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[RP ] Fils de Mars, Garçon de Novembre

Alphonse_tabouret
Le ciel de Florence s’est ouvert ce matin. Déchirant la grisaille humide des derniers jours, lambeaux de bleus ont envahi la corolle épaisse des nuages, déchiqueté la robe jusqu’à l’ étioler pour n’en garder que le parfum des pluies qui viennent à peine de cesser.
Rigoles s’égouttant, pavés humides, verres des fenêtres encore éclaboussés, la ville s’ébroue le long d’un Arno galvanisé, au courant vif. Marchands n’ont pas encore tous enlevé les bâches au-dessus des petits comptoirs qui sillonnent les rues et si certaines se creusent à la fonction d’un puits improvisé, les affaires ont repris de plus belle pour rattraper ces jours où chacun était pressé de rentrer pour s’essorer.
L’odeur des premières châtaignes grillées fend la ville d’une chaleur joyeuse, car si le ciel est clair, le froid, lui, mord les joues jusqu’au sang ; rouge frappe même les peaux mattes et pommettes apparaissent sur les visages des passants comme une ode à un hiver que l’on attend pourtant que le mois prochain.

Garçons marchent côte à côte, lévriers aux talons, épaules se frôlant parfois à la faveur d’un pas commun ; ils se sont extirpés quelques heures plus tôt d’un lit froissé et, chassés par les placards vides d’un appartement neuf, sont descendus dénicher une gargote où commencer la journée d’un petit déjeuner. Depuis, ils ont semé le temps d’une visite de la cité ; Tabouret improvisé guide a quadrillé la ville de ses souvenirs les plus gais, enjambant le Ponte Vecchio, embrassant d’un œil clair l’élégance de Santa Maria del Fiore au voisinage du Baptistère Saint Jean, flanqué de ses trois portes colossales où ils se sont recueillis d’une muette admiration jusqu’à se faire bousculer d’une cloche frappant l’heure écoulée. Eventrée de chantiers faramineux, ils ont parfois coupé la cité d’un pas boueux au travers de chargements massifs pour s’arrêter d’un instant suspendu devant la façade d’un palais étincelant dans le froid, aux confins d’un parc étoffé de quelque résineux.
Florence rayonne déjà, s’embellit, se transforme et à s’offre de détails étourdissants ; enfant chéri de la Renaissance entre dans son âge d’or et s’apprête à séduire l’Europe toute entière, à fragmenter le temps d’un avant et d’un après : quelque part dans la ville, à l’abri de l’atelier de Verrocchio, De Vinci a quinze ans , et Solyaane au ventre rond sort de son lit en les appelant.

Ils n’entendront pas ; chiots, enfants nés et à venir, ventre, toute responsabilité a été laissé sur place, au chaud d’une auberge du centre-ville à la solde d’Oricle et sans un regret, la porte a été claquée en promettant un retour avant la nuit.
A la fin d’après-midi, pas invariablement malgré leurs virages ont suivi un tracé double, l’inéluctable d’une poignée de mots que Faust a semé la veille et qui ont cintré Alphonse d’une raideur discrète dont l’aigreur a eu un gout étrange aux salins laissés par leur récent voyage. ; il a des affaires à régler ici, de celles qu’il a volontairement occultées de deux ans de silence, d’un souvenir figé qu’il n’a pas dépoussiéré et qu’il faut aujourd’hui déblayer aux aubes nouvelles.
Au prochain croisement, l’une des rues montera, et l’autre, plus sinueuse, ramènera d’une pente douce aux proximités de la maison ; c’est là qu’ils se quitteront d’une heure au contrat, d’infiniment plus à la réalité car Tabouret sait déjà qu’il ne ressortira pas sauf de cette entrevue : Villa Salviati garde dans son giron les vides abattus d’une errance mort-vivante et condamne Alphonse à un face à face où l’innocence ne se plaide pas.


Là…

L’on piétine un peu sur place, mains dans les poches de manteaux boutonnés jusqu’aux cols, écharpes rayant les museaux d’un trait qui ne suffit pas à faire taire les yeux ; le chemin n’offre aucun répit, ponctué en permanence d’un passage bruyant et scelle d’une impasse le destin des amants que l’on sépare. Habitudes prises à l’intimité de la petite nave bousculent la chair qu’il faut museler d’imperceptibles détails ; distances sont assises d’une infime exagération, d’un buste droit, d’une tête qui tend vers l’arrière quand le désir en menace l’équilibre falsifié vers l’avant, espace distendu d’une aberration que commande le monde.
Pourtant, le centre du monde est là, devant lui ; créature mâle aux yeux–miroirs, aux mots qui font et défont les réalités, aux rires-balances qui balayent d’un éclat chaque noirceur pour ne laisser que l’empreinte d’un parfum tendre, aux exquises verdures qui se targuent d’échos et s’empourprent, lianes.



Funambule soupire d’un cœur fendu et suit son méridien


C’est un peu plus haut, reprend-il en se détachant du visage de Faust pour jeter coup d’œil à l’allée désignée. Le ton a tout du badin, des aléas qui retardent sans gravité et si Alphonse s’interrompt, ce n’est pas d’un oubli à ses protectionnistes attitudes mais d’un remous qui scinde les passants en contrebas ; tempes serrent les rênes d’un agacement exacerbé d’un futur proche et l’attention en revient à sa principale préoccupation.
Retrouvons nous pour…
C’est l’oreille qui tire désormais et qui pousse le visage à pivoter plus nettement, croisant finalement le regard d’un jeune homme remontant la foule d’un contrecourant remué, agitant les bras en leur direction de quelques incompréhensibles syllabes ; voilà déjà cinquante mètres qu’il a reconnu les cheveux presque blancs de Montfort et essaye d’attirer leur attention. Enfin obtenue, il s’arrête essoufflé, s’accordant quelques secondes avant d’enfler le poumon d’une grande inspiration, et de fendre la distance qui les sépare encore d’un cri, mains en porte-voix :

Signore Tabouret! Tua moglie! … Le si sono rotte le acque! … Sta per avere un bambino, signore! *




* Monsieur Tabouret! Votre femme! Elle a perdu les eaux! Elle accouche, monsieur!
_________________
L_aconit
    Flashback. " L'ultima Casa Accogliente" - Pise.


- Il fera les esquisses en à peine une heure... les notes serviront à les étoffer. Ces gens là dessinent comme ils respirent.

Faust répète, véritablement impressionné :

- Incroyable.

Blond glisse une main aux cheveux bruns, murmurant:

- Ja, je me ferai tirer le portrait si tel est ton désir. Mais il faudra prévoir le goûter.

L'Aconit le regarde d'un air de " c'est entendu?"

- Le goûter?
- Bien sûr. Poser a l'air d'être terriblement physique. Je tiens à ma condition .

Il tape ses abdominaux .

- Tu ne crois pas que je vais rester planté une heure à te regarder sans avoir une faim de loup ensuite?

Alphonse Tabouret pouce vient dessiner le bas de la lèvre claire.

-Mijn, tu auras le ventre plein, je te le jure.

Faust pose sa joue contre le pouce, puis la main, pliant un peu le cou blanc. Alphonse l'y accueille d'une douceur.

- Alors ce sera bien..
- Et toi, qu'as tu envie de faire là bas? La ville pullule de marchés...

Tabouret y sourit en le disant. Caresse devient liane et Alphonse les rapproche d'une étreinte

- Te voir heureux...
N'est-ce pas à Florence que tu as quelque chose à régler?


Alphonse observe silence à cette remarque.

- J'ignore si ce que j'ai à régler la bas se règle en une journée...
J'ignore s'il convient même de les régler...

- Et bien soyons optimistes. Je te donne une heure.
- Une h..

L'Aconit l'embrasse, tandis que Tabouret se redresse d'une protestation qui se fait museler à la seconde. Faust a ce talent là, qui balaie d'une effronterie toute la souffrance d'une vie.

- Ensuite, nous irons manger gras, et nous enivrer quelque part. Nous finirons au lit.
Tu verras. Ce sera bien.


Et il hoche museau d'un air confiant qu'on ne voudrait que croire. Suivre. Alphonse le considère d'une oscillation curieuse; cela peut-il vraiment être aussi simple? Faust, à toute opaque entreprise, y préfère compter sur la désinvolture . Souvent, l'entreprise réussit.
Son voisin redoute le vin mauvais des après-confrontations, l'heure accordée qui se délaye à de houleuses explications, la lancinante violence des souvenirs qui hantent les murs de la villa... Le poumon se serre et museau se hoche d'une docilité.
Montfort sourit, lui, comme si rien n'avait tant d'importance. Il égrène , rassurant.


- Nous sommes en Italie. Nous revenons, pour en profiter. Nous allons acheter une fenêtre, et je vais te donner l'envie de t'y pencher chaque jour qui passe d'une rêverie.
Comme à Vésone . C'est une promesse.


Le sourire sincère du brun camoufle l’amertume distillée d'une note volatile au palais et lèvres viennent se sceller aux jumelles.


- Dépenser, manger, boire et baiser, cela me convient en tout points

Pour sûr, Faust n'avait pas fait la route jusqu'ici pour passer devant le museau narguant et impuni du passé d'Alphonse sans lui brandir le poing.


______

Florence.

Les silhouettes semblent se succéder dans chaque décor avec le même pas tranquille. Barcelone les a vus, comme Alexandrie, comme Pise, Florence, et demain Modène, puis Venise. Le duo contrasté n'en finit pas de marcher sur la peau du monde, de cette démarche alcyonienne, muselant l'un d'un sourire débonnaire, attardant l'autre aux observations laconiques. Les décors changent, les tenues s'adaptent, ils sont passés de l'été cuisant et des figues mûres aux paysages d'une Italie hivernale, où se calfeutrent derrière leurs écharpes leurs murmures. Echanges secrets de garçons secrets. Regards buvards à consigner dans des reliés sacrés.

Pourtant, si rien ne trahi la tension des deux hommes à l'approche de La Villa, un lien invisible s'est raidit sur l'ensecret qui les tient debout côte à côte, au métronome de leur démarche. Florence a volé un peu de Tabouret et y a apposé son contreseing, dans un monde qui n'était pas encore celui de Faust, mais à une échelle qui lui appartenait déjà sans même le savoir.
C'est lui qui, le long du chapelet de nuits sans paupières, aura renfilé les perles furieusement arrachées à Alphonse. De longs mois durant, à obtenir d'abord la reddition des symptômes, créancier de ces sombres heures qui avaient façonné le comptable d'une réticence silencieuse à la Vie. La vie "normale". La vie des gens en paix. Florence avait fait le sort des simplicités naturelles de toutes ses intimités. Il avait fallu combattre les crises, les insomnies, et les silences tirant sur les manches. Cachant aux yeux ce que l'âme seule pouvait percevoir.
Médecin aux mécaniques complexes, le temps avait poli sa Géode, mais en son coeur demeurait toujours l'acéré des cristaux pourpres. Alphonse avait composé. S'était rebâti sur des cendres. Que le moindre vent Florentin saurait raviver.

Faust ne le permettrait pas.

La veille, d'un ton faussement badin, Montfort avait lâché l'évidence. Aujourd'hui ils étaient là, à l'heure de ce Boticelli que lui vantait Tabouret, persuadé qu'il était indispensable de passer à son atelier pour une esquisse de portrait.
Les yeux bleus, graves, s'étaient posés sur les arrêtes de la Villa. L'accusant en silence, la condamnant d'un éclair froid aux feux de Saint Front. Tôt ou tard. Il n'avait pas terminé de percer l'opacité des fenestrons, l'inclinaison du toit comme le couvercle d'une boite de Pandore, qu'on les héla vivement, le tirant de sa chirurgicale analyse. Si son Italien n'était pas des plus aisé, il comprit l'essentiel, mot détonateur qui l'anima aussitôt d'un geste vulgaire vers la demeure, personnifiée comme l'horreur même. " Bambino".

A cette heure? Ici, maintenant?

Et d'un rire orgueilleux, l'index pointé impérieusement sur l'endroit où son amant avait vécu ses supplices, il perdit toute pudeur, toute réserve emportée dans une salve d'adrénaline . Saisissant de l'autre main l'épaule qui gardait sa distance, l'enfermant en étau d'un bras solide, il montra à Alphonse celle qu'il accusait, l'attirant dejà vers le chemin qu'ils venaient de parcourir :


Baisse tes rideaux, tu ne l'as jamais mérité. C'est là ta mort, notre fils naît!


Il naît, et l'on oubliera tout. Il naît et Alphonse oubliera tout. Tout ce qui a pu avant cet instant le lier un tant soit peu à une souffrance. Ton visage. Tes supplices. Toutes les sombres heures que tu lui as volé. Les années que tu as pris, par ricochet, à tous ceux qui l'ont attendu en France. Souvenir, incline-toi dans ta déchéance programmée et ploie ton visage hideux. L'enfant qui a mis neuf mois à pousser, six mois à s'envisager, deux ans et demi à éclore d'une histoire, t'aura balayé de son premier cri. Et balaiera tout ce qui reste. C'est un nouveau jour qui sonne à l'horloge. C'est un doigt d'honneur à la fatalité. Tu n'es plus rien.


Il n'y a pas de hasards, Liefde. Il n'y a que des rendez-vous.

C'est un signe !

Dit-il en tirant Alphonse par le col dans le brouhahah à l'éclat inattendu, vers l'auberge délaissée toute la journée.


C'est un signe, ton fils sera Florentin.


Et Florence aura réglé son ardoise. Payé sa dette. Rendu les armes. La messe est dite, la Maudite qui t'a sucé ton essence et t'a laissé exsangue va crever la bouche ouverte de ce retournement du sort. Elle qui croyait t'achever aux fers est aujourd'hui le berceau de ta catharsis. Et le théâtre d'une course folle, épis bruns et blonds bravant le froid, sur le pavé mouillé de ses rues, où la Villa a perdu une tuile. Amas éclaté au sol, dont l'abstraction n'évoque même plus rien.
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(En Bleu italique, les pensées Laconiques.) galerie d'avatar-Recueil
Solyaane
    Depuis des semaines, Solyaane attendait la délivrance. Porter un enfant s’était révélé être une expérience épuisante. Loin du cliché de la femme épanouie qui donne de la vie, elle s’était fatiguée à cohabiter avec une créature certes désirée, mais très envahissante, l’obligeant à se déplacer avec moult précautions, et à ne poser le pied au sol qu’en cas d’extrême nécessité. Le voyage en terres italiennes se résumait à un rapide tour de la ville du jour avant de se réfugier dans la chaleur d’une auberge en patientant jusqu’au soir. Quant au bateau, elle avait beau aimer la mer, elle était soulagée d’en être descendue tant le roulis lui donnait le vertige. Il n’est pas aisé de garder le pied marin lorsque vous avez le ventre lesté d’un petit tonnelet de cidre… ou de son équivalent en version humaine.

    L’heure a enfin sonné. Dehors, quelqu’un est parti à la poursuite des pères de l’enfant. Vêtue d’une simple chemise de nuit, Solyaane tente les cent pas dans la chambre. Une vague d’émotions multiples et incontrôlées la submerge. Et s’ils sont introuvables, perdus dans les dédales de Florence ? Devra-t-elle accoucher seule ? Comment, dans quelle position, à quel moment faut-il pousser ? L’enfant sera-t-il normal ? Respirera-t-il ?
    Les contractions la font se plier de douleur et interrompent momentanément le flot de questions qui se bousculent dans sa tête. Le plancher est humide des eaux qu’elle vient de perdre, et quelque part au fond d’elle, une voix murmure qu’elle devra donner un pourboire au personnel chargé du ménage, lorsque tout ceci sera fini.
    Ses mains agrippent si fort le bord du lit que les phalanges blanchissent. Une écharde s’enfonce dans sa paume. Solyaane n’a jamais donné naissance : le seul fils qu’elle ait jamais eu était adopté. Son corps fait connaissance avec le déchirement qu’est l’accouchement, et la mère se sent soudain très seule, dans cette chambre au beau milieu d’un pays où elle puise ses racines, mais où elle n’a plus guère de famille.

    La sueur perle sur son front. Ses muscles se crispent, bien qu’ils aient perdu de leur vigueur après tous ces mois sans entraînement. Sans même s’en rendre compte, Solyaane est allongée sur le lit. Au bas de son ventre, l’enfant lutte, indécis : il sait qu’il doit sortir de là, mais a-t-il vraiment envie d’être projeté dans un monde glacial et étranger ?
    Du monde s’agite autour d’elle. Alphonse et Faust sont forcément là, l’un est médecin, il sait quoi faire. Les autres visages présents ne lui évoquent rien, sur le moment. Du personnel de l’auberge ? Le valet des deux paternels ? C’est bien le dernier de ses soucis.

    Solyaane tremble de tout son corps, entièrement focalisée sur cet unique et ultime effort : l’inéluctable séparation. Pousser, respirer. Réitérer. Crier ? Oui, malgré elle, tant la souffrance est intense.
    Mais le cri qui résonne dans la pièce est différent. Ce n’est pas le sien. Celui-ci est plus criard, et à quelques pas d’elle. Des échos de voix, de rires et d’exclamations émues lui parviennent. C’est un garçon. Ses yeux brillent, humides. Il aura fallu quelques minutes pour le concevoir, neuf mois pour le fabriquer, des heures pour le finaliser.

    La mère s’enfonce dans les brumes de la fatigue. Elle sent l’enfant que l’on pose sur elle, sa bouche qui cherche le sein nourricier. Laborieusement, elle lève une main, douce et protectrice, pour effleurer son fils.

    Son fils.
    Un sourire de fierté flotte sur les lèvres de Solyaane.
    Peu après, ses paupières recouvrent ses yeux d’un voile de plomb.
    Elle a fini son travail.
L_aconit
Et le petit enfant naquit, tout chaud, poussant un premier cri comme un espoir.

Tête de velours brun, Il naît, et de naître seulement, il est beau comme le jour et la nuit réuni. Il naît juste après la course essoufflée de ses pères, de ses pairs, il naît dans la mort de la Villa Salviati.

Bouche contrariée d'être tiré de la panse de printemps pour se présenter à l'hiver.

N'avait-on pas dit, avant et après sa conception, que l'on sèmerait , s'aimerait jusqu'à l'hiver?

Faust le tient, d'une main qui jusque là avait été étrangement sûre d'elle, tête pas plus grosse qu'un pamplemousse dans la paume. Mûr, enfin tombé de l'arbre.
Melvil Paris Alastor Tabouret. Fruit qu'on fit.

Dextre tremble un peu, maladroite d'empoigner la petite nuque de vie. Prunelles le scrutent, de leur bleu mystérieux. Un bleu intimidé. Deux yeux. Deux oreilles. Deux narines de dentelle. Deux poings qui serrent le vide, équilibriste. Une parfaite symétrie. Les yeux rivés sur ce petit prodige de géométrie, Faust reste silencieusement ébaubi.

A-t-il vraiment fait cela? Aurait-il songé un jour faire cela?

L'enfant pansement vient froncer les sourcils dans une grimace indécise, et sa lèvre se réhausse , relevant avec elle toutes les saveurs de l'univers. Plus tard, l'on irait le baptiser au chianti. Le présenter à Tabouret, resté en retrait. Sans doute mort d'inquiétude, et galvanisé à la fois, à deux mètre d'eux derrière son drap de patience. Enveloppé dans un cendal, remis au sein, il se meut lourdement, tête pesante, bouche avide, et Faust regarde Solyaane dans son drap de fatigue. Passe un linge sur son front, sur son visage aux yeux clos.

Elle a bien travaillé.

Pensée aussi cruelle qu'inéluctable. L'enfant lui sera ôté bientôt. Le temps de trouver une nourrice. Le temps d'installer confortablement le petit être dans leur binôme mâle, l'arrachant à peine éclot au trinome formé neuf mois durant. Ainsi est le contrat.


    Trois sur un chemin, derrière une auberge.
    Trois dans le huis clos d’un mess.
    Trois dans une chambre de Paris.
    Trois frémit, gémit, éjacule.

    Trois autour d'une table.
    Trois à la même page.
    Trois dans la chambre de Petit Vésone
    Trois pense, cogite, spécule.

    Trois hier, resteront trois demain.
    Mais l'enfant aura remplacé sa mère.

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(En Bleu italique, les pensées Laconiques.) galerie d'avatar-Recueil
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