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Pourquoi la Vilaine a disparu subitement de la vie publique poitevine après la prise de la mairie de Poitier et pourquoi elle n'est pas réapparue. Les voies de la destinée de cette gueuse sont-elles parsemées de braises issues de l'enfer ?

[RP] En route pour la joie, en route vers le trépas ou pas !

Nessty
[En route pour la joie, en route vers le trépas !]
[Mais avec le noir désir de voir son sir...]


Etrange missive reçue un petit matin alors que Nessty se réveillait difficilement, après avoir festoyé toute la nuit à la mairie de Poitiers. La mairie de la capitale était à elle et à cette poignée d'ivrognes qui l'avait accompagnée, au grand damne d'un comte n'ayant pas prévu cet évènement qui allait grandement entacher son prestige. La belle lut et relut cette écriture dansante qui lui inspirait tant de choses et, quand elle ne relisait pas ces lignes pour s'y ressourcer en sourires et soupires, elle serrait au plus près de son coeur ce parchemin : plié avec grand soin, il logeait dans son corsage avec quelques noisettes comme toute chose précieuse dont elle ne voulait se défaire. Non, elle ne l'avait pas oublié, loin de là... loin de là...

Citation:
Expéditeur : Hijikata
Date d'envoi : 2009-09-25 07:11:10

Le plus beau chignon du royaume alias Nessty,

J'irai droit au but! C'est quoi ce bordel? Hop moi j'passe vous voir, vous faites un bout de route avec moi et ensuite... aucune nouvelle? Vous m'oubliez si vite? Vous allez finir par m'entendre grogner jusqu'à votre comté tant aimé... Puis en plus vous avez une somme de chose à me dire ne l'oubliez pas! Moi j'oublie jamais... héhé... ça d'etre un vieux con... la mémoire ne fait jamais defaut! Ha ben sont sympa les poitevines... entre vous et votre tendre copine qui devait donner des nouvelles... j'dois vous avouer que j'suis deçu... 'fin bref...

Maintenant que je me suis passé les nerfs j'peux vous demander si tout va bien pour vous. votre decoletté plait toujours autant? Vous l'avez relacé ou pas depuis la derniere fois? J'vais quand meme vous dire un truc meme vous le meritez... si j'pouvais j'passerai bien un moment a me rincer le gosier avec de la tisane en votre compagnie. Votre compagnie étant secondaire comme vous pouvez fort bien l'imaginer hein...

Moi... ben entre bibliotheque et donner quelques cours a des etudiantes rien qui bouge trop... ha si... ma fille, j'me souviens plus si je vous en avais parlé ou pas, donc ma fille que j'avais laissé dans un couvent, ben... l'est de retour... comme si j'allais pouvoir m'occuper d'elle... me voila fort bien mouarf...

En attendant d'avoir de vos nouvelles ou meme vous voir debarquer pour redevenir l'enchignonée de chinon.... je vous embrasse... ou vous le voulez j'vous laisse choisir...

Celui que vous avez oublié...
Hijikata

publié avec l'autorisation de l'auteur


Lui répondre ? Mais quoi ? Entrer dans son jeu ? Non, surement pas ! Ce serait lui faire trop plaisir et accorder trop de crédit à l'attachement qu'elle pouvait avoir pour lui. Lui mentir ? Non, là n'était pas la volonté de la Vilaine, que trop engoncée dans sa fierté et son honnêteté. Lui répondre ? Mais comment ? En le taquinant comme il le méritait et le faisait là avec elle ? Non, elle n'en avait pas envie ! Ce serait avouer qu'elle même avait été piqué à vif par cette missive et qu'elle perpétuait la chamaillerie qui les émoustillait quand ils se retrouvaient. Toujours autant déchirée entre ses sentiments et son incapacité à les exprimer, la gueuse ne fit rien.

Nessty prit vraiment tout son temps pour répondre.

Citation:
Mon cher et tendre Vénérable Vieux con,

Tous ces beaux jeux inventés
Pour passer devant les premiers,
Pour que chacun soit écrasé
S'il refuse encore de plier
Les dégâts, les excès,
Ils vont vous les faire payer
Les cendres qui resteront,
C'est pas eux qui les ramasseront
Mais les esclaves et les cons
Qui n'auront pas su dire non

Nous on n' veut pas être des gagnants
Mais on n'acceptera jamais d'être des perdants (*)
...
(*) Noir Désir - Gagnant-Perdant



Elle ne répondit pas tout de suite, en pleine révolte et pas seulement devant un château vendu à un escroc angevin mais également avec elle même. Des heures et des jours entiers à se mentir, ne sachant que penser, construisant peu à peu une missive fictive, espérant surtout trouver un moment propice pour donner la forme souhaitée et comme elle se l'entendait réellement exposer à ce Vénérable Vieux Con. Peut être quelques instants avant de monter sur l'échafaud en direction de cette corde comme le Chian avait lui promis en grande pamoison, enfin le jour où il arriverait à mettre la main sur elle et non pas de la façon dont il l'avait fait dans une taverne de Thouars. La Vilaine avait affirmé lors de l'assaut de la capitale du Poitou et les jours qui suivirent qu'elle assumerait devant Aristote et le Sans Nom ses agissements et elle l'aurait fait si... si la fourberie humaine ne s'était pas transformée en incantations magiques venant s'abattre pernicieusement sur cette gueuse en plein élan. Il était déjà connu dans tout le royaume que le comte Chuichian avait de grands pouvoirs de sorcellerie au point d'être devin et qu'il ne manquait pas de s'entourer d'histoires sordides et fallacieuses peuplées magiciens, trolls et dragons pour construire la légende de sa propre personne. Malheureusement, se sentant probablement bafoué dans son prestige par cette Vilaine que trop malicieuse et plus que volontaire, il ne fut pas surprenant de voir le manant couronné se comporter comme un véritable roc perfide et plus que lâche. Il s'en prit à la Vilaine et à ses paires, sans jamais oser les affronter directement mais en intriguant dans des sphères que la décence interdit de citer sous peine d'en susciter les foudres machiavéliques et que seul Juvénal su décrire avec justesse dans ses satires (II-63).

Citation:
...
Ô la peur, ô le vide,
Ô la victoire des avides
Faut pas bouger une oreille
Toutes sortes de chiens nous surveillent
Pas un geste, une esquisse
Sinon on tourne la vis

Nous, on n'a rien à gagner
Mais on ne peut plus perdre puisque c'est déjà fait(*)
...
(*) Noir Désir - Gagnant-Perdant



Ainsi l'on entendit dans tout le marais poitevin que les breuvages servis dans les tavernes pictaves étaient tous empoisonnés. Ainsi apprit-on un matin que le comte avait fait assassiner sa propre fille de 5 ans ainsi que sa compagne et celui qui fut l'un de ses amis. Ainsi les poitevins, nobles ou non, eurent-ils la surprise de découvrir un jour qu'ils avaient un Archontat, une espèce de sommité comtale supérieure à toutes décisions collégiales et dont la toute puissance était sans conteste même face à la voix électorale du peuple. Ainsi fit on silence sur la disparition plus que mystérieuse en ce dernier jour de septembre 1457 de cette gueuse impétueuse qui avait tout fait pour entraver le chemin de trop de fous de pouvoir.

Oui, Nessty disparut de toute vie publique poitevine, fort subitement, laissant mourir dans une forge pictave après les avoir sauvés un valeureux guerrier, une chieuse détestée et une gamine adulée.

Citation:
...
Toi qui viens de loin d'ici
Avec ta peau et tes os
On t'a parlé du paradis
On t'a menti, tout est faux
...
Oh, t'auras rien, c'est ainsi
C'est pas fait pour les perdants, le paradis(*)
...
(*) Noir Désir - Gagnant-Perdant


Mise aux arrêts ? Non, cela aurait été lui donner une dernière fois la possibilité de s'exprimer devant une justice en qui elle avait plus que foi pour l'avoir servie tant de fois. Et puis vouloir tenter d'intercepter une telle impétueuse sans croiser armes et vacarme n'était qu'utopie. Empoisonnée ? Non, car l'on aurait trouvé plusieurs corps dans le caniveau pictave, bave aux lèvres après avoir régurgité toutes les chopines frelatées jetées dans des gosiers insatiables. Puis la moitié de la population locale n'aurait pas survécue non plus. Assassinée sur une route ? Non, bien que le comte ait mis toutes les armées en alerte pour que la gueuse soit hachée menu dès qu'elle fuirait comme n'importe quelle maraude, une fois les poches pleines. Nessty avait pourtant clamé qu'elle ne quitterait point Poitiers tant qu'elle n'aurait pas les clés du château en main et qu'elle ne s'était pas emparé de la capitale pour faire fortune, surtout une capitale que l'on savait fort mal gérée depuis des mois. Complice dont le silence est acheté à prix d'or ? Non ! Ce n'était point connaitre la gueuse qui refusait intrigues et manigances allant contre le bien des poitevins. Elle n'était pas de ceux qui se pliaient devant quelqu'un, ami ou puissant fut il, comme l'avaient fait un certain Conte_de_Balmora ou encore cet oiseau de mauvais augure qu'était Falco, sans oublier cette Fourmi insignifiante qu'elle avait tenue à ses côtés pour diriger les Vilains. Tous s'étaient parait il détournés de leur objectif initial pour se mettre d'une façon ou d'une autre au service de ce comte Chian. Connivence ou sorcellerie, allez savoir car la gueuse, elle, n'avait pas le droit de savoir, de peur de la voir déballer au grand jour la vérité sur les agissements de Chuichian, l'Auguste clown d'un Poitou en plein déchéance.

Une Vilaine vouée au silence, chose inconcevable mais véridique.

Citation:
...
On a tous tendance à voir dans la force un coupable et dans la faiblesse une innocente victime."(**)
...
(**) Milan Kundera dans "L'insoutenable légèreté de l'être"


Assaillie lâchement, au coin d'une rue, alors qu'elle s'apprêtait à monter en selle, attaque de dos bien sur, encore et toujours, plusieurs bouffons sur une brindille, une main glaciale sur une bouche, des regards froids, un poignard qui étincelle dans la pénombre, le silence et encore le silence, un coup dans les entrailles, un autre dans les côtes, et un dernier pour sceller le contrat mortel, un simple gémissement de douleur, le choc d'un corps au sol, le néant pendant que les pas s'éloignent. Pourquoi ne pas lui avoir tranché la gorge afin que la sanction soit radicale ? Volonté d'infliger le sadisme d'une sentence aussi vindicative que lâche ? Incompréhension d'une tornade collective soudoyant jusqu'à l'hérétique ? Le gouffre de l'infamie était aussi béant que grande était la rage de ces assasins gagnant à faire perdre la vie insignifiante d'une insoumise.

La Vilaine s'était effondrée en silence, poignardée sans droit de réponse.

Citation:
...
Vous et moi, on le sait,
Le spectacle est terminé
Pourtant, c'était presque idéal
C'était loin du féodal
Oh ! Maintenant, c'est foutu
Ça fait joli dans ton...
Fort intérieur. C'est gênant
De rejoindre comme ça la cohorte des perdants(*)
...
(*) Noir Désir - Gagnant-Perdant


Avaient ils escompté avec la détermination de cette gueuse ? A croire que non. Le Stote et le Malin ne voulaient pas encore de cette âme torturée et laissèrent Nessty se vider de son sang sur le pavé de Poitiers mais pas suffisamment pour lui offrir le repos qu'elle cherchait depuis un certain temps. Le premier frima de la saison la sortit de son évanouissement. Elle rampa et réussi à se redresser, tenant d'une main ses flans et de l'autre enfonçant ses griffes dans la pierre d'un mur pour se tenir sur ses jambes. Un cheval, elle voulait un cheval ! Consciente de son état sans avoir à regarder ses blessures, elle ne voulait plus qu'une chose : revoir ce Vénérable Vieux Con, le seul à être en mesure de sauver son âme et peut être ce corps qui l'abandonnait peu à peu. Un cheval... Rien qu'un cheval et au diable tous ces chacals. Elle trouva son vieux canasson là où elle l'avait laissé, à quelques pas c'est à dire à l'autre bout du monde pour elle maintenant. Se hisser sur lui fut un miracle tant ses tempes battaient déjà la débacle. La Vilaine se colla de tout son long contre l'encolure de son destrier en le suppliant de la mener en Touraine, auprès de Lui. Increvable la crevarde qui n'avait déjà plus ni tête ni d'épithète.

Citation:
...
Faut pas se faire d'illusions
Mais c'est mieux debout, pour l'action
Et pour nos âmes, c'est égal,
Dieu n'est pas dans la bataille
Ô Messieurs les décideurs
De toutes parts, de tous côtés
Sachez que profond dans nos cœurs
...
On pourra toujours refuser
De devenir les premiers ou les derniers(*)
...
(*) Noir Désir - Gagnant-Perdant


Aucun coup de talon, aucun coup de genoux, aucun semonce de départ, aucune caresse d'encouragement. De simples larmes de douleur à chaque coup de sabot sur le sol et un coeur sonnant le ralenti avant de sombrer dans les ténèbres de l'inconscience. Un corps balloté par un cheval, une fièvre rongeant un corps plus qu'affaiblit, un chignon défait dont les mèches se mélangeaient à la crinière de l'animal, des heures de progression vers l'est, une ombre silencieuse et solitaire dans la nuit comme dans le jour cherchant un ultime abri.

Dis-toi qu'il n'est pas loin... Dis-toi qu'il n'est pas loin... Dis-toi qu'il n'est pas loin... répétait elle sans fin.

Avec douleurs et fièvres pour seuls compagnons, Nessty se retrouva devant la porte de la résidence du seigneur de Lemere. Tombant plus que descendant de son canasson, elle se traina jusqu'à la porte, close. Poings serrés en ultime combat contre le bois de l'huis, elle tambourina en appelant le propriétaire des lieux. Du moins, c'est ce qu'elle croyait. Ses mains étaient en effet recroquevillées sur la porte, ce n'était pas par poings qu'elle s'y attaquait mais, encore une fois, de ses griffes qui s'enfonçaient pour s'y maintenir jusqu'à laisser ses mains en sang. Elle glissait le long du dernier obstacle qui la séparait de Lui, silencieuse et pourtant persuadée de l'appeler au secours. Elle avait quasiment atteint son but et se laissait doucement aller, à bout de forces mais heureuse d'être arrivée jusqu'ici. Elle avait réussi à tenir jusque là. Rien que le fait de le savoir de l'autre côté de ce pan la soulageait. Il était plus prêt qu'il ne l'avait jamais été ces dernières semaines. Et elle l'appelait d'une voix muette, en plein délire de son esprit qui continuait coute que coute son combat alors que son corps passait à trépas, épuisé, vidé, blessé... Elle glissait le long du bois jusqu'à se retrouver à assise à même le sol, la joue en appui contre la porte comme si elle cherchait à écouter les bruits de pas qui venaient vers elle. Sourire de soulagement, sourire de libération et surtout le simple sourire du bonheur d'être si près de lui. Un souffle douloureux, une gorge qui se noue, une tête qui se jette en arrière, des paupières qui se ferment sous la douleur mais qui ne peuvent plus retenir ces larmes de joie, un cri au bord des lèvres et un sourire qui se fige pour l'Eternel... Vénérable Vieux Con qui détenait tous ses mots secrets.

Hiji...

Citation:
...
Pas de leaders triomphants
On s'ra jamais des gagnants ni des perdants.(*)

(*) Noir Désir - Gagnant-Perdant


La vie et la mort de la Vilaine n'appartiendraient jamais à ces crétins qu'elle débectait plus que tout. Elle les offrait au seul qui avait peut être cru un jour en elle et le seul devant qui elle n'aura jamais eu le courage de déballer sa vérité, sans jamais l'oublier... Contre elle, elle tenait serrés au plus près de son coeur, dans une main ensanglantée, cet étrange pli reçu et sa réponse inachevée tout aussi soigneusement pliée sur laquelle on pouvait à peine lire, sang et encre mêlés :


        A Hijikata
        "A la joie
        A la beauté des rêves
        A la mélancolie
        A l'espoir qui nous tient
        A la santé du feu
        Et de la flamme"(*)


(*) Noir Désir - A ton étoile


Devant les portes de l'enfer, la chienne au mordant d'acier continuerait à broyer sarcastiquement ses akènes tant appréciées contre cerbères et commères car aux liesses de l'hadès elle était vouée. Qu'on en veuille ou non, il y aurait toujours en plein milieu du néant un Géant, un Malin ou un Sans Nom qui de la diablesse condamnée saurait en faire une déesse confirmée. En attendant la damnation, un Vénérable Vieux avait tout pouvoir sur sa déraison.
_________________
Nessty
[Quand le destin cogne plusieurs fois sur la même trogne !]


Il était là, en son coeur et en son âme. Inexorablement proche et pourtant... Nessty, effondrée devant la porte du Vénérable Vieux Con ne se rendit pas compte qu'on l'attrapait par les cheveux pour la trainer hors des portes de Chinon et la rouer de coups. Encore le destin qui la happait alors qu'elle était déjà sans vie, sans arme et sans défense. Des soldats de l'armée tourangelle se ruaient à tour de rôle sur le corps inerte de la Vilaine, des personnes qu'elle connaissait de surcroit pour avoir partager quelques chopines avec eux au printemps dernier alors qu'elle enterrait l'emblématique Juliuz. Avaient ils eu connaissance de son dernier méfait en Poitou ou était ce la rage de revoir cette greluche venir les terroriser à nouveau dans leurs tripots ?

La belle était munie d'un seing devant lui dispenser tout cela. En effet, lors d'une halte imposée par ses plaies mises à mal depuis le Poitou par le frottement sur la selle de son vieux canasson, elle avait été ramassée par un couple de paysans. Ils avaient eu la gentillesse de panser ses blessures tant bien que mal et de lui offrir un bout de parchemin sur lequel elle avait griffonné, avec une écriture mal maîtrisée sous la fièvre, ces quelques mots :

Citation:
Au seigneur de Lemere,

Je vous annonce ma venue à Chinon pour vous implorer de m'aider à surmonter blessures infligées en Poitou. Serait il possible que vous portiez votre noble parole auprès de votre duchesse afin de m'octroyer un laissez-passer ?

Je n'ai plus ni armes ni fierté d'être poitevine. Je suis disposée à me mettre, avec mes Vilains, au service de votre patrie dès que je serai rétablie, si Aristote m'accorde ce droit. Je sais que les fourbes poitevins ne resteront pas longtemps à distance du conflit visant les terres du centre et dont on me fait écho. Ma haine à leur égard est telle que je ferai tout en mon pouvoir pour entraver leurs plans diaboliques. Et voir revoir...

Merci par avance à vous, Vénérable Vieux Con.

Nessty


Aucun cachet de cire, aucune fioriture, juste les traces d'une plume qui était tombée sur le bout de papier au moment où la douleur s'éprenait à nouveau de ce corps meurtri et de larmes trop contenues qui s'étaient écrasées pour venir se mêler à l'encre. Nessty savait Hijikata homme d'honneur et, dans les jours qui suivirent, elle reprit la route vers la Touraine, toujours en se cramponnant à la crinière de son cheval malgré la souffrance persistante, déterminée à ne vivre ou mourir que dans ces bras tant appréciés.

Jusqu'à cette maudite nuit du 12 au 13 octobre 1457 où elle fut trainée depuis Chinon, cadavre battu à mort et jeté en bordure de la frontière angevine. Celle qui venait quémander hospitalité pour se faire soigner et qui venait en alliée se retrouva sous les bottes de l'armée de Dragoond. Volées de bâtons, coups d'épées, cris de mise à mort, boucherie innommable, horreur écarlate, lambeaux de chaire déchiquetée, os broyés, douleur insupportable remplaçant une autre déjà insurmontable, jusqu'à l'anesthésie totale, ténèbres profondes, silence parfait et repos du néant. Aucune compassion, aucune pitié, aucune once d'humanité, aucun respect pour une consigne comtale, aucun regret... Simplement l'infamie d'une poignée de belliqueux contre une gueuse, seule, démunie et déjà à l'agonie. Etrange victoire, pitoyable dans le fond et sans gloire, bataille gagnée d'avance, minable dans la forme et sans contenance. Les jeux étaient faits, cruels et perfides, et elle, la Vilaine n'avait mot à dire en dehors de perdre la vie sous tant de hargne à l'achever alors qu'elle était déjà au seuil de la mort. Magnifique exutoire d'une guerre qui se devait être la sienne, magnifiques faits de bravoure de soldats cherchant à tout prix le goût du sang, magnifique mascarade d'une politique pimentée de sorcellerie pour maintenir le pouvoir suprême d'une greluche trop fardée. Nessty se mourait dans le bourbier qui aurait toujours du rester sien.

Trompe la mort et puis tais toi !

La douleur s'était estompée tandis que son coeur se glaçait.

Déjà arrivait à ses oreilles la chanson de son enfance, celle qui lui chantait Johannes quand elle pleurait, effrayée à l'idée de se retrouver seule dans le noir.


        Mon petit enfant d'amour et de soleil
        De soleil
        Nessty belle, Nessty douce
        Faut me pardonner si je suis une abeille
        Une abeille qui trébuche et qui bûche
        Dans la ruche de la vie
        Où je survis
        Il faut vivre pareil, Nessty belle

_________________
--Kramdukon


[Trompe la mort...]


Kram du Kon, fel et féal Vilain de la toute première heure, avait quitté Poitiers à la recherche de sa Grande comme il l'appelait si affectueusement malgré la différence de carrure entre le colosse rouquin et la fluette gueuse.

Foutre de dieu ! Elle s'est jamais barrée sans m'le dire, sans ses armes, sans son encrier... S'passe qu'que chose ! Même en chaleur, cette chienne ne ferait pas cela... Mordiable !

A arpenter tout le Poitou, à questionner tous les gens croisés quitte à leur secouer le collet, à visiter tous les buissons et les tripots bien sur, à se faufiler entre toutes les lignes armées à l'affut de celle qui avait réussi à prendre la capitale poitevine, il finit par la retrouver en frontière de l'Anjou et de la Touraine. Elle gisait dans une flaque de sang, sans vie, minciée de toute part. L'ancien bourreau ne la reconnut tout d'abord pas tant il était subverti avant de voir rouge et de crier sa rage de ne pas avoir été là quand il le fallait pour la protéger comme il se l'était juré. Malheureusement il n'y avait déjà plus de décollations à faire sur les pouilleux qui avaient osé faire cela, pas un seul oriflamme à l'horizon, pas un maraud en maquis. Ils avaient levé leurs armes sur sa belle amie et il était prêt à occire jusqu'à Aristote s'il le fallait pour qu'il lui laisse sa mignotte, sa garce si riace et babillarde, cette si petite chose qui paraissait si fragile quand elle n'avait plus sa verve et son arrogance pour combattre. Une vieille mansarde en lisière de forêt et près d'un rui, la bonne aubaine. Il y emporta Nessty et s'activa de façon à trouver un remède miraculeux pour la sauver. L'improbable était entre ses paluches afin de garder une once de souffle dans ces chaires lacérées et tuméfiées en agissant au plus vite. L'improbable était dans ses onguents dont il détenait le secret, les tourmenteurs n'étant pas seulement doués pour ôter la vie mais également pour la conserver. L'improbable était dans les fioles de gniole dont il tamponnait la moindre plaie pour la laver de toute cette boue qui s'y était agglomérée. L'improbable était dans les prières que le gaillard avait totalement oubliées et dont le sens lui revint spontanément à l'esprit. Des jours et des nuits à veiller s'il le fallait, abusant de vigilance, Kram ne faillira jamais à la dévotion qu'il vouait depuis si longtemps à sa Grande allongée sur un peltre recouvert de peaux, si livide qu'il croyait à chaque instant que son âme avait été rendue à la Carnade. Il se ferait moine s'il le fallait ou vendrait son âme au Sans Nom si ce soliveau daignait se montrer !

J'jure par mon cap d'rendre la muse si ma Ness survit ! larmoyait il sans cesse avec ce ton paterne qu'il avait à chaque fois qu'il parlait de sa Grande.

Au petit matin, alors qu'il était parti afin de pourvoir à quelques repaissances, tissus pour les pansements et autres ingrédients pour que le miracle s'accomplisse, il crut la retrouver plus morte qu'à l'agonie. Le feu éteint dans l'âtre, le corps glacé, les lèvres bleues, une poitrine qui ne se soulève plus. L'improbable, le gros rouquin savait en user, mais cette fois en hurlant et implorant pour qu'elle fasse un pied de nez à la vile Faucheuse comme elle le faisait si malicieusement avec pontes et nonces de ce royaume. Le difficile combat entre la mort et la vie d'une gueuse soutenue pas son plus fel et féal Vilain parut durer une éternité jusqu'à ce gémissement de grevance, puis cette déglutition quand il porta un godet de soupe aux lèvres ayant repris couleur. De maigres signes de vie mais suffisant pour insuffler au espoir au rustaud improvisé barbier. Un espoir bientôt défait par une nouvelle pointe de fièvre. Kram se sentait impuissant devant telle volonté du Très Haut ou du Malin et surtout à court de curation efficace. Il savait quel emplâtre appliquer, quelle potion administrer et quelle chaire tailler pour que la gangrène ne s'installe pas mais pas là. Fichtre, sa Grande était déjà suffisamment moribonde comme ça !

Dans la vesture loqueteuse et ensanglantée de Nessty, de vraies penailles qu'il s'apprêtait à jeter au feu, le rouquin trouva la missive de ce Doc, une espèce de médicastre ou d'érudit, un noblion tourangeaux de surcroit. Tout ce que l'ancien bourreau détestait d'autant plus qu'il tournait depuis un temps autour de la gargamelle de la belle, tout en la complimentant sans cesse sur son chignon. La drôlesse avait déjà quitté leur campement ou leur auberge en pleine nuit, sans mot dire, sur la pointe des pieds pour le rejoindre mais toujours en emportant sa miséricorde. La coquine croyait peut être que son preu Vilain n'avait pas remarqué sa parade, à mettre sa houppelande et à se parer comme une bigote pour le jour de messe. Il savait bien que c'était pour s'escambiller avec ce bellâtre, il n'était pas dupe non plus, l'gros ! Le jeu françois était son loisir préféré à chaque halte dans un bourdeau. Puis ce n'était une donzelle comme celle là, montrant qu'elle avait plus de pice qu'un couillu, qui était encore jouvencelle, surtout pas à trainer avec la truandaille et en les aguichant avec le lacet de son corsage comme elle savait bien le faire. Kram s'empressa d'écrire une brève missive au soigneur.

Citation:
Sir,

Venez d'urgence en frontière. Sur le tertre angevin bordé par la forêt tourangelle, près du rui Montjoli, vous trouverez une bicoque de berger au pan unique en ardoise.

Nessty est au plus mal.

Kram du Kon



Hijikata
[ Intuition qui colle à la peau... ]


Deception... en un mot... tout était dit... l'Vénérable avait perdu face à l'insistance d'un chignon... il s'était alors extirpé de son mouroir nommé bibliotheque... avait pris un cheval... et s'en était allé rapidement dans le Poitou... un besoin urgent d'une consultation... une rencontre étrange... bien que fort délicieuce... quelque chose n'allait pas chez elle... elle semblait relativement dépitée... mais tout était caché par un decoletté bien plongeant... une bien belle façade... elle lui avait dit avoir b'soin de soin mais ce n'était en aucun cas le genre de soin qu'un simple medicastre était capable d'administré... il s'était fait present et attentif au plus beau chignon du royaume... l'était même reparti avec lui en direction de l'Anjou avant de faire marche arriere sans bien plus de precision... à en laisser l'Doc d'ordinaire si bavard avec elle totalement pantois... une séparation en tout bien tout honneur tres rapide... trop rapide surement... il avait tenté d'extirper de ses remparts quelques mots sur le pourquoi du comment... mais pas moyen... et elle s'en était retourné... comme si elle avait un truc à lui reprocher...

Desillusion... encore une... une de plus... garde tout ça pour lui l'Doc... trois styles de gens pour lui... les blaireaux pour qui il n'a aucune considération et qui ne meritent meme pas qu'l'Doc leve les yeux pour user sa salive dans des salutations qui n'ont pas lieux d'etre... les amis et ceux pour qui il a la considération dont la seule presence le rend charmeur pour les femmes et grognon pour les hommes... quoique... grognon pour les donzelles aussi... et les personnes particulieres pour lui... qui en plus d'etre des connaissances ont ce petit plus qui font que... inutile de dire que la premiere categorie est la peuplée... se compose de la majorité des pecores de tout duchés... et quand aux gens particuliers... se comptent sur les doigts d'un unique pied... pas contre faut pas rever... l'ira jamais raconter ça l'Doc que ce soit à la Norf... à la zoziotte et encore moins au plus beau chignon du royaume... bref... depuis cette séparation bien plus qu'étrange... pas une missive envoyée... pas une miette qui vole... ça le fait marmonner tout seul dans sa bibliotheque l'Vénérable vieux con...

Amertume... grandissante de jour en jour... mélangé à de l'inquietude... térrible mixture explosive... faire l'éffort de se déplacer... de la remettre sur le droit chemin... pour au final étre ignoré... forcement... lui demande de venir... l'est con l'vieux con il vient... puis pourrait vraiment donner des nouvelles... pas pour dire si l'moral est present ou pas... non... non... mais au moins pour dire que l'Poitou c'est sympa...

Désappointement... qu'il emporte même dans son Qlipoth... dans ses profondeurs ou les âmes mortes se putrifient de regrets et de remords mais n'arrivent pas à disparaitre... accroupis dans un de ses boyaux... à tenter de ne plus penser à rien... raté... l'corps physique ne montre rien... mais l'corps spirituel se triture l'esprit... encore et toujours... qu'avait-elle... pourquoi l'a-t-il senti se barricadant derriere de fausses excuses... de faux pretextes... secouer la tête... ne pas s'inquieter... bien assez grande... peine perdue... l'ectomplasme de malheur tourne autour et lui murmure quelques paroles qui se repercutent au plus profond de lui... craquer... oui le terme... prendre un velin... une plume et la faire glisser... choisir chaque mots... qu'elle aille pas croire quelque chose qui ne peut se faire sans defier la loi de morale et de la bienseance... une pointe d'ironie... ajoutez a cela une dose d'humour... et juste une pincée d'inquietude... si elle ne reagit pas la... surement qu'il s'est trompé sur cette personne qui lui tenait tant à coeur...

Agacement... tres leger... jours passent... l'oiseau de mauvaise augure revient mais sans aucun mot ni rien... tant pis... une croix sur son nom... une de plus... peu importe ses obligations... peu importe ses coercitions... l'a toujours pris du temps pour répondre quand on lui ecrit... comme on dit... pas de nouvelles... bonne nouvelle... l'a vecu sans... continuera de la meme façon... mais ça l'irrite tout de meme un peu cette histoire... l'impression se precise un peu chaque jours... comme s'il s'était voilé la face depuis cette fameuse séparation... comme si il l'avait senti aspirée par un trou noir... comme si son dernier regard qu'elle a porté sur lui... si tendre et si triste... allait etre le dernier... c'est cette mauvaise intuition qui le ferait presque prendre la route de nouveau pour revenir dans ce fameux duché pour savoir si la chieuse savait ou était passée le chignon... mais pas moyen... sa fille est de retour... une quasi-évasion de son couvent pour rester avec lui...

Irritation... bien que camouflé par son sourire charmeur... bien presente... trop presente... loin... trop loin... sans nouvelles aucunes... juste un point d'air... sa fille... souriante et curieuse... s'occuper l'esprit pour oublier ces gens qui sont importants... profiter de la presence des autres... continuer à etudier... encore et toujours... oublier peu a peu... jusqu'a ce qu'un jeune homme penetre dans la bibliotheque... grognement pour l'accueillir... dépose rapidement une missive sur son bureau... la prendre en mains... l'observer sans l'ouvrir... pas de cachet rien... maladroitement pliée... quel gueux à pu lui ecrire... en temps ordinaire l'aurait meme pas ouvert... serait passé directement dans le tas de feuilles a faire bruler pour l'hiver... mais au moment de la jeter... un doute... ce petit truc qui fait que... incomprehensible... mais il l'ouvre au final...

Medusé... la relecture effectuée... c'était donc ça... saletés de poitevin à la con... l'est loin d'etre angelique la Ness... mais de la a la blesser physiquement... et qu'elle en vienne a ne plus etre fiere de ce qu'elle est et surtout à demander assistance aussi sechement... sans prendre le temps de mettre en forme... lui envoyant une lettre a peine signée... et pigmentée de traces de larmes...

Abasourdi... par cette nouvelle... le laisser passer est validé sans probleme par la duchesse elle meme... monter sur les remparts pour aider à defendre le duché... en plus ça lui permettra de la voir arriver de loin... il ne pouvait aller à sa rencontre... ne sachant d'ou le chignon allait surgir... son tour de garde se terminait au milieu de la nuit... et toujours rien en vu... que faire... passer des jours a parcourir la campagne pour qu'elle arrive ici et qu'il n'y soit pas... ou rester ici et peut etre risquer a ce qu'elle n'arrive jamais... son choix fut le deuxieme... choix par defaut... mais choix tout de meme... l'avait mis au courant sa fille que si une femme arrivait elle devait envoyer quelqu'un le chercher de toute urgence... ou allait-elle aller pour le trouver si il n'était pas aux portes de la ville pour l'accueillir... en taverne... surement pas... ce sera soit dans sa fameuse bibliotheque... soit chez lui si elle s'en souvenait... ainsi... apres chaque tours de garde il parait labas... etudier comme à son habitude mais se posant pret de la fenetre donnant sur l'entrée de l'université... juste au cas ou...

Deconcerté par la situation... attendre... peut etre indefiniment... une soirée sur les remparts remplie de doutes... une impression tenace... qu'il devra tres bientot faire jouer ses doigts de medicastre pour soigner... nuit du 12 au treize intenable... toujours les meme rituels... apres la surveillance... la bibliotheque... aucun livre de lu ce soir la... un retour chez soi au petit matin... alors que l'astre de feu perce a peine... s'arreter devant la porte... quelques traces de sangs... rentrer comme un fou dans la maison... premier soulagement... sa fille va bien... avant de comprendre... le plus beau chignon était la... courir jusqu'au lieu de rassemblement de l'armée et choper le premier soldat qui traine... l'interpeller violement... pas ses habitudes mais la... effectivement... l'ont laissé pour morte bien loin de Chinon... histoire qu'elle ne puisse revenir de si-tot... prendre le premier cheval... passer rapidement la porte... l'armée a pour habitude de laisser les carcasses des gens battus a mort loin du territoire...

Terrifié par une pensée... parcours a grande chevauché le lieu ou il pense qu'elle est... ou que son seul corps est... descendre maladroitement du canasson... rien du tout... pas de trace d'elle... regarder un a un les corps gisant ci et la... elle n'y est pas... lachez un hurlement... crier son nom... aucune réponse... s'agenouiller à terre... serrer les poings a se faire craquer les phalanges...

Incapable... son ressentiment... incapable de sauver sa femme... incapable de sauver Apolonie... incapable d'etre la pour soigner la Norf... maintenant au tour de Nessty... remonter a cheval... et entreprendre le chemin de retour... s'en mordre la levre avoir un gout de sang dans la bouche... yeux legerement... tres legerement humide... laissant la monture suivre la route... avant qu'un messager avec deux ailes viennent attirer son attention... recupere le morceau de parchemin... prendre une grande inspiration... pas besoin de deux lectures malgré la brume de ses yeux... faire chevaucher aussi vite que possible l'équidé... a s'en faire presque desarçonner... pour mettre un pied a terre a quelques pas de cette cabane... traverser a toute allure la distance le séparant de cette porte qu'il fit claquer des que sa main se posa sur la poignée... poser son regard sur cette piece...

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--Kramdukon


[... et ferme là !]


Agenouillé au pied de la couche, le gros rouquin entendit un destrier s'arrêter devant la bicoque et son regard se déporta spontanément vers le porte. Deux éventualités s'offrait à lui : la merdaille se présentait pour achever son oeuvre morbide ou le médicastre tourangeau s'avérait plus rapide qu'il ne le pensait pour se ruer au chevet de la belle. Quoi qu'il en soit, l'ancien bourreau se releva et s'avança vers la table pour se saisir de sa lame. L'envie d'occire les uns comme l'autre ne lui manquait point. Tous étaient à ses yeux responsables de l'état de sa Grande et méritaient la décollation. Le désarroi du brave gaillard était à son paroxysme. L'huis n'eut pas le temps de grincer tant le geste pour l'ouvrir semblait empressé. C'était le muguet de la belle. Kram du Kon grogna un bonjour peu convainquant tant ce jour lui paraissait funeste. Il s'écarta toute fois avec un soupçon de respect pour laisser passer le bellâtre pour qu'il officie afin de sauver le brin de vie qui subsistait en Nessty.

Il voulut lui expliquer mais aucun mot ne vint. La simple vue de la Vilaine gisant nue sur son peltre, à peine recouverte d'une grossière couverture en laine brute empruntée à son cheval, pouvait suffire pour décrire l'ampleur des dégâts. Et puis le noblion ne lui accordait déjà plus d'attention. Il n'était pas venu pour lui. Simple constat, l'Kram paraissait invisible malgré ses 6 pieds et demi et ses 300 livres. Le moment où le soigneur se pencherait sur le corps inerte serait le bon pour lui coller un coup fatal dans la nuque. Bref et efficace, comme à chaque décollation à laquelle il avait procédé avant d'abandonner les honneurs dus à sa tâche ingrate pour se vouer aux Vilains. Malheureusement, il se résigna à ne pas laisser sa fougue vindicative prendre le dessus car cet homme était potentiellement le seul à savoir comment soutirer des griffes de la Carnade cette vie destinée à s'évaporer à chaque instant.

Kram ne quitta pas des yeux le Doc, surveillant chacun de ses gestes et la moindre réaction de sa Ness, prêt à bondir aux gémissements de douleur pour en infliger autant à celui qui osait lui faire du mal, mâchoire serrée et main crispée sur le manche de sa lame. Le rouquin se tut, le temps nécessaire pour ne pas déranger le visiteur, le soigneur ou celui qu'il ne savait plus comment le qualifier.


Hijikata
[ Aux mille et un soins... ]


Il resta bloqué quelques secondes sur ce qu'il voyait... evidemment elle ne pouvait etre seule la Ness... elle n'aurait pu lui ecrire vu l'état ou elle semblait etre... ça lui avait totalement echappé au Doc... il en resta surpris mais tout s'envola rapidement... à peine un regard au grand roux... l'Soigneur de Léméré se retrouve agenouillé aux cotés du plus beau chignon ensanglanté du royaume...

Son visage était livide... ses yeux montraient que la vie était en train de l'abandonner... d'un geste assuré et il retira cette miteuse couverture en laine qui la recouvrait... le liquide de vie entachait bien sa peau... il se mordit la levre... se maudissant de la voir dans cet état... il posa sa main sur sa joue... lentement... la faisant glisser le long de son corps nu... parcourant ce qu'elle ne cache qu'a moitié d'ordinaire sous un brin de tissu... il s'arreta net en secouant la tete... pas le moment pour ça! De ce simple geste l'Venerable vieux con venait de se poser dans un coin de son esprit pour laisser place au medicastre... ils parleraient qu'apres de ses honoraires... mais il était certain qu'elle s'en blesserait elle meme d'avantage pour alourdir sa note...

Le moment n'était pas à ce genre de pensée... l'enervement était a son comble... il sentait tout le poids des espoirs de ce type roux qui ne cessait de le regarder... il est deja d'ordinaire asociable... mais la... le regard quitta quelques instants le corps de Nessty...


Toi! De l'eau tu me fais bouillir ça et vite!

Il avait executé sans sourciller... sans répondre... le ton était inhabituel chez Hiji... il était sec et autoritaire... besace posée sur le sol... bouteille de mirabelle... ouverte... necessaire de couture... linge propre... la mirabelle impregne peu a peu la piece et le corps de plus en plus inerte de celle qui est devant ses yeux... le temps joue contre lui... il ne pipe pas un mot... il reste concentré... pas meme un mot a la face de rouquin qui lui rapporte ce qu'il a demandé...

Il nettoie... desinfecte... le fil se lie a la peau... il ne faut plus qu'elle saigne autant... pas le temps de penser... il ne faut pas... tout mais pas elle... les gestes sont precis... concis... il lui recoue tout ce qui peut l'etre... mais la situation reste inquietante... sa vie est entre ses mains et ne tient qu'a un fil... il pourra soigner son corps... mais le reste malheureusement de dependra plus de lui...

Il la recouvre de tout ce qui peut la recouvrir... il ne faut pas qu'elle se refroidisse... son mantel... la vieille peau sous elle... couverture en laine dessus... la main reste sur la joue de ce visage sans vie... il a fait ce qu'il avait a faire... maintenant reste a savoir ce qu'elle fera elle... va-t-elle l'abandonner comme d'autres ont deja fait... lui laissant amertume et regrets... non... elle ne pouvait pas faire cela... elle ne devait pas faire ça...

Le temps s'ecoulait lentement... les yeux sur sa caboche... pas un mot... rien... combien de temps resta-t-il à la regarder... il n'en n'avait aucune idée... pour la premiere fois depuis son arrivé il s'adressa au rouquin... expliquant que seul le temps saura dire...

Il revenait chaques nuits en ces lieux... l'extirpant de la bibliotheque qu'il aime tant... chaque fois qu'il passait la porte il esperait l'entendre raler... remettant son decolleté en place... mais a chaque fois il ne voyait qu'une épaisse couche de vetement qui couvrait son corps... une main sur sa joue... ou tenant sa main... ben surement tres con... mais sa voix retentissait dans la cabane... comme ça... une envie de parler... meme sans aucune réponse... combien de temps cela durait... aucune idée... peu importe... l'était la... servait surement à rien... mais...

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Nessty
[Du combat de l'impuissance au retour de la détermination.]


Les jours s'égrainaient, la Carnade s'éloignait chassée par la dextérité et la douceur d'un soigneur, la gueuse à l'agonie revenait peu à peu à la vie. Enfin presque...


La Vilaine ne savait pas si elle voulait encore vivre. Son regard perdu dans le vide la trahissait tandis que son souffle se faufilait difficilement entre ses lèvres confondues dans son teint blafard. Elle priait pour que la vie en elle prenne enfin la fuite et la laisse en paix avec elle même. Tant pis pour ses rêves de bravade dans lesquels elle se voyait en haut d'un rempart, brandissant l'étendard des Vilains et hurlant une dernière fois "Spoliatis arma supersunt !". Mourir pour son idéologie, il n'y avait rien de plus beau pour celle qui avait dédié toute sa vie à cela. Rien de suicidaire, non, mais elle en avait fait le serment un jour d'automne comme celui ci, signant de son sang le grimoire sous les yeux de la Môme. Dieu que ce jour là elle aurait du ce méfier de ceux qui refusaient de porter leur griffe vermeille sur un vélin ou qui y allaient à reculons. Toute fois, une fois les trahisons et le goût amer qu'elles laissaient passés, la ptite gueuse impétueuse s'était forgée et confirmée dans son caractère pour devenir la Grande. Pourquoi ce qualificatif ? Elle même ne le savait plus. Probablement une taquinerie affectueuse de son Kram du Kon. Nessty était devenue une femme déterminée et sans aucune peur mais toujours avec la même foi et avec la même fidélité aux siens. L'arrogance avait été sienne et rien ni personne n'avaient réussi à lui arracherait cela. Nombreux étaient ceux qui s'en mordaient encore les doigts après avoir voulu entraver le chemin de cette donzelle. Son chignon était toujours aussi haut perché tandis que sa main n'hésitait pas à se tendre vers les plus démunis. Sauf qu'aujourd'hui elle était devenue intransigeante, presque inhumaine quand il s'agissait de défendre ce qu'elle croyait être le Bien. C'était là le prix de sa conscience, n'agir que pour ce que l'on croit juste sans jamais tomber dans la supercherie.

La vie se cramponnait à une simple gueuse, maintes fois poignardée dans le dos et lâchement battue par une horde armée alors qu'elle était déjà à l'agonie. Un véritable miracle que pourtant elle se mit à maudire dès qu'elle put rouvrir les yeux tant elle était en grévance et dans l'incompréhension de ce qui s'était passé.

La terre est donc l'enfer auquel on me voue éternellement ?

Avait elle réussi à murmurer à son réveil dans ce corps qui ne cessait de la faire souffrir. Une convalescence de plusieurs semaines voir des mois lui avait on annoncé. Un autre supplice pour celle qui ne tenait guère en place, d'autant plus qu'elle avait appris être en terre ennemie, l'Anjou, avec toutes ces personnes altières et insultantes qu'elle y avait que trop croisées. La punition suprême alors que le sort n'avait cessé de s'abattre sur elle.

Le Poitou est il l'Erèbe et l'Anjou le Tartare ?

Elle souhaitait sentir la vie s'échapper d'elle pour la soulager enfin, maudissant ceux qui lui avaient fait du mal. Elle suppliait pour qu'on l'achève comme on avait du le faire avec son vieux canasson. Elle désirait entendre le champ d'un oiseau céleste pour la ramener vers ces printemps où elle avait été si heureuse afin de les vivre indéfiniment. La gueuse n'en oubliait pas pour autant les joies partagées, les voluptés vécues dans la grâce ou les victoires accumulées contre les hommes et les intempéries. Malheureusement elle s'en savait privée, allongée là dans la plus grande impuissance. Elle n'arrivait même plus à combattre son esprit pour qu'il la libère car ce dernier étant la source de son courage et de sa détermination ne semblait pas vouloir la laisser aller. Paix ou enfer, peu lui importait, elle voulait quitter ce monde.

Pourquoi m'avez vous gardez en vie alors qu'elle m'est devenue insupportable ?

Elle se mit à se maudire elle même de ne pas connaitre la faiblesse, la seule qui aurait pu lui faire baisser les bras pour aller vagabonder immédiatement dans le brouillard de l'Hadès. Tout allait donc recommencer pour elle, à arpenter cet enfer dans tous les sens pour en extirper jusqu'à la moelle une justice utopique, à haranguer devant milles foules une vérité que chacun détenait mais se refusait à exprimer, à affronter les plus pernicieux vautours du genre humain avec des pieds de nez dont le sarcasme était bien plus blessant qu'une lame parfaitement aiguisée ? La Vilaine était mordu d'un sombre besoin d'aller toujours plus loin pour un jour toucher le but de la sérénité pour tous, peu en importe les tourmentes traversées. A chaque fois qu'elle pensait y parvenir, elle ne trouvait qu'une pâle copie d'une paix falsifiée par un nouvel arrivage de crétins. L'éternel recommencement, c'était donc par lui que devait arriver l'expiation de tout ce qu'elle avait fait jusqu'à là. Mais qu'avait elle fait ? Du moins quel avait été le sens de ses actes ? Pour elle, elle avait accompli si peu, pour les autres elle en avait que trop fait.

Qu'ai je fais pour qu'Aristote ne me laisse pas traverser le Styx ?

Elle se mit à maudire son propre destin. Non qu'elle aurait préféré être l'une de ces simples d'esprit pour lesquels la route était toute tracée, elle se savait trop déterminée encore une fois dans sa volonté de vivre pleinement son idéologie malgré les innombrables doutes qui avaient pu l'assaillir. Son monde avait été parsemé de tant de coloris, de saveurs, d'odeurs et de sons qu'elle ne pouvait guère ignorer que son passé l'emporterait sur les voies d'une destinée encore plus complexe où elle trouverait peut être encore une once de bonté et de beauté. Elle repoussait elle même sans cesse les limites des divinités pour tenter de faire place à une sagesse naturelle étouffée par de multiples ambitions qui n'étaient point les siennes mais celles d'une majorité muette. Aujourd'hui cette limite était celle de la Mort qui la bousculait maintenant dans tous ses projets. Peut être avait elle vécu dans un rêve qui s'était au final transformé en cauchemar. Peut être s'était elle perdue dans un instinct de survie pour se dédier à une forme de liberté. Elle ignorait comment elle en était arrivée là, en dehors de sa rencontre avec la Môme. Elle méconnaissait son désir de s'abreuver constamment, non pas de ces chopines dont elle raffolait tant, mais de ces vérités incolores, insipides, inodores et silencieuses, désir qui lui avait pourtant permis de soulever des montagnes. Telle avait toujours été sa conduite, une ligne de vie rythmée par un "quo fata ferunt" persistant malgré les embuscades perfides, un besoin de mouvements constants pour conjurer l'inertie qu'on voulait lui imposer, la peur de se morfondre dans l'ennui ambiant par lequel on voulait l'étreindre avec un drôle de linceul d'impuissance.


Inexorablement la gueuse était une Vilaine et tout cela était plus qu'absurde : passé, présent et futur confondus. L'instant était bel et bien réel quant à lui. La flamme de la vie persistait en elle qu'elle le veuille ou non car... elle était entourée de personnes bienveillantes qu'elle se refusait d'abandonner ainsi. Sa tête se tourna vers celui qui était à son chevet pour la soigner. Elle l'observa en silence et lui adressa un sourire au delà de celui de gratitude. Dans ses noisettes l'on pouvait déceler cette étrange lueur, celle là même qu'elle avait à chaque fois que la Vilaine avait pris une décision. Sa main tâtonna jusqu'à rencontrer celle de son bienfaiteur. Elle murmura dans un souffle plus léger que les autres un mot, le plus simple mais le plus expressif de tous :

Merci.
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Hijikata
[Pour son sourire...]


L'attente était insupportable... les questions se bousculant dans sa caboche... plus qu'une histoire d'ethique pour un Doc... c'était une affaire personnelle... l'avait deja laissé filer il y a un temps un ange qui est allé prendre sa place pres d'Aristote... pas un deuxieme... tout mais pas ça... les journées n'avaient rien d'ensoleillées... la penombre regnant dans la piece étant similaire à la celle qui regnait dans sa caboche... des secondes a esperer... des minutes à penser... des heures a soigner... des journées d'angoisses...

Posé a coté d'elle... juste a la regarder... rien que ça... encore et toujours... pas un geste de plus... il pouvait s'occuper de son corps mais son âme était ailleurs... longues journées avant qu'une main encore tremblante vienne se poser delicatement sur la sienne... il écarquilla les yeux... ne percutant pas de suite ce qu'il se passait... pourtant elle bougeait... et arborait un magnifique sourire... quoique beaucoup fatigué... mais ses yeux encore sans vie quelques instants auparavant petillaient de vie... un murmure... doux et tendre... auquel il ne su répondre qu'en serrant sa menotte... pas tres expressif l'Doc...

Les allers-retours dans cette cabane remplaçant peu à peu sa bibliotheque... lorsque rien n'est plus important qu'un regard... les études se tiennent loins... aucune histoire... rien... juste elle... lui... et le serviteur un peu trop collant... l'aurait tellement de paroles à lui dire... tellement de choses à lui demander... tellement... mais pas un mot ne sort... il ne peut... il ne veut... simple excuse pour ne pas la fatiguer... qu'elle se contente de reprendre des forces... rien de plus...

Alors chaque jours s'en occuper... comme il aurait du pouvoir s'occuper de celle à qui il avait juré l'éternité... sentiment de culpabilité... bien plus que ça... mais un voile preferant voiler une realité qui devrait eclater mais qui prefere rester terrer loin de la... ne retourner que peu chez lui... juste pour trouver un morceau de fer brisé alors qu'elle frappait à sa porte... en recuperer les morceaux un à un... comme s'il s'agissait d'un coeur qu'il tentait de rassembler... brisé de l'avoir vu dans cet état... brisé comme il a pu l'etre lors de sa chevauchée pour arriver jusqu'à elle...

Les soins se multiplient avec comme fond des regards complices... mais un fond de honte sur tout ce qui avait pu se passer... il aurait du etre la... il aurait du pouvoir arreter une à une ces épées qui s'abattaient sur elle et qui ont faillit le priver à jamais de sa presence...

Un début de matinée comme les precedentes, à une exception prêt... leger passage chez un forgeron... elle lui l'avait dit lorsqu'ils s'étaient vu à Thouars... cette épée contient une partie de son âme... même s'il a du mal avec ce concept... la moindre chose qu'il puisse faire c'est lui la faire reforger... dans les moindres détails... de longues journées d'attente sans qu'il lui en touche un mot... avant d'etre alerté un beau matin que l'âme du plus beau chignon du royaume était enfin terminé...

Large sourire... une chevauchée des plus joyeuse... juste l'envie de lui faire plaisir... pose un pied à terre... un accueil des plus désagréable... uniquement le fameux Kram... celui qui l'avait menacé en cas de mort de sa maitresse... les regards se croisent... le médicastre reste en face... pas de parole... tout se voit sur le visage de son vis-à-vis... tous les reproches... sa haine envers lui... garde l'épée dans sa besace... surement mieux ainsi... lui apporte des malheurs... la moindre des choses était de la sauver apres l'avoir envoyé à une mort certaine... tourner les talons...

Retour à la réalité... sur un chemin retour des plus longs... l'corps astral a mal... tres mal... il a surement raison... l'âme de Nessty dans une main... plus lourde que jamais... poid d'un fardeau qu'il a du mal à accepter... les joues se mouillent sous la pluie inexistante qui perce à travers les arbres... quand le sens de la vie se perd... le Qlipoth est la... y plonger dedans... de nouveau... l'Vénérable erre tel une ombre sans but dans les couloirs de la bibliotheque... continuer encore et toujours... pour sa fille... bien une des rares choses qui lui reste... direction même Tours... s'éloigner de cette ville de malheur... qui lui a pris sa femme... sa raleuse... et maintenant qui l'éloigne du sourire du plus beau chignon du royaume... paraître... paraître... et encore paraître...

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--Kramdukon



[Le choc des muguets inavoués]


Les jours s'écoulaient paisiblement autant que la neige s'accumulait autour du cabanon. La bicoque n'était plus qu'un monceau blanc trahit par serpentin d'un sentier tracé par des chevaux. La Grande reprenait des forces, même le goût à la vie d'une façon dont l'ancien bourreau ne l'aurait point soupçonnée capable il y a quelques mois. Il surprenait des regards étranges chez la garcelette, jalousant même certaines oeillades complices qui ne lui étaient définitivement plus destinées. Les noisettes sarcastiques de Nessty se faisaient douces dès que l'espèce de noblion posait une semelle sur le plancher. Vraiment inconcevable quand l'on connaissait cette gueuse fermée à tous sentiments risquant de briser sa sacro-sainte carapace. Le gros rouquin enrageait secrètement, conservant le profil bas imputable au serment qu'il avait prêté un jour et conscient que face au manège qui se tramait sous ses yeux sa carrure de rustaud et toutes ces années de preu serviteur n'y feront rien. Le comble, c'était qu'à chaque fois qu'il tendait le crachoir à la donzelle pour lui extirper un aveu au sujet de l'encombrant galant qu'était à ses yeux de couillu surprotecteur ce Vénérable Vieux Con, celle ci plongeait sa truffe dans le fumet de sa bouillie de lait, de pain et de miel qu'il venait de lui servir. Au mieux, agacée de se faire bâcher par le bougre au pelage aussi hirsute que rougeoyant, elle faisait mine de vouloir se remettre à roupiller, planquant une fois de plus derrière le rideau de ses paupières un secret dont elle même ne soupçonnait point encore l'existence.

Mais l'Kram n'était pas l'idiot dont il avait l'air, il ne voyait pas que le dérisoire, il voulait savoir.

Le colosse tenait parfaitement son rôle de cerbère, comme toujours. Il haïssait de plus en plus le médicastre tourangeau et ne manquait guère une occasion de le lui faire comprendre, sans un mot bien sur mais son comportement était des plus explicites, comme toujours. Ce fut à un tel point qu'il s'attirera le courroux de la convalescente et celle ci décida d'envoyer son fel et feal compagnon porter une missive dans l'est. Lui, faire office de pigeon ! à l'autre bout du royaume ? pour une question de confiance ? Le gros rouquin ne fut pas dupe, il avait parfaitement compris le stratagème et s'inclina sans rechigner ouvertement devant le désir de la Grande, comme toujours. Il quitta donc la baraque à regret, le regard noir et la mâchoire serrée, profitant d'une dernière occasion pour bousculer le seigneur de Léméré qui venait d'arriver, ponctuel et fidèle au chevet de l'enchignonnée, comme toujours... Sauf que cette fois ci, il laissa sa haine exploser en un odieux mensonge, faisant croire que Nessty avait quitté peltre et lieux. Le goût subtil d'avoir réussi à évincer aussi facilement son concurent se fit âpre dès qu'il vit les flans du destrier reprendre le petit sentier tracé par lui durant tous ces jours d'angoisse et d'espoir. Une rassage d'eau de vie l'en lava et il suivit à son tour le chemin qui le mènerait loin de celle qu'il portait en son coeur.

Celui qui avait juré de rendre la muse si sa Ness survivait n'avait plus qu'à honorer cette parole prononcée dans un moment de profond désespoir et s'éclipser dans le premier monastère sur le chemin du retour avec le poids de son mensonge à jamais sur la conscience. Peut être qu'il se rendrait à Paris avant, sur les pas de son enfance dans un quartier des plus malfamés. Il y avait suffisamment de bordels là bas pour compenser la perte d'une belle godinette qui restera à jamais platonique pour un gaillard hideux comme lui. Lui faudrait au moins écumer tous les bouges une centaine de fois pour tenter d'effacer l'image de sa Grande en pamoison devant un bellâtre. Aérer ses morbacs ne pouvait lui faire que du bien mais jamais sa Vilaine il n'oubliera !

L'Kram n'était au final qu'un idiot comme il en avait l'air, il ne vivait que dans le dérisoire, mais maintenant il savait.


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