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Un phare dans la nuit ou le suplice.

Gorborenne
[Une nuit de fin d'été comme tant d'autres,.... enfin, pas tout à fait....]


Sur les Terres d'Arquian règne le calme nocturne. La voûte étoilée étend son manteau d'un horizon à l'autre, se drapant ça et la de voiles cotonneux, annonçant la venue des pluies d'automne dans les prochaines semaines. Le vent fait frisonner les cimes de futaies s'étendant au pied des collines, arpentant les vallons de leurs colliers d'émeraude.

Castel Arquian, à demi-dissimulé entre les arbres, surplombant la chênaie à l'Est, les vignobles au Sud-Ouest, dressant son enceinte comme un bouclier isolant du monde. Le long de la muraille, le logis des Dragons, fiers combattants au service du Baron. Dans les alcôves du dortoir, le sommeil règne en maître à cette heure tardive de la nuit. Hommes et femmes profitent des quelques heures de repose que leur train de vie leur accordent......

Enfin, pas tous. Au fond du dortoir, dans la dernière alcôve, un homme n'arrive pas à trouver le sommeil. Le brasier qui s'agite devant ses yeux à chaque fois qu'il les ferme lui refuse de s'endormir tant que son corps exténué ne rends pas les armes. Chaque nuit, il passe des heures et des heures à se retourner sur sa couche, en proie à ses tourments, pour ne s'effondrer que peu de temps avant le lever du Soleil....

Mais pas cette nuit-là...

Répondant à un appel silencieux, le Chauve se lève de sa couche et chausse ses bottes et ses braies. D'un geste mécanique, il se drape dans sa couverture et sort de son alcôve. Directement sur sa gauche, une petite porte au lourd battant en chêne ouvre sur le rempart. En suivant le chemin de ronde, après avoir contourné les bâtisses des écuries, on atteint l'endroit où passé et présent se rencontrent. Là où la muraille du château se fond avec l'ancienne enceinte. Celle-ci remonte à flanc de colline, disparaissant de temps à autre quand la roche naturelle suffit à faire rempart. Gorborenne n'est encore jamais venu jusqu'ici, c'est la première fois qu'il escalade le promontoire auquel vient s'adosser le château. Passé la ligne de crête, le mur redescend un peu pour se dissoudre dans un aplomb rocheux d'une demi-douzaine de toises de haut.

Devant lui, une masse imposante jette un écran de noirceur, dessinant une ombre effrayante sur le ciel parsemé d'étoiles. L'antique Donjon des temps les plus reculés d'Arquian. Celui-que l'on ne peut manquer quand on entre sur les terres par les cols du nord, mais qui une fois sous le couvert des arbres, disparaît de l'horizon, redevenant souvenir parmi les histoires qu'il renferme.

La porte massive qui en barre l'entrée semble sceller quelque lourd secret qu'il ne serait pas judicieux de remuer.... Pourtant..... Elle n'est pas fermée. Une lourde poussée de l'épaule et le Chauve arrive à la faire pivoter sur ses gonds, dans un grincement d'outre-tombe. D'ailleurs, l'odeur d'humidité et de renfermé qui s'échappent de l'intérieur, aspirées par un courant d'air filant comme un fantôme ont tout pour rappeler les parfums de morts des catacombes.

À pas lents, comme si craint de troubler quelque repos, Gorborenne pénètre au bas de la tour. Si dehors il fait sombre, à l'intérieur, l'obscurité à quelque chose de dévorante, et le Chauve arrive à peine à distinguer le bout de son bras tendu dans la pénombre. Posant la main sur le mur, il avance doucement, à l'aveugle, jusqu'à ce que son pied vienne buter sur quelque chose de dur, qui ne remue pas. À tâtons, il finit par comprendre que ce qu'il a heurté est la première marche de l'escalier montant au sommet du Donjon.

Suivant comme un murmure, un pied puis l'autre, avec d'infinies précautions, il gravit lentement les volées de pierre, sous se doigts, il à l'impression de sentir comme une respiration émanant de l'épaisse muraille, comme un souffle insidieux et insistant, mais il continue à monter......

Durant ce qui semble une éternité, il grimpe peu à peu l'escalier au allures interminables, puis brusquement, sans prévenir, son poing tendu devant lui vient heurter violemment un obstacle invisible, qui sous le choc s'effondre pour laisser place à une large embrasure de porte dont il vient de défoncer le battant dans un grand fracas de bois qui éclate......

Étrange sensation que d'être ébloui par un ciel nocturne........

Il lui faut quelques instants pour que sa vue s'adapte à l'assaut de la clarté stellaire, pourtant si faible, mais Gorborenne a déjà compris qu'il vient de mettre pied sur la terrasse au sommet du Donjon.

Il reste là un moment, à contempler l'horizon qui se dessine sous la voûte céleste, les yeux perdus dans l'océan infini des étoiles sans nombres....... Le calme....... Perdu au milieu d'une mer de silence, comme s'il était seul au sommet du monde....... Assis dans l'ouverture d'un créneau, adossé au merlon, il resta longtemps le regard voguant au loin, et finit par s'assoupir,....... serein,......

Pour la première fois depuis longtemps.....


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sadnezz.
[ Une nuit de novembre comme tant d'autres.... enfin, pas tout à fait....]

La nuit est tombée sur Arquian. Le calme plat règne sur les terres du baron. Tout le monde dort, ou presque. Sadnezz marche vers les écuries, soucieuse de visiter sa monture laissée au Vouguier... L'homme a un regard étrange, et la brune lit souvent les miroirs de l'âme pour accorder confiance ou non . Pour celui ci c'est non, il n'est pas fiable, sauf peut être pour son travail fastidieux. La façon dont il a saisit les rênes de son cheval à son arrivée, la façon dont il l'a mené au pansage, son pas lent , ses yeux détournés... Rien qui ne plaise trop à Sadnezz. Ho bien sur, il ne mangera pas sa bête, quoi que...

Une légère brise s'est levée, mais le ciel est dégagé et la lune éclaire les pas de la brune. Elle fait du bruit, s'approchant à grand pas du lieu ou les bêtes dorment dans leurs box... En somme, elle s'annonce. Le Vouguier pourrait l'attaquer croyant apercevoir une espionne ou une intruse dans le noir, il n'est pas heure à jouer avec le feu. Couverte d'épais vêtements de flanelle et de cuirs, son arc à dos, elle cherche l'entrée du bâtiment et finit par s'y introduire. Personne. Pas de garde, pas un bruit. Des lors elle se fait plus discrète, même si elle sait que les chevaux l'ont déja entendue arriver, la guettent dans la pénombre, à l'affut du moindre bruissement de ses poulaines dans la paille sèche. Il y a là les montures des dragons et surement de quelques invité... Elle avance avec prudence dans le grand corridor, cherche la sienne, les yeux plissés. Finalement, Sadnezz pense l'avoir repérée, elle s'approche en longeant les stèles.

Venant à sa rencontre, elle sent la chaleur apaisante de la bête, laisse une main parcourir ses flancs, s'accrocher dans le crin dru... Le coeur de l'animal palpite doucement, ce qui la fait imperceptiblement tanguer sur ses pattes. Sadnezz l'a éveillée en arrivant à l'improviste de nuit, mais s'est rassurée. Tout semble en ordre, de l'eau, du foin frais, la selle bien rangée. A coté, la jument que l'on voudrait la voir monter en tant que dragon, placide. Cette jument, elle ne l'a jamais touchée, et ne le fera sans doute pas, préférant de loin celle qui la suivait partout, ramenée de frise pour son fils qui n'avait jamais su la monter. La Corleone hésita un instant puis décida de faire un petite sortie nocturne, le sommeil ne venant pas. Elle prit son temps pour arnacher, tresser , et monter à cru puis, les sabots claquèrent sur le sol des écuries en résonance.

Les voila dehors, petit galop dans la fraicheur du soir puis les pas s'allongent, l'allure s'accentue et les deux êtres se mettent au diapason sous la lune, ne faisant plus qu'un comme deux amants dans une étreinte... Arquian est vaste, et avant cette nuit ci, Sadnezz n'en avait pas conscience. La course dure, avide de visiter les moindres recoin de la terre qu'elle sert elle se fraye un chemin dans les herbes hautes, les endroit marécageux, la tourbe fraîche se martèle et étouffe les bruits du pas lourd. Elle va et vient, tournant autour du castel, repartant vers les sombres collines, passant devant le Vouguier qui l'avait reconnue par plusieurs fois, le narguant un peu. Les minutes défilent... Les yeux rivés sur une tourelle solitaire qui se rapproche petit à petit, elle laisse ses mains glisser sur l'encolure écumeuse du cheval, mêlant ses doigts au poil chaud collé de sueur. Le pas ralentit, les naseaux de la bête laissent échapper des volutes de brume, tel un dragon piaffant; rencontre de la chaleur et de la fraicheur.

Sadnezz observe l'édifice qui les surplombe, elle l'a déjà aperçu une fois sans jamais chercher à le voir de plus près. Un nuage solitaire s'en vient recouvrir l'astre lunaire et le noir s'intensifie. La Corleone met pied à terre, scrutant les remparts. son regard se fige tout à coup sur une forme humaine, là haut. Un homme. Difficile de définir s'il est mort ou s'il dort... Mais quel homme serait assez fou pour s'endormir au sommet d'un donjon, par une nuit de novembre? Tout cela ne plait pas trop à la brune. Sans quitter sa cible future, elle plie le coude pour saisir son arc et une flèche et lâche les rênes qui trainent au sol. Rapidement, l'arc est bandé, armé et la pointe métallique du projectile se dresse déjà vers un créneau. Ses lèvres se pincent et le vide se fait dans son esprit. Viser la muraille, tout près de lui, guetter une réaction...

La flèche part, les yeux de Sad s'ouvrent plus que jamais.

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Gorborenne
Paisiblement endormi, l'esprit du Chauve vogue au loin, par delà l'horizon. Comme chaque nuit qu'il passe au sommet du Donjon, il se repose dans un lit de souvenirs teintés de l'émeraude qui à disparu de ses yeux. Tels deux rubis ardents, ses pupilles parcourent les terres d'Arquian, comme un faucon cherchant son diner. Malgré le sommeil qui l'enveloppe, son regard perce les nuages des ombres qui dansent dans l'obscurité.

Son regard? Non! Le mien! Gorborenne s'est endormi en me laissant la place. Il a baissé sa garde en même temps qu'il a fermé les yeux, relâchant les chaînes par lesquelles il m'entrave. Moi-même ça m'étonne, d'habitude, il est bien plus prudent que ça, surtout en ce qui me concerne. C'est qu'on se connaît bien lui et moi, depuis le temps que je me promène sous son crâne, il sait ce dont je suis capable, enfin, quand il s'en rappelle. Son regard d'émeraude disparaît quand le mien s'embrase, alors que l'inverse n'est pas vrai. Je ne peux jamais m'empêcher de sourire à cette idée. Je vois tout ce qu'il fait alors que lui ne garde jamais que des bribes de souvenirs quand je suis au commandes.....

Dans mon dos, la tâche de ma naissance me démange. Cette vieille brulure est le lien indéfectible qui me lie au Chauve. Le pauvre, le nombre de fois qu'il a essayé de se débarrasser de moi...... en vain. Mais je sens qu'il commence à comprendre que je suis lui autant qu'il est moi...... Le premier pas vers la liberté, ne plus être chassé..... Ça ne doit pas être chose facile pour un Chasseur que d'être sa propre proie..... Des fois, je l'ai quand même plaint, même si de façon générale, je me moque plus souvent de lui qu'autre chose. Normal, je suis là pour ça.... Lui rappeler chaque jour ses erreurs et ce qu'il en a perdu..... Cruel? Bien sûr! Vous avez déjà vu un Démon empathique vous?

.... Du sang, j'en ai tellement envie que je le sens s'écouler à une lieue à la ronde.... Ma soif exacerbe tellement mes sens que je perçois le moindre mouvement des feuilles dans les arbres au pied de la tour, j'entends les pierres rouler sur le chemin, les chauve-souris voletant autour du donjon n'échappent pas à mon regard et je sens la faible chaleur du nuage vaporeux de ma respiration se diluant dans l'air froid annonçant les prémices de l'hiver....

Chasseurs nous sommes tous les deux. Mais la bête diffère..... Et je sens que ma proie approche. Un cavalier...... où plutôt, une cavalière. J'ai encore du mal à la localiser précisément à cause de la distance, mais j'entends distinctement son pas féminin foulant les feuilles mortes qui jonchent la colline.... Un murmure à peine audible dans le silence de la nuit, mais rien n'échappent au Démon que je suis.

mmmmmm, où est-elle donc...

Puis sur ma joue, je sens le glissement de la brise qui change de ton, comme poussée vers moi..... Inutile de réfléchir plus loin, juste incliner un peu la tête, tendre le bras, refermer le poing ..... et briser la flèche en plein vol.... Pffff, elle espère vraiment me toucher de là en bas, à cette distance? Mais maintenant, je sais où elle est.

Le temps de sauter à bas du créneau et de filer vers l'escalier, et elle sera à moi. Enfin, sauf si le rire carnassier qui me prend l'effraye assez pour la faire fuir..... J'espère bien que non!




sadnezz.
Les yeux se referment aussitôt que la flèche se perd dans la nuit, et Sad serre les mâchoires dans un juron. Raté. Elle a raté sa cible. Elle reste quelques secondes visage tourné vers le sol en une légère moue rageuse puis soupire et lève la tête vers le rempart. Là, son regard se fait grand, interloqué. Elle entrouvre les lèvres de surprise, silencieuse. L'homme a disparu. Les yeux noirs de l'italienne balayent le chemin de créneaux , quelque peu affolés alors qu'elle se baisse pour récupérer les rennes de sa monture. Qui étais-ce? Que faisait-il là haut? Milles idées s'emparent de son esprit, et des questions envahissent ses pensées. Des lors, elle se fige, les yeux rivés sur les hauteurs de cette étrange tour. Y avait-il finalement quelqu'un là haut...? Peut-être que son insomnie la fait doucement délirer, et qu'un mauvais reflet lui a fait apparaitre ce qui n'était pas. Non, impossible, elle n'avait pas rêvé, elle ne voudrait jamais se convaincre des failles de sa tête brune.

Les doigts se crispèrent sur les épais liens de cuirs qui se tendirent quand elle avança de quelques pas et la Corleone fut stoppée dans son avancée hésitante. Le cheval resta immobile, sabot plantés dans le sol meuble, refusant de faire un pouce de plus. Elle fit volte face, tirant plus allègrement sur les rênes , sans succès. Le canasson haussa la tête, bien décidé à ne pas la suivre. Les oreilles couchées vers l'arrière, la bête s'était tendue et Sad comprit qu'il était inutile d'insister. Les rennes retombèrent au sol et la cavalière s'éloigna vers l'édifice de pierre, lentement. La lune refit son apparition ce qui la rendit un peu plus hardie devant la lourde porte austère du lieu. Ses mains poussèrent un peu, puis rapidement ses épaules suivirent sous l'effort, le tout dans un grincement à glacer le sang chaud de la Corleone. Encore une hésitation, qu'elle se promit la dernière , et elle entra dans l'antre noire de cette tour mystérieuse. Tâtonnant la paroi froide et rugueuse , elle fût saisie par l'odeur si spécifique aux endroits abandonnés depuis des temps illustres qui emplit ses narines. Un courant d'air vint à son tour achever de lui arracher un frisson, et ce n'était plus une histoire de froid.

Les poulaines heurtèrent une marche. Sad se trouvait au pied d'un escalier. L'ascension s'avérait pénible car dans le noir total. Apres tout, que pouvait-il y avoir de si dangereux sur les terres du baron... Tout était bien gardé, l'apparition n'était peut-être qu'un guet en ronde. Une marche, une autre, la pierre froide dans sa paume et... Un rire machiavélique qui se mit à se répercuter dans la tourelle, comme sorti du coeur des enfers. Sadnezz eut un haut le coeur, et machinalement ses pas rebroussèrent chemin, courant presque, ratant des marches, affolée, effarée. Tres pieuse malgré ses activités elle fût sure que le diable en personne hantait l'endroit, et la panique qui l'envahit était sans pareille. Désorientée dans l'obscurité, sans repère, une de ses cheville flancha et l'entraina dans une chute jusqu'au bas du colimaçon de granit.


Hmmmmmmmh..!!

Elle se mordit le poing pour retenir un cri de douleur et quelques larmes perlèrent sur ses joues. Prise de tremblements nerveux, elle tenta de se relever à l'approche de bruits non identifiés, mais n'y parvint pas. Sad avait l'impression d'avoir la cheville en feu, une belle foulure surement ...

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Gorborenne
Filant dans les escaliers à toute allure, je ne peux m'empêcher de ressentir l'intérieur du Donjon d'un regard neuf, avec mes propres yeux.... Enfin, pas vraiment, vu qu'ici il fait tellement sombre que même moi j'y vois goutte, mais je sens.... Cette bâtisse pue l'ichor et la souffrance à plein nez. Je sais pas ce qui a bien pu se passer ici, mais, .... cette sensation a quelque chose de terriblement excitant, redoublant ma soif de sang..... J'adore cet endroit!

Et pas besoin de la voir pour savoir où elle est. Je l'entends qui dévale et glisse dans les escalier à une trentaine de marches plus bas que moi pour aller se vautrer au pied de la première volée.... Je souris, le bruit de sa chair raclant la pierre froide a quelque chose de presque mélodieux à mes oreilles...... Et ce parfum! mmmm, j'adore cette odeur de sueur glacée où se mêlent la peur et l'effroi.

Je l'entends, je la sens, si proche, à quelques pas encore, ah, cette impatiente qui me guette! Un bon du haut de la volée d'escalier et je me reçois sans un bruit à trois pas derrière elle.

Jambes repliées, presque assis sur mes talons, les mains posées à plat sur le sol humide, je me penche un peu en avant jusqu'à avoir son oreille à portée de mes dents. Je brûle de refermer ma mâchoire et de m'abreuver de son sang, mais depuis si longtemps que je n'ai pu sortir de mon trou, je crois que je vais d'abord jouer un peu avec elle.

Ouvrant d'un coup mes yeux de braise où viennent se réfléchir quelques pâles rayons de lune, je souris en dévoilant ma mâchoire avide de chaire fraîche....


- Salut Beauté, tu cherches ton chemin?...



sadnezz.
Les bruits se rapprochent, des pas, des glissements, la panique se généralise dans la tête Corleonesque... Elle cherche a fuir, elle ne le peut, se plaquant contre la muraille avec l'espoir fou de s'y aplatir jusqu'à disparaitre. Le silence revient, laissant place à l'imperceptible respiration saccadée d'un être tout pres d'elle. Même dans le noir ses yeux se font immenses pour tenter de voir l'indésirable hôte, son coeur palpite et lui fait mal... Si l'on dit que la peur a une odeur, elle a surement celle qui vient par effluve affoler ses sens et lui faire crisper la mâchoire. Un reflet lunaire laisse apercevoir des prunelles irisées de carmin, le sans nom s'est invité ce soir...

Machinalement elle se pare d'un signe de croix, seul espoir dans sa vulnérabilité, mais déjà la créature parle, d'une voix qu'elle ne connait pas; de la voix des enfers surement.

- Salut Beauté, tu cherches ton chemin?...

Par Giosep, qu'il m'épargne! Un carnassier rictus révèle une dentition des plus inquiétante, elle est perdue. Ses poils s'hérissent ... Quand on cède à la peur du mal, on ressent déjà le mal de la peur, aussi elle s'étouffe dans son propre souffle, sent les battements de son coeur pulser à ses tempes comme des coups d'enclumes dans une folle sarabande qui lui donne le tournis. Quel est cet être qui la toise tapis dans l'ombre de la nuit? C'est la faucheuse, chez qui elle est allé se perdre bêtement pour assouvir sa curiosité et son entêtement. La voilà brebis dans la tanière du loup, elle qui aime tellement défier la vie et se jouer de la peur. L'arc est tombé quelque part dans sa chute, et désarmée elle grimace d'effroi. Cette nuit aura laissé paraitre sa plus grande angoisse, la seule qui l'enveloppe d'impuissance: le Sans Nom. Son estomac se noue et c'est la délivrance; la brune tourne de l'oeil.

Ô douces limbes de l'âme accueillez moi,
que je goute à votre prison d'inconscience,
que de votre voile apaise mes sens
Sur la terre comme au ciel ce néant offrez moi


La terreur qui l'étreint se fait lointaine, et déjà l'écho de cette voix dérangeante n'est plus. Elle s'effondre lentement libérée de ses chaînes, loin de ce combat qui lui semble déjà perdu.

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Gorborenne
Eh bien, je ne savais pas que je fais cet effet la aux femmes, à peine je leur parle qu'elle se pâment et s'évanouissent.... Pfffff, même si c'est intéressant de sentir son esprit s'éteindre d'un coup comme on souffle une bougie, c'est vraiment pas drôle, c'est que j'ai envie de l'entendre crier celle-la moi..... Et ce signe de croix, comme si ça pourrait l'aider.....

- petit rire machiavélique -

Bon,..... c'est vrai que si j'admets être un démon, je suis forcé de reconnaître l'existence du Très Haut, mais si on réfléchit plus loin, le simple fait que je sois libre de mes mouvements est la preuve qu'il en a plus rien à faire des humains....

Un parfum vient à mes narines.... sous les couches de peur s'étalent les senteurs musquées de la peau de l'Italienne. Mmmmmm, appétissant, je crois bien que je vais la croquer sans attendre, déjà mes canines s'enfoncent doucement dans le derme tendre de sa nuque, mmmm, n'y manque que le gout du sang, ...... mais, bizarre, j'arrive pas à refermer ma mâchoire sur sa jugulaire.......


- Non! tu ne feras pas ça!

- comme un voix dans ma tête -

- Einh? Quoi? Rhooo, t'es toujours là toi? Retourne dormir, c'est moi qui commande maintenant, et tu m'empêchera pas de la mang......

Aouch, c'est quoi cette douleur qui me brûle dans la tête?- Grognement rageur - Impossible d'avoir un repas sans être dérangé!


- Arrête ça tout de suite! Je te laissera pas lui faire de mal!

Le Chauve se redresse d'un bond en arrière. Pris de légères convulsions, essayant de reprendre contrôle de son corps, mais son regard demeure de braises, toujours animé par les flammes démoniaques du Passager Ombrageux....


- Et pourquoi? Si j'ai si faim, c'est de ta faute! Et en plus, elle nous a tiré dessus au cas où t'as pas remarqué, ce n'est que justice!

- Me parle pas de justice, ça sonne faux dans ta bouche.... Tu n'es pas justice, tu es vengeance! Et elle, elle fait partie de la famille, alors si tu la tues, je te tues aussi!

- Tu te donnerais la mort pour te débarrasser de moi? Mouais, le pire, c'est que je sais que t'en est capable...... Foutu idéaliste! Continue comme ça, et un jour, tu seras tellement déçu et désespéré que tu viendra m'abandonner ton corps!.... Bon, d'accord, tu gagnes pour cette fois, je la tuerai pas, mais si tu m'interromps encore une fois quand je m'amuse, y'en a d'autres qui te sont bien plus cher qui risquent d'en pâtir..... Allez, maintenant, ouste! la paix!

- Non mais je ne te......


Là, je ne peux m'empêcher de sourire alors que je secoue la tête pour le chasser de mon esprit. Combien de fois n'en a-t-il pas fait de même? Ce que c'est bon de lui rendre la pareille. Par contre, il m'énerve, j'avais une de ses envie de lui sucer son essence vitale à celle-là!

Tant pis, on va trouver un autre jeu..... Mmmm, mais si elle continue à dormir comme ça, ça va pas être drôle..... Bon qu'est ce que je vais bien pouvoir lui faire? Réfléchissons.... Elle est toujours allongé à mes pieds, mais je me demande à quoi ressemble son visage, avec le parfum qu'elle a, il doit encore avoir la douceur de la jeunesse, mmmm, j'adore...... mais il me faudra un peu de lumière..... Lumière! j'ai une idée. Je m'étonne moi même de la résonance de mon rire, sardonique à souhait.....

Je me recule d'un pas, j'étends les bras, comme un chef d'orchestre donnant s'apprêtant à donner le signal du départ aux instruments, là je laisse mon esprit flotter un moment, mmmm, oui, elles sont là, dans les murs, je les sens, les empreintes de souffrance incrustées dans les pierres de ce Donjon comme mille voix infernales criant leur douleur..... Mon orchestre, mon chœur démoniaque. Musique Maestro! Que tournoie la sarabande de Belzébuth! Mes bras qui s'abattent devant moi et alors que je me mets à virevolter d'un endroit à l'autre, des pierres s'élève une musique qui me porte et m'entraine vers mes sombres desseins.....

Pas chassé, changement de pied, je sors les pierres à feu et l'amadou de ma besace dans une arabesque et clic-clac, petite flammes qui naissent au flambeau accroché à côté de la porte.

Entrechat et pas glissé, et je ramasse la donzelle en l'attrapant par le tissus de sa chemise et l'arrachant du sol d'un geste pas encore trop brutal.... Contre-temps, pirouette et bardaf, la belle gît sur ventre sur table.... Port de bras déchirant la chemise en fins lambeaux, manège autour du meuble pour lui lier fermement bras et jambes à l'aide des bouts de tissus..... Passe-pied, piqué tourné et pirouette pour s'écarter et vérifier le "plan de travail" avant de passer à la suite.....

Parfait, maintenant, mes outils......

Saut de biche, saut de chat et saut de l'ange pour monter les escaliers.... Entrechats et ronds de jambe pour redescendre de la terrasse avec le petit braséro, interrompus par une échappée le temps d'arracher un crucifix d'argent du mur au premier niveau, puis d'atterrir devant mon "jouet social", à défaut de jeux de société.....

Petite mazurka le temps de récupérer ça et la de quoi alimenter le braséro, et de le démarrer..... Relevé, échappé et surrection alors que dans mes mains brassant l'air valsent mes deux griffes tirées de leurs fourreaux..... Petite gigue, pour savourer le plaisir à venir avant de s'y adonner..... Saut royal, retour des couteaux à la ceinture, réception, révérence et salut, applaudissement de la foule, rideau!......

Tout souriant, je reviens près de la table, elle est couché là, la peau dénudée de son dos se hâlant à la faible lueur du braséro et de la torche. Je ramasse le crucifix, et le regarde un moment. Tout démon que je suis, je ne peux m'empêcher d'admirer la finesse de l'orfèvrerie, le travail des détails..... C'est qu'ils doivent vraiment y croire les pauvres....... Un autre rire me prends, mais je m'arrête soudain, comme si le regard sculpté dans le métal me posait une question: à l'endroit où à l'envers? sur ses pieds où sur sa tête? Quel symbole choisir? Christos, anté-Christos?...... J'ai trouvé! ni l'un ni l'autre. Prenant le crucifix à la base, je lève haut mon poing avant de l'abattre violemment sur la table et planter la croix d'argent par un de ses bras dans le meuble. Fichée dans le bois de travers, en mémoire du jour où le prophète est tombé en portant le symbole de sa mort jusqu'au Golgotha , juste sous le nez de l'Italienne. Où est-ce que je vais trouver ça moi?

Le fracas du métal pénétrant le bois massif accompagne le hurlement que je lâche au oreilles de la donzelle.....


- DEBOUT LA DEDANS!




[hrp]les pas de danses cités font pour la plupart partie du répertoire de la danse classique[hrp]

sadnezz.
Instant entre chien et loup. Aux portes de sa conscience, elle s'égare, vaporeuse raison dans le tourment de l'esprit. le trouble lui tend les bras, elle embrasse cet état second, incapable de réagir au moindres choses qui l'environnent, d'ailleurs les perçoit-elle? Un hurlement vient déchirer ses tympans, il se confond avec le vacarme qui règne dans sa tête brune, échos de son propre délire qui danse sous ses paupières. Le corps et l'âme ne sont plus liés par toutes les lois humaines, c'est la déraison qui mène la danse! Le froid est douce tiédeur, la brutalité est tendre gestes, et la douleur.. O la douleur! quelle est elle? insensé instant ou elle se perd dans les bois sombres de ses nuits d'insomnie, puis le silence...

Ce silence terrible qui l'arrache aux bras de son mal, angoissant néant sonore qui la tire de sa crise, la ramène à sa douleur et à la froideur sous son ventre, sur son dos, dans la moelle de ses os. Les émotions violentes la prennent à la gorge, le calme revient immanquablement. Sa cheville laisse une douleur lancinante poindre à la surface de sa peau, une fine chair de poule la parsème, elle a froid.

Ses yeux se plissent, de la lumière.. De la lumière! Un mouvement vain, ses prunelles se posent sur un crucifix planté là. Ses mains se crispent et tentent de se dégager de leurs liens. Attachée, sur le ventre, l'angoisse revient... Sadnezz réalise sa situation, planté dans son esprit, ce rire machiavélique, les yeux du sans nom, la bête! Elle se met à trembler à nouveau, à claquer des dents. Son menu corps s'agite de spasmes nerveux et ses yeux roulent dans ses orbites, fous.

Il est là, elle le sent , elle l'entend, il va la sacrifier sur cet autel glacé. La voila qui pousse un hurlement, entrecoupé de sanglots et de hoquets, il est tout juste compréhensible tant il sort de ses entrailles plus que de sa bouche...

- Diablerie!!! Mhhaaaaaaaaaaan!! à moi !! à l'aide!!

Sadnezz s'agite violemment, se tord comme possédée. Etrange de voir un être confronté à ses plus grandes peurs. On le cherche, ce 'est plus lui. Il est reclu dans une petite part de son esprit et ses angoisses tirent les ficelles.

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Gorborenne
Que j'aime ce spectacle, un pauvre créature se débattant dans la cage de son angoisse, désirant la délivrance jusque dans la mort, pour bien que quelque chose mette fin à cette terreur. Mon jeu préféré, enfin, pas tout à fait, mais parmi ceux auxquels je ne manque jamais de m'adonner quand dès que je me réveille....

Mmmm, elle convulse et contorsionne, mais ses liens tiendront bon, j'ai bien serré les nœuds. Je souris à la regarder frétiller comme un poisson dans mon assiette. La langue qui passe sur les lèvres, pareil qu'avant un bon repas. Mais est-ce que ça n'en est pas un de bon repas? Même si je ne peux satisfaire mon estomac de sa chair...... j'ai d'autres appétits.

Elle crie apeurée, je ricane amusé....


- Diablerie? Mais non beauté, moi, je ne suis qu'un avant goût de l'Enfer. Attend de mourir pour rejoindre le Roi des Démons! De l'aide, tu peux toujours crier, personne ne viendra!

Accompagnant mes mots, je balaye l'air du bras vers la porte du Donjon, à l'autre bout de la pièce, qui claque dans un grand bruit poussée par un courant d'air.


- Ici, il n'y a que toi et moi...... - montrant la croix fichée dans le bois - et lui qui nous regarde..... pas pour longtemps!

Dans un grand rire, j'arrache le cruxifix de la table et le jette dans le braséro où il vient ficher au milieu des flammes. Puis mon regard est attiré vers une niche dans le mur où dort une lampe à huile sous quelques toiles d'araignées parées de couches de poussières. Je la sort de son emplacement pour en vérifier le contenu. Encore à moitié pleine et l'huile n'a pas figé avec le temps.....


- Parfait, exactement ce qu'il me faut!


En trois pas et un bond, je me retrouve sur la table, à genoux au dessus de l'Italienne, une jambe de chaque côté. Je dépose la lampe à coté de moi, puis avec un des mes couteaux, de la pointe, d'abord je glisse sur la peau de son dos, éprouvant la tendresse de sa chair et la fermeté des tissus...... - sourire appréciateur - .... un morceau de choix! En humer le parfum une dernière fois, laissant mon nez se promener le long de son échine... Et au travail.

Être Démon n'empêche pas d'être artiste, et comme un peintre, je contemple la toile vierge, y imprimant d'un regard l'œuvre à venir, mais n'osant porter le premier coup de pinceau fatidique.

Mais il faut bien se lancer. Avec un précisions étudiée, j'enfonce lentement la pointe du couteau dans le derme de son omoplate gauche, jusqu'à faire perler un goute de sang, puis lentement, faisant bien garde à suivre le tracé encore imaginaire du dessin, la lame traverse son dos d'ouest en est, laissant derrière elle un sillon d'entrelacs ensanglantés.....



sadnezz.
- Diablerie? Mais non beauté, moi, je ne suis qu'un avant goût de l'Enfer. Attend de mourir pour rejoindre le Roi des Démons! De l'aide, tu peux toujours crier, personne ne viendra!

Une bête, un homme, peu importe, elle ne voit pas son visage, la peur n'en est que plus exacerbée. Elle le sait, la terreur suinte pas les moindres pores de sa peau. Sa tête se cogne à la table qu'elle croit autel, ses cheveux s'emmêlent et lui barrent le visage, encore un peu et le cou du lapin la guette à force de tenter de se libérer. D'une voix méconnaissable elle hurle encore.

- Charmogne! Peste soit de ta personne créature, mâne des enfers! Bisclavret!

La porte claque et son coeur ne fait qu'un tour dans sa poitrine. Enfermés tous deux dans cette tour maudite, qui sait ce qu'elle va subir avant de passer a trépas. Mourir dans un tel attrapoire, quel guignon! Plus un ajour pour la rassurer, juste le feu et la bête, un cauchemard.

- Ici, il n'y a que toi et moi......et lui qui nous regarde..... pas pour longtemps!

Le crucifix est là, planté sous son nez, comme pour lui rappeler qu'elle est perdue, que le trépas la guette, et pas le moins douleureux. L'appel à la contrition est planté a quelques pouces d'elle... Sa langue cesse de proférer les jurons de la création et Sadnezz récite un confiteor, frénétiquement, telle une possédée qui parle dans son jargon.

Confiteor Deo omnipotenti
omnibus Sanctis
et tibi Pater
quia peccavi nimis cogitatione
verbo et opere
mea culpa, mea culpa, mea maxima culpa

Ideo precor beatam
omnes Sanctos et Te Pater
orare pro me ad Dominum Deum nostrum

Misereatur nostri omnipotens Deus
et dimissis peccatis nostris
perducat nos ad vitam aeternam
Amen


La litanie se répète, de plus en plus fort pour couvrir les paroles de cette présence démoniaque, pour oublier cette flèche perdue qui a scellé son destin entre ces parois de pierraille. non loin du castel, Theo et les autres étaient en sécurité, coulant une soirée de douceur, à des lieues de penser ce qui pouvait bien se passer dans le donjon...

- Confiteor Deo omnipotenti...
omnibus Sanctis...
et tibi Pater....


Ses prières sont soudainement transformées en plaintes, une lame froide glissant sur son échine... Des plaintes aux gémissements, la suppliciée exulte sa douleur, ses ongles crissent sur le bois qui la soutient. Des échardent viennent se nicher sous ceux ci, mais rien de comparable au châtiment qu'accueillent les chairs de son dos. Lacérée, comme une vulgaire entrecôte sur la planche du boucher, ses muscles s'endolorissent à force de crispation et lentement une nausée monte en elle, surement due à la peur. le haut le coeur persiste... Sadnezz se mord les poignets liés au sang dans l'espoir d'échapper à son bourreau ...

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Gorborenne
Ah, qu'est ce que je m'amuse.... je serais chat qu'elle serait ma souris. Alors qu'elle prie pour pas pleurer et qu'elle crie pour prier, moi, je m'esclaffe devant ses gesticulations. Alors que sur le dos de la Donzelle, je termine de descendre le long de son échine pour achever les entrelacs de la quatrième entaille, terminant ainsi les contours d'un large croix, je plante vivement mon couteau où se pavane encore un peu de son sang sous son nez, juste à la place du crucifix qui se tord dans les flammes du braséro.

- Prie tant que tu veux, si ça t'occupe, mais arrête de gesticuler! Sinon, je te cloue à la table comme celui que tu invoques.

Grand éclat de rire alors que la litanie reprend de plus belle.


- Mais oui, c'est ça, implore le. Tu crois vraiment qu'il va descendre du ciel pour te sauver.


Je saute à bas de la table et me place devant elle, à quelques pouces de son visage, humant à plein poumon sa peur et sa souffrance,..... et un petit quelque chose d'autre....... On pourrait presque croire du repentir.....

- Vois comment tu es. Face à tes craintes les plus enfouies. Pourtant, si tu crois à l'Enfer, tu dois sentir au fond de toi que c'est là que tu finiras..... Je me trompes? Tu penses arriver à racheter tes fautes? Laisse moi rire!


Ce que je fais bien sûr même plus bruyamment que d'habitude, avant de lui saisir le menton et de plonger mon regard dans le sien. Dans ses yeux apeuré surplombant ses lèvres tremblantes, j'aperçois mon reflet qui se dessine. Impressionnant, en contre-jour par rapport à la torche et au braséro, mes traits demeurent dans l'ombre alors que mes yeux rougeoient de mille feux. C'est vrai que j'ai l'air d'un Démon.....

Claquement de dents sec sous son nez avant de lâcher la tête de l'Italienne et de contourner la table pour ramasser la lampe à huile. D'un geste un peu trop brusque, j'envoie le couvercle rebondir sur le dallage de la pièce, raisonnant sans fin sous les voutes du Donjon.

- Regarde moi, crois tu que je sois surgit de l'Enfer? Bien sur que non, je suis né de la main des hommes! Qui d'autre engendre des Démons?
Connais-tu seulement le récit de Bisclavret dont tu me prêtes le nom? Il s'est retrouvé Démon à cause d'une exécrable trahison par ceux en qui il avait le plus confiance et n'a retrouvé la paix qu'une fois vengeance obtenue! Ni Dieu ni le Diable ne sont intervenus dans cette histoire! Et ne me traite pas de lycan, malgré tout l'admiration que j'ai pour eux, je suis Surt , l'esprit du feu et de l'acier dévastateurs........


Lui murmurant à l'oreille...

Mais sa, tu risque pas de l'oublier de sitôt.....

Avec un mouvement mesuré, je verse lentement le contenu de la lampe sur le dos de la Donzelle, étalant le liquide sombre et visqueux du bout des doigts entre les contours des entrelacs sanguinolents. Puis d'une petite rotation du bras, j'envoie la lampe de céramique atterrir dans les braséro où les résidus d'huile ne tardent pas à s'embraser pour jeter de hautes flammes répandant tout un ballet d'ombres démoniaques sur les murs.

D'à côté de l'âtre de la Tour enfoncé dans la muraille, je récupère une pince à charbons et un soufflet. Avec la pince, je récupère le crucifix tout tordu par la chaleur et l'enfonce d'un geste rageur dans la lampe et repousse les deux dans un coin du braséro pour pouvoir trifouiller tranquille dans les braises et en sortir une de bonne taille.

Tenant le charbon ardent fermement entre les deux pattes de la pince, je me retourne vers mon "ouvrage" et.... quatre petits mouvements rapides et des flammèches naissent des quatre extrémités de la croix pour venir fusionner en son centre. Je lâche le charbon ardent dans le braséro pour contempler un crucifix flamboyant.

Des pensées se bousculent dans ma tête, et les cicatrices que j'ai dans le dos me démangent. L'autre s'agite de nouveau, à croire que laisser notre regard se perdre dans les flammes amincit la frontière qui nous sépare.....

Mais ce n'est pas le moment, comme un maître coq, il faut que je surveille la cuisson, que la viande soit servie à point. Il s'agit de frire sans carboniser. La surface de l'huile brûle, alors que l'intérieur va peu à peu rentrer en ébullition et il faut éteindre le feu au moment le plus indiqué pour que la chair attendrie et la sauce se mêlent de façon harmonieuse........

Quand le fumet de chair grillée flottant dans l'air indique que le point attendu est atteint, j'arrache un autre bout de tissus dépassant des lambeaux de la chemise de la Donzelle dont je m'enveloppe la main pour envoyer voler l'huile brûlante en mille petites gouttelettes traçant comme un ciel étoilée sur le dallage de la pièce.

Les cris de l'Italienne cessent de me parvenir un moment, mais ses gesticulations m'empêche d'observer mon travail. On peut être un démon tout en appréciant de bien faire les choses..... D'une main puissante sur son épaule, l'autre sur ses cuisses, je la plaque sur la table et la maintiens immobile le temps de jauger la croix d'un œil presque pieux....

Les connaissances médicales que l'Autre à amassé toute ces années me permette de juger d'un regard averti les chairs meurtries. La peau s'est boursoufflée sous la brûlure mais les tissus n'ont pas été atteints. Je souris satisfait, les impuretés de l'huile mêlées au sang des entailles donneront à la cicatrice une teinte sombre aux reflets rougeoyants. Et les entrelacs, je vois d'ici le petit relief vallonné qu'ils dessineront d'ici à ce que la peau se reforme.

Mais le plus dur reste à venir......

Alors que je ramasse le soufflet pour activer le braséro jusqu'à en faire blanchir les braises, une pensée me perturbe. Je commence à prendre plus de plaisir à réussir mon œuvre d'art qu'à l'entendre gémir. Ça doit être mon côté artiste.... Mais c'est vrai que je ne tirerait aucune satisfaction de peindre sur une simple toile, rien de tel qu'un petit corps qui gigote...... Je souris, rassuré...... Ça, c'est mon côté Démon.

Encore quelques minutes, et le feu sera à point.......



sadnezz.
Il lui parle mais ses mots ne parviennent plus à former des phrases distinctes à l'oreille de Sadnezz, la douleur l'empêche de l'écouter, sa présence dans son dos la paralyse, corps et âme. Elle sent le plaisir qu'il prend au simple ton de sa voix, ses cris et ses supplications ne font que l'exciter d'avantage, le stimuler à apprécier ce qu'il lui fait subir. Elle est jouet, il est joueur. Cet être ne dégage même pas de chaleur humaine là au dessus d'elle, penché sur son oeuvre sanglante. Sadnezz cesse de prier, les mâchoires crispées... Elle prend le passé en pleine face, plus douleureux encore que sa peau à vif.

Des images passent dans son esprit, suivit de bruits et de paroles désordonnées, comme une clameur lointaine. Le châtiment. Expier ses fautes, faire pénitence , voilà pourquoi Aristote l'a menée au pied de cette tour, le jugement dernier... Parce qu'elle n'a pas su pardonner à son ainé, parce qu'elle l'a déshérité, parce qu'elle a refuser d'hisser le drapeau blanc alors même qu'il gisait dans son linceul, parce qu'elle a maudit ce fruit qu'elle a porté pour ses fautes, parce qu'elle a refusé d'aller le mettre en terre... Le châtiment. Parce qu'elle a abandonné ses enfants, parce qu'elle a menti à tous ceux qui l'aimaient, parce qu'elle les a trompé, parce qu'elle a continué d'aimer celui qui l'a salie malgré sa haine, parce qu'elle n'a pas su faire autrement que de lui être fidèle, parce qu'elle a perdu la tête... Le châtiment. Parce qu'elle a détesté tous les autres, parce qu'elle a décider de se complaindre dans le mal, parce qu'elle a volé, pillé, battu, insulté, parce qu'elle a osé continuer à prier le très haut et à fouler le sol des cathédrales... Le châtiment.

Sa propre voix lui vient, et lui murmure la petite chanson assassine qui la berce tant de soirs...Quand on me voit sur ma monture quelle allure et quelle stature, un vrai modèle de droiture, une force de la nature. Ou bien ne suis-je qu'une raclure un animal de luxure, qui court à l'aventure, y'a t-il un coeur sous mon armure... Le sien est pur comme l'azur, laisse le panser mes blessures, oublions cette mésaventure, je t'aimerais si tu me jure qu'on la tuera cette ancienne moi... Mes rêves de petite fille, cousus de fil en aiguilles je les ais jetés aux loups, détrompe toi car je suis aussi blanche qu'une brebis qui se roule dans la boue... Mes mots d'amour sont des injures, mes serments sont des parjures, mon coeur déjà s'est fait plus dur, je te met au pied du mur. Délivre moi de ma ceinture , viens en moi petite ordure je t'apprendrais l'art de la luxure... je t'aimerais si tu me jures qu'on la tuera cette ancienne moi... Qu'on la pendra, Belladonna.

Le saut de la créature la sort de son délire et la ramène à sa nausée. Le temps s'arrête quand elle aperçoit enfin ce visage, son visage...


- Gorborenne!

il lui parle, il touche son menton et la toise de ses prunelles enflammées dans les siennes qui s'arrondissent et se remplissent à nouveau de larmes amères, des larmes d'incompréhension. Elle a du mal à croire ce faciès entrevu. Cet homme ne peut pas être celui qui la torture, son esprit la trompe!

- Gorborenne! ....Pourquoi me fais tu ça?! .... Gorboreeeenne!!!!!!!


Le géant conteur a perdu la raison, ses yeux brillent d'un éclat qu'elle ne leur a jamais connu, il repart et fouille dans les tréfonds de cet antre.. Sadnezz l'appelle en vain, tout est confus, la nausée monte encore et encore... Jusqu'à rendre au sol tout ce qu'elle a pu ingurgiter avant l'horreur, dans un râle de dégout. Elle balbutie:

- Si tu n'es pas lycan, tu es possédé! Gorborenne! arrête!


Un liquide froid et poisseux vient piquer ses plaies, suivit de la pire douleur qu'elle n'ai jamais connue... L'incandescence de la chair... Le feu


...Non! Nooooooon!!! NOOOOOOOOOOON!!!!!


Les hurlement déchirent la nuit, mêlés de larmes et de cris étouffés, la torture reprend. Indescriptible odeur de chair brulée qui flotte dans l'atmosphère froide ... Il la plaque contre le bois puis s'éloigne de nouveau, la laissant les yeux révulsés, épuisée... Ses muscles se tétanisent et la Corleone se met à convulser, de nouveau en proie à l'appel de l'inconscience.

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Gorborenne
Toujours occuper à garder les braises au plus chaud, une violente migraine me prends. L'Autre essaye de remonter à la surface, en réaction au cris de la Donzelle. Non, ce n'est pas le moment, je vais pas me laisser avoir maintenant.... Allez, laisse moi tranquille!

- Non! Assez! Arrête, tu vas la tuer!

- Si peu, si peu....

Et puis, parmi ses pensées qui essayent de prendre le pas sur les miennes, grosse comme une citadelle se dessine sa faiblesse.

- Et si tu ne me laisses pas finir, qui sait sur qui je pourrais assouvir ma faim.....

Silence, nul besoin d'en dire plus, il a compris où je veux en venir. Grand rire, intérieur cette fois. Ah ce que c'est bon d'être un Démon, d'obtenir ce que l'on veut en instillant un peu de peur dans les esprits. Bon, c'est pas tout ça, mais le moment semble venu pour la dernière touche qui sublimera mon œuvre. Je dépose le soufflet et me relève pour aller ramasser la pince au pied de la table, puis je m'arrête un moment devant le visage déconfit de l'Italienne.


- Gorborenne hein? Mauvaise nouvelle ma Belle, il dort la dedans...

Je me tapote le front pour qu'elle comprenne.... Enfin, si tant soi qu'il lui reste un peu de raison.

- Et t'as pas écouté ce que j'ai dis. Il y a aucune histoire de possession. Nous partageons le même corps. Moi, je suis la facette de notre âme que Gorborenne n'ose plus regarder en face. Je suis né de toute la souffrance qu'il a rejeté, la part de raison dont il s'est défait pour ne pas la perdre entièrement. Le pauvre, pendant toute ses années il a cru que j'avais disparu..... Mais aucune cicatrice jamais ne disparaît...... Et toi, pour te rappeler à jamais que les démons naissent par la faute de gens de ton espèce, tu porteras à jamais la marque de ce Dieu que tu ose invoquer avec les mains pleines de sang!

Mais les esprits égarés comprennent-ils? Comprendra-t-elle? En tout cas, oublier, elle ne pourra. Avec la pince, je sors la lampe des braises. La céramique à tenu bon, mais à l'intérieur, le crucifix d'argent s'est liquéfié et brille au fond du récipient. Je souris..... La dernière touche......


- L'Autre sait depuis longtemps, mais commence seulement à entrevoir ce qui se cache sous le voile....

Toi, tu porteras à jamais dans ta chair
Que quelque soit le Dieu que l'on adore
Le Diable se cache en chacun de nous
Les Démons ne sont fils des Enfers,
Mais naissent par les Hommes.....
Dans le feu et le fer!


Sur ces mots, je verse le métal liquide dans un fin filet ardent, venant remplir les entrelacs d'un reflet d'argent, pénétrant la peau en fondant la chair et s'y mêlant intimement. Je ne souris plus, concentré sur mon œuvre, prenant garde de maintenir le flux ardent aussi fin qu'un cheveux, pour qu'il se dépose sur le derme sans s'enfoncer trop loin, ainsi, la peau qui viendra recouvrir le métal restera fine, comme inexistante, et le tracé des entrelacs se fera aussi brillant et innombrable que le ciel nocturne auquel elle est venue m'arracher.

Je lâche la lampe à terre, et la pince dans le même mouvement. Bruit de l'acier qui vient raisonner au milieu de la céramique qui se brise. Je la regarde. Sur son dos agité de convulsions, l'argent se refroidissant rapidement jette quelques reflets qui scintillent sous la lumière de la torche...... À jamais gravé dans sa chair, mais hors de son regard.......



sadnezz.
Ecouter et comprendre ce qu'il dit, alors qu'il la surine... Elle ne peut pas, elle ne veut pas. Affligée de sa déréliction , ici-bas, la douleur à la douleur s'enchaîne , le jour succède au jour; et la peine à la peine. Les prières sont vaines, et ses cris sont échos se perdant dans les fissures du sol crasseux... Retour entre chien et loup, exsangue. Délires cauchemardesques aux pas de l'inconscience.


Elle est face à la tour, érection de pierre aux remparts sombres et légèrement asymétriques. Arquian sommeille. Le regard prostré sur l'homme immobile qui se tient là haut, la corde de son arc se tend sur son index et son majeur. Un oeil fermé, un autre grand ouvert sur sa cible humaine, ses lèvres se crispent un peu. Entre ses dents, un murmure au vent de la nuit, aux oreilles du très haut:

'Mon Dieu, préservez-moi des douleurs physiques. Je m'arrangerai avec les douleurs morales...'


La flêche part, laissant dans son trajet fuselé le sifflant son que Sadnezz se plait à entendre... Sa course fugace s'achève dans un cri strident qui déchire le calme des alentours, le sang jaillit sur les remparts, coule le long de la muraille.. Sadnezz redresse la tête pour mieux voir son oeuvre. L'imprudent a été touché, il revêt le gris de la pierre de son essence carmine , s'accroche et tangue, il va chuter... Ses gémissements résonnent aux oreilles de la brune, vibrant à ses tympans comme s'il souffrait à celles ci, blessant la fine membrane qui protège leur fragilité.... La voix n'est plus humaine, et un rire machiavélique la remplace, caverneux puis strident qui l'oblige à plaquer ses mains sur ses orifices, la mettant à genoux dans un faciès grimaçant. L'orage gronde, l'homme n'en est pas un. Elle l'aperçoit déja qui se redresse, sa flèche ancrée dans le crane, riant à s'en défaire la mâchoire. Ses yeux: le feu. Ses mains: le sans nom. Son visage: Gorborenne.

- Gorborenne! perché mi affliggi così? Gorborenne!


les cris cessent. Le corps se penche dangereusement dans le vide, et s'y laisse tomber, tel un sac sur le sol poussiéreux d'une grange, il s'abat en contrebas dans un bruit sourd. Sadnezz se relève et se vautre au sol dans son élan, ne trouvant pas assez vite son équilibre. Elle rampe jusqu'à lui, le visage trainé dans l'herbe tendre de la terre d'Arquian. Il geint, elle l'entend, fébrile devant lui. Un éclair illumine la noirceur du ciel, éclairant l'espace d'une seconde ce visage émacié qui ne ressemble plus en rien au chauve conteur... Ses orbites sont des trous béants , abysses sans vie ou dansent la vermine de la mort. La complainte gutturale qu'il exprime tétanise la Corleone, les traits déformés par l'effroi. Tout se met à tourner autour tandis qu'un ultime grondement annonce l'intempérie ... sanguine. Une pluie chaude s'abat sur leurs corps, les couvrant de vermeil, s'imisçant dans leur bouche, piquant leurs yeux. Sadnezz a un haut le coeur à la rencontre de sa langue et de ce gout métallique si significatif et se couvre les lèvres dans un râle de dégout...

Elle tente de se relever a nouveau, titube et chancèle. Sa monture, vite retrouver sa monture et s'enfuir, sortir de cet endroit maudit, charnier sans cadavre qui lui offre les relents cette putride rencontre... La monture est là bas, paissant paisiblement le brin ensanglanté. Courir ô courir, tant que les jambes peuvent porter; courir sans glisser sous la visqueuse averse ! Elle saisit le crin du frison, mais en se hissant sur la bête retombe aussi sec, les pupilles dilatées sur la vision d'épouvante qui lui parvient au delà du garrot chevalin...surplombant l'animal broutant, comme dans une mer déchainée, le corps inerte de son fils se balance dans le ressac du vent au bout d'une corde nouée à sa jeune gorge, pentacol de malheur ... Cette gorge de jouvenceau, celle là même qui s'est bleuie de la dernière étreinte, le dernier spasme de vie. Expirée géniture, ruisselant géniture. Ainsi sa paupière ne l'a vu pâlir et mourir, tendre fruit qu’à la lumière dieu n’a pas laissé mûrir. C'est l’enfant dont la mort cruelle un jour à vidé le berceau, qui tomba de la mamelle au lit glacé du tombeau.


Ils furent ce que nous sommes,
Poussière, jouet du vent
Fragiles comme des hommes,
Faibles comme le néant


Un glas retentit quelque part dans la nuit et dans son propre délire la Corleone s'évanouit.

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