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[Rp] Memento quia pulvi es

Soeli
Assise derrière un bureau une jeune femme écrit. Dans la pièce régnait un silence proche de l'absolu; silence tout juste empiété par le crissement de la plume, qu'elle tenait entre ses doigts, glissant sur le vélin et le crépitement en provenance du foyer où brulait un feu de cheminée. Autour d'elle dansaient des ombres et des formes bercées par le rythme des flammes émanant des chandelles qui les baignaient de leur lumière orangée; atmosphère tantôt chaleureuse tantôt maussade, mais surtout un savant mélange des deux. Sur la table, juste à portée de sa main dextre, un verre plein et une bouteille entamée contenant, tout deux, un liquide liquoreux verdâtre, posés parmi une multitude de parchemins de toutes sortes.
La femme quant à elle avait de fausses allures de princesse; vêtue d'une magnifique robe satinée bleu saphir, ses longs cheveux noirs tombant librement partagés entre ses épaules, ses avant-bras, sa poitrine et son dos; son visage était fermé, ses lèvres closes, seuls ses yeux semblaient expressifs brillant d'une lueur particulière.

Dans la pénombre, on vit son poignet imposer un mouvement brusque autant que rapide à la plume qui dessina de son encre noir sa signature au bas du document:

Soeli de Margny-Riddermark

La plume fut ensuite déposée soigneusement et l'encrier refermé. Redressant son dos qu'elle colla au dossier du fauteuil elle porta sa main sénestre vers la dextre, pour attraper entre ses doigts une chevalière qu'elle fît glisser le long de son index; elle s'arrêta pour l'observer un instant avant de la déposer par dessus le parchemin; elle fit ensuite de même avec la médaille Aristotélicienne qu'elle portait autour de son cou depuis son baptême, puis se leva faisant grincer la chaise sur le parquet.
Elle attrapa le verre posé sur la table, le vida d'une traite, le remplit à nouveau et se dirigea en dansant vers la fenêtre. Ses pieds étaient nus. Dehors la nuit était tombée occultant de son voile obscur le paysage, c'est sont reflet qui lui fut logiquement renvoyé par les vitres; elle se sourit, leva son verre, bu une gorgée et se remit à danser au rythme d'une musique imaginaire; elle le fit longtemps.
Ses gestes devinrent moins gracieux à mesure que l'absinthe, car il s'agissait bien de cela, faisait son effet; elle était prête. Tout en virevoltant, elle éteignit chacune des bougies allumées du bureau du Comte de Beaufort sauf une qu'elle garda pour se guider au travers des couloirs et allumer toutes les autres. Elle descendit l'escalier central, et le regarda longuement d'en bas avant de commencer à allumer chacune des chandelles qu'elle avait fait placer -de part et d'autre- sur chacune des marches et ce jusqu'au premier étage; le hall devint instantanément plus chaleureux; tout était fin près pour accueillir le Comte après une longue journée de travail au château. Tout en haut de la double volée d'escaliers, elle attrapa une longue tresse de rubans multicolores, qu'elle avait soigneusement confectionnée la veille, et l'attacha méticuleusement -face à l'escalier central faisant face elle même à la porte d'entrée- à la rampe en pierre blanche; assise sur le sol, entourée de ses jupons qui formaient autour d'elle un cercle presque parfait, elle tenta d'exécuter un nœud, tout aussi solide, à l'autre extrémité.

Tandis que glissait entre ses doigts le doux tissu satiné, la Margny leva la tête pour regarder l'homme qui assis sur la dernière marche l'observait de ses yeux sombres et froids; que les tâches semblant si simples d'ordinaire peuvent être compliquées lorsque l'on a, comme Soeli, quelques verres dans le nez, elle fût obligée de s'y prendre à plusieurs reprises avant de parvenir à obtenir le résultat escompté. Se maintenant d'une main sur la rampe, tenant l'épais ruban de l'autre, elle se releva; c'est alors que sa voix retentit dans la salle – à moins que ce ne soit dans sa tête:


Petite sotte!

Ce à quoi elle se répondit à voix basse:


Oh, la ferme! Je le sais! On aura l'éternité pour en débattre...


Tout en passant la corde fortunée -plus que de fortune- autour de son cou, prenant bien soin de ne pas y coincer le moindre cheveu, elle enjamba la rambarde et s'y assit un moment. Son coeur accéléra à n'en plus pouvoir; elle se sentit vivre quelques secondes encore; sur ses joues perlaient des larmes, non pas de tristesse mais celles d'un corps qui désespère; elle frissonna, elle sentit le doute et la peur l'envahir, elle hésita encore et encore; devant ses yeux défilaient quelques images heureuses, comme un dernier appel à son bon sens, dernier sursaut d'un cerveau imbibé qui n'a plus raison du reste du corps. Et alors qu'elle manquait de courage, l'ombre se prononça encore:

Tu n'oseras pas!


Puisqu'elle fut incapable de discernement; en réponse elle sourit à la mort, à son père; ferma les yeux; prit une dernière inspiration puis se laissa tomber dans le vide...



Bien en vue sur le bureau du Comte de Beaufort:

Citation:

Faict le septième jour de Janvier de l'an de grâces 1458
Par Soeli de Margny-Riddermark
à Sa Grandeur Jontas de Valfrey, Comte de Beaufort.

Mon cher ami,

Permettez que je vous nome ainsi pour une fois. Je ne vous demanderai pas de ne pas pleurer ma mort car il n'en est nul besoin, mais si tant est que vous ayez un tant soit peu d'égards pour moi ne vous montrez pas trop heureux. Je vous confie ici mes dernières volontés et vous fait confiance pour qu'elles soient respectées.

A vous Jontas de Valfrey, Comte de Beaufort, je vous lègue notre fille, Cyrielle. Vous ne la connaissez pas encore, mais je suis certaine que vous saurez en prendre soin et l'éduquer comme il se doit. Vous verrez mon ami, vous serez surpris de voir à quel point elle vous ressemble, tant de par son caractère que de par son physique d'ailleurs. Je vous laisse également, l'ardoise chez la couturière qui aura eu la délicatesse de coudre la belle robe dans laquelle vous me trouverez ce soir, en espérant qu'elle fut à votre gout. Remarquez également tout le soin que j'aurais pris à ne pas tacher votre parquet, je sais que vous y tenez, remarquable effort de ma part méritant tout de même d'être pris en considération.
Sachez aussi que je vous aurait aimé et apprécié malgré tout.

A notre fille, Cyrielle je laisse la chevalière ayant appartenu à mon père, ainsi que ma médaille Aristotélicienne. Vous les trouverez sur votre bureau à côté de cette lettre. Ainsi que la Seigneurie que vous m'aviez promise quelques années plutôt.
Je souhaite qu'elle apprenne mon trépas par Leandre et non par vous. Il n'est pas à démontrer que vous n'êtes pas un exemple pour ces choses là. Qu'elle sache qu'elle fût ma plus belle réussite et que je l'aurais aimée plus que tout.

A Leandre Lazare de Valfrey, qu'il reçoive mon épée et mon bouclier, ils n'ont que très peu servi. Ce cadeau n'a pas grande valeur matérielle, qu'il le prenne comme un geste symbolique. Il me rendit la vie bien difficile quelques fois, mais je l'aimais comme s'il avait été mon fils, il le sait.

A mon amie Dina, tous mes effets personnels se trouvant en ma demeure de Dôle, y compris la bague que m'avait offert son frére Franky de Galli. Qu'elle sache qu'elle fut une amie appréciée, mais rarement à sa juste valeur.

A ma marraine, la Comtesse Erine de Sparte et à mon parrain, le Comte Debenja; toute ma gratitude et ma reconnaissance pour leur aide et leurs conseils, ainsi que mes excuses pour ce geste.

A tous ceux que j'oublie; rien. Si je les ai oubliés, c'est qu'il y avait une raison.

Ainsi, je vous fait mes adieux mon ami
Éternellement votre

Soeli de Margny-Riddermark

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Vallon
Voilà pourquoi, nous n’avons jamais pu nous croiser.
La première personne à m’avoir porté attention au sein de la ville. Sa lettre.
Nous n’aurons pas eu le temps d’aller plus loin.

Pendu c’est macabre.

Par contre sa place est libre maintenant.
A la mairie.
Jontas
Une journée Ô combien ennuyante, une journée Ô combien déprimante. Voilà comment résumer une journée du Comte de Beaufort ces derniers temps, seul avec lui-même, seul dans ses pensées. Il ne pouvait une seule seconde imaginer que la banalité de ses journées pouvait basculer en une seconde, en un battement de paupières, en assez de temps pour que la mort s’abatte sur une personne. Son fils loin, devait faire plein de choses, suffisamment pour ne pas passer en Franche Comté ni considérer le père vieillissant.

Une journée Ô combien ennuyante, une journée Ô combien déprimante. C’était la journée du Porte-Parole du Parlement, qui parlait plus qu’il ne portait car après tout, le Comte ne pouvait se permettre de porter la parole d’une parole qu’il ne considérait pas importante à porter. Une journée faite de débats, de gestions de base, de débats et de dépressions de base. Le Comte qui s’en retournait à son château, avec l’aide de son carrosse, restait de marbre, le regard dans le vide, contemplait le paysage et remettait en question plusieurs attraits de sa vie, qu’était-ce donc que cet étrange sentiment, mélange détestable et pourtant si inquiétant ? Le Comte semblait sur le point de trouver la solution lorsque le carrosse se secoua, signe d’un changement de terrain sous les roues en bois, et fit perdre le cours de sa pensée au fier Valfrey. Son esprit perdant le dit fil fit que son regard recouvrit la vue et que le Comte put décerner une bâtisse bien connu, c’étaient les murailles du Beau Fort, le Château du Comte, que le carrosse venait de franchir.

Quelques secondes passèrent et ce fut l’arrêt complet de ce qui servait au Comte pour se déplacer, à défaut d’utiliser un cheval. Mais pour autant, le fier homme ne bougeait pas, attendant l’arrivée de son cocher ou d’un autre serviteur pour lui ouvrir la petite porte ce qui arriva assez rapidement, mais comme d’habitude, trop lentement pour le Comte. Il se leva enfin et descendit les quelques marches qui le séparait du sol avant d’observer la bâtisse qui lui faisait face, une bâtisse telle qu’il se devait d’apprécier. Frissonnant à la suite d’une légère bourrasque, il se décida enfin à marcher jusqu’à l’entrée de ce qui lui servait de donjon et d’endroit où il se plaisait à vivre quand ses hommes se contentaient de frêles bâtisses dans la cours.

Passant la porte, il s’étonna de ne voir personne à sa rencontre, puis se promit de corriger le premier valet qu’il croiserait mais une chose attira son regard. En effet, les escaliers qui faisaient face à l’entrée étaient couverts de bougies, deux par marche, une à gauche et l’autre à droite de la marche et alors que le regard du Comte montait les marches une à une, il fut attiré par quelque chose de suspendu, juste au dessus de lui. Pensant d’abord à un sac de patates, le visage comtal blêmit lorsqu’il comprit de ce qu’il s’agissait. Des pieds nus, blancs, semblaient flotter au dessus du Comte. D’abord tétanisé, ce dernier se déplaça un peu plus à l’intérieur du hall d’entrée pour voir petit à petit apparaître la personne qui semblait flotter au dessus de la salle. Passant des pieds blancs à la robe bleue puis aux cheveux noirs, le Comte ne put empêcher sa bouche de s’ouvrir dans un air hébété. Il venait de reconnaître la Dame de compagnie de sa défunte fiancée.

Montant les marches quatre à quatre, le Comte s’empressa de détacher la dite pendue pour qu’elle rejoigne le sol et le temps qu’il revienne aux bas des marches, il se rendit compte que de toute façon, il devait être trop tard. La jeune femme semblait déjà être morte depuis trop longtemps.

S’agenouillant aux côtés de Soeli, le Comte passa légèrement une main sur sa joue pour écarter les quelques mèches de cheveux qui cachaient son visage et tenta de prendre son pouls… Sans réussite. C’est alors qu’un changement s’opéra dans la tête du Comte, un bouillonnement qu’il n’avait jamais sentit, une explosion mentale telle que sa rage légendaire semblait minime.

Se levant, le Comte saisit une chaise sur les côtés du Hall d’entrée pour la lancer violement contre un mur et alors que le mobilier de la pièce semblait de plus en plus se transformer en petit bois et que les tapisseries étaient arrachées, il se mit à pousser un cri plus proche du désespoir que de la hargne, attirant quelques uns de ses serviteurs dans la salle devenue domaine du chaos et de la haine.

Voyant un de ses serviteurs s’approcher de lui, le Comte le prit par le col et sortant son épée, le transperça tel quel, sans rajouter quoique ce soit. Ce geste digne des plus fous fit fuir la totalité des quelques serviteurs qui s’étaient aventurés dans le Hall et le Comte, les mains pleines de sang et les genoux tombant à terre, poussa un autre cri alors qu’étonnamment, l’on put décerner quelque chose couler de ses yeux…

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Leandre
Il pensait en avoir fini, qu'il n'aurait plus jamais à poser les pieds sur ce sol maudit. Mais parfois, le destin en décidait autrement. Une histoire d'écus restés en Lorraine, qui lui appartenaient, et de cœur, aussi. Parce qu'au delà de l'apparence qu'il se donnait, le bâtard en avait, du cœur. Une profonde admiration pour celle qui lui enseigna moult choses, le tir à l'arc et le domptage d'ours, entre autres, mais aussi de l'amour. Pas cet amour qu'on éprouvait pour sa moitié, et qui nous transportait littéralement, mais plutôt un amour qu'on éprouvait pour sa mère. Soeli fut un peu sa seconde génitrice, celle, du moins, qui avait été toujours là pour lui. Et son passage en Franche-Comté lui permettrait de la retrouver. Tout ce temps qui s'était écoulé, sans qu'elle ne lui donne de nouvelles, ni-même la moindre information sur ce qu'elle devenait. Pourquoi l'avait-elle abandonné, elle aussi ? Pourquoi l'avait-elle laissé seul face au décès de sa véritable mère ? Pourquoi ?

Alors que le château de Beaufort était entré dans son champs de vision, le bâtard s'arrêta quelques instants, non loin des grilles. Terrible épreuve pour lui que de se trouver là, à contempler l'antre de ce père tellement détesté, dorénavant. Leur dernière entrevue s'était plutôt mal terminée : une annonce funèbre, des insultes, du sang sur le parquet (mais ça, c'est une autre histoire) et des coups, sur le visage du paternel et de son fils. N'ayant alors plus aucune raison de rester en Franche-Comté, Leandre avait pris la route pour la Bourgogne, afin de retrouver Maeve. Depuis, il n'avait plus revu le comte de Beaufort, et ne le souhaitait pas vraiment. Retrouver Soeli impliquait de croiser le chemin de son père, puisque les deux, dans l'imaginaire du jeune adulte, se vouaient un amour inavoué. Mais maintenant qu'il y était, il ne reculerait pas. Affronter Jontas ne lui faisait plus peur, il s'en persuadait autant qu'il le pouvait.

Il jeta un coup d'œil à ses côtés.


Bon... on y va ?

Calyce hocha la tête.

On y va, alors.

A l'entrée, les gardes ne leur posèrent aucun problème. Apparemment, ils n'avaient pas reçu de consigne de leur maître à propos du fils de celui-ci. Moment d'appréhension, tout de même, lorsqu'il s'adressa à eux. Peut-être craignait-il que le comte lui eut interdit de revenir à Beaufort, ce qui aurait compréhensible. Il n'en fut rien : les hallebardes s'écartèrent, les gardes le saluèrent et se fendirent même d'un grand sourire - j'exagère un peu. Alors, il enjoignit la fillette brune à le suivre, sur le sentier qui menait au château. Devant, le fameux carrosse aux armoiries gueules et argent stationnait, signe que le comte était présent. Pas découragé pour un sou, Leandre pénétra le premier dans le bâtiment.

Tandis que le hall était bien calme, si l'on faisait abstraction des serviteurs courant en tout sens - fait pas vraiment choquant lorsque l'on connait le propriétaire des lieux - un raffut sans pareil se faisait entendre à l'étage. Encore une fois, rien de bien choquant : le comte devait passer ses nerfs sur un serf. Par contre, les bougies qui ornaient d'une bien étrange manière les marches de l'escalier étaient un peu plus troublantes. Une nouvelle manie ou un rituel ? Un regard interrogatif à l'intention de Calyce, un haussement d'épaules digne de ce nom, et il entreprit de monter. Ce qu'il se serait bien gardé de faire s'il avait su ce qui l'attendait à l'étage.

Un homme transpercé d'une épée, gisant dans une mare de sang ; le comte de Beaufort à genoux et en pleurs ; et derrière lui, le corps inanimé d'une jeune femme. Il ne lui fallut pas plus d'une seconde pour la reconnaître. Soeli.
Ses mains vinrent se placer sur sa bouche, alors que celle-ci s'ouvrit en grand. Nul ne saura si c'était pour contenir un cri, ou bien pour réprimer un flux liquide non-voulu, dû au dégout que lui inspirait alors la scène.

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Bâtard de Valfrey.
Calyce.
Heureuse la fillette d'avoir retrouvé celui qu'elle avait longtemps imaginé, sorte de grand frère bienveillant et ce malgré les pics qu'il s'amusait à lui envoyer et auxquels elle répondait. Aussi quand il lui demanda de l'accompagner pour voir cette dame dans le château de son père, Calyce avait hoché la tête. Fascinée depuis sa toute petite enfance par ces grande bâtisses qu'elle rêvait d'avoir pour domicile un jour, elle ne pouvait que dire oui. Et puis la curiosité aussi. Curiosité de rencontrer cette jeune femme dont il parlait sans cesse et qu'elle n'avait jamais eu la chance de croiser.

Trajet qui se fait en silence. Un silence inhabituel pour le moulin à parole qu'elle était. Pas qu'elle n'ait pas de questions à poser ou autres remarques débiles à faire mais comme une grande, elle avait compris que c'était un moment difficile à passer pour le jeune homme. Il allait revoir le père qu'il avait osé frapper pour une histoire de mensonge au sujet de la mort de sa mère. Elle lui aurait bien dit que quelque fois les adultes faisaient des choses bizarres en croyant pouvoir ainsi préserver l'innocence des plus jeunes.

C'est ce à quoi elle pense jusqu'à leur arrivée devant les gardes. Émeraudes qui captent le manque d'assurance du garçon. Non il n'était pas le plus fort du monde comme il aimait à lui faire croire et dans d'autres circonstances, elle aurait pris un malin plaisir à le lui faire remarquer. Sauf que là, la brunette reste muette et se contente de suivre sagement le jeune Valfrey.

Mirettes impressionnées devant le carrosse puis c'est la petite bouche qui s'ouvre alors que la petite lève la tête pour pouvoir mieux voir le château dont se vantait Léandre quand ils étaient plus jeunes. Le petit air ébahi qu'elle affiche ne la quittera qu'une fois à l'intérieur. Nez qui se plisse face à l'agitation des serviteur. Pas l'habitude. Haussement d'épaules devant les bougies posées sur les marches. Les nobles gens avaient de drôles de lubies et faut croire que le père de Léandre ne dérogeait pas à la règle.

Les marches sont gravies toujours à la suite du jeune brun. L'étage. Si la petite gueuse Dénéré avait été éblouie à l'arrivée, il en est tout autre maintenant. Regard qui s'attarde sur le désordre, les meubles cassés avant passer sur les deux corps qui semblaient dénués de vie pour finir sur les mains ensanglantées du comte. La mioche déglutit comme pour essayer de faire disparaître la boule qui s'est vite formée dans sa petite gorge. Envie de dévaler les escaliers et de partir en courant. Quitter la vue cauchemardesque qui s'offre à deux petites émeraudes horrifiées. Et ce n'est pas l'inertie de celui qui l'accompagne qui va la rassurer. Menotte qui se tend pour se poser sur le bras du jeune homme mais qui finit par se raviser.

L'envie de quitter cette vue prend le dessus et les marches sont dévalées bien plus rapidement qu'elles n'ont été montées. Course qui se termine sur la dernière marche. Gambettes qui refusent de faire un pas de plus et la fillette se voit obligée de leur céder. Se donner contenance en s'appuyant à la rambarde. Mirettes levée qui tentent d'apercevoir vainement Léandre. Et puis elle se laisse glisser jusqu'à finir assise. Elle fixe ses petites mains flageolantes posées sur deux genoux qui tremblent tout autant. Et bizarrement aucune question ne traverse son esprit. Seulement l'image de ces deux corps éteints qui ne la quitte plus et des mots qu'elle laisse s'échapper dans un murmure...


L'pére de Léandre est fou...
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--Sirius7
L'éternité, c'est chiant. C'est divertissant pendant deux ou trois années terrestres de survoler l'empire et le royaume, à s'arrêter parfois pour contempler la déclaration enflammée d'un grand maître licorneux, ou bien faire la cour à quelques vicomtesses dont leur couronne paraît bien inutile - et surtout invisible - depuis qu'elles ont quitté leur enveloppe charnelle, mais à force, il n'y a plus rien d'intéressant à faire. Et puis les parties de carte s'accumulent, aucune satisfaction n'en émane - même quand je ne triche pas. De toute façon, je soupçonne Eragon de tricher aussi. Alors on s'engueule, se balance les cartes à la tronche puis on finit par se réconcilier autour d'un verre. Mais même l'alcool n'a plus aucune saveur, malgré qu'il soit ingurgité en quantité. Je me rends alors compte que c'était bien mieux d'être vivant. Surtout quand je vois l'état déplorable de Saulx, depuis que je m'en occupe plus. Certains serfs en ont profité pour s'accaparer la bâtisse du jardinier ou bien encore la petite cour qui longeait la façade ouest du château - que, je l'avoue, affectionnais particulièrement. Lamentable. Je préfère encore regarder les savoyards narguer l'Empire, tandis que ce dernier nargue la France, tandis que cette dernière nargue la Provence.

Mais ce jour... ce jour est différent. Beaufort attire mon attention, plus que de raison. Sans doute parce que ma bâtarde de fille procède à un rituel des plus étranges, avant de se pendre. J'assiste au spectacle, les bras croisés, affichant comme toujours cet air méprisant, alors qu'elle s'évertue à serrer son nœud. Je m'assieds sur la première marche, les yeux fixés sur elle. Elle se lève.


Petite sotte !

M'entend t-elle ? A en croire la réflexion qu'elle balance, chuchotement presque inaudible, la réponse semble être oui. Je plisse les yeux. Elle se met à pleurer ; elle hésite. Alors, je l'achève, avec quelques mots.

Tu n'oseras pas !

C'est ma fille, bien sur qu'elle le fera, surtout si je lui dis de ne pas le faire. Je ne veux pas sa mort, rassurez-vous. Je veux seulement lui parler. Depuis que je suis mort, j'arrive bien plus à communiquer avec les autres morts qu'avec les vivants. Je souris, alors que son corps pendouille au bout d'une corde de tissus. De cette façon, il ne faut pas plus de quelques minutes pour mourir. Comme prévu, je me retrouve face à son véritable Moi, qui, précisons le, garde l'apparence de son corps, en un peu plus transparent. Je reste silencieux quelques instants, le temps de la toiser, de la jauger. Elle semble avoir pris de l'assurance, depuis la dernière fois que je l'ai vu, en chair et en os. Je me lève de la marche, pour la saluer.

Ainsi donc, tu comptes vraiment venir me rejoindre ?

Question qui n'attend aucune réponse.

Et si je ne veux pas ?

Encore une.

Et si ta place n'est pas ici ?

Inutile de préciser pour celle-ci non plus.

Regarde-toi.

Je lui désigne son corps sans âme.

Pendue telle une gueuse qui aurait refusé d'entrer dans le lit du comte de Beaufort.
Nus pieds telle ta génitrice lors de notre rencontre.
Ivre. Ivre d'inconscience, aussi.

Pitoyable spectacle, n'est-ce pas ? Tu ne pensais pas que ça le serait tant, vu de l'extérieur. Moi aussi, j'ai été surpris lorsque ça m'est arrivé...


Je passe ma main à travers son corps sans vie - avantage de ma condition, qui impressionne au premier abord -, avant de me retourner de nouveau vers elle.

Tu n'as pas honte ? Je t'ai laissé porté mon nom, et tu le salis de l'ignomie d'un tel trépas... Pour en rajouter au déshonneur d'avoir enfanté une bâtarde, tu te permets de souiller ma mémoire par tes caprices puériles.

Alors que je lui parle, le monde commence à affluer tout autour de nous. Ils ne nous voient pas. Le comte de Beaufort, sa progéniture et une môme. La bâtardise semble décidément se développer un peu partout. Je consens à sourire en apercevant la petite Dégénérée s'enfuir au bas de l'escalier, puis je reprend mon sérieux.

Vois, ce cher Jontas... Son amour pour toi est si flagrant. Et la réciprocité est vraie, je me trompe ?

Bien sur que non, je ne me trompe pas.

Et ta fille ? La preuve inavouée de ce que je viens de te dire... Tu ne veux pas la laisser tomber, comme j'ai pu te laisser. J'en suis convaincu.
Alors retourne auprès d'eux, deviens comtesse de Beaufort, prend les choses en main, mais n'abandonne jamais.


Dans un dernier soufle, je parviens à lui glisser encore quelques mots, avant que je ne disparaisse. Ou bien peut-être, est-ce elle qui s'efface.

Tu es une Margny, tâche de ne pas l'oublier.
Soeli
L'éternité, je viens tout juste d'y accéder, à défaut d'être entrée dans la postérité; Que voulez-vous? Il n'est pas donné à tous d'accéder au Panthéon. Ma condition est toute nouvelle pour moi, contrairement à mon père qui, lui, semble avoir appris à s'en contenter. Je ne suis pas surprise de le voir, encore moins de l'entendre; il ne m'avait jamais vraiment quittée après sa mort et fût même plus présent que de son vivant. Je suis presque heureuse de le voir, pour autant qu'il puisse être possible pour un mort de l'être. Étrangement, je me sens apaisée et ne ressent ni douleur, ni peine; tout cela me semble dérisoire désormais. Toutefois, j'avoue être un peu déçue, ce n'est pas ainsi que j'avais imaginé le paradis, ou du moins l'équivalent pour ceux qui n'en sont pas dignes -car non, nous n'irons pas tous au paradis. Où donc étaient le bon Dieu, saints, anges ou leurs contraires? Au lieu du petit nuage réglementaire et de la lumière -qu'il ne faut pas suivre- j'erre non loin du lieu de ma mort face au fantôme de mon père et à mon geste inconsidéré. Décevant, humiliant; Était-ce cela l'enfer?

Combien de temps s'est-il écoulé depuis mon plongeon dans le vide? Quelques secondes? Une éternité? Ça n'a plus la moindre importance à mes yeux.

Je le regarde venir vers moi, presque heureux de me voir -ce sera arrivé au moins une fois- et l'écoute me parler; je lui aurais tant coupé la parole de notre vivant, que je me plais à lui concéder quelques instants de mon éternité. J'aurais bien le temps de lui répondre. A sa demande, je me regarde - ou plutôt, je regarde celle que j'étais- tandis qu'il évoque de façon non équivoque et crue mon intimité avec le Comte. De son vivant déjà, il ne faisait pas dans la dentelle, mais peu m'importe... puisque je suis morte.


Pitoyable... Poursuit-il.

Pour une fois, nous sommes d'accord; Je le regarde passer sa main à travers moi, à travers mon corps, aussi facilement que s'il s'était agit d'eau. Toute dépouille pitoyable qu'il fût, il s'agissait de moi, de celle que je fus. Belle plante tout de même, bien qu'à me voir ainsi suspendue j'ai le sentiment de voir une poupée de chiffons, voir un sac à patates; Ridicule, comme souvent; Sotte comme toujours. Je me jauge et me juge, pourquoi avoir fait pareille fadaise? Je n'arrive même plus à m'en souvenir. Il me gave avec ses leçons sur la honte que lui inspire mon comportement et mon geste; je me retiens de lui répondre que c'est de celui qu'il a choisi comme héritier et qui lui aura fait perdre Saulx qu'il devrait rougir, non de moi.
Le Comte entre, je le suis des yeux, j'observe chacun de ses mouvements. Il aura fallu qu'il rentre un peu plus tôt aujourd'hui... Pour peu, je le maudirais. Puis tout va trop vite; je ne comprends plus; la situation m'échappe en même temps qui ne s'échappe le cri bestial de Jontas. Je le maudis de réagir de la sorte; je me maudis de notre manque de dignité. Un jeune homme, Leandre accompagné d'une jeune fille... Cyrielle? Non, celle-ci est brune. Le Vicomte déblatère encore quelque ineptie; Comme si... Comme si, devenir Comtesse de Beaufort était raison suffisante; comme si ce pouvait être une fin en soi; comme si, il avait trouvé là l'argument suprême, l'irréfutable... Flagrant. Comme si ça se pouvait.


... n'abandonne jamais. Tu es une Margny, tâche de ne pas l'oublier.

J'observe encore un instant Jontas, Leandre, Calyce, le pourfendu, et la sotte-pendue que je fus; Avant que ne tombent sur moi, à nouveau, les ténèbres.

.
.
.

Un corps en robe bleutée git non loin d'un autre ensanglanté d'un serf qui n'aura commis d'autre crime que celui de vouloir se précipiter au secours d'un Comte hurlant; il aura été condamné pour lui avoir été dévoué. Si l'un gémissait encore, l'autre restait immobile, silencieux se gardant bien de laisser échapper le moindre petit indice permettant ne fusse que de suggérer qu'il fût en vie. Pourtant, le fin filet d'air, qui s'engouffrait dans ses narines pour traverser sa gorge jusque dans ses poumons, lui infligeait une douleur comparable à celle d'une lame transperçant son gosier. Mais encore eusse-t-il fallu qu'il puisse le manifester. Finalement, les deux sont à l'agonie; l'un lutant pour la vie, l'autre ne demandant rien de mieux que de la laisser s'échapper. Mais si la vie peut être illogique, la mort peut être injuste; il était écrit que quelqu'un perdrait la vie en cette soirée à Beaufort, mais peut-être pas celui que l'on cru; le serf rendit son dernier soupir. Ses yeux restés entrouverts ne percevaient rien; tout comme sa bouche, entrouverte elle aussi, ne laissait rien échapper sinon un fin filet translucide, maculé de sang s'écoulant du coin de sa lèvre et le long de sa joue. Tandis que plus tôt sa mort ne tenait qu'à une corde mal nouée et à la chance, sa vie était, quant à elle, suspendue à ce fil; car sur le sol, la Margny ne donnait autre signe de vie.
A quelques centimètres du corps inanimé un Comte à genoux et à quelques pas de lui un jeune adulte.

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Leandre
Tandis qu'un spectacle des plus improbables, et des plus invisibles, se déroulait au dessus d'eux, les gamins avaient chacun fait leur choix face à l'atrocité de la scène. Calyce s'était enfuie à toutes jambes, chose compréhensible vu son âge, et Leandre était resté immobile, même si ses jambes menaçaient de rompre à tout instant. Il avait tout de même suivi la course effrénée de son amie vers le bas de l'escalier, avant de se raviser et de poser de nouveau les yeux sur ce tableau empreint d'une violence certaine. Le peintre avait quelque peu abusé sur le rouge - pas la bouteille, mais la couleur. Pour sur qu'une telle œuvre ne laissait pas indifférent ses observateurs.

Le comte de Beaufort ne semblait pas avoir remarqué une quelconque présence dans son dos, bien trop occupé à déverser ses larmes sur le corps de la Margny. Etait-ce l'expression de ses regrets ? Tentant de reprendre ses esprits, Leandre déglutit difficilement, sans pour autant décrocher son regard de Soeli et de son père. L'atmosphère était d'une lourdeur incroyable et le temps avait cessé son manège perpétuel, comme pour permettre au jeune Valfrey d'analyser et de se rendre compte de la situation. Comme si cette vue ne l'horrifiait pas déjà assez... il fit quelques pas en leur direction, conservant sa discrétion. De plus près, c'était encore un peu plus insoutenable. Il ferma les yeux quelques instants, avant de les ouvrir de nouveau, pour y voir plus clair (logique...) dans son esprit.


Père... je... vous êtes fou.

Calyce l'avait déjà pensé tout haut, mais pas assez pour que le concerné l'entende. Là, c'était fait. Sans même s'en rendre compte, les lèvres s'étaient ouvertes pour lâcher l'offense. Et comme si cela ne suffisait pas, le bâtard porta la main à sa ceinture.

Après ma mère, c'est au tour de Soeli de payer le prix de votre folie ?

Le bruit caractéristique de l'épée qui sort de son fourreau se fit entendre. Le regard déterminé, l'épée tenue par une main aux phalanges blêmies par la pression exercée de ses doigts sur le manche, il faisait face à son père qui s'était redressé. L'inconscient gardait pourtant de sa superbe. Du haut de ses quinze ans, il n'avait plus peur de son père. Il allait le lui prouver. Le blesser. Les venger.

Ou bien, si le comte en décidait ainsi, rejoindre Soeli plus tôt que prévu. Pas sur que le fou soit bien celui auquel il pensait.

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Bâtard de Valfrey.
Jontas
Alors que le regard embrumé du Comte tentait de percer la silhouette de Soeli, il ne pouvait imaginer le combat qui avait lieu entre l’être presque perdu et son ancien ami décédé. Sans même apercevoir l’arrivée du bâtard et de la gamine qu’il avait déjà oublié, il cherchait un signe de vie sortant du corps de Soeli et, tout en s’approchant, il sentit le léger souffle signe d’un petit reste de vie dans la chair de la jeune femme.

Le mélange étrange de sentiments qui pouvait le transpercer de part en part se transforma en un sentiment unique, un espoir très largement dissimulé par la nature même de l’homme. Mais cet espoir ne pouvait qu’être le fait de la folie intérieur qui tuait l’esprit du Comte. Une folie qui prenait petit à petit de l’ampleur, qui allait sans aucun doute assassiner le peu d’humanité qui parcourait ses veines.

Alors même que l’homme tentait de comprendre ce qui le tiraillait dans tous les sens, alors même qu’il ne savait plus quoi penser ni quoi faire, il entendit la voix de son fils percer son esprit, le sortir de sa torpeur.


Père… je… vous êtes fou.

Après ma mère, c’est au tour de Soeli de payer le prix de votre folie ?


Le père tourna la tête vers son fils et remarqua l’épée que tenait celui-ci, menaçante, souhaitant défendre ce qu’il ne comprenait pas. Le Comte se leva alors, laissant l’épée qui avait servit à tuer le serviteur au sol, et regarda son fils, du regard le plus noir qu’il n’eut jamais pu avoir l’occasion de recevoir. Un regard emplit de folie, la folie que son fils avait bien décerné.

Eh bien, eh bien…
Enfin tu nous montres ta bravoure ! Mais… Que vas-tu faire avec ceci ?


Le Comte s’approcha et vint placer son cou sur la pointe de l’épée de Leandre. Et la folie du Comte s’exprima bruyamment, une lueur jamais exprimée dans le regard.

Allez ! Plantes moi bâtard ! Montres que tu obtiens ce que tu veux ! Mais choisis bien, si tu me tues, tu tues Soeli, si tu te montres comme mon fils, elle aura une chance de survivre, le peu de souffle qui lui reste suffira à la sauver.

Mais choisis Leandre, choisis bien car ce choix scellera à jamais ta vie ! Seras-tu prêt à porter deux morts sur ton dos ou te montreras-tu dignes de mon héritage, digne de la vie de Comte et digne de la vie de Soeli ?!


Le regard du Comte était en feu, les poings serrés, au même titre que sa mâchoire. Et d’un dernier cri, le Comte s’adressa à son fils… Peut-être pour la dernière fois.

Choisis !
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Leandre
A croire qu'il aimait les complications, le comte. Plutôt que de dire à son fils qu'il n'avait pas tué Soeli, il relevait le défi lancé par le bâtard, furieux, mais toujours valeureux. Sa gorge vint doucement se planter sur la pointe de l'épée. C'était à son tour de mener la danse, et de provoquer l'autre. Leandre ne montra pas le moindre signe d'étonnement, car étonné, il ne l'était vraiment pas. Après tout, ils étaient faits du même sang, même si celui du fils était bien moins bleuté que celui du père. Il écoutait ce dernier le mettre dos au mur, tenter de lui faire croire qu'il n'avait plus d'autre choix que d'enfoncer profondément cette lame dans la gorge, le duper. Jontas de Valfrey n'était pas homme politique pour rien. Et Leandre Lazare de Valfrey n'était pas son fils pour rien.

Il baissa sa lame, ainsi que ses yeux. D'aucuns auraient pu croire qu'il abdiquait. Mais le temps de chercher ses mots, et ils auraient pu se rendre compte qu'il n'en était rien, en vérité. A défaut de la pointe de l'épée, ce furent ses yeux qui vinrent se planter dans ceux de son géniteur. Sourire aux lèvres, ultime provocation ? Non. Il ouvrit la bouche, pour répondre au comte.


Vous avez raison, je peux obtenir tout ce que je veux.

Et d'un geste, il leva son épée. Et d'un autre il l'abattit, lame en arrière, pommeau dans le crâne du géniteur. Celui-ci s'écroula sans demander son reste. Le troisième corps à rejoindre le sol dur et froid d'un château à jamais souillé par l'arrogance d'un bâtard. Il laissa choir son arme, dans un fracas métallique, avant de prendre de nouveau la parole.

Voilà, vous avez pu voir. Je suis votre fils et à votre réveil vous serez fier de ce que j'ai fait. Je n'ai pas courbé l'échine comme un rat, mais je ne vous ai pas tué. Je suis digne. Digne d'un Valfrey, digne de la vie de Soeli, j'espère... Il y a toujours d'autres choix que ceux qu'on veut nous imposer.

Sans attendre de réponse - ce qui aurait été bien difficile dans l'état actuel de Jontas -, il enjamba le corps inerte, pour accourir aux côtés de Soeli. A genoux, il la secoua comme un prunier.

Soeli ! Vis !

Pas de réaction.

Calyce ! Viens m'aider !

Il ne savait pas vraiment où elle était passée, si elle avait quitté les lieux ou pas, mais elle l'entendrait bien. A eux deux, ils arriveraient certainement à déplacer Soeli jusqu'au bas des escaliers. Restait encore à déterminer ce qu'ils feraient d'elle ensuite...
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Bâtard de Valfrey.
Calyce.
[Dans la famille Foux-furieux je demande le père...non le fils.]

Le palpitant qui bat trop vite, trop fort. Tellement fort qu'elle a l'impression de n'entendre que lui. Les émeraudes qui fixent toujours les petits doigts qu'elle entremêle, qu'elle torture, espérant peut être que la douleur qu'elle s'infligeait ainsi lui ferait oublier ce qu'elle venait de voir à l'étage. Profonde inspiration qui semble redonner un rythme plus régulier à son petit cœur et atténuer le tremblement de ses membres. Brève accalmie qui lui permet de penser. Loin de se douter de ce qui se passait plus haut.

Léandre ! Elle l'avait laissé seul en présence de son fou furieux de père. Il fallait être fou pour être l'auteur d'une telle boucherie. Car oui, dans la tête de la fillette, le comte était celui qui avait mis fin aux jours de ces deux personnes qui gisaient sur ce sol. Et si dans sa folie meurtrière il décidait de s'en prendre à son fils ?! A cette pensée, Calyce se relève rapidement. Trop rapidement à en croire l'impression qu'elle a de voir la pièce tourner autour d'elle. Seconde grande inspiration avant qu'elle n'entreprenne de monter les marches.

Une... deux... Stop. Que ferait-elle si le malade, qui servait de paternel à son ami, s'en prenait à eux ? En quoi pourrait-elle aider ? Lui faire une grimace pour détourner son attention pendant qu'ils prendraient la poudre d'escampette ? Mouais. La mioche est peut être dégénérée mais pas suicidaire. Courageuse mais un tantinet prudente. Léandre s'en sortirait, il a une épée. Faut bien se donner bonne conscience. Et puis hors de question de revoir ces deux cadavres. Elle songe à aller prendre l'air dehors en attendant sagement que Léandre montre le bout de son nez. C'était sans compter sur ce qui l'attendait...


Calyce ! Viens m'aider !

L'aider ? La petite s'imagine déjà devant le père éventrant le fils. Les larmes montent en même temps qu'elle gravit les marches. Rapidement et en criant de toutes la force qu'elle pouvait avoir du haut de sa dizaine d'années... Prête à arracher les yeux du comte tueur...

Lâchez-le espèce de pé...

L'unique insulte qu'elle connait est réprimée à la vue du corps inerte du Beaufort. Regard empli d'incompréhension mêlée à du dégout qui se pose sur le jeune garçon. Tel père, tel fils. Comme si ils n'avaient pas vu assez de macchabées pour la journée...

Tu...tu l'as tué...tu es... comme lui...

Les larmes, longtemps contenues, inondent ses joues... Trop d'émotion pour la petite fille innocente qu'elle est.
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