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[RP] Le début de la fin

Heloise_marie
Il faisait noir. Elle courait. le plus vite possible. Ses pieds se prenaient dans des branches et des ronces, déchirants ses chaires et surtout, ses chausses. Elle courait en trébuchant mais en ne tombant pas ! Tant son souffle était haletant, elle ne parvenait pas à crier pour demander de l'aide ou tout simplement, faire étalage de son courage bien évident. Alors elle courait. Se retournant de temps à autre pour faire face à celui qui la poursuivait. Cette chose ou cet être sombre et terrible, hurlant son nom à tue tête, une arme ou en tout cas un énorme truc pointu à la main. Elle court en tenant ses jupes dans ses mains, relevées pour éviter de les abîmer elles-aussi. Des jupes en laine orangées...

Attendez un peu...

DE LA LAINE? Mais c'est dégueulasse ça !

Wooooaaaaaah !

Ses yeux s'ouvrent d'un coup sur ce cri strident alors que la lumière paraissait lentement entre les rideaux clos de sa chambre. Le cœur battant à tout rompre Héloise se redressa dans son lit à baldaquin et ses draps soyeux. Cauchemar ! Misère ... prémonitoire? Paniquant en tout cas. D'un coup, la porte s'ouvre sur sa chambrière à la mine paniquée et fit sursauter Héloise.

Maaadame Madame, vous allez bien vous allez bien j'ai ouïsse un cri de vous..
La ferme Colette !
L'on vous a attaquée? A LA GARDE
S'il te plait je t'ai demandé de...
A LA GAAAAAARDE.
MAIS BORDEL FERME LA !!!
Vous..je...
Vois-tu que je suis dans mon lit et en bonne santé?
Mais.. j'ai ouïsse..
Casse-toi !

La porte claqua sur sa mine déconfite ! Quelle cruche celle-là, encore une dinde à balancer à coup de fouet. Frottant ses mains sur ses yeux, puis étirant ses bras en l'air, Héloise Marie sauta hors de son lit et enfila son peignoir, PAS EN LAINE et surtout pas orange, beurk !!! D'un geste elle ouvrit les rideaux qui illuminèrent sa chambre de longs et brillants rayons du soleil ! Ça allait être une belle journée ! Magnifique journée de voyage !

D'un coup, la porte de sa chambre s'ouvrit de nouveau en grandes pompes sur deux gardes essoufflés.

On ...pff pfff pfff on est là pff pfff pfff
Soupir de la Comtesse.
Y a eu pfff pff y a eu attaque ! LA GARDE ppfffff pfff LA GARDE !
Désolée m'Dame la Comtesse j'ai essayé de les retenir...
Y A EU ATTAQUE?? pffff
... mais y m'ont pas écoutés ils sont...
écartez-vous de la pfff fenêtre !
...vraiment bête j'vous jure...

Par Aristote quelle malédiction la touchait à ce point pour qu'elle se tape des benêts pareils ! Alors qu'elle dévisageait les deux gardes occupés à fouiller, si on peut appeler ça une fouille, la chambre et les privés, elle poussa un nouveau soupir et se tourna vers la fenêtre, regard vers l'horizon. Laissons-ça de côté se disait-elle ! Aujourd'hui c'est une belle journée. Aujourd'hui elle rend visite à sa vassale ! Les deux femmes avaient des choses à régler et il était hors de question qu'elle parte d'Arbois en colère.
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Elisaabeth.
Du côté élisabéthain, tout se passait pour le meilleur du monde. Elle avait volontairement mis de côté le fait que sa suzeraine viendrait la voir dans quelques temps, pour sa tranquillité d’esprit, et surtout afin d’être la plus apaisée possible. Alors qu’elle avait expressément exprimé la volonté de dormir aux côtés de son époux, elle s’endormit dans les bras de celui-ci, complètement lovée comme elle aimait le faire, et fut plongée dans un profond sommeil dont Morphée avait le secret. Elle se réveilla en ouvrant un œil, puis l’autre, et s’étira, heureuse et tellement légère … légère ? Comment ça « légère » ? Elle posa une main sur son ventre relativement plat pour une femme supposée être enceinte jusqu’au bout des ongles. Paniquée, elle se releva tel un pantin dans sa boîte en cherchant du regard ce qu’il a bien pu se passer pour qu’elle s’endorme enceinte et qu’elle se réveille plate comme une planche à peine gondolée. Son regard croisa celui de son aînée, Marianne, qui avait le sourire jusqu’aux oreilles, visiblement en train de tenir quelque chose derrière le dos. Suffoquant presque, Élisabeth parvint à peine à demander à sa fille ce qu’elle faisait là, celle-ci lui répondit le plus naturellement possible :
Je suis venue te parler, maman. J’ai pris une très grande décision.

Un temps d’arrêt avant de reprendre … J’ai retrouvé papa, et je vais partir vivre avec lui.
Maman belette manqua une respiration, peur d’avoir mal compris ce qui a été dit. C’est pourquoi elle réitéra sa question, à savoir qu’est-ce que Marianne faisait là ?
J’ai retrouvé papa. Tu sais, celui dont tu ne veux pas prononcer le nom devant moi, Édouard de Sparte. Je l’ai retrouvé et j’ai décidé que je serai mieux avec lui qu’avec toi.
Tombée du lit, Élisabeth se précipita sur sa fille, la serrant aussi fort qu’elle le pouvait dans ses bras, les larmes commençant à ravager son visage. Elle ne comprenait pas, ou plutôt elle ne comprenait plus rien du tout.
Marianne, explique-moi. Pourquoi tu fais ça ?! Tu sais très bien que je t’aime ma …
La petite fille repoussa doucement l’étreinte de sa mère puis, le sourire qui était affiché plus tôt s’effaça pour laisser place à une mine sans expression. La gamine soupira avant de répondre : Je sais très bien que tu les préfères à moi. Elle faisait clairement référence aux enfants du couple d’Ormerach, ceci ne faisait aucun doute. Papa est parti alors tu te venges. Je mérite mieux, tu ne crois pas ?
Le visage noyé par les larmes, Élisabeth peinait à encaisser les durs mots de sa fille, la chair de sa chair. Bordel mais qu’est-ce qu’elle avait fait au bon Dieu pour qu’on s’acharne de la sorte ?!
Bien sûr que non Marianne. Je t’aime de tout mon cœur, et personne ne remplacera perso…
Le doigt de la petite se posa sur les lèvres élisabéthaines, l’intimant à cesser de parler. Ce qui permit à l’enfant de terminer : Je m’en vais. Tu pourras les aimer davantage quand je ne serai plus là.
Dépossédée de tout moyen, Élisabeth regarda sa fille partir alors qu’elle était agenouillée pour être à la hauteur de son enfant. Enfant qui avait un couteau couvert d’une couleur inquiétante, le rouge qui ne présageait rien de bon. Lorsque cette dernière allait passer la porte, elle s’arrêta et se figea quelques instants avant de croiser le regard de sa mère, un regard qui ne disait rien qui vaille, un regard qu’elle n’avait jamais vu auparavant dans les yeux de sa fille.
Bien entendu, ne cherche pas tes autres enfants, ils dorment très profondément … ensevelis dans le jardin naturellement.
Ce fut un choc tellement horrible qu’aucun son ne sortit de la bouche d’Élisabeth qui formait un O. La petite fille, âgée d’une petite dizaine d’années, reprit d’un ton extrêmement glacial : N’est-ce pas ce que font les vrais Sparte, lorsqu’un obstacle les empêche d’avancer ?

Puis elle partit, laissant en plan sa mère, elle avait abandonné le couteau ensanglanté sur le pas de la porte. Élisabeth suffoqua, complètement perdue et ne voulant croire ce qui venait de se produire sous les yeux. Elle pleura, de tout son soûl. Elle voulut bouger mais elle était comme coincée. Elle pleura tellement qu’elle apporta ses mains au visage, fermant les yeux, complètement perdue et désespérée. Elle se sentit secouée vivement, avec des appels lointains.

Lorsqu’elle rouvrit les yeux, elle était de nouveau allongée dans son lit, le soleil éclaircissait d’une très belle lumière la chambre. Celle qui l’avait secouée était sa camériste, Églantine, qui s’était inquiétée de l’entendre pleurer. Alors avant toute chose, Élisabeth vérifia si elle était toujours enceinte — quelle idée aussi ! — puis, s’essuyant les larmes qui avaient ravagé son visage, elle procéda à quelques respirations avant de demander où se trouvait Marianne : À son cours de couture, bien entendu. Puis, il y a aussi son cours de musique et de chant, où elle a réclamé votre présence pour vous montrer ses acquis.
Donc, Rogier va bien ?
Bien sûr que oui ! C’est un amour cet enfant. Toujours très souriant, comme la petite Marianne. Vous êtes sûre que vous allez bien ?
Mais, mais, mais Krän …
Sa Sérénité vous a laissé vous reposer. Il est parti vaquer à ses occupations, comme tous les jours… Vous êtes sûre que …
Rha mais oui. Je suis inquiète, c’est tout.
Bah ? Pourquoi ?
Un cauchemar. J’ai peur. J’ai un mauvais pressentiment.
La matrone a été rassurante, tout a l’air d’aller bien pour votre enfant. Et puis, vos deux autres enfants sont en plein forme, Dame Fortune est de leurs côtés. Vous n’avez aucune raison de vous inquié…
La mort rôde toujours Églantine.
Rho, madame. C’était juste un cauchemar. D’ailleurs, c’était quoi ?
De quoi ?
Votre cauchemar, évidemment.
Humpf. Rien, t’occupe. Est-ce que les appartements sont prêts ?
Sa Grandeur la comtesse pourrait venir à n’importe quel moment que ses futurs appartements sont prêts depuis que vous l’avez demandé, ma dame.
Bien. Aide-moi à me préparer.
Vous ne mangez pas ?
Plus tard… je veux voir mes enfants.
Je vais chercher vos vêtements de ce pas.

Pendant que la camériste partait chercher lesdits vêtements, Élisabeth se leva de son lit, avec à présent quelques difficultés vu son état de sainteté femme enceinte. Une fois sur pieds, elle marcha lentement vers la fenêtre de sa chambre et regarda par la fenêtre : c’était une très belle journée de printemps, les fleurs avaient, pour la plupart, joliment fleuri, les arbres affichaient de très belles couleurs ; la nature reprenait ses droits. Élisabeth faisait souvent des cauchemars, elle se réveillait et passait à autre chose ; mais cette fois-ci, le cauchemar fut violent. Elle ne voulait imaginer que ses progénitures s’entretueraient entre elles … du moins, que l’une d’elles envisage de passer à l’acte. Se secouant la tête pour essayer d’évacuer toutes les sombres idées qui voulaient envahir l’esprit de la Palsgravine, elle apporta les mains à son ventre, comme si elle souhaitait consoler l’enfant pas encore né — et peut-être se consoler elle-même —, elle continua de fixer l’extérieur : tôt ou tard, sa suzeraine viendrait comme c’était convenu. Mais quand ? Seul le Très-Haut et l’intéressée le savaient car la Comtesse de Champagnole maîtrisait l’art de la surprise et si son humeur était de jouer de l’effet de surprise qu’elle savait tant manier, il était donc impossible de connaître avec exactitude la date de son arrivée. Ce que la comtesse avait probablement oublié, était que l’ancienne Élisabeth, celle qu’elle avait connue durant leurs premières années d’amitié, rôdait toujours dans les parages et celle-ci était toujours prête à n’importe quelle situation qui pouvait faire surface.
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Heloise_marie
Léger bâillement qui fut brièvement masqué par sa main qui se ficha devant sa bouche. Héloise était fatiguée ! Elle n'avait plus bougé autant depuis, oulalala presque 5 ans, mis à part pour aller aux allégeances - la barbe- ! Les gens l'épuisaient ! Elle ne les supportait plus. Que ce soit les gens de tous les jours ou ses gens à elle. Elle avait d'abord du régler le sort de cette gourde de chambrière et se débarrasser des deux gardes boulets. Après un long moment à poireauter dans son lit se lever pour regarder l'horizon, se recoucher, se relever, chantonner et se bagarrer avec ses bras, elle se leva enfin.

Au petit déjeuner qu'elle avait pris dans son grand salon, elle avait dû gronder cette idiote qui lui avait servit son thé froid. Puis l'imbécile qui avait oublié d'allumer le feu dans l'âtre. De plus en plus elle faisait des manières de vieille bourgeoise nobliotte qu'elle n'était absolument pas en temps normal, mais il semblait que cette retraite l'avait aigrie et rendue maussade. Il était grand temps qu'elle reprenne un peu sa vie sociale. Il était temps qu'elle change de fréquentation, une autre personne à qui parler d'elle-même. Changer d'horizons, de paysages...

Après le petit déjeuner ce fut l'heure de la toilette. Choisir sa robe du jour, ses jupons, sa coiffe, bref, le parfait complet de la Comtesse. Rouge ou bleu? Blanc ou noir? Rose? non, quand même pas exagérer ! Après avoir revêtu sa plus belle robe -après tout elle avait voir le Krâneur aussi fallait être à son avantage pour qu'il constate ce qu'il avait loupé en choisissant sa vassale plutôt qu'elle- bleue aux couleurs d'Arbois et de Saulx, coiffé ses cheveux en un fastueux chignon perlé, la Comtesse ordonna qu'on prépare ses meubles et ses coffres pour l'escapade.

Avant de prendre la route, elle jeta un dernier coup d’œil à son reflet dans le miroir. Houuu belle gosse ! Petit clin d'oeil, tourniquet des talons et elle fila droit vers son carrosse ouvert qui n'attendait plus qu'elle. En attendant, un pigeon s'envolait haut dans le ciel.

Citation:
Elisabeth,

Je prends la route maintenant,
Si tout va bien, je serai là dans environs trois heures.

Bien à vous,
Héloise Marie dS


Trois heure, rien qu'en l'ayant écrit une fois elle était déjà d'avance blasée de devoir rester enfermée dans ce petit habitacle pendant une dizaine d'heures avec.. ce benêt d'Archimède et une de ses domestiques..Dont elle ne se souvenait même pas du nom ! Ça promettait. Trois heures séparaient Arbois de Dampierre.. A peine le carrosse fut-il parti qu'elle lâcha d'une voix sonore...

J'ai faim !
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Elisaabeth.
Le coursier avait tracé sans s’arrêter jusqu’à Dampierre, ceci expliquant pourquoi la réaction d’Élisabeth, suite à la lecture de ce billet, ne fut autre que celle-ci : « Oh, soit. Soyons large. Églantine ?… La comtesse de Champagnole arrivera ce soir ou demain matin. Voire peut-être plus tard, je ne sais pas. Préviens le personnel, qu’il se tienne prêt dès ce soir, au cas où. » Et c’est tout. Bah, oui. Élisabeth connaissait par cœur sa suzeraine et comme tout femme qui se respecte, dans « environs trois heures » se résultait à « demain, ou après-demain, si je n’ai pas massacré un ou deux abrutis en chemin. » C’était l’évidence même. Elle-même, lorsqu’elle voyageait, rencontrait très souvent des problèmes lors de ses voyages et quelques soucis de carrosse, voire même de petit personnel désobéissant était compris dans le lot, pas le choix.

Maman belette était fin prête, vêtue d’une robe bleue et noir, cousue d’or et d’argent — qui rappelait son fief Mesnay — qui mettait ses formes de femme enceinte en valeur. Elle se mettait en valeur — pas uniquement pour que son époux sache à quel point il était chanceux de l’avoir en tant que femme — pour montrer à sa suzeraine qu’attendre un enfant ne signifiait pas se laisser décrépir dans son lit en attendant la délivrance. Depuis qu’elle avait vécu sa toute première grossesse, elle savait qu’il était important de rester en forme, de bouger, de réfléchir. Bref, de vivre en soi. Et si elle était capable de pondre mettre au monde un garçon, cette grossesse lui apporterait un autre héritier mâle, ceci n’en faisait aucun doute. Mais l’heure n’était pas venue de chercher à connaître le sexe du futur enfant, ni même de savoir qui gagnerait le concours de la plus belle femme vivant en Franche-Comté, non …

L’heure était d’écouter Marianne chanter. Parfaitement ! Le soleil s’affichait clairement, le ciel était bleu, il s’agissait d’un parfait après-midi de printemps. Tout se passait bien. Oui, oui, tout allait très bien même. Le stress qui l’avait submergé plutôt fut balayé après un bon quart d’heure d’auto-persuasion que tout se passerait pour le meilleur du monde. N’oublions pas que l’ancienne Élisabeth traînait dans les parages, tel un fantôme hantant les vivants. Après avoir mangé, donné le sein à son fils chéri dont la nourrice était occupée ailleurs — la bonne excuse pour passer du temps avec ses enfants —, Élisabeth accepta d’aller écouter sa fille chanter. Il faut dire que cela faisait plusieurs mois que la madone blonde tentait vainement que sa fille soit présentable, acceptable aux yeux de cette société sans pitié, étant donné son statut, ce statut qu’une mère à deux doigts du mariage avec le père crevant de trouille ne souhaiterait pour aucun de ses enfants. Confortablement installée dans un fauteuil en noyer grâce aux coussins rajoutés, Élisabeth écouta sa fille, non sans prier pour que le massacre cesse les cours ne soient pas une perte de temps. Malheureusement, c’était la constatation du jour …

L’aaaAAAaamoooUUUuuur est’un ouuUUaasôôÔôÔÔ reeeuubééééélle ; que nuuUUUuul ne peut’aaAAaaaappriiiIIiiiivouuUUaAAAséééÉÉÉééé …

Marianne chantait terriblement mal. Pauvre enfant, elle avait de qui tenir. Voilà pourquoi on n’entendait jamais Élisabeth depuis tout ce temps : pour la simple et bonne raison que cette dernière n’avait pas acquis le don d’Apollon mais bien celui d’Assurancetourix. Et voilà que Marianne avait hérité de ce maudit don. Fichtre. Devant la mine déconfite du professeur qui voyait tous ses efforts anéantis en quelques instants, et la mine pareillement déconfite d’une mère constatant le mauvais talent de son enfant, elle fit signe à son aînée pour qu’elle cesse de vriller les tympans chanter, sourire rassurant. Elle profita de ce cours silence pour suggérer à sa fille de lui jouer de la harpe, ce qui fit un plaisir fou à la jeune fille qui se précipita auprès de la harpe et entonna quelques notes. Si cette enfant n’était pas douée pour le chant, autant l’entretenir dans quelque chose qui saura pallier au chant. Après avoir réalisé une belle petite prouesse musicale, fièrement félicitée par sa mère, la gamine se mit en tête de lui faire plaisir de nouveau, en lui chantant cette fois-ci quelque chose que son professeur de chant lui avait appris quelques semaines plus tôt, au grand désespoir d’Élisabeth, de nouveau …

Siiiiiiiiiingue miiiiiiiiiii eu soooooooongue of eu laaaass thate is gôôôôône, séééééy cou’d thate lass biiii aïe… *

Élisabeth ferma les yeux quelques instants, priant pour que quelqu'un interrompe le massacre musical de sa fille chérie, mais rien de tout ceci. Elle adressa son plus beau sourire à son enfant qui continuait de chanter et se leva de son fauteuil pour observer le paysage : est-ce terrible pour une mère de souhaiter une extinction de voix à son enfant juste le temps de la faire cesser de chanter pour lui faire passer le message ?




* Massacre bien volontaire, mais ça reste reconnaissable quand même. *cœur-cœur-cœur*

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Heloise_marie
- Sur la route direction Dampierre dans l'salon-

..ensuite, Votre Grandeur, il faudrait que nous discutions de ces tapisseries dans le couloir Est à Arbois, je les trouve de mauvais goût, je pense, en toute franchise, qu'elles datent encore de la période de feu votre oncle, comment se nommait-il encore, Cartache le Riddermark aussi un grand ancêtre mais qui semblait avoir des goûts différents des vôtres, tandis que votre chambre a été tout de même bien refaite, il semble que la couleur de vos rideaux irait parfaitement bien dans le hall d'entrée également et le maître bâtisseur m'a fait part des mâchicoulis à Salins qui seraient à refaire, il expliquait aussi que si vous vouliez agrandir le donjon et excentrer la tour de flanquement afin que les gardes puissent plus facilement faire le tour des remparts, la barbacane d'Arbois tombe en miette et...machouillement négligé de la pâte de fruit insipide, Héloise pousse un soupir. ... je pense en toute honnêteté que les douves c'est dépassé, à présent on parle d'autres technique de défenses, bien qu'il semble que vous n'en ayez besoin, j'ai aussi ramené la liste des prisonniers... nouveau soupir, enfin une pause dans ce bâvassement sans aucune reprise de respiration. Tandis que l'outrageux bavard cherchait dans sa besace le dit parchemin, la jeune femme, épuisée d'entendre le son rauque et désagréable de sa voix, frappa deux fois sur l'avant du carrosse pour signaler un arrêt.

Mais, vot'Grandeur? Nous ne sommes pas arrivés.
Ignorance superbement exécutée. Héloise défit le petit rideau qui masquait l'extérieur et attendit que le cocher lui ouvre la petite portière. Choque faite, elle s'appuya sur le bras ganté du dit cocher et sauta en dehors du carrosse brinquebalant, peinant un peu, après ces heures de tohu-bohu à reprendre son équilibre. Qu'en ai-je donc à fiche de ces trucs de donjon de douves de macher couler, elle avait même pas faim en plus pourquoi lui parlait-il de mâcher? A force, elle en venait même à se dire qu'elle aurait été mieux de rester en son couvent bien au calme à casser les pieds à la sœur Marie Thérèse.

Votre grandeur?
- Il ose, le malotru ! Etant à deux doigts de lui balancer son maigre poing dans sa face abîmée par l'une ou l'autre maladie de la peau, elle tourna les talons et lui flanqua un sourire bien forcé.
J'ai un besoin urgent ET irrépressible ! Puis-je? Ou dois-je m'accoquiner d'un garde qui me tienne les jupons tandis que je me soulage sur ses chausses?
Le laquait rougit jusqu'à ses tempes tel un enfant pris en faute mais néanmoins innocent puis balbutia une futile réponse qui la fit sourire de plus belle. Une fois le bec cloué à cet importun, elle tourna les talons et s'enfonça dans les bosquets, non sans lâcher un petit rire entendu. Ses pieds foulaient l'herbe haute et chatouillaient ses mollets. Sans se retourner elle marcha, marcha, piochant ci et là une haute herbe pour la mâchouiller négligemment !

Elle connaissait la région. Et ces quelques orées de bois et chemins sinueux parlaient à de lointains souvenirs. D'ailleurs... les hautes tours du château qu'elle apercevait au loin lui parlait également ! Aurait-elle trouver.... Dampierre?

- Dampierre, quelques heures plus tard-

Des sabots, des roues. Des cris retentirent dans la cour du château.
Ola ! Ola ! Ola MESSIRE ! DAME ELISABETH ! ON A PERDU LA COMTESSE.


Edit fautes
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Elisaabeth.
        [ Pendant ce temps, dans le salon de Dampierre. ]


Mais alleeezzz. Laisse-toi faaaiiiire-euh.
Miaulement.
Mains sur les hanches, la camériste essaya d’avoir un air assez contrarié même si la situation sous son nez était relativement cocasse : Marianne, enfin, qu’est-ce que tu fais ?!
J’avais envie d’embêter maman. Elle s’est endormiiiiiie, ahahah.
L’enfant riait. Comprenez-la, c'est tellement drôle. Quelle situation, vous vous demandez ? Eh bien, il s’agit d’une femme enceinte, tellement grosse que l’on peut avoir l’impression qu’elle est à deux doigts d’exploser, qui s’est lamentablement endormie dans le fauteuil en noyer, toujours installée avec des coussins pour rendre l’assise confortable, le coude était posé sur le bras du fauteuil, la paume de main accueillant le menton de la maman belette tandis que l’autre main se trouvait poser sur le ventre largement arrondi. Quelques ronflements sortaient de sa gorge, elle qui prétendait ne point ronfler, c’était râpé. Et là, vous vous demandez ce que pouvait bien faire la gamine avec un chat ? Remettons les choses dans l’ordre : Marianne avait trouvé un petit chaton qui traînait dans les pattes de la cuisinière. Ravie de sa petite trouvaille vivante, elle voulait montrer le petit chaton à sa maman, lui suppliant de la laisser « adopter » cette petite boule de poils « trop miiiignonne ». Marianne avait largement fini son cours de musique, le professeur était même parti faire … très bonne question ! Peu importe. Il était parti, laissant une maman belette seule dans la pièce, tranquille. Ce que Marianne n’avait pas prévu, loin d’imaginer de se retrouver face à une telle scène un jour, c’était de retrouver sa mère endormie, affalée dans le fauteuil, ronflant à moitié. Alors, puisqu’il était nécessaire d’obtenir le consentement de sa mère pour garder le chat, il fallait la réveiller. Sauf que la réveiller en la secouant donnerait une réponse directement négative. Lui poser le chat sur le ventre ne l’aiderait pas davantage, puisque le chat risquerait de faire ses griffes sur le ventre de sa mère, et l’idée de trouer le ventre de sa mère à cause du chat terrifiait la gamine. Que ne va-t-on pas chercher lorsque l’on est enfant, n’est-ce pas ? Trouer le ventre avec les griffes d’un chat. Ahah.

Alors, peut-être qu’en agitant la queue du chat sous le nez de sa mère, comme une plume, ceci la chatouillerait et lui permettrait de la réveiller en douceur. Sauf que le petit chaton n’était pas très coopératif. Il miaulait tout ce qu’il savait, ne voulait probablement pas laisser se faire tripoter de la sorte. La camériste, qui était arrivée en cherchant Élisabeth, finit par oublier « l’objet » de sa visite et rit devant cette scène. Elle conseilla Marianne de prendre une plume plutôt que d’embêter le chat, mais l’enfant, aussi têtue de la mère, voulait impérativement réveiller sa mère avec le chaton sous le nez. Pendant que la camériste et la gamine discutaient de la meilleure manière de réveiller en douceur maman Belette, cette dernière se réveilla et comprit que c’était leur bavardage qui l’avait extirpé des bras de Morphée. À moitié réveillée, et à moitié endormie, Élisabeth avait l’impression d’avoir la bouche pâteuse, l’esprit encore bien confus, elle s’extirpa du fauteuil avec un peu de difficulté et une fois debout, s’étira à en faire craquer son dos. Lorsqu’elle eut fini de frotter délicatement ses yeux et son visage, Élisabeth regarda sa fille et le gland tour à tour, cherchant à savoir laquelle des deux avait pu faire une ânerie la première, jusqu’à ce qu’elle voit ce pauvre chaton dans les mains de sa fille. Son regard se posa sur sa fille, devinant la future demande. Elle anticipa sa réponse : C’est non, Marianne.
De ?
Pour le chat. C’est non.
Mais pourquoi maman ??
Pense à ton petit frère. Et à ce petit chat. Pas de cohabitation possible. Puis avec l’autre qui doit arriver sous peu…
S’il-te-plaît maman !
Non.
Petit moment de silence. Le regard élisabéthain se posa cette fois-ci sur le regard niais de la camériste qui avait un sourire … tout aussi niais.
Qu’est-ce que tu fiches ici, toi ? T’avais pas une robe à recoudre pour Marianne ?
C'est-à-dire qu’on m’a demandé de venir ici pour …
Pour quoi ?
Pour vous dire quelque chose …
Qu’est-ce que t’attends pour me le dire ?
Et bien …
Mais qu’est-ce que t’as fichu ? T’en as pas marre de bavasser depuis l’temps que t’es partie, t’as encore rien dit à sa Sérénité ?
Hubert, fidèle d’Élisabeth depuis bien des années, arriva en trombe dans la pièce, comme s’il se trouvait chez lui. Tranquille penard. Il y avait un sacré relâchement chez le petit personnel qu’il allait falloir remettre à leur place.
Bonjour Hubert. Tu n’es pas chez toi ici, tu es donc prié de te comporter convenablement. Qu'est-ce qu'il y a ?
La garde est formelle : le carrosse avec les armoiries de la gnolaise arrive droit vers nous !
Oh ? Tu me charries ?!
Non non, j’vous jure !
Chiure … et dire que je m’apprêtais à passer une nuit de plus avant de la recevoir … Fichtre. Ce grippeminaud arrive trop tôt. Et bien, allons accueillir sa grandeur !

Pendant que sa blondeur suivait du plus rapide pas qu’elle pouvait émettre, Marianne et Églantine partirent de leur côté faire les essayages de la dite robe en « réparation ». Lorsqu’Élisabeth arriva pour accueillir sa suzeraine, ce n’est pas la blondissime Sparte qui sortit du carrosse mais ce … méconnaissable Archimède qui avait pris cher, crotte de biquette ! Pas de bonjour, rien. Il se contenta juste de dire que sa grandeur a disparu … bah tant mieux. Quoi ? Pardon ?
Comment ça, « disparue » ?
Mais oui ! MAIS OUI ! DISPARUE ! Ohlalalalaaaaa ! Il faut … IL FAUT APPELER LA MARÉCHAUSSÉE ! LES ARMÉES ! LES POMPIERS !!
Froncement des sourcils élisabéthains : C’est quoi ça, les pompiers ?
Je sais pas … MAIS IL FAUT LA RETROUVER ET VITE !!
Mais COMMENT t’as bien pu faire pour la perdre ?!
Elle, euh …
RÉPONDS !!!
Elle avait un gros besoin de … se soulager.
J’ai pas entendu.
Se soulager.
Toujours pas…
Elle avait envie de faire caca. Voilà.
Silence : très gros blanc.
Il faut faire quelque chose et vite !! Si ça se trouve, elle a été enlevée contre une rançon ! MORDUE PAR UN CHINCHILLA FÉROCE !!
Hubert, l’heure est grave. Prends une petite douzaine de soldats et va chercher sa grandeur. Elle doit s’être perdue en train de ch… Enfin bref, cherchez-la !
MAIS BOUGEZ-VOUS VOUS AUSSI !! Vous êtes la vassale ! C’est à vous d’vous y coller !!!
C’était la goutte d’eau qui faisait déborder le vase. Le regard habituellement vert d’Élisabeth changea de couleur : Héloïse allait avoir besoin de se chercher un nouveau sous-fifre. Elle attrapa ce satané Archimède par le col et lui aboya dessus : T’as pas vu que j’étais pas en état ?! Espèce de sottard ! Dépêche-toi Hubert, le jour commence à céder sa place. Quant à toi, on va causer. Misérable chiabrena que tu es. Même pas foutu d’apporter ta maîtresse jusqu’ici sans égarement ! Espèce de fot-en-cul.
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Heloise_marie
Le printemps était de loin sa saison préférée. Les jours tiraient sur la longueur et la senteur des herbes naissantes et des arbres s'ouvrant au monde lui procurait un sentiment de bonheur absolu. En plus, c'était son anniversaire le lendemain : que demander de plus!? Sans nul doute sa vassale adorée lui aura prévu une mémorable fête avec tous ses amis...Ah beh non, y a pas d'amis en fait, juste la solitude, cette vieille amie fadasse qui lui collait au corps comme pouvait coller une vieille merdasse dans les ruelles de Vesoul. Marchant tout à son aise en direction du domaine de Dampierre qui grossissait à vue d'oeil tandis qu'elle s'en approchait, Héloise Marie arriva au village du domaine. Elle avait dans les mains quelques simples cueillis ci-et là, afin de ne point arriver les mains vides chez son amie, dévisagée par les gens qui revenaient des champs. Sans nul doute les paysans du bon vieux Kraneur !

Aaaah Kran ! Un sourire futile passa sur ses lèvres alors qu'elle pensait à cet homme fort, musclé, suintant le musc et le coolesque tandis qu'elle passait dans la ruelle principale, sous les olas curieux des paysans dégueulasses du coin. Elle n'y accorda aucun regard. Vêtue il était vrai de sa plus belle robe, la jeune femme imaginait déjà son arrivée gargantuesque dans le Castel : ses cheveux lâchés brillants de blondeurs volants dans le vent du printemps avec ci et là l'une ou l'autre pâquerette trouvée à même le sol dans son escapade. Le bon Kran venant à sa rencontre, le sourire aux lèvres en lui disant, ah Héloise si j'avais su que vous étiez si belle j'aurai déjà tué votre vassale pour vous épousailler quel malheur que je doive me coltiner cette mégère à présent, venez, fuyons tous deux au fin fond des pays nordiques afin de vivre notre amour au grand jour...

- Gloire au Comte et à la Comtesse De Dampierre. Cria alors un malotru dans une des chaumières, ramenant la Comtesse à la réalité ! Peste soit de ce kraneur de mes deux qui parvenait toutefois à la mettre dans tous ses états d'un regard lubrique!! Levant enfin le voile des songes sur ses yeux, elle se rendit compte qu'elle était arrivée non loin des murailles derrière lesquelles régnait une certaine agitation. Dampierre la laide. Finalement, valait mieux rester célibataire on the life entière plutôt que de finir derrière ce château de mes deux qui suintait la traîtrise et la vieille aigrie ! C'est sur un hochement de tête convaincu et l'idée du meilleur choix de sa vie en laissant "les restes" à sa vassale, que lui vint l'idée du siècle ! Ce château était vraiment mal fichu : elle avait bel et bien retenu le monologue de cet abrutit d'Archimède sur les douves, les tourelles et tous ces trucs de proprio. D'un regard averti elle fit le tour du propriétaire : douves quasi vides. Donjon et remparts sans gardes. Murs qui semblent s'effriter ! Tous les ingrédients étaient réunis pour mener à bien un petit siège quelconque.

Satisfaite de son observation, elle remit à plus tard ses projets de conquête. Nul intérêt personnel; elle possédait déjà le quart de la Franche-Comté avec ses possessions, pas besoin d'en rajouter. Juste les emmerder un peu. Il lui faudrait mettre ça sur papier avec son dévolu Archimède. Ses pieds foulaient doucement le sol qui devint terre lorsqu'elle parvint sur la route. Elle s'écarta brièvement alors qu'une troupe de soldats sortirent en trompe de l'entrée principale, les regarda un moment passer, curieuse de savoir quelle quête menait l'kraneur ou sa vassale, puis repris sa route vers l'entrée.

La cour principale était vide. Étonnant. Sa voiture cependant était là, rideaux voletants au grès du vent délicat qui terminait sa vie. Passant sa main sur l'encolure d'un des chevaux, elle constata également qu'ils étaient encore chauds. Pourquoi personne ne s'en était occupés.

Bravo, quel service ! Quel accueil ! YOUHOU?
Comtesse? Oh Ohlalalala Comtesse mais c'est bien vous !
Que me veux-tu vilaine?
Héloise avisa la domestique qui vint à sa rencontre, un poulet décapité et à moitié plumé dans les mains.
Où sont mes gens? Pourquoi mes chevaux ne sont point défaits et coiffés? Ils ont besoin d'être nourris ! Le Comte serait-il radin vis-à-vis de ses invités que rien ne soit fait dans les règles? Oh et puis ... balayement de l'air avec ses gracieuses mains en envoyant quelques feuilles des simples sur la vilaine. Disparaissez de ma vue l'affreuse et allez donc me chercher ma vassale !

Mettant un point d'honneur à être accueillie dans les formes et sans devoir suivre une imbécile jusqu'à sa vassale, Héloise avisa le puits de la cour et s'y appuya, prenant grand soin de ne pas abîmer sa tenue et, par contre, d'être tout à son avantage.
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Elisaabeth.
Sottard. Fot-en-cul. J’en reviens pas que tu aies réussi à perdre sa Grandeur, disait Élisabeth tout en tirant inlassablement sur l’oreille de ce crétin qu’était Archimède. Imbécile, voilà ce qu’il était, un véritable crétin sodomite sur pattes. Alors qu’ils se trouvaient tous deux dans une pièce à l’intérieur du château, Élisabeth continuait de sermonner le « fidèle » serviteur d’Héloïse, sous les yeux témoins d’un garde qui était prêt à exécuter le dernier ordre lancé par la Sérénissime blondeur. Lasse de tirer l’oreille de l’ingrat personnage, Élisabeth le poussa aux pieds du garde qui l’attrapa par le bras. Archimède avait l’oreille rouge, et les doigts élisabéthains commençaient à s’engourdir tant elle avait serré fort. Se rapprochant du valet, le doigt menaçant pointé sous son nez, la Palsgravine reprit, de très mauvaise humeur : Je fais comment si on me réclame une rançon, hum ? Pire encore ! Je fais comment si on la retrouve morte, dépecée de toute part, humm ? Tu m’expliques comment je fais ? Comment je dois gérer ce petit incident qui devient NOTRE problème ?

Pendant qu’Élisabeth était en train d’engueuler Archimède, la domestique qui avait aperçu la comtesse de Champagnole dans la cour, poulet décapité toujours en main, s’incrusta dans la pièce, essayant de se faire la plus « petite » possible — ce qui avait lamentablement échoué : le garde commença une série d’éternuements, ce qui finit par exacerbée la Courden. Le doigt menaçant se tourna cette fois-ci vers la fameuse vilaine, fortement mécontente : Qu’est-ce que tu me veux saleté ? Tu ne vois pas que je suis en train de parlementer ?!
Rien … enfin si. Mais je crois qu’j’vous déran…
Non ? Sans rire.
P’têt’ qu’j’dois repasser plus tard …
Barre-toi. Hors de ma vue.
… mais j’fais quoi moi avec …
M’en fous. Casse-toi.
… avec la Comtesse ? Parce qu’elle est …
Tu la fous dans le feu avec le poulet.
… juste là. Au puits.
Petit instant de réflexion avant d'enregistrer mentalement ce que la domestique venait de dire : T'as dit quoi ??
J’vous jure ! Elle est au puits dans la cour !

N’y comprenant plus rien, Élisabeth fit signe de garder auprès de lui l’écervelé qui servait Héloïse, malgré ses crises d’éternuement, puis se dirigea à l’extérieur du château pour effectivement trouver une Héloïse parfaitement en vie, pour ne pas dire en forme olympique. Elle l’observa se dandiner devant le puits se trouvant dans la cour du château. Par quel miracle avait-elle réussi à revenir jusqu’ici ? Il est vrai que cette dernière connaissait probablement la Franche-Comté comme sa poche, étant donné qu’elle y était née. Ce qui n’était pas le cas d’Élisabeth, même si cela faisait de nombreuses années qu’elle connaissait cette contrée. En quelques instants, en voyant la jeune femme, dos à elle, une multitude de souvenirs communs lui revinrent en mémoire : le jour — ou plutôt devrait-on dire la nuit — où elle s’était rencontrée avant de se salir les mains pour épargner la vie de la jeune comtesse, leurs confessions, leurs secrets, leurs promenades, les missions « secrètes » comme de l’espionnage, avant que le temps ne commence à les séparer petit à petit. Héloïse avait rencontré un chevalier, Élisabeth devait se marier. Édouard mourut, Héloïse, fraîchement fiancée, se retrouva de nouveau seule, avec des secrets qui impliquaient sa vassale. En quelques instants, tous ces brefs souvenirs lui rappelèrent à quel point elles avaient été si proches, mais surtout à quel point elles s'étaient longuement quittées, laissant entre parenthèse leur amitié de si longue date. Revenue à la réalité par l’odeur que finissait par dégager ce pauvre poulet à moitié déplumé, Élisabeth congédia la domestique et se rapprocha de son amie tout en l’interpellant.

Élisabeth était presque à terme de sa grossesse, elle peinait à marcher rapidement, et surtout à tenir debout longuement. Lorsqu’elle fut proche d’Héloïse, instinctivement, la réaction qu’elle eut fut d’attraper les mains de son amie qui s’était retournée, oubliant le temps de se saluer les échanges épistolaires qu’il y avait eu entre elles, pressa ses mains dans les siennes, et lui adressa un grand sourire. Le temps de quelques secondes, elle s’accorda le droit de l’observer de la tête aux pieds, trouvant son amie … changée ? Peu importe, ceci reviendrait probablement plus tard sur le tapis. Toujours souriante, elle prit enfin la parole : Vous êtes ravissante. Elle marqua un temps de pause, puis renchérit : Il va me falloir conter ce qui vous est passé par la tête pour quitter votre carrosse aussi soudainement. Son sourire diminua un peu : J’ai bien failli étriper Archimède pour ceci. Elle marqua un nouveau temps de pause qui fut bref pour conclure cette petite retrouvaille par un : Vous m’avez manqué. Elle le reconnaissait, elle ne pouvait le nier, c’était un fait indiscutable.

Lui attrapant le bras, la Courden amena la comtesse de Champagnole avec elle à l’intérieur du château. Avant de lancer un ordre pour que le carrosse de la Sparte soit rangé et que l’on s’occupe de ses chevaux, elle s’excusa rapidement auprès de la jeune femme : Vous nous pardonnerez pour votre voiture. Tout a été laissé tel quel car ce fot… Archimède a rameuté tout le castel en hurlant que vous aviez disparue. Nous avions donc lancé des gens à votre recherche. Si seulement ils avaient su. Elle ne lui laissa guère le temps de rajouter quoi que ce soit car elle renchérit de nouveau en lui disant : Vos affaires vont être montées dans les appartements que nous avons préparé rien que pour vous. Vous pourrez ainsi voir d’un autre œil le paysage franc-comtois. Elle sourit puis elle l’amena lentement dans un salon du château. Elle s’excusa de ne pouvoir marcher plus vite mais se sachant arrivée à la fin du terme de sa grossesse, elle craignait d’accoucher à tout instant. Lorsque les jeunes femmes arrivèrent dans l’un des salons du château, Élisabeth lâcha le bras d’Héloïse et l’invita à s’installer à ses côtés, dans un autre fauteuil chargé de coussins. Lorsque la future mère fut installée, elle demanda si son époux pouvait se libérer de son activité pour venir saluer leur invitée.

Une domestique entra dans la pièce avec un plateau portant une carafe de vin et trois verres à vin. Elle laissa la domestique servir les deux jeunes femmes, ravie du timing de ses domestiques, puis une fois le verre en main, elle leva son verre en direction de sa suzeraine et ne but qu’une petite gorgée du vin italien. Tenant son verre entre les mains, Élisabeth leva son regard sur sa suzeraine et lui sourit : C’est un plaisir de vous recevoir. Restez le temps que vous le souhaiterez, vous vous savez la bienvenue chez nous. Elle marqua une pause volontairement, observant la réaction d’Héloïse, soupira longuement avant de reprendre, non sans une pointe d’ironie, ou de plaisanterie : Je pourrais croire que vous vous êtes apprêtée pour mon époux, vu la beauté que vous dégagez. Si seulement elle lisait dans ses pensées, elle n’hésiterait pas à l’étriper et faire cuire ses boyaux dans un pot-au-feu improvisé. Elle reprit la parole, beaucoup moins enjouée qu’elle ne pouvait l’être : Il y a tant de choses à se raconter. Commençons par le commencement : qu’avez-vous bien pu faire pendant tout ce temps ?

Oui, tu sais, ce temps où nous étions « tellement débordées » l’une et l’autre qu’on s’est très clairement oublié. Allez père castor, raconte-nous une histoire !
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Heloise_marie

Offrande du visage parfaitement parfait au soleil.

Héloise ferme un instant les yeux, profitant, elle le savait certainement, des quelques dernières secondes de répit avant de devoir assumer le capharnaüm de la vie de Castel. Et ce fut bref ! Moins de dix secondes avant de voir une furie ENORMISSIME blonde sortir de l'entrée. La vache ! -et c'était vraiment bien le terme adéquat - Elisabeth avait changé ! Beaucoup trop. Où était la donzelle timbrée et violente qui avait, pour elle, risqué sa vie mainte fois? Elle avait là une femme accomplie, énorme certes, mais accomplie et épanouie. La Comtesse cligna deux trois fois des yeux en la jugeant d'un regard expert. Elle restait tout de même, dans le fond, cette petite péronnelle croisée dans une ruelle sombre alors qu'Héloise allait crever comme un rat.

-Vous êtes ravissante, lui dit-elle ! Evidemment, aurait-elle voulu répondre. Mais point de temps. Le volcan blond face à elle semblait n'avoir aucune envie d'entendre la voix mélodieuse de la Sparte. Un sourire fugace traversa son visage alors qu'elle proposa d’étriper Archimède. Puis un autre, différent cette fois lorsqu'elle lui dit qu'elle lui avait manqué. Héloise resta bloquée sur cette idée tout le temps du monologue Courden et suivit celle-ci à l'intérieur du château. Il était certain qu'Héloise était bien plus peinée pour marcher que sa vassale. Malgré qu'elle ne fut point pleine, le poids du bras, oui oui rien que du bras d'Elisabeth posé sur le sien semblait peser plus qu'un quintal.

Un soupir de soulagement s'échappa de ses lèvres mutines alors qu'elle fut libérée de la poigne d'Elisabeth. Ni une ni deux, afin de masquer la gouttelette de sueur qui semblait rouler le long de sa colonne vertébrale sous sa robe majestueuse, elle s'assit dans un des fauteuils et analysa la pièce tandis que sa vassale lui proposa de rester autant de temps qu'il lui faudrait. Un silence suivit cette phrase, sans doute qu'Elisabeth attendait une réponse, mais Héloise resta silencieuse. Si elle était venue c'était uniquement pour accomplir son devoir d'amie et pouvoir aussi baptiser cet enfant selon ses propres choix. Ah et apparemment, Elisabeth avait deviné que c'était également pour voir son époux ! La vache, elle était même devenue perspicace avec le temps. Un peu perplexe par cette observation qui, il en était certain, perturberait ses plans, Héloise marqua un temps d'arrêt pour analyser le visage d'Elisabeth face à elle.

Qu'avait-elle fait pendant tout ce temps ! The question. P'tain même elle ne savait pas ce qu'elle avait clairement fait ! Ses souvenirs n'étaient remplis que de flash incertains et farfelus. Trempant ses lèvres dans le liquide servit, un vin dégueulasse qui ne venait certainement pas de chez elle, Héloise se racla ensuite la gorge. Enfin, elle m'en laisse placer une !

Tu m'as manquée aussi. Aurait-elle pu commencer par balancer, d'une manière totalement neutre. Mais elle préfère se tourner vers un laquais de la pièce en lui tendant son verre. Veuillez nous débarrasser de cette merdasse et sortir de mon convoi le tonneau qui s'y trouve afin de nous en servir une carafe. Il est hors de question de boire de la piquette en un jour pareil. Puis de se tourner vers Elisabeth un sourire aux lèvres tandis que le laquais, mi-figue mi-raisin, semblait hésiter à s'activer sans un ordre de sa maîtresse, j'ai fait du vin, voilà ce que j'ai fait. Et c'était la réalité ! Elle s'était lancée dans la vigne alors qu'elle avait commencé ses plants des années auparavant ! A présent que ses récoltes étaient florissantes, le vin d'Arbois prenait de plus en plus forme et vie.
Tu vois, Elisa, j'ai fait du vin ! J'ai bien mis mon temps à profit ! Pas de maris, pas d'enfants. Juste des tonneaux pour le plus grand plaisir de mon oncle. Purée cette phrase faisait pitié à mort. La pauv'fille et ses vignes, qui enivre son oncle. Quelle vie mes aïeux ! Du coup je voudrai, s'il te plait ne t'offusque pas, c'est une proposition très intéressante... Il fallait qu'elle parle vite avant que l'Ours mal léché bourré de muscles saillants et excitant n'arrive et ne la tabasse certainement. Je voudrai pourvoir à l'éducation de ce fils à naître et l'emmener à Arbois avec moi afin de parfaire son éducation une fois en âge de parler. Hop, c'était dit ! Tel un sparadrap qu'on enlève d'un coup sec alors qu'il est collé à la croûte de la blessure. Evidemment, l'offre ne tient que s'il s'agit d'un garçon. Elle n'avait absolument aucune utilité d'une pisseuse pour transmettre son héritage. D'ailleurs, elle allait lui expliquer le pourquoi du comment elle souhaitait formuler pareille demande, mais voilà...

Il y eut la suite..
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Elisaabeth.
À peine était-elle arrivée et voilà que cette peste qu’était Héloïse se montrait déjà insultante. Du vin italien. Venu tout droit de la Lombardie. Et dire qu’elle avait hésité entre sortir le vin sarde ou celui sicilien. La contrariété naissait dans le creux de l’estomac d’Élisabeth. La Palsgravine vint à regretter de l’avoir laissé parler et ne pas avoir attendu que son époux se pointe plus vite qu’un escargot pour que cette dernière parle. Il allait y avoir une baston, c’était sûr. Si le séjour se présentait de la sorte, il deviendrait alors difficilement supportable d’avoir la Sparte dans les parages. Quel amer regret que d’avoir accepté qu’elle vienne. Pourquoi ne pas avoir attendu la naissance de l’enfant ? Elle aurait pu profiter des derniers instants de sa grossesse en étant sereine, heureuse, comblée même ! Mais non, non, il a fallu avoir l’idée d’accepter le fait que la suzeraine débarque, que cette dernière fasse des comédies, fasse caca dans la nature sur le trajet alors qu’elle devait arriver sans encombre, et qu’elle gâche l’instant rêvé d’une future mère : le calme et la paix. Soit, c’était un détail qui pourrait se régler un peu plus tard.

Elle but une autre gorgée du vin lombard, Élisabeth attendait effectivement que la jeune femme en face d’elle réagisse mais il n’en était rien. Elle se contenta de l’observer : ses manières, sa posture, l’expression faciale qui ne tarderait pas à lui en dire davantage sur ce qu’elle devait attendre de l’alcoolique comtesse. Pourquoi dire « l’alcoolique » ? Oh, pour la simple raison que non seulement l’un de ses fiefs portait le nom de « gnole », mais qu’en plus, elle avait fait du vin … Ah oui ? Rien que ça, du vin. Un vin qui allait remplacer le délicieux vin italien. Un soupir plus tard, Élisabeth en vint à la conclusion qu’en quelques années, elle ne s’était pas foulée. Du vin. Tout le monde était capable d’en faire, du vin. Si Élisabeth avait pu lire dans les pensées de celle qu’elle considérait malgré tout comme son amie, elle lui aurait balancé le verre de vin qu’elle avait entre les mains. Fort heureusement pour la belle toilette qu’elle avait, il n’en était rien. Elle avait attendu ardemment que cette dernière ouvrit le bec pour parler — pour dire autre chose que des insultes à ses choix et goûts — et c’est ce qu’elle fit. Quoi qu’elle aurait largement préféré qu’elle ne dise rien, en fin de compte. Pourquoi ? Pour la simple et bonne raison que la suite de « c’est une proposition très intéressante » n’allait pas du tout lui plaire, elle s’en doutait. Elle préparait encore un sale coup. Pourquoi ne l’avait-elle pas deviné plus tôt ? POURQUOI avoir accepté sa visite pour qu’elle vienne tout gâcher ? La suite arriva, et elle ne plut pas du tout à maman Belette.

Les yeux écarquillés, la main se serrant de plus en plus fermement autour du verre, elle sentit son cœur s’affoler, un rythme cardiaque qu’elle connaissait que trop bien lorsqu’une contrariété apparaissait, un imprévu qui la chiffonnait, ou encore lorsque la colère allait pointer le bout du nez. Elle mit tant de force en serrant ce malheureux verre qu’elle finit par le faire fissurer avant de le briser en morceaux. Des éclats pénétrèrent dans sa peau, du sang sortit de la plaie. Malgré la douleur qu’elle s’était infligée seule, elle ne pipa mot, scotchée par les vagues émotions négatives qui commençaient à prendre le dessus. Elle lâcha le reste du verre qui rebondit sur le sol. Reprenant le plus calmement possible, elle retira les morceaux qui s’étaient incrustés dans sa main, ne parvenant pas à retirer les infimes morceaux. Au fond d’elle, elle savait qu’elle devait se calmer, maintenant même, mais il semblerait que la suzeraine voulait lancer l’offensive contre sa vassale dès cet instant. Misère…

M’offusquer ? Moi ?

Un domestique était revenu avec une carafe réclamée par Héloïse. Le bougre avait accédé à sa demande, au grand dépit d’Élisabeth. À la vue de la blessure de la Palsgravine, celui-ci se stoppa net, carafe en main, hésitant entre faire comme si rien n’était ou prendre la poudre d’escampette et aller chercher la camériste qui s’occupait de la jeune femme. Décidant finalement de déposer la carafe et de s’éclipser, il sortit, restant derrière la porte à attendre le prochain ordre donné. Pendant ce temps, sa blondeur se tint la bouche avec sa main valide, retenant un rire pour ne pas dire un gloussement. Puis, n’y tenant plus, elle rit fort, très nerveusement et ceci s’en ressentit dans les petits tremblements qui agitaient ses mains. Elle finissait par croire qu’elle n'était pas là pour son bien. Non. Du tout. En fait, c'était probablement pire… peut-être qu’Héloïse souhaitait voir sa vassale mourir, là, sous ses yeux, avec ce petit rictus suffisant qui étirait ses lèvres lorsqu’elle avait réussi quelque chose qui la satisfaisait à un point. Secouant la tête, Élisabeth leva un regard glacial vers la Sparte, prenant un ton qui se voulait menaçant : Écoute-moi bien, Héloïse. Elle mesurait difficilement ses mots, tant elle parvenait avec beaucoup de difficulté à contrôler une certaine colère qui la submergeait petit à petit. Si tu voulais tant pourvoir à l’éducation d’un enfant, surtout « d’un fils » comme tu le dis si bien, encore aurait-il fallu que tu sois capable — elle insista lourdement sur ce mot — de garder un fiancé à tes côtés pour te marier. Elle se leva de son fauteuil, la douleur de ses jambes gonflées fut largement oubliée, probablement à cause de l’adrénaline. Elle poursuivit : Si la maternité te fait vraiment défaut, tu n’avais qu’à garder cette bâtarde que tu as engendré — de nouveau, elle insista lourdement sur celui-ci — il y a quelques années avec ce chevalier. Encore quelque chose dont tu auras le toupet de nier, n’est-ce pas. Des contractions se firent ressentir. Il n’était pas rare qu’elle en eut ces derniers temps, expliquant ainsi pourquoi elle n’y prêta pas plus attention à ce moment-là. Elle continua : Et même si l’enfant à venir était un garçon, jamais je le laisserai entre tes mains !

Pour ne pas dire « entre les mains d’une meurtrière possédée ». Hors d’elle, furieuse. Son regard se durcit davantage car on parlait de ses enfants, la chair de sa chair. Elle refusait catégoriquement de s’imaginer que quelqu'un puisse leur faire du mal, et l’idée qu’Héloïse veuille cet enfant lui fit prendre peur. Elle savait ce dont elle était capable, du meilleur mais surtout comme du pire. Les douleurs s’intensifièrent, celle qui trainait dans ses jambes lui rappela qu’elle était encore debout, ce qui l’obligea à s’asseoir. Sa main gauche étant momentanément indisponible par la blessure, elle appuya l’autre main sur sa hanche, essayant de se calmer — bien que cet exercice soit laborieux — grâce à la respiration. Elle releva la tête pour regarder la Sparte, puis, n’y tenant plus, elle boucla la boucle, bien qu’à sa manière : Si jamais tu touches à un cheveu de notre progéniture sans notre accord, je … le liquide amniotique coulait le long de ses cuisses, trempant par la même occasion ses jupons et le fauteuil dans lequel elle était de nouveau assise. On ne parlera même pas des coussins. Elle allait ponctuer sa phrase lorsqu’elle se rendit compte que ce n’était pas de l’incontinence mais bel et bien l’arrivée impromptue de l’enfant à venir. Elle écarquilla les yeux, paniquée. Ce n’était pas la première fois qu’elle allait accoucher, mais le contexte dans lequel elle se trouvait actuellement lui fit perdre une grande partie de ses moyens, de son propre contrôle. La panique prit le dessus : oh non, non, non non pas maintenant … Serrant les cuisses de toutes ses forces, elle s’agrippa aux bras du fauteuil, les jambes tremblant telle une feuille morte sous ses jupons, elle ne voulait pas que ce soit maintenant. Prenant son courage à deux mains, elle s’aida du bras du fauteuil pour se relever, puis essaya de souffler une excuse pour s’éclipser, s’imaginant peut-être qu’Héloïse allait être dégoûtée à l’idée d’assister à un accouchement, la vue du sang la répugnait et Élisabeth le savait. Ceci expliqua alors pourquoi elle misait parfaitement sur cette idée pour aller accoucher, loin d’elle, dans un environnement moins hostile, plus calme en tout cas. Elle s’accrochait vraiment à l’espoir de pouvoir abandonner Héloïse ici, dans cette pièce.

Je … désolée mais … je … reste pas … je … c’est le moment.

Oui mais voilà, la suite n’était pas tout-à-fait ce qu’elle avait prévu dans sa tête.
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Heloise_marie
18h47

Héloise ne remarque rien de l’émoi de sa vassale. Bien entendu. Elle est trop occupée à s’imaginer, flânant dans les prés avec toute la floppée des précepteurs qui s’occuperaient de Bobyzz second du nom, car oui c’est bien le nom qu’elle souhaite lui donner, tandis qu’elle prendrait le soleil sous une ombrelle, tout un concept de vieille chiarde qui souhaite garder son teint de yahourt blanc. Elle ne fronça que légèrement les sourcils alors qu’Elisabeth brisa le verre d’une poigne de malade, mettant ça sur le compte de la grossesse, ayant un vague souvenir de sa mère la Terrible Erine alors qu’elle était enceinte de sa petite sœur Naëlle. Elle sourit même, oui oui, un sourire enchanté, lorsque le vilain lui rapporta la coupe de son vin d’Arbois.

-Allons Elisa ne vous mettez pas dans tous vos états, pensez au bébé. Marmonna-t-elle sans grande conviction et sans jeter un regard à sa main -eurk, sang-. Mais d’un coup, Elisabeth se met à rire. Pas le genre de rire dont on peut se souvenir quelques années après, émus, la larme à l’œil d’un bon souvenir partagé. Non ! Un rire qui vous glace le sang. Autant que les mots qu’elle lui asséna et qui lui firent l’effet d’une lame rougie dans le feu qui transperça ses entrailles. Des mots qui résonnèrent dans ses oreilles comme s’ils avaient été d’une autre vie. Chevalier. Fiancé. Bâtarde… Bâtarde ? Quelle était donc cette nouvelle ineptie ? Rien n’était jamais sorti de son corps et rien n’en sortirai jamais. L’expérience de la vie lui avait sans doute appris qu’elle, la dernière représentante des "Sparte pure souche" était stérile.

Puis, les événements semblèrent s’enchaîner trop rapidement. Elisabeth s’assit, comme en proie à une grande douleur. S’agrippa aux bords de son fauteuil et semblait marmonner des non non non. Avant de se relever. Aucune cohérence !

19h03

Héloise se lève, d’un coup pour s’approcher de Elisabeth, mais pas trop. Du sang s’échappe de sa main et en ses yeux il semble que le Malin y ait pris place. D’une voix mal assurée, elle se penche tout de même vers la jeune femme pour lui asséner ce qui serait sans doute le coup de grâce.

Tu quoi, Elisa? Tu quoi si je m'approche de ta progéniture? Je croyais que tu serais heureuse moi, de cette idée ! Hein? Tu quoi? Réponds? Tu vas partir où? Le moment de quoi?

Elle cherche du regard un vilain, un domestique, un quelconque prétendant à récupérer Elisabeth qui semblait un peu malade. Ses yeux tombent alors sur le fauteuil. Mouillé ? Quépassa ? Sa tête de lève pour regarder au plafond, percé ? Ce ne serait pas étonnant vu le proprio des lieux.

19h04

Héloise ? Va chier ! Lui balance Elisabeth entre deux souffles rauques. Tiens, dans ta face. Pas très poli ça. Se redressant d’un coup, le regard hagard, Héloise cligne quelques fois des yeux en observant la scène. Premières secondes : Elisabeth, pliée en deux en train de pousser de petits souffles saccadés. Secondes suivantes. Elle l’insulte, ou du moins, elle marmonne des trucs incompréhensibles qui semblent sonner comme des insultes. Secondes suivantes… prise d’un élan de sympathie, Héloise lui tapota le dos. Puis, dernières secondes. L’écu tombe.

19h05

MERDE ! T’ES EN TRAIN DE ? OLAAAA OLAAAA ! QUELQU’UN ?
Elisa Surtout reste CALME ! D’ACCORD ? Oh Misère ! OLLALLALLLA Que l e Très Haut Nous vienne en aide. RESTE CALME HEIN ? D’ACCORD ? NE PANIQUE SURTOUT PAS !

19h07

Les deux minutes les plus longues de sa vie ! Bordel ils foutaient quoi les gens ici pour mettre des années avant de réagir. Elisa soufflait comme si l'air manquait dans la pièce. Héloise n'osait pas la quitter de peur qu'elle ne tombe ou pire : que le nouveau né tombe. D’un coup, le vilain à la carafe de tout à l’heure passa sa tête dans l’entrebâillement de la porte avec des yeux ronds devant la scène et sûrement, devant la tête de Héloise. Puis, il fila avant qu’elle n’ait eu le temps de lui dire quoi que ce soit.
REVENEZ BON SANG ! Il EST parti ELISA ! OLALLA MONDIEU!!!
Elle n’avait aucune idée de quoi faire ou quoi dire à Elisabeth, elle se contentait de lui tapoter le dos en vociférant. Merde quelle idée d'avoir voulu venir pour cet accouchement... Se redressant tout à coup alors qu'une flopée de femmes entraient dans la pièce Elisabeth sembla sortir de sa douleur.
Aide-moi au lieu de hurler dans mes oreilles! 
L'aider ! Belle idée ! Accompagnée des femmes, la soutenant par le bras -du moins faisant genre de la soutenir- Héloise suivit le groupe sans trop se rendre compte de ce qui allait se passer.

19h15

...




Rp écrit à 4 mains avec JD Elisa.

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Elisaabeth.
Il n’était pas cinq heures du mat’, mais Élisabeth frissonnait, ne claquant pas des dents quand même. Le son ? Ce sera les respirations entrecoupées et saccadées. Il fallait qu’elle reste calme, même si le contexte ne s’y prêtait pas. Héloïse dans tout ça ? Elle n’avait rien compris. Pas un piètre mot. Non, elle est même allée jusqu’à profiter de sa faiblesse pour enfoncer davantage le couteau dans la plaie. Il fallait la jouer fine à présent, et surtout que la marmotte pense à quitter son habit de gros nounours d’amour pour le troquer avec l’ours mal léché. Davantage encore lorsqu’Élisabeth lui aura fait part de la conversation que suzeraine et vassale ont eu, notamment concernant leur progéniture. Pliée sur elle-même, Élisabeth tente de respirer calmement, maudissant sa suzeraine d’avoir provoqué l’accouchement car dans le fond, elle en était sûre, c’était de sa faute si le bébé souhaitait arriver. La contrariété ne l’a pas aidé à garder l’enfant un tant soit peu. « Réponds ? », « Le moment de quoi ? » Héloïse n’avait décidément rien compris. La colère reprit le dessus, entre deux souffles, Élisabeth lâcha à l’encontre de la Sparte : « Héloïse ? Va chier ! » Effectivement, ce n’était pas très gentil, mais c’était nécessaire à ce stade. Après tout, l’accouchement qui allait avoir lieu lui donner tous les droits d’être infecte, ignoble, grossière, insupportable. Alors autant en profiter, n’est-ce pas ? Et voilà qu’elle se met à tapoter le dos d’Élisabeth, probablement un élan de gentillesse. À croire qu’elle la prenait pour une vache sur le point de mettre bas, et qu’il fallait réconforter en lui tapotant le dos. Misère ! Tout à coup …

    [19h05]

Alléluia ! Enfin avait-elle compris pourquoi elle était dans cet état !! Le Très-Haut avait-il écouté sa prière muette ? Peut-être pas, mais c’était bon de se sentir « soutenue ». Rester calme ? La bonne blague ! Si Héloïse savait qu’Élisabeth avait justement perdu son calme dès lors qu’elle avait commencé à lui répondre. Élisabeth finissait par regretter amèrement de l’avoir convié. Mais soit, maintenant qu’elle était là, autant l’exploiter un peu. Elle était restée, près d’Élisabeth, angoissée à l’idée de ne savoir ce qu’il fallait faire. Élisabeth aurait aimé lui dire d’aller ouvrir la fenêtre mais l’aurait-elle fait ? Plusieurs minutes s’écoulèrent — semblant être une éternité pour Élisabeth, pas seulement pour Héloïse — et voilà que des domestiques, dont l’accoucheuse qui était restée dans le château à la demande d’Élisabeth, arrivèrent dans la pièce. Églantine, la camériste de la Palsgravine, soutint la future mère qui réclama l’aide de la comtesse, par la même occasion. La tripotée de femmes partirent vers une chambre, non pas la chambre conjugale mais une chambre où se trouvait le siège sur lequel Élisabeth accoucherait.

    [19h15]

Lorsque les femmes arrivèrent dans la chambre, toutes — du moins, la plupart — se hâtèrent à de très vives préparations, comme sortir du linge, retrousser les manches pour les tâches à venir, s’occuper du feu de la cheminée, ramener de l’eau. Aucune ne resta sans rien faire. On effectua un déshabillage en retirant les couches de la robe de la principale concernée qui se retrouva en chainse, lui permettant ainsi d’être dans de meilleures conditions pour l’accouchement à venir. Élisabeth s’installa sur la chaise, celle qu’elle avait déjà utilisé pour son précédent accouchement. Une fois installée, l’accoucheuse examina la future mère et à la mine grimaçante, celle-ci annonça que ce n’était pas encore le moment. Ce qui fit râler davantage maman Belette qui souhaitait ardemment la délivrance. Commença dès cet instant une longue attente, dont la patience était parfois oubliée sur la table de chevet. Restée assise, Élisabeth reprit ses exercices de respiration, de façon à tenter de trouver le calme. Pendant ce temps-là, une domestique revint dans la pièce, mains sur les hanches et demanda, le plus naturellement possible : « Quelqu’un souhaite manger quelque chose ? » en se tournant davantage vers Héloïse-Marie. Élisabeth fusilla du regard cette bécasse, suivie de sa camériste, Églantine qui se promit de lui faire sa fête, à celle-là. Tandis qu’Héloïse, le plus naturellement possible à son tour : « Beh oui, évidemment. Faites des crêpes, tuez un bœuf pour la naissance et apportez-moi du thé avec une cuiller de miel ! »

Le comble ! Après la domestique, c’était la suzeraine qui fut littéralement assassinée du regard. Était-ce réellement le moment de bouffer ? Une envie de l’étriper se fit plus forte que le retour au calme, mais la douleur que provoquaient les contractions la fit revenir à la réalité : non, sa suzeraine ne mourrait pas aujourd’hui, même si l’évocation d’un quelconque menu pouvait être le motif d’un potentiel meurtre. La domestique, plutôt hébétée de devoir tuer un bœuf sans l’autorisation de ses maîtres, partit malgré tout chercher ce que la comtesse avait demandé.

    [20h22]

L’attente était longue, très longue, même palpable. Élisabeth souffrait, et elle voulait le faire savoir en geignant, ce qui était contraire à ses habitudes. Car en effet, elle préférait mille fois souffrir en silence que de ne dévoiler ses blessures à quiconque. Or, là, elle en voulait terriblement à Héloïse car elle la jugeait responsable de son accouchement qui, à ses yeux, s’était trop précipité. La contrariété l’avait tellement submergé que le calme n’était pas parvenu à diminuer le stress engendré. Et quelle était la meilleure manière de faire en sorte que la responsable culpabilise ? En faisant une très belle démonstration de la douleur. Toujours assise sur le fauteuil, priant de manière muette que l’enfant se décide de poindre le bout du nez, elle continua d’inspirer et d’expirer de manière lente et « calme ». Soudain, elle se souvint qu’elle n’avait pas fait la demande de savoir si la marmotte avait des nouvelles de sa femme : « Est-ce que mon époux sait ce qu’il se passe en ce moment ? » Le silence fut la réponse à la question qu’elle se posait, tandis qu’Héloïse se retrouva toute chose rien qu’en évoquant le nom de Krän. La rage reprit de plus belle, et les domestiques purent entendre deux voix s’entremêlées dans la gueulante poussée :
Bande d’ingrates !
Comment osez-vous vilaines ?!
Bougez-vous les miches et allez lui dire !
Hâtez-vous avant de tâter du fouet ! Aahhh !! le personnel de nos jours.

Dit-elle tout en replaçant une mèche rebelle et se recoiffant. Sur ce point-là, Élisabeth était en accord avec Héloïse, le personnel avait la fâcheuse manie de vous contrarier pour la moindre broutille. Expliquant ainsi pourquoi elle ne la contredit pas. Elle soupira, par les contractions qui étaient parfois violentes, mais aussi par la contrariété de voir tout ce qu’elle avait imaginé partir en fumée : un accouchement comme elle avait apprécié lorsqu’elle avait mis au monde Rogier, ce petit bout de chou ; un calme olympien comme elle avait su dégusté lors de sa précédente grossesse, jusqu’à la mise au monde de ce bambin déjà bien grand. À l’évocation de cette grossesse, des larmes montèrent et pourtant, la volonté de ne pas craquer devant tout ce petit monde était plus fort. Elle râlait intérieurement mais ne put s’empêcher de penser à voix haute que cet enfant souhaitait peut-être sa mort à force d’être aussi long à venir. Ceci l’angoissait terriblement ; elle pensa même faire une confidence à l’accoucheuse, confidence qui ne tomba pas dans une oreille sourde : Si j’en viens à mourir … laissez-moi mourir. Même achevez-moi, c’est un ordre !
Alors que la matrone allait protester, Élisabeth lui fit signe de ne pas répondre et continua : Vous laisserez pleurer sa Sérénité. Il sera triste, c’est sûr. Mais le bougre ne connaît pas … serrant violemment le poignet de la sage-femme, Élisabeth serra les dents et un cri sourd sortit de sa gorge, les contractions traînaient toujours en longueur ; les douleurs qu’engendrent tout ça ! Donc, laissez-moi mourir …
Vous inquiétez pas, je m’occuperai d’eux si vous trépassez. D’eux tous !

Un regard lancé sur celle à qui appartenait la voix, Élisabeth fut prise d’une terrible angoisse : s’en occuper ? Elle ? D’eux « tous » ?? Ohhhlalalala, ça puait tout ça. Elle savait que ses enfants seraient fichus dans les pattes de nourrices, précepteurs et tout le tintouin possible pour que la comtesse vive en paix son amour avec … SON époux à elle !! Libérant le poignet de l’accoucheuse qu’elle avait emprisonné dans sa main quelques instants plus tôt, Élisabeth détourna le regard de son amie, essayant d’effacer la pensée qui l’avait submergée sans prévenir, le cœur serré par toutes ces pensées négatives qu’elle ne cessait de ressasser depuis plusieurs instants. Elle ne pouvait pas mourir, surtout pas pour se retrouver en Enfer lunaire en de bien mauvaises compagnies — surtout en compagnie du père de son aînée, Grand Dieu ! — et observer la scène qui se déroulerait sous ses yeux : Krän épousant une Héloïse aux combles de la joie d’avoir obtenue ce qu’elle voulait, mettre tous les enfants d’Élisabeth dans des ordres monastiques et essayer, tant bien que mal d’engendrer elle-même un autre héritier pour la marmotte. Impossible … IMPOSSIBLE ! Même si c’était catégoriquement impossible, ceci n’empêcha pas Élisabeth de renifler et de pleurer en silence, une main cachant une partie du visage décomposé.

    [20h59]

Dépitée d’être toujours dans le même état que précédemment, mais également ressentant une certaine lassitude mêlée à la fatigue, Élisabeth se leva de la chaise, décidée à faire quelques pas dans la pièce, dans l’espoir ultime que l’enfant voudrait sortir. Après plusieurs respirations, elle commença à faire les cent pas dans la chambre, bougonnant comme elle savait si bien faire, serrant les dents par moment de devoir souffrir aussi longtemps. Les domestiques, ne sachant que faire, se tinrent prêtes à tout moment, tandis qu’Héloïse, assise non loin de la chaise où se trouvait sa vassale, la suivit du regard, toute penaude. Après tout, que pouvait-elle faire de plus ? Rien, malheureusement. Et il était compliqué de pousser le destin dans des moments pareils.

    [21h13]

Ayant fait de nombreux pas dans la chambre, l’angoisse reprit de plus belle. Élisabeth avait la sensation de suffoquer, d’être non loin de tomber dans les pommes. S’agrippant à un dossier de chaise pour se tenir, elle demanda entre deux souffles si quelqu'un pouvait lui ouvrir la fenêtre avant de se sentir plus mal qu’elle ne l’était. Héloïse s’y précipita, se sentant enfin utile à quelque chose, voire même soulagée de servir à quelque chose. Élisabeth se rapprocha doucement de la fenêtre, observant la lumière qui éclairait le village plongé dans l’obscurité de la nuit. Héloïse en fit de même, un peu en retrait. Quitte à mourir, autant inspirer une dernière fois de l’air pur …

    [21h32]

Observer l’extérieur, c’est bien. Mais le temps ne passe pas pour autant à une vitesse folle. Abandonnant la fenêtre, elle refit le tour de la chambre, pestant à chaque pas réalisé. Elle avait fait un cauchemar il y avait peu, et elle avait peur qu’il se réalise. Et si celui-ci ne se réalisait pas, c’était probablement le Très-Haut qui lui avait envoyé un signe pour lui faire comprendre qu’elle avait péché. Elle avait beau passer en revue tout ce qu’elle avait fait depuis qu’elle avait quitté le couvent pour retourner dans la vie active, elle ne comprit pas ce qui clochait. Rien ! Elle n’avait rien commis qui puisse lui être reproché sur le tard. L’angoisse reprit de plus belle, accompagnée de la panique. Si c’était son heure, elle n’avait rien préparé dans le cas où la Mort arriverait. Cette idée en provoqua une autre, et quoi de mieux que de réaliser un testament maintenant ? Beh oui, après tout, au point où elle en était ! Elle demanda à ce qu’un huissier vienne la voir, tout de suite. Maintenant ! Toutes perplexes, une des domestiques se dévoua à aller chercher ledit huissier et revint avec celui-ci, quelque peu mécontent d’avoir été dérangé dans son travail, et le fit comprendre à la blonde. Grossière erreur que voilà. Après une belle menace, l’huissier se dirigea à son poste. Élisabeth de nouveau assise, se plaignit d’avoir trop chaud. Héloïse se précipita vers Élisabeth, prenant au passage un parchemin et commença à l’éventer. Oui oui, elle l’éventa avec un parchemin. Tant pis, ça donnait quand même de l’air, un peu, Élisabeth s’en contenta sans broncher.

    [22h13]

S’occuper du cas de Marianne, check. S’occuper du cas de ses deux derniers enfants — si le dernier est toujours en vie : check. Après avoir signé n’importe comment son pseudo testament de dame trouillarde face à la mort, et obtenu la signature d’Héloïse comme témoin — elles n’en rataient vraiment pas une les deux ensemble ! — Élisabeth convia tout le petit monde à une prière. Genre un vrai gourou. Et vu que personne ne pouvait rien lui refuser en ces instants difficiles, toute personne présente dans la pièce se mit à prier, juste pour faire plaisir à la future mère. Durant cet instant pieux, la jeune femme rencontra à plusieurs reprises le regard de sa suzeraine, à chaque fois avec une expression faciale différente. C’était vraiment glaçant. La première fois qu’elle la regarda, elle pouvait lire de l’inquiétude, elle ne se trompait pas. La seconde fois, elle put voir son expression changer, devenir plus … satisfaite ? Elle fronça les sourcils et haussa les épaules, peut-être était-ce une pensée qui lui traversait l’esprit. Il faut dire que l’ambiance actuelle n’était pas spécialement la plus enjouée.

Plusieurs instants après, Élisabeth regarda de nouveau Héloïse, elles échangèrent un regard. La comtesse avait les yeux brillants, comme si des larmes étaient contenues. Elles échangèrent un sourire, l’une se voulait rassurante et l’autre se voulait consolante. Le compte y était. Peut-être que leurs points de désaccord seront réglés sans trop de discorde. Du moins, cette pensée la collait à l’esprit jusqu’au moment où elle jeta une dernière œillade, plusieurs minutes après, où cette fois-ci, ce n’était plus un Héloïse larmoyante et inquiète qui se trouvait en face d’elle, mais une Héloïse méconnaissable : des yeux grands ouverts, un grand sourire carnassier, elle se leva de sa chaise, telle une bête s’approchant calmement de sa proie. Bouche bée, Élisabeth ne trouva rien à dire et ne sachant à quelle crasse elle allait subir, elle fut secourue par la domestique, partie presque trois heures plus tôt, qui revenait avec des crêpes et le thé demandés. Surprise par ce retour inattendu, Héloïse retourna s’installer sur la chaise qu’elle avait quitté quelques instants plus tôt et regarda la domestique avec un dédain certain.

Virez moi ça, elle accouche, elle ne va pas s'enfiler une crêpe !!!

Dit-elle après avoir regardé les crêpes avec un dégoût sans nom, avant de reposer un regard bienveillant sur sa vassale.

    [22h22]

Essayant toujours de se débarrasser de l’image de sa suzeraine changée en si peu de temps, comme si le Malin la possédait, Élisabeth se plaignit d’avoir toujours trop chaud. Ce qu’elle n’avait pas remarqué, c’est qu’Héloïse, entre-temps, s’était relevée pour aller fermer la fenêtre. C’était bien beau de réaliser un désir d’une femme sur le point d’accoucher, mais c’est qu’elle avait froid ! Héloïse prit un éventail et s’approcha de la future mère en lui agitant l’objet pour lui faire de l’air. Les deux jeunes femmes se s’observèrent, ne se quittèrent pas du regard, l’une se demandant si l’autre n’allait pas encore avoir une réaction sournoise comme elle avait eu précédemment, tandis que l’autre se demandait quelle robe allait-elle choisir lorsque les parents du futur enfant à venir allaient baptiser le nouveau-né. Oui oui, vous avez bien lu. Elle pense froufrou pendant un accouchement. Il est vrai que c’est capital de choisir sa plus belle toilette afin de pouvoir mettre le grappin sur la plus belle tête couronnée, à défaut d’obtenir — pour l’instant — cet homme si viril, si sauvage, pestant « le musc et le coolesque ».

    [22h59]

Un peu plus tard dans la soirée, une arrivée discrète se fit remarquer. Voyez ce bel oxymore. « Pourquoi donc ? », vous demandez-vous ? Nous vous expliquons : la nourrice aurait pu entrer discrètement si elle n’avait pas un enfant dans les bras. Mais ce n’était pas n’importe quel enfant ! Il s’agissait du petit Rogier. Ce petit bambin tout mignon tout plein. Que faisait-il ici ? Ne devrait-il pas être en train de dormir ?! Je sais que ce sont des questions que vous vous posez. Mais rassurez-vous, Élisabeth aussi, se demande bien pourquoi son gamin est encore éveillé à une heure si tardive. Et surtout, pourquoi son enfant est amené, là, dans cette pièce. D’ailleurs, la question fut posée : Mais … vous faites quoi ici ?
Nous avons oublié de mentionner que le petit Rogier pleurer … bah oui, sinon, elle ne serait pas venue jusqu’ici avec le gamin, la fameuse nourrice.
Il pleurait. Parce qu’il est triste. Il vous réclame … je ne parviens pas à le ca…
La barbe il pleure et alors? Vous êtes payée pour le calmer !
Vous n’êtes pas prête à accoucher, c'est évident !
Rappelle-moi de te faire bouffer par les chiens quand j’en aurais fini avec …
Non mais c'est dingue ça ! Même pas foutue de faire son travail. Élisa, il va falloir revoir le petit personnel. Je vais faire le tri là dedans une fois que tu te reposeras !! Dégagez avec le mioche, l'affreuse ! Et s'il pleure assommez le.

    [23h01]

Mais ce n’est pas tout ! Une fois que la nourrice fut renvoyée de la pièce, non sans s’être fait incendiée pour son incapacité à gérer les choses, ce fut au tour d’une petite tête rousse répondant au nom de Marianne qui arriva dans la pièce. Il fallait croire que les enfants s’étaient donnés le mot pour venir « faire causette » avec leur mère. En robe de nuit, poupée à la main, la petite fille s’approcha de sa mère, jetant une œillade à l’autre blonde présente, puis attrapa la main que sa main lui tendit pour la serrer dans la sienne. Elle partagea son inquiétude, entendant tout le raffut qui avait été fait et voulait savoir si tout allait bien.
Mais c'est pas vrai c'est une garderie ici ou quoi? Un bébé à naître et tous les autres débarquent?
Élisabeth caressa la joue de sa fille, se voulant rassurante. Elle lui embrassa la joue, lui demandant de retourner dormir et de ne pas s’inquiéter quand soudain : Aaah, la bâtarde ! Fourrez moi ça dehors. C'est au couvent qu'on élève une bâtarde ! Non mais c'est pas sérieux là. On accouche ici ! On joue pas aux cartes !
On les fout au couvent, ou on essaie de les tuer aussitôt nées. C’est mieux, n’est-ce pas Héloïse ?
Héloise ne semblait pas voir où son amie voulait en venir. Ce n’était pas la première fois qu’il y avait ce sous-entendu qui la laissait perplexe. Un peu perdue, Héloise fixa Élisabeth d’un regard vide, haussa les épaules et retourna à son occupation : c'est-à-dire ne rien faire mais quand même en faire trop.

    [23h14]

Marianne avait embrassé sa mère, avait jeté un regard qui se voulait désinvolte envers cette femme monstrueuse qui avait parlé d’elle comme si elle n’était pas là, puis repartit, traînant des pieds malgré tout. Élisabeth, quant à elle, se releva de sa chaise et repartit pour un nouveau tour dans la chambre. Elle avait chaud, n’en pouvait plus de souffrir de la sorte dans cette attente intenable. Des gouttes de transpiration perlaient le long de son dos, de son cou et de ses tempes. Elle était très loin d’être à son avantage ; il fallait imaginer un ours en colère enfermé dans une cage. Là, c’était presque pareil, à défaut d’un ours, nous avons une femme enceinte en colère, pestant sans fin car son enfant la torturait et surtout, elle voulait retrouver une certaine liberté qui finissait par lui manquer, indiscutablement. Héloïse, toujours à son poste, sursauta lorsque sa vassale se mit en colère contre la fenêtre fermée. Qui avait bien pu la fermer, cette maudite fenêtre ? Églantine, la camériste d’Élisabeth, se précipita pour la réouvrir, s’excusant pour quelque chose qu’elle n’avait même pas commis, puis jeta un œil accusateur à l’encontre d’Héloïse. Cette dernière ne confirma aucunement les soupçons de la camériste mais elle était en effet la responsable qui avait refermé la fenêtre. Parce qu’il fallait se l’avouer, il fait un froid de canard bon sang ! Malgré le feu de cheminée, laisser la fenêtre la frigorifiait, et elle ne se doutait pas que sa chère et estimée vassale allait pousser une énième gueulante contre ce malheureux incident.

    [23h41]

Lorsqu’elle sentit des contractions se rapprocher doucement mais sûrement, Élisabeth, aidée d’une domestique, revint s’asseoir sur la chaise destinée à l’accouchement. Installée, on fit revenir la matrone qui s’était éclipsée et pendant ce temps, Héloïse s’approcha à la demande d’Élisabeth qui souhaitait son soutien, une présence amicale. Elle l’obtint en accueillant dans sa main celle de sa suzeraine, qui avait la larme à l’œil à chaque fois qu’Élisabeth lui serrait — pour ne pas employer le terme broyer — la main à chaque contraction plus douloureuse qu’elle ressentait. Lorsque l’accoucheuse revint, elle inspecta la future mère après lui avoir adressé un sourire qui se voulait rassurant, puis une fois fait, releva la tête en affichant une légère grimace : l’enfant voulait bien sortir à présent, oui, mais il ne se présentait pas correctement car au lieu de commencer par la tête, les pieds apparaissaient en premier. Accoucher en siège serait alors plus dur qu’habituellement. Expliquant rapidement comment elle comptait remettre l’enfant « à sa place » avant de l’accueillir, la matrone obtint l’accord d’Élisabeth, terrifiée, de remettre l’enfant correctement. Pendant plusieurs minutes, et sous les cris parfois étouffés et parfois clairement exprimés d’Élisabeth, la sage-femme appuya sur le ventre pour faire tourner le bébé de façon à ce qu’il se présente le mieux possible. Il s’agissait d’une pratique qui n’était pas sans douleur, mais qui permettrait à la future mère de ne pas souffrir davantage pendant l’enfantement.

    [23h52 — puis, le 16 mai, 00h02]

Plusieurs minutes plus tard, lorsque la « manipulation » fut terminée, la sage-femme inspecta de nouveau Élisabeth et la rassura, lui affirmant qu’à présent, le travail allait pouvoir véritablement commencer. C’était laborieux, mais il était temps de mettre un terme à cet accouchement qui n’en finissait plus. Pendant plusieurs minutes, la fatigue se faisait de plus en plus ressentir, c’était une Élisabeth épuisée, à bout de souffle, tenant la pauvre main de la Sparte qui tentait, vaille que vaille, de mettre au monde un enfant qui s’était fait languir, qui avait surtout décidé de sa venue à un moment où la mère le souhaitait le moins du monde. Elle avait respiré, poussé à plusieurs reprises, pendant plusieurs longues minutes qui lui paraissaient interminables. Sauf qu’au bout d’une dizaine de minutes, l’enfant était né, enfin présent. Ce qui soulagea grandement Élisabeth qui voyait enfin la fin d’un calvaire. Elle regarda Héloïse et lui sourit avant de lui lâcher la main, comme pour s’excuser du mal qu’elle lui avait pu faire pendant l’accouchement. Quelques secondes s’étaient déroulées entre l’expulsion et le soulagement, l’angoisse revint à grand galop et non sans raison : l’enfant n’avait ni crié, ni pleuré. Désorientée, elle regarda la sage-femme qui s’était tournée avec l’enfant afin de cacher celui-ci. Des larmes lui montèrent aux yeux : elle cherchait au fond d’elle le peu de force qui lui restait pour encaisser la mauvaise nouvelle qui lui pendait au nez…


Petit détail : ce RP a été écrit, de nouveau, à quatre mains avec jd Héloïse.

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Heloise_marie

Tout file.

Le temps file, les secondes sont des heures les minutes des années. Même l'oxygène semble manquer.

Tout file.

Tout, sauf les battements de cœur de cette petite chose fripée au visage bleuit. Un silence de mort s'impose d'un coup dans la chambre. Même le souffle de Elisabeth, sur laquelle Héloise a posé ses yeux semble retenu par le temps qui, lui, s'est arrêté. Il n'y a pas de parole à dire. Il n'y a plus rien à critiquer. Le monde s'effondre d'un coup sous ses pieds. Elle a eu chaud, elle a eu froid, elle a eu faim, elle a eu peur, elle est passée par des centaines d'émotions mais là, il n'y a plus que le vide. Un gouffre, un trou béant, un univers qui s'ouvre et semble vouloir l'aspirer dans les méandres de la terre. Un vide sidéral qui brise son cœur et son âme en mille morceaux épars.

Elle n'a ni la force de se lever, ni la force de parler. Elle peine même pour reprendre une bouffée d'air vicié par l'odeur du sang et de la douleur de la mère. Un frisson lui parcourt le corps tandis qu'une voix effrayante s'impose et résonne dans son crâne comme le couperet d'une hache bien trop aiguisée qui lui trancherait les vertèbres. "Il est mort, l'enfant est mort". Ses yeux se ferment, non, non c'était impossible, c'était impossible. Quel Dieu Quel être céleste quel qu'il soit pouvait imposer une telle chose. Quel Dieu pouvait tolérer qu'un être si petit, si innocent périsse sans même avoir pu goutter à une seule bouffée d'oxygène. " C'est de ta faute s'il est mort." Poursuit le couperet, alors qu'Héloise, dans une force ultime se lève et contourne Elisabeth, accueillie par un signe négatif de la tête de l'accoucheuse qui s'éloigne du minuscule corps inerte.

Une fille. Un pas de plus et Héloise arrive à frôler du bout des doigts la courbe de la tête qui aurait pu promettre une chevelure blonde et abondante. Une minuscule bouche ouverte qui semblait appeler à l'aide comme s'il lui manquait un rien pour pousser son premier cri. Les petits poings sont serrés autant que le coeur de la Comtesse qui, brisée sent une étrange chaleur couler le long de ses joues. Ses doigts glissent le long du cou du nourrisson puis descendent sur son torse.

Je crois en Dieu, le Très-Haut tout puissant, Créateur du Ciel et de la Terre, Des Enfers et du Paradis, Juge de notre âme à l'heure de la mort. Chuchota-t-elle du bout de ses lèvres pincées. tandis que ses mains se posèrent toutes deux sur le coeur de l'enfant. Je crois en Dieu, le Très Haut tout puissant, ne nous abandonnez pas ! Poursuivit-elle, en pressant de plus en plus fort sur la cage thoracique de l'enfant et répétant ces gestes salvateurs dans un dernier espoir vain et totalement ridicule. Créateur du Ciel et de la Terre, Des Enfers et du Paradis, Juge de notre âme à l'heure de la mort, laissez cet enfant vivre, je vous en prie! Laissez-nous cette âme ! Elle s'acharne. Priant pleurant, massant frappant même, sans un regard pour Elisabeth ou les autres personnes de la chambre. Elle est seule. Seule face à Dieu, seule face à cet être ridiculement petit entre ses mains. Elle est seule comme elle l'a toujours été toute sa vie. " C'est peine perdue" lui murmure sa voix. Non ! NON ! HORS DE QUESTION !! Que le Très-Haut nous accorde le Pardon, que le Très-Haut nous accorde le Pardon, que le Très-Haut nous accorde le Pardon, Un dernier mouvement, plus fort, plus violent dans lequel elle met sa haine contre le monde entier, un dernier mouvement qui fait jaillir un cri puissant de l'enfant. Il vit... Héloise le regarde, abasourdie. Béate. Dévote. En larmes. Elle pleure en continuant de masser le torse du bébé qui se soulève et s'abaisse en même temps que ses cris désespérés pour se faire entendre. Elle pleure en la prenant dans ses bras, comme si le monde n'existait plus autour d'elle. Elle pleure en mêlant ses larmes au sang et au liquide poisseux de l'enfant qui geint. Elle pleure en serrant le minuscule corps contre son cœur. Elle pleure en se tournant vers Elisabeth, puis, avant de s'en séparer pour ce qui semblait être toute la vie, elle se penche vers l'oreille du bébé. Et que l’étreinte nous mène bien plus loin que nous-mêmes, pour que soudain la peine se transforme en je t’aime*. lui souffla-t-elle, comme un secret entre-elles deux, comme un pacte pour une vie meilleure que la sienne. Puis, elle s'approcha de Elisabeth avec douceur, déposant dans le creux de ses bras ce petit être hurlant, s'arrachant au passage une partie de son cœur. Je te présente... Anatoline.

    Comme une éternité d'un amour l'horizon,
    C'est faire de l'Univers une simple saison,
    En Enfer avec toi j'irai mille fois plus qu'une,
    Comme un soleil se couche dans les bras de la lune.*


*Damien Saez Anatoline, les deux.

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Elisaabeth.
      Probablement était-il mort…


L’enfant était mort et on ne voulait pas le lui annoncer. Elle ne voyait que cette possibilité pour qu’un silence glaçant et morbide soit maître de la pièce. Elle était fatiguée, éreintée après cette longue attente avant de pouvoir enfin mettre au monde cet enfant, mais elle était également angoissée car elle ne comprenait pas pourquoi personne ne répondait à ses questions, ni même ne prenait la peine de la réconforter dans sa détresse. Elle se sentait seule, comme si le monde dans lequel elle vivait s’écrouler petit à petit, sans qu’elle puisse rien y changer. Puis surtout, elle était en colère, elle ne pouvait l’expliquer mais cette colère prenait beaucoup de place, comme la fatigue et l’angoisse. Elle ne souhaitait perdre espoir, c’était probablement une farce douteuse qu’on souhaitait lui jouer. Mais elle comprit lorsque Héloïse s’approcha de son bébé que la farce de mauvais goût n’en était pas une.

Ce fut à ce moment-là que le temps écoulé lui parut être interminable. De longues minutes qui furent probablement les pires minutes de sa vie. Elle n’entendait même pas les prières prononcées par son amie. Le monde autour d’elle avait cessé de marcher, du moins était-ce son impression. Elle ne vit pas que certaines domestiques attendaient, la boule au ventre de devoir faire face à ce qui était monnaie courante pour l’époque, la naissance d’un mort-né ; tandis que d’autres s’activaient pour commencer à nettoyer les traces de ce pénible accouchement. Les yeux dans les vagues, la vue troublée par les larmes qui piquèrent ses yeux et se répandaient le long de ses joues, elle était littéralement perdue. Perdue parce qu’au fond d’elle, elle se battait contre elle-même, une bagarre entre une partie d’elle qui se résignait sans se battre et l’autre qui ne voulait rien lâcher, cette battante qui continuait toujours de faire face aux événements de la vie, même malgré la fatigue.

Elle était encore dans sa torpeur lorsque le bébé hurla. Elle avait quitté la réalité et ne parvenait pas à la distinguer avec un vieux souvenir qu’elle avait jusque-là réussi à enfouir au plus profond de son être. Un souvenir qui venait de lui glacer le sang et dont elle ne cessera jamais de prier pour que le Très-Haut lui pardonne son acte. Elle ne parvenait plus à savoir de quel enfant il était question à présent. Sa conscience lui rappelait à quel point ses années d’enfermement ne lui avaient pas spécialement épargné des blessures, bien au contraire. Ce fut non sans surprise, comme si on la réveillait d’un mauvais rêve, qu’Héloïse lui donna avec une certaine douceur son enfant, un enfant bien présent et surtout bien vivant. Elle regarda son amie, presque étonnée que cet acte soit réalisé par elle. Elle l’avait bien vue s’approcher de l’enfant un peu plus tôt, mais Élisabeth fut rattrapée par de tristes souvenirs et l’angoisse de devoir subir à nouveau un tel sort qu’elle n’avait pas vu que c’était bien elle, Héloïse-Marie, qui avait sauvé la vie de cet enfant. De son enfant. Elle ne parvenait pas à sourire, elle tenait ce petit être fragile et bruyant, pas encore nettoyé après sa sortie du ventre maternel. Elle était épuisée de tout ce qui venait de se produire durant cette nuit, et elle accueillait son enfant avec des larmes qui se mélangèrent à leurs tours aux substances qui se trouvaient sur le bébé. Elle serra Anatoline dans ses bras, le plus fort possible en veillant à ne pas l’étouffer. Elle ne pouvait dire un seul mot, tant sa gorge était nouée, alors elle se contenta de garder son enfant dans les bras, patientant malgré la fatigue que l’accouchement se termine avec l’expulsion du placenta qui ne fut pas trop long. Lors de la présentation père-fille, Élisabeth prétendit être beaucoup trop exténuée pour y assister. Elle resta donc seule, dans son lit, après s’être changée et nettoyée, profitant de ce moment de solitude pour enterrer de nouveau un souvenir douloureux qui avait rejailli auparavant, afin de se consacrer à son entourage encore bien vivant, et surtout se concentrer sur l'instant présent.

Sauf si le Très-Haut avait encore une bonne farce à lui faire d’ici là.
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