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[RP privé ] Au Tigre blanc Remèdes d'Asie et d'Orient

Musaraigne
Musa se réveilla au matin.
Il avait réussi à se rendormir après la méchante crise nocturne, mais ses rêves avaient été peuplés de cauchemars menaçants.
Plusieurs fois, il avait senti la main apaisante de Xm se poser sur lui et sa voix le rassurer doucement.

Au matin elle était toujours dans le fauteuil, à ses côtés et Musa ne put s'empêcher de se sentir pris de culpabilité.
Il se redressa faiblement dans le lit et lui sourit:
Xm, j'ai mauvaise conscience de voir qu'à cause de moi tu ne dors pas ou mal. Je te donne certainement trop de travail et...
Il hésita un instant puis poursuivit:
Enfin, je comprendrais que tu veuilles que je rentre, et maintenant que nous avons une idée du dosage que je peux supporter...
Il sentit l'angoisse étreindre son coeur mais continua néanmoins:
je peux peut-être poursuivre le traitement chez moi, qu'en penses tu?

Musa regardait attentivement le visage de Xm afin d'y déceler les moindres réactions visibles que pourrait susciter sa proposition: soulagement, inquiétude, déception...

Par ailleurs, étant extrêmement intuitif et totalement à réceptif à tout ce qui était communication non verbale, il lui semblait que Xm était partagé par des sentiments ambivalents quant à sa personne. Sentiments qu'il n'arrivait pas bien à démêler, car Xm était très forte et possédait une grande maîtrise d'elle-même, mais qui le troublaient lui aussi relativement...
Xmanfe1999
Musa était pâle est ses traits tirés démentaient ce qu'il venait de dire à Xm

Citation:
je peux peut-être poursuivre le traitement chez moi, qu'en penses tu?


mais la jeune femme lisait également dans le regard de son patient son impatience à rentrer auprès des siens. La déranger dans son sommeil et ses habitudes? Voilà qui importait bien peu pour elle. De plus son sommeil, depuis que Zeus avait mystérieusement disparu et qu'elle avait appris sa mort de semaines plus tard n'avait plus jamais été troublé que par ses propres ruminations. L'insomnie familière qui avait été sa compagne pendant son " séjour" auprès du sultan de Damas, quand dormir pouvait signifier mourir, l'avait reprise et elle l'avait retrouvée avec l'aisance d'un vêtement usé mais confortable. Alors ne pas dormir? Il n'y avait rien là qui puisse la déranger.

Tu ne me déranges pas du tout, Musa... je suis une vieille bête, je dors les yeux ouverts et parfois même en marchant.

Elle rit.

Fais comme tu le souhaites, mais je ne te chasse pas.

Elle ne pouvait s'empêcher de penser avec tristesse que ce soir elle allait à nouveau se retrouver seule.
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Musaraigne
Non, si tu me promets que je ne te dérange pas...

Musa scruta Xm attentivement et continua:
Personnellement je me sens mieux ici. Je n'ai pas besoin de donner le change et il y a moins de réactions affectives de part et d'autres...
Je veux dire par là que je n'ai pas peur d'être très mal devant toi alors qu'avec Cael et les enfants c'est plus compliqué... à la fois pour eux et pour moi...


Musa continuait de regarder Xm tout en lui parlant. Cette maladie créait une intimité et une complicité entre eux qu'il n'aurait jamais imaginé, mais qui ne le surprenait pas tant que ça.

Musa pensait que Xm et lui avaient certainement plus de points en commun qu'ils ne voulaient bien se l'avouer!
Notamment une certaine brutalité et une volonté affichée de ne pas vouloir s'encombrer de choses, mais aussi une vraie intuition et une sensibilité à fleur de peau qui avançait masquée...
Dans certaines situations, ces deux caractères bien trempés menaient droit au clash, mais dans d'autres...

Musa sourit et lui dit:
si j'en sors on finira même par devenir amis toi et moi...
Xmanfe1999
Citation:
Si j'en sors on finira même par devenir amis toi et moi...


Amis?
Ces mots résonnaient étrangement à l'oreille de Xm.
Tandis qu'elle regardait Musa debout devant elle, elle tournait et retournait ce mot dans son esprit au point qu'au bout de quelques secondes, elle se dit qu'elle devait lui paraître complètement idiote à le fixer comme cela sans rien dire.


Amis? répéta-t-elle la voix enrouée. Vous croyez...Tu crois vraiment?
Xm essayait du mieux qu'elle pouvait de gommer toute émotion de son timbre

Elle se raidit intérieurement avant de poursuivre.


Je crois que je ne suis pas très douée pour avoir des amis. Des amis hommes en tout cas.

Elle se remémora les rencontres masculines qui avaient jalonné son errance, depuis qu'elle avait quitté son Alsace natale.
Être l'amie d'un homme? Autant demander à un chat de dormir à côté d'une souris. Ce n'était tout bonnement pas possible. Les seules fois, la seule fois plutôt, où elle avait réussi, c'était parce l'homme en question avait pris peur et qu'il avait été sauvé in extremis par l'arrivée d'une demoiselle en détresse, qui l'avait rassuré en le prenant sous son aile jalouse. Belle réussite en effet. Ce souvenir arracha à Xm un sourire narquois.

Mais j'apprécie ta remarque, ajouta-t-elle d'un ton détaché.

Non, non, non, criait -elle intérieurement. Comment puis-je débiter aussi froidement de telles inepties?

Comment pouvait-elle se mentir autant à elle même. Elle savait bien pourtant, pour avoir haï Musa si fort, quand elle avait fait sa connaissance, après avoir fait celle de Cael, que ce qu'elle éprouvait aujourd'hui ne pouvait pas être anodin, inoffensif, ... amical?
La honte et la culpabilité enfonçaient doucement leurs griffes dans son coeur. Cael... non je ne peux pas.

Xm s'affairait dans la petite pièce, arrachant les draps froissés et encore humides de sueur dans lesquels Musa avait dormi la veille, retapant l'oreiller à grands coups de poings. Le parfum âcre qui s'en élevait, sueur douceâtre de corps malade, médicament, était dominé par un arôme indéfinissable qui lui donnait le vertige.
Musa la suivait des yeux pendant qu'elle s'activait.

Comme toujours quand elle se retrouvait confrontée à une situation qu'elle ne savait comment gérer, la colère enflait sourdement dans son ventre et la froideur de son apparence augmentait de manière inversement proportionnelle à son trouble intérieur.

Elle se força néanmoins à sourire.


Comme je te l'ai dit. Tu ne me déranges pas. Tu peux rester si tu veux.

Elle contrôlait son souffle, incapable d'aligner plus que ces petites phrases hachées. Une petite veine battait à sa gorge.
Elle jeta dans la cuisine à l'arrière de la maison le ballot de linge sale.


Mais si ça ne te fait rien, je dormirai en haut maintenant que tu vas mieux. Il me faut une bonne nuit de sommeil dans mon lit.
En cas de besoin tu sais où me trouver...


Elle aurait pu se gifler pour avoir laisser échapper quelque chose qui pouvait passer aussi explicitement pour une invite. Elle ajouta, sans précipitation:

Ou tu n'auras qu'à m'appeler.

Xm planta là son patient et s'en fut dans sa cour par la porte de derrière.
Elle espérait que Musa ne la suivrait pas et commença à tirer de l'eau au puits pour faire sa lessive.
Elle espérait surtout qu'elle allait parvenir à étouffer dans l'œuf l'espoir ignoble qu'il allait rester.

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Musaraigne
Musa suivit pensivement des yeux les hanches larges de Xm qui ondulaient sous sa robe pendant qu'elle partait d'un pas vif et presque fâchée dans la cour...

Musa avait poussé avec les loups. Il ne connaissait de ce fait aucune comptines, contes, traditions, chansonnettes, mais il avait tout de même appris de nombreuses choses dont les autres humains ne soupçonnaient même pas l'existence!
Ainsi il percevait très bien les signaux annonciateurs de la nature, concernant les tempêtes, les avalanches, les crues... Mais il avait aussi l'odorat incroyablement développé et savait déceler sans faillir certains signaux olfactifs forts chez autrui, tels que la peur, l'agressivité, la maladie...
Et le désir sexuel faisait partie de ces signaux olfactifs forts...
Musa ne pouvait donc plus se voiler la face quant aux mouvements émotionnels ambivalents que traversait Xm le concernant.

Au début il avait bien senti chez Xm une sorte de lâcher prise vis à vis de lui, alors qu'elle était habituellement plutôt agressive et sur ses gardes.
Musa avait dans un premier temps trouvé cela fort agréable, car ce lâcher prise permettait à tout ce qui était beau et tendre chez Xm de s'exprimer aussi.

Puis il avait senti chez elle un changement à son égard. Il avait voulu se convaincre que ce changement était dû à l'intérêt et à la compassion que le médicastre ressent et doit ressentir pour son malade.
Musa avait suffisamment souvent soigné des gens ou fait accoucher des femmes pour savoir les liens intimes qui se tissaient nécessairement et normalement entre le soignant et le soigné. En sentant cette chimie se mettre en place entre Xm et lui, il s'était dit que l'un et l'autre en avait l'habitude, saurait gérer ces affects et ne pas se mettre à tout confondre...

Mais là, en entendant sa voix chargée de souffle, ses phrases qui devenaient de plue en plus équivoques à force d'être auto-censurées, en voyant ses veines battre et son corps se débattre dans une sorte de suractivité, il ne pouvait plus nier l'évidence: Xm était troublé au plus haut point par sa présence...

Musa restait assis là, la tête entre les mains, à ressasser cette révélation soudaine. En même temps il ne comprenant simplement pas comment cela avait pu se mettre en place. Il ne lui semblait pas avoir été particulièrement charmant ou attirant. Il était maigre, mourant. Elle le voyait là, suant, vomissant et tremblant... Rien de tout cela n'était véritablement érotique!

De plus, suffisamment longtemps, Xm avait au contraire donné tous le signaux de rejet et d'agacement concernant la personnalité indépendante, laconique et sauvage de Musa.

A cet enchevêtrement de pensées se mêlaient aussi les suivantes: dans un tel imbroglio émotionnel, comment le soin était il encore possible? Pouvait il dormir ici à chaque reprise de traitement comme il le souhaitait ou est ce qu'il ne valait pas mieux désormais éviter à tout prix cela...

Musa pensait aussi à Cael, mais de manière sourde, se disant que ce n'était pas à elle de gérer cela mais bien à Xm et à lui.
Bien évidemment Cael avait incroyablement tiqué quand Musa lui avait dit qu'il passerait les nuits les plus difficiles chez Xm, exprimant ce faisant, le manque total de confiance qu'elle avait en Xm, mais aussi sans doute en Musa...

Tout à ses pensées, il n'avait pas vu revenir Xm de la cour. Mais quand il leva les yeux, il vit qu'elle était très près de lui, l'observant avec une forme d'avidité douloureuse.

Musa se leva lentement et calmement du tabouret où il était assit - aussi pour ne pas rester ainsi à hauteur des seins de Xm - et lui dit tranquillement, répondant ainsi à une remarque qu'avait fait Xm ultérieurement:
Moi si, j'ai déjà eu des amies femmes et sans nécessairement devoir passer par la case plumard...
Il lui sourit et continua:
bien sûr il faut un peu y mettre du sien, mais ça peut valoir le coup...
Xmanfe1999
La case plumard?

Xm était revenue de la cour chargée de deux seaux d'eau glacée qu'elle eut bien du mal à ne pas laisser échapper en arrivant auprès de Musa qui s'était affalé sur un siège à côté de la table, accoudé, la main sur le front.
Encore grimaçante sous l'effort et inquiète de voir son patient ainsi presque prostré, elle s'était penchée vers lui et s'était alors pris ces trois mots en pleine figure comme un soufflet.
Et en plus , il souriait...

La case plumard? Elle était tellement choquée et blessée que la suite lui avait échappé.
Abasourdie elle s'était reculée comme si Musa venait de la frapper.

Les mots lui manquaient.


C'est ça que tu crois? Tu... Tu... Tu crois que je veux te... tu crois que tout ce qui m'intéresse c'est de coucher avec toi??? C'est comme ça que tu me vois? Une ...

Xm se mordit les lèvres pour retenir ce qu'elle avait été sur le point de jeter au visage de Musa: une femelle en chaleur...

Elle parvint à se maîtriser suffisamment pour lui cracher:

Tu crois que j'ai tellement besoin de me faire... trousser que je suis prête à débaucher les maris de mes amies?

Elle n'en croyait pas ses oreilles. La douleur le disputait à la fureur qu'elle sentait monter. Elle essayait de contrôler sa voix.

Tu crois que si ce n'était que.... que si c'était juste...

Elle hoquetait, la colère l'étranglait. Sa fierté foulée au pied par trois mots. Ses yeux noirs brillaient dans son visage plus pâle encore que d'ordinaire.
D'un geste excédé elle repoussa derrière son oreille une mèche qui persistait à venir lui chatouiller le nez. Les larmes menaçaient de lui faire perdre toute dignité.


Oh et puis , à quoi bon... les hommes, vous êtes bien tous les mêmes...

Renversant au passage le seau d'un coup de pied rageur, elle sortit et s'en fut à grands pas dans la rue, laissant derrière elle la porte grande ouverte.
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Musaraigne
Musa était complètement abasourdi de la réaction de Xm. il eut juste le temps de l'attraper par le bras en criant: mais reste, voyons!

Elle s'arrêta net, mais ses yeux continuaient de jeter des éclairs dans son visage blême.
Musa lui dit sur un ton apaisant:
Je ne parlais pas de toi et de moi ou pas que de toi et pas que de moi si tu préfères...
je réfléchissais juste à ce que tu disais sur la difficulté pour toi d'avoir des amis hommes.


Il sentit qu'elle se détendait légèrement et il continua: Et j'entends très bien ce que tu dis, ce n'est pas la peine de jouer les naïfs. L'amitié entre homme et femme est souvent ambigüe ou faute de mieux ou éventuellement possible entre deux ex amants...

Il la regarda et sentit qu'elle était prête à continuer de l'écouter. Musa relâcha donc doucement sa main qui enserrait toujours son bras et continua:
Du coup, je réfléchissais aux quelques femmes que je considère comme des amies. Me demandant si ce terme d'amitié était un leurre, voire même un mensonge... ou si réellement j'avais des amies femmes.
Et dans les femmes que je considère comme mes amies, il y en a deux avec qui je n'ai jamais couché. L'une parce que je me le suis interdit et l'autre, parce que je n'en avais pas envie et il m'a semblé que pour cette femme cette absence de trouble était partagé et que nous avons vécu une vraie belle amitié...


Musa pensa à son amie Dom, si rebelle et sauvage, drôle, tendre et forte à la fois,avec laquelle il avait voyagé jusqu'en Italie et son coeur se serra... Il continua néanmoins:
... Ce qui tendrait à prouver que l'amitié désérotisée entre un homme et une femme est rarissime mais possible.

Musa se rassit doucement et conclut:
Ma remarque, certes maladroite, ne te concerne donc pas en tant que telle. Elle n'engage que moi en fait.

Musa rajouta sur un ton un peu las:
Et je ne suis pas en train de dire que tu rêves de me sauter dessus... Vu mon état de santé et ma dégaine actuelle, ce serait plutôt une faute de goût de ta part...

Ces lèvres se retroussèrent en un demi sourire qui découvrit juste la pointe brillante de la canine:
Et qui plus est, même si c'était le cas, n'ayant qu'une connaissance très approximative de ce que certains appelle la morale, je n'en déduirais rien sur tes besoins affectifs et ne te mépriserais pas pour autant..

Musa regarda Xm avec franchise et lui dit: je suis désolé de t'avoir blessé ou offensé, mais il n'y avait pas dans mes paroles ce que tu as cru y déceler.
Puis il ferma les yeux, épuisé d'avoir tant parlé.
Xmanfe1999
Le sang qui rugissait furieusement aux oreilles de Xm l'empêchait de saisir l'intégralité de ce que lui disait Musa. D'ailleurs elle n'avait pas envie de l'entendre. Ce discours rassurant sur l'amitié entre hommes et femmes. Quelle sinistre plaisanterie!
Peu à peu, cependant, les battements affolés de son cœur se calmèrent et sa colère commença à retomber. Ne restait plus qu'une immense détresse et une immense honte de s'être ainsi laissée emporter devant lui.
Quel médicastre digne de ce nom se serait ainsi laissé aller à perdre son sang-froid devant son patient? Sa crédibilité venait sans nul doute d'en être sérieusement écornée.

Pendant que Xm reprenait contrôle d'elle même, Musa ne l'avait pas lâchée. Le contact brûlant de sa main sur son bras acheva de la ramener à la réalité. Elle battit plusieurs fois des paupières pour chasser les larmes qui menaçaient de rouler sur ses joues.
D'une voix rendue rauque par son accès de rage, elle s'adressa à Musa, en évitant de le regarder en face.


Je te prie de m'excuser. Je ne sais pas ce qui m'a pris. Je comprendrais parfaitement que tu ne veuilles plus de moi comme médicastre. D'ailleurs, cela vaudrait sans doute mieux.

Le timbre de la voix de Xm était plat et complètement dépourvu d'émotion.

Le mieux serait, je crois, que tu rentres chez toi. Je m'occuperai de préparer ce qu'il faut pendant la journée et je te le ferai parvenir.

Elle se détourna pour chercher quelque chose dans un tiroir.

D'une voix presque inaudible et tout aussi inexpressive elle ajouta:


Maintenant laisse-moi s'il te plait...
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Xmanfe1999
Après le départ de Musa, Xm s'était assise à sa table et y était restée longtemps sans bouger. D'un geste machinal, elle lissait un pli de ses braies ( jamais de robe Xm, mon cher Musa ce n'est pas dans sa nature!). Ses yeux ne quittaient pas la marque humide que l'eau avait laissé sur le sol de pierre. Elle s'absorbait dans sa contemplation comme si les contours indistincts de la tache allaient lui suggérer une quelconque solution au dilemme qui la tiraillait.

D'une part, continuer à soigner Musa était son devoir de médicastre, même si elle n'avait prêté aucun serment et qu'aucune université helvète n'accepterait de reconnaître la formation qu'elle avait reçue.

D'autre part, la fréquentation assidue de son patient ne lui faisait aucun bien à elle. Il importait bien évidemment que le traitement puisse se poursuivre dans de bonnes conditions, car même si pour l'instant son état ne donnait aucun signe d'amélioration ou d'aggravation, elle avait foi en ce que lui avaient transmis les moines de Xuankong Si...
Le traitement devait opérer... Il ne pouvait pas en être autrement... Musa ne pouvait pas... Elle n'osa même en esprit achever sa phrase.

Xm s'arracha avec effort à la contemplation de la flaque d'eau sur le sol. Quelques instants auparavant, elle avait lancé à Musa, pour se débarrasser de lui, qu'elle allait préparer la cure suivante et la lui faire parvenir. Sa décision était maintenant prise. Elle allait faire le nécessaire et ensuite disparaître, ou tout au moins se retirer quelques temps. Elle n'avait aucun doute, Cael saurait faire ce qu'il fallait.

Elle retourna donc dans sa cuisine, qui pour quelques heures redevint son officine et y prépara la médication que Cael devrait administrer à son compagnon.

Tout en surveillant attentivement la décoction, la décantation, la distillation puis la réduction de la mixture, puis en y intégrant les ingrédients qui la rendraient moins nocive, elle réfléchissait à la manière de présenter son changement d’attitude à son amie.
Perchée sur un tabouret, les bras enserrant ses genoux, elle s’interrogeait.


Comment lui faire comprendre sans la blesser ? Xm invectivait son reflet déformé sur la panse rebondie de sa cornue :
Hein, qu’est ce que tu vas lui dire, bougre d’andouille ? Désolée Cael, mais je ne peux plus soigner ton mari ? Je suis tombée amoureuse de lui et je suis prête à tout pour me faire aimer de lui ?
Grotesque.
En plus, amoureuse, ce n’était vraiment pas le mot.

Xm ne ressentait rien de cette fièvre qui l’avait nouée pendant des semaines tandis que Mélian et elle se découvraient l’un l’autre, se rapprochaient , se liaient, s’aimaient… pour finalement se déchirer.
Elle ne ressentait pas non plus la soif inextinguible, la faim dévorante que Zeus lui inspirait. Elle avait été insatiable et infatigable pendant les quelques semaines qu’avait duré leur liaison. Mais son âme était restée solitaire et personne, pas même Mélian avant lui, n’avait su briser le mur qu’elle avait construit autour d’elle depuis la mort de son maître des années auparavant. Personne jusqu’à Musa.

L’évidence de ce constat la frappa en plein visage.
Musa, son humour caustique, sa parole acérée. Son calme. Son flegme. Son exigence. Sa violence maîtrisée qui bouillonnait en lui comme une flamme même dans son état de faiblesse et de lassitude extrêmes.
Comment une âme si semblable à la sienne pouvait elle avoir été catapultée sur terre et ne pas lui être destinée?

Xm modelait pensivement entre ses mains les pilules qu’elle enrobait délicatement de cire fondue. Le jour était maintenant tombé et la flamme des bougies se reflétait dans le verre et le cuivre des instruments que Xm avait patiemment rassemblés dans son officine.
Son ouvrage achevé, Xm s’assit un moment devant sa table de travail pour contempler son œuvre.
Nichées dans une boite de laque verte les pilules dégageaient la même odeur astringente et forte que celles qu’elle avait préparées quelques jours plus tôt.

Si je les prenais toutes en même temps, songea un instant Xm. Tout serait fini. Plus de Xm, plus de Genève, plus de Musa, plus de Cael, plus de soucis… Plus rien que le grand rien.
Avec peut-être au bout une réincarnation dans un monde meilleur dans une forme plus à même de rejoindre la félicité de l’anéantissement suprême au terme d’un nouveau cycle…
Ou une irrémédiable régression ?


Xm soupira. A quoi bon vouloir précipiter sa fin ?
Elle haussa les épaules devant la vanité du geste dont elle avait un instant caressé l’idée.
A quoi bon mettre fin à sa présente incarnation sans avoir résolu tous ses problèmes, sans avoir réparé ses erreurs et ses errements ?
Tout cela ne la mènerait qu’à les répéter encore et encore, incarnation après incarnation.

Elle referma le couvercle de la boite et l’enveloppa dans un parchemin sur lequel elle avait écrit avec soin les instructions pour Cael.
Prenant sa cape et son col elle sortit dans les rues désertes à la recherche de amie. Sans doute la trouverait-elle en taverne.

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Musaraigne
Musa arriva devant la porte de Xm et hésita un instant.
Puis il se pencha et glissa un papier sous sa porte avant de s'en aller aussi discrètement qu'il était venu



Chère Xm,
j'aimerais te voir, mais bien sûr il faudrait que tu le veuilles aussi...
j'attends donc ton bon vouloir et t'embrasse
Musa, désormais chauve...
Musaraigne
Musa passa devant la maison de Xm. Cette dernière était quasi invisible en ce moment et d'ailleurs sa maison semblait hermétiquement fermée.
Musa se dit qu'elle était sans doute dans sa maison de thé et il soupira.
Un temps il s'était senti proche d'elle. Sa maladie et la façon dont Xm avait commencé à s'occuper de lui, lui avait permis d'avoir aussi accès à la douceur de cette personnalité torturée.
Musa s'arrêta et regarda attentivement la maison, dont désormais il connaissait bien l'intérieur...
Et puis Xm avait commencé par investir dans cette relation de patient-soignant et même de possibles amis - car il se sentait très proche d'elle sur bien des points et il ne doutait pas qu'il en allait de même pour elle - des sentiments plus ambivalents...
Musa soupira encore une fois, une ride soucieuse lui barrait le front, puis il reprit sa route, tout à ses pensées.
Xmanfe1999
A force de gardes avec ses soldats et de nuits sans sommeil aux côtés de son mystérieux visiteur, Xm commençait à perdre doucement la notion du temps. D'aucuns auraient ajouté que sa notion de la réalité avait elle aussi tendance à devenir plus floue et son amie Caël, qu'elle venait de rencontrer en taverne, semblait pour sa part s'inquiéter beaucoup pour elle. Les regards soucieux qu'elle lui jetait à chacune de leurs brèves rencontres ces derniers jours, en disaient long sur l'incertitude qui commençait à l'habiter.

Serais-je, en en train de devenir folle? se demandait Xm en cheminant à grand pas dans les rues sombres et désertes de Genève.
Elle s'arrêta un moment à la lumière d'un pot à feu pour mieux réfléchir. Le vent glacial s'engouffrait sous sa cape qu'elle resserra frileusement autour d'elle. Elle haussa les épaules. La jeune femme devait bien admettre que celui qu'elle voyait tous les soirs dans sa maison au fond des bois ne pouvait pas être là.

Un spectre?
Elle ne pouvait l'accepter. Comment un spectre aurait-il pu lui répondre, lui sourire, boire son thé, manger sa nourriture, passer la nuit avec elle sous sa couverture?
Le visage fermé, Xm se remit en marche.

Ou alors tout cela n'était-il qu'une cruelle illusion?
Une rassurante création de son esprit malade et de son cœur déchiré par la culpabilité? Xm s'arrêta à nouveau.
Dans le froid et les ténèbres humides de la nuit, au delà du pont et de la place devant la grande bâtisse sombre de l'avoyerie, la route vers la forêt et la montagne ouvrait un sillon miroitant sous la lune. En plissant les yeux, elle pouvait presque distinguer une lueur indécise, tremblante comme un feu follet. Un spectre aurait -il pu allumer une lanterne? Elle n'avait en tout cas aucun souvenir de l'avoir fait. D'ailleurs, elle, si précautionneuse et ordonnée, comment aurait-elle pu commettre pareille imprudence?

Laisser une lanterne allumée dans une maison de bois et de papier... impossible.

Les planches du pont, puis les pavés de la place de la mairie, résonnèrent sous les bottes de Xm. Il n'y avait pas âme qui vive à cette heure tardive. Un volet battait au vent, grinçant et cognant contre une fenêtre avec une régularité sinistre. Comme tirée d'un mauvais rêve, Xm réalisa qu'elle se trouvait devant son échoppe et que le volet qui battait était celui qui défendait sa fenêtre. Elle s'approcha, machinalement pour le fixer plus solidement, le bruit devait agacer ses voisins...
Qui étaient-ils au fait? Elle ne s'en souvenait plus.
Alors qu'elle s'apprêtait à coincer la persienne rebelle avec une pierre, elle aperçut une feuille collée contre le carreau par la pluie et le vent. Un pot à feu placé providentiellement à quelques pas lui permit de déchiffrer les quelques lignes délavées, tracées d'une main alerte.


Citation:
Chère Xm,
j'aimerais te voir, mais bien sûr il faudrait que tu le veuilles aussi...
j'attends donc ton bon vouloir et t'embrasse
Musa, désormais chauve...


Xm jura à mi-voix. La courte missive à peine lisible encore se froissa dans son poing serré. Un sentiment d'impuissance et de honte l'envahit soudain.

Mein Gott, comment ai-je pu ainsi l'abandonner? Mais...
Elle défroissa le message et le rapprocha de la flamme du pot à feu, le retournant en tout sens, tâchant de découvrir un indice, une date qui pourrait lui indiquer quand Musaraigne avait déposé ce parchemin. Rien. Pas une trace. Certes, l'écriture était encore visible malgré le mauvais temps qu'il avait fait ces derniers jours.
Il ne pouvait pas y avoir de cela plus d'une semaine? Deux???
Xm affolée essayait de se remémorer la dernière fois qu'elle s'était arrêtée devant sa boutique. Combien de nuits de gardes avait-elle effectuées depuis? Combien de nuit d'oubli avait-elle passées dans sa maison dans la montagne?
Impossible de se le rappeler.
Fouillant sous la grosse barrique retournée qui lui servait de siège devant sa fenêtre quand il faisait beau, Xm récupéra la clef et entrouvrit la porte. Il régnait dans la boutique un froid de caveau et la lune qui n'avait pas encore atteint son point de culmination n'éclairait pas encore la pièce qui semblait remplie d'une ombre liquide et noire comme de la suie. Xm eut un mouvement de recul. Son regard angoissé se tourna encore une fois vers la montagne où le lumignon qu'elle y avait distingué quelques minutes auparavant semblait clignait pour l'appeler. Xm hésitait sur le pas de la porte, se mordant les lèvres. Au bout de longues secondes elle se décida enfin à entrer, adressant une prière muette à celui qui l'attendrait en vain cette nuit .


Pardonne-moi maître. Je n'ai pas le choix. Je dois sauver la vie de cet homme.

Elle entra et referma la porte derrière elle. Elle se hâta d'allumer un feu et de poser une chandelle dans un candélabre sur la table. Ne sachant où elle avait laissé son écritoire - peut-être était-elle restée là-haut avec le reste de ses affaires - elle retourna la lettre que lui avait adressée Musa et la lissa du plat de sa main. Une mine, une plume, il lui fallait quelque chose pour lui répondre. Fouillant fiévreusement ses tiroirs, elle finit par dénicher un morceau de mine de plomb et griffonna en toute hâte:

Citation:
Je suis désolée. J'espère que tu me pardonneras de t'avoir abandonné. Viens me voir dès que tu le voudras. Je t'attends. Xm


Elle grimpa quatre à quatre au grenier, où par bonheur ses colombes n'avaient pas terminé la réserve de grain qu'elle leur avait laissé à son dernier passage. Elle attrapa la plus courageuse, celle qui n'avait pas peur de voler la nuit, et lui fixa les message soigneusement replié à la patte. Elle la lança par la lucarne.
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Musaraigne
Musa arriva à pas rapides et silencieux devant la maison de Xm.
Par les carreaux verdâtres, il voyait la lueur d'un feu de cheminée qui dansait en des arabesques bizarres.

Musa venait de recevoir la pigeon de Xm. L'heure était tardive, mais il savait qu'elle l'attendait. Il tenait contre lui la bouteille de champagne qu'il était allé chercher à son échoppe. Ce n'est pas qu'ils avaient quoi que ce soit à fêter, mais Musa savait que Xm ne buvait pas que du thé vert et qu'elle aimait aussi l'alcool.
Cela faisait longtemps qu'ils ne s'étaient vus en tête à tête et Musa n'avait aucune idée de quoi allait être fait leur entrevue...

Musa monta les marches qui le séparait du perron et gratta la porte d'un doigt léger, comme à son habitude.
Il accompagna son geste de la voix et souffla de sa voix chaude et grave que le chuchotement rendait un peu rauque:
Xm, c'est Musa. Ouvre-moi.

Bizarrement Musa sentit son coeur battre un peu plus vite quand la porte se mit à tourner de suite sur ses gonds, découvrant une Xm cheveux défaits qui le regardait étrangement et presque timidement.

Musa laissa un instant ses yeux sombres se promener sur ses traits fins et racés, puis sa bouche dessina un léger sourire :
Tu vas réussir à me laisser rentrer ou tu souhaites que nous discutions sur le perron par - 10?
Xmanfe1999
La main sur la poignée de la porte largement ouverte, Xm regardait Musa.
Chaudement emmitouflé dans une cape, son crâne nu dissimulé par un foulard noué à l'arrière de sa tête il avait quelque chose d'un brigand. L'espace d'un instant, dans l'ombre projetée par l'avant toit sur son visage, elle crut reconnaître son contrebandier préféré et se retint juste à temps de le débarrasser de la bouteille qu'il avait à la main pour lui sauter au cou et l'embrasser... C’est alors qu’elle avait reconnu la voix de son visiteur qui lui disait :


Citation:
Tu vas réussir à me laisser rentrer ou tu souhaites que nous discutions sur le perron par - 10?


Surprise, confuse et à vrai dire un peu déçue elle s’effaça pour laisser entrer Musa, ne pouvant s’empêcher cependant de se demander quelle aurait été sa réaction si elle s’était pendue à son cou, lèvres offertes. Cette pensée la troubla quelque peu.

Entre je t’en prie. Comme tu vois je m’occupais en t’attendant.
Xm désigna d’un geste la table où gisait, posé sur un grand rectangle de soie noire, un magnifique sabre long de plus de trois pieds.
Soigneusement alignés sur la table dans l’ordre où elle devait s’en servir, Xm avait disposé une pierre à aiguiser plongée dans un pot d’eau pure, la poudre à polir serrée en boule dans un carré de tissu fin monté sur un manche de roseau, puis le pinceau et un flacon contenant l’huile de girofle qu’elle s’était procurée à prix d’or par ses canaux clandestins habituels.

Souriante, elle invita Musa à s’asseoir au sol près de l’âtre et, saisissant le sabre et le pot de terre cuite dans lequel trempait la pierre elle s’assit face à lui sur un tabouret bas. Elle lissa soigneusement sur ses cuisses les plis de son large pantalon de coton noir. Musa n’en avait jamais vu de pareil. Xm jeta devant ses pieds croisés – gainés, remarqua Musa, d’étranges bas de chausses blancs comportant un doigt pour le gros orteil- un genre de coussinet de paille tressée serré sur lequel elle fit reposer la pointe de la lame.


J’espère que ça ne te gêne pas si je termine… Je ne savais pas si tu viendrais. Je me suis couchée après t’avoir écrit mais malgré ma fatigue le sommeil me fuit…

Xm eut un petit rire étrange.

Ou peut-être est-ce moi qui le fuis, je ne sais plus trop. En tout cas, je n’ai pas réussi à m’endormir et finalement je me suis relevée et je n’ai rien trouvé de mieux à faire que de me mettre à affuter cette beauté…

La jeune femme avait saisi délicatement la tsuka* dans sa main gauche et tout en parlant, avait commencé à caresser la lame à l’aide de sa pierre mouillée, d’un mouvement lent, long et régulier. La soie vibrait à peine, rendant un son clair à chaque fois que Xm parvenait au bout de la lame. Bien que n’étant pas particulièrement petite pour une femme, Xm avait peine à parvenir au bout de la lame et devait se pencher en avant et tendre son bras droit au maximum pour y arriver. L’effort ne tarda pas à faire monter le rouge aux joues de la jeune femme habituellement pâle, et ses cheveux défaits à se collèrent à ses tempes. Elle les ramena d’un geste preste derrière ses oreilles et tira d’une des larges manches de sa veste croisée un petit foulard rouge qu’elle noua autour de son front.

Assis au coin du feu, dont les flammes se reflétaient dans la lame et dans les yeux brillants de Xm, Musa l’observait, la bouteille toujours à la main.

Sans lever les yeux de son ouvrage, Xm s’adressa à Musa qui sembla soudain sortir d’un rêve.


Je boirais bien un peu de ce vin que tu nous as apporté. Ôte-moi un doute : est-ce là du vin de Champagne ? Si c’est le cas tu as deviné mes goûts. C’est mon préféré. Après celui que l’on produit près de chez moi naturellement ?

La jeune femme soupira.

Cela fait des lustres que j’en ai bu…

Toujours entièrement attentive aux longues caresses qu’elle administrait presque langoureusement à sa lame, la jeune femme désigna du menton le meuble d’angle dans lequel elle rangeait tous ses trésors.

Tiens, si tu veux bien nous chercher ce qu’il faut. Il doit bien y avoir là dedans de quoi déguster dignement ce breuvage princier…

La bouteille à la main, Musa entrouvrait une à une les portes du meuble à la recherche des gobelets, des coupes ou des hanaps dans lesquels il pourrait verser le vin qui devait commencer à se réchauffer.

Non ! manquant de laisser choir le précieux katana aiguisé à ses pieds, Xm poussa un cri étranglé. Pas là ! En haut, à gau…che…

Trop tard. Il avait vu.

Les amateurs savent naturellement que la tsuka est la poignée d'un katana...

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Musaraigne
Musa fit comme si de rien n'était, attrapa deux coupes et les posa sur la table basse devant Xm.
Puis sans crier gare il lui prit la lame des mains et d'un geste vif, sabra la bouteille de champagne et eut un rire bref en voyant l'air estomaqué de Xm.

Il reposa la lame devant elle, versa le liquide doré et pétillant dans les coupes et leva son verre :
A notre santé ? C'est cela qu'il faut dire?

Musa eut un demi sourire, fit sonner sa coupe contre celle de Xm prit une gorgée de champagne et se laissa doucement choir au sol sur un très beau coussin, face à la jeune femme.
Il la regardait tranquillement et attendait qu'elle dise quelque chose. Après tout, c'était elle qui lui avait écrit pour le faire venir...
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