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[RP ] That woman deserves her revenge and we deserve to die.

Tigist
*Cette femme mérite sa vengeance et nous méritons de mourir.
Quentin Tarantino - Kill Bill. Vol. 2.



« If you believe and deceive common sense says shouldn't receive
Let me take you down the corridors of my life
And when you walk, do you walk to your preference?
No need to answer till I take further evidence »*

Tricky – Hell is round the corner.
*
Si tu crois et trompes ton prochain, la morale veut que tu sois puni
Laisse moi t'emmener dans les corridors de ma vie
Dis moi, lorsque tu marches, marches tu vers tes désirs ?
Je n'attends pas de réponse avant de trouver une preuve plus évidente.





    Cela fait un mois et demi. Tu te rends compte Tigist ? Un mois et demi, tu les aurais sentis bouger en ce moment même, tu aurais vu l'air curieux de Maria se pencher sur ta panse remplie, ses questions et ses interrogations à leur sujet.
    Les rênes de la monture sont tirées d'un coup un peu sec qui la fait renâcler et la main en guise de réconfort tapote l'encolure. Il est à peine midi et déjà le soleil écrase le Limousin de sa chaleur, mais l'éthiopienne s'en fout. Elle a connu plus chaud, elle a vu le soleil de plus près encore.


    « Je ne suis pas venue apporter le Lumière au royaume de Saba, wendim. Je vais tuer les fils de putes qui ont tué mes enfants. »

    Il n'y a plus de capuche sur la face noire, les tresses s'agitent en guise d'étendard quand elle descend de l'animal pour parcourir les rues de Rochechouart. Judicael a arraché de son sein les fils qu'elle portait et Tigist s'est défait de ses aînés pour avoir le champ libre, à eux deux, ils ont éteint la parcelle d'amour qui subsistait dans l'âme noire.
    Le détachement qui traverse la foule attire les regards et comment pourrait-il en être autrement ? Le regard chargé de haine de Corleone couplé à sa beauté doit faire défaillir les pucelles, l'air de mendiante de Lili et ses bêtes menant la route fait frémir les matrones, la face noire et la haute stature du mansaring derrière inquiète les mères et les pères, tout cela s'ajoute à l'air déterminé de l'éthiopienne, rendant la présence de la Massari tout à fait surprenante en dépit de sa ferveur. Gelada a cédé la place au Kebero des plateaux, elle ne se contente plus de se cacher et de craindre les prédateurs, non. La meute disparate chasse le prédateur.

    L'arbalète à la main, elle se tourne vers ses acolytes, cherchant dans les expressions de Gabriele, Lenù, Lili ou Kelhyos ce quelque chose qui pourrait indiquer qu'ils ont vu celui qu'il cherche ou quelque chose le menant à lui.
    L'ambre avise un regard peu amène devant une taverne, et Tigist avance vers l'homme qui la dévisage sans vergogne et non sans haine. Ce que la peur fait faire des fois.. On tue tant de gens sur le seul motif de la différence. L'éthiopienne s'approche près de lui, à le faire reculer, arbalète pointée en avant, faisant frémir l'assistance et douter les gens quant à la conclusion de leur venue dans la ville.

    « As-tu vu deux jumeaux roux par ici ? »

    Les regards se baissent de part et d'autres, qui voudrait dénoncer les jumeaux meurtriers ? L'homme renâcle et crache au pied de l'éthiopienne lui arrachant un haussement de sourcil et un sourire narquois. Alors les lèvres s'approchent plus près de l'homme, à sentir son haleine avinée sur sa face.

     « Tu sais ce qu'ils sont capables de faire mais tu ne sais pas de quoi je suis capable. Sois prudent. »

    Et sans plus d'hésitation, la femme fait demi-tour pour rejoindre sa monture.

    « Si l'un d'entre vous les croise, dites-leur que Tigist de Nerra les cherche. Nous avons une affaire en souffrance eux et moi. Et si certains d'entre vous n'en peuvent plus de devoir accepter de voir souffrir leurs amis, de craindre que leurs filles ou leurs femmes soient violées, venez. »

    Pas Tigist Corleone, pas la sage épouse de l'italien, pas la femme douce et maternelle que Gabriele a chéri. En sortant ses rejetons morts du sein de l'éthiopienne, en la ramenant d'entre les morts, Corleone a donné vie à celle qu'Eikorc n'avait jamais su créer.
    Car dans l'ambre, il n'y a plus de douceur ou de tendresse. Et s'approchant de Gabriele, elle pose la main sur son bras.


    « Ils sortiront. Ils ont trop d'orgueil pour se laisser traquer comme des lapins. »

    Sans pitié, sans scrupule, sans compassion, sans indulgence, pas sans intelligence. Et la haine qui coule dans les veines de l'éthiopienne est alimenté par un brasier qui ne s'éteindra pas de si tôt.
    Dans la poitrine, ça cogne lentement avec force, un rythme aliénant. Les occidentaux ont oublié jusqu'à ce son et Kelhyos seul pourrait comprendre : à leurs oreilles et dans leurs âmes tapent les tambours de guerre.


« The constant struggle ensures my insanity
Passing the ignorance ensures the struggle for my family
We're hungry beware of our appetite
Distant drums bring the news of a kill tonight
The kill which I share with my passengers
We take our fill, take our fill, take our fill »*

Tricky – Hell is round the corner.
*
La lutte constante  assure ma folie
Le dépassement de l'ignorance assure la luttepour ma famille
Nous avons faim, prends garde de notre appétit
Les tambours éloignés apportent l'écho d'une mise à mort ce soir
La mise à mort que je partage avec mes passagers
Nous prenons notre dose, prenons notre dose, prenons notre dose.


_________________
Kelhyos
[ Quand on se prend un coup en pleine face... ]

C'est ce qu'il lui est arrivé. Plus d'un mois. Voir deux. Il n'y croyait pour ainsi dire plus. Limoges. Après le départ de Genève, ou il avait eu des informations sur une femme noire, il avait tout laissé ce qu'il construisait là bas pour une chimère. Et pourtant, il en était certain. Il la trouverait. Il la rencontrerait.

Et un soir, contre toute attente, une ombre noire comme lui a franchi la porte de la taverne ou il discutait tranquillement avec une rousse. Il s'était mis debout sans un mot. Ne pouvant rien dire. Ne voyant qu'elle. Ne voyant pas l'arbalète qui se dressait et le doit sur la gâche prêt à l’actionner. Seule la rousse avait bougé le petit doigt. Enfin la main en direction d'une dague planquée.

Là devant lui, une Sœur! Son cœur s'était arrêté de battre. Ses narines s'ouvraient tandis qu'il tentait de retrouver son souffle perdu comme s'il avait couru dans la savane comme durant sa jeunesse après une antilope. Il se retint de la prendre dans ses bras et de la serrer enfin contre lui. Puis, elle n'avait pas un regard amical au début. Elle se détendit quelques minutes plus tard après lui avoir parlé en sa langue. Quelques mots lui revinrent, mais il ne comprit pas tout. Cela faisait si longtemps....


[ ... La balade commençait... ]

Il suivait. Dépassant quelque peu la foule qui s'ouvrait devant eux. Devant elle. Leur groupe ne passait pas inaperçu, c’était une certitude. Lui qui avait toujours été dans l'ombre, passait à la lumière. Il n'en avait cure. Il avait choisi de la suivre quand elle lui avait demandé de l'aider à se venger. Il savait ce que cela impliquait. Leurs regards se trouvèrent et il lui fit non de la tête.

Elle avise un homme. Ils se mettent derrière elle en arc pour la protéger. Elle interroge. Menace. Il écoute sans bruit. Les yeux à l'affut de la moindre menace. Il part en lui même et se revoit protégeant ainsi une autre femme. Une autre Princesse. La fumée. Le bruit des bombardes. La fureur des hommes et des femmes sur le champ de bataille. L'odeur de la mort. Le gout acre du sang dans sa bouche....

Elle tournait les talons et remontait en selle. Ils suivirent. Ton était donné de leur trac. Ils ne s'arrêteraient plus avant de les avoir trouvés.
Il s'en fichait. Cela ou autre chose. Tant qu'ils étaient ensemble pour un temps. Le temps de se connaitre. Le temps de s'apprécier. Le temps d'être Frère et Sœur.
Judicael.
I been movin' calm, don't start no trouble with me
Tryna keep it peaceful is a struggle for me
Don’t pull up at 6 AM to cuddle with me
You know how I like it when you lovin' on me
I don’t wanna die for them to miss me
Guess I see the things that they wishin' on me
Hope I got some brothers that outlive me
They gon' tell the story, sh*t was different with me


J'ai été calme, ne commence pas à me chercher des noises
Essayer de garder mon calme est un combat pour moi
Ne passe pas à 6 heures du mat pour me faire des câlins
Tu sais combien j'aime ça quand tu m'aimes
Je ne veux pas mourir pour pouvoir leur manquer
Je crois voir les choses qu'ils souhaitent pour moi
J'espère avoir des frères qui me survivront
Ils raconteront l'histoire, différemment de moi

Drake - God's Plan




La vengeance appelle la vengeance.
Et le cercle infini des représailles sera ta bague à l'annulaire,
ou la corde à ton cou.


Le roux hocha le menton d'un air pensif. Elle le cherchait. Il l'avait su à peine quitté l'Anjou, de la bouche d'une de ces alliées de l'ombre et les détails de la délation avaient forcément de quoi surprendre. Tigist avait survécu. Si Judicael savait combien les mauvaises herbes avaient du mal à crever, il y vit un peu de magie noire, une de celle que les siens sans doute, aux confins des continents lointains, faisaient autour de grands feux au rythme des tambours. Ainsi, elle avait pris la route sur ses talons, haine en bandoulière, quelques angevins la suivant, les derniers qu'elle n'avait pas trahis sans doute. Car aucun clan à sa connaissance n'avait encore de l'estime pour la Traîtresse. Tigist s'accrochait à ses dernières alliances. Et si l'ardoise avait été soldée, l'honneur vengé, elle avait décidé qu'il n'en était pas ainsi.

    Tigist, tu es bien folle de déboucler la boucle... Nous aurions pu en rester là. Comptes étaient soldés.


Il se leva d'un mouvement ample, glissant dans la patte du petit rapporteur un écu ensommeillé pour les nouvelles. Elle le cherchait. Les verts se tournèrent sur les corps de la blonde angevine et de la blanche au gros ventre qui dormaient encore à ses côtés. Un homme aussi reposait inerte plus loin, maladroitement calé entre un coffre et les bords de la couche, endormi dague en main. L'auberge était silencieuse, il était déjà tard, le soleil proche du zénith au dehors. Renard ne dormait jamais seul. Aux miracles, personne ne dormait jamais seul. Chaleur nécessaire. Cohésion. Nécessité vitale. Tanière ouverte.

Toute la ville en parlait ce matin. Noire n'était pas difficile à localiser. Établie dans un coin de la ville où les siens avaient fait fuir les villageois de passage. Il plongea une main mouchetée de brûlures roses dans l'eau dormante du baquet. S'appuya un peu sur le rebord, laissant couler l'eau sur sa gorge. Observa dehors par le mince interstice qui s'effilait entre le papier gras et l'ouverture de la fenêtre. Eté écrasait la ville de sa chaleur.


J'ai rendez-vous. Restez-là.

Dit-il au hasard du sommeil de sa compagnie nocturne, qui peinait à s'éveiller. Il passa une chemise qui traînait au sol, couvrant les stigmates vieillies du fouet. Passa une main sur son visage humide pour en lisser un peu au front les cheveux rouilles qui recommençaient à pousser aux épaules.

Lorsqu'il descendit et traversa la grande salle ou quelques uns des siens buvaient déjà leur second ou troisième alcool, seule la senestre s'éleva en guise de salut. Lèvres restèrent closes. Nul besoin d'appeler, les autres sauraient bien assez vite ce qui se tramait. Renard était, en bon meneur, trop fier pour se faire escorter à un rendez-vous galant. La noire, à force d'être sa meilleure ennemie, était devenue aussi lisible qu'il l'était pour elle. Peut être trop. Peut-être plus intimement que s'ils avaient frayé ensemble. Il est étrange de sentir plus de vérité dans les guerres que dans les paix. Plus de promesses tenues dans l'affrontement que dans le pacifisme.

Le maître du quartier Pourpre sortit de sa tanière le menton légèrement haut. Les yeux plissés sous la luminosité corrosive du soleil. Pipe fumante dans une main. Dague dans l'autre. Celle-là même qui avait ouvert le ventre de la noire quelques mois auparavant. Lèvres minces recrachant une épaisse fumée étourdissante dans la barbe jachère. Calmait-elle quelque chose? Adoucissait-elle la marche vers le destin? Roux se payait l'audace de venir seul et largement désarmé. Tigist le savait. Judicael ne résisterait pas à une invitation avec le diable.



Bad things
It's a lot of bad things
That they wishin'
and wishin'
and wishin'
and wishin'
They wishin' on me


De mauvaises choses
C'est beaucoup de mauvaises choses
Qu'ils me souhaitent,
qu'ils me souhaitent,
qu'ils me souhaitent,
qu'ils me souhaitent
Qu'ils me souhaitent

_________________

Recueil-galerie d'avatar
Marzina
[Vivre ou ne pas vivre
Pour cette passion qui nous dévore
Ou l’on peut voir passer la mort
Puisqu’elle fait partie du décor]


Comment aurait-elle pu penser à un moment que les choses finiraient ainsi?
C'était le propre de sa vie finalement, de basculer en un clignement d'yeux, comme un jeu pervers entre les mains de l'enfant qu'elle n'avait jamais cessé d'être. Pourquoi donc avait-elle donné cette information à Tigist, juste une direction, pour une somme aussi modique? 30 écus. Parce que Marzina se fout bien des autres, à moins de leur porter une quelconque affection. Parce que la Bretonne s'est recouvert d'un vernis angevin avec les années, et que les écus, même si peu nombreux, avaient fait briller ses yeux. Alors pourquoi, ça l'avait travaillée ensuite? Pour beaucoup Blondie est une énigme, et elle-même ne fait pas exception. Elle ne sait pas pourquoi mais lettre était partie vers Renard, tardivement sûrement, le temps qu'elle prenne la décision. La Blonde voulait rester neutre, écrire au Renard revenait à rétablir un certain équilibre comme savait si bien le faire la Nature qu'elle admirait.
Elle avait pensé que son rôle s'arrêterait là.

Mais comme toujours, les éléments sont liés, tirez sur l'un et c'est tout un chapelet qui vient à sa suite. Blondie perd soudain pied. Son univers s'écroule en une nuit, une nuit angoissante où à ses yeux elle perd tout, y compris le goût de vivre. Elle l'avait pressenti, mais ne l'avait pas vu venir pour autant. Alors elle tombe à genoux, comme rarement dans sa vie. Dans son malheur, c'est au Renard qu'elle écrit, elle-même ne sait pas pourquoi, l'implore de l'achever. Il refuse mais quelque chose l'appelle, la Blonde croit au destin, elle le rejoint. Pour ne pas être seule, pour ne pas être jugée, pour trancher net avec son passé. L'Altesse se retrouve au milieu des Rats, s'y sent bien. Qui l'eût cru?
Les jours passent, les liens se créent, se nouent, muent au fil du temps. Marzina guérit doucement, remange, rit même parfois. Le cœur d'artichaut s'attache, dénoue des secrets, fait des paris, et des promesses. Loyauté de la Blonde s'attache à celui qui fût là quand elle était à terre, elle décide de veiller sur son sommeil. Avoue sa trahison.
Elle protégerait Louarn* la nuit, son rôle s'arrêterait là.

Le voyage se poursuit, l'objectif en vue. Les nuits sont calmes sur le feu de camp, Blondie se paie même le luxe d'un peu trop de chanvre avec l'Italien, une bulle de paix suspendue dans le temps. Jusqu'à la livraison. Ce sac empli de mains d'enfants dont l'odeur reconnaissable entre mille vient les tendre brusquement. Et la Blonde qui se retrouve avec la lettre entre les mains, avec l'horrible mission de lire à haute voix ce que sont censées représenter les petites mains. Ces mains d'enfants. Comme son enfant, sa dernière, cette chétive créature de cinq mois laissée derrière elle. Loeiza.
Soudain, les pièces du puzzle s'imbriquent. La lettre de la Blanche, dont elle s'est fait l'écho pour le Renard, qui apprend à Blondie la participation de celle qu'elle affectionne parmi les rangs de la Noire. Le père de Loeiza, compagnon d'armes d'Yseult...L'esprit s'emballe, la Blonde refuse d'y croire. Une fois de plus, elle écrit à l'Anglais, les mots s'étirent sur le papier dans la précipitation.


Marzina a écrit:
Ecris-moi.
J'ai besoin de savoir qu'ils ne vont pas te tuer avec elles.
J'ai besoin de savoir que tu ne te trouveras pas devant ma lame.


Si Renard est protecteur avec elle, Blondie l'est tout autant avec Pearl. Elle se sent responsable de l'enfant à qui elle a enseigné, jusque dans l'intimité. Celui qu'elle a transformé en homme, puis en père. Alors quand réponse enfin est reçue et qu'elle l'ouvre avec les mains tremblantes, que les mots viennent frapper la rétine, la lettre semble lui brûler les doigts. Elle la lâche, elle hurle. Elle n'a pas voulu y croire, jusqu'au bout elle s'était imaginé qu'il n'en serait pas. Les larmes qu'elle n'a plus versé depuis la mort de son père, coulent à nouveau. De rage, d'impuissance. D'un nouveau coup porté par le destin. Cette fois, elle le sait, elle ne fera pas changer d'avis l'Anglais buté.

[Être un jour, une nuit
Être en vie face à soi-même
Renoncer au grand amour
Danser sans arrêt, toujours
Mais y a rien qui dure.
]


Pearl a écrit:
Tu as sans doute raison, je ne changerai jamais. Après tout, si par malheur je croisais ta lame, ça serait une bonne chose. Je préfère finir ainsi qu'au fond d'un port, ou dans les latrines d'un bouge.


Renard frappé par la livraison, une fois défoulé revient pour la trouver abattue. Elle le regarde s'agiter, ivre de colère, quand seule la tristesse l'habite. Elle l'écoute lui refuser sa compassion, quand elle n'est qu'inquiétude pour un autre. Elle l'entend alors qu'il intime de regarder demain plutôt qu'hier, que la Noire cherchera tous à les atteindre.
Et Blondie prend la décision de resserrer les rangs, parce qu'aujourd'hui la place qu'elle occupe parmi eux est la chose la plus précieuse qu'elle possède.


"C'est une brindille, il est jeune, il est père, il est stupide, et il va mourir. Elle me l'a pris. Alors je n'hésiterai pas."

Dans ses yeux, elle croit lire de la déception et de l'incrédulité. Qu'importe, la Blonde ne revient pas sur une décision.
Son rôle était déjà écrit.

Alors ce matin là quand il se lève, elle ne dort pas. Depuis la lettre de Pearl, elle ne dort plus vraiment. Elle en serait, et elle tiendrait toutes ses promesses. Elle protégerait Louarn. Et si quelqu'un devait achever l'Anglais, ce serait elle. Le médecin a depuis longtemps accepté son sort, la Mort trottine à ses côtés, achever est une mission qui lui incombe. Et même s'il est contre ses principes de tuer les êtres aimés qui ont encore une longue vie devant eux, tant pis, la Bretangevine plie. Elle a renoncé à l'amour, à quoi bon les garder auprès d'elle? S'il le faut elle les tuerait tous pour les protéger d'eux-même, pour mettre fin à un cycle rongé par la gangrène et démarrer un nouveau cycle de vie.
Blondie est un paradoxe.

Il se lève, et elle pressent. Chez la Blonde, tout est intuition. La tension est palpable, elle pourrait presque la toucher. C'est aujourd'hui. Le cauchemar débuté le soir de la lettre s'achèverait ce jour, la délivrerait. Le corps fluet se glisse hors du lit, range la dague qui ne la quitte plus. Besace est attrapée, Blondie quitte la pièce sans un bruit, refermant la porte derrière elle.


[Vivre ou ne pas vivre
Oh mon amour, ma raison
A l’affiche il y a mon nom
Comment dire oui, comment dire non?]


___________________
Louarn= Renard
Paroles: Vivre ou ne pas vivre - Marc Lavoine

_________________
Rose
Si à un moment ça lui a foutu le sourire aux lèvres, désormais ça la gonfle au plus haut niveau. Pas l'ombre d'une expression, pas le moindre mouvement de sourcil, pourtant, à l’intérieur, un truc se met à bouillir, comme une toute petite épine dans le pied qui ne fait pas mal mais qui, à force, commence à déranger. Du coup, comme pour une épine, faut prendre quelques minutes d'un temps souvent précieux, pour l'enlever, nettoyer l'éraflure pour pas qu'elle s'infecte, pour l'oublier définitivement.

Quelques semaines avant, un fait divers. Un truc sans importance. Un petit jeu pour répondre bêtement à un idiot. Ouais, faut le dire, elle n'a pas souvent d’estime pour les gens, sachant pertinemment qu'ils n'ont aucun intérêt pour la plupart du temps, elle ne s'arrête pas sur eux qu'elle considère comme sans importance. Proches ou non, s'ils ne sont pas des siens, ils ne sont rien. Même pas une question de principe, c'est juste comme ça, elle est détachée, indifférente.

Yseult se pointe pour une info.


J'ai reçu une missive de 'Judicael, semble croire qu'on escorte une Noire nommée Tigist".

L’intérêt est piqué, pas à vif, on s'en cogne, mais puisqu'on a rien d'autre à faire, elle s'informe..

Ce nom me parle ...C'est pas le type qui est venu demander de l'aide à l'Anjou avant d'abandonner son équipe en Champagne pour aller se planquer chez nous ?

Même si elle a une mémoire un peu décousue, c'est bien le bonhomme en personne. Et évidemment, Rose classe les gens par ordre d’intérêt. Celui là n'en a aucun pour elle, surtout sachant qu'il n'est pas fiable. Elle hausse les épaules avec un désintérêt au niveau qu'elle porte à l'information.

Et la fille, c'est qui ?

Tigist. Ça ne lui dit rien mais à lire le courrier, la nana en question a dut bien le faire chier pour qu'il en ai autant après elle.

Il n'en faut pas plus à la brune pour sourire à sa complice qui déjà se frotte les mains.


Dis lui que ouais, on l'escorte. Ça l'occupera un moment et autant ça le foutra sur une mauvaise piste.

Fin de l'histoire sans intérêt, quelques petites minutes à se foutre de la gueule de Judicael puis plus rien, plus personne n'y pense, aucun intérêt, ils ont des projets tout autre que de s'occuper de ce genre de fouines.

Yseult répond, elle s'en amuse. Puis continue ainsi leur périple qui n'a guère plus d'importance que le reste à leurs yeux. Pas besoin d'en faire toute une histoire.... Sauf que ...


Rose ?

Mhm ...?


J'ai reçu un courrier étrange, de Marzina...


Là c'est surprenant, elle ne savait même pas que la Blanche connaissait Marzina autre que de vue. La femme de son ami avait toujours été à ses yeux quelqu'un de discret et de fiable, jusqu'au jour où ... La vie aidant, la vie ou la mort, d'ailleurs, la blonde avait changé. Non. Peut être pas changé en fait, comment le savoir en la connaissant si peu. Non, pas changé. La vie aidant, elle s'était révélée. Si au départ Rose en avait eu bien rien à foutre de ses sauts d'humeur et autres sauteries, lorsqu'elle avait débaucher Pearl pour en faire son amant et ensuite l'abandonner au profit d'un autre, elle n'aurai eu aucun à priori sur elle, mais dés qu'on touche à son équipe, un truc se met en place en elle et on devient inévitablement "persona non grata" à ses yeux. Marzina signe donc à son insu un pacte de non confiance avec Rose. Fin de la collaboration.

Pourtant, au delà de l'indifférence qu'elle lui porte, la voilà revenir, à des dizaines de lieues de chez elles, sur le devant de la scène.


J'suis pas la seule à avoir reçue une missive de Marzina.
Pearl, aussi.
Et de lui donner la lettre que le jeune homme lui a demandé de remettre à Rose.

Lecture ...




[bla bla bla ...] "J'espère que tu n'as suivi ni la Blanche Yseult ni la Noire Tigist, que tu es loin de la Savoie,(...) .Ecris-moi.J'ai besoin de savoir qu'ils ne vont pas te tuer avec elles. J'ai besoin de savoir... que tu ne te trouveras pas devant ma lame.

Marzina"


Semblerait qu'elle cherche à savoir où on est. J'pense qu'il croit toujours qu'on escorte la Noire Tigist.

Entre rire et se mettre en colère, son cœur balance. A quel moment avait on sollicité Marzina pour s'occuper de leurs affaires ? Quand lui avait on demandé son avis ? Madame, maintenant que tout le monde lui tournait le dos, pensait peut être qu'elle allait pouvoir menacer indirectement son équipe sans en payer les pots cassés ? Elle commençait à clairement lui courir sur le haricot la blonde... Et Rose allait devoir le lui faire savoir.

Mhm... Elle manque de discernement décidément et pas que ... Sans doute un besoin d'exister, elle se raccroche à n'importe quoi pour ne pas glisser complétement dans la folie... En attendant, elle me déçoit. Une intox et elle écoute les ragots pour en faire sa vérité. Dommage. J'ai vraiment cru qu'elle était pas du genre à écouter des le premier crétin qui passe. Et puis, c'est qui, "les rats" ?. Quoi qu'il en soit, ne sois pas inquiète, c'est pas avec leur bite, leur couteau et leurs envies qu'ils tueront qui que ce soit...

Yseult ? Tu m'autorises à répondre à Marzina ? C'est comment déjà le nom de la femme qu'ils traquent ?


S'en suit une discussion peu constructive où les deux femmes se moquent de la naïveté, rient d'avoir, juste pour se marrer, imaginé des alliances et surtout que d'autres les aient cru et répétés. Putain, que c'était facile de faire tourner en bourriques les gens, aussi inconnus soient ils.

Peu importait le fond après tout, mais la forme lui déplaisait. Entre ronronner de la merde à Yseult et faire style de s’inquiéter pour Pearl pour lui soutirer des informations, Rose trouvait la blonde fourbe, sachant qu'à un moment donné ils avaient tous été dans le même camps. Bref ...

Elle prit son temps pour répondre donc à l'ex femme de Finn...




Marzina.

Il m'a été dit que tu aurais imaginé qu'on puisse tuer mon équipe pour avoir escorter une femme, Tigist ...

Je t'avoue, qu'au delà que j'en ai un peu marre d'entendre parler de toi, que je suis déçue par ton manque de discernement et pire... de tes choix débiles. Pourquoi débiles ? Et bien simplement que tu préfères faire confiance à un inconnu et d'écouter les merdes qu'il a à te raconter au lieu de prendre la peine de vérifier la véracité de ces infos auprès des personnes concernées. Ensuite, tu as, si je comprends bien, l'intention de t'en prendre à des membres de mon équipe ?
Non mais sans rire, à quel moment tu es devenue aussi stupide ? A quel moment as tu assez vrillé pour t'en prendre à des angevins qui ont combattus à tes côtés ? Non, ne prend pas la peine de répondre à ces questions... enfin, pose toi les à toi même mais moi je me moque bien de la réponse, tu n'as, à mes yeux, aucune importance.
En est il qu'autant sur le fond que sur la forme, je trouve tes procédés assez vicieux, stupides puisque sans fondement, mais vicieux à jouer les farouches pour arriver à tes fins.
Bref, en un mot, nous n'avons aucune espèce d'idée de qui est la femme que tu pourchasses, nous n'en avons jamais entendu parler. Cela dit, puisque ton nouveau jouet et toi avez prit la peine de nous mêler à ça, je vais me faire un devoir de contacter cette nana et lui proposer tout simplement notre aide. Ouais, même si je n'ai aucune idée de la teneur de vos différents, je crois que vous méritez bien ça, Judicael et toi.

Je crois avoir fait le tour de la question et espère ne plus avoir à entendre parler de toi et tes frasques vicelardes...

Ha, oui, une dernière chose ... même si elle viendra sans aucun problème en face de toi pour te défier au besoin, je te rappelle que Yseult fait partie de mon équipe et qu'elle n'est pas seule. C'est pas à une personne que tu viens de t'en prendre en faisant croire que sa vie est en danger, mais à nous tous...

Rose C.




Le courrier n'est même pas relu, peu importe la forme tant que le fond est clair. Elle se doute bien, pour l'avoir déjà lu, que la blonde va monter sur ses grands chevaux ou feindre l'incompréhension mais peu importe, il fallait que les choses soient dites. Si Marzina est arrivée à mettre le merdier chez les Orpilleurs, il n'était pas question pour Rose de la laisser foutre le bordel au Clair Obscur...

Tout pourrait se terminer ainsi sauf que ... désormais, sa curiosité la pousse à vouloir savoir qui est cette Tigist....

_________________
Samael.
[Genève, dans son bain]

La patte goupil caresse, écrase les gouttelettes sur la blafarde joue de sa Petite. L'heure est à la détente, à la quiétude. Le couple improbable se délasse dans un bain aux herbes parfumées que grâce au fruit de leur larcin, ils avaient pu se payer, dans cette chambre d'auberge plutôt bourgeoise. Les longs doigts du roux s'amusent à titiller les bourgeons d'une poitrine menue et délicate tandis que la pointe de la langue se promène le long d'un lobe, susurrant à l'esgourde féminine, non pas la promesse d'un monde meilleur ou d'un château en Espagne, mais une église cramée avec le curé au milieu.

Quand je vois des têtes à claquer
J'ai envie de les toltchoker
De leur bouillare leurs gueules de cons
A coup d'peupon dans la cheutron
Vraiment je suis encore trop bon
Je veux en faire du ronron


Ha ça oui....Samael sait comment parler à sa femme et peut être qu'il aurait pu s'inviter dans la chaleur humide de son antre, si cette putain de porte ne s'était pas ouverte à la volée, se refermant derrière le visiteur

Le fol reconnut de suite l'homme, une petite frappe venant de Brissel, rampant depuis sa plus tendre enfance devant les jumeaux terreur.. Il poussa légèrement Magdelon pour se redresser dans le baquet et promptement se saisir de sa dague toujours à portée de main. Elle fut lancée à la tête de l'importun qui esquivant trébucha sur l'amas d'habits jonchant le sol.

    -T'es pas culotté, toi bordel !
    -Toutes mes excuses, Messire Samael mais je...
    -je quoi ? Veux partager ton bain, ta couche ta femme ? Tu t'es cru ou connard ?


Quand je regarde une p'tite fourmi
J'ai envie d'la faire exploser
Qu'elle tombe complètement bézoumni
J'ai envie de tout faire péter
D'faire un feu d'artifice géant
D'me bidonsker tout c'qu'y a d'dément


Furieux, les émeraudes exorbitées de rage, Rouquin s'extirpa de l'eau, lança un drap propre à Brunette et dans le plus simple appareil vint redresser l'homme, serre acérée autour de sa gorge.

    -je...reviens de Paris. On m'a dit que vous étiez là et je...des rumeurs...pitié.

Le messager suffoquait, il allait payer sa témérité mais un nom lui fut salvateur.

    J- u..di....cael


La poitrine renarde fit un bond, Maël retint son souffle avant de gueuler, hystérique.

    - Quoi ??? Parle !!!


    -Je..je peux plus respi..rer.
    -Ha oui, c'est vrai.


L'étreinte fut relâchée.

    -une femme..le cherche, te cherche..Elle a juré de vous...
    -tu te fous de ma gueule ? Tu viens me déranger pour ça ? Encore une frustrée qui en redemande !


Quand je rencontre de zolies filles
Qu'elles sont tout c'qu'y a de tzaribles
J'ai envie d'leur filer d'abord
Un vieux coup de dedans-dehors
Et d'me drinker un moloko
Au vas et vient près du métro


Dégoulinant, chaque pas de pieds nus sur le plancher faisant ploc ploc, la longue tignasse rousse collant au front et au dos, il vint récupérer sa lame figée dans le bois de la porte et brusquement l'appuya contre la gorge du type. Celui-ci transpirait tellement que c'était à se demander lequel des deux sortait du bain.

    - La Corleone, la noire. Elle parlait, semblait possédée par le Sans-nom en prononçant vos noms. Elle a juré de vous..


Et merde....

    -Tigist mmmh
.


Le bras se baissa, lâcha la dague, les lippes s'étirèrent en un sourire carnassier, puis la tête fut rejetée en arrière et un fou rire dément emplit la pièce.

    - Petite conne de traîtresse, pour qui elle se prend ?


Loin de se douter que vengeance fut déjà accomplie, œuvre fraternelle, sur celle qui des mois plus tôt les avait trahi, claqua des doigts et ordonna.

    Apporte-moi de quoi écrire et toi Magdelon, couvre-toi mieux, merde on voit ton nombril !


Balançant son pied au cul du gars, il grogna

    -t'avise pas de regarder et écris ce que je te dis ça occupera tes yeux.


Après réflexion, dictée fut faîte.

    Le premier je te trouverai
    Dans ton crâne de traîtresse un bénitier je creuserai
    De tes jambes de catin, des chandeliers je taillerai
    Ton sang d’esclave, au calice je boirai
    Ainsi tes funérailles je célébrerai.


Il observa l'écriture, lui tira une claque derrière la tête.

    Crâne et traîtresse y a un accent chapeau sur le a de l'un le i de l'autre, crétin ! Jambes prend un s final, elle en a deux donc chandeliers aussi. Non mais...t'as appris ou à écrire ducon ?


Il se pencha. arracha la plume des mains et griffona.



Le cœur se serra, ses pensées vagabondèrent sur un Autre ayant pris un chemin différent du sien, se demandant s'il avait apprivoisé les lettres.
Maël était confiant. Son jumeau était fourbe, vif et saurait se défendre, mais....
Et si Tigist le prenait à la traître, c'était bien son genre non ? L'image fraternelle étendu dans une mare de sang vint hanter son esprit. La pression monta et éclata d'un splendide coup de poing sur la table, phalanges craquèrent.
Pas une plainte, un regard froid et impassible se planta dans celui de l'homme.

    - Va...débrouille-toi pour livrer le parchemin à l'Ebène.
    Mais Monsieur Samael...je viens d'arriver à Genève et j'ai des affaires importantes à régler et elle va me bouffer si je lui livre ça.
    -Ce n'est absolument rien comparé à ce que je vais te faire si tu échoues et si tu te barres pas quand j'aurais compter jusqu'à 3.
    Mais, je...
    Un...
    J'y vais !
    3 !


L'homme détala, glissa sur un sol trop mouillé , se releva et fila sans demander son reste sous les ricanements du roux. Pour sûr, il ne faillira pas sa mission, les jumeaux avaient leur réputation de salauds sanguinaires et Samael put enfin se sécher et se rhabiller.

Dr Béru s'est réveillé
La tête à la place des pieds
J'ai vraiment fait un drôle de rêve
Dit il à son fou d'péroquet
Il sortit d'chez lui en sifflotant
Un petit air tout c'qu'y a d'dément

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le Renard
Magdelon
La pipe de chanvre consumée s'échoue lamentablement sur le sol de l'auberge alors que les mains renardes s'attardent sur sa poitrine menue. Les paupières se ferment, laissant la peau s'envahir de picotements et frissonner aux paroles s'échouant à ses esgourdes. Un moment de calme qui paraît presque déplacé comparé aux derniers mois qu'ils viennent de vivre, à coups de bastons, de brigandages sur les chemins, de prises de mairies plus ou moins réussies et d'avoinées bien senties en terres du Sud. Les chuchotements du renard lui arrachent un sourire de connivence, et bientôt les mains toujours aussi glacées et aux ongles rongés de nervosité parcourent les cuisses mâles, dos marqué par les stigmates de la vie se calant contre le torse sec du rouquin. Brunette pourrait presque se laisser aller, là, au creux de cette chambre et à la faveur de cet instant suspendu, laissant les doigts rouquins dévier à leur guise et glisser plus bas. Mais c'est un sursaut qui la prend lorsque la porte s'ouvre à la volée, la laissant un instant ébaubie avant de se mettre à gueuler, Samaël se redressant avec rapidité et dague volant à travers la pièce dans le même temps.
    - Putain mais c'est qui ce crevard ?!

Attrapant le drap lancé avec son mauvais bras encore faible du coup d'épée reçu, mauvais réflexe qui la fait grimacer de douleur, Magdelon observe son homme s'approcher dangereusement de sa proie, transformant alors le rictus de douleur en un sourire moqueur. Le bougre s'est trompé de tanière et risque de passer un mauvais quart d'heure. Elle ne pipe mot, n'a rien à dire de toute façon, presque satisfaite de savoir que le rouquin va pouvoir s'amuser un peu. Ils se sont tellement pris de coups dans la tronche ces derniers temps qu'un petit revers de situation ne fait pas de mal.

L'eau dégouline encore de son corps nu, lorgné de deux prunelles sombres s'attardant au dos et aux fesses avant de glisser nonchalamment sur l'importun pour écouter d'abord d'une oreille distraite, vite mise à l’affût par le nom jeté dans l'air.

Judicaël.

Quatre syllabes qui peuvent mettre le feu aux poudres et faire péter un boulon à vitesse grand V au rouquin. L'oiselle se redresse, ne se préoccupant pas d'offrir à la vue du messager un corps bien trop abîmé pour une gamine de son âge, enroulant à la va vite le drap de bain pour sortir du baquet, manquant de glisser sur le sol mouillé. Bordel de putain mal baisée, que s'était-il passé de grave pour qu'un couillon de Brissel vienne se pointer en Helvétie pour trouver l'un des deux jumeaux ?
Interdite, elle observe la scène, le cœur frappant à sa poitrine d'entendre une nouvelle qui pourrait à tout moment faire vriller Samaël et égorger sans somation le glandu qui se trouve là. Et tout péter par la suite dans la pièce, dans l'auberge, voire même dans le bled tout entier.

Aux paroles lancées d'une voix suffocante et haletante, peur se sentant dans chacun des mots prononcés, la respiration de la berrichonne peut enfin reprendre en un soupir discret de soulagement. La suite est écoutée avec une attention accrue, chaque information est analysée, détaillée et assimilée. Ça n'est pas la première fois qu'elle entend parler de cette noire là, Corleone. Judicaël lui avait expliqué, cet hiver, ce qui s'était déroulé dans le Sud et en quoi cette traîtresse était bonne à pendre comme un cochon. Ce que Magdelon ne percutait pas, là, c'était pourquoi elle s'acharnait maintenant à vouloir tomber sur les jumeaux. Illogique. Totalement illogique. Il avait dû se passer quelque chose ces derniers mois pour que la situation s'inverse.

Au rire dément lancé dans la pièce, le visage se tourne vers Samaël, attendant la suite des événements. À sa réflexion, les mirettes se baissent, constatant que le drap a été positionné n'importe comment dans la précipitation. Profitant de la séance d'écriture, le tissu est balancé à travers la pièce pour se coller des frusques sur le dos, oreilles traînant à l'écoute des quelques vers bien avisés, lui arrachant un ricanement. Mais soudain, cul posé au sol pour enfiler ses bottes, ses gestes s'immobilisent. Lui revient en tête un courrier reçu quelques semaines auparavant, auquel elle n'avait pas vraiment prêté attention si ce n'est que des bras en plus, c'était pas à refuser.


Citation:
Bien le bonsoir ma Dame

Je ne sais si vous vous souvenez de moi, homme, noir, grand, musclé, beau... à Genève. Nous avons fait le tournois. Il ne me semble point que nous nous soyons retrouvés l'un contre l'autre d'ailleurs et tant mieux au moins ainsi nous n'avons rien à nous reprocher.

Vous vouliez que je vienne avec vous à Limoges, mais j'avais décliné votre offre ayant déjà un groupe. Aujourd'hui, je ne suis en quête d'un nouveau groupe. En passant l'autre jour par Rochechouard, j'ai entendu parler de vos exploits et je me suis rappelé que nous nous connaissions.

Auriez-vous par hasard, besoin d'un mercenaire assez fou pour vous accompagner dans vos pérégrinations ?
Si oui, alors dites moi ou vous rejoindre et je serai celui-ci !

Bien à vous
Kelhyos


Et sa réponse, stoïque, mais balançant une information glanée peut-être un peu trop facilement.

Citation:
Salut,

je me rappelle bien, t'étais tout noir et pas trop causant. Je crois pas en effet qu'on ait quelque chose à se reprocher, mais ça veut pas dire qu'on aura pas envie de se foutre sur la gueule le jour où on va se recroiser.

Tu peux te pointer.
Fribourg, je sais pas encore pour combien de temps.

M.


Depuis, plus de nouvelles, brunette s'était-elle fait avoir comme une bleue ? Les questionnement affluent, et c'est sans un mot qu'elle finit de se fringuer pour se redresser, zieutant Samaël avec attention une fois le messager reparti la peur au ventre.
    - Samaël, tu crois que tous les noirs se connaissent entre eux ?

Réflexion con, mais qui a toute sa place ici, dans le cerveau de la brune qui commence à faire bouger ses rouages. La coïncidence est trop grosse pour que les lumières ne s'allument pas dans son esprit, malgré qu'il soit embrumé par les vapeurs de la drogue. La question s'échappe de ses lèvres alors qu'un bras vient s'enrouler autour de la taille renarde, dévalant tous deux les escaliers pour rejoindre le vieux gascon ronchonnant sur ses putains et sa pucelle. Bientôt, ils prendraient la route.
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~~*~~ ReVolte ~~*~~
Martin.cv
      [Saint Giron - 4 août 1466]




Entre hier et aujourd'hui, il me semble qu'une éternité s'est écoulée. J'ai l'impression d'avoir perdu des mois de ma vie. Volé par le déni. Volé par cette barrière de protection dont l'esprit avait besoin. Aujourd'hui, je me réveil, je regarde droit devant moi et le calme m'a quitté. Au fond de moi brûle le désir de vengeance. Brûle l'envie de meurtre mais pas n'importe comment. Je ne suis pas un fin limier. Je n'ai jamais traqué autre chose qu'une proie en forêt. De plus, mes obligations en Armagnac et en Comminges m'empêchent de partir comme bon me semble. Sauf qu'il y a une différence, je compte les jours qui me séparent de ma liberté.

Je ne veux pas reproduire mes erreurs. Je ne veux pas rester là à subir ce que la vie m'impose. L'éloignement fut le déclencheur. J'avais perdu Tigist. J'avais perdu mes fils. Et j'avais perdu foi. Depuis toujours, je me méfie de ceux qui m'approchent. Je cherche toujours à voir quand je vais être trahit. Quand le coup de poignard va arriver. Tigist n'avait pas fait exception. Je l'avais chassé pour cela de Saint Girons mais aussi parce que je ne voulais pas reconnaître cet attachement qui me lie à elle.

Pourtant à chaque fois que je suis au sein de mon Castel, je vois Menelik jouer, rire et être un enfant plein de vie. A chaque fois que je pousse une porte, j'ai l'impression que la noire sera là. Mon âme est imprégnée par la sienne. Je ne peux le cacher. Je ne veux plus le cacher. Avant ce tragique événement, j'avais hâte qu'elle soit de retour ici. J'avais hâte de l'avoir avec moi. Des envies de mariage avaient alors pris possession de moi. Pourtant, rien ne se passera comme j'avais prévu. Je l'avais traité de menteuse. J'avais refusé de croire en cette grossesse maintenant qu'elle était éventrée. Mais comment faire autrement ? J'étais à des lieux. Je n'avais jamais vu son ventre s'arrondir sous la vie. Je n'avais fait que la croire sur papier.

Trop de morts jonchent ma vie. Trop de peines ont détruit celui que j'étais. Aujourd'hui, seule la colère sait me combler. Je me laisse aller à son poison. Je me laisse aller à son besoin de vengeance. Après tout, j'en ai au tant besoin qu'elle. J'ai besoin de voir la tête de Judiacael loin de son corps. Et comment traquer de la meilleure des manières un homme ? Par l’appât du gain. Le sourire s'était fait en coin tandis que le parchemin était préparé. Mot à mot, je sentais l'excitation me gagner. Lettre après lettre, j'imaginais la tête du meurtrier se détacher de ce corps pourrit jusqu'à la moelle. A l'apposition du sceau, je souris pour de bon. Un sourire qui se veut carnassier.

Je fais signe pour que tous aillent propager la nouvelle. Je ne doute pas que tous les brigands du royaume, que tous les mercenaires voudront se faire 2 000 écus facilement. Judicael vois tu ta fin approcher ?



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Tigist

    « Rien de beau ne peut se résumer » écrivait Paul Valéry, ça tombe bien parce qu'elle est moche cette histoire.


Citation:
      Automne 1465 - Armagnac & Comminges..


    Plusieurs troupes de brigands notoires s'allient pour piller l'Armagnac et les Comminges, comptant leur lot d'assassins, voleurs, violeurs et mercenaires en tout genre. Voilà comment les montagnes voient déferler sur eux sans rien voir venir les Cielo Azzurro, les Corleone, les Piques et tout ce que le Paris dégueulasse peut renfermer d'immondices. Des bandes organisées, très bien organisées même qui s'abattent comme les sept plaies d'Egypte sur un comté démuni. Sur le papier.
    Car il suffit d'un grain de sable dans l'engrenage pour que le mécanisme bien huilé se grippe, un grain de sable noir et enceinte : Tigist Corleone.
    L'éthiopienne dénonce les agissements des brigands à un comte du coin en échange de la protection de son fils ainé et de l'enfant à naître.

    La déroute des rats est entamée et sa tête est mise à prix. Oups.


      Janvier 1466 - Anjou.


    Après s'être terrée à Saint Giron pour accoucher de sa puinée et la confier plus tard en Limousin à Gabriele Corleone, Tigist rejoint l'Anjou déterminer à provoquer l'ire des brigands. Ouais, c'est c'là ouais. Allez tout droit en prison, ne franchissez pas par la case départ et ne touchez pas 20000 francs. La Lépreuse a la rancune tenace et des amis aux bras longs. Tigist épouse Eikorc de Nerra en cachette (ou presque) et se retrouve veuve dans la foulée, déterminée à se barrer avec le magot du vieux brigand pour rejoindre le Couserans, enceinte de son bel et blond comte, une fois sortie de taule.

    Un partout, la balle au centre.


      Printemps 1466 - Anjou.


    Judicael blessé se pointe en Anjou. Tigist le trouve mal en point. Sa faiblesse ? La souffrance. Son erreur ? Baisser sa garde. Judicael a la rancune plus tenace encore que Desideratum. Si l'éthiopienne n'avait pas hésité, elle n'aurait pas pris de couteau dans le ventre et les fils de Martin y seraient encore.
    Gabriele - décidément le moins rancunier de tous et le plus amoureux certainement - débarque et ramène d'entre les morts l'abyssinienne - la légende raconte qu'il aurait même prié, mais n'allez pas le raconter, il pourrait tuer pour cela - merveilleuse erreur que celle-ci.
    Abandonnée par Martin, Tigist a appris pendant qu'elle agonisait de cette superbe césarienne organisée de main de boucher que la fille aînée de Gabriele était morte, que ses enfants sont morts, que le monde est mort et que Judicael doit mourir - ainsi que tous ceux qui se mettront en travers de son chemin, y a pas de raison, on est pas bégueules.

    Pendant ce temps-là, Renard décide de foutre l'Helvétie et la Ritalie à feu et à sang parce que ce serait dommage quand même de ne pas foutre le bronx partout où on passe. On a une réputation à tenir, et on s'y tient, quitte à en crever à moitié, bout par bout sur le chemin.


    C'est bon, tu suis maintenant ? On peut reprendre ? C'est pas dommage.




      Eté 1466 - Helvétie.


    Sur la route, ou plutôt sur le bord de la route de l'Helvétie, on peut apercevoir un convoi arrêté composé d'un grand noir, d'une petite blonde flanqué d'un gros chien et d'un chat, une belle brune à l'air noble, une petite brune coiffée de tresse, un superbe italien et ..

    « Ca va, ça va.. Pas besoin de me tenir les cheveux.. Je peux encore vomir toute seule.. »

    Clairement de tous la plus élégante, la plus racée, la plus foncée aussi, et de loin aussi la plus régulièrement bourrée : Tigist. A la réflexion, surtout la plus bourrée. Majoritairement, les jours sans pluie en tout cas, c'est l'été ? Ah.
    Pas d'enfants sur les bras, pas d'enfants dans la panse, pas de responsabilités puisque ce n'est même pas elle qui dirige l'équipée – les jaloux diront que c'est une chance – la seule chose qui lui reste à faire, c'est de garder les yeux ouverts, la main sur l'arbalète et de laisser sa monture la garder sur le droit chemin pendant qu'elle cuve son vin.

    Il y a des promesses comme ça qu'on fait à l'encre sur le papier, de la pointe d'un couteau en larmes de sang, et il y a celles qu'on ne tient jamais. En partant à la recherche de Judicael, l'abyssinienne avait juré de ne plus toucher une goutte d'alcool, ou plutôt de ne plus se laisser aller à en toucher trop d'affilée. C'était sans compter sur la correspondance avec Martin, sans compter sur les avis de recherche lancés par Martin, sans compter sur les mots écrits par lui.


    « Tu les as tué. Tu es la seule et unique responsable. »

    Et Tigist avance, funambule, avec comme point de mire, la chevelure rousse d'un Renard, car en dévier, cela voudrait dire tomber et donner raison à Martin. Si Judicael savait comme il lui est vital, assurément, il se laisserait crever pour la satisfaction de l'entraîner avec lui dans la mort.
    Sur le fil du rasoir, elle avance en titubant, puant l'alcool à plein nez certains soirs, plongeant dans le mutisme, le nez dans les étoiles, les autres nuits.
    Tigist a tué ses enfants. Encore.
    Tigist a du sang sur les mains, de celui qui ne s'efface jamais, celui de ceux qu'on a aimé.

    Alors dans le fossé, l'éthiopienne vomit son dégoût d'elle-même, son dégoût de la vie, sa haine et toute sa rancoeur en même temps que la bile et le génépi. C'est pas beau à voir une princesse en déchéance. Et quand enfin l'estomac est vide, elle remonte en selle, saisissant sa gourde pour en boire une rasade, l'avantage d'être non loin des montagnes, c'est que l'eau y est plus fraîche et moins dangereuse que celle souillée des bourgades.


    « Putain, c'est dégueulasse le goût de l'eau. »

    Moins encore que le dégoût de toi. Bois, avance et ferme-la Tigist.

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Lenu
Au milieu du chemin de notre vie
je me retrouvai par une forêt obscure
car la voie droite était perdue.


Dante Alighieri. Inferno.



Et en ce printemps 1466 Gabriele l'avait abandonnée.

Là.

Dans cette forêt obscure qu'elle découvrait jusqu'ici chaque nuit, en sa compagnie. Loin de tout. S'éloignant peu à peu du chemin qui se traçait pour elle. Loin du libertinage rappelant que son corps est en vie à défaut de son âme.

Depuis Gabriele, elle est a acquis une forme de sagesse. Si si je vous assure ! Même si Axelle refuse de croire ses écrits. Même si l'Italienne n'a pas su exprimer sa rencontre avec le Corleone autrement qu'avec le mot "Reconnaissance". Est-il si difficile de croire ces instants où le corps abandonne tout désir afin de laisser l'esprit se nourrir de l'Autre ? Pour Lénù tout était qu'évidence même, découvertes et apprentissages nocturnes, franchir cette frontière interdite, se perdre dans la forêt obscure et atteindre les Enfers la jouissance ancrée au ventre.

Il l'avait abandonnée en ce printemps 1466 alors qu'ils avaient rejoint l'Anjou. Et si l'Enfer paraissait d'une douceur infinie dans le regard vitreux de leurs victimes d'un soir, il avait un goût amer et putride ce soir là. Gabriele l'avait abandonnée ce soir funeste où au lieu de cueillir la vie au sein d'un ventre, la camarde au double visage amorçait la chute d'une Reyne Sombre.

Un jumeau avait pris la vie d'autres jumeaux. Berceau douillet de vie devenu cercueil putride. L'Italienne d'habitude peu encline aux sentiments qui trouvait un exutoire dans la souffrance de l'autre, ce soir-là, a vacillé.

Gabriele l'avait abandonnée devenu ombre de lui même, une Reyne s'est relevée, main tendue vers Lénù. Sait-elle qu'en elle vit le même Enfer que le Corleone ? Pourrait-elle deviner que derrière l'ovale Italien, qu'à travers les prunelles sombres, l'esprit se nourrit de souffrance, de plaintes gémissantes, de supplications, de suffocations, de regards effrayés par la Mort et écarquillés par la douleur ? Sait-elle que l'Ange qu'elle reflète n'est que Démon, Monstre avide d'admirer la Faucheuse faire son oeuvre et ce, au nom de la médecine ?

Gabriele l'avait abandonnée, et elle est restée auprès de lui, auprès d'eux. Un peu en retrait, dans cette bulle secrète que seul le Corleone connaît. Les nuits ont défilé, dans un lugubre rituel. Seule. Froide. Aussi glaciale que la Mort. Statue impavide scrutant le fluide vital fuyant sous les différentes lames lacérant les chairs. Une chute libre et sans fin jusqu'à être retenue à bout de bras par Tigist et ses sages paroles. Chute libre qui l'a éloignée d'être chers, comme Axelle, Lucie, Siméon, même si elle ne les oublie pas.

Les orbes sombres se lèvent sur l'étendue majestueuse des montagnes, l'esprit n'est plus aussi torturé même s'il réclame son du nocturne. Apaisée par les bras de Kelhyos, cheveux tressés par les doigts fins de Tigist elle mène la petite troupe vers l'Italie, là où promesse de déguster le Chianti a fait chanté la missive. Même si le breuvage aura un autre goût que celui du soleil Milanais, celui de la vengeance.

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Lililith

~ Quelque part en Helvétie ~


Lili attend et observe. Elle ne dit rien ; mais pourquoi parlerait-elle ? Elle ne juge pas, elle contemple et garde au fond de son cœur. Elle a un cheval, elle aussi, et elle tient serré entre ses petits doigts les rênes de l'animal.

Elle ne sait pas, ou plutôt : elle ne veut pas savoir. L'histoire ne la concerne pas. Elle sent déjà bien trop la douleur de tous ceux qui l'entourent que pour vouloir en comprendre tous les tenants et les aboutissants. L'Étoile, à l'origine, voulait juste retrouver Tigist ; parce qu'elle l'aime bien, Kippu... Mais comme toujours, elle s'est retrouvée embarquée dans une histoire pas possible, ou plutôt inimaginable à cause de la souffrance qu'elle porte en son cœur.

L'enfant ne dit rien, et préfère enfouir ses doigts dans la fourrure flamboyante de son chat, casé on ne sait comment au-devant de la selle de l'équidé. C'est une bonne pâte, ce chat : pas un miaulement de plainte depuis qu'ils sont en route, alors qu'il est malmené, et assurément pas confortablement installé. À côté du cheval, en bas, il y a Custos, qui s'est assis à l'ombre du convoi arrêté pour laisser vomir Tigist.

Lili talonne son cheval et c'est un spectacle comique qu'elle donne à voir, elle si menue sur une bête qui pourrait lui marcher dessus par inadvertance ; mais elle n'en a cure, puisque la seule chose qui compte, c'est de continuer à avancer. Et comme les journées sont longues, elle forge dans ses pensées les lettres qu'elle écrira au soir, songeant ainsi à Maïwen, à Fanette, et se demandant également ce qu'elle pourrait écrire à Nizam et Arsène. Loin des yeux, mais toujours près du cœur.

Elle ne pense pas qu'elle devra faire face à l'horreur ; Gabriele pourtant l'a prévenue, mais Lili a dit qu'elle resterait. Elle n'a pas peur : les cauchemars, elle les a déjà. Montparnasse a achevé le peu de candeur qui restait en elle. Si elle a cessé de boire, c'est parce qu'elle souhaitait retrouver la pleine possession de ses sens et de sa lucidité : c'est important lors des combats.

La Luciole ignore comment cela va se passer, et évite de s'inventer des histoires qui n'auront certainement jamais lieu : les seules choses qui comptent, c'est l'instant présent. Et si elle a tenté de réconforter Gabriele, elle n'est pas sûre d'y être arrivée. Elle se sent nulle, zéro, mais demeure impassible alors qu'ils marchent vers... Vers elle ne sait trop où exactement, mais peu importe.

Au bout du chemin, la mort les attend.

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Judicael.
Il n'avait pas trouvé sa promise. Étrangement, les rumeurs étaient aussi trompeuses que l'écho. Là où vous pensez entendre le son d'une voix, ne demeure que l'ersatz de l'éclat, et votre source est déjà loin. Avait-elle été mise sur une autre piste? Une fausse piste. Car s'il ne s'y intéressait guère depuis le dernier courrier que la Noire avait jugé bon de lui envoyer, Judicael savait que des missives allaient bon train, des uns aux autres, et n'imaginait pas à quel point certaines pouvaient ressasser un paquet de conneries à la ligne... L'idée qu'il fut avec son frère, lui qui s'en était séparé depuis des mois, le confortait dans l"idée que Tigist n'était pas si bien renseignée que cela.

A la lettre d'yseult, dont le but était bien trop grossier et évident pour une si belle jeune fille, il ne répondit pas. Après tout, ne pas savoir écrire avait tout de même certains avantages, dont celui de ne pas s'épancher en mépris inutile.

Le mépris, il le gardait pour lui. La plupart du temps, solitaire s'octroyait une bonne part de retenue. Si les autres parlaient et criaient fort dans les tavernes, lui, se taisait. Et souvent disparaissait aussi vite qu'il était apparu, allergique aux réunions de plus de deux personnes depuis que la Rousse les avaient quittés. Judicael se renfermait sur lui même, et ne perdait pas de vue ses buts.


C'est en italie, à Alessandria précisément que ceux là le menèrent. Il visait allègrement un diocèse, qu'il attaqua en armée, sans imaginer l'issue du combat face à des italiens féroces et possessifs. 75 procès pour avoir mis le ducato di milano à feu et à cran, des marchés retirés de toute leurs denrées pour ne pas nourrir l'engeance brigande qui avait pris ses quartiers, des tavernes barricadées et vides, et des Rats à soigner. Blondie n'avait pas été de trop. Surtout qu'au delà de ces évènements, un enfant était né. Le second fils de Cael avait vu le jour dans cette abomination de bordel de dieu... Encore un rat né sous une bonne étoile.

Ordre avait été donné par le roux de quitter le duché à tous ceux qui étaient en état de le faire. Lui resta quelques jours de plus, frôlant la mort suite à l'infection d'une blessure soignée avec brio par Blondie, afin de nourrir les blessés avec ce qu'il réussissait à soutirer au marché noir et de trouver non loin d'Alessandria , un lieu sûr où Gwenvael pourrait garder sa femme et l'enfant nouveau né.

Le soir où il se retrouva face à la Noire , comme une vieille ennemie que le temps ramenait d'un pays et d'une vie qui étaient restés derrière, Judicael était sans doute le dernier des Rats à ne pas avoir quitté les lieux, entêté, persuadé qu'il ne pouvait pas s'en aller sans son sacro saint Jambon de Parme.

C'est donc Jambon sur l'épaule, et armé d'une unique dague dans la botte - pas celle de Tigist - qu'il fit face à la joyeuse troupe venue pour lui.

Surprise...


Observant les uns et les autres à la seule lueur d'une lanterne qu'éclairait une maison, il secoua un peu la trogne. Rattrapé par ce qu'il avait sans doute relégué trop longtemps à l'oubli.



Y'en aura pas pour tout l'monde, je préviens...


Demi oreille n'a pas son pareil? Pour ironiser au seuil de la mort, sans doute.

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Recueil-galerie d'avatar
Tigist


    C'est en Italie, à Alessandria précisément que celui-là les mena.

    Sur la route, ils avaient croisé une Blanche qui avait mentionné deux noms connus : Marzina et Judicael. Les noms auraient pu l'intéresser si la donzelle n'avait pas joué à qui a la plus grosse – concept aberrant quand on se retrouve face à une arbalète et quatre personnes à cran d'avoir parcouru le Royaume en vain – et la recommandation de chercher plus au Sud et pas en Italie n'avait pas été suivie.
    Premièrement parce que les étoiles avaient parlé.
    Deuxièmement parce qu'en étant si proche de la frontière italienne, c'eut été une ineptie de ne pas en profiter pour faire découvrir à Kelhyos les joies du chianti.
    Troisièmement parce que quelque chose se joue là. Il y a dans la haine plus de complicité et d'intimité que dans le dédain. Et Tigist et Judicael se haïssent plus qu'ils se méprisent.

    Tout dans cette ville pue le traquenard, le double-jeu.
    Si on lui avait dit que le maïs acheté sur la route et revendu sous le manteau à moins regardant qu'elle, finirait dans les poches des acolytes de Renard.
    Si on lui avait dit qu'en désespoir de cause, après avoir échangé les carreaux empoisonnés pour ceux lambda, elle se retrouverait face à Cael alors qu'ils préparaient le départ. La voix connue la fait sursauter, et elle se retourne l'arbalète déjà armée par prudence.

    C'est une histoire de ratés.

    Mais pas pour le carreau.
    Il fuse dans le roux, sans préavis, sans préambule. Elle n'a pas visé la jambe ou le jambon, elle a visé le cœur la Noire. Là où il lui a fait mal. Comme pour l'achever, comme on tuerait un animal avec respect après l'avoir traqué des nuits dans la forêt.

    Il n'y en aura pas pour tout le monde ?
    Mais il n'est pas pour tout le monde Cael, il est pour elle, rien que pour elle. A cet instant, Tigist n'aurait su être plus possessive.
    Judicael est à elle et à aucun autre. Sa vie lui appartient, sa mort lui appartient. Ce souffle qui s'échappe lui appartient.


    « Du jambon, Cael ? Sérieusement .. Tu méritais mieux. »

    Elle hausse le sourcil, perplexe. Mais aux autres, c'est un regard d'avertissement qu'elle sert, l'éthiopienne n'est plus ivre, non. Elle est sobre, terriblement sobre et elle avance vers le roux, saisissant dans le carquois un deuxième carreau qu'elle glisse dans l'encoche pour armer le levier.

    Judicael, tu vas mourir, pourquoi tu te traînes ce putain de jambon..

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Judicael.
Juste une seconde.


même en me tuant, tu ne fais pas honneur à ton clan Tigist la Noire. Les Corleone se sont tapé le pays en travers pour te voir me tirer un carreau dans le cœur , accroché à mon dernier jambon. Le dernier présent de la Camarde... Pas un geste. Pas une demi minute de torture. Pas de passage à tabac en règle, d'insultes en italien, de défoulement de haine, d'acharnement en bande ... Pas une miette pour du grand Clan Corleone. Tu ne leur a rien laissé de mon vivant.

Juste, une seconde. Et mon cœur que tu transperces. Parce que tu sais que tu aurais dû tirer ainsi la première fois.

J'ai pas le temps de penser à tout ce que je laisse derrière. A vrai dire, j'ai le temps de rien, cette fois tu as été la plus rapide. Fenrir den Andre. Hel. Vivia. Blondie. Gwen. Tann. Tous les rats égarés. Le quartier Pourpre. Le Comptoir des usuriers. Le bordel... Ce bordel de la Rose Pourpre qui m'a coûté une tresse et pas mal d'audace... Kelel. Larah et midia. Sianne la terrible. Gysèle. La peine. La peine qui s'est incrustée à mes veines et qui ronge mes nuits depuis la Champagne. Le manque. Samael, mon frère. Ce fou de frère. C'est maintenant que ça s'arrête alors? Quand je tombe à genoux... Devant toi et tous les tiens. C'est bien la première fois que ça m'arrive... Je les vois à peine. Je ne vois que toi. Et je crois que ce sourire narquois ne voudras plus quitter ma tronche. Est-ce qu'on l'emporte avec nous, le dernier sarcasme? Est-ce que tu te sentiras soulagée, même si tes bafoués ne reviendront pas?

Là, celui là que tu as trahis et qui te suis encore, il doit drôlement t'aimer...

Et celui que tu as fuis le ventre plein, une fois qu'il a assuré tes miches en Armagnac et qui a mis ma tête à prix pour 2000 écus, il doit drôlement t'aimer...

J'ai violé Neijin, votre petite protégée et certainement d'autres que tu ne soupçonnes même pas. J'ai ouvert ton ventre et je t'ai pris tes fils. Et pourtant, tu sais... Tu sais que je suis le seul des hommes à avoir tenu ma promesse... Parce que j'avais promis de venger notre honneur. Alors pour négliger le plaisir de tes pairs et le garder pour toi, juste pour toi ... Tu dois drôlement m'aimer Tigist. Tu sais qu'on a tous quelqu'un d'autre en nous. C'est l'Autre qui me tue, ou c'est toi, Tigist ? Quand j'serre ma femme dans mes bras, tu vois, c'est moi. On pense pas que ces mains là ont pu frapper si fort et donner la mort. On pense juste en bicolore. Tout blanc, ou tout noir. Ami, ou ennemi. On est un peu des animaux en survie. D'ailleurs, on nous appelle bien les Rats.

Le jambon? Ah la noire.. Si tu m'avais connu un peu... Juste un tout petit peu... Tu aurais su l'histoire qui me reliait si étroitement à ce putain de Jambon. Les miens savent. Les miennes surtout. Et je n'ai qu'une question qui s'envole quand je tombe dans la poussière, fauché par ta pointe.

Est-ce que je l'emporterai au paradis?


Juste une seconde. Un dernier battement . Demi oreille a du plomb dans l'aile et le visage se froisse d'agonie.

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Recueil-galerie d'avatar
Tigist


    Le Renard s'effondre, son jambon avec.

    Ca fait mal un carreau hein, Cael ? Ca vous transperce aussi assurément qu'un mot d'amour qui est devenu un mot de haine, ça ne s'arrête pas à l'épiderme, ça s'immisce d'un coup net à travers les os quitte à les briser au passage, ça s'enfonce dans les chairs, profondément.
    C'est une arme de lâche, tout le monde le sait. A moins d'être hésitant ou alcoolisé, il y a très peu de chances de louper une cible à quelques coudées. N'importe qui peut tirer à l'arbalète mais tuer à l'arbalète, cela demande plus.

    Parce que la vérité, c'est que tout le monde ne peut pas tuer tout court. Cela demande beaucoup de prendre une vie, cela demande sûrement plus que d'en mettre une au monde. Il lui en a pris deux, elle lui en prend une, c'est un marché de dupes pour l'éthiopienne. Ce n'est même pas un prêté pour un rendu. Pourtant, quand le deuxième carreau est armé, elle ne tire pas.
    Tigist se laisse choir, assise à califourchon sur le torse du rouquin, les genoux sur ses bras à lui pour l'empêcher de faire quelque geste que ce soit, comme s'il en était encore capable. Il a un carreau planté dans la cage thoracique. Cela doit être douloureux pour respirer.

    Les cuisses enserrent le torse maigre comme on monte à cheval, comme une amante, et ce carreau obscène entre elles. Tu crois qu'elle pourrait jouir, Renard ?


    « Nous n'irons pas au Paradis, toi et moi. »

    Et si Judicael sourit narquois, comme il l'a toujours fait, Tigist ne voit que lui ou plutôt voit à travers lui. Oubliée l'escorte, oublié Gabriele qui voudrait pouvoir prendre son dû, oubliés les carreaux empoisonnés pour le torturer lentement.

    Tigist n'est même pas véritablement une tueuse, elle est devenue voleuse parce que la vie la plaçait aux côtés de voleurs, pourquoi voudrait-elle torturer ? Elle n'est même pas Corleone, elle n'est pas non plus comme son père, son foutu père tordu. Même tuer ne lui apporte rien. Et c'est bien le plus dramatique, c'est bien ce qui fait le plus mal. Judicael a pris et n'a rien rendu en échange.


    « Cela ne les fera pas revenir. Rien ne les fera revenir. »

    Et tuer Judicael n'y changera rien. Rien ne les fera revenir Tigist. Et la haine qui l'habitait, qui collait à la peau et à l'image du roux, cette haine s'en va aussi sûrement que la vie dans le grand corps d'albâtre. Et si la haine part, il n'y a que du vide, un trou béant dans son ventre et dans son cœur.

    L'arbalète est jetée au loin et les épaules de Renard sont saisies pour être secouées et tant pis s'il est déjà mort. Le sien de corps est secoué de sanglots et de hoquets qui viennent du fond du cœur.


    « Tu ne peux pas mourir. Cael.. Tu ne peux pas mourir ! CAAEEEEEEEEEEEEEL. »

    Car si Judicael meurt, elle ne pourra plus le tuer, alors, elle pourra dire à adieu à tout espoir de paix dans son cœur. Judicael ne peut pas mourir, pour que la mémoire de ses fils ne s'éteigne pas avec lui.

    Tu le voulais ton aveu ? Elle t'hai-me, con de roux.
    Là, dans la masure italienne, pour sûr qu'il va bientôt va falloir filer vu les hurlements désespérés de l'éthiopienne.

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