Afficher le menu
Information and comments (0)

Info:
Unfortunately no additional information has been added for this RP.

[RP] Par le fer et le fil - Partie 1

Gerfaut
~ Campement des Lames d’Amahir, près de Vesoul.
Samedi 13, lendemain ordinaire de bataille. ~


Gerfaut avait posé sa pique et son bouclier, après les avoir vérifiés. Des bosses, des échardes, mais rien qui ne les empêche de tenir le prochain assaut. Maintenant agenouillé torse nu devant un baquet d’eau, il lessivait sa chemise du sang et de la sueur de la nuit. La sueur était sienne. Le sang, probablement pas ; il ne portait pas de blessures apparentes. Ce qui n'était pas le cas de tous ce matin. De sa position en retrait de l’allée et entre deux tendeurs de toile, il levait les yeux à l’occasion, attentif au va et vient fatigué du retour de bataille.

Il essorait les manches de son vêtement lorsqu’une estafette l’aborda. Il avisa l’expéditeur, et lâcha rapidement la chemise sur un tendeur avant de défaire le pli. Un bilan de situation en une douzaine de lignes. Il fit signe au coursier d’attendre, s’accorda quelques de secondes de réflexion, et finit par lâcher :


Réponse immédiate.

Et le coursier retourna à l’envoyeur son courrier, avec la réponse hâtivement griffonnée au dos.

[…]

Les manches de sa chemise humide, froissée, et presque gouttante encore, étaient retroussées à ses coudes. Après un petit pas de course, Gerfaut s’arrêta au battant d’une tente. La courte distance n'a pas suffi à l'essouffler.

Astana ?
Astana
Et dire qu'il y a quelques heures encore, Sørensen se bidonnait en imaginant qu'on la bordait trop à ras. À ce moment là, l'Est haï remontait presque dans son estime. Mais à présent qu'elle est couchée sur le flanc droit, presque fumasse, à se maudire d'avoir été si négligente, il n'y a plus de sourire qui tienne. Entre deux tiraillements, la blonde grignote quelques minutes de sommeil ici et là, attendant que son homme de main réponde à l'appel. « Bonjour, c'est pour quoi ? Une couture. Bien, vous avez une carte de fidélité ? Euh, non. Faites-moi confiance, devriez en prendre une. »

Quand Gerfaut fait son entrée, Astana rouvre les yeux sous lesquels des creux violacés ont fait leur apparition, et retrouve une position assise. Quelle heure il est ? Aucune espèce d'idée. T'as perdu la notion du temps quelque part entre le champ de coquelicots et ta tente. De trois-quart pour le saluer, elle semble plus anguleuse encore qu'à l'accoutumée, et a troqué pourpoint et compagnie pour une large chemise grise tâchée de sombre entre l'épaule et l'omoplate.

Bref regard.


- « Vous êtes venu. Merci. »

Elle pense la chose sans pour autant y mettre les formes, ni d'émotion particulière. Il est de notoriété commune que la danoise n'est pas femme de démonstration. Penchée et grimaçante au-dessus d'un baquet d'eau, elle s'y rince le faciès avant de tiquer et d'obliquer à nouveau la grisaille dans sa direction. Un sourcil s'arque par défaut, et d'une voix subitement teintée de gouaille, demande :

- « Vous gouttez, Gerfaut. Votre chaussette vous a donné tant de fil à retordre qu'elle vous a fait suer sang et eau ? »
_________________
Gerfaut
Je ne vois que de l’eau sur ma chemise.

Pas d’écho à la goguenardise danoise dans l’expression ou le ton de son obligé. Gerfaut observe. Il voit l’auréole pégueuse dans le dos d’elle, ses traits de mauve et d’aigre. A portée d’yeux aussi, la panoplie de couture, à laquelle elle s’est d’évidence déjà essayée. Le fil est déjà dans le chas.

Mais oui, Gerfaut goutte. Après le départ de l’estafette, il n’avait pas reprisé chaussette comme ce qu’avançait sa courte réponse. Il avait tout simplement renversé sur sa tête son eau savonneuse de lessive, frotté, renversé un second seau d’eau claire en guise de rinçage, et enfin, sans guère prendre plus de temps que pour s’égoutter, renfilé braies propres et chemise humide. Le temps de compter jusqu’à trois cent dix-neuf. De toute façon, il savait ne plus disposer de linge propre pour se sécher.

Enfin, il avait rejoint la tente au petit trot – cinquante-deux – , croisant sur la route l’estafette qui lui revenait, le précédent pli re-gribouillé de quelques mots à bout de bras. Gerfaut l’avait raflé sans marquer l’arrêt, et n’avait lu qu’en diagonale ; si elle avait eu le temps de répondre, c’est que lui en avait déjà trop pris.


A moins que le col ne soit assez large, vous allez devoir vous défaire de la vôtre, au moins sur la manche gauche.

Son regard balaie le reste de l'espace, s'attarde sur ce qu'on devine de la blessure sous le lin, et revient se fixer sur le nécessaire de rapiéçage, présenté en plateau.

… Non, attendez.

Il ramasse précautionneusement l'objet de son attention et autres accessoires associés, s’assoit à terre, et invite son hôte à le rejoindre. Puis, désignant le dos de son avant-bras gauche par son autre main tenant l’aiguille, avant de la lui tendre :

D’abord, faites m’en un. Votre tour après.
Astana
À la demande concernant sa chemise, Astana réprime une grimace.

- « Ce n'est pas comme si ce chiffon était récupérable, de toutes façons. »

Elle le rejoint à terre à la manière d'une anguille, se glisse hors du lit direction le sol en minimisant l'effort à fournir pour atteindre le point ciblé. Aucune confiance n'est accordée à ses quilles qui pourraient céder sous le poids de sa carcasse branlante, légèrement imbibée d'alcool qui plus est. Faut être honnête, Sa Blondeur, t'es une vraie loque. Pas encore au stade du pathétique, à chasser des reluis, mais ces choses-là préviennent jamais avant de se pointer pour dire bonjour. Faudrait cloisonner au cas où, autrement ton homme de main prendra conscience de la largesse de l'expression « s'adoucir avec l'alcool». On se cramponne à sa réputation de femme longue et corrosive.

Ses jambes ramenées en tailleur, elle fiche à présent la main sur une bouteille du plateau et s'envoie une rasade dans le gosier tout en observant l'aiguille qui lui est tendue. La grisaille passe de la main à l'avant bras, sans comprendre vraiment.


- « Je vous suis pas. »

Un temps de réflexion.

- « Ah. »

La langue claque contre son palais. Quelqu'un ici n'a pas fait ses devoirs correctement. Malgré tout, l’œillade qu'elle lui jette est plus perplexe que réprobatrice. Nouvelle gorgée, pincement de lèvres. Tu me demandes de t'entailler la carne ? T'es pas très net comme gars, ou étrangement dévoué.

- « Bon. Admettons que vous soyez une chaussette. »

Sans prévenir, Astana s'empare du coutelas sur le plateau, approche la lame de son avant-bras avant de bifurquer et de trouer sa chemise retroussée à la place. Mieux vaut l'étoffe que ta peau, tu crois pas ? L'aiguille y est plantée à la suite et dessine quelques points.


- « Je dois vous recoudre, et je vais faire des points très serrés, quitte à ce qu'un pli se forme. Pour que ça tienne et éviter de racheter une nouvelle paire parce que bizarrement, je tiens à vous, même si votre première jeunesse est passée depuis un bail. Simple. Voilà, bon... Bah avec une plaie, on évite les plis et on serre moins. »

Effectivement, les points qui suivent les premiers sont légèrement plus lâches. Ils laissent entrevoir une infime ligne de peau en-dessous.

- « Parce qu'il faut que les onguents puissent pénétrer, voire évacuer la suppuration s'il y a. »

Tête penchée sur le côté, elle l'interroge du regard. C'est bon pour vous ?

_________________
Gerfaut
Gerfaut observe le cache-cache entre l’étoffe et l’aiguille, le fil en queue-leu-leu ; et Astana qui compose là-dessus sa chanson de toile. Enfin, elle suspend son geste, et relève des yeux interrogatifs derrière leurs voiles. Alors il coupe le fil, lui reprend l’aiguille d’entre les doigts, et la pose sur le plateau.

Bien. Votre tour, donc. Ne bougez pas, vous êtes sous la lumière.

Il se relève, et contourne la blessée pour ménager derrière elle un espace de mouvement en repoussant la couche. Il peut ainsi s’asseoir, toujours à terre, mais aux premières loges de la blessure. Enfin, il tire à lui le plateau d’accessoires, sans manquer auparavant d’en avoir sorti une certaine bouteille. Qu’elle reste à portée d’yeux et de gosier de son sujet du jour.

Vous n’êtes pas vraiment femme pour ignorer que le sang frais se lessive facilement.

Il s’empare de la bobine de lin ciré et commence à dérouler.

Le temps de remettre un fil, je vous laisse décider si vous me faites confiance pour récupérer votre chiffon de chemise en plus de votre lambeau de chair, ou si je dois lui accorder le sort qu’a subi la mienne.
Astana
Sørensen lève les yeux au ciel. Elle va pour s'adresser au couturier du jour par-dessus son épaule gauche en même temps qu'elle hausse celle-ci, grimace large, puis rabat le minois à l'extrême droite en râlant un peu. Il lui faudra le temps de s'y habituer. Mais la perspective de garder le bras en écharpe tandis que des combats sont encore à prévoir ne rend pas la blonde particulièrement jouasse, d'autant qu'elle a l'impression que ça perturbe l'équilibre déjà fragile de sa carcasse. Enfin. Mieux vaut ça que de finir manchote comme Gaétan.

- « Vous auriez préféré que j'entaille votre peau plutôt que votre chemise ? »

Elle s'imbibe à nouveau, se marrant à demi face au goulot de la bouteille. Arrête, peut-être que c'était sa chemise préférée.

- « Avant de décider, il faudrait déjà voir si le col est assez grand pour vous permettre d'opérer sans avoir à m'arracher la manche. »

Astana dit ça, mais en vérité elle n'en a pas grand chose à cirer. La cause des chemises ne vaudra jamais celle des chaises, ni des coins éternellement vides. Qui le sont ici également, quand on y regarde de plus près et qu'on est au fait des obsessions louches de la danoise. Pour donner le change, la dextre tire légèrement sur le col dans le but de l'élargir. Au prix d'un bouton de moins, il tombe suffisamment bas pour lui offrir la marge de manœuvre nécessaire. Elle considère vaguement sa clavicule dévoilée et la rature qui s'y trouve, et décide de s'accorder une énième lampée. Un poil plus amère, celle-ci.

- « Eh bien voilà. Vous pourrez même garder la chemise si vous arrivez à la récupérer. »
_________________
Gerfaut
La chemise en glissant traîne avec elle un motif de sang mal essuyé. Ça lui habille l’épaule de rouge, comme des chevelures rouges de comètes, dans la suite du sillon sombre et luisant de sa plaie. Par contraste, la blancheur de sa peau ressort davantage.

- « Eh bien voilà. Vous pourrez même garder la chemise si vous arrivez à la récupérer. »

Pas ma taille.

Le baquet d’eau n’est pas loin. Quitte à achever sa propre chemise - propre - , qui ne le restera pas longtemps d’ailleurs, il déroule sa manche gauche pour l’y tremper. Et de ce linge improvisé, Gerfaut prend le temps de nettoyer les contours de la blessure, sans la toucher, et en veillant à n’en pas tirer les chairs. Enfin, il reprend l’aiguille.

Le premier point est lent, mais ne tremble pas. L’aiguille passe la chair, le fil suit sur sa longueur, et avant de poursuivre, il réalise un nœud plat. Un point de plus, guère plus rapide, non moins délicat.


Quand j’étais petit, sur la route vers le bourg, - pique - il y avait un champ planté d’un épouvantail. Deux fois par semaine, - fil - le dimanche en allant et au retour de l’office, nous le croisions de loin. Mes frères lui lançaient des mottes de terre. - pique - De bons lanceurs, mes frères. Ils ne me rataient jamais, moi. Mais je ne me souviens pas qu’ils l’aient une seule fois touché. - fil - Ou alors, c’était parce que je ne les regardais pas faire. Je détestais regarder en face la chose. Raide et maigre, - pique - en paille et guenilles. J’ai cauchemardé de cet épouvantail pendant deux ans, jusqu’à ce que le champ passe du père au fils, - fil - et que le fils l’abatte.

- pique -

- fil - En entrant tout à l'heure, j’ai trouvé que lui ressembliez un peu.

- pique, fil - Il en reste un peu plus de la moitié.
Astana
Entre deux mâchoires serrées et trois grimaces, la blonde se gondole légèrement. Eh quoi, tu crois être le premier à me le sortir ? Un rire ricoche entre ses cotes pour mourir étouffé dans sa gorge. De tous temps, Astana a été surnommée « l'épouvantail ». La faute à sa crinière folle de l'époque, à son allure hâve ou plus simplement aux dix-huit ratures qui lui barrent l'épiderme. Voilà longtemps qu'elle a fait le deuil de sa mise de tendron, et qu'elle n'a plus le cœur au bord des lèvres non plus. Par la force des choses, ces réflexions ont fini par lui passer au-dessus de la carafe.

Quelques doigts viennent soulager une démangeaison fantôme aux alentours de la plaie à demi refermée.
Moment durant lequel Sørensen l'observe par-dessus son épaule et rétorque :


- « Navrée pour vous, mais il n'est pas prévu que je me fasse abattre prochainement. »

Elle attarde un peu la grisaille sur l'homme à l'aiguille avant d'ajouter sans y croire une seule seconde :

- « Et puis si je vous donne tant de cauchemars, fumez donc. Ça vous apaisera les nerfs. »
_________________
Gerfaut
Regard soutenu, dans un demi-sourire.

Vous m’avez donné un équipement, des courbatures, une bosse, et du fil à retordre. Même quelque miasme, selon votre cousin. Mais de cauchemar, point. Et ce dont je suis sûr, c’est que l’épouvantail aurait esquivé le coup, lui.


Puis de baisser les yeux sur son ouvrage en cours, pour un temps de silence et de respiration. Avant que l’aiguille ne reprenne sa danse. Hors adoucir son geste lorsqu’une crispation paraît, Gerfaut ne ralentit pas. C’est dans un mouvement régulier et une douleur anticipable que la seconde moitié est finalement couverte. Au dernier point, il réalise un second nœud plat, avant d’ôter l’aiguille et raccourcir le fil.


Y a-t-il autre chose.
Astana
Ainsi devant vous, Saint Gerfaut qui ne boit ni ne fume.

La danoise montre un signe de déception, traduit par un plissement de lèvres. Elle s'en retourne bien vite à sa bouteille et fait le dos rond sous les assauts de l'aiguille. Chaque fois que le fil passe dans sa chair, une inspiration profonde est prise ; comme pour donner moins d'impact à la brûlure provoquée. Et lorsque la tête en vient à lui tourner, l'intérieur de sa joue écope d'une vilaine morsure pour éviter toute rupture de contact avec le présent. Ne va pas nous tomber dans les vapes, Sørensen. Qu'importe que le cuivre envahisse ta bouche. Les d'Assay ne se font pas plaindre, ils se plaignent des autres, dit-on. S'efforçant d'encaisser le mieux possible, elle est au bord de la défaillance lorsqu'il se manifeste.

Devenue livide, Astana lui barbouille un bref et étouffé :


- « 'minute. »

Sa bouche est essuyée d'un revers de main, les inspirations profondes se font moins discrètes. Et la minute une fois passée, consommée jusqu'à la dernière seconde, et que les fourmis au bout de ses doigts semblent s'être fait la malle, ce qu'il reste de la danoise parvient à formuler une phrase.

- « J'ai besoin de vous pour bander la blessure, et me faire une écharpe. »
_________________
Gerfaut
Il n’y est pourtant pas allé plus fort sur la seconde moitié. Les points d’aiguille en ponctuation d’un récit sont-ils moins douloureux qu’opérés en silence ? C’est peut-être accorder trop de crédit au pouvoir de la narration, et trop peu au calvaire enduré par la couture d’une plaie de cette importance. Aussi Gerfaut ne se départit-il pas de son silence, tandis qu’à grand renfort d’air Astana se recompose un semblant maintien. Il s’est juste déplacé sur ses trois quarts arrière plutôt que de rester dans son dos, en poussant en peu le plateau, sur lequel il repose l’aiguille essuyée dans sa manche gauche.

- « J'ai besoin de vous pour bander la blessure, et me faire une écharpe. »

Mmh.

Trois secondes de réflexion.

Sans me poser en expert, étant donné la ligne verticale que suit votre blessure, on pourrait bander en passant autour de votre bras gauche, de là – il effleure son épaule nue – à là – puis à travers le tissu, un point de ses côtes sous l’aisselle. Mais je craindrais que le pansement ne tende à glisser par-dessus l’épaule, si on ne jette pas un ou deux tours de bande du côté droit, en intercalés. Là, ou là – et il lui désigne de même deux points à l’exact symétrique des premiers. … A moins que vous ne l’envisagiez autrement ; mais dans tous les cas, il faudra élargir votre encolure.
Astana
- « Mmh. »

Dans la mesure où la danoise est à la ramasse et qu'aucune objection ne s'impose à elle, Gerfaut n'obtiendra rien de plus. Elle se contente de lui lancer une œillade torve, traduisible par « te loupe pas mon gars, sinon je reviendrais te hanter depuis la tombe ». Un deuxième bouton saute, Astana se défait mollement de sa manche droite au prix de quelques gesticulations. Son bras une fois libéré, elle réitère l'opération à gauche puis s’attèle à nouer les manches contre son thorax. Pour serrer le tout, la blonde met une extrémité dans sa main, l'autre entre ses dents et tire. Ce qui la fait dangereusement tanguer vers l'arrière, le cogner au passage sans savoir où et lui marmonner quelque excuse à peine audible.

Une rature par-ci une zébrure par-là, offertes à vue, et l'épouvantail de chair et d'os devient plus réel encore.
C'est ce qu'on appelle un surnom bien mérité. Ne manque que la paille, puisque les corbeaux sont déjà là.

Quelques doigts réajustent l'étoffe sous l'aisselle pour laisser place au bandage, avant de lui faire signe qu'elle est prête. Prête à être saucissonnée...


- « ... olé olé... »

Rien. Chut.

_________________
See the RP information
Copyright © JDWorks, Corbeaunoir & Elissa Ka | Update notes | Support us | 2008 - 2024
Special thanks to our amazing translators : Dunpeal (EN, PT), Eriti (IT), Azureus (FI)