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[RP] Papotage post-carnages.

Eldearde

    “L'opium dégage l'esprit. Jamais il ne rend spirituel.”*
                                                                                                                       - Ah bah zut alors.

    - LIMOGES -
Cette nuit encore, janvier s'invite dans la chambre à coucher.
D'un oeil qui ne cille pas, Kierkegaard fixe les poutres du plafond qui égrainent, le plus naturellement du monde, leur kyrielle de flocons. Gisante de chair s'abîme à la contemplation de leur chute, surprise de ne rien sentir de leur éphémère froidure. Elle l'attendait, le guettait d'un coeur battant la mesure, et pourtant l'entièreté du corps dénudé se contorsionne de stupeur et d'effroi mêlés quand le rire grinçant de la lépreuse s'élève de sous le plumard. Énorme et grimaçant, il se dilate entre les quatre murs de la piaule jusqu'à exploser en un millier d'ongles blafards. Le cri épouvanté que l'hallucinée ravale s'enfonce jusqu'aux tripes qu'il déchire du suraigu de son timbre et lorsque, affolée et malingre, cauchemardeuse pivote vers un mari ne pouvant qu'être sur le qui-vive après pareil boucan, la longue carcasse endormie la heurte salement, lui disant de tout ce sommeil exhibé la profondeur de ses égarements.

D'un geste barbouillé de brutalité, le tiroir du chevet est sommé de vomir son contenu sans plus atermoyer.

Et merde...
Entre ses doigts dissipés, la fiole affiche la plus sinistre des aridités, vidée de la teinture d'opium qui, il y a une semaine encore, l'emplissait à ras-bord. Un instant, l'organisme privé de la perspective d'un prochain soulagement demeure perclus de tout côté, l'espoir mourant aux parois du flacon dépouillé. Finalement, la défroque d'os saillants se déplie de mouvements inégaux et saccadés, semblables à ceux d'une machine rouillée, et finit par étendre toute sa funeste minceur, voûte plantaire au plancher plein de cire et cabèche auréolée de la voûte enneigée de ses délires.

Quelques fripes sont passées, suivies de près par le seuil de la chambrée. La ruelle fatiguée, que la présence inopportune réveille, ne lui fait pas bon accueil, braquant sur elle toute l'épaisseur de ses ténèbres, transformant chaque pavé en possible écueil. Néanmoins aucune menace n'égale celle d'une alcôve que l'hiver et les macabres mémoires capitonnent et il n'y a donc aucune hésitation dans le pas engourdi qui, sombrement, résonne. Août fait traîner des lambeaux de chaleur sur ce mois de septembre à peine entamé; l'obscurité a le goût braisé des nuits brûlées. Trop ronde pour se porter sans peine, la lune sue de grosses gouttes de lumière fanée. Sans lanterne, sans falot, inconsciente promeneuse n'a pour seul allié que ce pâle halo : souvent, elle trébuche sur une ombre ou s'invente des formes chimériques qu'elle croise en baissant le menton, paumée dans les décombres de sa triste imagination.

Quand soudain, à l'intersection de deux artères que le noir bouche à en suspendre le coeur déjà atrophié de la cité, une face immense et blême, bouffée par deux profondes prunelles que la fatigue inonde jusqu'à la mélancolie suprême. Cette trogne saugrenue semble flotter dans l'air couleur charbon comme un gros et blond ballon...sauf que non, la chose est en réalité posée sur le moelleux d'un édredon entortillé autour de ce qui semble être un putain de garçon.

C'est bien là tout ce que Kierkegaard a l'heur d'apprécier avant de se faire sauter les tympans d'un AAAAAAH glapissant attestant d'un courage flagrant.


* Jean Cocteau
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[Blason en construction]
Niallan
[Je léguerai mon âme à la science 
Car moi je n'irai pas plus loin
Je tiens ma tête entre mes mains
Guignol connaît pas de sots métiers
Je ris à m'en faire crever ! *]


J'étouffe un énième rire dans le moelleux de l'édredon réquisitionné pour la nuit en pensant à ce qu'est ma vie aujourd'hui. Mon ex-femme et notre merveilleuse môme ont été enlevées par celui que je considérais comme un ami, mon cousin officiel et sociopathe avéré. Atteinte du syndrome de Stockholm, ma bien aimée ex-femme n'a rien trouvé de mieux à faire que de s'amouracher de lui et d'accepter sa demande en mariage. Notez que dans un étrange dédoublement de personnalité, elle continue de nous envoyer des appels à l'aide. En bon père et ex-mari qui se réveille trop tard, j'ai écrit au dénommé Gabriel -ne vous fiez pas au prénom, c'est un démon- pour lui faire part de mes impressions et lui annoncer une future agression sans pression. Il m'a répondu une pauvre ligne en réponse à mon PS et ma frustration a été semblable à celle qu'aurait produit un mois d'abstinence. Parlons d'abstinence justement, ce soir veille du départ, Neijin m'a écrit pour me dire qu'elle ne viendrait pas avec nous et resterait avec son ami, Corleone qui ne m'a pas à la bonne.

En résumé, ma vie est actuellement plus merdique que celle d'un hémiplégique syphilitique poursuivi par une clique de moustiques. Depuis que je suis aux côtés de ma Potesse, j'ai pris l'habitude qu'elle me confesse -ou que je m'occupe de ses fesses- quand détresse et tristesse se pressent. Seulement, comme vous avez pu le noter au paragraphe ci-avant, elle m'a lâché. Je me retrouve donc abandonné, inquiet, frustré, énervé et pourtant plongé dans l'hilarité à son apogée.
Pourquoi ?

C'est plutôt simple en fait. Non content d'être passablement bourré et enfumé, je suis aussi crevé, ce qui a conduit mes nerfs à lâcher. La réception de la missive de l'aimée a été la goûte de trop et après avoir balancé celle-ci dans les latrines -la missive, pas sa rédactrice-, j'ai bourré ma pipe, dégainé une bouteille de whisky et les ai attaquées. J'ai vite tourné en rond dans la tente mais comme je voulais pas me peler, j'ai pris ma couverture avant de sortir.

Ce qui nous emmène à maintenant. Aux environs de minuit on ne sait où dans Limoges. Tel une chenille qui aurait subitement appris à marcher sur deux pattes, j'avance dans la nuit en laissant échapper tantôt des petits rires nerveux, tantôt de grands éclats de rire. Et quand je me marre pas, c'est que je bois ou que je suis à deux doigts de chialer. Cette vision on ne peut plus séduisante que j'offre produit diverses réactions. On va passer sous silence les moues de dégoûts et les regards d'incompréhension pour arriver directement à la terreur absolue.

Le retentissant glapissement produit une réaction en chaîne. Comme tout être humain normalement constitué, entendre quelqu'un brailler à deux pas de moi me laisse entendre qu'il y a un danger, et par conséquent me fait flipper. Comme tout être humain passablement aviné, mes réflexes ne sont pas au mieux de leurs capacités. Je laisse échapper un « AAAAAH » partant étrangement dans les aigus, tente de reculer mais m'empêtre dans l'édredon. Je tente de me rattraper, sans succès et, comme mes paluches sont prises par la bouteille je n'ai aucune prise. C'est dans un bruit mat que je percute un autre corps. Un « AAAAAH » de surprise s'échappe de ma gorge, remontant dans les graves. Je roule sur le côté, redonne un coup de « AAAAH » pour que le célèbre dicton du jamais deux sans trois soit comblé. Puis je m'énerve parce que, quand même :

Non mais on a pas idée de faire peur aux gens comme ça ! Qu'est-ce que vous foutiez au milieu du chemin, hein, vous ramassiez les champign...

Tête tournée sur le côté, je reste hébété une durée indéterminée. Eldearde. Avec au moins un siècle de plus. Pris d'une culpabilité au sommet, je me redresse d'un bond et lui tends la main dans un sourire désolé.

Je suis désolé, si j'avais su que c'était vous...moment réflexion...j'aurais essayé de tomber en arrière au risque de me fendre le crâne sur un rocher.

Ma tentative d'humour me semblant bien dérisoire, je lui tends la bouteille à moitié pleine -prenons les choses du bon côté-.

Vous en voulez ? Il paraît que ça soigne tout.

Insuffisant. J'agite un pan de l'édredon.

Je peux aussi vous prêter ça.

Toujours pas suffisant. Je tente un sourire amical.

Dites, euh... vous avez pas l'air bien, indépendamment du fait que je me sois taulé sur vous, vous voulez que je vous raccompagne ?


*Thiefaine -113ème cigarette sans dormir

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Bannière réalisée par les grands soins de JD Calyce.
Eldearde
Un AAAAH fait écho au sien. Quoique bizarrement plus efféminé que celui de sa gorge échappé.
Puis un autre
AAAAH qui heurte paire d'esgourdes décidément malmenées lorsqu'une carcasse heurte le noble zombie, ce qui fait BIEN trop de heurts au compteur, même pour cette étrange nuit. A tout le moins - a-t-elle le temps de songer en passant de la verticale à l'horizontalité - le rugueux contact la rassure-t-il quant à la nature de ce corps étranger : si d'un esprit malin il s'agissait, sûr qu'il n'y aurait point eu tant de matière à palper. Et qu'elle ne se retrouverait pas ainsi écrasée entre soixante-dix kilos de chair et l'arrondi des pavés.

AAAAH.
Non mais c'est pas bientôt fini ces vagissements de diva enrouée ?
Naseaux renaclent durement, colère encrasse une bouche de fiel chargée, sourcil dessine l'arche frondeuse qui, vers les Enfers, descend : ça va chier. Sauf que...Niallan. Niallan dont même l'or des cheveux parait éteint, boucles tristes et fatiguées barrant un front que les tourments ravinent à la façon d'une terre tout juste labourée. Niallan tout d'ivresse froissé, la sombre trogne fêlée en son milieu d'un rictus hilare qui dit tout l'état déplorable de ses nerfs à vif, bien qu'arrosés de pinard. Niallan qui, finalement, crochète une blanche paluche pour hisser l'accidentée sur ses panards.

Essayez, à ma vue, de vous fendre d'un sourire plutôt que le crâne. C'plus délicat et franchement moins sale. Réplique foireuse pour humour faisandé. On ne peut guère attendre mieux de deux cervelets décalqués.

A ses jupes bleu nocturne constellées de novas fangeuses et d'étoiles brunes, la percutée n'accorde pas même l'once d'une attention ennuyée, le cabochon encombré de bien plus vaseuses pensées. La bouteille que l'on agite sous son nez, en revanche, est plus prompte à capter son intérêt. Si ce ne sont les grands crus et les plus fameux vignobles de Bourgogne, Kierkegaard ne considère l’absorption d'alcool que comme un remède ragoûtant que l'on avale de traviole pour soigner les maux orduriers que sont la prudence, la pudeur et la dignité; ou pire encore, comme un pis-aller quand la thériaque vient à manquer.

Sans vouloir mettre en doute l'efficacité de votre breuvage, vous n'me semblez pas des plus dispos, goguenarde-t-elle en enroulant pourtant ses doigts autour du goulot.
Quatre lampées, de quoi refiler un peu de sursis au palpitant à l'agonie. L'autre main, en revanche, décline le bout de couverture proposé puisque nobliaute, même au fin fond de la misère, tient à conserver toute la fierté dont elle se croit - à tort - drapée.

Le sourire, bienvenu, coud une broderie de lumière sur le rire de douleur éperdue qu'exhibe notre promeneur abattu. A la proposition gentiment survenue, cependant, Eldearde tombe -encore- des nues : une seule échappée mentale vers la piaule tout juste abandonnée, Pandémonium trompeusement douillet, l'emplit d'une indicible anxiété.

Parce que vous pensez arborer votre gueule des grands jours, vous ? Vous êtes plein comme une putain au p'tit matin. Vous allez vous endormir au coin de la rue et les chiens errants viendront vous pisser d'ssus. Peut-être pas que les clébards d'ailleurs. Alors JE vous raccompagne jusqu'à ce qui vous sert de demeure.
D'autorité, grande perche pend bras-allumette à l'aile droite enfouie sous la couette et sonde d'un regard mou les alentours tout aussi flous.
Bon. C'par où ?
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[Blason en construction]
Niallan
[Avalé par des yeux immenses
En parler comme si c’était les miens
Nager dans tes yeux leur élégance
Voilà que moi, je baisse les miens*]


J'ai honte, je suis mal à l'aise. Je me suis taulé sur elle, quoi ! En plus, la dernière fois que je l'ai vue, elle était en cloque alors si ça se trouve... Totalement beurré, j'en viens à penser que je l'ai dégonflée et cherche des yeux le moutard évacué. Juste une seconde, ça va. Je reprends mes esprits quand elle se met à causer et me conseille sur la localisation de mes fentes -n'y voyez pas un truc salace-.
J'en prends bonne note.

Ça s'arrange. Ou presque. Pas dispo ? Roooh...
Ça se voit que vous m'avez pas vu avant que j'en entame la descente, vous m'auriez pensé un pied dans la tombe.
Un ange passe. Ainsi qu'une ombre sur mon visage quand je me remémore pourquoi ça va pas fort. Elle s'empare de la bouteille et j'en viens presque à regretter ma proposition, mon affliction rappelant mon addiction. J'ai soif. D'espoir, de boire. J'esquisse un sourire en observant sa descente et me risque à la décrire.
Eh bien, on est loin de votre retenue dévolue à votre grand cru parisien.

La fameuse retenue se ramène au refus de la couverture. Je hausse un sourcil, prêt à lui rappeler qu'il commence à cailler et que sa fierté n'est pas conseillée. Finalement, c'est les épaules que je hausse avant de resserrer les pans de l'édredon autour de moi. Cette nuit, j'ai pas envie de me la jouer galant homme protecteur de ces dames. Tu veux pas que te couvre ? Tant pi pour toi. Tu veux pas que je te ramène ? Tant pi pour toi. J'enfonce le menton dans les replis douillet et y étouffe un rire à la description de mon futur proche, sûrement pas si éloigné de la réalité.
Vous savez ce qu'elle vous dit la catin ? Je suis pas un garçon facile...Petite pause pour me rendre compte de la stupidité de ce que je viens de dire. Enfin, en dehors des heures de travail. Travail que j'ai d'ailleurs mis entre parenthèses.On s'enfonce et on creuse encore. En clair, n'espérez pas que qu'en me raccompagnant, vous aurez droit à mes faveurs et que nous nous livrerons à quelques turpitudes.

Je la regarde avec un je ne sais quoi de plus brillant dans les yeux et lui décoche un sourire en coin. Si je devais être tout à fait honnête, même avec ses apparences de squelette, je nous imagine bien sous la couette à faire des galipettes. En levrette, ce serait chouette. J'élargis mon sourire lorsque son bras se glisse sous le mien et fais en sorte de l'attirer un chouïa vers moi. Oui, j'en veux à Neijin mais c'est pas seulement par vengeance. Elle m'a toujours attiré la K[insérer la suite des lettres de ce nom imprononçable], ne serait-ce qu'avec sa répartie à décorner un cocu, depuis ce premier jour à Paris jusqu'à..
De quoi ?

Retour au maintenant beaucoup moins bandant. Qu'est-ce qui est par quoi ? Sourcils arqués, je la dévisage un bon moment avant de comprendre ce qu'elle attend de moi. Lui indiquer la route. Ah. Le truc c'est que je me suis toujours débrouillé pour ramener les donzelles chez elles, histoire de pouvoir partir quand je voulais. Aussi, j'avais juste à me laisser guider et le matin j'avais assez décuvé pour retrouver la route comme un grand. Je me racle la gorge et sors un bras de la couverture pour désigner vaguement une direction dans le flou du brouillard.
C'est par là. Avec la voix assurée qui va bien.

Je l'entraîne avec moi en essayant laborieusement de reconnaître l'arbre qui m'avait fait penser à une main, logiquement à droite du buisson en forme de poisson.
Et sinon, je peux vous demander ce qui vous angoisse autant à l'idée que je vous raccompagne ? Vous avez peur que Zozo de la laine me flanque une raclée ? Et d'ailleurs, comment il va lui ?
Je tourne la tête pour observer sa réaction et rate, malheureusement pour nous, l'embranchement qui aurait dû nous mener à ma tente. Je rate aussi un arbre que j'aurais reconnu lorsque je me saisis de la bouteille pour en prendre trois grosses lampées.

[Longer tes jambes, immenses
Tout ça mais comme alors si de rien
Et ta démarche, quelle élégance
Si l’on marchait jusqu’à demain*]


Précisons que la fameuse élégance n'est permise que parce qu'à côté, j'ai vraiment une démarche de gros balourd larvaire. Je sais pas où je nous emmène, mais on y va et on se coltine accessoirement un terrain accidenté avec son lot de racines traîtresses et de rochers piégés. Au terme d'une marche qui me paraît très longue mais qui ne l'est en fait pas tant que ça, je nous dégote une tente qui semble correspondre aux critères d'hygiène. Avec l'air confiant du type qui arrive à sa maison, j'entraîne Eldearde avec moi et ouvre un pan de la demeure de toile pour tomber sur un fatras désordonné d'objets non identifiés.

Euh en fait, c'est pas chez moi, c'est chez un copain.
Je la regarde, grimace.
Je serai incapable de retrouver le chemin de ma tente, pour être honnête.
Rame, rame, rameurs, ramez.


*Louise attaque – Si l'on marchait jusqu'à demain

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Bannière réalisée par les grands soins de JD Calyce.
Eldearde

    “C'est pas nous qui marchons pas droit.
      C'est le monde qui va de travers”
    *

A ce stade de l'aventure, il n'est plus grands événements et autres faits qu'Eldearde parvienne à appréhender ou du moins à imprimer aux replis de sa cervelle atrophiée : elle ne voit rien du pseudo-geste stratégique esquissé par le séducteur emmitonné, ne perçoit nulle trace de l'évident amateurisme du guide auto-proclamé, ne pressent pas même les prémisses d'un état de surgélation non-négligeable dont témoigne une chair de poule de tous les diables. Son seul exploit notable est donc celui de rire bêtement aux énoncés sans queue ni tête de son acolyte pompette et d'y répondre de manière toute aussi farfelue, pourtant persuadée de la pertinence du discours soutenu.
Sans vouloir vous vexer, très cher ami, je crois que quand bien même je serais intéressée par quelque acte adultère auquel je répugne et que je condamne bien évidemment de la plus grande des sévérités...enfin, bref, dans le scénario tout théorique et improbable d'une proposition indécente par moi exprimée, je doute fort que vous soyez en état de performer ou de mettre à exécution l'une de ces faveurs dont vous me causez.

Sur les directives aléatoires d'un éclaireur aussi crédible qu'un scout louveteau de quatre piges et demi, le duo mal assorti s'engage sans précipitation dans un enfer de brouillard. Vers où ? Kierkegaard n'en a fichtrement rien à secouer, tant qu'ils vont quelque part. Et si elle devait rester ainsi suspendue au bras ami pour une éternité de randonnée le long d'un raidillon infini, elle n'y trouverait rien à redire, satisfaite de son sort et de l'avenir.
Au risque de froisser deux égos démesurés, ni mon époux ni vous n'y êtes pour rien. Elle n'en dira pas plus, pas avant d'avoir fait mille fois le tour de ce bois, d'avoir bu le reste de sa conscience et de se sentir le cœur trop lourd pour le porter seule entre ses doigts. Zolen est...égal à lui même. Par là j'entends que, bien que partageant sa vie depuis plus de deux ans, je suis dans l'incapacité de vous dire s'il se porte comme un charme ou s'il est au bord du gouffre, l'esprit plein de larmes. Aucune peine ne pointe au timbre flou de la voix qui conserve l'apparente neutralité du constat.

Le pas succède au pas, l'arbre supplante l'arbre, et la ballade nocturne prend des allures d'errance éméchée que rien ne saurait enrayer...si ce n'est cette tente surgie comme par enchantement, étrange bestiole de toile posée entre deux châtaigniers, étendant ses pattes filandreuses garnies de sardines et de piquets.
A l'image de son hôte, longue donzelle soulève d'un bras nonchalant l'un des pans de prélart pour s'offrir le spectacle d'un pouacre bazar tel qu'elle n'en a jamais vu, et ce malgré un quotidien partagé avec le plus désordonné des hurluberlus. Le fumet ambiant, savant mélange de divers fluides corporels, de grasses aisselles et de décomposition avancée, la frappe littéralement d'un tampon dans le nez, ce qui n'empêche pas la malmenée de céder à la plus nerveuse des hilarités, menotte plaquée sur la bouche pour ne point décéder.


Diantre, Ozéra, votre amour du bordel vous suit jusqu'en votre demeure... qu'elle gouaille en enflammant quelques calbombes mangées de cire séchée pour dévoiler, à la faveur d'un halo jaunâtre, l'étendue du carnages exposé. Néanmoins, qu'il s'agisse ou non des appartements privés et dépravés de Niallan, auguste invitée, estimant avoir suffisamment trimardé pour la soirée, se laisse choir, vannée, sur ce qui semble tenir lieu de grabat-mangeoire-décharge-canapé. Une grimace et un couinement de douleur plus tard, l'affalée retire de sous un plaid mité l'olisbos d'ébène qui vient de lui démanteler la colonne en plus d'instaurer le règne de la gêne...et de l'obscène. L'objet est vitement balancé loin, très loin, de ses mains souillées, menottes dont elle ne sait d'ailleurs plus que faire et qu'elle laisse donc piteusement pendouiller.
L'italienne mutique et ce qui vous sert de loustic ne vont pas se demander où vous êtes passé ? Parce que oui, il faut tout de même préciser que l'indigne amie n'est pas franchement à la page.


* La rue Kétanou - Marcher pas droit
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[Blason en construction]
Niallan
Dans l'attente de la tente :

[Let's ride, all night*]

Allons faire un tour toute la nuit, c'est ça l'idée. Vaguement imposée par mon ébriété qui, en plus de m'égarer, ne me permet pas de performer. Même que j'entends « perforer » dans la bouche de la non-intéressée. J'avoue qu'elle m'a perdu mais c'est une belle façon de se prendre un stop. Je me marre sous les replis de la couverture, avale quelques gorgées du liquide ambré, me remets à causer.

Je note que vous avez employé le terme « improbable » et pas « impossible ». Au vu du soin que vous apportez à votre discours, j'imagine que ça a toute son importance. Je peux arrêter de boire si vous voulez.

Je procède à une chorégraphie de sourcils des plus flippantes avant de partir dans un grand éclat de rire.

Non, je déconne. Hors de question que j'arrête de picoler cette nuitée. Sachez toutefois que je dispose d'un large éventail de possibilités pour la mise à exécution de ces faveurs.

Après m'être copieusement désaltéré, je fais preuve de générosité et fais tourner, non pas les serviettes mais la bouteille. Je regrette mon geste quand un silence pesant s'installe. J'ai jamais aimé ça, ça m'ennuie, ça m'angoisse. Alors au début, je suis tendu, au milieu c'est pas mieux mais à la fin ça va bien. Je sais pas dans quel état j'erre, je suis pas en état de gérer mais je suis plus malheureux. Les bienfaits de la randonnée en toute amitié ne sont plus à démontrer. Quand elle daigne enfin me répondre, je sursaute, perturbé par la disparition des bruits de la forêt. Je me reconcentre, fronce les sourcils devant ce que j'entends.

Vous devriez lui demander, après l'avoir fait picoler pendant une randonnée. Ça aide à causer et c'est bon pour la santé.


Dans la tente de ta tante :

On va pas se mentir, tout le monde s'en cogne du vase à moitié cassé que j'ai retrouvé et de la carcasse de poulet qui moisit sous le canapé. Par contre, la rencontre de madame prout-prout et du sextoy moyenâgeux, ça vaut le détour. Hilare, j'observe la chute de l'olisbos et m'en vais le rattraper d'un pan de la couverture. J'ai pas envie de parler de mon amour du bordel ni de mes amours bordéliques. Aussi, tout naturellement s'impose un autre sujet de conversation.

Vous en avez déjà utilisé un vous ?
Je vois bien qu'elle est mal à l'aise, j'insiste pour que se poursuive le règne du malaise. A l'aise Blaise, j'y vais de ma synthèse.
Moi oui. Pas sur moi, certes. Vous vous souvenez de l'éventail de possibilités dont je vous ai parlé ?
Je le porte à hauteur d'yeux et le fais tourner, front plissé par la concentration.
Dans mes souvenirs, celui qu'on a utilisé était un peu plus gros. Je crois que c'était la même couleur par contre.
J'arrête de faire mumuse avec l'objet de toutes passions, la regarde avec attention et l'achève d'une dernière question.
A votre avis, c'est parce que la légende raconte que les noirs ont une tuyauterie plus étendue que la moyenne ?

Je souris.
Selon toute probabilité, elle devrait être assez perturbée pour que je lui confie mon instabilité sans être jugé.

J'ai quitté l'italienne pour une normande, j'aime bien les extrêmes. Et puis je l'aime elle, Neijin, peut-être même plus que la bibine. Pour le loustic, vous pourriez être plus précise ? C'est que j'ai la paternité multiple.


Ça me tente,je tente :

En cette nuit de nuit de janvier, j'arrive pas à pioncer. Crispé, je contemple le corps de l'aimée aux paupières closes, la gorge serrée et l'estomac noué. On s'était dit oui pour le meilleur et pour le pire, on s'est épuisé dans les répétions de la seconde partie. On se quitte avant de se détruire. Et ça fait mal, putain. Ça fait tellement mal. J'ai besoin de parler à quelqu'un qui a une vie encore plus pourrie que la mienne. Comme une évidence, s'impose le visage fantomatique d'Eldearde dans une tente paumée en pleine forêt. Quelques minutes après, le vélin est expédié et la neigée à nouveau contemplée.

Citation:
De cocu à cocue,

J'ai besoin de discuter à bâtons rompus.
On a rompu, ça va plus, je suis foutu.

Si Zozo de la laine vous donne pas trop de fil à retordre, ça vous dirait de vous perdre en forêt et de refaire le monde qui va de travers ?

J'embrasse votre pieuse joue de ma bouche pécheresse,

Niallan.


Faites que demain soit loin, faites qu'elle soit dans le coin.


*Paroles Parov Stelar – All night

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Bannière réalisée par les grands soins de JD Calyce.
Eldearde

    “We took a walk to the summit at night, you and I
      To burn a hole in the old grip of the familiar, you and I
      And the dark was opening wide, do or die
      Under a mask of a million ruling eyes”
    *

S'il est une chose pour laquelle Niallan fait montre de beaucoup de talent, c'est bien pour cultiver les moments gênants. Il les arrose de questions libidineuses, les rempote de quelques expressions licencieuses et éclaire le tout d'une bouille à faire défaillir la gueuse. Pour sûr, le bougre a la main verte lorsqu'il s'agit de faire éclore le rose aux joues des donzelles candides et souvent pompettes. Mais, certes raisonnablement avinée, Kierkegaard n'en demeure pas moins épouse Zolen, ce qui suppose un certain degré d'immunité lorsque le parler se fait grivois et que le lubrique s'invite au dîner : ses hautes pommettes conserveront leur teinte habituelle de lait caillé.

Mais aussi et surtout, il y a cette partie d'elle que l'angoisse déchire, ce monstre de souvenirs qui lacère tout un versant de son esprit, comme on déchire des pans de tapisserie. Parfois, à la faveur d'une seconde délétère, sa conscience vacillante éclaire cette portion d'elle-même, la met sur le devant de la scène, et la bête exulte de cris de détresse et d'épouvante, avec pour seul public celui de son âme horrifiée. C'est brusque et bref. Imprévisible. Comme l'on tourne la page d'un bréviaire ou que l'on parie sur la facette d'un écu continuellement balancé dans les airs.

Pile.
Le sourire qu'elle esquisse n'est pas faux ; il est juste lointain. Reflet silencieux d'un trait de lumière perçant l'ombre de son visage cireux.

- Qu'entends-je ? Vous ne vous assurez pas de la qualité des accessoires usités en les testant préalablement sur votre propre personne ? Mais quel manque de professionnalisme ! Et puis, vous savez, faire appel à l'argument ethnique est chose bien mesquine pour justifier de l'humble taille de votre engin.
Face.
L'effroi, suivant un réseau sui generis de voies internes, gangrène studieusement le corps trop long mis à sa disposition. Trouvant sa source au plexus, il court, il s'éparpille, impatient, en un entrelacs d'affluents. A la manière d'un sonneur éperdu, il fait battre le cœur à bâtons rompus. Il strangule le cou délié. Il boit, à même les lèvres, ce qui lui reste d'air, d'un baiser mortifère. Il fait crépiter la peur aux extrémités exsangues de ses mains ; il y fiche mille petits aiguillons invisibles et indistincts. Il pèse sur son estomac vidé et le gave d'anxiété à l'en faire exploser.
Niallan continue de parler. De lui, enfin. Mais elle ne perçoit de son discours qu'un babillage étouffé.


- Pardonnez...
Hâtivement extraite de l'abri, elle vomit sa bile sur le noir de la nuit. Sous sa paume, elle devine l'épiderme raboteux d'un feuillu et s'excuse auprès de lui.
Lorsqu'elle soulève de nouveau le pan de toile, Niallan a commencé à effectuer les gestes savants, cette pantomime thaumaturge, cette cérémonie de l'apaisement en mouvements. L'aiguille est déjà plantée dans le chandoo que contient la coupelle ; il a compris et exécute le rituel pour elle. La flamme effilée, captive de la lampe au paturon de laiton, dilate la larme d'opium, la gorge de feu et de vice. Kierkegaard n'a jamais su faire, éternelle spectatrice, inutile témoin du doigté à la fois dépravé et éblouissant de ses pairs. Façonnée à ses bords, la boulette carmélite est chargée, par une brusque torsion, sur le fourneau hexagonal en grès beige signé. La pipe d'Ozéra est d'une rare élégance : de bambou patiné, montée d'une selle en baitong ajouré, gravée de nuages et de svastikas en pleine chevauchée lyrique, elle exhibe outrancièrement quatre cabochons de jade et d'agate ainsi qu'un suçoir d'ivoire atypique.


Quand il la lui tend, lui laissant l'honneur de la première bouffée, Eldearde est un instant projetée aux agrestes contrées où l'on confectionne objets si raffinés.
- Vous êtes un perpétuel amoureux, Niallan. Comment est-elle, cette fois ?
A même le sol que les nippes constellent, haridelle s'étend avec la délicate mélodie de la soie que l'on froisse, celle que l'on écoute plus volontiers au creux d'un boudoir cotonneux que sous le prélart d'un chapiteau loqueteux.
- J'évoquais votre petite dernière. Anna-Umbrella. Ou est-ce Anna-Paella ? Franchement, "Anna" aurait été largement suffisant.
Le coude droit clouant à l'humus une guenille puante, elle rapproche le fourneau de la lampe, juste assez pour ne pas carboniser son contenu et se promettre néanmoins une aspiration munificente.
Zolen quitte le train en marche et, pour une fois, s'occupe d'autre chose que de la vie, de la mort.**




[MANY MONTHS LATER]

L'agitation maladive d'une gambette que rien n'arrête dévoile toute la nervosité de la grande perche dégingandée.
C'est que janvier ne lui réussit guère.
C'est que janvier est un mois damné.
La seule pensée d'un coche pressé, creusant dans la boue scintillante un duo d'ornières parallèles et infinies, coince entre sa glotte et ses cordes vocales une désespoir si absolu que rien ne peut en être dit. Pourtant, elle ne saurait demeurer là, sur l'assise de cette chaise vieillie : elle exaspère, elle ennuie. Arry s'est fait la malle ; Lucie s'agace de toute son envahissante gestuelle d'amie inquiète & fidèle ; Dédain, s'il avait connaissance de ses projets, l'aiderait à boucler ses paquets.


Citation:

      Nian,

    Le zozio Zozo a migré jusqu'en terre limousine et ne volette donc pas au même ciel que moi.
    J'ai fait mon nid en Bourgogne.
    J'ai froid.

    Où qu'vous êtes encore fourré ? Géographiquement parlant hein ? Je ne cause pas du con que vous êtes en train d'honorer. En passant, c'est sans doute le pire moyen de se consoler.

    Paniquez pas.
    Stay calm & wait for Kierkegaard.

    E.



* Agnès Obel - Familiar
** "Fumer l'opium, c'est quitter le train en marche ; c'est s'occuper d'autre chose que de la vie, de la mort." -Jean Cocteau ; Opium (1930)
N.B. Post rédigé avec l'aide de l'article suivant : "La « divine drogue » : l’art de fumer l’opium et son impact en Occident au tournant des XIXe et XXe siècles" par Ami-Jacques Rapin.

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