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[RP]Dualité alternative sollicitée... L'Apo se réveille...

--Apo.
[... Ou quand les limites du supportable s'atteignent...]



La journée avait pourtant bien commencé. Le séjour en Languedoc aussi. L'audience avait été acceptée par le Coms Cristòl et ne s'était pas mal déroulée. Elle s'en doutait en venant, mais il lui fallait être sûre. Le Puy n'était quant à lui pas le pire village qu'elle ait eu à traverser, et la halte était agréable à défaut d'être palpitante. Apolonie avait même croisé sa presqu'homonyme en taverne, s'excusant des ennuis que leurs prénoms très proches avait engendrés. Un 'a' à la place du 'e' et les soldats peu instruits avaient vite fait de mélanger le tout. Deux brunettes qui en avaient ri en se retrouvant autour d'une chope. L'ambiance badine des tavernes de voyageurs...

Et ça.
La lettre.
Une missive, encore.
Un courrier, toujours.
La valse des mauvaises nouvelles reprenaient, à jamais.

Le sourire avait d'abord étiré les lèvres de la jeune femme à la lecture de la signature. Sa filleule, sa douce, la jolie Alethea. Des nouvelles de Moulins... Ah non, vrai qu'elle se trouvait à Angoulême. L'azur se pose, pétillant de joie, sur les arabesques tracées à la hâte... Et les joues se vident de leur sang, le teint blêmit, l'oeil se plisse tandis qu'elle découvre ce qui motive ces nouvelles.


Thea a écrit:
Angoulême le 07 décembre 1456


Mon Apolonie, Ma Marraine,

Je ne pensais pas être un jour sur le chemin d'une si triste nouvelle. Elle arrive à du Poitou, funeste et meurtrière et j'ai peur qu'il ne reste personne pour te la faire parvenir.

Apolonie ton frère a été laissé pour mort. Je ne sais pas grand chose d'autre car tout n'est que rumeurs ici... On parle d'un enfant, la fille de Sélène peut être et de vengeance... Eikorc ne serait pas le seul loin de là... On parle de bien d'autres que je ne connais pas.

Ils étaient partis, tu sais, depuis deux jours maintenant. Quelques corps sont revenus. Je n'ai pas vu le sien, je l'aurais reconnu bien sur. Pardonne-moi de ne même pas pouvoir t'en dire plus et d'ajouter l'incertitude à la peine.

Théa


Un choc, sourd, violent. Un battement de coeur qui se rate.
La mâchoire se crispe comme les poings, l'ongle ravageant une nouvelle fois les paumes tachetées de croissants rouges...
Eikorc...
EIKORC !

Pas lui. Pas possible. Mort... Non. Personne ne peut tuer un colosse. Hein ? HEIN ? Non...
Le sang en tourbillons violents se charge au passage cardiaque de caillots de douleur qu'il charrie jusqu'au bout des membres. La moindre parcelle de son être se tourne vers son frère, son autre.

EIKORC !

Apolonie se repousse d'un coup d'pensée, l'Apo r'prend une place qu'elle avait déjà brigué il y a quelques jours, mais cette fois elle r'vient en force.
Son frère, sa vie, avait trahi une parole... Cette fois c'la faucheuse qui s'la joue narquoise et c't'hors de question.
La d'moiselle peut pas supporter, et laisse l'Apo gérer la douleur. Elle connait elle, c'est c'qui la maintient en vie. C'est c'qui l'amène, toujours, encore... C'est c'qui empêche Lonie d'être heureuse... l'chagrin prend trop d'place dans sa vie.

EIKORC !

En vie, il peut être qu'en vie... Sinon, elle s'dit qu'son coeur aurait lâché avec. Elle l'aurait senti nope, si son autre s'tait éteint. Elle l'aurait su...
Blessé... blessé... Par qui ?
L'poing se colle, rageur, dans un pan d'bois qu'avait rien d'mandé mais qu'a eu mal. Elle sent pas la souffrance l'Apo, elle r'marque à peine l'sang qui coule d'ses phalanges. Et s'carre des échardes qui s'plantent dans la peau abîmée.
Muerte et Libertad... LIBERTAD ! C'est c'qu'elle gueule en s'enfuyant, fuyant les gens, la foule, les rires. Fuyant c'qu'elle est, s'réfugiant dans une course effrénée dans l'froid.
La suite la cueille dans une ruelle à l'orée d'la ville. Une missive qui la trouve, où qu'elle soit, même au fond du puits, au bord du gouffre... L'plongeon s'ra d'autant plus dur qu'l'espoir r'nait avec l'nom d'l'auteur.


Mamour a écrit:

Ma chère Apo, Mamour,

j'espère que ce courrier te trouvera en forme.
Je suis à Angoulème, avec tous ceux que tu connais.
on est mal, très mal tous.
Ton frérot, Selene, Baile, , Bireli, Aphélie, Maleus... Fab...
Une certitude dans tous ça, deux d'entre nous que je ne connaissais que très peu, Evan's et Ermy sont morts et ne se relèveront plus jamais. Je sais que tu les adores et je suis désolée d'être celle qui t'annonce cette malheureuse nouvelle.

Selene ne donne pas de nouvelles. je m'inquiète pour elle étant donné son état.

On est partis se battre contre une armée poitevine qui avait assassiné, je pèse mes mots, la petite Libertaa et Linon, qui n'étaient pas dans notre armée. Normal, une pacifiste et une ptiote comme ça, ça va pas au combat.
elles se remettent doucement, mais la petite est choquée. très choquée. commence à avoir des attitudes inquiétantes. Elle n'a pas vu son père ou sa mère depuis qu'elle est tombée sous les coups de ces rustres, et s'inquiète énormément.
on essaie de lui changer les idées comme elle peut, mais elle s'enferme de plus en plus dans une sorte de mutisme dont seuls ses parents pourraient la sortir.
quant à nous.. et bien nous faisons comme nous pouvons. Les chambres de la taverne de Baile nous servent d'hospice. mais sans médecin.
Personne pour nous donner les soins nécessaires et certaines plaies commencent à s'infecter. Je suis inquiète. Pas pour moi. Pour les autres.
Mon moral est en berne je dois te l'avouer. La Natt qui rigolait avec toi sur la place de Montpensier semble être restée sur ce champ de bataille.
mais c'est mon sort, c'est ma vie, je ne m'en plains pas.
Donne moi de tes nouvelles, j'ai besoin de savoir que des Libertad vont bien..

je t'embrasse Mamour. ton sourire et ton humour me manquent

Natt


La mort balance sa faux, l'sang a été appelé par la terre poit'vine. Leur sang.
Libertad, sa famille, les siens. A terre, blessés, morts. Le poing cette fois se jette contre la pierre.
Enfouir la souffrance dans l'sang, à défaut d'pouvoir faire couler l'leur, sur l'instant.
Elle a r'fusé d'y aller, heureuse, calmée, elle a refusé d'se battre, d'les accompagner. Elle les a pas r'joints, elle a suivi sa route. Et ils sont tombés... S'sont battus. Et elle est loin. Le cri de douleur s'mue dans sa gorge en un cri de rage.


LIBERTAD !

Puis meurt alors qu'elle se laisse glisser sur le sol.
La pensée vole vers un Ange mort en voulant venger une môme. Evan's... La canaille libertadienne aux principes ancrés profondément dans l'âme d'çui sur l'épaule duquel elle aimait à poser sa tête quand ils étaient à Labrit.
Evan's et ses espoirs. Evan's qui s'tait battu y'a peu contre Eik.. pour l'honneur d'une Lune... Sa Lune... elle aussi au sol s'lon les dires d'Mamour.
Les paupières s'laissent couler sur les prunelles rendues noires par l'chagrin qui l'assaille. Ermy... la chauve chanteuse de grands ch'mins... Morts. Elle avait dit à plus tard, mais c'trop tard, plus d'espoir... L'sanglot s'étouffe en un grognement, l'Apo s'laisse pas gagner si facil'ment par la tristesse, nope, faudra en passer par la rage.
Son coeur, son sang réclame vengeance. Ceux partis lutter l'arme au poing contre les faucheuses, ram'nés en sang et sans vie dans une taverne périgourdine... L'ironie d'la situation lui échappe à cette seconde.
La pogne trouve la route d'l'épée, l'extirpant d'son fourreau, à plat sur ses paumes griffées... Libertad, ou le prix du sang...
L'Bire touché... Et l'Oiselle ? L'Andalou aussi est au sol... Fab... Et l'dernier échange épistolair'ment cinglant entre eux... n'pas lui avoir dit tout c'qu'elle avait à dire...
Les souv'nirs affluent avec la marée grondante qui assaille les falaises d'sa conscience mise à mal. Les images ensoleillées d'une Gascogne qui les avait rapprochés, tous. La teinte rouge d'un sang qu'ils avaient sur leurs mains, çui d'l'Excellence, quand ils l'avaient ram'née à la vie.
Et aujourd'hui qu'la leur est en danger, elle est là. Dans une ruelle languedocienne... De nouveau l'poing frappe le sol à son côté, meutrissant un peu plus les phalanges maltraitées, un craqu'ment, elle s'en moque...

La bulle de douleur est trop épaisse autour d'elle pour qu'elle s'rende compte d'l'utopie d'son idée... Prête à partir sur l'instant, l'arme à la main, l'goupillon ach'té hier sur une place du village dans les fontes, prête à aller meurtrir du poit'vin, à aller pourrir d'l'angoumois...
l'Apo réclame vengeance, elle r'fuse toute pensée qui la sortirait d'l'état second où elle s'trouve, oubliant sur l'instant ses préoccupations soudain si futiles...
Elle voit pas plus loin qu'le bout d'sa lame, pas plus loin qu'l'envie d'faire souffrir l'autre autant qu'elle a mal... Elle aurait dû être avec eux.
L'murmure s'fait aussi lancinant qu'la douleur qui transperce son coeur et son âme.


Eikorc... Bire... Fab... Sél... Natt... Ermy... Evan's... Mal'... Aphé...

Litanie d'noms d'corps souillés d'épées aveugles... Frappés pour avoir voulu venger une môme et une pacifiste.
L'monde part à vau-l'eau et la santé d'l'Apo s'met au diapason du sentiment d'culpabilité qu'elle ressent face aux siens.
Dualité alternative...
Conséquences difficiles à assumer.
L'amour des siens.
L'besoin nécessaire à la survie d'rester soi.
La culpabilité qui réveille l'Autre...
L'combat s'perd à chaque seconde...
Sans eux... elle n'est rien.
Seule, elle est restée elle même.
Et les a perdus...
L'combat s'perd un peu plus à chaque seconde où la rage gagne sa place à coups d'pensées veng'resses... l'combat s'perd quand elle voit d'vant elle l'corps d'son frangin, d'ses amis...
Quand elle imagine les grimaces d'Mamour alors qu'elle rédigeait c'te lettre d'malheur...

Faut v'nir la sauver elle aussi... sinon elle s'ra pas en état d'aller les voir, sinon elle s'ra elle aussi dans quelques jours étendue conn'ment dans un champ poit'vin ou périgourdin...
N'pas laisser la Sombre prendre le d'ssus... Apolonie aussi peut agir... Faut-il encore qu'elle ait des raisons d'le faire... faut-il encore qu'l'Apo la laisse faire.

Dans une ruelle du Puy, l'dos calé contre la pierre gelée, un après midi de décembre, une brunette aux mains ensanglantées s'maudit d'pas avoir suivi sa deuxième famille. Une jeune femme en prise avec elle même s'morigène. Et de ses iris azurés coulent un ruisseau salé qui trace des sillons d'un chagrin rageur sur ses traits durcis par la colère.
Et appelle à l'aide, d'toute la force d'sa conscience... Parce qu'elle veut pas d'venir l'autre... Parce qu'elle aura bientot plus l'choix... Parce qu'la vie semble pas vouloir la laisser en paix.


Libertad... Eikorc...

________________________
Alayn
- Rencontre avec soi-même -

L'après-midi est banal pour le vicomte, visite du Puys, habillé chaudement en ce mois de décembre, errant dans les rues de la ville à la recherche... à la recherche de quoi d'ailleurs ? D'un peu de calme, de tranquillité, de nouvelles choses à découvrir. C'est fait pour ça aussi les voyages, voir du pays, apprendre, découvrir, se retrouver, rencontrer de nouvelles personnes également...

Se retrouver avec soi-même, est-ce vraiment utile en cet instant ? Il est heureux, cela fait des mois que ce n'est pas arrivé, il est enfin lui-même. Fini la dépression, seul dans son domaine à se reclure et à se morfondre sur la perte d'un être cher, finie cette politique ducale qui avili les hommes, du moins lui, et plus que jamais il assume ce mandat tant décrié, à tord ? à raison ? question de point de vue. La prochaine étape sera cette lettre, cette patente à envoyer à sa marraine, celle qui se fait nommer La Douce, intendante de l'Ordre du Mérite du Bourbonnais-Auvergne, qu'il avait commencé à rédiger, se demandant si le ton employé était vraiment le bon... Après tout, il ne doit rien à personne, et cette médaille, cette babiole, il ne la souhaite pas plus que ça, pas après un an de la fin de son mandat ducal, c'est trop tard. Oui, la patente sera parfaite sur ce ton, celui des De Viverols, de son père, celui qui avait voulu séparer le Bourbonnais de l'Auvergne, ce grand homme qui repose aujourd'hui au Panthéon de ce même duché toujours unifié, ironie du sort. Mère lui a souvent dit, et encore récemment, Alayn ressemble beaucoup à son père, plus qu'il ne veut le laisser entendre, plus qu'il ne le souhaitait, avant.
Pourquoi ignorer le sang du Vicomte de Ravel qui qui coule dans ses veines ? Pourquoi avait-il voulu être différent ? Parce qu'il ne l'a pas connu, et que beaucoup lui disaient alors qu'il était enfant quel homme abjecte il avait pu être. Non son père n'était pas cet homme-là, il était un mari aimant, un homme d'honneur et ayant des valeurs sures, et aurait fait un père merveilleux.

Pourquoi toutes ces questions soudain ?
Un moment de doute ? De peur de se tromper de chemin à nouveau ?

Non, il ne se trompe pas, pas lui, pas encore. Pas cet homme qui a vu tomber des proches sur les champs de batailles bretons, ce guerrier qu'il est devenu grâce aux 45, à Arthur, à Oya, morts eux aussi... Et puis ce jour qui refait surface, et les jours qui ont suivi... l'enlèvement, les tortures, les cris de ses amis.
Des brèves qui lui reviennent, des flash. Il avait occulté cette période, il l'occulte toujours, préférant se raccrocher à des souvenirs meilleurs, à des rêves d'une vie qu'il souhaite construire à deux, avec elle.



- Découverte de l'autre -


Elle... Elle ? Apolonie ?
Oui c'est elle, il l'aurait reconnue même au milieu d'une foule d'une centaine de personnes, mais là elle est seule, courant à perdre haleine dans les rues du Puys, passant comme un éclair devant lui à quelques dizaines de mètres, comme si elle fuyait... quoi ? Il n'y a personne derrière elle, elle ne semble pas être suivie.

Ce n'est plus le moment de s'apitoyer sur son propre sort, le pas est emboité et la foulé plus rapide. A l'angle de la rue il la cherche du regard, elle n'est déjà plus là, alors il se met à courir lui aussi, continuant dans cette rue dans la même direction que son aimée, ralentissant à chaque croisement pour tenter de l'apercevoir.
Et enfin il la trouve, dos à un mur, assise à même le sol au bout de cette ruelle, épée au poing. Instinctivement le vicomte porte une main à la garde de la sienne, prêt à affronter le premier qui qui viendrait s'en prendre à elle... Il approche doucement, sur ces gardes, puis ce poing qui frappe le sol, il est encore loin mais il lui a semblé entendre les os de cette main si douce craquer sous l'impact violent. La sienne s'éloigne de son épée, il n'y a pas d'ennemi, son visage se tord de douleur pour elle.

Il approche encore, quelques mètres les séparent. Des larmes perlent le long des joues de sa dame, un souffle qui se meurt...


« Libertad... Eikorc... »

Plus que quelques pas, elle ne fait pas attention à lui, mais il ne sait pas quelle réaction elle va avoir, l'instinct de guerrière est bien présente en elle. Il se souvient de ce jour à Montbrisson, dans les bois alors qu'à une vingtaine de mètres elle l'avait entendu arriver derrière elle et était prête à lui sauter dessus, dague à la main. Comme pour ce jour, il s'annonce pour ne pas la surprendre.

Apolonie... Mon amour ?

Le ton est doux, les yeux compatissants, et un début de sourire appelé par la tendresse se dessine sur ses lèvres.
Pourquoi ses larmes ? Pourquoi cette violence ? Sa main saigne, ce n'est pas dû qu'à ce coup sur le sol, il y en a eu d'autres
Qu'est-il arrivé ?
Il hésite un instant et efface les pas qui les séparent encore, gardant du coin de l'œil la lame qu'elle tient toujours dans sa main.

_________________
--Apo.


Ça fait mal. Ça irradie dans sa main, ça remonte, gambadant le long des nerfs, jusqu'à titiller là où déjà la douleur est immense.
La souffrance en petits cailloux qui s'amuseraient à rouler sous sa peau, à tel point qu'elle voudrait se l'arracher. Ne plus avoir à rester dans ce corps meurtri. Bulle prête à éclater, qu'elle crèverait bien à coups d'ongles...
Un éclat vif sur sa lame, une lumière qui trouve son r'flet sur l'acier brillant... Elle s'rappelle la première fois qu'elle a du la laver c't'épée, rinçant le sang séché d'un inconnu, elle s'souvient d'la sensation qu'ça procure, d'planter son arme dans l'corps d'quelqu'un...
La peau qui s'écarte, l'sang qui lubrifie l'métal comme pour faciliter la blessure, l'craquement d'l'os qui s'coue le poignet... La lueur d'sadisme brille d'un éclat étrange dans l'azur assombri d'l'Apo, avant d'se voiler d'une image.
C'est dans l'corps des siens qu'la lame s'est plongée, c'est l'sang d'ses amis qui a coulé à l'ouest, leurs âmes qu'ont été libérées du poids d'la vie.

Et l'orage gronde en elle, l'envie d'vengeance qui s'taille sa route en elle, l'écume d'la rage qui roule sur les vagues d'la colère. La marée s'fait houle, tout en elle bouillonne...
Elle s'voit déjà là-bas, l'arme à la main, écrasant l'goupillon sur l'crane des assassins, traversant leur corps de couards de son épée... Le sang appelle le sang, Bire avait raison... lui qui le premier l'avait r'connue au milieu des sourires d'Apolonie. Lui aussi était tombé...

C't'alors que l'poing s'en va d'nouveau frapper l'sol qu'elle l'entend.


Apolonie... Mon amour ?


L'éclair azuréen s'lève immédiat'ment jusqu'au visage du vicomte. Dire qu'le regard est vide s'rait mentir, il brille, pétille même. Mais il n'y verra pas la malice et la tendresse qui s'y trouve normal'ment quand elle le voit.
Les prunelles sont presque noires, la mâchoire crispée, les traits du visage sont durs. L'Apo est bien moins douce qu'l'autre, et ça s'voit. L'geste est vif, assuré. Elle s'relève, et lui fait face. La main abîmée sur l'coté, l'épée toujours à dextre.
Coupable.
Elle est coupable.
Elle est là.
Ils ont blessés.
Elle est heureuse.
Ils souffrent.
Trahis, elle a trahis.
Et LUI. Lui la fait sourire.
Elle est coupable.

La colère s'déplace... Trop lourd à porter c'poids sur ses épaules, ça l'empêch'rait de s'battre, ça la forcerait à s'poser des questions qu'elle r'pousse d'puis qu'elle a r'çu ces lettres.
Elle l'foudroie du r'gard. Et l'invective.


Sont morts ! Rien d'doux dans c'monde.
Libertad, Alayn, l'sang appelle le sang.


Sans même s'en rendre compte, elle porte les phalanges ensanglantées à ses lèvres, léchant les blessures, ravivant la douleur d'l'os brisé, mais goutant l'sang. L'sien. Crevant d'envie d'en faire couler d'autre.
L'port de tête est fier, bravache... L'regard perçant et dur. Un air d'défi sur la trogne, essaie d'm'en empêcher tiens, qu'on déconne...
T'peux plus rien... j'suis là, elle est battue. J'suis l'Apo, j'suis pas Elle. J'suis pas celle qu'tu connais. J'suis l'Autre. T'peux plus rien...
Et en elle, au fond, bien planqué, l'appel à l'aide résonne, tordant les tripes, f'sant battre un coeur en pleurs. La pogne rougie essuie rageusement une larme faible, laissant une trace carmine sur la pommette qui n'a rien d'timide pour l'coup. Aide-moi...


Vouliez m'connaitre ? Bienv'nue dans mon monde.
C'lui où les gens crèvent pour des idées et où tout l'monde s'en carre.
C'lui où une gamine d'5 ans peut s'faire déchiquetée par une armée trop trouillarde pour s'en prendre à ceux qui savent s'battre.
C'lui où ceux qu'j'aime finissent au sol, inexorablement, c'lui où ça meurt.
C'lui où j'suis pas avec eux....


L'aveu s'fait, comme par surprise, lueur bleue dans l'azur qui tente de s'refaire sa place, aide-moi...

________________
Alayn
La tête se tourne vers lui, le regard est froid, mais animé par une furie sans nom, ce ne sont pas ces yeux d'un bleu profond dans lequel il aime tant se noyer d'ordinaire, non... mais il ne détourne pas les siens, au contraire. Elle se relève d'un bond pour lui faire face, lui ne bouge pas d'un pouce, les yeux toujours dans les siens, il veut y lire le moindre détail, connaître le pourquoi de cette rage qui est sienne, de cette douleur.
Les premiers mots qu'elle lui lance résonnent dans son crâne.


« Sont morts ! Rien d'doux dans c'monde.
Libertad, Alayn, l'sang appelle le sang. »


Il redoutait cet instant, mais jamais il n'aurait été capable d'imaginer qu'Apolonie ai pu être cette femme qui se trouve devant lui. Ces gestes, ceux d'une bête, elle lèche ses propres blessures, son propre sang... le sang.
« Le sang appelle le sang » Ce n'est pas la prime fois qu'il entend cette expression, pourtant il n'a jamais été confronté directement aux libertadiens, ces hommes et ses femmes tant redoutés... Pourquoi d'ailleurs ?
Des prises de mairies ? Ce ne sont pas les seuls à s'adonner à cet exercice, mais eux ont des raisons valables si il en croit les on-dit.
Des meurtres ? Il n'y a pas de combat sans morts, ça il le sait à présent. Oui la vie est belle dans un castel, mais ce n'est pas la réalité, ce n'est pas la vie de la majorité des gens qui vivent en ce monde. Qu'ils sont heureux ces dirigeants qui restent bien au chaud dans leurs hautes tours, derrière leurs remparts imprenables, qu'il était heureux l'héritier de Ravel dans ce monde parfait qu'était le sien il n'y a pas encore si longtemps. Lui aussi a connu le sang, le prix du sang versé, et de celui que l'on fait couler, la perte d'un être qui lui était proche, plus proche encore qu'il ne l'avait imaginé.

Aujourd'hui c'est elle qu'il aime, Apolonie, et il ne ne veut pas la perdre, il ne pourrait pas s'en remettre, pas cette fois-ci. Mais ce n'est pas elle qui lui parle, qui le regarde, ces yeux là ne sont pas pas les siens, définitivement pas. L'étonnement est là lorsqu'elle poursuit, mais il ne laisse rien paraître, le ton qu'il emploie est toujours aussi calme.


Ce n'est pas Votre monde, c'est notre monde à tous, à tous ceux qui le voient tel qu'il est réellement.
Je suis désolé pour vos proches, vos amis, pour cette fillette...
L'Homme est un être vil et la vie cruelle. Les larmes ne ramènent pas les morts, la violence non plus, et rien n'apaise la souffrance si ce n'est le temps.


Il ne sait pas qu'au fond d'elle une véritable bataille est entrain d'être menée entre une Apo et une Lonie, que chaque geste, chaque mot peut faire pencher la balance d'un côté ou de l'autre. Mais il pèse chacun des siens, ne voulant laisser aucune ouverture à celle qui lui fait face. Il cherche dans ce regard noir qui le dévisage le bleu de ceux de son aimée, une lueur... d'espoir.
Il n'avait pas bougé depuis, il ne sait s'il le doit... L'envie de la prendre dans ses bras, de la laisser éclater en sanglots comme il eut été normal qu'elle le fasse à cet instant... non, il est encore trop tôt, le combat n'est pas gagné, la lutte sera dure. Il ne tend pas ses bras, il ne la touche pas, un simple pas en avant vers elle, rien de plus qu'un espace entre eux qui se réduit.


Mon monde aussi est fait de morts, de pertes d'êtres chers à mon cœur.
Nous avons tous nos peines, mais il ne sert à rien de les garder pour soit. Nous sommes deux, je suis là pour vous, tout comme vous vous êtes là pour moi mon amour, je le sais. Nous savons que nous pouvons compter l'un sur l'autre, parce que nous avons confiance, mutuellement.


Toujours la même posture, surtout ne pas faire de geste menaçant, provocateur. Il est conscient de sa vulnérabilité en cas d'un éventuel sursaut de colère d'Apolonie, toujours son épée à la main. Mais il n'en a cure, jamais il ne lui viendrait à l'esprit de lever la main, il demeure néanmoins sur ses gardes, prêt à s'écarter au moindre signe d'agressivité, le visage serein.
_________________
--Apo.


Son ton est calme. Il la regarde posément. Il est là, immobile, devant elle. Elle bouillonne. L'azur orageux lance des éclairs.
Bien sur elle avait r'fusé d'les suivre bien avant d'le revoir. Mais l'fait d'être là, avec lui, renforce l'sentiment d'culpabilité. Pourquoi tu m'rends heureuse, hein ? Pourquoi tu m'fais sourire quand ils crèvent là-bas ? Pourquoi t'essaies d'm'empêcher d'souffrir là ?
Il fait un pas, elle se raidit. Les doigts se serrent sur l'pommeau, l'Apo en réflexe conditionné, s'battre avant d'parler, tout est agression... Faut s'défendre...
Mais il n'bouge plus. Un pli qui s'creuse sur l'front. Elle comprend pas. Il comprend pas ? Comme elle souffre ?
Et il parle... Elle hurle. Elle lui crie ce qu'elle ressent, il la met en colère, elle lui balance ses réponses à la trogne, parc'qu'elle est coupable. D'pas y être.


et rien n'apaise la souffrance si ce n'est le temps.

Quel temps ? Le temps soigne rien, sauf si on veut oublier...
C'pas l'temps, vous confondez, c'est l'sang... C'lui des autres...


Nous avons tous nos peines, mais il ne sert à rien de les garder pour soi.


Y'a des peines plus dures... Et j'compte pas l'garder pour moi.
J'compte bien leur faire partager, à ces cons, qu'ils souffrent autant qu'les miens qui sont tombés.


L'sourire s'glisse, sardonique, plus grimaçant qu'joyeux, tranchant.
Oui, c'est c'qu'elle veut là... les r'joindre, et faire couler l'sang d'en face. Quitte à en crever, quitte à r'trouver les siens dans un ailleurs.
Il comprend pas. L'Apo s'bat, la douleur est là, furieuse rivière qui roule dans ses veines. Qui brule sa peau d'un chagrin immense qu'Apolonie n'peut pas gérer. 'Reus'ment qu'elle est là, l'Autre, pour l'faire pour elle.
Et toujours c'sentiment d'les avoir trahis, lancinant, qui n'permet pas l'pardon.

Son frère !
EIKORC ! La Lune ! SELENE ! La fillette ! LIBERTA ! L'Andalou ! FABLITOS ! L'Ange... EVAN'S ! L'Oiselle... APHELIE ! Le Rasé... BIRELI ! L'Borgne... MALEUS ! La 'tiote... AYE ! La coureuse de ch'mins... ERMY ! Mamour... NATTASCHA ! Minette... AMBERLE ! La Souris... NEA ! L'Doc... HIJI !

Sur une plaine, tombés... Leurs corps, souillés. Leurs idées, incomprises. Et elle, si loin... L'calme en volonté ancrée, vivre tranquill'ment, s'reposer... Et les abandonner...

Morts, blessés, loin ! Tous ! Frappés !
On peut faire c'qu'on veut, la terre réclame son lot d'sang, et j'tais pas là !
C'est l'leur qui a coulé...


Nous sommes deux, je suis là pour vous, tout comme vous vous êtes là pour moi mon amour, je le sais.

Non, j'suis pas là. Vous comprenez pas ? J'suis PAS là ! Pas quand il faut...

Sa souffrance s'marque sur l'visage. Les sillons salés ont creusé les joues, s'taillant un ch'min dans les traces sanguines qui maculent la peau d'l'Apo.
Les prunelles furibondes évitent soigneus'ment d'se poser dans l'regard presque doux d'Alayn. Non, j'veux pas qu'tu m'calmes. Non, j'veux pas qu'tu restes. Non, j'veux pas qu'tu m'aimes. T'comprends pas ? Ceux qu'j'aime, ils meurent, ils souffrent. J'veux pas...


Laissez-moi...

Aide-moi... Sauve-moi...
L'mouv'ment d'recul s'fait sous l'impulsion d'l'Apo, s'coller au mur, t'approche pas...
L'corps est crispé, tendu, elle s'tient prête à s'défendre, à lui faire mal pour éviter d'le blesser plus tard... Pour éviter d'être malheureuse plus tard...
L'attaque comme défense...
Mal...
Si mal...
COUPABLE !
Loin...
Si loin...
COUPABLE!
Heureuse...
Avec lui...
COUPABLE !


Laissez-moi !


Aide-moi...

___________________
Alayn
Il encaisse les cris sans sourciller, il la laisse déchaîner sa haine sur lui. Mais une chose est sure, il ne sera pas son souffre douleur, pas lui, il ne la laissera pas prendre le dessus. Le visage se fait plus terne, le regard moins doux, mais pas menaçant pour autant, surtout pas. Elle veut crier ? Qu'elle crie, ce sera toujours une douleur physique infligée à elle-même en moins, un coup d'épée sur un homme en moins.
Elle pleure, elle crie... elle souffre. Jamais il n'avait vu tant de souffrance chez quelqu'un, la culpabilité qu'elle ressent est grande, très grande. Trop grande. Ce n'est pas de sa faute s'ils sont tombés. Elle s'en veut de ne pas avoir été avec eux, elle n'aurait pas pu empêcher ce massacre, tout au plus elle aurait fait une victime de plus, un corps supplémentaire étendu sans vie sur ce champ de bataille. Mais tout ceci il ne peut lui dire, ça ne l'apaiserai pas, au contraire. Un pas en arrière, elle se retrouve à nouveau dos au mur, son regard fuyant celui du vicomte.


« Laissez-moi... 
...
Laissez-moi !»


Ô non je ne te laisserai pas...

Ce serait s'avouer vaincu que de partir, perdre cette lutte qui se mène et qui devra se terminer par le fer, le sang, les larmes ou bien sa fuite à elle. Il n'y aura pas de happy end, pas cette fois, par pour une plaie si grande, une douleur si intense, à jamais elle en souffrira.
Il entrevoit de plus en plus la possibilité d'un affrontement, se prépare intérieurement à subir un assaut, tous ses muscles sont tendus, la mâchoire se crispe, il ne s'en aperçoit pas. La colère monte en lui, il doit la contenir, il ne faut pas en arriver là, la violence engendre la violence... Et c'est une femme, pas n'importe laquelle, il l'aime, il ne veut pas lui faire de mal.
Mais elle en ressent un bien plus grand, de mal... il veut l'aider, et qu'importe le prix, il ne veut pas la perdre...

Pourquoi ? Pourquoi me fais-tu subir ça Apolonie ?

Les larmes montent alors qu'il est sur le point de craquer. Les nerfs vont lâcher, il le sait, il le sent. Il doit agir, qu'importe ce qui arrivera.
La distance qu'elle avait établi entre eux et qu'il respectait jusqu'alors est franchie d'un pas vif, ses mains viennent chercher les poignets d'Apolonie pour les plaquer contre le mur avant qu'elle ai eu le temps de bouger. Ses propres poings heurtent la pierre, la violence du choc lui extirpe une grimace, il ne la lâchera pas, il la maintient fermement. Sa voix est presque autoritaire, les yeux fiché dans l'azur de la jeune femme, il la force à le regarder.


Non, je ne partirai pas... jamais je te laisserai.

Il doit parler, ne pas lui laisser le temps de faire quoique ce soit, s'il lui laisse le temps de réagir il est fichu. Il ne perd pas de vue le fait qu'elle peut toujours riposter, un coup de tête, ses jambes sont libres également. Il appuie d'avantage sur son bras droit pour tenter de lui faire lâcher son arme, gagner du temps, la distraire.
Pour la première fois depuis le début de l'échange il la quitte des yeux et rapproche son visage jusqu'à ce que ses lèvres soient à hauteur de l'oreille d'Apolonie. Il parle distinctement, mais sa voix n'est pas douce, pas tendre, il est franc.


Je t'aime Apolonie, comme tu es... ne t'en déplaise à cet instant. Et rien ne pourra effacer ce que je ressens pour toi.
Alors non, je ne partirai pas, je resterai à tes côtés, toujours, quoiqu'il arrive.
Et si toi tu veux partir, là, maintenant, il faudra d'abord me tuer. Si je dois mourir je préfère que ce soit par ta main que par celle d'un autre.


Le défi est lancé, il sait parfaitement qu'il n'aura aucune chance, il est en position de faiblesse, n'a aucun moyen de se défendre et le coup peut venir n'importe quand, l'obligeant à lâcher prise, ce qui laisserai à son adversaire tout le loisir de le battre d'une seule frappe.
Il est prêt à payer ce prix, il le sait maintenant, c'est plus qu'une évidence à ses yeux.

_________________
--Apo.


Elle n'l'a pas vu v'nir. Rageus'ment aveugle, elle l'a pas vu approcher. Elle s'attendait pas à ça. Pas d'sa part. L'choc contre l'froid d'la pierre résonne dans son esprit, la grimace d'Alayn trouve son r'flet sur ses lèvres qui hurlent sa douleur, alors qu'l'os brisé fait vibrer les nerfs.
Son épée r'joint l'sol dans un fracas métallique. Désarmée, acculée, il lui parle, réduisant l'monde qui les entoure à leur simple face à face. Bousculant l'Apo dans ses bases.
Désarmée.
Prise au piège.

L'a pas l'habitude l'Apo qu'on lui force la main. Qu'on s'pense plus fort. L'a pas l'habitude qu'on l'aime non plus. Qu'on lui dise. L'a pas l'habitude d'tout ça.
L'Apo l'est forte. L'Apo elle fait mal, elle s'bat, elle crie, elle s'moque. De vous, de tout, de rien. Toujours. L'Apo apprécie pas qu'on l'aime. L'Apo elle r'fuse d'aimer.
Ça la tue.
Ça les tue.


Non, je ne partirai pas... jamais je te laisserai.

Elle s'prend l'tutoiement comme une claque en pleine trogne. L'azur s'fait attraper par l'regard d'un vicomte qui d'jà s'en échappe pour s'approcher encore.
L'réflexe premier s'rait d'mordre, d'lever un g'nou... C'est c'qu'elle devrait faire là... S'tordre les poignets jusqu'à les libérer, l'frapper, fuir c'qu'il lui offre, lui faire mal pour continuer d'souffrir en paix...


Non, je ne partirai pas... jamais je te laisserai.

Ça s'répercute en caboche comme un écho qui r'fuserait d'lui foutre la paix. Ce "tu" qui ouvre une nouvelle dimension. Il la tient, elle est là... Tournant la tête, n'voulant plus subir l'regard du vicomte menacé par l'humidité chagrine qui a déjà mouillé le sien.
Mais l'souffle glisse jusqu'à son oreille. L'ton n'a rien d'doucereux, dommage, l'Apo sait qu'elle y aurait puisé la force d's'échapper.


Je t'aime Apolonie, comme tu es... ne t'en déplaise à cet instant.
Alors non, je ne partirai pas, je resterai à tes côtés, toujours, quoiqu'il arrive.
Et si toi tu veux partir, là, maintenant, il faudra d'abord me tuer.


Un coup dans l'coeur. L'envie qui grimpe, s'nichant dans les tripes, courant jusqu'au coeur, l'serrant, emprisonnant l'Apo. La t'nant encore plus fermement qu'les mains d'Alayn n'maintiennent ses bras contre l'mur.
L'vicomte est allé creuser l'âme, extirpant celle qu'il aime d'son carcan d'douleur, effleurant d'sa peau chaude la joue maculée. Il a creusé d'ses mots l'caveau d'l'Apo. N'reste qu'une faille. Et elle s'en empare.
Comme ça.
D'une voix froide.
Parce qu'il faut.
On n'peut pas lui faire de promesses.
Ça s'trahit les promesses.
Elle n'veut plus faire de promesse.
Mais les mots, si simples, r'fusent de franchir la barrière d'ses lèvres.

Il est là, il est contre elle. Il l'aime. Elle souffre. D'un battement d'cil elle ancre l'azur dans son r'gard. D'une respiration elle accepte de l'croire. D'un clin d'coeur elle veut bien l'aimer.
Et la tension tournée vers l'sang, l'corps en d'mande de souffrance s'fait messager d'l'élan. Et la colère r'tombe, laisser l'chagrin creuser sa place. Une phrase qui un jour a flotté dans la moiteur d'un été gascon traverse l'esprit torturé... "T'as l'retour en souffrance sur la gueule" ... Non, j'veux plus.
Sur sa hanche un "On verra..." taillé à la dague dans une taverne ang'vine, encré du noir d'l'espoir qui l'habitait, malgré tout, même là bas... qui chatouille. Et elle r'prend sa place. Et elle l'apprivoise. Et elle la r'fout au fond, tout au fond d'elle. C'pas l'temps, pas l'jour, pas l'heure. J'veux plus...
Les choix s'assument, les conséquences aussi...
Elle sait...
C'qu'elle voulait.
C'qu'elle a eu.
L'bonus en plus...
Sourire.

Faible, mais présent. Elle voulait pas s'battre. Elle voulait pas crever. Elle voulait vivre. C'est c'qu'elle fait. Ils ont fait leurs choix. Coupable ? d'quoi ? D'pas être en sang ? D'pas gagner l'concours d'cicatrices avec son jumeau ? D'pas les avoir suivis ? Chacun sa voie, Libertad, nope ? Tant qu'ça fait c'que ça peut pour aider... Trahison... Elle trahirait si elle r'ssentait rien. Elle n'trahit pas en restant en vie.
L'air frais du Languedoc s'inspire en révélation, teinté d'l'amour d'un auvergnat qui la sauve.
Il l'aime.

Et elle s'laisse aller. Et elle cesse de résister. Et elle s'retrouve, pour mieux s'perdre dans l'étreinte qu'elle lui propose, d'un souffle qui s'glisse dans son cou, d'une larme triste qui s'échappe de son oeil, d'une phrase lâchée avec un accent terriblement sincère.


Tu n'as pas peur ? Tu ne vas pas fuir ?
Tu ne vas pas... mourir ?


L'iris bleu brille d'un éclat nouveau... Avouer qu'elle n'est pas insensible; qu'il l'ait vue, dans son ensemble... Qu'il soit là, quand même... Ils sont blessés, morts... Elle est là, en vie. Elle aime. Elle l'aime. Et armée de ses sentiments, elle compte bien aller les voir, les soigner, pleurer sur leurs tombes ou leur rendre hommage... Mais ne plus s'oublier... S'accepter, et assumer ses choix. Et son choix, elle l'a fait. Lui.

Je t'aime.

_______________
Alayn
Rien... rien ne vient. Contre toute attente aucun coup n'est donné, elle ne tente même pas de se débattre... Pourquoi ? Est-ce un leurre ? Pour qu'il relâche prise et qu'elle en profite pour frapper plus fort après ? La rage semble pourtant bien se faire plus faible, sa joue effleure celle du vicomte, des larmes coulent, la lueur sombre dans ses yeux disparaît.
Une invitation à se rapprocher encore, une étreinte. Les battements de cœur du jeune homme se font moins rapides ; le choc, la surprise, plus lointain. Reste cet instant de tendresse inespéré qu'elle lui propose. Lentement les bras d'Alayn entourent la jeune femme, il sait qu'elle ne pleurera pas, pas plus que ce sillon tracé sur sa joue à cet instant. Il aurait tant envie de se laisser aller avec elle, mais non, il faut rester lucide. Accepter sa peine mais rester lucide.

Il sait ce qui a déclenché chez elle cette douleur, sa réaction est parfaitement normale, elle se sent impuissante, elle a l'impression de les avoir trahis. Là où certains seraient tombés dans une tristesse profonde, elle s'est armée d'une folie meurtrière, aveugle, pour venger ceux qui sont tombés. Et lui, il doit être là pour l'en empêcher, s'imposer face à cette rage pour se faire entendre, lui faire entendre raison. Raison, un bien grand mot... où se situe la limite entre raisonnable et non raisonnable ? Non là il est question d'une vie à conserver, celle de la femme qu'il aime. Il le fait pour lui, mais aussi pour tous les autres proches d'Apolonie, son frère, qui peut-être n'est pas mort, et bien d'autres...

A cette question posée, ce
« Tu n'as pas peur ? Tu ne vas pas fuir ? Tu ne vas pas mourir ? » il se contente d'un simple « Non » soufflé à son oreille.

D'une caresse sur sa joue il essuie cette perle salée, plonge son regard dans l'azur qu'il retrouve enfin, il parle calmement, sincèrement.


Non je n'ai pas peur, je te l'ai dit, je t'aime, toi, telle que tu es. Et celle que j'ai en face de moi c'est toi.
La fuite... je ne sais pas ce que c'est. Une fois j'ai abandonné dans ma vie, une fois seulement, il y a longtemps, et je ne l'ai pas fait pour moi. Je ne suis pas de ceux qui fuient.

Et... mourir ? Un jour il le faudra bien, tout comme toi... Avant que ce jour n'arrive je compte bien profiter de chaque instant, avec toi.


« Je t'aime »

Je t'aime aussi Apolonie.
Je ne sais pas si un jour je devrais encore m'opposer à toi ainsi, mais si c'est le cas, j'agirai de la même manière. Je préférerai ne pas avoir à le faire, mais je ne veux pas te perdre, alors oui je le referai.


Une main qui vient chercher celle, blessée, d'Apolonie, pour examiner les dégâts, ne pas ignorer ce qu'elle s'est infligé, accepter son autre.

J'ai encore beaucoup à découvrir de toi, et je le veux sincèrement, je veux tout savoir... Ca prendra le temps qu'il faudra... je serais patient.

Il est calme, serein, sincère. Il la quitte un instant du regard pour se baisser, il ramasse l'épée tombée à terre pour la lui tendre, la garde dirigée vers elle ; comme pour appuyer ses mots : non, il n'a pas peur. Une autre main qui vient relever une mèche de cheveux, puis descend jusque dans sa nuque. Le baiser est offert, tendre, amoureux. Puis les lèvres se séparent.

Nous nous rendrons où ils sont si tu le souhaites, je viendrais avec toi.
_________________
Apolonie
[... Ou quand les limites se reculent...]

Une main sur sa joue qui y cueille la marque de son chagrin, un souffle qui l'apaise, un baiser d'une tendresse chaleureuse qu'elle fait sien, un instant. Dans la main d'Alayn son épée, sur laquelle elle pose un azur troublé. Un éclair fugace, une vision rougie de ce qu'elle pourrait en faire, avant de tendre la main indemne, rangeant le métal dans son fourreau, refusant la colère qui ourdit au fond d'elle, puisant dans le regard d'Alayn la confiance recherchée.

La main dont il s'est emparée lui fait mal. D'une douleur qu'elle supporte pour mieux faire taire l'Autre. L'os est brisé, elle en est sûre. Une chance qu'elle ne soit pas gauchère... Elle sent peser sur cette blessure le regard d'Alayn... elle tremble de sa réaction, de ce qu'elle vient de faire. De ce qu'il a vu d'elle... Les paroles se veulent apaisantes, elle les entend, de là à les accepter il y a encore un pas.


Je ne suis pas de ceux qui fuient.
J'ai encore beaucoup à découvrir de toi, et je le veux sincèrement, je veux tout savoir...


Et une fois qu'il saura tout ? plus que ce qu'il a déjà pu deviner d'elle à l'instant... Sera-t-il de ceux qui partent ? Se rapprochant encore de lui, nécessaire rempart de la présence du vicomte contre sa rage qui se calme mais ne s'éteint pas, elle en frissonne. Sans lui, dans cette ruelle, elle aurait sombré... Sans lui, elle serait partie, inconsciente folie vengeresse d'une coupable qui courait à sa perte. Il est là. Il l'a vue, et il est là.

Nous nous rendrons où ils sont si tu le souhaites, je viendrais avec toi.


La logique voudrait qu'elle s'y jette, elle se sait encore fragile de ce sentiment confus de trahison et de chagrin qui s'entremêlent de colère pour mieux l'entrainer. Le temps de la route jouera pour elle, pour eux... Elle lève un regard reconnaissant vers les prunelles aimées. Il est là. D'un sourire d'une faiblesse marquante elle le remercie. D'un voix rendue rauque tant par le froid que par les cris, elle lui répond, le visage enfoui dans le cou de l'auvergnat.

Tu sauras. On va parler...
Merci...


Les jambes flagellent, mais elle se tient pourtant droite. La force de l'Apo l'a quittée pour un moment... Le temps de s'apprivoiser de nouveau, comme elle avait su le faire à Moulins... Se servir de ce dont Apo est capable pour faire écouter Apolonie, y piocher juste ce qu'il faut de hargne pour avancer... Ne plus se laisser submerger... Et de sa main droite se saisir de celle d'Alayn.

Viens...

Un peu plus loin, dans le méandre des rues languedociennes, celle où se trouve leur auberge. Un coin de chaud au milieu du brouillard de l'hiver qui s'annonce rude. Un peu de chaleur qu'elle puise dans l'amour qui les unit au milieu de la détresse qui l'étreint en pensant à ses amis, à son frère. Là-bas, ils pourront discuter, apprendre à se connaître... Avant de reprendre la route... très vite. Les voir. Le voir. Les présenter l'un à l'autre. Espérant qu'elle le puisse... La pression des doigts sur la main d'Alayn s'intensifie. Tu m'as sauvée... aime-moi.
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Co-fondatrice avec Amberle du fan club de Constant Corteis.
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