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[RP] Je vous retournerai plus tard

Jhoannes
            Un samedi. Poitiers.


Jhoannes13:09
C'est frappant pourtant. Toi tu es lumineuse, et tu balances des rayons sur les gens. Là, ça se répand. Moi j'absorbe, les rayons, et parfois certaines personnes.
Astana plisse légèrement l'œillade, le temps de s’imprégner de la chose.
Astana13:11
Et... les rayons te font du bien ?
Jhoannes13:11
Tout dépend desquels...
Jhoannes hausse une épaule amusée et reprend sa plume.
Astana13:12
Oh ?
Astana hoche lentement la tête, souriant à demi.
Astana13:13
D'accord.
Jhoannes13:14
C'est toujours une question de mesure, Sørensen. Trop loin de la lumière, on se perd et on y voit comme dans le cul d'un mouton. Trop près, on s'y aveugle et on s'y brûle.
Astana13:16
C'est... hm, le principe d'une source de chaleur, oui.
Jhoannes13:16
Ah, la vie est d'un chiant…



            Un mercredi. La Rochelle.


À l'aide d'un bois de grève, le blond creuse un long sillon dans le sable humide qui part d'un rocher, échoué là comme un gros galet tombé de la poche d'un géant, jusqu'au seuil où meurent les vagues. C'est marée basse. Le ciel est d'une clarté de verre et le soleil se rapproche dangereusement de la ligne d'horizon. Ce qui tombe bien, puisque rendez-vous a été donné au crépuscule. La longue silhouette qu'il voit se radiner au loin confirme que tout le monde est bien à l'heure. Par mesure de sécurité, et pour éviter tout conflit concernant la ligne d'arrivée, il retire ses bottes et les flanque sur la pierre. Le bâton de bois flotté est à son tour planté dans le sable, comme un plot ridicule. C'est ici que se terminera la course.

Dans l'écho brouillon du ressac, qui couvre tout sauf les cris des mouettes en train de guetter leur gueuleton du soir, le blond remonte la piste de course jusqu'à son adversaire. Les orteils dans le sable, vêtu de sa simple chemise et de ses braies, les pouces calés dans le cuir de sa ceinture, le menton un brin relevé et comme souvent, un peu trop orgueilleux. C'est qu'il a conscience d'avoir toutes les chances de perdre contre la danoise, alors autant faire comme si de rien n'était, et jouer la carte de l'espoir. Sa seule espérance réside dans une bonne dose de hasard et de miracle, mais, il paraît que l'intérêt est de ne jamais la perdre, l'espérance. Ou tout du moins de faire comme si.

Il remonte la piste comme il remonte le fil des dernières semaines, tissées de langues désaccordées, d'engueulades et de soupirs tristes. D'autres choses aussi, plus douces, mais la trame des jours a été alourdie par les nœuds et abîmée par les déchirures. Comme si deux cons tissaient leurs histoires en sens inverse en espérant s'y retrouver quand même, et foutaient des coups de ciseaux n'importe où. Et puis un peu plus tôt, ce matin, le blond a décidé d'abandonner sa carrière de couturier, ou quelque chose du genre, pour serrer son épouse dans ses bras. Autant défaufiler le voile, quand il nous met les yeux dans le noir. Il avait un cruel besoin de lumière.

C'est bizarre, cette impression d'oublier peu à peu les personnes qui se tiennent à nos côtés, et doux de les découvrir à nouveau. Au fur et à mesure qu'Astana devient plus nette, lui il se souvient d'elle. Et longue et blonde, le cheveu si pâle qu'il en serait presque désarçonné. La ligne d'un cou, dans lequel il s'est paumé maintes fois. Les jambes, qui signeront sa défaite dans quelques minutes. À l'instant de croiser la grisaille de ses yeux, dans lesquels il a fait bien plus que se perdre il y a bientôt neuf ans de ça, il se fend d'un petit sourire bête. Aujourd'hui j'ai quinze ans.

Lorsqu'il parvient à portée de voix, marchant toujours vers elle, il tend le bras vers l'arrière pour désigner la roche qui marquera la fin de leur course.


- « Tu t'en sens capable ? »
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En noir c'est Jhoannes.
En vert c'est Caillou, une de ses voix intérieures. Caillou est vil.
Astana
    – Penser à toutes ces belles choses, simples ou farfelues, d'après course demain, c'était simple.


La Rochelle les pieds dans le sable. Une course bête. Et une idée.

Sørensen avait observé son herbier sur pattes s’activer de loin. Ni planquée ni en embuscade. Juste plantée au commencement de la plage, grisaille fixée sur le rivage et la scène qui s’y déroulait. Lentement, elle avait ôté ses bottes pour plonger ses orteils dans les grains de sable et puis s’était penchée pour enfouir ses mains dedans. Il n’était ni chaud ni tout à fait froid, ne sentait ni les rudes soirées d’hiver ni les après-midis cuisants d’été. Il embaumait la matinée de printemps et les instants d’après rosée. Quelque chose de frais et doux à la fois.

Ce matin, le vilain barrage qui tenait les blonds séparés depuis des semaines s’était pété. Il s’était fracassé d’un coup net et l’eau s’était engouffrée dans la brèche pour balayer toutes les saloperies de la surface de la planète blonde. La secousse avait été tellement soudaine que dans la tête d’Astana, y’a un petit couillon d’observateur qui s’était écrié : « Oh ils ont dû la sentir passer celle-là ». Oui. Le bleu s’était effacé. Adieu les peines.

Et bizarrement, la danoise réalisait tout juste que la ligne d’arrivée représentait désormais le trait définitif sur tout ça, tandis qu’elle approchait à la rencontre de Johannes. Ce n’était plus le seul objet d’un pari qui aboutirait à un gage. C’était retrouver Johannes. Jo-hannes. Le gars qu’elle avait épousé dès les Œufs rue Coquillère. « T’as une gueule à tutoyer les anges, mais. ». L’éclat de bouteille de vin, son alliance, autour du cou.

Oh, les deux cons qui se sourient niaisement sur le littoral.

Hé Sa Blondeur t’es retombée amoureuse ?
Ouais. Ça m’arrive souvent. Toi-même tu sais.

Aussi, elle met quelques secondes à se recentrer sur la question qu’elle a entendu résonner dans sa tête. Prête à qu… Ah oui. Les châsses grises glissent du blond au rocher, du rocher à la ligne de départ et reviennent se fixer sur son époux. Hé, salut toi.


- « Même pas peur. »

Et le sourire s’agrandit. Mais il n’est orgueilleux ni fiérot.
Il est simplement jouasse.


- « Montre-moi comme tu traces vite. »
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Jhoannes
- « Mais je vais te montrer... », assure-t-il, en s'agenouillant au sol.

Puis de lancer un regard plissé vers la paire de bottes au loin, comme s'il fixait une ligne d'horizon depuis un rempart pour guetter l'arrivée d'une armée. Est-ce qu'on peut le faire ? On est à combien de toises là ?

- « J'suis une bête de course… Mon nom rime avec flêche... »

Il rime pauvrement, mais si tu fais l'effort de bouffer une syllabe, on s'y croirait. Allez, on y croit, on y croit dur comme fer sa Blondeur. Regarde comme j'ai l'air tout bien sérieux et sûr de mon coup. Un coureur né.

- « Léger comme le vent… des mollets taillés par les dieux... »

Est-ce que Blondin se fatigue lui-même ?
Oui.
Souvent.

Ses talons se plantent en position de top départ, le genou un peu replié, et d'un mouvement de tête il vérifie que son épouse a adopté une position jumelle. À la loyale, on a dit. Sans coups fourrés. Sans sabotage, ni corruption.

Juste toi, moi, le sable et les mouettes en témoin.

- « Trois, deux, un. »

Et le barbu se met à courir.
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En noir c'est Jhoannes.
En vert c'est Caillou, une de ses voix intérieures. Caillou est vil.
Astana
C'est précisément parce qu'ils avaient dit qu'ils feraient ça à la loyale, sans coups fourrés, ni sabotage ni corruption que la danoise a réprimé son geste. Parce que dans sa tête, elle s'est vue tendre la main gauche vers le mollet droit - et taillé par les dieux - de Johannes pour le lui pincer et peut-être lui arracher quelques poils au passage. Ça t'apprendra à avoir une petite gloriole avant de l'avoir méritée, té. Dans la vraie vie, celle de maintenant tout de suite, il ne s'est rien passé. Oh, elle a maté le mollet bien sûr. Et puis le mollet s'est mis à bouger et Astana a capté un temps trop tard que le départ était lancé.

- « Hé j’étais pas pr… »
ête ! Je matais tes beaux mollets, putain.

Elle ne finit pas sa phrase. Vas-y que ça impose un rire aux seules esgourdes de l’archiviste en plus des siennes ; parce que les mouettes n’ont pas d’oreilles, ni les vagues, ni même le sable et qu’elle se lance à sa poursuite. Elle rit un peu à s'en faire péter les poumons qui devraient être occupés à seulement engranger assez d'air pour lui donner la puissance nécessaire pour rattraper Johannes, qui a tracé droit devant. Han comment tu détales trop bien, Blondin. Mieux que moi ça se voit.


- « Johannes la prestesse ! »
Et ça, ça rime pour de vrai quand on le prononce tout haut.

Salut moi c'est allégresse, enchantée.

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Jhoannes
Au bout de plusieurs foulées — grandioses les foulées, mais on prendra le temps d'expliquer sa stratégie interne pour se pousser au cul un peu plus tard, Jhoannes s'arrête net et se retourne vers sa dame. C'est moi ou elle a dit qu'elle était pas prête ? Ou alors je suis en train de tout faire capoter ? Non parce que dans le doute…

- « Savez quoi ? On va r'prendre… »

Non je ne viens pas d'avaler une énorme cuillerée d'air.

Lui laisse-t-il le choix ? Non. Du tout mon épousée, reprenons depuis le début, puisque je suis déjà en train de rebrousser chemin vers toi. Blondin est parfois un vrai bonhomme, si on met de côté la créature spongieuse et molle qui lui sert de cœur. Même qu'il est capable de porter Astana. Il y a une personne encore vivante en ce bas monde qui pourrait en témoigner, mais son anonymat sera préservé. Pour les plus curieux, c'est un homme, il est roux, et il marche dans une rue de Limoges à cet instant-même. Cependant, aujourd'hui, seules les mouettes pourront assister à ce phénomène rare, mais comme elles sont en train de chasser de la poiscaille sur fond de soleil couchant, la légende restera une légende.


- « Non parce que je vois bien que vous essayez d'tout saboter là... Là c'était juste l'entraînement ma sirène... On va recommencer et puis c'est toi qui feras le décompte, hein. Pour qu'on soit bien sûrs de partir sur un pied d'égalité. C'est important dans un couple. »

Arrivé à sa hauteur, sans rien demander, il se penche pour refermer les bras autour de sa taille et la hisse sur son épaule. Il lâche tout de même un juron pendant le processus. Astana est une grande perche mince, mais n'empêche que c'est pas un édredon à l'intérieur. Y a pas que des plumes. Blondin se marre alors que ses talons s'enfoncent dans le sable, en route vers la ligne de départ.

- « Oh putain… »

La légende disait donc vrai.
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En noir c'est Jhoannes.
En vert c'est Caillou, une de ses voix intérieures. Caillou est vil.
Astana
- « Mais non ! »
Mais non, mais non. Tututulutuuuu.

- « Je sabotais pas, j’courais le cheveu au vent et je matais t… IH ! Johannes, c’est pas réglementaire ! Je proteste ! »

Astana, transformée en glorieux sac à patates – tout aussi glorieuses– pour une poignée de secondes échappe un rire franc, les mains qui débarbouillent son visage des tifs blancs qui sont venus lui brouiller la vue. Et comme l’instant est infiniment clair, mais qu'il y a tout de même rapt, la danoise force un peu son poids vers l’arrière. Tu veux porter ? D’accord. Mais tu vas quand même le sentir passer un petit peu, astre cuisSant de mes jours. Que les mouettes voient, si elles daignent regarder par ici entre deux filets de poisson, que je t’ai fait un peu galérer. Juste un brin. Parce qu’on sait tous les deux, en vrai de vrai, que le porter de danoise peut, ou pourrait, mener aux voyelles. Et c’est joli les voyelles. En tout cas, les voyelles de Toulouse le sont. Encore. Même après toutes ces années.

- « Heu. »
T’as vu ? Ça sonne comme une voyelle.

- « Enlèvement de danoise sur ligne de fuite, ça vaut dans les combien de points en moins ? Franchement c’est presque éliminatoire non ? »

Est-ce que ses pieds ont déjà retouché terre ? Non pas encore.
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Jhoannes
- « Comment ça, des points ? Quels points ? Y a des points maintenant ? »

Un faux départ et une modification du règlement ? Mais dis donc, tu mets vraiment toutes les chances de ton côté. Sournoise danoise, qu'on sent que t'es en train de chavirer vers l'avant en guise de protestation. C'est pas très réglo, ça non plus. Et même pas nécessaire, hein, on commençait déjà à en chier un peu. C'est pas qu'tu sois très lourde, mais heureusement qu'on court pas sur les bras ensuite.

- « Y a des… Astana ! »

Il enroule un bras autour de ses jambes, sous les fesses, et force pour faire remonter le paquet qui se fait la malle. Il imagine qu'elle se transforme en longue anguille nordique, en serpent de mer ivoire en train de se débattre en faisant des drôles de bruits, et ça lui arrache un petit rire con. Dans le sable, les marques de foulées s'estompent ; ça tombe bien, parce qu'on a les bras qui commencent à trembloter un peu.

- « Y a des… Attends... »

Déjà, je relâche ma prise en douceur pour te libérer, Sabine Sørensen. Maintenant que tu es stabilisée, je calme mon souffle. On reprend :

- « On va faire un vrai départ propre parce que je connais déjà la suite… Si tu gagnes j'vais avoir droit à... »

Petit air fiérot sur la face.

- « J'arrive quand même à vous battre en partant après mon renard... », dit-il, imitant très imparfaitement l'accent de son épouse, avant d'enchaîner sur la seconde alternative : « Ou alors, pire, si je passe la ligne d'arrivée le premier… Han mais ça compte pas Jhoannes, t'es parti avant moi...»

Et je refuse de nager courir en eaux troubles.

Le blond réalise qu'il n'a pas entièrement relâché son épouse non plus et qu'il l'étreint encore. Bien évidemment, ça lui fait des choses. Des choses comme t'as qu'à un mot à dire, de toute façon y a que les mouettes et les crabes. On peut s'affronter sur un autre terrain, où théoriquement y aura pas de perdant. Moi j'suis partant, là tout de suite. Parfois ça m'prend d'un coup, puis faut dire que t'es supérieurement roulée, puis... Hein. Non ?

Non mais ça coûte rien d'essayer.
Bon, tu fais le décompte ?

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En noir c'est Jhoannes.
En vert c'est Caillou, une de ses voix intérieures. Caillou est vil.
Astana
Sørensen accuse un petit rire tout foireux qui lui ricoche entre les côtes. Ha, ton accent est tellement naze, Johannes... Un jour je t’apprendrais pour de vrai le parler de chez moi. Et tu le débiteras comme si c’était ta deuxième langue maternelle. Ça sera si fluide que même moi, j’y croirais presque. Comme si t'étais né sur un bateau avec un harpon à baleine dans une main et une peau d'loup dans l'autre. Si, je te jure. On fera les herbiers sur pattes dans les lieux publics et on causera danois pour ajouter au côté mystère. Et on lorgnera sur ceux qui pigeront rien en se poilant bien comme deux cons. Est-ce que ça sentirait pas un peu la Champagne et l'Artois ça ? L'époque des faux-noms et des sourires entendus ? Si. Bien sûr que si. Et c'était doux bien avant d'être amer.

Johannes et Astana se causent parfois silencieusement. Ils se passent petits et grands messages par les mains et par les yeux. C'est simple. Et les doigts de la danoise qui se sont accrochés à l'épaule de l'archiviste et qui triturent le tissu de sa chemise aussi, ils disent des choses. Ils disent : « Non, je t'entends mais j'suis pas une girouette. Je reste focus sur mon objectif, monsieur. D'abord, franchir la ligne d'arrivée et ensuite... ».


- « Hrm. »

Petit raclement de gorge. C'est rude de pas en être une, de girouette, quand tu me regardes comme ça.

- « Non mais t'as des mollets taillés par les dieux. J'peux rien contre la volonté des divinités... »

Bref soupir amusé. Allez, on se replace sur la ligne de départ.
Châsses grises sur châsses noires. T'es prêt ?


- « Trois, deux, un ! »

Et la blonde trace.
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Jhoannes
Et le blond, à son tour, décampe comme le vent. Jhoannes, fils des airs et de l'art de fuir. Jhoannes, qui se figure présentement qu'il a un petit escadron de cavalerie au cul, et qu'il faut filer, filer vite sur la plage pour éviter de se faire faucher. Souvenirs des nuits de chasse à courre, où c'était lui la proie, parce que Robert-sur-son-cheval avait bu un coup de trop et le confondait avec un gars d'en face, non mais sa chemise est de la même couleur que leur fanion, j'ai vu un éclat, ah Robert… tu m'auras pas aujourd'hui. Et c'est vrai, que j'ai de bons mollets mais, taillés par les dieux ? Plutôt taillés par une sainte trouille ouais. Une vie à arpenter les chemins aura aidé aussi.

Et il court longtemps, et vite. Certainement pas plus vite qu'un cheval mais suffisamment pour distancer une danoise sur une bonne partie de la piste ensablée. Elle est pas tant loin derrière, ses pas résonnent dans son tympan gauche. Et elle est dangereuse. Parce qu'on a beau avoir de l'avance, on y est pas encore à la ligne d'arrivée mon gars. Astana, elle est pas du genre à abandonner en route, ni à lâcher son bout de gras quand elle a mis les crocs dedans. Elle veut te filer un gage à la fin. Sûr qu'elle a déjà préparé une liste de trucs foireux à te faire faire et qu'elle l'a planquée sous une aisselle histoire de l'avoir sous la main, quand elle te narguera à l'arrivée, en l'agitant gracieusement.

Cette image en tête, Blondin donne une seconde impulsion à ses jambes pour maintenir le rythme. Maintenant il ne fuit plus une menace dans son dos, il tente d'éviter celle qui se profile devant lui. Paradoxalement, c'est une menace vers laquelle il faut foncer, pour la déjouer correctement. Alors il continue de foncer. Ses guiboles tiennent le choc, mais son palpitant commence à trouver la situation pas forcément agréable et s'agite sec. C'est pas comme s'il allait déposer un préavis de grève non plus mais la situation ne va pas être soutenable encore très longtemps. Non parce que courir vite, d'accord. Courir longtemps, on peut le faire aussi. Courir vite ET longtemps : pas l'idée du siècle.

T'es toujours là danoise ?
Petit détour pour éviter de s'entailler sur une coquille tranchante.
T'as remarqué que je commence à en chier ou je fais encore illusion ?

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En noir c'est Jhoannes.
En vert c'est Caillou, une de ses voix intérieures. Caillou est vil.
Astana
Astana a des talents et des savoirs. Elle sait couturer des chairs avec habilité, faire des mélanges savants pour soigner les maux de la carne ou de l’esprit. Elle sait aussi répéter plusieurs fois – et toujours très vite – des phrases longues et pleines de pièges. Se jeter à corps perdu dans tous les gages foireux qu’on lui refile. Taper où ça fait mal. Repérer le bibelot qui vaudra un bénef’ certain à la revente. Enfumer son monde. A quelle température doit se trouver l’eau d’un bain pour qu’il soit réussi. Elle sait manier le fer, dans une forge ou dans un champ de coquelicots, avec talent. Doser son chanvre. Faire des blagues. Ecouter causer les silences et les pièces pleines de bruit. Que les chaises valent mieux que les tabourets. Apaiser Johannes, jusqu’à ce qu’elle ne sache plus – et qu’elle retrouve derrière le mode d’emploi.

Alors courir, oui, Astana sait faire. C’est à peu près ce que tu apprends au stade second de la petite enfance, après avoir découvert comment mettre un pied devant l’autre tout seul. Généralement, les premières échappées folles vers l’avant s’accompagnent de sévères gamelles, de genoux râpés et de pleurs. Aujourd’hui Sørensen ne pleure plus lorsqu’elle se rétame. Les années aidant, elle a appris que la peau se soigne toute seule. Comme l’esprit et l’âme. Mais que tu peux aider, aussi, pour accélérer le processus de guérison. Parce qu’après la chair à vif c’est la croûte boursouflée et moche qui vient et qui cache tout ce qu’il se passe en-dessous : la nouvelle peau. C'est une mue. Le mariage des blonds éternels s’est viandé salement voilà quelques temps, l’écorce s’est formée lentement mais sûrement et aujourd’hui elle est prête à se faire la malle. La ligne d’arrivée, c’est la mue.

Ne reste plus qu’à bouffer la distance restante. Grandes jambes font de grandes enjambées et menacent le râble de l’archiviste. Je suis là. J’te colle au train. Sûrement qu’il y a un sourire qui s’échange. L’instant d’après, c’est un petit flottement qui se lit sur le faciès de la danoise. En elle, les poumons fatiguent. Ils se ratatinent et ne sortent plus assez d’air pour insuffler suffisamment de vie, de puissance dans son corps. Les muscles qui font agir ont beau être là, s’il n’y a plus assez de matière première pour alimenter les rouages, c’est rude. La blonde comprend à cet instant précis, qu’elle ne dépassera plus.

Sa Blondeur, t’es niquée. Tu vas perdre.
— Je sais. C’est pas grave.

Grandes quilles ont les foulées qui s’amenuisent. Et la ligne d’arrivée franchie, c’est le saligaud rocher à trois quarts enterré qui vient dire coucou. Orteils tapent contre la roche, dans l’élan, et c’est la chute dramatique. A peine si elle a le temps de tendre la main en avant et d’agripper un bout d’étoffe voisine. La danoise tombe en avant, entraînant peut-être l’archiviste avec elle. Et passées les quelques secondes où le souffle se trouve bruyamment coupé et que les étoiles dansent devant les yeux, Astana rit.

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