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[RP] Plaire, aimer, courir vite.

Cixi_apollonia
Du fer, du feu, du sang ! C'est elle ! c'est la Guerre. Debout, le bras levé, superbe en sa colère, animant le combat d'un geste souverain. Aux éclats de sa voix s'ébranlent les armées ; autour d'elle traçant des lignes enflammées, les couleuvrines ont ouvert leurs entrailles d'airain. Partout chars, cavaliers, chevaux, masse mouvante. En ce flux et reflux, sur cette mer vivante, à son appel ardent l'épouvante s'abat. Sous sa main qui frémit, en ses desseins féroces, pour aider et fournir aux massacres atroces toute matière est arme, et toute âme soldat. Puis, quand elle a repu ses yeux et ses oreilles de spectacles navrants, de rumeurs sans pareilles, quand un peuple agonise en son tombeau couché, pâle sous ses lauriers, l'âme d'orgueil remplie devant l'œuvre achevée et la tâche accomplie, triomphante elle crie à la Mort: « Bien fauché ! »

Oui, bien fauché ... Vraiment la récolte est superbe, pas un sillon qui n'ait des cadavres pour gerbe... Les plus beaux, les plus forts sont les premiers frappés. Sur son sein dévasté qui saigne et qui frissonne, l'Humanité, semblable au champ que l'on moissonne, contemple avec douleur tous ces épis coupés. Hélas ... Au gré du vent et sous sa douce haleine ils ondulaient au loin, des coteaux à la plaine, sur la tige encore verte attendant leur saison. Le soleil leur versait ses rayons magnifiques ; riches de leur trésor, sous les cieux pacifiques, ils auraient pu mûrir pour une autre moisson.

Apollonia à l'abri des regards a versé une larme dans un soupir hagard, et sa lame est tombée sous un souffle à ses pieds. Parfois à trop de volonté rien ne germe, si ce n'est l'effroi et la colère qui s'étend au derme. Leçons ont été prises, et ne seront plus données. Si vivre c'est lutter, à l'humaine énergie pourquoi n'ouvrir jamais qu'une arène rougie ? Pour un prix moins sanglant que les morts que voilà l'homme ne pourrait-il concourir et combattre ? Manque-t-il d'ennemis qu'il serait beau d'abattre ? Le malheureux ... Il cherche, et la Misère est là .

L'heure semblait propice et la Hase candide, croyait dans le lointain d'une aurore splendide voir de la paix déjà poindre le front tremblant. On respirait. mais la leçon quittait sa couche... La trompette à la bouche, la fin de la guerre annonçait, plus âpre et plus farouche l'exil inéluctable loin des liens naissants à peine. Écrasant le progrès sous son talon sanglant sans pitié et sans peine. L'emporter ou périr. Voilà le bilan. On ressasse souvenir. Cette inconnue qui venait des champs ou de la forge était une soeur ; il fallait l'embrasser, - on l'a égorgée. Et chacun s'en ira chez soi? Dénué de pensées et vide?
On l'enverra être qui elle doit. Apollonia n'est qu'apatride.
Les hameaux, les cités s'écroulent dans les flammes. Les pierres ont souffert ; mais que dire des âmes ? Près des pères les fils gisent inanimés. Le Deuil sombre est assis devant les foyers vides, car ces monceaux de morts, inertes et livides étaient des cœurs aimants et des êtres aimés.

Guerre, au seul souvenir des maux que tu déchaînes, fermente au fond du cœur le vieux levain des haine. Dans le limon laissé par tes flots ravageurs des germes sont semés de rancune et de rage, Hase est vaincue d'être victorieuse et n'a plus, dévorant son outrage, qu'un désir, qu'un espoir : enfanter des vengeurs. Des vengeurs pour hanter ce Père réputé sans coeur. Qu'il la voit, qu'il l'entende, qu'il retourne les terres. Sa fille n'est plus à vendre, plus une trace aux parterres... Jeune fille est partie, avant la fin de la nuit. Sans un mot, sans un bruit, avant que Chevreuse ne l'emporte. Ainsi Paternel à force de revanches, arbre découronné, verra mourir ses branches. Adieu, sombres futurs ! Salut ailleurs nouveaux ! En ce départ raté tendresse est impossible. Plus d'ombre, plus de fleurs ! Et ta hache inflexible, pour mieux frapper le fruits a tranché ses rameaux. Apollonia s'échappe de ce joug infernal. Ce secret trop poisseux et ses murmures crânes.

Non ce n'est pas à nous, penseurs et chantres austères de nier les grandeurs d'un sabotage volontaire... mais à ce fier brutal qui frappe et qui mutile, aux silences destructeurs, aux fermetés inutiles, qui la ferme dans son horreur. Hase s'oppose par la fuite, évitant toutes les questions.

Un mot dans les affaires de Zoyah, glissé à son insu au feu de camps.


Citation:
" Altesse,

les jours ont passé, je sais que les langues se sont déliées. Croyez bien que je le déplore, j'ai eu pour seul tort de prendre mon frère en pitié, qu'il est cruel de savoir une vérité que recherche l'autre sans pouvoir la lui donner, surtout lorsqu'il est question de sang. J'aurais sans doute pu mentir à tous, mais pas à un frère, le tribut que le Comte me somme de payer est trop lourd pour un crime dont je ne suis pas l'auteur, et le prix d'un allié qui le connait et le comprend trop précieux. De toutes, vous êtes sans doute la seule que je n'arrive pas à approcher, vous parler m'est difficile. Voyez, l'on vous a placé aussi malgré vous dans un rôle, vous êtes la main du roy, d'une certaine façon. Alors de deux comédiennes qui ne connaissent pas leur texte, qu'y a-t-il à tirer? Guère je le crains.

Je vous remercie de vos attentions distantes mais réelles, de votre œil dans lequel j'ai su discerner aussi, la bienveillance qui vous sied si bien. Faites moi une dernière faveur; dites à mon père que je l'allège d'un souci de plus. Je ne tiens pas tant à tenir le premier rôle et à alimenter les discussions, quand il ne songe qu'à me faire oublier.

Dieu nous garde.

Apollonia."


    Plaire.

Il faut plaire. C'est ce qu'Il voudrait. Il voudrait , même s'il ne daigne pas reconnaître aux yeux du monde qu'Il l'a mise au monde, qu'elle plaise au monde. Comme pour satisfaire un orgueil secret. Plaire, elle sait faire. C'est un don inné que la vie lui a donné. même dure. même revêche. même fuyarde comme une jeune Hase. Apollonia plait de son indépendance. De sa fierté. De son indicible gout de liberté. Cixi plait de filer entre les doigts. Intenable, et attachante. L'on brûle de la saisir, d'en saisir le sens, de l'ouvrir comme une boite et d'en percer les froides rétentions. Couleuvre. Paradoxale. Elle plait de ne pas en dire assez, de laisser ses deux prunelles claires le faire à sa place. Chacun peut y lire ce qu'il veut. Pourtant sous la colère, sous le silence des lettres mortes, se tient son drame secret. Elle ne Lui plait pas à Lui. S'il en avait été autrement, elle aurait déjà été amenée à Rubroek. Elle se tiendrait devant Lui, à cet instant précis, et peut-être, sans doute même, Lui trouverait-il des ressemblances avec sa mère? mais se souvenait-il seulement de sa mère...

Une main gantée serre le médaillon contre son plexus.

    Aimer.

Faut-il aimer? Est-ce bien raisonnable... Aimer ne garde pas des ennuis. Il semble même qu'il les catalyse, sans quoi, Il aurait aimé. Sa mère. Puis Elle. Plutôt que de les reléguer au rôle de l'encombrant fardeau dont on ne sait pas bien que faire... Que l'on entoure de secrets. Que l'on travestit, étouffe d'un ordre, et que l'on veut bien surveiller de loin. De très loin. Par les yeux des autres. Faudrait lui dire que l'on ne peut pas aimer par le cœur des autres. C'est comme ... Regarder le soleil par les barreau des geôles. Elle a sentit qu'elle ne pouvait pas se garder d'aimer. De lier des attachements singuliers. Certains interdits. Comment pouvait-il en être autrement, elle était depuis la mort de Celestina, seule au monde. A l'âge où aimer prend son premier sens. Éveille les premiers sens. Des amours différents, d'intensités différentes. Autant de liens à ne pas entretenir, pour ne pas causer de tort.

Le bijou est rangé entre les entrelacs tièdes de cuir et de laine, senestre vient glisser le pouce au ceinturon, flirtant avec la garde d'une épée courte.

    Courir.


Courir était vital. Il ne fallait pas s'arrêter de courir, comme si le diable était à ses trousses. Partir en sens opposé, souvent, et contourner tous les endroits à découvert. C'est ainsi que le lièvre fait. C'est ainsi qu'elle a appris à vivre, depuis qu'elle était partie. Sauter des talus, se plaquer au mur à l'approche de pas... Se tendre d'un poumon figé... Et brandir lame à la gorge du pauvre hère qui sursaute et recule, un pli à la main, la main sur la garde. L'épée s'élève comme le Lansquenet le lui a appris. Toi tu aurais mieux fait de ne pas me suivre, disent les billes froides, les gestes qui se suspendent d'un seul cri:


- J'ai des messages! Ne... Arrêtez ...!

    Si tu ne veux pas te faire rattraper, Hase libre, il faut courir plus vite.
    Bastian avait tort. Tu n'as pas si peu d'importance que ça.

_________________
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Cixi_apollonia
On a parfois le cœur soulevé par la sauvagerie du monde.
On est écœuré par l'annonce d'une nouvelle tyrannie.
Le raffinement des anciennes par les mensonges.
L'odeur du fumier dans les villes.
L'horreur qui pèse sur tous nos lendemain.
On s'engloutit alors dans un sombre désespoir.
On a peur, on a honte puis on est triste d'être humain.
On réclame en pleurant une naissance nouvelle,
Ou du moins l'admission par baptême dans une nouvelle confrérie.


Et puis d'autres vinrent à elle. Et d'autres l'attendirent. Des lettres. Cachetées. Codées. Dissimulées. Bavardes ou silencieuses, de ce silence qui veut tout dire.

Citation:
De Bastiann de Leffe-Cetzes

*Missive courte, écriture pressée*
*Pli remis par un homme louche. Le frangin avait dit qu'il la ferait surveiller, il n'a pas menti.*


Cixi,

Serais-tu devenue folle? As-tu idée des conséquences de tes actes? Notre Père a été mis au courant par la Princesse, tout va être bien plus compliqué désormais. Si je puis si aisément te faire suivre, crois-tu que tu resteras bien longtemps hors de portée de lui?

Je sais à quel point ta situation est déplaisante mais parfois nous sommes obligés de faire des concessions si on veut s'assurer un avenir. Bref. Tiens moi au courant de ton avancée, de ce que tu fais.
Je préciserais également que tu m'as attiré des ennuis, à moi aussi. Chevreuse était persuadée que je t'avais aidé, incité à prendre ta liberté et partir.

Pourquoi dieu fallait-il que tout soit si compliqué? Tu m'épuise. Je ne vais pas te demander de revenir, le mal est fait. Prends soin de toi et garde moi au courant des choses, j'y tiens, j'insiste. Et ne fait pas de bêtises, vraiment.



    Je t'ai attiré des ennuis... Quel toupet Bastian.
    C'est toi qui es allé raconter à Chevreuse que tu savais tout,
    et tu m'imputes ta déveine...
    T'es trop con Bastian. mais je t'aime, Bastian.


Notre foyer lui même nous semble hostile
Comme si tous les talismans qui définissaient notre identité
S'étaient retournés contre nous.
On se sent déchiré et en pièce et en morceaux.
On prend alors avec terreur que si on n'peut pas s’asseoir pour réunir ces morceaux
Et les assembler à nouveau, on va devenir fou.


Campagne. Sentiers déserts. Givre du matin, bottes à raccommoder. Again. T'as les doigts gelés Cixi. Patrouille en cavaliers. Jeu de cache-cache. Faudrait pas se faire attraper si bêtement. De toutes façon Bastian a raison, sans te manquer de respect tu n'as pas tant d'importance. Ils traquent de l'angevin, comme tu as pourfendu de l'Angevin, pourquoi tu serais leur gibier? mais quand même... Détours. Passage à guet. Bottes foutues. Faudra s'arrêter en ville. Trouver de quoi répondre. Trouver de quoi reprendre la route. Ne pas se retourner. Ne pas se retourner. Tousse un bon coup.

Citation:

De Lenu de Massari

Courrier dupliqué et largement diffusé pour se retrouver dans plusieurs villes espérant qu'Apollonia puisse en prendre connaissance.

Apollonia,

Mes blessures m'immobilisent et j'enrage comme un loup en cage. Mais je me remets, petit à petit. Quant à Bastian, il est ainsi, fait de réflexion philosophiques, entier, avec un coeur qui palpite derrière son mur de glace. Il est ton père, en plus tendre. Surement parce qu'il est jeune. Et il est une chose certaine, Apollonia, c'est qu'il n'est pas fait pour la guerre, pour se battre et tuer sans en subir le retour en questionnements et remords.

Je suis fière de toi. Aucune blessure et la mort au bout de ton épée. Pour une première fois, c'est même excellent. Par contre, je suis triste, absolument triste d'apprendre que tu te sois sauvée. Sans même un mot pour moi. Sans même être venue me voir. Je n'aurais pas pu t'empêcher de quoi que ce soit, et tu le sais. Pas uniquement à cause de mes blessures mais surtout car je me revois en toi, au même âge. "volgare 1", j'ai tellement l'impression d'écrire comme une vieille là. Vois ce que tu fais de moi !

Tu serais venue, nous aurions parlé et je t'aurais aidée. Cachée ou autre. Mais je serais apaisée de te savoir en bonne santé, mangeant à ta faim et en sécurité. Et là, chaque jour mon sang se ronge à ne pas avoir de tes nouvelles. Si jamais. Et que tu n'es pas trop loin, tu peux rejoindre Ludry et son épouse Bloodwen, ils sont à l'abri, cachés en Bretagne. Je t'aurais bien envoyée vers Jurgen et Darria actuellement à Limoges pour aller à Périgueux, mais Anaella est avec eux et l'ambiance n'est pas des plus agréable. De plus, je ne veux pas que tu sois en sa présence sans moi, c'est une peste et trouverait le moyen de contacter ton père.

Il me reste une douzaine de jours à perdre patience, de là, je ne sais si j'irais à Périgueux chercher Jurgen ou si j'accompagnerais ton frère en Alençon et après filerais à Périgueux pour au final aller en Bretagne. Là, je dois voir mon père et régler une bonne fois pour toute notre différent. Ensuite nous irons à Saint-Malou, voir le bateau du pirate !

Sache que je garderais le secret, même envers Bastian, si jamais tu décides de me donner des nouvelles. Mais pense à lui, écris lui que tout va bien. Il souffre même s'il ne l'avouera jamais.

Lénù.



Pulpe des doigts redessine les déliés italiens. Sauter les talus, fouetter les flaques d'eau. Au point où en sont tes grôles. Trembler dans ton bliaud. Chut, tais-toi, sale traître, toi aussi tu finiras par geler. D'ailleurs tu ne bats pas si fort que ça, je ne t'entends qu'en cavalant dans la plaine. Rythme irrégulier. Il y a de l'orage mis à couver. Dormir contre l'écorce sèche. Ne pas fermer l'oeil, l'oreille aux aguets.

Citation:
De Siegfried fechter de Poméranie

Un simple pli. Le courrier est porté par un homme de confiance de Siegfried, qui montre son casque pour prouver qu'il est sans danger pour la Hase, une fois courrier donné et un paquet délivré, contenant des rations, il repart d'où il vient.


Apollonia, retrouve nous à Thouars et fais-toi discrète.

Siegfried


Mais parfois se produit pourtant une manière d’événements mystérieux et éblouissants,
Qu'on contemple encore longtemps après,
Et avec un émerveillement mêlé du respect qu'impose le sacré.



Tout était là. Trois battement de coeur essoufflés contre une lettre pressée au sein de cuir.
Elle ne lui aurait jamais dit. Jamais. A quatorze ans, on n'dit pas ces choses là.
On ne dit pas qu'on aime comme ça. On s'en va.


    J'peux pas Fechter. Peut-être qu'un jour tu comprendras.
    Peut-être que t'as dejà tout compris. Désolée.
    T'as pris la droite j'ai pris la gauche, je suis déjà repartie.


Fauve -Tunnel

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Zoyah
[Le 16 novembre 1466 en Poitou – premier coup de tonnerre.]


Les doigts de la princesse n’avaient trouvé le billet d’Apollonia qu’au petit matin, au moment où le soleil levant déchirait les langues de brumes qui couvraient le campement et colorait le ciel d’un joli rose poudré. Zoyah était assise sur la couche qu’elle partageait avec le grison. Le départ de son homme qui était encore plus matinal qu’elle -ce qui tenait du prodige lorsqu’on savait que la princesse se levait toujours aux aurores- l’avait sortie du lit couvert de fourrures. La jeune dame remettait de l’ordre dans ses affaires lorsque la lettre tomba de sa sacoche à l’instant où elle en tirait un foulard de soie bleue, seule trace de féminité conservée au milieu de l’attirail de guerre. Et lorsque ses yeux caressèrent le pli, elle resta d’abord interloquée. Cette absence de réaction ne dura que quelques secondes avant qu’elle ne quitte sa torpeur pour se prendre la tête entre les mains et lâche un rageur…« putain d’ado ! ». Abusé, quoi !

Cette gosse avait décidé de la rendre folle. C’était rare qu’elle jure ainsi, puisque des années à forcer des sourires polis et à déployer des trésors d’amabilité lui avaient enseigné à conserver le contrôle. A chaque fois qu’elle s’était échappée d’elle-même, qu’elle avait laissé parler ses sentiments de façon violente, qu’elle avait explosé de colère ou laissé la jalousie empoisonner sa langue… elle l’avait presque aussitôt regretté. Les yeux fermés, elle réfléchissait. Étrange. Compliquée. Réservée. Craintive. Des adjectifs qu’elle employait pour qualifier la jeune fille lorsqu’elle faisait part de sa perplexité à ses amis. Elle n’aurait pu trouver mieux et Apollonia lui en donnait encore la preuve, mais maintenant, elle ajoutait au portait de la jeune fille le mot « Inconséquente ».

Pourtant, la mioche avait tenté une approche, même fugace, qui avait touché l’altesse. Alors, Zoé s’était exercée à la considérer avec encore plus de gentillesse, lui trouvant même quelques qualités. Débrouillarde. Pieuse. Gentille. Capable d’empathie envers les autres. Elle en était même venue à espérer qu’à la fin de la campagne, elles seraient parvenues à faire connaissance et qu’Apollonia aurait fini par comprendre que Zoé était surtout de son côté. La princesse s’était littéralement fourvoyée. Elle était là, ne sachant que faire, à la fois inquiète et en colère. Oui, en colère. Mais cette colère n’était pas tournée uniquement vers Cixi, mais vers ceux qu’elle suspectait être dans le coup. Elle n’était pas aveugle, elle les avait vu se carapater, la bâtarde, le lansquenet et l'héritier, les uns après les autres pour aller se retrouver dans un autre endroit, la veille. Cela l’avait rendu méfiante, mais pas suffisamment.


« Je vais attendre… elle est probablement partie retrouver Lénu à Thouars »… pensa-t-elle à haute voix, les dents serrées, puisqu’elle avait bien remarqué que la jeune bâtarde passait du temps avec l’empoisonneuse, dite aussi l'italienne. De fait, elle soupçonnait bel et bien le lansquenet, l’italienne et l'héritier d’avoir aidé Cixi à la fuir et cela la contrariait franchement, car à aucun moment, elle ne s’était montrée dure ou malveillante envers la jeune fille. C’était pour elle une insulte, un manque de respect flagrant. Et l’altesse, sans se soucier de la véracité de ses suspicions, nourrit bien vite envers eux une animosité certaine. Déjà que deux de ces joyeux trublions s’autorisaient à la nommer par le surnom que seuls ses amis usaient, mais en plus, ils se foutaient ouvertement de sa gueule, sans compter qu’ils la mettaient dans une position difficile vis-à-vis de celui à qui elle avait promis d’en prendre soin. Lui. Lui qui lui avait envoyé sa fille unique comme un sac de linge sale, il ne manquait plus que le mot « vous pouvez me recoudre mes chaussettes, vous seriez bien aimable ma bonne dame ».


Néanmoins, elle dû admettre que le rejet que faisait Apollonia la blessait plus qu’elle ne voulait l’admettre. Zoyah avait l’impression très désagréable d’avoir été aperçue, pesée, jugée et déclarée inapte à la vitesse d’un battement de cil et cela, sur les bons conseils d’autrui, sans même prendre le temps de la connaître. Peut-être un peu de la même façon qu'elle venait de condamner le groupe d'amis, mais cela, elle n'était pas encore prête à l'admettre. Son premier réflexe fût d’avertir le paternel que son rejeton difficile avait encore faire des siennes, après tout il était son père, lui cacher aurait été inconsidéré. Le mot fut bref, froid, impersonnel. Et maintenant ? Agir, courir ?

Toutefois, ce sentiment en demi-teinte que lui inspirait l’enfant de Leffe s’estompa lorsqu’en taverne, après une conversation avec Bastian, elle découvrir que Cixi n’avait jamais rencontré son père, ce qui expliquait bien des choses. L’héritier lui avait affirmé n’y être pour rien, mais elle ne le crût pas vraiment. Pourtant, le bon cœur de la princesse parla aussitôt… « Pauvre enfant » avait-elle finit par se dire en regagnant sa tente.


« Orenç ! »… commanda-t-elle. L’homme après qui elle mandait n’était autre que le capitaine de la garde de Tulmon, celui qui l’accompagnait sur le champ de bataille et qui veillait sur elle. C’était un homme robuste, d’une hauteur que l’on pouvait considérer comme moyenne, qui affichait un milieu de trentaine affirmé puisque ses cheveux châtain clair commençaient à se parer de quelques filaments gris et blanc au niveau des tempes. Son visage était mangé par une barbe courte mais dense qui ne laissait apercevoir aucune parcelle de peau. Une balafre fine lui barrait le faciès du milieu du front, cassant l’arête du nez entre les deux yeux et se contournant l’œil jusqu’à se stopper dans la joue.

« Je suis là »… dit-il simplement sans s’encombrer de théâtrales salutations.

« Je veux que vous alliez à travers les campements de trois armées et que vous cherchiez Apollonia, la jeune fille qui est venu prendre Tencendur, l’autre fois »
L’homme grimaça, il n’avait pas vraiment prêté attention à l’allure de la gamine, ce n’était pour lui qu’une donzelle, enfin un garçon manqué,de plus dans l’entourage de la princesse.

« Oc, je vais surtout chercher le cheval, je le reconnaîtrais plus facilement qu’elle. »

« Merci ».. souffla-t-elle
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Zoyah
[Du 17 au 21 novembre toujours en Poitou : abasourdie]


Au 17 novembre, Orenç n’était pas encore revenu et donc, elle demeurait sans nouvelle. Le soldat avait d’abord louvoyé entre les tentes, sifflant et en appelant : « Tencendor ! »… de son fort accent du Quercy. Pour sûr que le cheval aurait réagi puisqu’il répondait assez bien à son nom. Il avait ensuite adopté une attitude plus discrète, fureté, écouté, questionné. Parfois le signalement semblait interpeler quelqu’un qui lui communiquait de vagues indications… « J’crois k’jai vu vot gosse et son bourrin par là-bas ! »… mais à chaque fois, il suivait une fausse piste, tombait sur une impasse ou surprenait quelqu’un ressemblant à Apollonia, mais qui n’était pas Apollonia. Il était passé d’un camp à un autre, d’une armée à une autre sans trouver la moindre trace de la bâtarde.Quant à la princesse de Chevreuse, elle avait guetté une lettre du Comte qui avait probablement explosé de colère en recevant son pli. Elle n’avait eu aucun mal à l’imaginer poussant de grands cris rageurs, tout en brassant l’air de ses bras, agitant sa canne qu’il ne manquerait assurément pas, d’abattre généreusement sur son monde à grands renforts de malédictions. Soupir. Tout ça, c’est de sa faute. Vieux grigou sans cœur.


Se devant à sa charge et gérer ses terres à distance, Zoé avait dû passer la matinée à expédier ses affaires courantes. Persuadée que la gosse était fourrée avec la petite troupe qui gravitait autour de l’Héritier, elle n’était pas encore assez soucieuse pour ameuter toute la province. Pourtant, une petite voix intérieure lui soufflait insidieusement ... « ne laisse pas cette pauvre enfant ainsi ». Elle relevait souvent le nez de ses écrits, rêvassant de longs instants. Ses pensées la ramenaient systématiquement presque quatorze ans en arrière, lorsqu’à douze ans, elle fut placée chez cette effroyable baronne qui lui en fit voir de toutes les couleurs, lui reprochant son extraction roturière, ses yeux trop clairs, son nez trop petit, ses lèvres trop grosses, ses cheveux trop noirs, et tant d’autre chose. Lorsque sa grand-mère l’avait emmené, elle avait dû lutter fort pour ne pas s’enfuir. Mais à cet âge-là, Zoyah avait déjà un étonnant sens des responsabilités. Ce n’était pas une rebelle, une aventurière qui vit d’amour et d’eau fraiche, une fofolle ou encore une bagarreuse. C’était une enfant sage, docile, gentille et intelligente, à qui on reprochait surtout d’être trop curieuse. Et bien que roturière, elle ne souhaitait pas faire honte à son aïeul, ni écorcher le nom de cette dernière. Le nom de rien du tout, mais c'était le sien et cela lui suffisait. Alors, elle subit cette vieille guenipe qui lui fit le plaisir de s’éteindre l’année de ses quinze ans, soit trois ans plus tard ce qui lui avait offert largement assez de temps pour l’agonir de reproches et lui aboyer dessus autant que faire se peut ! Elle se mit à imaginer qu’Apollonia devait redouter bien des tourments de sa part et les mots qu’elle avait couchés sur le vélin avaient contribué à l’éclairer. En réalité, elle la percevait comme le bourreau de son père. Rien d’autre. Et toute la gentillesse du monde n’y changera rien, il fallait autre chose, un autre déclencheur pour que la grande enfant, la presque femme modifie sa manière de la considérer. Durant tout l’après-midi, Zoyah s’était promenée entre les tentes à la recherche d’Orenç, d’Apollonia et de son cheval. Elle avait marché longuement au point que ses pieds lui étaient devenus douloureux. A ce moment-là, la princesse était loin d’imaginer que le ciel allait lui tomber sur la tête dans peu de temps.


Le soir tombant, elle fut contrainte de rentrer bredouille et retrouver le refuge de sa tente. Elle venait de s’affaler sur sa couche quand on lui remit le bulletin d’information du capitaine dont l’intitulé « ultime bulletin » aiguisa sa curiosité plus que de coutume. La lecture lui fit plus mal que n’importe quel rejet d’une jeune fille perturbée. Il abandonnait... ils les abandonnaient… Encore une fois, elle resta clouée sur place, assommée par la nouvelle. Car il ne s’agissait pas seulement de démonter l’armée et de plier l’étendard, mais l’homme leur annonçait qu’il se retirait du monde. Son homme voulait quitter Son monde. Ce n’était pas la première fois qu’il s’aventurait là où elle ne pouvait pas le suivre. En six ans, il lui en avait fait des outrages, mais là, c’était différent. Pleine d’incompréhension et chargée d’inquiétude, refusant de céder à la panique, elle l’avait calmement rejoint, espérant que c’était là qu’une tournure de phrase qu’elle avait mal compris, que c’était une erreur. La sentence tomba, de bourreau, elle devenait victime. Son compagnon avait décidé de vivre cloitré dans son appartement de Poitiers peut-être jusqu’à la fin de ses jours. La nouvelle l’avait fauchée et ses yeux étaient devenus brûlant de larmes qui refusaient de couler. Ce qu’elle ressentit alors, elle ne put mettre des mots dessus. Une chose était sûre, le sort de Cixi ne lui importait plus. Oubliée la gamine sur les chemins. Seuls comptaient pour elle leurs peut-être derniers instants.


Le lendemain, elle le passa entre les bras de son capitaine, à se faire cajoler tendrement, à le câliner avec une affection débordante. Ils s’embrassèrent passionnément, ils rirent un peu, ils firent l’amour…. beaucoup. Elle quitta l’appartement avec sa chemise à lui. Lui, l’invita à venir le visiter de temps à autre. Et elle le fit. L'altesse le visita encore le lendemain et le surlendemain. Quémandant quelques dernières caresses comme un petit animal blessé, sollicitant les derniers conseils car elle ne savait plus où elle était, ni où aller. Les derniers jours avaient été éprouvants pour Chevreuse. Elle n’avait retenu qu’une chose, c’était le retour improbable, c’était le mot « jamais » associé au verbe « revenir ». L’angoisse lui avait serrée les entrailles pendant des jours et ces fichues larmes qui refusaient de sortir mais qui continuaient de lui piquer les yeux. Mais Zoé n’était pas seule car pendant cette mini déprime, elle avait reçu le soutien indéfectible d’amis, tels qu'Alfred, Elwin, Athénaïs, Gnia, qui eux, n’avaient retenu que l’espoir de le revoir. Alors, elle s’accrocha à ces salvatrices parcelles d’optimisme qu’ils tentaient de lui distiller. Ainsi, elle reprit bien vite du poil de la bête. Que dirait-il s’il la voyait baisser aussi facilement les bras. Rien. Il ne dirait rien, mais il serait déçu.


Le soir du 21 novembre, elle vit Orenç revenir seul. Nu de compagnie, nu d’informations. Il n’avait rien trouvé, la gosse s’était volatilisée.

« Venez me trouver demain soir, dans mon appartement avant mon départ. »… commanda-t-elle.
« Votre départ ? »il se gratta la barbe. Déjà qu’il peinait à comprendre ce qu’il se passait avec le Capitaine Sancte Iohanne, sur les raisons qui l’avaient poussé à cesser le combat.
« Oui. Nous devons partir récupérer une caraque qu’on menace de couler dans un port. »
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Cixi_apollonia
Elle s'était débattue comme un beau diable , aux prises de la pogne sévère du messager de son Père. Dans l'empoignade, le médaillon de sa mère avait été arraché de son cou fin et s'était brisé négligemment au sol. Le veinard qui avait réussi à lui mettre la main dessus sous couvert d'avoir un pli à lui remettre n'escomptait pas laisser filer si belle chance. Apollonia si le comte la voulait si ardemment devait valoir un sacré paquet de récompenses...
Le réflexe premier qu'elle avait eu avait été de le mordre de toutes ses forces, ce qui ne lui avait valu qu'une torgnole ensanglantée et un gout de métal dans la bouche. Sonnée, mais pas vaincue, Apollonia avait décidé d'adopter une stratégie infaillible: le poids mort. Elle avait alourdi ses membres de plomb, s'était laissé traîner comme un sac de blé qu'on aurait du mal à ajuster sous le bras, frêle silhouette inerte... Pour attendre le meilleur moment, celui où l'haleine trop curieuse du messager sale de plusieurs jours de voyage, chargée d'alcool fétide, était venue lui vicier les narines... Celui où sur son derme, le poil dru de sa barbe avait griffé la peau de ses bras. Cet instant où la pensant évanouie, il avait osé glisser un doigt dans le bâillement de sa chemise pour voir ce qui se tramait dessous... Et soudain frapper entre les jambes accroupies sur elle, à l'endroit le plus stratégique qu'une fille se battant avec moins d'armes pouvait le faire. La victoire fut aussi écrasante que celle du Poitou, et en se dégageant comme si la mort voulait la saisir, elle avait arraché la lettre dans la poussière et s'était enfuie à toutes jambes, sans regarder derrière elle. C'était officiel. Les hommes en livrée rouge étaient à ses trousses. Les choses devenaient plus délicates.

Ce n'est qu'à la ville suivante, Tencendur caché dans l'écurie d'un maréchal ferrant qui avait accepté de racheter en échange de quelques heures de répit son plastron pour en récupérer le fer, que la jeune femme prit connaissance des lignes austères et inévitables de son Père. Furieux. Il était furieux. Rien qui ne l'étonne en soi, et pourtant, quelque part, tout sonnait comme une défaite. Peut-être aurait-il été plus simple d'écouter les ... Non. Le vif esprit se rebellait férocement contre cette idée de contrainte imposée et aveugle. Tout en elle, forgeait l'aversion de cette soudaine vie contrôlée, soupesée, et le fait que la Princesse de Chevreuse ait alerté Wayllander de Leffe miras renforça son sentiment. Rien ne l'attendait dans cette vie là, si ce n'est un mirador éternel, représenté d'abord par la multitude de gens que le comte avait sélectionné pour l'élever à sa place, puis par l'autorité d'un mari que Bastian lui avait vanté sans convictions, donné de gré ou de force à l'aube de ses seize ans.

Dans la plus miteuse des chambres d'auberge du Berry, les mots de son frère revinrent sans cesse en son esprit. Le soir où il avait évoqué qu'elle devrait de toutes façon faire comme lui. Qu'ils n'auraient jamais le choix. Le soir où pire, dans sa maladresse avérée, il avait évoqué les médecins qu'elle devrait voir avant un mariage arrangé, pour vérifier " si elle était encore intacte"... Alors c'était ça, la vie qu'on lui promettait? Le non droit ne serait-ce que de rencontrer son géniteur, alors que sa mère venait de rendre son dernier soupir, et le devoir d'écarter les cuisses... Se marier pour créer des alliances entre familles, voilà ce qu'avait dit Bastian. Sans le savoir, son jeune aîné avait inévitablement conduit la jeune sœur à fuir. La transition d'une vie sans préoccupations dans une famille de marchands avec celle de l'enfant à taire et à préparer pour le jour où elle serait digne d'être révélée au monde pour rapporter des intérêts, était trop brutale. La césure, trop abrupte. Voilà que le parfum de sa mère était lentement balayé par les vents de l'inéluctable... Voilà qu'elle avait été confrontée à la réalité la plus violente qui soit, celle de la guerre. Poussée par sa curiosité. Incapable de ne pas apprécier cette liberté illusoire, et incapable à la fois de ne pas s'enfermer dedans. Apollonia eut un hoquet rageur.

    " L'apprentissage des armes ne fera rien de toi. Tenter de te sauver de moi non plus. "


Désormais, Il la voulait. Pour quoi faire? La briser. Lui faire passer le goût des échappées belles. Le gout des soldats. De Fechter. de Lénu. La ramener comme on ramène un sac tombé sur la route. Et l'ouvrir, pour semer les récoltes de demain. Où qu'elle aille, elle serait confrontée à la fuite perpétuelle. La détermination des gens de Rubroek ne faisait aucun doute, le messager, s'il n'avait pas eu l'ordre de la ramener entière, lui aurait brisé la mâchoire sans état d'âme. Et quelque chose lui disait que bientôt les cavaliers de Chevreuse s'y ajouteraient. Où pouvait-elle aller, pour échapper à ces mains de fer? Thouars aurait été la pire des choses à faire.

Ce n'est que tard dans la nuit, alors que l’œil clair chargé d'images fantômes la ramenait à Bruges et à ses chers quais marchand, que la Hase se redressa dans un éclair de génie. Le moyen d'échapper à ce joug et de laisser définitivement ce nom de malheur derrière elle sans aucun espoir d'être rattrapée s'imposa à elle...

Comme une évidence.

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Elle avait réussi à troquer ses dernières pièces d'armure souple contre de quoi écrire. Au fil des jours, elle se défaisait de ce caparaçon, comme on écaille un vernis. Comme on égare des souvenirs dont on ne voudrait pas tout garder. La Hase revenait à un état sauvage qui n'était pas enviable à son épaisse crinière brune, qu'elle avait fini par attacher pour ne plus sentir crocheter montagne de noeuds sous ses doigts. Les joues un peu grises. Les yeux toujours bleus, ou verts, ou gris, selon la pluie ou le beau temps, mais bien vifs, dieu merci.

Ecrire... Depuis combien de jours était-elle partie sans donner aucune nouvelle, laissant ses compagnons dans l'ignorance la plus totale? Culpabilité. Elle s'était assise dans une église vide. Et à la lueur des cierge, avait écrit. Ecrit... Ecrit. D'abord, la lettre qui, elle l'espérait, allait solutionner tous ses ennuis. Celle ci, écrite de sa plume la plus appliquée, fut soigneusement repliée et serait envoyée au moment le plus opportun. Il ne fallait pas l'envoyer au hasard. S'assurer que le messager qui se porterait volontaire pour la remettre sache bien où il devait aller, et à qui il devait la donner... Puis, après une relecture des plus minutieuse, elle rédigea d'autres lettres, celles de Siegfried et de lénu.


Citation:
À Siegfried_fechter, pli laissé en une auberge à l'attention du Lansquenet.

Siegfried.

J'ai bien eu votre message et ce qui allait de pair. Je vous remercie. Je ne peux pas encore vous dire où je suis, mais je le ferai bientôt. Quand je ne serai plus à portée des cavaliers de mon Père. Inutile de m'attendre à Thouars, je n'irais pas... Pas l'envie qui manque, mais vous et moi savons que l'on me cueillerait là bas comme une fleur. Et puis tant qu'on y est, plus je vous en dirais, moins cela nous sera bénéfique à l'un comme à l'autre. J'aurais aimé vous dire beaucoup plus, je sais, ce n'est pas correct. Je veux dire que j'aurais aimé vous parler là bas, pendant qu'il en était encore temps, mais m'épancher ne fait pas partie de mes talents, ça, vous l'aurez remarqué. Je vais devoir laisser Tencendur quelque part, j'ai besoin de savoir que vous irez le récupérer. Ce cheval a été mon seul compagnon ces derniers jours et il m'a depuis Poitiers souvent sauvé la vie... Je ne pourrais pas l'emmener là où je vais. Siegfried. Jurez-moi que vous irez le chercher, et que vous le garderez. Dites-moi que vous regrettez un peu ma présence, alors, je vous dirais aussi.

A dieu je nous remet.


Apollonia.


Citation:
À Lenu

Lénu,

j'ai bien réceptionné ton pli, et plusieurs fois. As tu décidé de lancer l'ensemble des messagers du royaume à ma poursuite? J'ai cru qu'il s'agissait des cavaliers de Rubroek, certains ont eu du mal à comprendre ce qui leur est arrivé. Tu m'as fichu la frousse. Pardonne moi mon silence, mais je ne pouvais pas te prévenir de mon départ sans attirer les regards sur toi, et sur moi. J'aurais voulu venir à Thouars, comme me l'a demandé Siegfried, mais c'était comme dessiner une croix rouge sur une carte et la perdre ensuite dans la tente de Zoyah... Je n'ai pas envie de t'attirer d'ennuis, pas plus que je n'ai envie d'aller vivre avec la princesse de Chevreuse. J'ai l'impression désagréable d'être une chose que l'on trimbale et que l'on pose où il faut le temps qu'il faut ... J'ai de quoi manger. Et je ne suis pas seule. La Bretagne aurait été bien, mais il n'est pas un endroit sur terre où je ne sois pas à portée des sbires de mon Père, et s'il est comme l'indique sa missive encore plus colérique que la dernière fois, je ne veux pas goûter de cette nouvelle leçon là. Là où je me rend, il ne pourra pas me saisir. Ecrire à Bastian attendra le dernier moment, celui où je serai hors de portée de tous.

Vous me manquerez.


Apollonia.


Elle avait menti, oui. Elle était plus seule que jamais. Quelques jours plus tard, percluse de fatigue, elle se laissa glisser sur une paillasse louée pour quelques heures dans une auberge de passes et profitant de la clarté si rare et si chère en ville, elle relut la dernière missive de Fechter, pour la énième fois.


Citation:
De Siegfried fechter de Poméranie

Missive pliée portant le sceau de Siegfried

Apollonia,

Tu peux me savoir rassuré d'avoir reçu des nouvelles de te part, j'ai appris que Bastian avais envoyé des cavaliers à ta suite et sache que je ne lui ai pas fait part de la lettre que tu m'as envoyée, ni à Lénù, bien que je vais surement lui dire que je sais que, pour l'instant, tu vas bien.

Tu n'as pas à t'inquiéter pour ce que tu considères un manquement, de toute façon je pense que tu aurais pu passer des heures à me parler de tes craintes et de tes désirs que je n'aurais su te convaincre de rester ou de partir, tu as trop de caractère pour cela et je te respecte assez pour ne pas t'infantiliser sur tes décisions.

Bien que j'ai une haine profonde pour les chevaux, j'irais récupérer Tencedur et je laisse ici trace de mon serment ; je le garderai et le soignerai bien pour toi pour qu'à l'heure venue, tu puisse le récupérer. J'irais le chercher sur l'heure dès que tu me donneras l'endroit où tu l'a laissé.

Et pour conclure, oui, effectivement, ta présence me manque. Mais je reste confiant, l'optimisme est un trait de caractère de ma famille.

Bien que je ne sois fervent, j'ose espérer que le Très-Haut dans sa miséricorde te garantira sauvegarde.


Siegfried


Certes, l'information la plus primordiale aurait du être qu'une énième cavalerie, celle de son frère, était lancée à ses trousses... Pourtant, inlassablement, Apollonia relisait les mêmes phrases. Dans le calme le plus plat de l'esprit, à l'asile du lieu saint. Il était rassuré. Il n'avait rien dit. Il la respectait, elle, malgré son âge, son sexe. Elle lui manquait. Il n'aimait pas les chevaux et pourtant, il s'engageait à prendre soin de Tencendur. Savait-il seulement qu'il détiendrait avec cet animal, l'assurance la plus certaine de la revoir le premier...? Soupir . L'escarcelle de nouveau vide, la Hase reprit la route après cette courte halte. Esquivant et dupant les sbires de Rubroek, guettant le visage messager du Lansquenet. Les jours se suivirent dans sa solitude résignée...



Jusqu'à ce que...


    - Salut morveuse.
    Sursaut. Devant elle, le sourire mesquin de gamin fier de sa blague. Cixi le fixe comme on verrait un revenant.
    Il se tire finalement une chaise pour y poser ses fesses.

    - Qu'est-ce qu'il y a?
    Elle secoue le nez. Reprend contenance, fierté tout ça. Pas surprise elle, non. Non.

    - Rien.. rien... Salut.. Ganwyn.
    - T'as traîné où depuis la dernière fois?
    Elle ramène ses genoux contre elle.

    - Là où j'ai pu mettre à profit tes leçons...

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Retrouver Ganwyn et l'anonymat l'avait apaisée plus qu'elle ne l'aurait imaginé. Rendosser ce rôle de franche comédienne, assurant ses arrières et ceux du Chevalier errant un brin porté sur la boisson avait été plaisant, bien que trop bref pour être vraiment savouré. Mentir avait été jusque là la seule arme qui l'avait véritablement protégée. Si l'on prenait d'ailleurs la situation dans l'autre sens, ce fut lorsqu'elle cessa de mentir, à Bastian par exemple, que tout s'était rapidement gâté.

Elle avait retrouvé auprès du breton ses réflexes de survie, la solitude et la méfiance, de même que l'obstination chevronnée qui la caractérisait tant. Sans le savoir, Ganwyn exerçait sur elle une autorité paternelle nécessairement appropriée, une de celle qui ne passait pas par les lettres ou les ordres sans contrepoids, celle d'un homme en chair et en os, présent à ses côtés pour la dissuader de faire des choix trop stupides ou lui tenir chaud sans contrepartie et de façon désintéressée quand ses pieds bleuissaient. Prêt à lui en coller une ou à la protéger selon la situation la plus appropriée. Un homme dans toute sa splendeur, bourru et bourré de défauts, plein de vieille valeurs désuètes et visant un idéal qui lui échappait encore. Un de ceux qu'on ose défier parce qu'on en a l'âge, mais à qui l'on ne tient pas tête trop longtemps par peur de perdre son intérêt. Une transition retrouvée depuis Siegfried. Il y avait au fond d'elle depuis la mort de sa mère qu'elle savait irremplaçable, le besoin fort et impérieux de trouver cette personne. Quelqu'un qui saurait lui enseigner la vie, sans la cacher aux yeux de tous, la priver , sans se servir d'elle pour lier deux familles, sans la faire examiner comme une génisse... Quelqu'un à admirer. Une ligne d'horizon vers laquelle tendre.


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- Ganwyn?
- Mh?
- J'ai trois cavaleries au cul.

Apollonia se dit que c'est de bonne guerre de le lui préciser. ça ne se fait pas autrement. Ganwyn ouvre de grands yeux.
- Attends. Trois cavaliers ou trois putains de régiments de cavalerie?
- Peu importe. Si tu vois du rouge. Qui bouge. Fais le mort.

Elle se lève et pose sa main sur son épaule.
- Tu as dis que tu voulais m'accompagner. C'est dit, maintenant.
La Hase prend son sac
- Hein?
- On part à l'aube.
- Mais c'qui ces gars? Et t'as foutu quoi?

Apollonia se tire. Ce sera tout pour ce soir. Alors, ennuyeuse ta vie d'avant? Ganwyn lui attrape le bras.
- T'barre pas comme ça.
Apollonia regarde le bras avec dédain. Ah.. ça sent la scène de redite...
- Que fais tu?
- J'attends quelques réponses.

Il lui relâche le bras, agacé.
- M'enfin casses-toi, on verra ça demain.
Ganwyn se replie sur sa bouteille, sentant qu'il en aura besoin. Apollonia se casse donc. Senestre se posant quand même sur son bras. C'est qu'il a de la poigne le breton pas breton...

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Inutile de préciser que le morose et cavalier compagnon avait mis pas moins de sept nuits à obtenir les réponses à ses questions, au compte goutte, forçant méthodiquement les silences verrouillés de la jeune fille, et finalement... S'en sortait avec l'essentiel: L'Apollonia s'était enfoncée dans une merde épaisse, qui n'allait pas tarder à lui retomber sur le museau s'il s'obstinait à la garder dans ses bottes crottées. Fort de ces éléments, Ganwyn de la Rance, autoproclamé Sir du Cornouiller depuis ses douze ans fit ce qu'il savait faire de mieux: rien qui ne soit bien prudent. Les nuits passèrent sur eux comme si de rien n'était, et il ne sut le dernier point crucial de l'intrigue que lorsqu'ils arrivèrent là où la Hase s'obstinait à vouloir se rendre: Angers.

Elle s'était présentée au rendez-vous édicté dans son échange de missives secrètes et avait pris la décision difficile de tenir tête au troglodyte, plus à l'aise dans les catacombes de la Capitale angevine que sur les quais... Départ sonnerait bientôt, missive partit vers Siegfried. Il ne restait plus qu'à attendre le signal.



Citation:

À Siegfried Fechter

Siegfried,

il n'y a pas que Bastian qui a envoyé ses hommes pour me rattraper, ceux de Rubroek tournent sans relache dans les villes, frôlent les arbres où je grimpe dormir, rôdent autour des auberges où je vais me laver... Et son messager m'a trouvée. Je lui ai échappé de peu... Mais la missive qu'il détenait n'augurait rien de tendre. Je n'ai pas vu ceux de Zoyah, sans doute que la Princesse a laissé tomber, et elle aura eu raison. Il est dejà difficile pour moi de me cacher comme un lapin, j'ai hâte d'arriver à bon port... Cette vie n'est pas la mienne. Et vous aviez raison. Aucune vie ne vaut la liberté. Vous trouverez Tencendur à l'écurie, chez Jacky la Main Froide à Angers. Il n'a plus de fourrage, j'espère que vous ne tarderez pas... Il est déferré à la jambe gauche, j'aurais aimé payer ses soins, mais je n'ai plus assez pour cela. Vous manquez. C'est inexplicable, mais plus que tout, vous manquez. C'est votre visage, que je vois dans mes rares moments de repos. Et votre voix, dans celle des passants. Peut-être nous reverrons-nous. Peut-être jamais. Que la vie est étrange, tant de gens, si peu de temps. Je ne suis plus seule. Je ne serai plus seule, c'est ce que l'avenir me promet.

A dieu, Lansquenet.

Cixi A.

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Siegfried_fechter
      - Jacky l’main froid ? Navrée m’sieur, c’nnais pô.


    Siegfried se pinçait l’arrête. Etais-ce vraiment si dur de trouver des informations dans une ville aussi grande ? Les tenancières et autres taverniers, pourtant supposés être des noyaux d’informations rare, ne connaissaient pas ce Jacky la Main-Froide. Les bonnes gens, qui eux pourtant devaient assurément avoir des chevaux, ne connaissaient pas d’aurige, garçon d’écurie, maître d’écurie, étalonneur ou officier de haras portant un tel nom.

    Pas même les mendiants, yeux et oreilles du monde souterrain, n’avaient connaissance d’un certain « Jacky la Main Froide », ou simplement ne faisaient-ils pas confiance au Lansquenet qui, la mine patibulaire, bordait la fulmination. C’est finalement après avoir cédé et transformé ses promesses de récompenses en menaces, le col d’un mendiant fermement tenu dans sa main gauche et le poing levé menaçant de s’abattre sur le visage d’une vieille femme qui se protégeait le visage avec les mains qu’on vint le trouver.

    Un courrier lui tendant un pli. Le lansquenet lâcha la pauvre dame qui se crapahuta pour échapper à ce fou à la gueule balafrée qui venait de lui promettre de la défigurer. Siegfried se redressa et lança les épaules en avant pour réajuster la position de ses épaulières. Tournant le chef il toisa un peu le courrier, tentant de le dévisager sous son masque et sa lourde cape. Impossible de voir des formes, des yeux, une silhouette ni même un visage. L’étranger qui tendait un pli silencieusement était aussi anonyme que lui dans cette ville et, sans dire mot, il prit le pli qu’il inspecta avec soin.


    « Les Écuries d’Augias »


    Et une clef. Qu’il retourna sous tout ses airs. Elle était simple, faite d’un fer portant encore les traces ocres de la rouille. Rien à voir avec les clefs d’une ville, rien à voir avec ces beaux ouvrages destinés à être utilisés pour des coffrets à bijoux. Non, une simple clef à l’image du lansquenet. Rustique, portant des traces d’usures et mystérieuse. L’idée lui arracha un sourire, monstre pétri d’arrogance qu’il s’avérait être par moments. Fermant le poing sur la clef pour s’assurer qu’elle ne s’échappe pas, il lança un regard au courrier qui tourna les talons et disparu. Bien que Siegfried tentât de le rattraper pour l’interroger, l’homme, la femme ou la chose a forme humaine indescriptible fini par lui échapper. Et c’est seul dans une foule angevine qu’il perdit sa trace. Mais au moins maintenant, il avait un outil plus efficace qu’un simple surnom. Il avait un lieu.

    Cette fois, il trouva réponse à ses questions. « Les écuries d’Augias ? A la sortie nord de la ville, dans c’te direction a environs quoi, trois cents verges, pourquoi ? », Siegfried ne répondit rien, lança un écu avant de partir au trot vers les écuries. Il avait mis plus de temps que prévu, et l’état de Trencedur l’inquiétait. Peut-être avait-il été vendu pour couvrir ses frais d’écuries ? Peut-être abattu ? C’était bien la première fois dans une vie de fantassin qu’il s’était inquiété de la santé et du bien-être d’un foutu cheval, un roncin de rien du tout. Pourquoi ? Car a parole donnée, un Fechter ne se débine jamais.

    Une fois arrivé aux écuries, Siegfried se glissa directement dans les écuries. Comment allait-il reconnaître Trencedur ? Pour lui il n’était rien de plus qu’un cheval, pouvait-il l’identifier à sa robe ? Pouvait-il l’isoler dans une foule de mille chevaux comme certains maîtres cavaliers le pouvaient ? Non… Tout ce qu’il savait, c’est qu’il était déferré à un sabot.

    Alors, il chercha du regard un garçon d’écurie, un pauvre gamin qui soulevait de la paille avec une fourche pour nourrir le haras de son maître. D’un pas rapide, déterminé et particulièrement volatile, l’ancien capitaine de Lautrèc agrippa le col du garçon qui protesta d’un geignement aigu. Hissé du sol, il fut plaqué dos contre le mur d’une écurie. Les chevaux eux, sentant la tension, commencèrent a s’agiter alors que la voix rauque du Lansquenet s’éleva.


      - Je cherche un cheval. Annonça-il impérieusement. Un roncin qui est arrivé ici y’a une semaine ou deux. Déferré d’un sabot, laissé par une jeune fille ou un jeune garçon aux cheveux noir.


    Le garçon, loin d’être le propriétaire de cet établissement se protégea le visage de ses deux avant-bras. Bonne défense, pensa Siegfried, peut-être est-il habitué a se faire cogner celui-là. Finalement, hésitant, il tendit un box d’un doigt et dès que l’information fut captée, l’enfant fut relâché et Siegfried s’approcha du box alors que l’enfant s’enfuyait pour aller chercher « Jacky », en criant. Siegfried lui, vint s’adosser contre l’entrée du box et dedans se trouvait la source de sa recherche.

    Trencedur


    Ce foutu roncin était encore là. Vivant et robuste malgré les mauvais traitements. Du moins, c’est ce qu’il voulait voir. Finalement, il tenta de voir si la clef qu’il avait permettait d’ouvrir le box. Instant de vérité alors que dans son dos, une grosse voix agacée s’approcha. Une main froide se posa sur son épaule.


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Cixi_apollonia
La clef n'ouvrait pas le box. Ce dernier était déverrouillé, presque une invitation à entrer, abritant un cheval déferré à la jambe désignée comme prévu et mangeant un fourrage qui venait juste d'être mis en auge.


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Deux lettres étaient arrivées, faisant monter d'un cran les craintes de la Hase. Dans son terrier, les Catacombes angevines où elle retrouvait Ganwyn la nuit tombée après une dure journée de labeur, elle avait pris le temps de les lire et d'en tirer des conclusions.

Citation:
De Lenu

Apollonia Bella.

Mes jours de convalescence sont enfin terminés. J'ai bien failli m'enfermer plusieurs fois au monastère. Mon morel est bien enfoncé loin dans mes chausses. Je ne t'ai pas répondu et je te présente mes excuses. C'est en partie du par le fait que je me sens impuissante. Que depuis quelques temps j'ai cette sale impression que tout glisse entre mes doigts comme l'eau. Que rien ne tient concrètement. Pas même l'histoire entre Bastian et moi.

Je nous ai sacrifié pour l'Honneur de la famille Leffe. Je ne suis qu'un misérable cancrelat au regard de ton père. Tout juste bonne à être son homme de main, et encore. Une Princesse sera plus à son goût, il y en a déjà une accrochée à Bastian, qu'elle se fasse plaisir. Mais il n'est pas l'heure de pleurer sur mon foutu sort. Je suis toujours inquiète pour toi. Tu as écrit que tu n'étais pas seule, j'espère que cette personne est de confiance. Mais où te rends-tu pour échapper à ton père ? Le mien n'a pas cherché à me retrouver bien longtemps.

Si jamais l'envie de nous revoir t'étreins, je te donne quelques indications pour nous retrouver... Pour ma part je pars certainement demain pour Limoges avec Roman. Siegfried part à Angers récupérer ton cheval puis nos amis Ludry et Bloodwen en Bretagne pour me rejoindre. Bastian retourne en Alençon.

J'ai pas aimé ta façon de signer ta lettre. Cela signifie que nous ne nous reverrons jamais. Et ça, je ne le désire pas.

Lénù.


Problème. Siegfried arrivait à Angers. Et contre toute attente, son départ traînait au port pour des ennuis logistiques... A l'heure qu'il était, elle devait dejà être bien loin, à l'autre bout de la terre , peut être. Mais elle était là. Et Siegfried arrivait. Elle ne sut pas bien si cette nouvelle lui faisait plaisir ou la décontenançait... Fuir le Lansquenet une seconde fois ne figurait pas sur ses plans, et jouer à cache cache avec lui dans la ville, alors qu'il était venu pour lui rendre service en prenant sur lui de s'occuper de la monture qu'elle laissait sur place était insultant. Etait un crève-coeur. Apollonia refoula une foule de sentiments, prête à les digérer et à garder la tête froide. Il fallait à tout prix savoir quand Siegfried serait en ville... Avec un peu de chance, elle aurait embarqué avant. Elle avait pris le temps de répondre, masquant subrepticement son malaise. Il fut question pour cela d'ouvrir les lignes sur Bastian. Son Frère. Puis Ganwyn.

Citation:

À Lenu

Lénù,

Ainsi tu as quitté Bastian. Voilà que j'ai quelques remords, à attendre d'être hors d'atteinte pour lui écrire. S'il savait que de vous trois, lui mon frère est le dernier à recevoir nouvelles de moi, il m'en voudrait certainement. Pourtant, tu le sais, il le sait, Leffe n'est pas mince affaire, rien ne doit être laissé au hasard si je peux parvenir à me mettre à l'abri des hommes de la Maison... D'autant plus s'il retourne en Alençon, il aurait tôt fait d'informer sciemment ou pas mon Père et d'avorter mes projets.

Je crois que parfois le destin, si l'on omet de le défier, n'est pas destiné à nous être favorable. Bastian et toi n'êtes pas faits du même bois, cela crève les yeux, c'est aussi pour cela que vous vous aimez, et que vous vous aimerez encore, même de loin. Mon frère est même différent de moi, regarde, il savait que nous ne pouvions pas rester ensemble. Leffe-Cetze est une personne résignée et sacerdotale... Prêt à céder son bonheur pour l'honneur. Peut-être que de nous tous, c'est lui le plus admirable. Ou alors est-il juste un âne bâté? Parler de lui ravive ma culpabilité. Je suis partie trop vite. J'aimerais ce soir être auprès de lui. Et il n'en saura rien encore.

La personne qui m'accompagne est loin de tous ces enjeux, c'est un chevalier errant. Je l'ai rencontré avant de vous rejoindre, et lui aussi, j'ai du le laisser lorsque mon père m'a ordonné de rejoindre Zoyah. Le hasard nous a réuni de nouveau, il m'a accompagnée jusqu'à mon lieu de rendez-vous... Parfois il me fait penser à Siegfried.

Tu dis que Siegfried vient chercher Tencendur, quand sera-t-il à Angers? Et dis-moi aussi le nom de ce navire, dont tu m'as souvent parlé... Peut-être qu'alors, nous nous reverrons plus tôt que tard...

Apollonia.


Le pli fut confié au messager qui l'avait apporté, moyennant quelques écus, et la jeune Leffe Miras tenta de chasser de son esprit l'imminence nébuleuse de cette arrivée qui, elle en était certaine, pouvait changer la donne si elle se laissait aller à trop de sentimentalisme. Fechter avait un étrange pouvoir sur elle. Le même que tous les hommes d'autorité peut-être, si tant est qu'elle les percevait comme bienveillants dans leurs intentions. Souvent et sans oser le lui avouer, elle observait les manières qui n'en étaient pas du chevalier errant à qui elle tenait tête, et les ramenaient inéluctablement au grand mercenaire... Ils avaient tous deux un vécu qui se lisait à même leur visage. Tous deux lui avaient appris à manier les armes. A se protéger. Les deux hommes étaient caractériels et bornés, bourrés de principes. Quoi que Ganwyn était peut être plus souvent bourré tout court, là où Fechter n'avait jamais été ivre devant elle. Et chacun d'eux avait accepté de lui accorder confiance à un moment ou à un autre. Lui laissant l'amplitude dont elle avait besoin, tout en gardant une main de fer sur son tempérament.

Deux jours passèrent, avant que le pli fatidique ne lui parvienne. Compliquant les choses.


Citation:

Apollonia,

Je ne sais si se courrier saura te trouver, ni dans quel état il le fera, mais je tenais à ce que tu le saches. Je viens d'atteindre Angers ce matin à l'aube, dès les premières heures de la journée et mes ablutions faites, j'irais chercher Trencedur et m'assurerais qu'il sois bien traité. Tu n'as plus à t'inquiéter pour ton vieux compagnon, d'ici quelques heures, il sera en sécurité. Peut-être mal nourri, peut-être toujours déferré mais au moins entre des mains qui sauront le traiter à sa juste valeur. Il sera mon cheval jusqu'à ce que je puisse te réunir avec lui. Dussais-je dépenser des centaines d'écus pour acquérir ce cheval.

Cependant, de grâce. Prends garde si tu te caches dans les alentours d'Angers et que tu cherches à m'approcher, Bastian a tenu a m'accompagner jusqu'ici, sois-disant prends-il la route d'Alençon pour reprendre sa vie de petit politicien, probablement sait-il que je suis venu ici uniquement pour récupérer ta loyale monture.

Je te reproche toujours d'être partie ainsi sans avoir essayé même de me consulter, ne serait-ce que me demander conseil sur comment survivre dans la nature. Mais j'ai confiance en tes capacités et je suis persuadé que tu as ce qu'il faut pour vivre.

Je vais rester à Angers au moins deux jours, dans ce temps je crois que Bastian aura continué la route, j'irais ensuite chercher d'autres compagnons de route pendant que le Leffe reprendra sa vie faite de flagorneries et langues de bois, qui sais, peut-être te trouvera tu sur le chemin ? Au moins tu sera en sécurité même si ta présence, d'après ce lâche incapable de tenir tête à son père, nous mettrais en danger. Ce qui, pour être parfaitement honnête avec toi, ne m'intimide pas le moins du monde. Comment peut-on survivre une douzaine, bientôt treizaine d'années en tant que lansquenet s'il suffit de la colère d'un petit comte pour me faire trembler ?

Tu ne sera plus seule, ça, tu peux en être certaine. Et n'oublie pas une chose ; la vie est faite de plusieurs certitudes, celle qu'on a des parents, celle qu'on paye des taxes d'une façon ou d'une autre, celle que l'on mourra, celle que je ne te vendrais pas a Rubroëk ni à Leffes-Cetzes et celle que tu me reverra si tu t'en donne la peine. Moi je suis prêt à venir te chercher, tu n'a qu'a me dire où tu te trouve.

Qu'importe ta réponse, qu'importe le temps qu'il faudra que j'attende pour avoir de tes nouvelles Apollonia, sache que tu es l'une des rares personnes dont je prie le Seigneur pour qu'il t'accorde sa protection et garantisse ta sauvegarde. Et sinon, qu'il craigne ma colère, car je me ferais déicide.

Avec toute mon affection,
Deine schwertmeister,
Siegfried Fechter



La tête aux filins bruns retomba lourdement sur la lettre et la table à la fois. Siegfied était en ville. Et Bastian aussi.

Son coeur battit à ses tempes comme un galop sourd, il fallait réfléchir. Vite. Bien. Il fallait réfléchir... Réfléchis bon dieu, Apollonia ! Prends une décision.

Les mots relus l'en empêchèrent. Au fond d'elle, elle savait que si Siegfried mettait à jour son projet, il l'empêcherait de faire ce qu'elle s'apprêtait à faire... Et qu'elle ne saurait pas lutter contre l'imbroglio que lui dictait son coeur piétinant le fer de sa raison. Pourtant, Hase était fait fait d'un bois dur, si dur... Celui Wayllander. Car si le "Petit Comte" n'effrayait pas Fechter, il avait provoqué de quelques lignes la situation actuelle. Et elle n'escomptait pas se laisser saisir pour quelques faiblesses adolescentes... A la fin de journée, décision fut prise. On affrontait pas ses choix en faisant l'anguille. Parfois, il fallait bien prendre le Lansquenet par les Cornes... Il avait signé 'Ton Maitre d'armes'. On ne se débinait pas devant son Maitre d'armes.


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La clef n'était pas une fantaisie décorative. Lorsque l'animal bougea pour aller vers le Lansquenet, pas impressionné, il révéla derrière lui une porte à serrure. Fermée. Les écuries d'Augias étaient en vérité à l'arrière d'un bien baptisé Tripot, chez Jacky la Main Froide, déserté depuis ce que les angevins appelaient " l'Occupation" Royaliste... La porte en question y conduisait, en débusquant le roncin Fechter venait de mettre à jour l'entrée du repère d'une singulière fugitive. Qui l'attendait, résignée, sur un tonneau.

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Fechter ouvre la porte après avoir dépassé Tencedur, un peu perplexe.
Apollonia assise en tailleurs sur un tonneau, toise la porte dans un silence résigné. Siegfried entre dans la taverne, plisse les yeux le temps que sa vue se fasse a l'obscurité, puis hausse les sourcils.


- Boje moi.

Dit-il simplement. Apollonia plisse les yeux sur lui. Il baisse sa cape, toujours la même gueule balafrée. Toujours le même homme, comme si la guerre ne s'était arrêtée qu'il y'a que quelques minutes. Il s'approche d'elle et vient se mettre face à elle, la toisant un peu.


- Qu'est-ce que tu fais ici ? Tu es folle ?

Cixi Apollonia museau levé sur lui, se redresse sur son tonneau, jusqu'à s'y tenir debout et lui arriver légèrement au dessus de la tête. Puis saute sur lui. Pose les poings sur les hanches, puis se retrouve assailli, restant un peu coi avant de finalement rire un peu, fermant les deux bras autours de la jeune Hase.


- Dzièn dobry, Apollonia.

Apollonia reste agrippée à lui, dans le vide. Quelques secondes. Lansquenet sourit, la gardant contre lui avant de la déposer sur le tonneau.

- Toujours aussi vivace espèce d'idiote...


Lansquenet était là. En chair et en os. Une seule parole, il était venu chercher son ronçin. Étrangement, elle avait cristallisé des craintes en entendant la clef dans la serrure qui s'étaient littéralement volatilisées lorsqu'elle avait aperçu dans la pénombre la grande silhouette de Fechter. Il était venu. Et tout semblait être naturel. Aussi naturel que le "Au revoir" qu'elle avait lancé le soir où, au lieu d'aller se coucher au camps, elle avait pris la fuite. Il pouvait bien la sermonner désormais. Lui faire la leçon. Ce qu'elle préférait chez le grand nordique: c'était d'être son élève. Clef avait été remise sur la porte. Si Fechter était là, Bastian n'était pas loin.


- Bastian ne doit pas savoir.
- Pour qui m'prends-tu ?

Demande-il en levant une main, épaule se haussant.


- Il ne saura rien, j'dirais juste que j'ai récupéré un cheval.

Apollonia s'approche de lui.


- J'suis désolée.

Siegfried lève sa grosse mimine et la pose dans sa chevelure, lui ébouriffant.


- Tu sais, a ton âge j'avais tué mon père et j'ai fui la maisonnée pour aller rejoindre une compagnie de mercenaire pour échapper a la vie qui m'était destinée. Si y'a bien une personne qui est fière de ta décision c'est moi.


Fechter lui offre un sourire franc, bien que déformé par la balafre qui défigure sa joue gauche. La Hase opine doucement , assimilant ce qu'il vient de dire.


- Merci pour les vivres. Ils m'ont été utiles. Le temps de retomber sur Ganwyn...

Lansquenet hoche la tête doucement, croisant les bras.


- Parlons sérieusement, logistique. De quoi as-tu besoin ?

Elle secoue le nez.


- Quelqu'un s'est occupé de tout..

Il penche la tête sur le côté.


- Ganwyn ?

Demande-il, prononçant atrocement le prénom, accent germano-polonais quand tu nous tiens.


- Non. Enfin... si. Mais non.

Apollonia s'assoit sur la barrique. Toujours aussi claire.


- Ganwyn m'a escortée jusqu'ici. Je n'espérais même pas le recroiser.

Fechter se met face à elle, la regardant bras croisés.


- Le destin fais parfois bien les choses.
- Il faut croire que j'ai sacrément d'chance dans la vie...
- Qu'as-tu prévu de faire ?
-Partir.
- Ça j'avais cru le comprendre, tak...

Dit-il un léger sourire en coin de bouche.

- Où ?
- Partir là où l'on ne pourra pas me rejoindre.

Apollonia désigne la fenêtre. dehors, le port.


- En Angleterre ?
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En Angleterre , avait-il dit. Apollonia eut un léger cillement. Bien plus loin, Fechter. Bien plus loin... Machinalement, la Hase tapota dans son escarcelle l'échange de lettres qu'elle avait gardées jusqu'ici au secret le plus total, n'en parlant à personne. Des vélins qui avaient été écrits plusieurs semaines auparavant, lorsqu'elle venait de quitter les troupes Royales à Poitiers.


Citation:


À vous Tanissa Maria Agata Aleramica Imperiali des Francavilla, Dame de Trégastel et de Caudeval, Marquise de Saint-Clair-sur-Epte et Amiral de France,

Je me prénomme cixi Appolonia,

J'ai quatorze ans.

Je suis actuellement soldat royal et j'ai combattu les troupes angevines à Poitiers pour l'honneur de la France. Je voudrais devenir marin à vos côtés et une fois mes études terminées mener des bateaux pour la royauté. L'on dit de vous que vous êtes la plus fine lame des mers, et je souhaite apprendre parmi les meilleurs comme j'ai appris à manier l'épée auprès des meilleurs. Votre réputation n'a pas de frontière, laissez moi vous prouver que ma loyauté est d'égale envergure. Faites de moi votre matelot, je vous montrerai que je sais me montrer digne de vos apprentissages .


Fait à Poitiers .



Citation:

De Tanissa d'Honfleur

Le bonjour jeune fille.

La Royale a toujours besoin de marins et votre proposition est intéressante.

Quand même, il faut que je vous prévienne que la vie en mer, surtout quand on sert sur un des navires de la Royale est assez lourde, et je ne parle pas seulement du travail à bord, mais cela risque de vous garder souvent et sans une date précise de retour loin de votre famille.

Par contre, de famille vous en trouverez une autre, faite de marins et des capitaines, une famille où l'entraide est le fondement, où si vous voulez, doucement vous pourrez apprendre l'art de la navigation et du combat en mer.

Car une particularité de la Royale, comme rarement arrive dans les armées à terre, c'est le total partage des informations sur les missions en cours. Court, je n'aime pas trop avoir "d'utiles idiotes" à bord, mais je veux que chacun se sente impliqué et puisse goûter complètement l'aventure.

Car comme (le futur le dira mieux) on dit: liberté est participation.

Si ça ne vous fait pas peur, j'aimerais vous rencontrer en personne pour vous expliquer d'autres détails et répondre à vos questions. Où êtes vous maintenant? On fera escale dans quelques jours sur la côte, et je pourrai vous indiquer une ville à rejoindre pour pouvoir vous rencontrer.

Cordialement.

Maria Agata Aleramica Imperiali
Amiral de France


Avec toute la témérité dont elle savait faire preuve, le jeune menton se redressa et Apollonia répondit simplement:


- Je me suis engagée dans la Marine Royale en tant que marin de Tanissa. Elle a payé mes vivres et mes études.

Siegfried sourit.

- Tu m’impressionnera toujours. D'autres se seraient terrés en attendant que la tempête passe. Et toi tu montes à bord d'un bateau pour continuer a faire ce que tu faisais.



Tanissa l'avait accueillie avec intérêt et chaleur. C'était une grande brune à l'accent italien prononcé, et un Français parfois épouvantable. La piaule des marins de la Royale, forcés de rester à Angers quelques temps pour réparer leurs navires endommagés lors d'une bataille sanglante dans les eaux portugaises avait observé cette nouvelle recrue d'un oeil curieux, mais ne la bousculèrent pas. Dans ces rangs là, l'ambiance était très différente de ceux des troupes à terre. Les marins étaient des gens plutôt optimistes et joyeux, soudés comme les doigts de la main. On ne tarda pas à l'affecter à un navire et personne ne posa de questions. D'où qu'ils venaient, les marins de la flotte Royale semblaient s'accorder sur un point: une identité nouvelle , une famille nouvelle, voilà ce qu'était être marin pour Tanissa , la plus célèbre des Amirales. Rapidement, la Hase avait pris ses marques, aidé aux travaux et l'on lui avait offert un paquetage de vivres pour deux mois ainsi que l'argent nécessaire à ses études lorsqu'ils pourraient poser pied à terre. Hase, peu habituée à de telles démonstrations, en était restée coite.


Citation:
De Tanissa d'Honfleur,

Le bonsoir, vue que vous etes intéressée étudier navigation, j'aimerais vous offrir en nom de l'Amirauté Royale un petit cadeau que vous aidera ces jours suivre l'université, et surtout vous nourrir dans cette ville encore sous siège.

Veuillez accepter sans vous poser des soucis, vous pourres répaer avec votre travail à bord.

Cordialement,

Tanissa


Le départ approchait bientôt. Ganwyn qui n'avait pas le pied marin, voir peut être même quelques phobies du grand large, observait ce départ d'un mauvais oeil. Pourtant rien ne semblait faire changer d'avis l'entêtée Leffe Miras. Pas même l'indéchiffrable regard du Lansquenet...


Hase plissa les lèvres, s'était attendue à une paire de torgnoles verbales. Scrutant les traits du Lansquenet.


- Mais sincèrement, la marine ?

Le mercenaire l'imita. Là. La brune s'était emballée trop vite. Ride du lion revint .


- Quelques temps... Au moins.
- L'infanterie c'surfait pour toi ?

Apollonia secoua le nez.

- Ce n'est pas ça...
- Je sais.

Dit-il en posant sa main sur son épaule, il la taquinait, rien de plus.


- Regardez combien de temps il a fallu pour que tout le bastion parle de moi. En mer, personne ne viendra me chercher... si tant est...

Les billes le fixèrent avec sérieux.


- Que personne ne prévienne Tanissa de mon identité. Se préserver d'une seule personne est plus aisé que de toute une armée.

Le visage de Fechter passa de celui d'un homme ravi au sérieux prussien qui le définissait.


- Et puis j'aime la mer.

Son regard se fit dur, froid.


- Je ne suis pas Bastian, ni cet imbécile de Cornelius. Je sais tenir un secret. Ne m'insulte pas Apollonia.


Alors Siegfried resta quelques jours avec elle. Il lui raconta Bastian et Lénu. Poitiers. Les projets de chacun. Pendant ce temps là, où ils échangèrent des mots, des gestes et quelques entraînements pour vérifier si la jeune fille n'avait pas oublié tous ses apprentissages, Ganwyn ne se montra pas. La Hase avait dans un premier temps préféré se cacher, fermer à clef les écuries pour jouir de cette présence autrement rassurante en la personne de Fechter de façon secrète. Mais lorsqu'elle fut informée que Bastian, de façon sûre, avait quitté la ville, la jeune matelot se détendit un peu. Peut-être trop.

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[ Plaire ]



Fechter sourit en coin.


- Quand je te reverrais, j'm'attends à combien de tatouages de femmes nues et d'ancres ?


Apollonia d'un ton moins assuré, ajoute quand même.


- Arrêtez... J'suis quand même soulagée d'vous voir avant de prendre la mer... Tanissa est une bonne personne. Elle ne me questionne pas, tant que je travaille.

Fechter passe un bras autour de ses épaules et viens l'enlacer, souriant vaguement en coin.

- Tak, tak. J'suis soulagé aussi.


Siegfried.

Parfois, au fil d'une conversation dans l'endroit désert et éclairé d'une seule chandelle, Apolonia surprenait un geste d'affection de sa part, comme il n'en donnait jamais. Comme elle semblait qu'il ne sache pas faire. Il y avait entre eux cette pudeur immense, et la distance imposée qu'un geste parfois, un seul, parvenait à percer, déchirant la matrice rassurante dont elle s'était entourée pour laisser place à l'envers d'un décor auquel elle s'était habituée. Peu désireuse de nouer contact physique avec qui que ce soit, chaque claque dans le dos, chaque empoignade finissant en brève immobilisation contre le Gambison noir la laissait rétive, crispée, impuissante et désarmée de ne savoir comment y donner le change.


- C'est drôle. J'aurais pensé que vous feriez des pieds et des mains pour m'empêcher de partir...

Hase croise les jambes sur sa barrique, en tailleur.


- T'es d'une autre trempe que ton frère et même que moi. C'est ton choix. Consciencieux. J'suis qui pour t'en empêcher ? Ton père ? Dieu m'en garde. Ton frère ? J'lui ressemble en rien.
- Il est vrai...
- J'suis ton maître d'arme, ton mentor diraient certains. Et j'suis ton ami.


Elle le détaille sous ce jour inédit. Siegfried? Son ami. Non. Impossible. Mais il l'apprendra quand elle aura pris un peu de bouteille et mit un mot sur la chose.


- C'est vachement soulageant en tout cas. J'aurais pas aimé devoir argumenter.

Dit-elle sur un petit air condescendant surjoué. Siegfried lui sourit avec une forme de tendresse.

- Il faudra embrasser Lénu pour moi. Faites-le.
- Tak, j'le ferais.


Peureuse de maladresse, ou de passer pour ce qu'elle était peut-être. Une gamine trop admirative de son Maitre d'armes. Fechter était un grand homme froid, et ses marques d’intérêts étaient si rares qu'elle ne savait, de pouvait les repousser, même dans des tentatives désespérées de se faire violence. Et il ne fallait pas sortir de Belrupt pour comprendre ce qui se passait, lentement mais sûrement, entre l'élève et son Maitre. Quelque chose qui aurait fait Bondir Bastian. Quelque chose qui aurait fait se déchaîner les foudres du Rubroek dans son castel. La jeune fille commençait à plaire. Et pas comme il aurait fallu qu'elle le fasse.

Fechter ouvre les bras.


- Allez, viens là.

Il ferme ses bras autours de sa silhouette. L'enlaçant avec une douceur qu'on n'devinerait pas au lansquenet.

- Tant que tu me promets que tout ira bien. Ca m'va si tu pars sur l'eau.

Apollonia sent son coeur danser la gigolette. Marmonne :


- Sûr que tout ira bien... J'ai pas laissé mon Père me faire saisir par ses sbires, ce n'est pas une petite vague qui va m'renverser sur le dos.

Siegfried rit doucement.

- Tak, tak.
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[ Aimer ]



Apollonia ferme un instant les yeux. Il sent le cuir. Putain ce qu'il sent bon. Réprime cet instant trop ... Trop. En se libérant doucement et en retrouvant le plancher des vaches. Fechter reste comme ça, la laissant contre lui puis la relâche.

- Bon, tu sais quand tu prends la mer ?

Elle ramasse la cage, chassant la vapeur de ses yeux d'ado qui ne comprend rien à la vie et la pose sur la barique, en mode " elle est là. tu ne peux pas l'oublier. " La cage devait servir par trois reprise à libérer les oiseaux porteurs de messages du navire.


- D'un jour à l'autre. c'est imminent. ça devient longuet... J'ai l'impression de ronger un os qui n'a plus de moelle...

Elle écoute à la porte s'il y a du passage de l'autre côté, oreille aux aguets.


- J'passerais demain voir si t'es encore là. Sinon, laisse moi un message ici.
- Demain. Ja. A demain Lansquenet...

La Hase lui lance un dernier regard et se tire. Le poumon plein. Direction le port.

Le port. Les embruns. Le silence de la ville. Les coques qui s'entrechoquent doucement. Le bois qui chuinte. Qui travaille. Qui se distend. Nuit passe. Demain il fera jour.


*



Fechter arrive un sac de provisions sur les épaules, ouvrant la petite trappe en faisant tinter la clef dedans. Apollonia redresse le nez, assise devant le feu , un vélin étalé à ses pieds. Siegfried s'approche d'elle et pose le sac a ses côtés, ainsi qu'un fourreau tenant un sabre à la garde ornementée de laiton. Hase déloge le sabre, billes s'écarquillent en lucarne.

- Wow.

Elle le tourne et le retourne, détaillant la garde, l'épaisseur de la lame et répète:


- Woow..
- Avec ça au moins tu sera un minimum crédible sur un bateau, Apo'.
J'avais pensé chercher un sabre de hussard, histoire que tu aies la classe.


Elle lâche un juron dans une autre langue. Celle de toutes les filles impressionnées.


- Mais j'en ai trouvé aucun, faut croire qu'ils sont arriérés dans c'royaume.


Apollonia le regarde, soudain vachement intimidée.

- Qu'est-ce que je peux faire pour vous remercier?
- Revenir vivante, entière et récupérer ton canasson.

Dit-il en lui souriant. Apollonia acquiesce un peu.


- S'il n'y a que ça. comptez sur moi.


Toutes ces journées semblaient s'être condensées en une seule. Longue et interminable. Celle où Siegfried était venu chercher Tencendur. Attendre que les bateaux soient remis à flot était difficile à l'impatience nerveuse de la Hase. Face au sac déposé à ses pieds ce soir là, un regard perplexe s'était reposé sur le Lansquenet.


- Qu'est-ce que c'est?
- Des biscuits, des provisions de longue durée.

Elle arbore un imperceptible sourire, cynique.

- z'avez peur que j'maigrisse ?
- J'avoue.

Dit-il sur un ton sarcastique.

- J'veux pas que tu perde tes formes naissantes la jeune.

Fechter se marre un peu.

- Tu verra quand tu devra te rationner, donc avoir un peu de réserves personnelles c'toujours bien.
- Si j'avais su que mon Maitre d'armes s'inquiétait de la rondeur de mes hanches...

Qu'elle a parfaitement droites d'ailleurs.

- ... J'aurais conseillé à Bastian de dormir avec moi pour surveiller les allées et venues.

Cynique.

- Plus sérieusement? Merci. Encore.

Dehors, la ville s'était endormie sur une oreille, Angers la rebelle grondait de tumultes à venir. Une liste Angevine avait été montée pour reprendre le duché, pourtant les forces Royales tenant la ville n'escomptait pas laisser les choses se faire. La résistance s'organisait, et les consignes avaient été distribuées aux marins de la flotte Royale. Dans le silence qui avait englouti la ville avec le noir de la nuit, deux voix sourdes filtraient leurs murmures aux travers de la porte des Ecuries d'Augias, jusqu'à tard.


- Tu te sens prête ?
- Ja. Toujours. Et vous?

Sourire de petite conne s'étire à la lippe.

- Moi ? Tu m'connais. Toujours prêt. J'pense que tu f'ra peur a plus d'une personne avec ton joli sabre.

Il ricane un peu.

- A défaut de faire une grande chevalière. Tu fera une grande amirale Apo'.

- Attendons voir. Vous et moi savons que je ne trouverais rien , si ce n'est l'apprentissage et le travail, sur ce navire qui m'égayera vraiment. Qui sait de quoi demain sera fait. Ganwyn m'a proposé de devenir son écuyer. à mon retour du Khan.
- Il est chevalier ?
- Ja. Il est.
- De quel ordre ?
- C'est drôle. J'étais à peu près certaine que vous me demanderiez cela mot pour mot. Si je vous dit que je ne le lui ai pas demandé ?
- Tu veux que j'sois franche avec toi ? J'aurais bien aimé t'avoir comme pupille.


Il croise les bras, lui souriant vaguement. Elle s'apprêtait déjà à le singer entrain de la gronder un peu, contrefaisant sa voix en un grondement caractéristique:


- Ce sera une vie de boue et de chem... hum.
- J'avais même pensé rejoindre l'ordre du corbeau moi, y devenir chevalier et te prendre comme écuyère. Bon, ça m'aurais demandé du temps mais ça aurais pu se faire. Faut dire j'pense que la grand-maître s'rait contente d'avoir un gars comme moi en tant que chevalier.

Siegfried joue de sa chevelure slave, genre prince charmant de Shrek.


- Faut croire que quelqu'un vous a devancé.

Hase s'est tue. Cherche à percer derrière le masque, si cela l'agace. La réaction, même mineure. une mimique. N'importe quoi. Il plisse un peu la joue.


- Tak, quelqu'un m'a devancé.


Il était plutôt incroyable de penser que le premier homme à qui elle s'était attachée était celui qui l'avait cognée plus de fois que quiconque, lors de leurs longues séances de passes d'armes et d'autres techniques insoupçonnées de combat et parfois discutables dont le Lansquenet avait le secret. Pourtant. L'évidence était là. Personne ne l'intimidait plus et la poussait à sortir de sa coquille de noix à la fois que le brouet du nord. L'on avait sonné l'embarquement. L'heure était aux au revoir. Pourtant, encore face à face, les deux apatrides se jaugeaient de leurs hauteurs respectives.


Apollonia baisse le masque d'un index.

- Pourquoi vous l'portez tout le temps? Pour cacher ça?

Revers de l'ongle glisse sur les cicatrices saccageant le visage de la montagne. Rare contact autorisé. Il hoche la tête doucement, d'autres se seraient fait broyer la main pour le geste qui viens d'être fait, mais pas elle.


- Pour la protéger du froid plus exactement.
- Qu'y fait le froid?
- Elle est trop sensible.

Brune observe la balafre. Lénu ne l'a pas raté.

- Là avec les embruns, le sel et le froid. C'comme si j'avais un fer rouge à la place de la joue parfois, donc le masque m'évite bien des douleurs, même si ça pique.


Hase repose ses mains sur ses genoux, en tailleur sur son tonneau vide. Fechter la relâche, restant proche d'elle pour autant.


- Je ne pensais pas que les cicatrices continuaient de faire souffrir avec le temps.
- Pas toutes, j'en ai beaucoup d'autres sur le corps qui ne me font plus mal. Qui sont devenues parties de moi, là, celle la... Sur la joue ? Elle n'a que quelques mois. Le mélange des mauvais soins, du mauvais temps et du mauvais train de vie que j'ai...
- C'était vraiment un accident?

Cixi fixe la balafre, sur la balafre humaine qu'est Fecther.


- La joue ?
- mh.
- Tak. Je l'ai poussée dans ses retranchements et elle a réagis instinctivement.
- Que lui avez vous dit?
- Physiquement j'entends. Dans un pugilat.


Siegfried mime de mettre des directs du droit et du gauche.


- Pourquoi pas moi?
- Comment ça pourquoi pas toi ?
- Puisqu'elle était votre élève. Pourquoi, moi, je n'ai pas eu cet.. Apprentissage?
- Mais tu l'auras. Mais faut que tu te muscles un peu plus pour ça. Histoire que t'aprenne à encaisser. Et quelques mois sur un bateau ça va te faire un corps solide tu verras.
- Faites-le. Je vais m'en aller. Donnez-moi une dernière leçon. Et m'prenez pas pour une chétive.

Elle fronce les sourcils.


- Tak, très bien.

Siegfried Fechter va s'approcher d'une table et y défait son armure. La jeune recrue saute à terre. Il détache les épaulières, canons d'avant-bras, brassards, gantelets.
épartissant le tout avec une minutie religieuse. Puis défait son plastron qu'il dépose par terre. Elle le regarde faire. Il défait sa ceinture, posant le lourd ceinturon plaqué de laiton et l'épée sur la table, puis ouvre son gambison.


- Ca fait peur, je sais, mais n'y prête pas attention.

Dit-il, prenant un timbre sérieux, le maître d'armes prenant le dessus. Elle reste coite. ne s'attendait pas à le voir se décarapaçonner autant. Fechter enlève son gambison, il ne porte pas de chemise en dessous. Son dos est puissant, musclé et surtout, couvert de dix-neuf cicatrices qui sont clairement les marques de coups de fouets.


- J'ai pas de bandes, donc c'est à poings nus, ça va faire mal tu en est consciente ?


Apollonia tente de ne pas paraître impressionnée. Se redresse. Fière.


- Ja. Ja. Pas de problème.

... Ben voyons. Pas de Problème ? T'es maso ma fille!


Parfois, ils prenaient des moments moins conventionnels. Presque risibles au passant qui les auraient surpris au détour d'une fenêtre mal condamnée...


- Regarde, avec un doigt. J'vais te faire tomber à genoux.

Dit-il en tendant l'index.

-J'vais y'aller doucement parce-que ça fais vraiment mal. Prête ?

- Ja.

Siegfried viens lui mettre un doigt... Dans le foie !


- humpf!

Cixi a la réaction la plus prévisible du jour. Et tombe à genoux, dans un grognement de bête blessée. Et agacée. Main sur le foie.


- Respire. Respire.

Dit-il en s'agenouillant à côté d'elle.


- C'est bizarre, j'saurais pas l'expliquer. Mais le foie humain est un véritable talon d'achille. Pour ça qu'il faut toujours que tu fasse attention à là.


Fechter essaie de glisser sa main sur le côté droit de sa cage thoracique. Sage évidemment. Apollonia accuse le coup en faisant mine que ça va, je gère. reste pour autant à genoux. Flanque un coup dans la main qui la tâte. Elle s'agrippe à lui par la nuque . Yatah. Surpris, Siegfried se fait attraper et suis le mouvement. Réflèxe de survie pour éviter une blessure.

- Rhra !

Elle cogne contre son épaule à plusieurs reprises.

- gn! M'ménagez pas!

Hase semble en colère. Il gromelle et se redresse, usant de l'avantage de la force pour se libérer puis, dans un geste un peu rapide essaie de l'attraper par le cou pour la plaquer au sol. Elle end le cou, fin et courru de tendons secs comme celui d'un lièvre, et envoie le genou.

- Ik ben geen kind! ( ne me traitez pas comme une enfant !)

Hase n'a pas le dessus pour autant, bien entendu. Heurte copieusement le sol. Mal au cul. Il accuse le coup en lâchant un bruit rauque puis referme sa poigne sur son cou et la désigne du doigt, il a mal, mais essaie de passer outre.


- J'essaie... De t'apprendre des trucs. J'te traite pas... Comme une gamine...

Fechter parle par à-coups, il a mal ouais. Les yeux un peu écarquillés.

- Sloeg! ( frappez!)


Elle reste raide, immobilisée . La cage thoracique qui se balance rapidement, naseaux grondants. Elle le fixe. est-elle furieuse? Putain. Frappe, Lansquenet. Tu ne comprends pas que j'veux garder quelque chose de toi, là bas? Il fronce les sourcils, lisant dans son regard qu'elle veux se battre, est-ce une expression d'une peur inavouée qu'il lit ? Autre chose ? Il l'ignore et la relâche pour se reculer.


- Allez, si tu veux danser.

Lansquenet se met en garde, clairement plus sérieux qu'a l'accoutumée.

- On va danser.

Elle se redresse et essuie une écume imaginaire, relève sa garde. Agacée. Pourquoi Lénu, et pas elle? Cixi veut aller trop vite. Il lui en cuira.

Parfois, ils prenaient le temps d'avoir de vraies conversations, dénuées de fards, dénuées de protections, des moments où la Hase pouvait se laisser aller à la pure curiosité dont ses observations l'enrobaient, mais dont elle ne se permettait aucune démonstration... Fechter était un homme. Avec un passé qu'elle avait compris peu reluisant parfois, plein de reliefs inégaux qu'il ne fallait même pas tenter d'aplanir, sinon de cartographier et de répertorier... Pour savoir où mettre les pieds. Par dessus tout, la proximité évidente et la confiance qu'il vouait à Lénù l'interpellaient, faisaient travailler les rouages de ses questions. De sa soif de savoir.


Siegfried Fechter se pose la main sur les côtes quand même, une fois qu'elle est au sol. Il souffle fort, le coup lui ayant tout de même fait mal faut pas déconner. L'adrénaline aidant juste.


- Ca te suffit ou bien tu en veux encore... ?!

Demande-il finalement, provocateur à souhait. Elle cesse de bouger, de se lamenter. Fait la morte. Elle sent le gout du sang sur sa gencive. Sent battre son palpitant dans sa joue. Est bonne pour un sacré bleu. Fechter plisse les yeux et se redresse un peu, inquiet quand même de s'être emporté il viens s'agenouiller à côté d'elle, main sur son dos.


- Eh, ça va ma belle ?

Apollonia apprécie qu'il ne la roue pas de coups de bottes comme il l'aurait fait avec un quelconque adversaire. A besoin de prendre en masse, en agilité et en humilité. Laisse passer un moment de silence et ouvre un oeil.


- Wanneer ik terugkom, ben ik degene die wint... ( Quand je reviendrais, je serai celle qui gagne.)

Le lansquenet sourit, utilisant son allémanique pour comprendre et passe sa main dans sa chevelure pour lui ébouriffer. Apollonia a la tête comme un tambour. Se redresse


- Tu sais c'quoi ton erreur ? T'a essayé de m'affronter sur mon terrain, en force et en endurance brute.


L'adolescente grogne pour toute réponse.


- Réfléchis, un bon combattant est avant tout un esprit fin.


Elle lève une main, l'air de dire : on en reparlera. Remet son ceinturon, doigts fins ajustant à l'ardillon. Il sourit et l'aide à se redresser, une main restant dans son dos au cas où, il observe son visage. Le coup a probablement touché l'arcade sourcilière. Apollonia aura les vraies stigmates demain, à froid.


- J'apprendrais.
- J't'apprendrais.

Hase le regarde en se hissant, masquant ses douleurs au cul et au coude dans un souffle.


- Et moi. Qu'aurais-je à vous apprendre?
- A nager. Et des trucs de marins.

Fechter lui sourit. Elle ne retient pas de poser une main fine sur sa joue gonflée.


- Alors rendez-vous en été. Parce que ça caille franchement dans c'patelin
- Eh, Apo'.

Dit-il en lui attrapant un bras.


- J'te le dirais qu'une seule fois.


Elle se raidit. Déteste ce geste. Celui de Bastian. Celui de Ganwyn. Siegfried l'attire à lui pour à nouveau l'enlacer, vu que c'est probablement la dernière fois qu'il la verra avant longtemps.


- Humf
- J'suis heureux d't'avoir retrouvé, tu m'avais manqué.

La Hase ne lui demandera pas cependant à lui, ce qu'il est entrain de faire, comme elle en a le réflexe dès qu'un contact agresse sa fierté.. Se détend, soudain. Désarmée.


- Ik zal je missen.. ( Vous allez me manquer )

Lâche-t-elle à demi voix. Il vient poser un baiser dans sa chevelure, même s'il doit se baisser pour ça.


- Ik ook. ( Moi aussi )

Apollonia l'étreint d'une force volontaire, quoi que bien diminuée. Muscles encore raides de s'être trop crispée à l'affronter.


J't'écrirais tes trois lettres. Faudra que tu me donne tes haltes sur la route d'accord ? Si j'ai envie de t'en écrire plus que trois.


Cixi hoche le museau contre le torse. Drôle de sensation. A-t-elle déjà ne serait-ce que touché un torse nu? Fechter la laisse faire, la main toujours dans la chevelure. Puis sourit un peu.


- J'viens d'penser à un truc.


La jeune fille réprime un frisson lui courant le long de l'échine, et se dégage. Jamais longtemps câline. Elle se plie souplement pour saisir l'escarcelle accrochée à un vieux clou. Y déloge la bouteille. Siegfried sourit vaguement en coin, pas du genre à prolonger les étreintes plus longtemps que voulu, et va prendre son sac dont il tire son collier de chevalier à plaques et en enlève l'emblème.


- Hep, réflexe.


Il le lui envoie comme une bille, dans un "ping" métallique.


- Vous me gâtez.

Dit elle en l'attrapant maladroitement.


- Nie.

Apollonia manque de lâcher la bouteille.


- ça tu me le rendra. C'est l'emblème de mon ancienne compagnie. Comme ça j'sais que tu crevera pas histoire qu'tu m'le rende.

Elle le manipule entre ses doigts, curieuse d'en observer les détails. La breloque vaut son pesant ... Lève les clairs vers lui.


- ça ressemble à une tentative de m'débaucher ou je n'my connais pas...

- De te débaucher ?

Il rit. L'emblème est assez simple, en laiton. Représentant un heaume reposé sur une flamberge et hallebarde entrecroisée. Apollonia le fait tourner entre ses doigts, sourire revenant lentement reprendre ses droits.

- D'un chevalier à l'autre. Ja.
- J'admets tak.

Il rit et va se rhabiller complètement.


- J't'écrirais demain, un simple courrier même si tu prends la mer.


La jeune fille le glisse méticuleusement dans la doublure décousue de son bliaud reposé, là où les voleurs cachent leurs trésors.


- D'accord. Vous n'aurez qu'à glisser le pli à un matelot de l'Obélix. Il saura me le donner.

Siegfried Fechter hoche la tête en remontant son masque. Cixi_apollonia glisse au sol, Hase est parfois couleuvre.


- Dobra, allez Apollonia. Rends moi fier en orient.

- Prenez soin d'vous Lansquenet.
- Tak toujours.

Cixi Apollonia a un clair pincement au palpitant, une corde mal accordée quelque part. Mais l'heure du départ est là. Il est temps. Elle lui laisse la boutanche. Réajuste ses frusques. L'escarcelle retrouve l'épaule. Siegfried Fechter sourit et viens ouvrir la porte.


- Allez, môlon labé comme on disait chez nous.


Apollonia lui emboîte le pas en silence. Tout est dit. Au r'voir la Montagne. Y'a que les Montagnes qui ne se recroisent pas. Dieu merci, les lièvres ça court la campagne.

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Cixi_apollonia
[ Courir vite ]



Citation:
À Ganwyn

Ganwyn... pointe toi... je vais embarquer et je ne veux pas partir sans t'avoir dit au revoir...

A.


Paquetage sous le bras, la Hase avait pris bien du retard pour le rendez-vous fixé par Tanissa la direction du port, mue par l'espoir de croiser Ganwyn avant de prendre l'eau ... Pli d'excuse avait été glissé dans la cabine de l'Amirale, tandis que la jeune mousse faisait les cents pas en tournant son cou frêle à chaque bruit entre les coques. Viendrait-il? Piétinant, gorgée nouée, découpe furtive dans la nuit, elle s'était attardée encore un peu, le temps d'un espérance vaine, avant de filer aux premiers bruits de bottes sur les pavés. Regrets. Elle aurait aimé lui dire au revoir. Lui qui détestait tant l'idée qu'elle s'en aille voguer sur l'eau. Demain, lorsqu'elle aurait pris la route, le messager à qui elle avait destiné ses lettres apporterait les messages à son frère et à son Père. Bastian et Wayllander seraient enfin au fait des projets de l'infante, et leur colère ne l'atteindrait plus. Elle n'allait pas en Angleterre. Nee. La direction était plus au nord ouest. Dans les étendues d'eaux glacées menant aux terres du grand Khan. Pour sûr, le voyage serait long. Interminable peut être. Mais la détermination de la jeune Leffe était scellée de fer. Sabre flambant neuf à la ceinture, capuchon relevé sur ses cheveux bruns, écume vaporeuse dans l'air noir et froid d'Angers. Deux yeux clairs étincelant à la lueur d'une torche. Ceux d'une Hase happée dans le faisceau lumineux d'une lanterne.

Des murmures, des bruits d'une épée qu'on tire au clair. Puis deux. Puis trois. Et cent. Hase avait juste eu le temps de cesser de respirer et de réaliser l'erreur tactique qu'elle venait de commettre que déjà le guet s'écria :


- Là ! Y'en a un qui s'échappe avec des marchandises!


Le port. La flotte royale. Apollonia et son paquetage. Seule dans la nuit. Il lui coûta de réaliser que l'escouade était en réalité toute une armée, traquant la rébellion organisée des angevins pour reprendre leur château... Il lui coûta de songer qu'à juste quelques enjambées, son navire l'attendait depuis plus de deux heures, et qu'ils ne la verraient pas arriver. Dans un réflexe de survie, Hase s'était mise à cavaler, glissant sur le pavé humide et salin pour échapper à la horde s'élançant à ses trousses.

Courir.


Si la montée d'adrénaline soudaine, brute, lui avait laissé le temps de réfléchir à quoi que ce soit, quelques phrases soudain bien futiles auraient tonné dans l'esprit du matelot.



    - Qu'est-ce que je peux faire pour vous remercier?
    - Revenir vivante, entière et récupérer ton canasson.

    - S'il n'y a que ça. comptez sur moi.


Courir.


    - ça tu me le rendra. C'est l'emblème de mon ancienne compagnie. Comme ça j'sais que tu crèveras pas histoire qu'tu m'le rende.


Courir.



    - Tant que tu me promets que tout ira bien. Ca m'va si tu pars sur l'eau.

    - Sûr que tout ira bien... J'ai pas laissé mon Père me faire saisir par ses sbires, ce n'est pas une petite vague qui va m'renverser sur le dos.


Courir vite.

Et mourir. Rattrapée avant même d'avoir le temps de grimper sur le navire, prise pour un petit saboteur tentant d'empêcher la flotte de s'en aller avant l'aube, la Hase fut battue à mort et jetée, disloquée, sur le pavé glacé. Paquetage éclaté, une miche de pain roulant à terre, dans une flaque carmine et huileuse. Sur la coque de l'Obélix, les traces pourpres de deux fines mains qui s'étaient agrippées à un autre espoir vain. Celui de tenir ses promesses. A dieu, le beau sabre de Fechter. Adieu, l'envolée sauvage. Ganwyn n'était pas venu. Apollonia serait découverte lorsque l'heure de tirer l'Ancre aurait bien trop tardé... Non. Ce n'était pas les sbires de Rubroek qui l'avaient stoppée dans sa course vers la liberté. Non. Elle ne rendrait pas de sitôt le collier confié par le Lansquenet. Personne ici ne savait qui elle était. Une pauvre masse inerte, au visage défiguré par l'estoc d'une lame. Et pour toute ironie, une lame Royale.



Spoiler:
08/12/1466 04:07 : Félicitations ! Vous avez débloqué le trophée Chair à canon.
08/12/1466 04:07 : Votre bouclier a été détruit.
08/12/1466 04:07 : Votre arme a été détruite.
08/12/1466 04:07 : Vittoria vous a porté un coup d'épée. Vous êtes mort au combat.
08/12/1466 04:07 : Alandrin vous a porté un coup d'épée. Vous êtes mort au combat.
08/12/1466 04:07 : Lalock3 vous a porté un coup d'épée. Vous êtes mort au combat.
08/12/1466 04:07 : Pamounette vous a porté un coup d'épée. Vous êtes mort au combat.
08/12/1466 04:07 : Romu2b vous a porté un coup d'épée. Vous êtes mort au combat.
08/12/1466 04:07 : Richard.horn vous a porté un coup d'épée. Vous êtes mort au combat.
08/12/1466 04:07 : Leane vous a porté un coup d'épée. Vous êtes mort au combat.
08/12/1466 04:07 : Lalock3 vous a porté un coup d'épée. Vous êtes mort au combat.
08/12/1466 04:07 : Aimelin vous a porté un coup d'épée. Vous êtes mort au combat.
08/12/1466 04:07 : Vittoria vous a porté un coup d'épée. Vous êtes mort au combat.
08/12/1466 04:07 : Maradrir vous a porté un coup d'épée. Vous êtes mort au combat.
08/12/1466 04:07 : Gregoire_de_j vous a porté un coup d'épée. Vous êtes mort au combat.
08/12/1466 04:07 : Torchesac vous a porté un coup d'épée. Vous êtes mort au combat.
08/12/1466 04:07 : Victoire. vous a porté un coup d'épée. Vous êtes mort au combat.
08/12/1466 04:07 : Alandrin vous a porté un coup d'épée. Vous êtes mort au combat.
08/12/1466 04:07 : Ludovicus vous a porté un coup d'épée. Vous êtes mort au combat.
08/12/1466 04:07 : Rhuyzar vous a porté un coup d'épée. Vous êtes mort au combat.
08/12/1466 04:07 : Eymerick vous a porté un coup d'épée. Vous êtes mort au combat.
08/12/1466 04:07 : Davyxiv vous a porté un coup d'épée. Vous êtes mort au combat.
08/12/1466 04:07 : Aimelin vous a porté un coup d'épée. Vous êtes mort au combat.
08/12/1466 04:07 : Axel_baccard vous a porté un coup d'épée. Vous êtes mort au combat.
08/12/1466 04:07 : Gregoire_de_j vous a porté un coup d'épée. Vous êtes mort au combat.
08/12/1466 04:07 : Richard.horn vous a porté un coup d'épée. Vous êtes mort au combat.
08/12/1466 04:07 : Sventovit vous a porté un coup d'épée. Vous êtes mort au combat.
08/12/1466 04:07 : Axel_baccard vous a porté un coup d'épée. Vous êtes mort au combat.
08/12/1466 04:07 : Romu2b vous a porté un coup d'épée. Vous êtes mort au combat.
08/12/1466 04:07 : Kwale vous a porté un coup d'épée. Vous êtes mort au combat.
08/12/1466 04:07 : Arthur_ar_sparfel vous a porté un coup d'épée. Vous êtes mort au combat.
08/12/1466 04:07 : Benjaminfauconnier vous a porté un coup d'épée. Vous êtes mort au combat.
08/12/1466 04:07 : Fred1003 vous a porté un coup d'épée. Vous êtes mort au combat.
08/12/1466 04:07 : Lalock3 vous a porté un coup d'épée. Vous êtes mort au combat.
08/12/1466 04:07 : Duissane vous a porté un coup d'épée. Vous êtes mort au combat.
08/12/1466 04:07 : Alienor_vastel vous a porté un coup d'épée. Vous êtes mort au combat.
08/12/1466 04:07 : Benjaminfauconnier vous a porté un coup d'épée. Vous êtes mort au combat.
08/12/1466 04:07 : Abigail. vous a porté un coup d'épée. Vous êtes mort au combat.
08/12/1466 04:07 : Richard.horn vous a porté un coup d'épée. Vous êtes mort au combat.
08/12/1466 04:07 : Hoeldetrajan vous a porté un coup d'épée. Vous êtes mort au combat.
08/12/1466 04:07 : Alienor_vastel vous a porté un coup d'épée. Vous êtes mort au combat.
08/12/1466 04:07 : Vous avez été attaqué par l'armée "Varn Waele" dirigée par Karyaan.

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Ganwyn
Non il n’était pas venu. Ganwyn était de ceux qui parfois et même souvent désertaient leur responsabilités à la première occasion. Plus d’une fois il avait tourné le dos quand on l’appelait, et à chaque dos tournés, à chaque faux pas dans une vie qu’il avait rêvé infiniment plus chevaleresque, il s’en allait se noyer un peu plus dans l’obscure vérité que pouvait offrir le vin. Ce soir là ne faisait pas exception. Il n’avait pas reçu le pli de sa jeune écuyère en devenir. Enfin, si, il l’avait reçu. Mais au mauvais moment. Au moment où il cauchemardait dans un coin d’une taverne lugubre désertée par ses propriétaire. Ganwyn avait loupé pas mal de trucs dans sa vie, et il en loupa une de plus. Le messager l’avait trouvé là, mais repoussé par un vague geste d’alcoolique non prompte au réveil, il avait alors laissé le pli sur la table. Et le chevalier l’avait ramassé seulement le lendemain, quand encore barbouillé par ses excès de la veille, il tentait de comprendre ce que foutait ce papelard ici. Partie. Elle devait être partie et il n’avait pas réussi à la voir. Pourtant il y avait plus difficile à faire que de simplement se pointer à un rendez vous. D’un soupire il balaya l’invitation au sol et tituba vers la sortie. Angers était un sale trou à rat, la gamine sur les flots, rien ne le retenait ici. Alors il fit ce que pouvait faire de mieux n’importe quel chevalier errant de son acabit, il prit la route.

Sa dernière tentative de la voir fut une bien inutile. La visite des catacombes, même si il savait au fond qu’elle n’y serait pas. D’une plus grande utilité aurait été l’idée d’aller voir le port. Mais cette idée ne l’effleura même pas. Embué par l’alcool qui servait de plate excuse à son véritable dégoût des vastes cours d’eau ainsi que des étranges tas de bois qui flottaient dessus, le chevalier n’avait guère hésité sur l’avortement de cette idée pourtant beaucoup plus intelligente que la première. Avec un dernier regard sur Angers, il espérait simplement que la gamine ne finirait pas ballonnée d’eau au bord d’une plage. Même si il savait que son offre avait bien peu de chance d’aboutir, il espérait au fond de lui que cela se concrétise. L’espoir, ça aide parfois.


[Quelque part dans le sud de la Bretagne.]

C’est sous une pluie battante que rentra le messager. Le breton était installé confortablement près de l’âtre d’une de ces tavernes de route. Bien éloigné des seuls autres occupants qui étaient un trio de gens en armes breton. Allergique aux siens, Ganwyn s’était fait un devoir sacré de s’éloigner le plus possible des types de chez lui. Assez lucide étrangement pour un début de soirée, il ne comprit guère quand le message lui arriva sous le coude. Le type ne portait pas de couleur, et avait l’air plus ennuyé d’être là qu’autre chose. Après tout, quelle idée de courir la campagne jusqu’au sud de la Bretagne pour apporter un pli à un ivrogne ? Message délivré, il reprit la porte sans guère un mot au chevalier qui peinait à lire les lignes. Éduqué aux armes, Ganwyn n’était pas un homme de lettre, et ne possédait que des rudiments d’écritures, et une lecture extrêmement lente et douloureuse pour lui. Cependant, au bout d’un petit quart d’heure, les lignes étaient lues, et il les reprit. La Royale qui descendait un de leurs ? Cela n’avait aucun sens. Il ne pouvait pas la voir mais lui envoyer des onguents. La lettre fut reposée bien assez tôt et le cul breton se décolla de sa chaise.

- C’est quoi c’te lettre ? Hurla-t-il à travers les trombes d’eaux bretonnes.

Le messager le regarda comme si il était la dernière des prunes.

-Une lettre, lis la et me fait pas chier, fait froid ici.

La réponse ne convenait clairement pas au chevalier.
D’une marche bien décidée, il avança au travers de la douche de son pays natal pour tirer le cavalier hors de sa selle.
Le messager s’écrasa mollement dans la boue, retenu par une main ferme.


-T’es con ou quoi toi ? Beugla-t-il alors qu’il se débattait pour tenter de comprendre ce qui lui tombait sur le coin de la gueule.

-T’iras nul part tant qu’tu te traîneras pas ma réponse avec toi. Boucles la et ramène ton cul dans cette taverne.

Assit dans un coin le plus éloigné de la sortie et de Ganwyn possible, le messager bougonnait le nez dans sa bière. Quelques pièces, un repas chaud, deux trois bières, et une menace l’avait convaincu de rester quelques minutes de plus. Quelques minutes pour que le chevalier fasse son choix sur la marche à suivre. Un instant, il hésita à enfourcher son cheval et retourner à Angers. Mais, à quoi bon ? Voir la gamine mourante ? Mettre un pain dans la tronche du type qui avait pu la dézinguer. Non, c’était inutile. Et il se rendait bien compte d’une chose, il n’avait aucune envie de la foutre sous terre. Si elle s’était faite casser la gueule à ce point là, sa vie ne devait tenir qu’à un fil. Ses questionnement réussirent à lui ouvrir la lèvre inférieur à force de la mordiller. Au final. Si la gosse était sur le pavé, c’était sûrement de sa faute. La grande danse des « si j’avais » commença alors. Et le breton se laissa emporter par un florilège des erreurs passés. Alors il ne prit pas son cheval pour revenir à Angers. Une simple lettre pour la gamine si elle se réveillait, si elle vivait. Mais il n’avait guère d’espoir là dessus. Il avait vu trop de type mourir de leurs blessures à la guerre pour y croire. Lettre finie, le messager fut remit sur pied et congédié dans le froid et les insultes réciproques. Ganwyn reprit place près du feu. Ses mains tremblaient. D’un geste, il commanda une bouteille de vin rouge. C’était ça sa meilleure technique pour oublier, se détruire la tronche à coup de vinasse. Et il avait besoin d’oublier.
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