bien ce que le rital me dit.
Oh, tu sais, on fait tous des conneries. Et puis c'est une Corleone, c'est dans ses gènes.
C'est une audition sélective qui produit une réaction aussi détachée. J'ai entendu voler. Pas violer. J'arrache le fil récalcitrant et décoche un clin d’œil à l'angoissé. Puis il cause, ça mérite une pause.

Un accident ? Je roule des yeux avec un sourire en coin. Il va pas me faire croire qu'il a détroussé quelqu'un par accident. Mais je souris, ne jamais contredire un homme qui s'apprête à se marier.
Pourquoi il me cause d'Aphro ? Je fronce les sourcils, débouche la bouteille de whisky et l'entame. J'aime pas qu'on parle d'elle mais je le laisse faire. Il va se marier, il a besoin d'évacuer.
Un violeur ? Tilt.
Dis-moi que tu te fous de moi...

Je tangue d'un pied sur l'autre pour rééquilibrer les neurones secoués par la nouvelle. Hein ? Quoi ? Comment ? Hébété, je le regarde sans savoir quoi dire ni quoi faire. On en a fait des conneries, on en a fait couler des larmes. Des femmes sont mortes par notre faute et on a pas toujours été aussi respectueux qu'on aurait dû l'être. Mais ça...ça jamais j'en aurais cru l'un de nous capable. Je secoue la tête, ingurgite une quantité alcoolisée non mesurée.
Tu déconnes, tu déconnes complet. Comment t'as pu...

C'est là que je vois son regard et que je comprends. Je comprends que quel que soit mon jugement, il ne sera jamais pire que celui qu'il a de lui-même. Je sais qu'il morfle, je sais qu'il regrette. Alors, doucement, je presse son épaule et lui adresse un bref sourire.
T'es pas un violeur. On...on va arranger ça.
Je me garde bien de lui avouer que je sais pas encore comment et enchaîne avec une autre affirmation.
J'veux plus me marier. Le mariage c'est...

Nul. C'est ce que j'aurais dit s'il m'avait laissé finir, s'il avait pas demandé que je le réconforte encore. Je soupèse la bouteille et pèse mes mots.
Je peux pas te dire qu'on va pas se planter, y'a même de grandes chances qu'on foire.
Ça commence mal vous trouvez ?
Mais ça vaut la peine d'essayer. Elle en vaut le coup. Puis si ça peut te rassurer, je crois pas qu'elle s'attende à ce que ce soit une divine idylle.

A peine je finis d'énoncer mes banalités que monsieur décide que me causer à poil -même si on est plus à ça près- c'est moyen. Je perds pas une miette du spectacle qui s'offre à moi, pas que je sois pris de soudaines envies sodomites mais parce que c'est un boulet et que ça me fait marrer. Ensuite, ça cause ciseaux. Je les lui tends. J'entame la corvée coiffure sans oser lui dire que la dernière fois que je m'y suis essayé, ça a mal tourné. J'essaye même d'appliquer ce que j'ai vu mes coiffeurs faire en lui parlant de la pluie et du beau temps :
Ahlala, quelle belle journée pour se marier.
Clic. Clic. Ça ce sont les bruits des ciseaux. Oups. Ça, ça vient de moi qui regarde une mèche plus grande que les autres tomber au sol. Déglutissant difficilement, je passe une main dans le léger trou au milieu de la crinière du poto.
Bon bah on va s'arrêter là. C'est...parfait.

Vu ma bourde, vous vous doutez bien que je me suis pas essayé à l'atelier taille de barbe. Et que j'ai chaudement félicité le rital en le voyant ainsi pomponné.
Pour sûr, tu peux pas faire mieux ! T'es ma-gni-fique.
Je me laisse aller à siffloter, le laisse m'attraper sous le bras et m'entraîner, pipe au bec. Je suis un type rassurant, avouez, surtout quand je lâche un :
T'en fais pas, on sera à l'heure. Disons que j'ai organisé un petit jeu de piste pour nos invités pour nous permettre de pallier au retard que je pressentais. Ils vont suivre des indices, trouveront des cadeaux et finiront par arriver à l'église.

Au terme d'une balade champêtre, nous arrivons devant la bâtisse. Je lui souris et ouvre la porte dans un mouvement cérémonieux. Envoûté par ma prouesse, l'italien rejoint rapidement l'autel. Je me glisse à ses côtés, révèle un morceau de cuir sombre sous ma chemise et lâche avec un air de conspirateur :
J'y ai pensé, t'en fais pas. Le signal sera...ours.
Je vérifie que personne ne nous a écouté et presse l'épaule du poto.
T'es prêt ?


*Artics Monkeys – Do I Wanna Know ?

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Bannière réalisée par les grands soins de JD Calyce.
Ayla.
L’écossaise achève de nouer un ruban dans ses longs cheveux d’ébènes, afin de les retenir en une queue de cheval des plus rudimentaires. Elle observe avec une petite moue, le reflet que lui renvoie le miroir : une femme trop grande, mince, dont les courbes pourtant appréciables, sont serrées dans une tenue de cuir souple et sombre. Ses grands yeux gris trahissent le mécontentement de ce que lui renvoie son image, elle n’a pas de tenue qui puissent convenir pour un mariage. Depuis bien trop longtemps maintenant, elle a troqué les robes de soies et les bas de dentelles pour épouser la vie d’une chasseresse qui court après la vengeance et qui se fait ambassadrice de la Grande Faucheuse. En signant pour cette vie rude, elle s’est appliquée à bannir ce qu’elle était, elle a réprimé sa féminité, ses émotions, ses désirs pour n’être plus qu’Ayla. De son savoir des plantes et de la médecine elle a embrassé le côté sombre pour devenir une empoisonneuse sans pitié.

Maman ?


Elle se retourne aux paroles enfantines en souriant, gorgée de tendresse pour sa fille, Maya qui partage sa vie depuis quatre ans déjà. C’est sa seule faiblesse, cet enfant. Mais c’est aussi d’elle qu’elle tire sa plus grande force, c’est elle qui lui permet de garder un brin d’humanité et de ne pas décrocher sans cesse pour céder à un coté plus sombre. Elle s’agenouille devant la petite fille aux traits angéliques la remerciant silencieusement d’être là, près d’elle.
La brune n’a plus de famille, son époux est mort, sa fille est morte, Sarah a disparu avec Mao, Manu est mort, Enjoy envolée, le clan Macdouggal n’est plus, Il est loin le temps de la rébellion à Sarlat, de la gloire de leur clan allié à celui des Corleone. Elle n’a plus d’homme auprès d’elle, Léo n’ayant pas réussi à se faire à son mode de vie, lui l’homme de bien, elle la malfrat. Elle n’a plus d’amis, seulement des ennemis, Lix est disparue, probablement morte, son maitre Méo est mort. Il ne reste dans sa vie, plus que Maya et Diego.

Diego l’ami, Diego l’amant. Leur histoire, bien que très brève avait été une grosse erreur qui s’était soldée par une grossesse difficile non désirée, un accouchement en solitaire pour finalement contempler un nourrisson sans vie. Elle n’avait pas versé une larme pour ce fils qui n’aurait jamais le loisir de pousser son premier cri. Tant mieux. Elle ne voulait pas s’encombrer d’un autre enfant. Et encore moins du père qui va avec. Elle se souvenait trop bien des premiers mois des jumeaux qu’un Diego paniqué lui avait refourgué dans les bras. C’est elle qui les avait élevé, qui leur avait donné le sein en même temps qu’elle allaitait Maya. Elle se souvient, qu’elle avait dû élever trois enfants sensiblement du même âge, totalement seule. Durant ces longs mois d’isolement, à jouer la mère parfaite, elle s’était jurée que plus jamais aucun homme ne l’engrosserait, ni ne lui ferait jouer le rôle de la nourrice.
En enterrant Kieran, elle avait enterré son envie d’être mère dans le futur.

Elle tresse les cheveux blonds de sa fille avec adresse et patience, souriant fièrement à la petite qui énumère le nom des diverses plantes qui sont dans le panier. L’écossaise caresse tendrement la joue enfantine avant d’attacher à l'aide d'épingles les tresses en un chignon champêtre, dans lequel elle glisse des fleurs des champs, cueillis quelques heures plus tôt durant leur promenade matinale.
Tu tournes pour me montrer comme elle est belle, cette petite robe ma puce ?
Maya s’exécute dans un rire cristallin, tournoyant plusieurs fois sur elle-même, faisant voleter le tissu, contente d’avoir eu une nouvelle robe pour l’occasion et de troquer la tunique plus pratique qu’elle revêt d’ordinaire. Ayla regarde sa fille heureuse, avec l’émotion d’une mère qui voit son bébé grandir. Elle est sa fierté, cette petite qui survit envers et contre tout. Elle détaille ce petit corps dans sa robe couleur lilas qui ne lui ressemble en rien.
L’enfant n’a hérité de sa mère que le teint laiteux et les yeux gris. Tout le reste lui vient de son père. Des cheveux blonds comme les blés, une bouche finement ciselée et une marque de naissance sur le bras gauche qui trahit ses origines profondes. Elle enroule sur ce bras là un large bandage.
Tu es belle ma princesse, tu n’oublies pas, le bandage doit rester sur ton bras.
Dis maman, tu vas mettre une belle robe toi aussi ?

L’écossaise sourit à la question enfantine. Non, tu sais bien que je n’aime pas les robes. Mais la mariée en aura surement une.

Elle attrape la main de la petite fille pour mettre fin aux questions de la curieuse, qui indubitablement vont arriver et lui tend un bouquet de marguerites. Main dans la main, elles s’en vont à la cérémonie. Si Maya est guillerette à l’idée d’assister à son premier mariage, il n’en va pas de même pour Ayla, qui, d’une nature profondément anxieuse, psychote à l’idée qu’il arrive quelque chose. Elle qui devait faire accoucher Alaynna avait finalement fuit Marseille en hâte pour protéger sa progéniture qu’elle chérit tant.
Alors qu’elles entrent dans l’église, elle prend conscience, que pour elle aussi, c’est la première fois qu’elle assiste à une union en dehors de son propre mariage. Le temps que ses yeux s’accoutument à la pénombre de l’endroit, elles se glissent en silence jusqu’aux bancs quand elle se fige en voyant les deux hommes. Niallan et Diego. Elle n’avait pas prévu que le blond serait là, lui aussi, et désormais, en proie à un terrible dilemme, elle hésite à filer sans demander son reste. Finalement, un rictus officiant de sourire leur est adressé en guise de salut avant de se ranger pour attendre que la cérémonie débute. Pas de panique, il n'arrivera rien, ce n'est après tout qu'un mariage. La fillette prend place à ses côtés, sagement, fixant curieuse, son regard innocent sur les deux hommes.

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Daeneryss
    «Il y a deux sortes de mariages : le mariage blanc et le mariage multicolore parce que chacun des deux conjoints en voit de toutes les couleurs.»
    Georges Courteline



Le désordre avait battu son plein jusqu'à atteindre son paroxysme. Les jumeaux et les non-jumeaux avaient vaincu le balourd, mais ils avaient aussi failli avoir raison de moi et de ma capacité à garder mon calme. Cet épisode avait finalement été des plus instructifs et des plus révélateurs sur le futur de ma vie : Je ne voulais plus avoir d'autres enfants. Quatre étant déjà un nombre correct, j'avais sous-estimé la puissance de si petits êtres. A quatre, ils étaient un véritable fléau. Une arme certaine pour qui chercherait à vouloir s'approcher de l'Italien, je ne pouvais m'empêcher de sourire à l'idée qu'une inconnue veuille s'immiscer dans nos vies sans savoir que la cavalerie enfantine risquait de lui tomber dessus pour lui faire vivre l'Enfer. Le Diable a des visages dont il faut se méfier et nos enfants en étaient la parfaite représentation. Surtout ainsi affublés de tenue si officielles.
Et qu'ils sont beaux...!
Ezia ressemblait véritablement à une petite princesse. Sa chevelure nouée dans une tresse large lui accentuait son regard si profond, et les fleurs de ses cheveux ne faisaient qu'accentuer la fraicheur qui irradie de ses joues roses pastel. Que dire des bijoux de sa mère... Radieux, étincelants. Si je ne l'avais pas connue, elle devait être certainement une femme à la beauté resplendissante. J'essayais souvent de me l'imaginer au travers des traits gémellaires, lui prêtant la ligne du nez de Mano, les yeux de Lucrezia ou encore leur sourire à tout deux quand ils s'admirent à l'instant même. La main de Mano si douce à cueillir la main de sa sœur, je ne peux m'empêcher de penser à la crainte de Diego de les voir un jour passer à un cap supérieur. A les voir, tout semble facile et léger. Une complicité parfaite qui me fait sourire tendrement.


- Mano, tu viens mettre ton gilet de chevalier ? Romeo mon trésor, ton col.


Romeo s'ajuste comme un grand, sa blondeur angélique en parfaite opposition avec sa chemise noire. Oui, noire, malgré ce jour, cette couleur lui va tellement bien et le met si bien en valeur que je ne pouvais me résoudre à lui faire porter autre chose. Comme à son habitude, il plonge son regard dans le mien, silencieux après la tempête, renfermé comme un Corleone. Sans le quitter de mes azurs, j'installe la petite couronne de fleurs sur la chevelure sombre de Callie qui ne peut s'empêcher de remuer son minois enfantin, et je chasse le visage de Gabriele qui m'apparaît par bride comme un fantôme. Au fond de moi, je sais que son ombre planera toujours et que tant que Romeo sera, il ne pourra en être autrement.
La petite robe de Callie paraît encore un peu grande pour elle, mais le sourire rayonnant qu'elle arbore trouve son écho dans celui que je lui rends. Ode à la beauté, elle n'a rien à envier à quiconque et j'espère chaque jour que cette innocence demeure le plus longtemps possible. Je ne souhaite plus de démons, je ne souhaite plus de guerre, bien que certaines batailles d'hiver viennent encore habiter mes songes.

Sans qu'il soit question de bataille, aujourd'hui nous avancions ensemble vers l'Eglise, indissociable petit groupe sans s'attendre au combat. Les demoiselles ouvrent la marche, main dans la main, belles. La négociation avait été longue pour que les jumeaux se lâchent et acceptent de marcher aux côtés de leur demie-sœur et presque-frère. De l'arrière de ce petit cortège, fermant la marche, le voile déchiré finalement abandonné sur le lit, j'avais opté pour être en harmonie avec les filles, et un diadème de freesia blanches pour contraster avec ma rousseur.
Un pas après l'autre, je ne peux m'empêcher de penser à Diego, à notre premier mariage quelque peu volé, aux amants passionnés que nous étions. Sans savoir me l'expliquer, sans savoir véritablement à qui je pouvais avouer mes craintes sur mon couple, j'appréhendais ce mariage plus que le précédent. Je serai plus officiellement encore sa femme que je ne l'étais déjà et l'angoisse de perdre un peu ce statut d'amante me retournait la tête. Attend-on véritablement la même chose d'une femme et d'une épouse ? Serait-il suffisamment satisfait au point de continuer de me désirer autant qu'avant ? Des questions toutes plus et surtout moins chastes les unes que les autres envahissaient mon esprit alors que nous avions déjà gravi les marches du lieu saint. C'est la voix de Romeo qui m'arrache à mes interrogations et ce rendez-vous surréaliste que j'étais en train d'avoir avec ma conscience.


- Maman... on entre pas ?
- Si, si. Bien sûr qu'on entre.

Si étonnant que cela puisse paraître, lorsque cette porte s'ouvre enfin je ne peux m'empêcher de retenir mon souffle, comme avant de décocher une flèche. La concentration à son maximum, je cherche le regard italien comme point d'horizon ; un point d'ancrage qui devait être - avec les enfants - le seul jusqu'à la fin.
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Diego_corellio
« J'avoue qu'c'est un peu con *
D'aller coucher ailleurs
C'est quoi c'te tradition
Qui dit qu'ça porte malheur

De dormir à côté
Du fameux être cher
Quand ça fait des années
Qu'on pêche à fond la chaire »



Moi aussi j’étais bien d’accord avec cette chanson, c'était une tradition de merde. Mais n’empêche que celle-ci m’avait permis très justement d’être comme un coq en patte ce matin, sans enfants dans les pieds qui beuglent à qui mieux mieux. Finalement si on réfléchit bien, le mariage c’est un peu une tradition bidon qui sert juste à se faire plumer et à marquer son territoire sur une femme. Non parce que ça apporte rien de sensationnel, à part des complications pour le divorce. Mais faut croire qu’il y aura toujours de benêts comme moi pour se marier quatre fois. A quand la cinquième, je me le demande...

J’apprécie grandement la « balade champêtre » offerte par le poto prévoyant. D’ailleurs je m’extasie sur à peu près tout ce qu’on croise, essayant inconsciemment de retarder le moment fatidique ou il faudra entrer dans la bâtisse. C’est comme ça qu’on a fait plusieurs pauses « pipi », d’autres pour regarder une fleur on ne peut plus commune ou un insecte à l’allure bizarre. J’en profite aussi pour fumer comme un pompier, histoire de me détendre le slip, que je ne porte, évidemment, pas.

On finit tout de même par arriver devant la bâtisse que je n’étais pas pressé de revoir. Niallan doit ralentir l’allure tellement je traine, comme si mes pas avançaient à reculons. Le cœur se met à cogner dans la poitrine, avec une soudaine envie de rendre le petit déjeuner que je n’ai pas pris. Le souffle se fait court, la bouche se fait sèche quand mes bottent claquent contre les marches du perron me rapprochant de la lourde porte. Je secoue la tête brièvement dans un signe négatif que Niallan ne peut pas voir. No, je peux pas y aller.
La silhouette de Niallan avance, ouvre la porte des enfers, je ferme les yeux revoyant les flammes lécher mon corps, sursautant, avant de le suivre, refoulant les terribles souvenirs d’Italie. J’inspire longuement en passant sous l’arche, entrant dans la maison de ce seigneur qui ne fait strictement rien pour ses ouailles.
Nos pas raisonnent contre les dalles froides du lieu saint, remontants l’allée centrale jusqu’à l’autel. Mes doigts viennent se perdre sur le grain de la pierre dure, fermant les yeux sur la mélancolie qui grimpe, en même temps que les frissons. No, pas aujourd’hui, ne pas penser à Elle…

Quand je rouvre les yeux, ils sont pleins d’assurances et non plus empreint de doutes. Un clin d’œil est adressé à Niallan, reconnaissant d’avoir songé à une solution de repli.
J’ai croisé mes mains derrières mon dos, comme un gentleman, mais surtout par praticité afin que personne ne puisse voir que mes doigts tremblent atrocement.
L’attente a débuté. Longue. Immuable. Angoissante.

Une silhouette s’est dessinée dans l’embrasure de la porte et le palpitant s’est à nouveau emballé. Sauf que ce crétin, avec le contre-jour, n’a pas été capable de voir que ce n’était pas la bonne. Pas celle pour qui il doit cogner. Il se calme nettement quand je reconnais la guerrière si singulière, accompagnée de Maya. A la place un sourire enjoué vient animer la trombine italienne ainsi qu’un signe de tête guindé par l’anxiété. Je n'aurai pas pensé qu'elles viendraient.
Elles prennent place et l’attente reprend, simplement rythmée par nos souffles qui semblent exacerbés. Alors que le temps égraine ses minutes interminables, je me mets à triturer nerveusement le lien de cuir que je n’ai pu me résoudre à ôter de mon poignet. Je lui parle, silencieux, cherchant dans l’immensité du vide ses réponses, quand elle apparait enfin. Cette fois l’autre idiot sait pourquoi il s’excite dans sa cage thoracique. Je me dandine d’un pied sur l’autre alors qu’un sourire plein d’amour étire les lippes italiennes, tandis que l’air me manque pour respirer convenablement.

Je ne distingue que le contour de son corps, que déjà les sens sont en émoi. Je regarde l’ombre manger les pleins de de celui-ci, tandis que la lumière cisèle, sculpte ses formes. Je devine plus que ce que je ne vois réellement l’arrondi de son épaule, le creux de sa hanche. Elle fait un pas et elle explose, magnifique en pleine lumière. Je ne me lasse pas de la dévorer ainsi du regard, dans l’indécence la plus totale. C’est inconvenant de désirer si pleinement sa presque future-femme alors qu’elle vient à peine de faire son entrée.

C’est seulement à cet instant là que je remarque les deux fillettes, radieuses en sœurs alliées et non plus ennemies. J’imagine sans nul doute comment il a dû être complexe à Dae de convaincre Lucrezia de lâcher la main de sa moitié pour tenir celle de cette sœur qu’elle déteste tant. Mais les voir là, si proches, si complices pour ce jour si particulier me remplit d’une joie indescriptible. Mes yeux remontent un peu pour croiser ceux de mon fils habillé comme mon homologue. En le voyant à côté du Corleone, leur blondeur se tutoyant ainsi, on pourrait croire qu’ils sont frères. Pourtant c’est bien en croisant les prunelles de Roméo que la réalité me revient en pleine figure. Il ne sera jamais mon fils. Et il aura toujours la gueule de son foutu géniteur.

Quand mes pupilles se plongent dans leurs consœurs azur, il n’y a plus de doutes. C’est elle que je veux épouser.



* « Le Mariage » par Lynda Lemay

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Ban : JD Calyce
Alaynna
En retard. Si. Je le suis. Nous le sommes avec Anna-Gabriella. Mais si l'on me dit quelque chose, je dirai que c'est la faute de l'Italien. D'ailleurs c'est vrai. C'est bien parce qu'il m'a dit de me vêtir comme si je souhaitais reconquérir l'homme de ma vie quand je lui ai demandé ce qu'il fallait porter à ce mariage que nous sommes à la bourre.
D'habitude, je ne suis jamais en retard. Je suis même ponctuelle et parfois en avance sur ma ponctualité. Mais pas aujourd'hui.

C'est que si je fus rapide à préparer notre petite princesse-pirate, en la revêtant d'une adorable petite robe de couleur bleu marine, sans manches, ne cachant en rien la tâche de naissance à son petit bras qu'elle tient de son père ; rehaussé de quelques galons de dentelle blanche, lui glissant un petit foulard assorti dans sa petite chevelure blonde qui rappelait ce bleu des yeux qu'elle tient de son papà...il en fut tout autrement pour ma personne. Les minutes, les demi-heure, les heures, pratiquement trois, se sont écoulées avant que je ne mette la main sur la robe du jour. Moi qui ne met jamais de robes, j'étais servie aujourd'hui. Et j'avais fini par me glisser dans une robe de dentelle d'un bleu aussi marin que celui que porte Anna-Gabriella. Et si cette robe ne porte aucune échancrure, le tissu dentelé est porté à même la peau, ce qui ne manque pas de souligner la silhouette. Mes cheveux sont noués en chignon dans lequel la fibule Serbe a bonne place.

Je ne voulais pas venir à ce mariage et si je suis présente, c'est bien parce que Diego a insisté. Lourdement. Je viens pour l'Ami. Parce que celui-ci ne me trahira pas. Jamais.
Et puis les églises, ce n'est pas ma tasse de thé. D'ailleurs, depuis mon mariage avec Niallan et la débâcle qui s'en est suivi, je hais encore plus qu'avant les églises.
Faut-il que j'y tienne à l'Amitié de l'Italien pour entrer en ces lieux.
Alors je fais bonne figure, cachant la nausée que me procure cet endroit quand j'y pénètre, qui ne manque pas de m'en rappeler un autre.

Nous sommes en retard. J'ai bien aperçu Niallan du coin de l'oeil mais il ne faut pas que je le regarde. Surtout pas. Alors je me focalise sur les mariés avant de chercher un endroit où nous réfugier avec Anna-Gabriella.
C'est là que je l'ai vu. Ayla. Et sa fille. Toutes les deux devaient m'accoucher. Si. La petite aussi devait être présente, c'était la condition exigée par Ayla. Et moi j'étais tellement en panique que j'avais accepté. De toute façon, elle ne m'avait pas laissé le choix. Et tout cela pour finalement disparaître au moment où j'avais le plus besoin d'elle.
Je l'avais lâché à Diego que si elle avait été là, sans doute que le cours de notre vie, surtout la mienne, aurait été différent. Très probablement que je ne me serai jamais enfuie quand le travail s'est déclenché.
Mais. Ce n'est pas à elle que j'en veux. Je lui avais accordé ma confiance à elle, quand je ne l'accordais pas aux autres.
C'est donc vers elles que je me dirige, prenant place à leurs côtés, Anna-Gabriella dans les bras. J'esquisse un léger sourire en la saluant et je pose le regard sur la fillette qui l'accompagne. Aussi blonde que ne l'est Anna-Gabriella.
Et qui a dit qu'un bébé de neuf mois n'est pas sociable ? Elle doit tenir ça de son père assurément. Mais Anna s'est penché vers Maya, lui parlant dans son langage bien à elle et se penchant dangereusement en avant, voilà que la petite va plaquer sa bouche bien baveuse sur la joue de la fillette.
Sourire un peu gêné à l'attention d'Ayla alors que je ré-équilibre l'assise d'Anna entre mes bras, et que je passe une main machinale sur la chevelure de Maya pour lui remettre en place la petite mèche de cheveux qu'Anna a cru bon de décoiffer au passage.

Ce n'est pas vraiment le moment de lui demander où elles étaient passé à l'heure où elles auraient du être là pour m'accoucher. Nous en causerons plus tard.
Je suis déjà assez gênée comme ça, d'être en retard.

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Kachina
"Quand tu prendras la mer
elle sera sémaphore
quand tu verras la terre
elle deviendra le port
quand t’auras plus le ciel
elle sera ton étoile..."(Saez)


Elle peste intérieurement à propos de la dureté du banc de bois sur lequel elle a posé ses fesses. Devant, les bien-nés ont droit à des coussins et à des places réservées à leurs noms. Elle, elle est au fond, avec les gens du peuple, elle n’a ni titres, ni fiefs lui permettant un prie-dieu capitonné de velours qui épargnerait ses genoux. Pourtant sa robe somptueuse tranche avec indécence sur d'autres tenues plus simples. C'est qu'elle a gardé de ce temps où elle tenait échoppe de tisserande en Armagnac, l’habileté et le goût de tailler dans une étoffe pour assembler, ourler, et confectionner les plus belles toilettes. Cette robe-là est de moire aux reflets changeants virant du pourpre à l’écarlate, mêlant l’or et l’orangé au moindre de ses mouvements.

Elle s’est voulue belle pour l’occasion.
Non pas parce qu’elle prise ce genre de cérémonie. Elle pense que l’union de deux êtres se célèbre à la caresse d’une bouche sur la peau aimée, aux sourires complices échangés, aux corps alanguis entre les draps froissés, à tous ces petits riens qui font que l’Autre est unique et précieux. Faisant fi des signatures au bas d’un parchemin, elle ne reconnait dans un mariage que cet instant où chacun dit oui. Et puis c’est agaçant cette manie qu’ont les promis de vouloir que leur mariage à eux soit différent.

Un peu comme pour se rassurer sur le sujet. Histoire de se dire : Vrai que ça dure jamais vraiment un mariage mais nous… Nous on est bien au-dessus de tout ça. On s’aime plus, plus fort, mieux. On tiendra…. Alors, il faut qu’il se passe un truc spécial à notre mariage, que tout le monde s’en souvienne.

Foutaises…

Moui…. Elle recale discrètement une mèche qui s’échappe de la coiffure qu’elle a voulue soignée en ce jour de fête.
Elle n’aime pas les mariages mais elle aime l’amour.
Elle a plongé du côté sombre par amour un jour, et se fait des plus sages par amour encore aujourd'hui.
Et elle a pour Dae cette tendresse particulière qui méritait bien qu’elle lui sacrifie son habituelle chevauchée matinale. Il y a certaines amitiés qui naissent comme ça, de quelques confidences, de cette reconnaissance innée, comme une évidence.
La jeune femme l’a invitée à ses noces. Elle ne pouvait pas refuser.

Elle est là donc, à narguer les statues de marbre figées dans leur éternité de son regard vert qui glisse jusqu'aux deux compères plantés devant l’autel.
Niallan, Diego...Complices à l’infini.
Ils sont beaux. Et leurs belles gueules de séducteurs doivent en faire à cet instant se trémousser plus d’une dans les rangs des filles. Un sourire égaie sa frimousse à la moue jusque-là boudeuse. Sa main vient se perdre machinalement dans les plis de sa robe, avant de se figer sur la chaine en argent qui souligne sa taille. Aucune parure à son cou, aucun bijou n’orne sa peau, mis à part ce lien de cuir paré d’un coquillage. Elle n’a de chaines que celles qu’elle s’est choisie, invisibles liens qui la ramènent encore et encore à un voleur de cierges, amateur de chanvre.

D’un regard, elle balaie l’assemblée, devine quelques têtes connues, en salue quelques-unes. Vers les fonds baptismaux, un chandelier en argent l’attire comme un aimant, et le sourire se fait chafouin. Elle songe en riant silencieusement : est ce que je le vole ou pas ?

Et c’est enfin sur Dae que ses prunelles s’attardent quand la future épouse s’engage dans l’allée centrale. Kachi surprend le regard de Diego posé sur la Belle et l’ambiance s’électrise. Que Dieu et ses saints en rougissent s’ils le peuvent. Il y a sans aucun doute, quelque chose qui se passe entre ces deux-là. Qui fait que la température soudain semble monter d’un cran.


    « Ils flottent, ils volent. Ils sont Dieu, ils sont anges, ils sont seuls. Autour d'eux, le monde s'efface et se réduit au simple décor d'un théâtre dont ils sont les uniques acteurs. Ils s'aiment. D'un amour dans le sang. D'une ivresse permanente. Dans l'instant et l'éternité. Et en même temps, la peur est partout. La peur du manque. La peur de se retrouver sans oxygène. C'est l'évidence et la confusion. C'est à la fois la foudre et l'anéantissement. Le plus beau des printemps, l'orage le plus violent. Et pourtant, ils s'aiment. »(Musso)


Elle se cale un peu mieux à sa place, appuie son dos au bois, et marmonne : Que ça commence foutre Dieu…
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(Merci à Jd Axelle pour la bannière)
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