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[RP] Amahir in love

Clement.lexhor
Deux familles, égales en noblesse,
Dans la belle Paris, où nous plaçons notre scène,
Sont entraînées par d’anciennes procédures à des attentes nouvelles
Où l'encre des hérauts souille les mains des hérauts.
Des entrailles prédestinées de ces deux inepties
A pris naissance, sous des étoiles contraires, un couple d’amoureux
Dont la ruine néfaste et lamentable
Doit ensevelir dans leur tombe la fierté de leurs parents.
Les terribles péripéties de leur impatient amour
Et les effets des tergiversions obstinées de ces familles
Que peut seule apaiser la désobéissance de leurs enfants,
Vont en deux heures être exposés sur notre scène.
Si vous daignez nous écouter patiemment,
Notre zèle s’efforcera de corriger notre insuffisance.


Hôtel de Cluny, à l'aube.

C'est l'alouette, hourra, messagère du jour ! De la nuit il n'avait pu dormir. Les draps étaient trop chauds, il les jettait, alors il avait trop froid. Son oreiller était trop dur, et puis trop mou, il avait mal au cou, au dos, et une crampe dans le mollet. Vingt fois il avait dit ses prières, mais en aucune occasion il n'avait eu le coeur au recueillement. Et enfin le Soleil daignait se lever sur ce jour béni où il allait prendre femme.

Il fallait faire vite : La valetaille ne tarderait pas à s'éveiller elle aussi, et ils voulaient à tout prix éviter de croiser quelqu'un dans les couloirs ou dans le jardin. C'était une chance, d'ailleurs, que leurs deux chambres donnent sur l'arrière de l'hôtel et non l'avant : Il y avait sous la fenêtre de Clément un grand arbre sur lequel il s'appuya pour descendre. Une poignée de gravillon : Il lança quelques petits cailloux sur la fenêtre de l'aimée, et glissa en dessous une échelle qu'il avait, la veille, dissimulé dans les buissons.

Ne restait plus à la belle qu'à descendre. Il espérait seulement qu'elle n'était pas endormie, ou sinon, au moins, qu'elle s'était endormie toute habillée et que les bruits mats des pierres contre les carreaux l'avait éveillée. Dans le pire des cas... Il n'aurait plus qu'à ranger l'échelle, et à recommencer le lendemain, la mort dans l'âme. Car aujourd'hui, il en était persuadé, était une journée parfaite pour épouser Ysilgonde. Personne à Paris, sinon les domestiques : Grand-Père devait être à Orléans, Arthur aussi, Aemilia en Touraine, et Grand-Mère Dieu sait où. Ils se marieraient, remonteraient dans leurs chambres et passeraient la journée en faisant semblant de rien, et le soir venu...

Du moins, c'était son plan.

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Ysilgonde
Même hôtel, même aube.

Ysilgonde de Josselinière, jeune enfant encore, s'éveillait au chant des premiers oiseaux, ceux qui s'éveillaient avec la pointe du jour. Elle faisait une toilette brève, allait et venait d'une salle d'atours à sa chambre, d'un pas dansant. Elle était heureuse ; heureuse de vivre auprès de celui qu'elle aimait, protégée et acceptée par les siens. Les Amahir chérissaient les plus belles valeurs du monde : à la loyauté, ils joignaient la bonté ; à la fidélité, ils joignaient la générosité ; à l'amitié, ils joignaient la jovialité. Toujours amènes, ils avaient fait de la jeune marquise de Nemours leur hôte et obligée.
Elle vivait là, entre roman courtois et comédie romantique, à voir Clément d'Amahir chaque jour, à recueillir ses baisers à la commissure de ses lèvres, à adorer observer les ombres changer, à chaque heure du jour, les expressions de son visage. Elle commençait à le connaître, et lui-même devait voir poindre sous la blonde enjôleuse et charmante les caprices de la réalité.

Elle avait le sommeil lourd, l'esprit distrait, l’œil calculateur, les courbes enjôleuses. Derrière ses airs d'ange, longtemps loués par son père le marquis de Nemours, la jeune femme dissimulait un caractère fier et manipulateur, ambitieux et envieux : quand elle avait commencé à désirer Clément, il n'avait pas fallu longtemps pour qu'il proposât lui-même de l'épouser clandestinement, dans l'attente de leur mariage officiel.
Car bien sûr, ces noces qu'ils s'apprêtaient à célébrer n'étaient là que pour tromper leur conscience : ils allaient pécher innocemment, au soir venu. Ce n'était que ça : attrait de la chair et de la luxure ; éveil au plaisir de deux jeunes gens peu éduqués à la chose, et tout entiers soumis à leurs instincts primaux.

Ce jour-là, elle s'était vêtue de blanc, et ceinte de rouge. Des pierres d'ambre paraient sa coiffe à demi-lâchée sur ses épaules. Loin de ses parents, elle avait pris l'habitude de ne plus enfermer ses longues boucles dans d'horribles carcans capillaires. Clément l'aimait mieux ainsi.

Clac. Elle sursauta.
Clac. Elle se retourna.
Clac. Elle comprit.

Vlam, elle avait ouvert la fenêtre.


Est-ce le jour enfin, empereur de mes songes,
Où nous ferons tous deux cesser ce qui nous ronge ?
Le mal qui nous enserre, et par des liens nouveaux,
Accueillir en nos seins les présages si beaux ?
Maintenez cette échelle où je risque à tomber,
Pour qu'en bas parvenue, je n'aie qu'à vous aimer.


Elle chut, mais d'une chute gracieuse dont seule les héroïnes romanesques ont le secret. Dans ses bras accueillie, elle lui refusa un baiser passionné.

Refrénez vos ardeurs, il n'est point encor l'heure,
De couronner l'amour de baisers et de fleurs,
Allons, allons, courons, à l'hôtel de Dieu,
On y trouvera bien qui nous rendra heureux.

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Clement.lexhor
L'alouette chante et la croisée s'ouvre. Enfin le visage tant attendu paraît. Elle n'a pas changé, et pourtant chaque jour elle lui semble un peu plus belle. Et aujourd'hui, de son humble avis, Ysilgonde rayonne. A moins que ça ne soit lui qui, d'un trop plein d'amour, ne se prenne à garder trop de lumière dans les yeux.

Merveilleuse journée
Que le jour de notre hyménée.
Ma Mie, vous voilà ravissante ;
Chaque jour votre image me hante.
Venez à moi que je vous cueille,
Sinon quoi ce jardin sera mon cercueil.


Et malgré ses efforts, l'ange choit du ciel, heureusement sans dommage ni gravité. Mais la belle lui refuse un baiser, et d'un verbe gracieux chasse le pli de contrariété né au creux de ses sourcils.

Pardonnez, Ma Mie, mon emportement,
De vous savoir mienne il me tarde grandement.
Allons, allons, courons, à l'hôtel de Dieu,
Ce matin, l'amour sera victorieux.


Il prend sa main et la guide à travers les parterres de roses et les lilas. Dans le mur d'enceinte est percée une petite porte de service : De sa bourse replète, garnie d'une généreuse somme qu'il destine aux œuvres parisiennes, il tire une clé et la fait coulisser dans la serrure. Plutôt que d'emprunter la très fréquentée rue de la harpe, Clément entraîne sa fiancée par les ruelles : Rue du foin, du bout de brie, de la parcheminerie, et enfin, puisqu'il n'y a plus le choix, la rue Saint-Jacques, pour passer par le petit Châtelet, sur le petit pont et rejoindre l'île de la Cité.

Là, notre fringant duc, tout de bleu vêtu, navigue entre les mendiants et malades pour finalement trouver une nonne, enfin !


Ma soeur, ma bonne !
C'est ici plutôt qu'en Sorbonne,
Que nos pas nous ont guidé.
Allez !
Il faut prévenir l'évêque de Périgueux,
Que céans se tiennent deux amoureux.

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L_aconit
Heuse, chargée d'aller dans les bas fonds de Paris pour acheter au marché le moins en vue de Paris des antidotes bons à faire Thériaque, heurta de plein fouet l'ébullition de la jeunesse, surprise et levant les bras au ciel, en laissa choir son panier. Ah l'amour, l'amour! Qu'y connaissait-elle? Pourquoi l'amour rendait les jeunes gens si pressés? Comprenant le caractère urgent de la situation, et ramassant son contenant, nonne pointa l'édifice qui enjambait la seine et faisait les yeux doux à Notre Dame:



Allons mes enfants, pour deux amoureux il faut courir à la hâte!
Prélat sera reparti en Province avant que le temps se gâte
Passez les portes de l'Hotel Dieu, vous verrez là ses blancs cheveux
Courrez! Bon sera l'évêque de Périgueux, le chapelain des lieux.



Ainsi jeunes gens connurent le chemin où s'en aller. Leur arrivée fut remarquée. Tonitruants pas sur le pavés se chargeait de défier l'atmosphère moribond de l'entrée, où bien souvent la seule course qui parvenait à se jouer était celle des derniers espoirs de la vie. Le chapelain , alerté par les cris de quelques nones effrayées, croyant à une énième rixe du guet s'avança au devant des deux jeunes gens aux joues rougies dont les mains se liaient l'une à l'autre comme une entrave indéfectible. Qu'ils étaient vifs et décidés, parés de beaux atours et l'épi décoiffé par leur quinze ans... Faust d'un air marri leur indiqua les pavés de l'Hotel Dieu.



Hardis jeune gens vous voilà arrivés sans doute au mauvais endroit!
Ici l'on s'en vient prier pour que Dieu épargne des mourants la vie
Votre jeunesse ici bas, gagez que tout le monde vous l'envie
Par ma foi, annoncez votre but, je vous indiquerai la voie


Dans moins d'une heure, il aurait franchit les portes de Paris, délaissant quelques jours ses élèves , ses malades, ses carrés de simples, s'en remettant aux bons soins des soeurs
comme il avait coutume de le faire à quinzaine. Si la mitre ne paraissait pas quand il séjournait à Capitale, la grande croix et l'anneau épiscopal ne laissaient pas de place au doute; sous les crins clairs et dans les yeux bleus, se tenait bien face à eux l'évêque de Périgueux.

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Chapelain de l'Ostel Dieu à Paris, Evêque de Perigueux, Exorciste de Rome
(En Bleu italique, les pensées Laconiques.) galerie d'avatar-Recueil
Ysilgonde
Ysilgonde n'avait sans doute pas été faite pour la vertu. De sa mère, si pieuse et réservée, elle n'avait guère hérité que les traits : la peau claire, les grands yeux, l'air mélancolique à l'occasion, la maigreur, les cheveux blonds, et le charme de la maison d'Albret. Son tempérament lui venait plutôt du côté Josselinière : Yolanda sa tante, Aimbaud son père, tout à leurs péchés et à leurs excès, l'une gloutonne et l'autre licencieux avaient transmis à la petite marquise des pulsions diverses.
Quelques mois plus tôt, elle s'était enfuie pour essayer d'épouser son propre frère. Et c'était déjà l'évêque de Périgueux, mais un autre en ce temps, qui avait été choisi pour procéder. Le pauvre homme avait été laissé sur le carreau quand les enfants avaient été retrouvés et châtiés pour leur crime. On avait étouffé l'affaire pour l'honneur de l'héritière, qui s'était trouvé un autre héritier, à l'insu de son plein gré.
Elle aimait Clément, et n'en doutait pas. Parfois manipulatrice, elle n'était pas malhonnête et sentait au plus profond d'elle-même ce désir d'être unie au duc de Chartres. Toutefois, quand elle vit l'évêque, son visage aussi pâle que le sien, ses cheveux cendrés, la rigueur de son menton, elle laissa échapper un "Oh" de surprise, de surprise agréable : qu'il était beau, le curé.


Nous mourions d'envie, Monseigneur, de vous voir,
Pour que par votre main, et bien avant ce soir,
Le duc ici présent, et moi, votre servante,
Soyons unis ce jour : notre amour est fervente.
Nous ne sommes, Monsieur, des âmes égarées.
Nous croyons Dieu, les Saints, Aristote lui-même,
Qui jugeait qu'il vaut mieux convoler quand on aime.
Nous nous aimons, pitié, jugez que c'est assez,
Pour couronner l'instant d'un heureux hyménée.


Elle l'implora si bien qu'elle se trouva tout près de lui, trop près de lui, les yeux brillants d'un trop plein de passion. La passion qu'elle avait pour la créature, bien plus que pour les créateur, mais éduquée en couvent, elle savait les mots et les mines qu'on devait faire quand on croyait fermement en Dieu. Elle contrefaisait à merveille la dévote ; elle l'était d'ailleurs elle-même, quand sa morale était trop fermement malmenée. Ainsi le marquis de Nemours avait-il été vertement sermonné quand il l'avait affublée d'un frère bâtard.

La main d'Ysilgonde, serrée dans celle de Clément, s'en défit pour saisir celle du prélat dont elle baisa l'anneau.


Mariez-nous aujourd'hui, que l'injustice ait tort.
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L_aconit
Quelques oiseaux curieux ont cessé de chanter, et même le chant des malades s'est arrêté de siffler. Il y a dans l'air l'expectative des heures troubles, ou la fièvre n'émane plus du mal, mais des coeurs qui se penchent silencieux attendant qu'on les adoube.

- Bien avant ce soir? C'est heureux, je m'apprêtais à partir,
He qu'ouï-je ? Un clerc ne peut s'en aller quand il s'agit d'unir...
Quant à mourir d'envie, taisez ce blasphème qui nous ferait rougir,
Il n'est digne ni de votre bouche, ni de l'écho que j'entends.


Il s'étonne, cueilli à l'improviste par ces deux enfants qui ont fait taire de leurs élans toutes les nones de l'Ostel Dieu. Leurs silences encouragent les autres à parler, et leurs oreilles n'en ratent pas une virgule... Nicolas marque un temps d'arrêt qui étire sa sentence dans un épais silence. Jusqu'à ce que le premier sourire ne s'occupe de le fendre.

- Veille le ciel sourire à cet acte pieux, et puisse
L'avenir ne pas nous le reprocher par un chagrin !
Car ces joies violentes ont des fins violentes,
Et meurent dans leur triomphe : flamme et poudre,
Elles se consument en un baiser. Le plus doux miel
Devient fastidieux par sa suavité même,
Et détruit l'appétit par le goût : aimez donc modérément:
modéré est l'amour durable; la précipitation n'atteint pas le but plus tôt que la lenteur.


Les yeux bleus se posent sur la bague que le baiser de la jouvencelle recouvre d'insistance, puis sur le damoiseau dont il détaille les traits. Constatant à l'appui des regards et aux lèvres convaincantes que les jeunes gens ne l'entendront pas autrement que ce pourquoi ils sont venus, le prélat lève deux mains blanches à la résignation des braves. Qui est-il pour empêcher deux amoureux de s'aimer dans l'ordre du divin? Loin de lui l'idée que ses visiteurs fussent les deux jeunes gens qu'Isaure et tant d'autres ont largement recherchés pour les empêcher de s'aimer. L'ignorance aura donné l'avantage à ces futurs amants. Le prêtre incline minois et les convie d'un geste.


- Allons, venez avec moi, et nous aurons bientôt fait ;
Sauf votre bon plaisir, je ne vous laisserai seuls
Que quand la sainte Église vous aura incorporés l'un à l'autre.


Traversant le pavé, ils les conduit à la chapelle Saint Louis dont il pousse la porte, et les invite à entrer pour s'incliner devant Dieu. S'il les unit vite, peut-être arrivera-t-il demain avant le soir pour savourer son souper?

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Chapelain de l'Ostel Dieu à Paris, Evêque de Perigueux, Exorciste de Rome
(En Bleu italique, les pensées Laconiques.) galerie d'avatar-Recueil
Clement.lexhor
L'impatience grandissait dans le cœur et les tripes de l'Amahir. Lui était amoureux pour la toute première fois. Et que ne bénissait-il pas chaque matin le Ciel d'avoir placé sur son chemin cette céleste créature. En y repensant, il se voyait encore, quelques mois auparavant, jurant ses grands dieux que jamais il ne se marierait. Il était bien loin ce temps où il répondait aux bravades d'Erwelyn par d'insolentes menteries. Il n'avait suffi que de quelques heures pour qu'il se sente irrémédiablement attiré par Ysilgonde. Et moins de temps encore pour savoir qu'il était amoureux d'elle.

Il ne remarqua pas les battements de cils qu'elle adressait à l'archevêque. Il ne fronça pas le sourcil lorsqu'elle détacha sa main de la sienne pour aller baiser l'anneau épiscopal. Clément aimait avec la pureté et l'innocence qui ne se doit qu'au premier amour ; sa fiancée était l'être le plus parfait au monde, et le jeune duc gardait yeux et esprit bien clos lorsqu'il était question qu'il soit porté atteinte à cette dite perfection.


Que Monseigneur en soit remercié.
Et que d'une chose il soit assuré :
Si j'en juge par toute la bonté que votre coeur a,
Croyez qu'avant vos vingt ans on vous sanctifiera.


Lorsqu'ils furent face à la chapelle, la fébrilité le gagna. Avaient-ils tort de se presser ainsi ? Mère n'approuverait pas. Grand-Père non plus. Quant au marquis de Nemours... Il était à peu près sûr que, s'il l'apprenait, il voudrait le tuer. Mais son regard se posa sur les boucles blondes de sa promise, dans lesquelles il eut instantanément envie de plonger ses mains. Et il se dit que, finalement, ce n'était qu'une question de temporalité. Qu'ils prenaient simplement un peu d'avance sur les cérémonies officielles, mais qu'en fin de compte, ils se marieraient de toute façon. Personne n'avait à être au courant de cette aventure. Personne sauf le Très-Haut, qui approuverait sans doute que l'on s'unisse sous son regard avant de forniquer gaiement comme le faisaient pourtant nobles et gueux.

Alors il sourit, en entrant dans la petite bâtisse qui sentait la cire et l'encens. Il posa genou à terre, puis se signa, avant de se relever pour cueillir les mains d'Ysilgonde dans les siennes. S'accrocha à son regard et, galant homme, décida de lui laisser une ultime chance de revenir sur sa décision.


Nous voici, Ma Mie, aux pieds de l'autel,
Mais si en votre coeur la crainte est telle
Que vous ne sachiez s'il est bon ou non de m'épouser,
Plutôt que de vous taire, de grâce, parlez ;
Ou alors avançons-nous vers le choeur,
Mon Âme, je vous épouserai sur l'heure,
Et ainsi s'ouvrira le roman,
De la belle Ysilgonde et de son Clément.

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Ysilgonde
Souvent, les mariages étaient d'un ennui mortel. Tous se ressemblaient. Ysilgonde n'y avait jamais vu que les mêmes têtes mornes, les mêmes formules consacrées, les mêmes félicitations hypocrites. On s'ennuyait au banquet, on s'ennuyait au bal.
Même le mariage de la dauphine lui avait paru d'une infinie longueur, de ces mariages qu'on ne finit jamais de célébrer parce qu'en réalité, plus personne n'est dans l'ambiance après quelques minutes d'attente sur le parvis. Le défilé des carrosses est insupportable de longueur, les gens se pressent, se massent. C'est insupportable.
La marquise aurait bien le temps de subir un vrai mariage d'apparat, où toute la bonne société sera conviée. Les noces d'un Amahir et d'une Josselinière seront évidemment un grand événement, et par conséquent, un événement ennuyeux. Les parents se disputeront des préséances, les enfants piailleront, et il y aura trop de monde, et même des gens auxquels les mariés n'auront jamais dit un mot de leurs vies.

Ce mariage là, que la blonde et le blond s'offraient dans la clandestinité était donc bien plus original, plus sincère, moins convenu, et surtout, rien qu'à eux. Il n'y avait ni musique, ni présents, ni témoins, ni bans, ni trompettes, ni parents. Son bras, elle ne le donnait qu'à son fiancé, sa main, à celui qui devenait son mari.


Les yeux rivés sur lui, elle déclamait son amour en vers, sa passion en rimes.

Je fais le voeu sincère et sans ambiguïté,
De toujours te chérir et de toujours t'aimer.
Clément Jules Lexhor, mon amour éternel,
Je t'épouse ce jour, devant le Dieu du Ciel.
Je te promets amour, soutien, fidélité,
Je serai une épouse, une femme comblée,


A genoux devant l'autel et le prêtre, elle fit acte de contrition et entama d'un filet de voix un credo, qu'elle chanta comme on lui avait appris au couvent ; elle savait que lors d'épousailles, on le récitait.
Ses grands yeux se posèrent sur le prêtre - Dieu qu'il était beau ! : elle implorait sa bénédiction.

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L_aconit
L'évêque fit appeler Soeur Heuse, qui d'un pas timide vint se poster non loin des époux, en lieu et place de témoin valable pour l'église. La soeur, dans un silence religieux, observa les jeunes têtes en songeant à ce qu'aurait été sa vie si elle aussi, avait pris la bague au lieu du voile... Elle récita un crédo et se signa prestemment, dans le même élan que Nicolas.


Ysilgonde , Clément, vos prières sont faites
recevez des mains de l'Eglise le sacrement qui va faire votre bonheur.
Ne prenez pas à la légère l'engagement que vous citez céans
devant tous, et surtout le Très haut, vous allez vous unir
Traversant les années pour le meilleur et pour le pire,
Que Dieu vous bénisse ! Amoureux enfants!


Il pose sa main sur le voile de la jeune vierge, et d'un ton harmonieux lit un passage de la vie d'Aristote: Stagire , la comète et le sage époux attendant l'enfantement de son épouse.


Clément, entend à son exemple le père noble et sage, soucieux de son épouse
Son existence marquée par la justice, le travail et l'honneur donnent réflexion.
Voilà l'exemple que tu dois suivre. C'est là que se trouve la clé du bonheur.
Levez vous mes enfants. Debout récitez devant dieu votre serment .
Clément veux-tu prendre ysilgonde pour épouse, dans la sainteté et la confiance,
Vivre avec elle dans l'amour de chaque jour? Faire dépendre ton bonheur du sien,
Donner par l'exemple de votre union un signe visible de l'amitié de Dieu sur terre?


Et se tournant vers la jeune fiancée , répétât dans l'écho de la chapelle :


Et toi ysilgonde, veux-tu prendre Clément pour époux dans la sainteté et la confiance,
Vivre avec lui dans l'amour de chaque jour? Faire dépendre ton bonheur du sien,
Donner par l'exemple de votre union un signe visible de l'amitié de Dieu sur terre?
Tu n'as qu'à dire que tu le veux, et je vous donne sur le champ au bon Dieu.

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Chapelain de l'Ostel Dieu à Paris, Evêque de Perigueux, Exorciste de Rome
(En Bleu italique, les pensées Laconiques.) galerie d'avatar-Recueil
Clement.lexhor
Enfin ils en arrivaient au moment tant attendu. A l'instar de sa fiancée, il s'agenouilla, et récita de bon coeur ses prières. Quelle raison aurait-il eu d'en vouloir à Dieu, alors même que celui-ci leur permettait — déjà, enfin ! — de se marier, et d'entamer sous le sceau du secret leur vie maritale ce qui, soyons honnêtes, était mille fois plus palpitant encore.

Il n'écouta qu'à peine la lecture, tout plongé qu'il était dans la contemplation du profil délicat d'Ysilgonde. Bientôt, sa femme. Il n'y avait que quelques mots à dire, et il les dit, poitrine bombée de fierté, sourire aux lèvres, et regard énamouré posé sur l'objet de ses convoitises.


Oyez donc, Monseigneur : Je le veux ;
Pour toujours et à jamais, je l'appelle de mes vœux.


Puis il se tourna vers elle, et lui prit les mains.

Ma Mie, sous le regard du Très-Haut je te promets
L'amour, le soutien, la fidélité,
Et de te faire honneur la nuit tout autant que le jour,
Tes joies seront miennes, et je partagerai tes peines,
Sois malade, je t'offre le sang de mes veines,
Mon Ysilgonde, sache que je te chérirai toujours.


Il n'était pas question de sourire. Sérieux dans sa profession d'amour et de foi, il attendait la réponse de l'Aimée, non sans une légère pointe d'anxiété.
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Ysilgonde
Le voulait-elle, ce mari ? Et surtout, qu'en voulait-elle ? Après tout, c'était étrange, après une jeunesse entière de pieuse éducation, de réprimandes, de contrôle de ses émotions, de ses faits et gestes, de vouloir soudain cette liberté. Avait-elle seulement le droit de vouloir quoi que ce soit, si ce n'était la volonté de son père, de sa belle-mère, de sa famille, de Dieu ?
Là, soudain, elle fut prise d'un doute. D'ailleurs, le mobile de ce mariage secret n'avait rien de louable. Dieu le savait, qu'elle ne cherchait que la fornication. Dieu savait aussi qu'elle n'en était pas à son premier galop d'essai et il la châtierait sûrement pour ça. Dieu était-il vraiment miséricordieux ? Mais après tout, ils ne tarderaient pas à régulariser la situation. Ce n'était, somme toute, qu'une avance sur salaire qu'elle demandait.
Mais si elle tombait enceinte ? Hors mariage ? Aurait-elle le temps de cacher les choses avant de procéder à une vraie cérémonie en grandes pompes avec la cour et tout le toutim à Notre-Dame ? Isaure la percerait à jour, c'était certain.
Son père la ferait emmurer vivante et jetterait le semi-bâtard au puits comme il avait menacé de le faire de Lestan.

Elle regardait Clément. Lui ne semblait pas hésitant. Était-il si bon qu'elle le pensait ? Après tout, il lui avait raconté ses exploits sexuels avec des dames de bordel, le ton vantard. Elle n'était peut-être qu'une proie qu'il souillerait avant de la laisser choir dans le déshonneur et le discrédit pour toute sa vie.
Clémence de l'Épine devait sacrément rougir, au-dessus des cieux. Pauvre mère. Elle n'avait pas même été grande consommatrice dans les liens du mariage.
C'était terrible, cette situation. Cette question, en réalité, en soulevait bien plus qu'elle n'apportait de réponse.
Il s'écoula un temps avant que la blondine ne réponde. Le temps qu'une goutte perlât sur son front et aille s'écraser sur son épaule.


Je le veux, désormais, que mon âme soit tienne,
Que tes souhaits, mes désirs deviennent,
Mon mari, je serai ton épouse fidèle
Attachée tout à toi par un lien éternel.

Devant vous, Monseigneur, j'affirme confiance,
Sainteté et amour, bonheur jour après jour,
Nous ne vivrons jamais dans la moindre défiance,
En ce que j'ai choisi d'aimer Clément toujours.


Ce dit, elle s'abaissa encore vers le prélat, qu'elle remercia de chaudes larmes en vers lyriques, symphoniques, synodiques.


Avec mes excuses les plus plates.

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L_aconit
Alors soyez mariés sur le champ
par la grâce de Dieu je le proclame
et vous ne mettrez sans doute pas longtemps
à essuyer de ces joues roses les larmes
car les baisers seront légitimés
et vos enfants seront baptisés
d'un amour infini que vous transmettrez
ah fiers enfants; que ne rendrez-vous pas fiers vos parents!


En cela, quelle erreur. Le Prélat ne savait pas si bien dire...


Là; voilà que la Grosse marie sonne, l'entendez-vous?
C'est de bon augure, allons, pressez, allez vous embrasser sur le Parvis de Notre Dame,
Je vous déclare maintenant unis par les liens sacrés du mariage.
Ce que Dieu a uni, nul ne pourras le désunir vous le savez.
Enfants vous n'êtes plus tant, vous avez désormais le monde à vos pieds.


Heuse se signa dans le même geste que l'évêque , et un sourire avait même fini par naître sur ses lèvres... A quoi peuvent bien penser les nones, en regardant les autres vivres ce qu'elles ne connaîtrons jamais qu'en spectatrices....? C'est le mystère qui s'étalait là, sur le visage encore jeune, et plein de secrets de la religieuse.


Ainsi furent mariés en secret Ysilgonde et Clément.

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Chapelain de l'Ostel Dieu à Paris, Evêque de Perigueux, Exorciste de Rome
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