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[RP] Midi trente devant le portail

Zoyah
Le soleil était à son firmament, réduisant considérablement les ombres du palais et de ses hautes tours blanches. Seule la rangée d’arbres feuillus qui subsistaient encore sur l’esplanade bien entretenue, implantée entre Louvre et Seine, apportaient quelques bienfaits en ce début de saison chaude. La fourmilière grouillante de vie qu’était le palais royal avait baissé en activité à l’exception probable des cuisines. Le flux des badauds et autres officiers s’était finalement taris et le château dans son entier semblait s’être attablé devant une tourte ou un faisant grillé.

La Princesse de Chevreuse venait à l’instant de rallier le Louvre où elle ne vivait pas, n’ayant jamais trouvé le temps de se faire assigner un logement. Cela faisait bien des années qu’elle réservait un étage entier d’une auberge non loin de là et elle s’en contentait pour l’instant, puisqu’elle y trouvait une certaine quiétude loin de la touffeur des salons royaux. Elle avança lentement ses jupons vaporeux de cendale azur jusqu’à un banc de pierre abrité sous un vieil arbre à la haute futaie. D’un geste raffiné et féminin, elle replaça sa longue natte de jais dans laquelle s’était emmêlé un galon d’argent, sur son épaule comme à son habitude. La dame était en avance au rendez-vous qui lui avait été fixé. Un choix volontaire afin de relire les quelques mots qu’elle avait couché sur le vélin dans le but d’organiser ses idées qui étaient encore fort confuses. Temps nécessaire également pour s’assurer qu’elle aurait un discours cohérent, qu’elle ne le questionnerait pas à tort et à travers, que sa curiosité naturelle ne s’emballerait point trop et la pousserait à devenir indiscrète, ou pire, impolie. Elle avait beau avoir une adorable frimousse, un sourire délicat sur une bouche ravissante, cela demeurait absolument inefficace ( en plus d'être un avis totalement subjectif !) d'autant plus qu'elle n'avait jamais su bien en jouer. Et c'était d'autant plus vain que son vis-à-vis consistait en un homme qu'on décrivait comme abrupt, qu'on devinait probablement insensible au superficiel et surtout, qui pouvait certainement perdre patience à tout moment.

Pourtant, elle connaissait bien ses propres travers, et l'altesse savait qu’une fois la discussion entamée, elle babillerait plutôt deux fois qu’une, passant d’un thème à un autre sans même qu’il y ait de lien entre les deux. Tout comme elle n’avait jamais été témoin de la férocité de son interlocuteur qui s’était toujours montré courtois avec elle. Le visage encore paisible, elle méditait le nez penché sur ses notes, tout en jouant avec sa ceinture d’orfèvrerie dont le long pendant glissait entre ses doigts fins. Si Zoé avait plus ou moins – et encore - compris pourquoi le choix du capitaine s’était porté sur elle, il y avait encore un brouillard suffisamment épais pour qu’elle hésite à le franchir. Beaucoup de « Et pourquoi ? » et de « Et si ? » lui brûlaient les lèvres, lui envahissaient la tête, aussi, la Princesse de Chevreuse espérait que l’entrevue à venir lèverai le voile sur ses doutes. Car ce n'était pas une banale demande qu'il lui avait faite...

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Wayllander
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_____[Couloirs du Louvre - quelques instants plus tôt]


___-Dégagez le passage, bande de baltringues ! Sneller !

Le convoi du repas de la Reyne croisait, à son plus grand malheur, le Comte de Rubroëk.
Une petite dizaine de domestiques chargés de plats et chariots divers, qui se retrouvaient obligés de se coller précipitamment de part et d'autre du couloir, pressés contre les murs, pour laisser passer l'austère flamand. Ils l'avaient mis de mauvaise humeur. Car malgré ce que pouvaient bien dire les mauvaises langues, il n'était pas un malade. Il n'aurait assurément pas insulté gratuitement de braves serviteurs de la Couronne simplement car ils étaient sur son chemin. Au contraire, ceux qui le connaissaient savaient qu'il avait pour ces gens un respect bien plus grand que pour les oisifs en tous genres qui vagabondaient au sein du Royaume.
Mais alors là. À sa première demande, polie, de lui faire place, ils avaient eu le toupet de lui demander de reculer, et d'attendre qu'ils passent. Il voulait bien faire un effort, mais la limite de son affabilité était tout de même assez rapidement atteinte. Et plus encore ce jour, car il était attendu. L'horaire du rendez-vous avait été fixée avec une grande précision, et il tenait absolument à être à l'heure. Comme il se plaisait à le répéter -ou plus justement, à l'assener- à ses collaborateurs, la ponctualité était la politesse des Roys. Et puis, il en allait d'une affaire d'importance.
Aussi, sa canne toujours à la main et l'expression particulièrement dure, il imposa par sa carrure un passage au beau milieu du convoi, le regard droit devant lui. Relativement rapidement eu égard à l'état de sa jambe, il se dirigea sans perdre plus de temps vers le Grand portail du Palais. De fait, il ne se traînait jamais lorsqu'il se déplaçait. La mollasserie ou la nonchalance ne faisaient pas partie de son vocabulaire.

Parvenu sous les murs du Palais, place parfaitement décrite précédemment, Leffe n'eut pas de difficulté à repérer Zoyah, bien seule en ce lieu à cette heure. Ce qui était, d'ailleurs, le but de l'opération. Il fût légèrement surpris de la voir penchée sur un vélin. Impossible cependant de savoir, de la distance où il se trouvait encore, de quoi il en retournait. Sans doute relisait-t-elle sa dernière missive. Ou bien, plus probablement, s'intéressait-elle à tout autre sujet en patientant pour lui. Ne serait-ce que dans le cadre de ses recherches pour « le » projet.
Tandis que chaque pas, et chaque crissement de canne sur le gravier, le rapprochait de sa cible, le Comte réfléchissait à la manière dont il allait l'aborder. Il n'était habituellement pas homme à se poser beaucoup de questions à ce sujet, ayant confiance en son sens aiguë de l'étiquette et de la bienséance. Mais là, il sentait qu'un compliment serait de bon aloi. Après tout, il lui demandait une importante faveur, et l'avait fait se déplacer jusqu'ici. Un commentaire sur la beauté de sa robe, peut-être ? Ou de la vitalité matinale de ses traits ?
Lorsqu'il fût assez près d'elle, il s'arrêta, posa une main sur sa cuirasse pour la saluer, et se racla la gorge.


-Vous paraissez bien anxieuse, Princesse. Il marqua une légère pause, en fronçant les sourcils. Le compliment semblait mal tourné. Cela vous vieillit.

Si si, c'était un compliment.
Car cela impliquait qu'elle paraissait jeune, le reste du temps, et ça l'incitait à ne plus s'inquiéter davantage.
Non ?

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    L'accent de Wayllander ? Une petite idée là.
Zoyah
La princesse de Chevreuse, alors penchée sur ses vélins, en était encore à se questionner sur l’énigmatique Comte de Rubroëk quand ce dernier amorça son approche. Un roc en apparence, dont les écrits tendaient pourtant à illustrer une personne un peu différente. Plus prévenant et attentif, peut-être. Si la dame s’était arrêtée au vernis d’austérité qui le couvrait, à ses dehors sévères, et à ses expressions inflexibles pour le peu qu’elle en avait vu, elle en aurait probablement déduit que sous son armure de métal devait se dissimuler une carapace solide qui recouvrait une couche de marbre froid qui devait former une gangue autour d’un cœur bien vivant. Mais voilà, elle soupçonnait qu’il y avait un autre homme sous ces allures bourrues, une ombre dont la forme et le fond resteraient probablement indéfinis pour elle. Zoé n’osait se lancer dans des hypothèses hasardeuses sur la vie passée du Flamand, sur sa jeunesse apparemment dissolue qu’il avait à peine effleurée du bout de la plume dans ses lettres, mais qui les conduisaient tous deux à se rencontrer aujourd’hui.


Et bien que l’homme se soit avancé sans chercher à se dissimuler, la princesse ne l’avait pas entendu en dépit de la canne qui cognait le sol. Aussi, elle releva brusquement le nez quand Wayllander l’interpella. Surprise, elle posa ses yeux allongés sur lui, le considérant longuement, avant de reprendre vie pour répliquer avec un léger sourire en coin… « Ce n’est pourtant pas moi qui m’appuie sur une canne ! ». Vieilli … autant dire que le compliment était tombé à l’eau. Sur l’instant, elle pensa même qu’il cherchait à la taquiner. On s’éloignait alors du croque-mitaine du Louvre. Zoyah se redressa et le salua d’une inclinaison du chef … « Le bonjour va votre Grandeur… quand même … Et je ne suis point anxieuse, juste songeuse »… bougonna-t-elle. « C’était justement vers vous qu’étaient tournées mes pensées » … crut-elle bon de préciser. Bien vite les papiers étalés sur le banc furent rassemblés et glissés dans une pochette en cuir. Penchée sur le porte-document qu’elle refermait, la princesse ne prit aucune pincette pour lui demander… « Pourquoi est-ce que sa mère vous hait ? »
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Wayllander
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Un léger rictus déforma le visage du Flamand, à la réponse de la Princesse.
Il s'apprêtait à lui formuler une réponse bien sentie sur leur différence d'âge, et les combats champenois qui l'avaient mené dans l'état où il se trouvait -car il fallait reconnaître qu'il ne vivait pas tellement bien le fait de devoir se déplacer aidé d'une canne, aussi, sujet sensible- lorsqu'elle eut la présence d'esprit de poursuivre sa tirade. Songeuse, soit. Et à son sujet. D'un regard quelque peu surpris, il suivit ses gestes lorsqu'elle rangea précipitamment ses multiples vélins étalés autour d'elle. La curiosité avait beau ne pas faire partie de sa nature, il aurait bien aimé savoir ce qui se racontaient ces nombreuses lignes. Mais son étonnement fût plus grand encore, lui faisant instantanément oublier les papiers, lorsque Zoyah posa sa première question. C'était là une entrée en matière qu'il aurait bien plus facilement imaginée sortir de sa propre bouche que de celle de sa méticuleuse et habituellement précautionneuse interlocutrice.
Le Comte fronça légèrement les sourcils, et garda silence quelques secondes en réfléchissant à la réponse qu'il allait donner. Les raisons qui pouvaient pousser une jeune femme de bonne famille abandonnée enceinte à détester le géniteur lui paraissaient évidentes. De fait, il extrapolait plus qu'il ne l'avait constatée la haine que la mère en question devait avoir contre lui. Il ne l'avait en réalité jamais revue après son départ. Quelques vingt années plus tôt, le jeune homme inconscient et désillusionné qu'il avait été avait causé plus de mal qu'il ne l'avait voulu. Il ne pouvait désormais plus que tenter de recoller les morceaux, brisés depuis bien longtemps. Pour combler l'attente provoquée par sa longue réflexion interne, il prit place sur le banc aux côtés de Chevreuse avec un discret soupir, posant sa canne sur ses genoux. Le regard porté au loin sur les superbes jardins du Louvre, sans vraiment les regarder, il répondit finalement d'une voix assurée qui ne trahissait rien du léger trouble qui avait pu être le sien.


-Je n'ai jamais eu l'occasion de lui poser la question. Il va falloir vous contenter, comme je le fais, d'hypothèses. Semi-réponse, semi-vérité. Il tourna la tête vers sa voisine. C'est cela qui vous fait tant songer ?

Question rhétorique ; il se doutait bien que non.
Le courrier de la Princesse qui avait précédé cette entrevue avait d'ailleurs été porteur de nombreux autres motifs de questionnement. Certains dont les réponses seraient aisées à fournir, et d'autres un peu moins. Il comptait bien se montrer le plus franc possible, toutefois. Mais pas forcément le plus exhaustif.

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    L'accent de Wayllander ? Une petite idée là.
Zoyah
À cause du rictus dont il la gratifia suite à l’évocation de la canne, la princesse déchiffra aisément le mécontentement du Comte mais ne s’en alarma pas outre mesure et ne s’en blâma encore moins. Rubroëk était pour elle un militaire aguerris qui ne devait pas supporter qu’on s’apitoie sur son sort, aussi, elle n’avait glissé aucune malice dans ses propos. Au contraire, elle pensait même lui épargner une vexation certaine si elle était venue avec un ton compatissant et des mots chargés de mansuétude. N’ayant jamais eu à subir les foudres du Flamand, elle ne devina pas qu’elle avait échappé alors, à quelques traits bien piquants qui n’auraient probablement pas manqué d’heurter sa forte susceptibilité et l’aurait condamnée à afficher une lippe boudeuse tout au long de l’entretien. Une fois le Comte assis, Zoyah rassembla ses bleus jupons et posa, à son tour, ses fesses sur le banc. Sur ses genoux, reposait le porte-document contenant les papiers qui avaient aiguisé la curiosité de Wayllander. Et comme Zoé ne comptait pas lui avouer qu’elle avait éprouvé le besoin de coucher sur le vélin les milles questions auxquelles elle comptait le soumettre, elle n’en pipa mot de crainte de le voir prendre congé sur le champ.

A sa première interrogation, elle reçut une réponse qui lui laissa un goût de trop peu. Elle retint une légère grimace, mais s’accorda un soupir. Il ne lui facilitait pas la tâche et elle comprit alors qu’elle devrait probablement lui tirer les vers du nez afin d’obtenir un portrait fidèle de la situation. Elle dodelina lentement du chef, non, ce n’était pas particulièrement ça qui la rendait songeuse. L’altesse puisa dans le peu de courage qui l’animait, prit une inspiration, tourna son doux minois vers le rude faciès du Flamand et décida de faire preuve d’une imprudente et inhabituelle franchise. Elle lui révéla une partie de ses pensées
… « Je me disais juste que le jeune homme que vous avez été non, elle ne dit pas qu’il est vieux maintenant !... était bien différent de l’homme que vous paraissez être en ce moment. Je me demandais quels événements avaient pu vous façonner aussi ... hésitante, baissant le ton... caparaçonnéLa dame haussa légèrement les épaules, consciente de la naïveté et peut-être même de la bêtise de ses interrogations. Les tempes fortement rosies, un rien gênée par cet aveu, elle lui dédia alors un sourire timide en guise d'excuses.

Arrachant son regard à celui de Wayllander, Zoé l'ancra sur le château dont les pierres blanches étaient éclatantes au soleil. Lui présentant son délicat profil, elle poursuivit ...« Bref, c’est sans importance, je vous prie de me pardonner mon indiscrétion, cela ne me regarde en rien, revenons-en au sujet qui nous intéresse »… embraya-t-elle puisque de toute façon, elle n’était pas là pour le psychanalyser. « Si je vous ai posé cette question, c’est que je m’interroge sur les sentiments de cet enfant envers vous. Si la haine ressentie par la mère à votre égard est encore présente des années après, elle a pu la transmettre à sa fille. Et il me chagrinerait d’héberger chez moi quelqu’un qui puisse vous vouloir du tort et par extension chercher à nuire aux miens en pensant que cela pourrait vous atteindre… enfin votre honneur. »… elle tourna à nouveau la tête vers lui et l’interrogea du regard, cherchant à savoir s’il suivait le raisonnement qui était le sien. « Que savez-vous de cette petite, l’avez-vous déjà vu au moins? Vous semble-t-elle en colère ? … comment est-elle ? »… et bien qu’elle aurait préféré faire preuve de retenue, elle débita la première salve de questions en espérant qu’il pourrait lui apporter des réponses et non des hypothèses.

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Wayllander
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Les mots de la Princesse laissèrent le Comte pensif le temps de quelques secondes.
L'homme qu'il était par le passé, très -trop- jeune, désespéré et désillusionné après le décès tragique de ses parents était en effet bien différent de celui pragmatique et froid qu'il était devenu. Et ce dernier avait prié plus d'une fois pour la repentance du premier, tâchant tant bien que mal de corriger ses erreurs. Chose qu'il faisait encore à cet instant précis, aussi désagréable puisse-t-elle être. Quant à la manière dont s'était opéré le changement… Une réponse complexe et longue, dont lui-même ne connaissait sans doute pas l'entièreté de son subjectif point de vue. Il avait vieilli. Il avait abusé durant de trop nombreuses années des penchants malsains des Hommes, de leur goût du sang. Mercenaire, il avait tué des dizaines, peut-être même des centaines, d'hommes et parfois de femmes pour le poids de sa bourse. Jusqu'à l'indifférence totale de la chose. Il lui avait finalement fallu frôler la retour auprès de son Créateur, après qu'il ait été laissé pour mort, égorgé dans un fossé, pour provoquer chez lui un soudain afflux de fanatique piété, le poussant à tout recommencer à zéro, guidé par le désir d'expiation, les remords et la honte. Mais il n'était pas prêt à parler de tout cela. Heureusement pour lui, Zoyah ne semblait pas attendre de lui qu'il le fasse, et elle revînt rapidement sur le sujet qui les amenait ici.
Après avoir écouté silencieusement sa flopée de questions, sortant avec peine de ses douloureux souvenirs, il secoua lentement la tête.


-Je ne l'ai jamais vue. Il marqua une courte pause, les sourcils froncés par cet aveu soutiré. Je ne sais d'elle que ce qu'elle veut bien m'écrire. En nee, elle ne me semble pas en colère. Frustrée, certainement.

Mais qui ne le serait pas, à sa place ? Abandonnée par son père alors qu'elle n'était pas même encore née, sans nouvelle de lui durant toute son enfance, voilà qu'il se mettait une fois enrichi et fieffé à envoyer à elle et sa mère lettres et pensions. Même guidé par de bons sentiments, un tel retour ne pouvait se faire en grâce. Toutefois, cela ne répondait pas à l'interrogation principale de sa voisine. Tandis qu'il se lissait la barbe d'une main, il prit une longue inspiration.

-En toute franchise, je ne sais comment elle réagira au décès de sa mère. Mais je doute qu'elle vous soit hostile. Elle me voit, et vous verra, comme un moyen inespéré de quitter sa basse condition. C'est une fille intelligente. Cela, il en avait été convaincu par la subtilité étonnante de sa plume, et ce qu'elle arrivait à exprimer entre les lignes. Lui ne s'attendait pas même à ce qu'elle sache écrire. Il reprit, l'expression dure. Et si elle vous causait du tort, soyez assurée que je vous la retirai sans discussion aucune.
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    L'accent de Wayllander ? Une petite idée là.
Zoyah
Silencieuse et observatrice. Une main lissant lentement sa longue natte noire, la Montalbanaise considéra longuement son vis à vis alors qu’il semblait en être à une de ces rares minutes où l’introspection vous entraîne jusqu’à des bas-fonds qu’elle n’a jamais éclairés encore. Elle le détaillait tant et si bien que l'audacieuse princesse ne songea même pas à détourner les mirettes quand les regards bleus & bleus s'affrontèrent au hasard de leur entrevue.

Il prit enfin la parole, brisant le silence qui pesait au-dessus de leurs têtes. La Princesse était restée sage et mutique tout au long des quelques bribes d’explications qu’il venait de lui délivrer. Elle le trouva peu loquace ou du moins, pas assez pour satisfaire sa curiosité naturelle et un peu excessive. Les lèvres closes, sans le lâcher des yeux, la jeune femme n’en avait pas terminé de son « auscultation » et tentait d’associer les expressions du faciès du Flamand aux sentiments qui auraient pu l’animer sans y parvenir. Colère ? Peine ? Soulagement ? Zoé ne voyait pour l’heure que l’auguste austérité dont il se drapait à chacune de leur rencontre dont elle ne savait encore en écailler le verni. Comment aurait-elle pu, elle le connaissait si peu.

Quand le Comte eut terminé de lui répondre, Chevreuse cilla quelques secondes, le temps pour elle d’assembler les pièces qu’elle venait de récolter afin de dessiner le portrait de la jeune âme qu’elle allait devoir héberger. Une jeune fille de quinze ans, intelligente, qui sera alors orpheline de mère, qui n’a jamais connu son père et qui ne manquera certainement pas de l’interroger. En bref, une ado maligne comme un singe qui aura toute les raisons du monde de vouloir cramer la terre entière ! Une situation rêvée ! Zoé en vint se demander - légitimement - si Rubroëk n’envisageait pas de la rendre un peu folle pour une raison qui lui échappait totalement.


Un pli de contrariété avait rapproché ses noirs sourcils… « De vous, comme de moi, nous nous lançons dans l’inconnu pour une inconnue, mais vous escomptez faire sa connaissance ? Vous … vous… hésitante, un rien agacée vous ne comptez pas juste me la faire livrer ? J’imagine que vous l’accompagnerez et que vous ne serez pas négligeant avec elle ? »… demanda-t-elle sur un ton qui discordait avec la tournure interrogative de la phrase et seyait mieux à de l’impératif. Comprendre par là, « tu ne va pas me lâcher toute seule avec ta mouflette révoltée et ses hormones en ébullition !»

Car la froideur de l’homme l’inquiéta soudain et que ses écrits venaient de lui revenir en tête. Il ne comptait pas reconnaître l’enfant et à dire vrai, la princesse avait été un tantinet vexée du ton employé pour évoquer la bâtardise de la petite. Là-dessus, elle reviendrait, quitte à se disputer avec l’homme du nord. Pour l’heure, elle se souciait plus de la température entre père et fille que Wayllander ne semblait pas encore prêt à réchauffer d’affection ou de bienveillance paternelle. Comme si la distance entre lui et sa progéniture illégitime n’était déjà pas suffisamment grande. Et elle, Zoyah, allait se retrouver peut-être entre les deux, mais pour jouer quel rôle ?
... « Qu’attendez-vous de moi au juste ? Et n’hésitez pas à entrer dans les détails »… ajouta-elle, exigeante.
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