[RP] L'Auberge du Pacte des Loups

[Mende, suite à la rencontre entre Insanius et Hildegarde icelieu]

La docilité de la jument rendait la promenade presque bucolique; elles avaient galopé pendant quelques lieues et la Palomino estait éreintée. Sa maistresse esgalement, mais quoi de plus plaisant que la compagnie d'un charmant hosme comparé à l'endormissement dans une couche vide? Le sommeil viendrait plus tard, sans doute après un bon bain et la caresse des mains de Meyya qui la masserait après leur trajet.
Elle le vit esquisser un sourire alors qu'elle descrivait ceste terre. Sans doute avait-il déjà rencontré bien des personnes aussi estonnées qu'elle à la vue du paysage...

- Mais ces loups, croyez vous qu'une lance de huit garnements ne les effraiera point? On raconte qu'ils mangent les humains, mais ce n'est que légende pour apeurer les enfants n'est-il point? A moins qu'en grande disette ils n'aient besoin de chair fraische.

Un frisson la parcourut de la pointe des pieds au plus haut sommer du crane, hérissant le duvet de sa chair à l'idée de se voir déchiquetée par des animaux affamés.

- Enfin pour le moment le gibier est abondant et nous ne sommes point en période hivernale. Il ne manquerait plus que je ramène une blessure due aux loups plutost qu'à un coup d'espée. Bien moins glorieux n'est-il point?

Un petit gloussement sortit de sa bouche entrouverte.

- Enfin si nous avons le loisir d'échanger quelques coups d'estoc avec les armées Rouergates... Ils prennent le temps sans doute de gonfler leurs armées afin de venir nous taquiner sous les remparts de la ville. J'espère que nous avons un stock de résine pour en faire de la poix* et les renverser sur nos petits assaillants... Vous avez tant d'arbres icelieu... La nature est souvent bien faite!

Elle le regarda encore, puis demanda d'une voix un peu enfantine, ne voulant passer pour une inculte...

- Dites, c'est quoi un 'Ponot'? J'aurai bien une interprétation mais elle semble ne point estre des plus plaisantes...

Tout en marchant elle se mit sur la pointe des pieds et s'approcha de son oreille, l'occasion estant propice à un rapprochement ludique dont la Veuve Saintclair aimait à user avec les représentants de la gent masculine.

- On ne remplace point le P par un C n'est-il point?

Se mordant la lesvre inférieure, elle espéra un instant n'avoir point froissé le tressé guerrier. D'ailleurs... N'estait-elle point inconsciente de se promener avec un homme qu'elle ne connaissait ni d'Eve ni d'Adam? Dans le silence de l'aube il aurait pu l'entrainer dans une ruelle pour la brigander... Mais la rouquine aurait du répondant avant qu'il ne puisse la mettre à terre pour la rudoyer, du moins le croyait-elle, car bien qu'elle fut assez charpentée Insanius semblait l'estre pour deux. D'un regard vers son visage elle effaça de son esprit toutes ces pensées. Il semblait bon, droit... et atypique de part sa coiffure. Et cela amusait l'excentrique Hildegarde, qui de part sa nature fantasque détonnait dans le paysage.

S'approchaient-ils de l'auberge? Elle n'en avait cure. Ils avançaient lentement, profitant des dernières lueurs du jour, moment ou le soleil de la journée laissait place à au camaïeu topaze parsemé de quelques touches de rose du crépuscule.

Après sa journée passée à la Mairie, la Vicomtesse se rendit au Pacte pour vérifier que toutes les chambres qu'elle avait demandé de préparer gracieusement pour les personnes extérieurs qui venait défendre Mende étaient prête.

Elle avait eut le plaisir d'accueillir des ponots en autres. On l'avait prévenus de l'arrivée d'une Dame venue de Savoie accompagnée d'une autre personne.

En entrant au Pacte, la Mairesse et propriétaire trouva les lieues un peu désert. Même elle n'avait malheureusement plus beaucoup le temps de passé. Enimie la secondait très bien à l'auberge, Nanelle eut une pensée pour son époux, il serait très fier de ses enfants.

Après avoir donner de nouvelles recommandations pour préparer de nouvelles chambres, Nanelle se servit une tisane et s'installa à une table. Posant ses mains sur son ventre, elle ferma les yeux quelques instants, elle était épuisé, il faudrait qu'elle prenne un peu soin d'elle et surtout de ce petit être qui grandissait en elle.

L'imbécile... Voilà qu'il lui avait fichu la frousse avec ses histoires de loup. Et il en rajoutait le bougre... Son visage se tourna vivement vers l'homme... Bon Sang! Ce sourire qu'il arborait, ceste victoire sur la crédulité de la rouquine..
Sa voix semblait lasse... Autant il semblait aimer ceste terre, autant il semblait déçu par ses habitants... Fort heureusement il y avait toujours un petit groupe d'irréductibles dans chaque ville, il fallait juste les croiser en taverne...
Son intervention eut au moins le don de le faire rire aux éclats, sa voix porta loin et il lui sembla que l'on poussait des volets pour voir qui fesait un tel tintamarre de bon matin. Il aurait peut-estre fallu faire un vrai charivari pour les forcer à se lever, ces faignants Mendois.

Quoi qu'il en soit, elle fit mine d'estre oustrée...

- Oseriez vous vous gausser de ma personne Monsieur? A me faire croire histoires sordides sur les loups?

Le ton paraissait très hautain mais le sourire qui accompagnait ses paroles ne pouvait nier l'humour qu'elle en faisait. Elle ne put réprimer un rire joyeux, elle avait oublié toute fatigue, trouver quelqu'un avec un tant soit peu de conversation estait si rare désormais...

- Ainsi donc vostre ami Pachillou vient de cest endroit... J'y passerai lors de mon chemin retour... Autant varier les itinéraires. Est-ce une belle ville?

Son regard se perdit dans la contemplation des maisons aux façades colorées, et revint se poser sur le guerrier.

- En Savoie nous avons de grosses maisons de bois, façonnées pour résister aux grands froids, couleur forest bien entendu. Icelieu les maisons sont aux couleurs du soleil, d'une grande gaité.
Estes vous un homme de guerre Messire? Vostre apparence semble vous trahir, mais sait-on jamais, vous pourriez n'estre qu'un mercenaire ou bien un vaillant bûcheron...

Les clapotis de l'eau vinrent teinter leur marche... De l'eau, des monts... et peut-estre bien d'austres merveilles à découvrir au fil des journées passées dans ce pays. Elle lui aurait bien demandé d'ou venait ceste idée de tresses, mais elle s'abstint, ne connaissant point l'hosme intimement. Quoi qu'il en soit, elles estaient dans un drosle d'estat, comme si elles avaient esté violemment raccourcies.

La Veuve Saintclair n'estait point arrivée d'une matinée qu'elle commençait déjà à poser mille question à un pauvre habitant qu'elle avait alpagué au passage. Il répondait poliment, et ne semblait point embarassé... Elle babillait naturellement, comme si elle avait connu le digne compagnon de Medusa depuis des lunes.
Du coin de l'oeil elle le voyait sourire, c'est donc qu'il paraissait bien moins bougon qu'il ne le montrait, ou bien était-ce parce qu'il estait en sa moelleuse compagnie?

- Ce sera avec plaisir que je ferai cheminer ma blonde sur les pavés de vostre village. Elle aime à avaler les lieues dans une frénésie de galops... Je vous avertirai de mon arrivée pour que vostre servante me prépare un bon bain chaud pour me prélasser. Un énoOoOorme baquet...

Du bout des lesvres il évoqua quelques vagues bribes de son existence, et la belle prit conscience à ce moment de sa trop grande curiosité. Elle se mordit la lesvre inférieure, espérant qu'il ne fut point courrouçé... Mais le sourire qu'il lui fit en terminant sa phrase la rassura quelque peu.

- D'autres questions Donà?

Moi? Euh... Non.. Hildegarde ne put réprimer quelques gloussements... Pardonnez si j'ai un peu trop fait intrusion dans vostre vie... Et encore soyez heureux que je sois éreintée, sinon vous auriez peut-estre eu droit à un véritable interrogatoire!

On voyait au loin une enseigne... Elle plissa les yeux pour tenter de reconnaistre la forme du fer forgé... à ce moment entre chien et loup ou le monde devenait flou, indescriptible, fuyant... Son doigt vint pointer l'objet...

Nostre auberge? Par Bacchus comme la nuit tombe vite en ce mois de Septembre... Logez vous esgalemen à cest endroit?

Le pauvre homme aurait sans doute à supporter ses caprices de bourgeoise s'il y avait prit demeure... Pauvre de lui...

Un silence s'establit alors qu'ils s'approchaient de la taverne, les protagonistes marchant un peu plus lentement, laissant la douce fraischeur de la nuit les rafraischir. Le moment inéluctable de la séparation approchait, et la Dame de Brison Saint-Innocent allait le faire à regret, sans bien connaistre la cause de ceste touche de tristesse. Fatigue, lassitude, tresses?...

Son bras se raidit quand elle sortit de sa resverie, bercée par le son de sa voix. Son regard azur croisa le sien, un autre sourire malicieux à sa raillerie sur son verbiage, il lui faudrait trouver de quoi lui couper le sifflet... Et austrement qu'en usant de ses charmes, elle savait déjà la méthode imparable... Quoique... La commissure gauche de ses lesvres s'étira doucement.

J'aurai alors une jolie demoiselle avec qui faire la conversation au coin du feu si je venais à m'ennuyer quelque peu.

Un gamin faisait le pied de grue devant la bâtisse, et la belle lui remit la longe d'Eos, mit un écu dans la paume de sa main et lui dit, se penchant vers le petit.

Un écu pour que tu l'emmènes aux écuries, et deux austres si tu retrouves mes compagnons savoyards... Tu sauras les reconnaistre, ils ont un estrange blason rouge avec une croix blanche... Et... ça... du nougat, tu sais ce que c'est?

Hildegarde en coupa un morceau que le mioche enfourna, le sourire aux lesvres, puis partit à la recherche des gens sans demander son reste. Elle tendit le morceau restant à Insanius.

Et vous... Voulez-vous profiter du nougat de Montélimar? Un vrai régal pour les amateurs de petites choses sucrées...
Je vous remercie pour la balade et pour la conversation... Je pense que je vais m'affaler dans un baquet rempli d'eau et dormir du sommeil du juste. N'hésitez point à me faire mander si d'aventure vous veniez prendre un gobelet ou deux, je me ferai un plaisir de vous accompagner.

Sa main vint presser la sienne en signe de gratitude, il avait esté un charmant compagnon de route. Un dernier sourire, puis elle appuya sur la clenche de la porte pour entrer dans l'Auberge.
Lasse, inassouvie, mais preste à brusler aux enfers pour défendre ceste ville.

La porte poussée, Hildegarde s'estait retournée pour mirer son guide...
Ses épaules semblaient s'estre un peu affaissées, comme si leur promenade avait egayé ceste fin de journée. Ou bien était-ce ce que la rouquine ressentait?

Cela faisait longtemps, si longtemps, qu'elle n'avait pas babillé, ri... Ce petit moment d'amusement venait juste de se terminer et la froideur du quotidien reprenait peu à peu son emprise sur le coeur de la belle.

La porte fermée, elle se retourna pour atteindre le comptoir et sourit à la tavernière.

- Bonsoir... Avez vous encore deux chambres de libre? Avec de grandes couches... Et un baquet d'eau brûlante... pour moi, je ne sais ce que le Chancelier décidera de faire de sa soirée.

Mais en attendant, servez moi donc une liqueur... locale?

Le voyage l'avait éreintée, et elle ne resvait que d'une chose... Se plonger dans un bain, fermer les yeux, respirer les essences que Meyya aurait choisie et savourer le massage qu'elle lui offrirait. Sans doute s'endormiraient-elles dans les bras l'une de l'autre... Comme avant...

Elle retourna en salle pour prendre place à une table, saluant les clients d'un sourire poli, quoiqu'un peu plus appuyé quand le jeune homme estait bien fait.

Le gamin allait-il retrouver le Chancelier? Elle eut un imperceptible tressaillement, lui avait-elle dit que Meyya estait une ébène? Il allait prendre peur en découvrant son visage couleur nuit...
A force de vivre aux costés de sa Dame de Compagnie la Veuve Saintclair en avait oublié que sa couleur de peau n'estait point appréciée de tous alentour.

Les heures s'étiolaient et son grand désarroi la belle n'avait point vu une seule tresse de son doux ami. Assise dans le moelleux fauteuil réservé aux gens de sa condition, Hildegarde savourait une dernière gorgée de liqueur de castanha.

Les malles de la Donà avaient esté promptement ajoutées à la foultitude d'objets dont estaient remplis les charrettes, le paquetage du Chancelier ne prenant qu'une place infime dans tout le fatras des emballages.
Epices, mets venus d'Orient, voilages... Hildegarde avait dépensé sans compter. Mais tous ces présents estaient bien pasles comparé au joyau qu'elle avait découvert au creux de la forest de Mende. Une pierre de chair et de sang, parfois glaciale, parfois bruslante...

La veille elle s'estait endormie, éreintée... Comme elle aurait aimé laisser la folie la gagner, mais ses forces l'avaient abandonnées. Ceste dernière journée la vit très occupée... A donner les ordres, vérifier les chargements, acheter les vivres pour tenir quelques journées de marche et arpenter les rues en espérant le croiser.

Les avants bras sur les bras du fauteuil, la succube ferma les yeux quelques instants, oubliant les clients de la taverne, ce puant vagabond qui buvait à quelques tables plus loin, la séduisante gourgandine qui posait sa main sur le "truc" d'un jeune homme prest à la suivre ou elle voudrait, les joueurs qui se battaient pour un écu. "Faites qu'il soit là lorsque mes yeux s'ouvriront."

Elle souleva ses paupières, mais cela n'arriva pas. Il devait avoir esté retenu par quelque affaire hors des remparts pour n'estre point venu. Les battements de son coeur s'intensifièrent alors que son esprit envisageait mille possibilités... Cela n'avait-il esté que du tourisme sentimental? Maintenant qu'elle retournait dans ses pénates allait-il l'oublier? L'on se promet de s'écrire, de se voir, et les occupations de chacun repoussent la rencontre, jusqu'à l'oblitérer en sa totalité.
Pourtant... Ces moments passés ensemble, les baisers échangés, la douceur de ses doigts et le velouté de ses lesvres... Elle secoua la teste pour effacer ces sombres pensées.

Puis Majda l'avait rejointe pour quelques minutes, Hildegarde aimait la petite maure, cest enfant qui se comportait déjà comme une grande. Quelle idée de lancer des chats au moyen d'une catapulte... La rouquine l'avait laissé partir après une chaleureuse étreinte et quelques baisers.

Meyya estait ensuite venue la chercher. Tout estait prest pour le départ. Hildegarde se leva, s'enroula dans sa cape et suivit sa Dame de Compagnie. Le séjour à Mende estait fini.