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Info:
Suite du p'tit chap'ron rouge. Ou quand la Licorne veur retrouver l'une des siennes !

[RP] Quand l’ombre rencontre les ténèbres

E_newton


Il en avait les trippes qui se nouaient, l’estomac qui semblait vouloir se rétrécir, la tête était prise dans un étau qui se resserrait indéfiniment. Il n’était plus qu’un mal total, une plaie béante et suppurante. Il souffrait sans savoir pourquoi, de ces maux qu’on ne savait expliquer, qui vous ravageaient de l’intérieur telle une gangrène qu’on ne savait réfréner. Il avait peur le Licorneux. Oh pas pour lui, car il était de ceux qui n’étaient nullement effrayés de leur propre sort. Non, il avait peur pour elle, sa p’tite sœur, cette femme Chevalier qui l’avait mené, guidé, tiré, poussé sur cette voie qu’était celle de la noblesse d’âme et de cœur. Mais en ces instants, son âme était des plus sombres, franchissant un nouveau pas dans l’abime sans fond des ténèbres qui l’habitaient déjà. Chaque seconde qui s’égrenait lui faisait redouter les pires issues de la quête qui était devenue sienne sur une simple prémonition. Car il ne s’agissait que de cela, un inexplicable pressentiment à la lecture de la missive qu’elle lui avait envoyé. Pourquoi s’en était-il fait autant pour ces quelques lignes à l’époque ? Il n’en savait fichtrement rien. À contrario, sa rencontre avec une inconnue et le majordome de l’ancien Grand Maître de la Licorne, en l’hôtel de Lazare à Limoges, n’avait fait qu’accroitre ses inquiétudes.

Ils l’avaient informé du pourquoi du départ de Cerridween. Elle pourchassait un certain Jules. Celui là même dont il apprit plus tard qu’il était le meurtrier de Stannis, un de leurs frères assassiné lâchement, d’une flèche dans le dos. S’il comprenait l’acharnement de la Capitaine à retrouver cet assassin, il ne concevait pas qu’elle en ait fait une affaire aussi personnelle. Nombreux étaient les Licorneux prêts à traquer les mécréants à travers le Royaume tout entier, mais très peu étaient apparemment ceux qui avaient été mis dans la confidence de ces faits. Pourquoi le leur avoir caché ? Et surtout, pourquoi ne rien lui avoir dit à lui ? Il était vrai qu’au moment des faits qui avaient conduit à la disparition Hérault de l’Ordre, il n’était pas encore membre du Haut Conseil. Cependant, depuis qu’il y avait accédé, nul ne l’avait informé. Ne le jugeait-on point digne de savoir ? Ou bien redoutait-on que l’impulsivité qui le caractérisait encore parfois, le ferait partir seul à la recherche du mécréant ?

Il ne savait pas … Il ne savait plus … Et peu lui importait réellement en ces instants. Seule cette petite voix intérieure l’assurait qu’elle était encore en vie, là, quelque part, et qu’il se devait de la retrouver. Peu lui importait de savoir comment, ni les moyens qu’il aurait à employer. Dusse t’il retourner cette cité, ce Comté, voire même le Royaume tout entier, il n’aurait de cesse tant qu’il ne la verrait. Et quand bien même pour cela il lui faudrait recourir à des moyens peu ou pas chevaleresque, il s’en contre fichait. La faim justifiait les moyens, et il avait les crocs là, le Licorneux.

Bien que le gamin soit resté endormi à leur départ de Limoges, Ethan avait tout de même décidé de prendre la route. C’était peut-être mieux ainsi dans l’immédiat. Son manque de tempérance aurait peut-être pu leur porter préjudice. Au moins, ils bénéficieraient de vingt-quatre heures d’avance sur lui, et peut-être serait-ce suffisant pour leur permettre de trouver une piste encore « chaude ». Le trajet fut avalé en trois jours, au cours desquels il n’accorda aucun répit à la petite troupe qui l’accompagnait. Au matin glacial de leur arrivée en la cité poitevine, il les rassembla sur la grand place, ne leur laissant même pas le temps de se reposer.

Fouillez moi cette cité de fonds en combles, des taudis aux hôtels particuliers, sans oublier les auberges ou tout autre lieu où elle aurait pu séjourner.
Interrogez tous les passants, résidants, nobles ou roturiers, la maréchaussée, le Maire, la douane, qui vous voudrez.
Glanez toutes les informations susceptibles de nous donner une piste.
Et pensez aussi à rechercher ce Jules … si on retrouve sa trace, y’a de grandes chances qu’elle n’en soit pas loin.


Voilà, ses ordres étaient donnés, sans vocifération, mais sans fioriture. Tout devait être mis en place pour se donner une chance, si infime soit elle, de lui mettre la main dessus. Pas de repos désormais tant qu’ils ne sauraient pas ce qu’il était advenu d’elle. La machine Licorneuse était en branle, et le Capitaine était bien décidé à couper nette l’envie de toute personne osant entraver sa marche.

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Lady_antlia


[Voyage-Voyage ]
Un petit tour en Touraine pour mieux rentrer sur Lyon et finir à Castres.
Elle avait cru à un peu de repos l'Etoile, mais non. Le pli était arrivé bien peu de temps après leur arrivée sur Castres.... Le Cap'tain avait des inquietudes sérieuses sur .... sur une disparition. Le repos était terminé, elle le savait la Blonde, et de suite elle mit de l'ordre dans ses affaires.
Pour qu'il en ait c'est qu'il devait y avoir plus que des inquiétudes et surtout concernant le Tyran. A l'appel, la Blonde n'avait pas hésité un instant. Son cheval sellé, affaires rangées à nouveau dans sa saccoche, elle avait conduit sa fille Appolline et son ami Eloy d'Azayes en Bourbonnais Avergne , confiant à l'ainée Tristan son dernier né. Elle les avait regardés partir, le coeur serré comme celle d'une mère perdant ses enfants , les voyant s'éloigner. Et elle ? Qu'allait elle faire? Des recherches, se battre peut etre comme l'apprehendait constamment sa fille.
Elle aurait tant voulu l'accompagner dans ce nouvel avenir qu'Appolline semblait se forger mais l'Etoile ne pouvait que constater qu'elle était absente de l'éducation de sa fille et de cela elle s'en voulait énormément l'Etoile. Et cette vie d'Errance qu'elle avait choisit.


[ Les sacrifices ]
La Pivoine l'avait prévenue .... beaucoup de sacrifices lorsque l'on devenait un Licorneux. Elle sacrifiait sa vie de femme et de mère, pour n'être plus que la guerrière. La Licorne .... maintenant sa vie? Elle ne savait encore alors qu'elle chevauchait vers Limoges. Elle avait fait des sacrifices, du chemin aussi sur ce qui était temperance, réfléxion et sagesse. Elle en était loin de tout cela, son chemin était tortueux, sinueux et franchement long. Elle se savait trop vive peut être, se battant contre les injustices de façon quelques fois trop naïves peut être, se faisant alors taper sur les doigts souvent. Alors elle serrait les machoires puis se relevait sans cesse. Oui elle le voulait. Et tout en chevauchant vers le point de ralliement, elle pensait à tout cela... laissant sa famille derrière elle, en retrouvant une autre, différente mais présente tout de même.

[ l'Affaire ]
Limoges et tout se déroule rapidement, juste l'espace d'une journée. La longue attente des autres Licorneux, les doigts de la Blonde qui tapotent sur la table de l'auberge où Aldraien et l'Etoile se sont installées, sans qu'elle s'en aperçoive, signes d'impatience incontrolables. Puis ce sont des changements de position, jambes qui se croisent , qui se décroisent... soupirs et tisanes jusqu'à les voir enfin arriver, soulagée.
Le regard du cap'tain, son visage fermé lui en disent long. Pas de discussion, la route est reprise aussitôt, après être passé au ravitaillement. Il chevauchait rapidement le Ténébreux, trop même comme si vie en dépendait. L' estomac de l'Etoile se noua alors à cette pensée. Allez ça ne pouvait être ça, le tyran est bien trop solide pour plier genou!
La Rochelle, enfin, leur but, la fin des recherches étaient peut être dans cette ville.
Arrivée sur une place, où tous mirent pied à terre, poussiereux, épuisés. mais la tension peut faire des miracles et ils étaient tous debout, même les impétrants. Le Ténébreux ne laissa aucun repos aux Licorneux, et sous ses ordres ceux ci se dispersèrent.
Les pas de l'Etoile martelèrent le pavé jusqu'à la plus proche taverne. Sa cape bleu azur estampillée de Licornes d'argent battait à la brise qui soufflait ce matin là.
Les tavernes, lieu où l'on parle beaucoup, lieu où la moindre chose se sait. Elle poussa la porte de la taverne municipale.

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Kar1
La porte de la taverne s’ouvre, et une blonde apparait.


Voilà autre chose. Karine a tiré un trait sur un passé très lointain, depuis des lustres maintenant. Là où les amitiés ont été plus que fusionnelles, trop fusionnelles même. A s’en étouffer. Il y a eu des clashs à cette époque au pays du nougat. Deux blondes qui se séparent parce que le caractère de l’une ne va pas au caractère de l’autre -une pensée pour Nad’, son sosie. Karine n’en a jamais vraiment compris la raison d’ailleurs, mais la vie est ainsi faite. Alors elle a coupé les ponts, inconsciemment surement. Même avec les personnes qui restaient pourtant des amies. Comme Antlia. C’est étrange. Mais le passé rattrape toujours celui ou celle qui l’a fuit pour x raisons que ce soit. La preuve est là, devant une Paillasse, sous ses yeux, une autre blonde.

Karine ne la reconnait pas tout de suite. Ce sont des bonjours de convenance qui fusent dans la taverne municipale de la Rochelle. Une cape aux couleurs de la Licorne. Un chevalier errant qu’il parait. Mais la voix ne trompe pas elle. Alors le corps de la blonde se fige. Son sang ne fait qu'un tour. Elle la reconnait maintenant. Mais ou, comment, pourquoi. Rien n’est encore certain. Karine cherche dans le fond de sa mémoire. Poisson rouge qui plus est, ça aide pas forcément. Combien de temps s’est écoulé déjà. Cinq, dix ans qu’elles ne se sont pas vues et qu’elles ne se sont pas donné de nouvelles?
Aucune nouvelle.

Et pourtant.. Pourtant, un large sourire s’affiche sur le visage des deux blondes. Ça y est, elles se situent et en tombent des nues. Elles se tombent dans les bras. Les phrases sont ponctuées par des embrassades incessantes. Surprises toutes les deux que l’autre soit encore vivante. Tout le monde tombe et ne vit jamais aussi longtemps pour se voir vieillir dans ce royaume il semblerait. Encore sous le choc, les deux femmes s’installent, l’une à coté de l’autre. C’est l’heure des œillades, elles se reluquent, des..

«Tain.. Que l’temps passe.
C’est toi?
Vraiment?
Mais qu’est c’que tu fous là?»

Et puis on n’en revient toujours pas. On reparle des personnes que l’on a connues. Ça ne rajeunit pas, mais le retour à cent quatre vingt degré en arrière est agréable. Esomak, elles ont eu le même amant. Fhar est mort. La blonde qui ne le sait pas encore. Il y a Nad’ aussi qui n’est plus de ce monde. Une Antlia adoptée par un écossais qu’elle connait aussi. Cela semble si vieux, cela semble si lointain. Une autre vie peut être.

Le Dauphiné.
Éternelle squatteuse de ce Duché voisin de son lieu de naissance. Mort de son premier amour là bas, Killawave. Tuberculose qu’il parait, à Valence. Début de ses longs voyages incessants, toujours sur les routes depuis, pas de halte. Toujours aller de l’avant, en avant. Le cœur à la fois lourd et léger, Paillasse avait quitté cette terre qui lui était pleine de souvenirs.

Et visiblement, Karine n’est pas la seule à avoir fait son petit bonhomme de chemin.


T'es v'nue voir la m..?

Puis la vision de la cape couverte de Licornes aussi bien brodées les unes que les autres revient en tête de la blonde. Elle n'en fini pas sa phrase. Les destins se croisent encore plus qu'on ne le croit. Ce n'est que devant le fait accompli que l'on réalise bien souvent. Que dire, que faire. Répondre aux questions, c'est sur..
Mais comment..?

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Karine de Pommières.
Aldraien


La rouquine à dada sur son cheval…

Ils étaient partis de Limoges comme ils étaient venus, c’est-à-dire sans avoir rencontré grand monde. Faut dire que la ville était déserte, mais genre beaucoup. Pire qu’Embrun, si vous voyez la référence.
Bref, un désert.
Direction la Rochelle maintenant, changement.
Silencieux le petit groupe de cavaliers avançaient sur les routes, pensifs et d’humeur sombre, chacun plongé dans ses propres préoccupations. Ils avalaient les lieues, il fallait arriver rapidement, le plus vite possible pour la retrouver. Retrouver Cerridween. Et même si Ald ne la connaissait pas, elle n’avait pas hésité à suivre les autres pour leur prêter main forte, un geste naturel, un de ceux qu’elle ne pouvait s’empêcher de faire et il aurait sans doute fallu l’attacher pour qu’elle reste à Limoges en les regardant partir.
Mais là ils ne parlaient pas, même Antlia semblait enfermée dans la solitude du voyage, réduisant les échanges au strict minimum.
Et la rouquine dans tout cela ?

En retrait, elle les observait là, devant elle, cette allure noble dans la façon de se tenir sur leurs montures.
Elle les suivait depuis plusieurs mois à présent, ils étaient devenus une seconde famille pour elle, même si elle n’en faisait pas réellement partie. Depuis ces quelques mois, elle avait effectué un travail sur elle, savoir rester calme, savoir se tenir et se comporter correctement. Approfondissement du premier travail effectué lorsqu’elle était devenue vassale.
Changement du tout au tout et ceux qui avaient pu la connaitre avant et après sans aucun doute avaient vu la différence, plus posée, plus sage, plus réfléchie…quoi que parfois, ‘fin c’était pas toujours quoi, mais souvent quand même.
Elle prenait exemple, observait et apprenait. Tout ce qui pouvait venir des Licorneux était le bienvenue pour la rouquine qui ne demandait que ça elle, apprendre. Et là, comme une enfant qui apprend pour la première fois à monter à cheval, elle se redresse sur sa monture et prend l’allure noble que les autres possèdent déjà, là bas devant. Une leçon de plus pour elle et un jour, elle aurait leur prestance.

Trois petits jours et puis y sont…à La Rochelle.

Ils les avaient avalé ces trois jours de route, pas de pause et c’était bien compréhensible : ils auraient perdu du temps.
Elle n’avait pas râlé la rouquine, pas un mot.
Ils étaient arrivés, et ils auraient sans doute été détendus d’être là, s’il n’y avait pas eu ce qu’il y avait…Ils se reposeraient oui, mais uniquement lorsqu’ils l’auraient retrouvé, pas avant. Ald, même si elle ne la connait pas la Capitaine, met une farouche détermination à vouloir la retrouver. L’esprit de famille, sans doute.
La retrouver…
Ordres donnés, ils se dispersent.
La rouquine, elle, va au marché, s’acheter à manger et en profiter pour interroger quelques marchands. Une rousse, cape bleu azur avec des licornes…Non ?
Non.
Avec cette absence d’information mais aussi son morceau de pain pour remplir son estomac, elle décidé finalement de se rendre en taverne, lieu de rencontres et de discussions, surement l’endroit le plus productif après le marché, on pouvait y entendre tous les ragots qui trainaient. Et souvent les ragots, c’était aussi une part de vérité.
Mâchouillant son bout de pain, elle l’avale, pousse la porte de la taverne et y pénètre. Masque détendu par-dessus la fatigue et elle s’assoit à côté d’Antlia, même pas surprise de la trouver ici. Pis un bonjour à l’autre blonde, qu’elle connait pas encore. Oui, un seul bonjour, et elle écoute, parce qu’elles ont l’air de se connaitre quand même les deux blondes.


Bonjour.

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E_newton
[Quand seule la rage vous meut !]

D’aucun furent ceux qui purent se soustraire à la ténacité du Licorneux ! Il avait déjà accosté tous ceux qui passaient à sa portée, leur posant les mêmes questions et en attendant une réponse qui ne venait pas ...

Vous n’auriez pas croisé une Licorneuse ? Probablement vêtue de la même cape que la mienne …
Elle est rousse de chevelure, avec une cicatrice sur l’arcade gauche … Non ?


Tous … jusqu’à cet olibrius qui avait voulu jouer au plus fort. Du haut de ses six pieds et quelques, il avait toisé dédaigneusement le Capitaine qu’il dépassait de presque un pied. Puis, après avoir harangué la foule des passants et laissé éclater un rire narquois, il avait balancé ces mots.

Une catin d’Royalo ? Non, j’en n’ai pas vu d’puis la dernière qu’on a pendue. À moins qu’ce soit elle ?

Ce furent les paroles de trop qui déclenchèrent la colère déjà bien trop contenue du Ténébreux. Pour sûr, les membres des Ordres Royaux étaient qualifiés de royalistes, à juste cause. Mais traiter sa p’tite sœur de catin, était là une erreur que le géant aurait à regretter. Il aurait pu le saigner à blanc comme un goret qu’il était, laissant son sang vicié se répandre dans les égouts de la cité en signe d’avertissement. Il avait aussi songé à l’émasculer, pour s’assurer qu’il ne pourrait jamais enfanter un être aussi déplorable que lui … Ou enfin à lui trancher d’un seul coup d’épée ce qui servait de réceptacle à son cerveau mono-neuronal. Mais c’eut été là bien trop aisé et aurait certainement déclenché une réaction qu’il ne souhaitait nullement, bien que des envies de meurtres l’assaillaient. Le Licorneux se contenta donc de lever ses yeux de braise vers l’abruti, un rictus avenant se formant sur ses lèvres. L’autre se sentit immédiatement en confiance et se mit à sourire aussi, ses babines retroussées découvrant les chicots les plus immondes qu’il ait été donné à Ethan de voir. Ce faisant, la main droite du Licorneux, parée d’un gantelet, ce refermait en poing serré.

Ces gantelets, faits de l'acier le plus solide, assemblés en plaques métalliques épaisses et résistantes, terminées par de fines mais résistantes articulations qui protégeaient les doigts de son porteur, lui avaient été remis par Enguerrand de Lazare. Plus encore que des gantelets, ils étaient de réelles armes, capables d'un seul coup de bras d'assommer l'adversaire, tout en parant les flèches traitresses. Leur taille, inhabituelle, permettait de recouvrir les avant bras dans leur presque totalité, se substituant à n'importe quelle armure de plaque. Deux licornes gravées sur le dos de chaque main, semblaient comme vouloir se ruer contre l'adversaire qui oserait s'opposer à eux.

Alors qu’il fixait toujours de son regard la montagne de crétinerie hilarante qui lui faisait face, le bras d’Ethan se détendit furieusement, le poing fermé venant irrémédiablement se loger en plein dans son plexus. Les yeux de l’autre devinrent ronds et vitreux, tandis que la bouche s’ouvrait en grand cherchant apparemment l’air qui manquait à ses poumons. Un silence morbide s’installa dans la foule assemblée au moment où le géant s’affaissa sur ses genoux, ses mains collées sur la poitrine. Ce Goliath venait de tomber, mais aurait la chance de s’en remettre, lui. Profitant de l’émoi qu’il venait de provoquer, il reposa son éternelle question à haute et intelligible voix, mais rien n’y fit. La foule se dispersait déjà, alors que l’affreux commençait à recouvrer son souffle et à vomir trippes et boyaux. Mais déjà Ethan s’en était désintéressé pour poursuivre à poser ses questions ailleurs …

La faim commençait à le tenailler, et il se dit qu'il serait de bon ton d'avaler quelque chose, et d'en profiter pour interroger tous ceux qui se trouveraient dans la taverne, des fois que … Il avait la tête des mauvais jours le Capitaine, de celles qui mettaient mal à l'aise le premier quidam venu. Se dirigeant vers le comptoir, il apostropha le tavernier qui n'avait rien à lui envier en matière de "taciturne", mais qui lui rendait bien une tête et une largeur d'épaule. Décidément, ils étaient tous taillés dans la démesure dans cette cité, à moins qu’il n’ait un lien de parenté avec celui qui devait encore vomir sur la place. Il en fallait cependant bien plus pour intimider le Licorneux en cette journée.

Bonjour l'ami ! S’efforça-t-il de lancer au propriétaire des lieux.

Pas de réaction de la part de l'armoire poitevine qui se tenait là derrière son comptoir en train de le faire reluire, ou du moins essayer puisqu'il semblait avoir bu ce comptoir autant de liquide qu'en contenait la mer ... Il continua sa tâche imperturbable et lança un
" Ça s'ra quoi ? " d'une voix grave et profonde, avant de se déplacer d'un pas lourd vers un pichet qui trainait dans un coin.

Ça promettait d'une conversation des plus soutenues avec celui là ! Y'avait pas à dire, ce n’était certainement pas les qualités d'accueil du patron qui remplissait les tables. Il allait donc commencer par le commencement, et éviter de brusquer le bulldog qui sommeillait derrière le comptoir.

Ce sera de quoi manger et boire, si tant est que ce soit possible.

Il se retourna avec une agilité étonnante le tavernier et appela d'une voix de Centaure.

Babette ! Une galimafrée, un potage, du vin de ces idiots de Guyennais et une bonne miche de pain !
Il se retourna vers le ... bonhomme armé.... mazette du chevalier... avec un collier pareil, ça se reconnait...pas impressionné mais curieux tout de même.
Vous voulez rester au comptoir ou j'vous installe dans un coin pénard ?

Il l'avait surprit le regard de l'armoire qui lorgnait sur son collier. Pour sûr, ce n’était pas la première fois qu'il en voyait un. Ca n'avait pas l'air de lui faire d'effet, mais bon, ils ne devaient pas en voir tous les jours dans le coin, et surtout pas dans ce taudis.

Dans un coin … ce serait bien, un de ceux où nous pourrions discuter au calme.

De lever un sourcil... un chevalier qui veut causer... diantre... ça pue et pas le poisson pas frais... il indiqua d'un coup de menton une table reculée vers la fenêtre.
Installez vous là bas, j'suis à vous dans une seconde
Il partit d'un pas roulant vers la cuisine et regarda la Babette, brune gironde (rien à voir avec les guyennais) qui s'affairait à sa commande.Quand t'auras fini, tu sers... j'ai un gars qui veut me causer. Apporte deux verres du coup... tu s'ras mignonne.
Et de revenir vers la salle et de s'assoir avec lourdeur sur la chaise en face du chevalier
J'vous écoute

Bon, ça s'annonçait plutôt pas mal, même si la brute n'avait pas l'air si enchanté que cela. Il allait falloir le prendre avec des pincettes et pas tenter de le rouler dans la farine celui-là. Ethan se posa sur une chaise et patienta peu avant que le géant ne prenne place à son tour. Allez, quand faut y'aller ...

Il m'a semblé que ce n'était pas la première fois que vous voyiez un collier de ce genre, je me trompe ?

Il rit doucement.

C'est pas parce qu'on est une taverne pas cossue qu'on sait pas reconnaître les insignes 'savez. On en a une de chez vous, Zalina de Montmorency qui est poitevine. Et puis Mackx qu'est d'ici... alors ouais j'connais cet insigne, Chevalier.
La Babette arriva et posa la miche de pain les deux verres et une pleine carafe de vin. Coup de menton du tavernier qui servit deux verres et en poussa un vers le chevalier qui lui faisait face
C'pas pour ça que vous vouliez causer si ?

Ah ben voilà qui expliquait pourquoi il n'était pas étonné, ça allait permettre d'embrayer bien plus rapidement. Ethan hocha la tête pour remercier le tavernier de les avoir servis, et tendit son verre pour trinquer avant de continuer sur sa lancée. Fallait battre le fer pendant qu'il était chaud ...

Je constate en effet que vous êtes coutumier de notre Ordre. Votre taverne n'est donc pas si méprisable puisque Zalina et Mackx y séjournent de temps à autres.
Mais ce n'est pas eux qui m'amènent, mais une autre de nos sœurs.

Il avala une gorgée du liquide, qui avait quand même un sacré goût de piquette ... dur pour un p'tit déj ...

Ah ?
Il le regarda sans comprendre
C'est que j'en ai pas croisé des chevaliers ces derniers jours...
La serveuse amena de nouveau sur un plateau une large part de tourte aux herbes et aux légumes, une assiette de soupe et une part de tarte aux noix, disposa le tout sur la table et s'en retourna derrière le comptoir.
Vous êtes sure que la ... dame est dans le coin ?

Ethan se désintéressa de la serveuse qui leur collait ses miches sous le nez, et dont les formes semblaient ne pas laisser le tavernier indifférent. Laissant les plats de côté, il préféra s'adonner au questionnement du tavernier qu'il sentait à même de lui fournir une réponse.

En fait, je voudrais savoir si vous n'auriez pas rencontré un autre Chevalier. Un p'tit bout d'femme aux cheveux roux, avec une cicatrice sur l'arcade gauche ...
Cela vous dit-il quelque chose ?


Le tavernier leva un sourcil... non ça pouvait pas être ça... celle là... dedieu de ventre saint gris si c’était elle il allait l'entendre tout chevalier qu'il était.

Une rousse avec une arcade ouais... mais elle ressemblait plus à quelqu'un qui cherche les soucis, sauf votre respect.
Elle a demandé une chambre ici et elle m'a tout laissé en plan ! Son canasson noir à l'écurie est une peste ambulante !
J'arrive pas à le vendre ! Pour le nourrir j'ai vendu ses effets et si vous la connaissez va falloir voir à payer c'qu'il reste...


Les sourcils du ténébreux se froncèrent à écouter l'autre lui parler d'payer. Qu'est-ce qu'il en avait à battre de ses soucis pécuniaires ? Il n'était pas là pour l'entendre se plaindre. Il voulait du sonnant et du trébuchant le balaise, il allait en avoir ! Mais d'abord, il allait falloir qu'il crache le morcif. Il prit sa bourse chargée d'une centaine d'écus, et la posa lourdement sur la table, faisant bien attention à ce que l'autre prenne conscience de ce qu'elle contenait

Pour payer, j'ai ce qu'il faut. Mais va falloir m'en dire un peu plus. Que vous a-t-elle demandé d'autre à part la chambre ? Et quand l'avez vous vue pour la dernière fois ?

Le tavernier toisa la bourse sans réaction apparente... ça sentait définitivement pas bon cette histoire. Et l'bonhomme en face usait des mêmes moyens que la rousse qui l'avait abordé il y avait de ça un bon mois... il releva les yeux vers le chevalier.

Elle m'a demandé où elle pouvait trouver la Zoko... J'lui ai dit à demi mots pour éviter les emmerdes. Ils étaient descendus dans une taverne à l'ouest de la ville près du port. Elle a rien dit, elle est montée dans la chambre et elle est descendue à la tombé d'la nuit. Elle est jamais revenue...

Là, il n’y eut pas que les paupières du ténébreux qui se refermèrent... son cœur aussi fut pris dans l'étau qui vint l'enserrer. Sa respiration se coupa un instant, le temps pour lui de faire tourner ce qui lui restait de neurones à la vitesse d'un ch'val au galop. La Zoko ! Putain ! Où est-ce que t'es allée t'fourrer sœurette ?

Combien pour les frais ?
Pas le temps de tergiverser, il venait de bénéficier d'une piste, et il lui fallait la suivre immédiatement.

Oh ben ça me parait bien assez.
Il pointa la bourse avec un sourire en coin

Les yeux de braises vinrent s'emparer du regard glauque du balaise, histoire de lui faire comprendre qu’il ne fallait pas l'prendre pour une truffe, ni pour un de ses nobliots qui avaient les écus qui débordaient de toutes leurs poches.

Le tavernier soutint le regard et dit d'une voix posée

30 écus pour le canasson, 50 si j'vous le garde encore un temps et 10 pour le petit renseignement

Mouai, c'était déjà mieux, surtout qu'il s'appelait pas Faooeit le Licorneux, il lui faudrait bosser s'il voulait se nourrir les prochains jours. Il s'empara de 70 écus et les refila au tavernier.

Le reste, c'est pour racheter ce que vous avez mis en vente.
Le ton était sans appel, même s'il savait que le tavernier n'en serait pas effrayé. Mais s'il n'avait pas envie qu'Ethan vienne lui coller le feu à sa boutique, vaudrait mieux qu'il obtempère.
Je repasserais chercher le tout plus tard. Et gardez sa chambre libre

Il le regarda en hochant la tête et en se demandant s'il allait tout retrouver le tavernier... remarque il pourrait toujours racheter à l'identique... faudrait voir. La large paluche s'empara de la bourse et il demanda.

Autre chose ?

Ethan lui tendit la main, afin de sceller les paroles engagées.

Non, merci encore.

Le tavernier zieuta le chevalier, serra la main tendue et se leva pour retourner d'un pas lourd vers le comptoir.
Ethan se leva à son tour pour partir, mais se retourna pour ajouter :

Ah si … si jamais vous la voyiez, dites lui qu'Ethan la cherche et qu'elle m'attende ici. Merci.

Puis il sortit, laissant là le repas, et la piquette infâme qui lui ravageait les boyaux ... Une seule question se posait désormais à lui, aller seul dans cette fameuse auberge semblant être infestée de requins, ou bien en informer les autres ?



[HRP] Merci à LJD Cerridween qui a joué le rôle du tavernier pour ce dialogue [/HRP]
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Mackx
[En mode sous-marin dans les rues d'une ville portuaire]

Des bruits de couloir, qui s'étaient petit à petit amplifiés jusqu'à se transformer en une rumeur tout d'abord sourde puis persistante étaient parvenus aux oreilles du Cavalier. Ils parlaient d'une rixe en taverne qui s'était terminée dans la rue. Jusque là, tout allait bien ... la Rochelle était une ville de marins et Aristote sait que les marins ne sont jamais les derniers lorsqu'il s'agit de dégainer le poing. C'est quand il entendit le mot Zoko qu'il commença à saisir que quelque chose n'allait pas.

En effet, il avait l'oeil sur la Zoko depuis leur arrivée, sachant plus ou moins combien ils étaient, ce qu'ils faisaient de leurs journées - vider les tavernes -, et ce qu'ils étaient venu foutre dans le coin. Mais qu'ils se soient fracassés avec des indigènes, ça, le Vicomte venait de l'apprendre.

Quand il eût appris, par recoupements successifs et témoignages valables, que les "indigènes" en question n'en étaient finalement pas mais que c'était une étrangère seule, rousse et licorneuse qui s'était opposé au gang d'Eikorc, il blémit ...

Il n'y en avait qu'une pour faire un coup pareil ... toute seule contre la Zoko ... vindjeu !

Elle avait été blessée selon les rumeurs, et salement. Elle devait donc techniquement se trouver toujours dans le coin à moins qu'ils ne l'aient emmenée avec eux. Mais pour en faire quoi ? La Zoko était un groupe d'action, habitué à se déplacer vite et peu chargés ... Mackx les voyait donc mal trimbaler une carriole derrière pour porter une blessée grave, qui ne manquerait outre pas de faire tourner la tête des gens sur leur passage, ce qu'ils pouvaient éviter en étant seuls.

Ayant donc l'impression que la Capitaine était toujours à La Rochelle, il entreprit de flâner par la ville à sa recherche. Oh, il n'y avait pas d'illusion à se faire ... si elle s'était cachée ou qu'on l'avait cachée, il ne saurait pas la trouver facilement comme ça. Mais étant un villageois du cru, ses oreilles habituées à l'écoute en douce pouvaient lui rendre de bien meilleurs services que ses muscles, en tout cas à l'heure actuelle !

Il partit donc faire le tour des tavernes. Car quand on boit, on parle entre les gorgées et quand on a un peu bu, on est souvent plein de vérités pour qui sait écouter. Le Vicomte - en tactique sous-marin - entra donc dans un premier bouge et tendit l'oreille tandis que le patron déposait devant lui une chope pleine. Son écoute ne lui dit rien et, après une petite dizaine de minutes, il partit, ayant à peine entamé sa bière ce qui, pour quelqu'un le connaissant, n'aurait pas manqué d'alimenter la conversation pendant des mois : d'Alesme n'avait pas fini sa chope ! Vindjeu, il devait être malade ...
Les deuxième et troisième tavernes dans lesquelles il entra ne lui apprirent rien de nouveau non plus. Là aussi il laissa une bonne partie de sa bière traîner tandis que rien de nouveau ne parvenait des bribes de conversation.

Il était donc parti vers une quatrième, et non la dernière ... une ville de marins reste une ville de marins. C'est alors qu'il allait y arriver qu'un homme en sortit la démarche rapide et raide. Sauf que l'homme en question avait une cape azur qui flottait au vent, cape que le Cavalier n'avait pas mise mais qu'il gardait enroulée dans sa besace. On a jamais vu un sous-marin avec une cape ...
En plus d'avoir une cape, il avait des cheveux blonds et une stature que le Vicomte connaissait, et pour cause, c'était Ethan, ou alors, ça ressemblait très fortement à Ethan !

Le Capitaine avait l'air d'hésiter, planté là devant la taverne. Mackx s'approcha alors de lui assez rapidement, pour être certain de ne pas le voir partir et devoir le suivre de loin. Lorsqu'il se sentit assez proche pour être entendu, il mit ses deux mains en porte voix autour de sa bouche et interpella le blond.


Hola ! Ethan !?

C'est seulement à ce moment là qu'une question latente parvint à son cerveau, comme ferait une bulle qui éclate enfin après être remonté depuis les profondeurs d'un lac : Mais p'tain, qu'est-ce qu'il foutait à LR ?
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Cerridween
[ Solitude ]

Les yeux sinoples fixent le vide...
Le vent souffle doucettement et fait voler une mèche pourpre qui passe devant ses yeux.
Elle est assise là, sur le banc de pierre de la cour. Elle ne bouge pas.

Ils sont partis.
Les malles ne l'avaient pas trompée. Ils sont partis, tous sans exception. Elle a regardé par la fenêtre, la massive carrure s'avancer dans la cour. Il s'est arrêté un instant sans se retourner. Puis il est monté sur son cheval, essayant de masquer les heurts qu'elle avait laissé dans son corps.
Les sabots ont frappé la pierre, la cour a résonné du départ...
Avant de se taire en s'enfonçant doucement dans la torpeur de l’ombre qu’irradie doucettement un rayon de lune.

Libre...
Libre...
Amère liberté teintée de vide.
Le bras en écharpe est lové contre sa poitrine, abrité par la cape noire qui la protège du frimas.
Du dehors pas du dedans.
Elle n’a plus qu’un demi-sourire, empêché par un autre, peint sur sa joue par le baiser d’une hache. Elle ne soupire pas, assise sur le banc de pierre froid. Elle regarde au loin, dans un lointain sans lendemain.

Rien ne passe dans son impasse.
La douleur est là, compagne et lien, qui la cloue au sol. On lui a coupé les ailes. Elle les a perdues. Ses doigts ne répondent pas et la plume refuse de rester dans sa main sans que le mal ne vrille la marque du feu et du fer qui ronge son épaule. Elle n’a plus de monture pour s’évanouir loin de la mer qui flue et reflue, comme les pensées. Aujourd’hui est le premier jour. Le premier jour où la Pivoine même effeuillée, blessée, sans sève, reste au sol coupée.

Dans sa main gauche une lettre.
Elle résume tout ce qui a été et n’est plus. Une quête, la vengeance. Il a fini à genou. Mais au lieu du sang, elle aura tiré des larmes du corps de celui qu’elle avait juré de faire tomber.
Miséricorde. Accordée.
Du juste pardon, après châtiment, puisqu’elle a brisé tout ce qu’il était. En se perdant elle-même, en soufflant sur la flamme qui la faisait tenir debout. Celle de la haine, dernière chandelle, pour éviter de tomber à genou.
Le devoir fait mal. Toujours. A jamais.

Que faire avec une vie qui ne peut plus être la sienne ? Elle le sent, elle le sait même si elle ne peut s’y résoudre. De la douleur naîtra la perte. Jamais plus elle ne pourra porter la canne de maitre de la main droite. Ni Miséricorde qui est partie au loin, alors qu’elle l’a donné, ironie, à un autre.

Elle l’a bien cherché encore et encore. Il aurait su. Il aurait su trouver ce petit rien qui fait tout, pour lui redonner le goût à ce fruit mûr qui est son existence. Il aurait su. Mais il n’est plus là le géant blond. La seule tête aux épis de blé n’a pas sa carrure, bien qu’il ait derrière son masque la générosité et la fougue qu’elle n’a plus. Il est là. Alors qu’il n’a aucune raison de l’être. Elle commence à peine à cerner ses contours… et il y a un silence qu’elle ne perce pas. Les contraires s’attirent mais ne se ressemblent pas. Quelle phrase idiote…

Elle doit les rejoindre. Elle doit demander. Ce qu’elle s’est toujours refusé. En tous cas pas à eux qu’elle n’a pas voulu amener danser avec le Diable. Ils ne méritent pas d’être damnés.

Elle doit les rejoindre. Et elle est là, chaines aux poignets, le cœur en plomb à regarder son impuissance. A regarder les débris de sa vie sur le sol pierreux, jonché de souvenirs, gravé d’un peu trop près dans sa peau et sur ses yeux.

Elle lève les yeux.
Merci… mon anneau de salut, je t’en prie…
Le ciel est blanc et sans promesse. Ni d’une accalmie, ni d’un gros temps.
Lentement, comme une pavane, il se piquète d’albâtre qui descend mollement.
Sa main valide s’ouvre et elle accueille un joyau éphémère qui lentement se pose au creux de sa peau qui lui ressemble.

Elle ferme les yeux.
Et elle demande. Au plus profond d’elle-même… elle supplie.
De pouvoir encore respecter ce qu’elle lui a promit.

C'est bizarre, un voeu. Ça meurt, comme un flocon sur le doigt…

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Armand.
Ils sont partis.

Debout à sa fenêtre donnant sur la cour il les avait regardé plier bagages. Bras croisés sur sa poitrine et visage impassible, il avait suivit de loin le ballet de leurs allers et venues. Son regard s'était posé un moment sur la silhouette imposante du colosse alors qu'il se souvenait de sa promesse. "Zoko ad vitam eternam", serment inaliénable qu'Armand avait porté et n'aurait brisé pour rien au monde tant il respectait Eikorc et Maleus. Et pourtant, auprès de la montagne de muscles, se tenaient ceux qui le faisait douter de cet engagement. Tapis dans l'ombre, l'estomac noué, le jeune mercenaire avait regardé longuement le couple zokoïste vaquer à ses occupations. Au fond, Armand ne les détestait pas sincèrement, mais cela était tellement plus simple que de s'avouer la vérité. Une vérité bien trop honteuse pour un jeune homme aussi fier que le blond.

Las de cette colère qu'il nourrissait, celui-ci avait finalement fait volte face laissant dans son dos ses "compagnons", une part de lui rageant de ne pouvoir les accompagner. Il était zokoïste, sa place était à leurs côtés mais voilà... comment oublier le regard que la féline, un regard à glacer le sang.... traitre. Fatigué, Armand avait soupiré à cette pensée tout en se laissant tomber sur le lit. Doigts croisés derrière la tête et azurs rivés au plafond, il s'était mit à cogiter une fois de plus. Il le savait, ressasser le passé ne le mènerait à rien mais c'était plus fort que lui. Comment en était-il arrivé là? Pourquoi avait-il agit comme un tel idiot? Arm' n'acceptait pas et les dernières semaines ne cessaient de tourbillonner dans son esprit. Tant de questions et un seul sentiment d'impuissance pour toute réponse, on ne réécrit pas le passé.

Nouveau soupir. Et dire que tout avait commencé parce qu'il avait nourrit l'espoir de pouvoir laisser tomber le masque devant cette Féline seule témoin dans les geôles puantes de Joinville de ce qu'il pouvait être au delà du facétieux charmeur, sombre crétin! L'idée de pouvoir enfin laisser surgir le mercenaire qui sommeillait en lui, de trouver confidente avait guidé ses pas. Ne plus avoir à se cacher, enfin. Pauvre idiot, la belle n'avait aucune raison de se souvenir de lui et comme un pied de nez du destin à ce blond prétentieux, la voila tombée amoureuse de ce fougueux qui l'avait fait se sentir si faible.

Armand s'était relevé d'un seul coup à cette évocation, repenser à tout cela ne faisait que l'énerver et c'est bien cette colère qui l'avait fait déraper allant jusqu'à le faire devenir traitre aux yeux Félins. Et le blond n'acceptait pas, voilà bien le problème. Comment accepter d'avoir agit comme un tel con? Pourquoi cette affaire de l'avait pas laissé indifférent? Pourquoi ressentait-il ce besoin d'exister à leurs yeux alors qu'eux s'en foutaient? Armand ne comprenait pas. Il était bien le seul à s'énerver de cette situation et trop fier pour admettre son besoin, il préférait à présent détester, oublier, tout briser que de reconnaitre cette évidence, ça jamais!

Colère remontée à la surface en une vague submergeante, le jeune homme qu'il avait finalement quitté sa chambre, préférant aller se calmer sur la plage que d''assister au départ. Prenant bien soin de passer par la porte dérobée de l'auberge pour ne pas avoir à les croiser, il était parti sans se retourner. Il ne pourrait retrouver la Zoko sans avoir retrouvé la paix, oublier!


Ils sont partis.

Et comme la veille Armand se terre dans cette chambre d'auberge qu'il ne quitte plus ou si peu. Son crâne est un vrai champs de bataille ou s'oppose sans cesse son cœur et sa raison dans une lutte inégale, le cœur l'emporte toujours.

Il sont partis, enfin! Et pour la première fois depuis des semaine le blond se sent libéré...
Libre...
Libre...
... Amère liberté teintée de vide.

Besoin d'un bol d'air frais, le blond ouvre la fenêtre, laisse son regard glisser sur la cour comme chaque jour depuis cette nuit là, et celui-ci se pose comme la veille. Elle est là, assise sur un banc de pierre, le bras en écharpe lové contre sa poitrine, perdue.
L'épaule du blond vient se poser sur l'encadrement de la fenêtre. Bras croisés, il observe. Il est là, alors qu'il n'a aucune raison de l'être.

Sa main se porte jusque dans sa poche machinalement pour en ressortir un anneau sur lequel les azurs se posent. "Cet objet n'a pas de prix à mes yeux, elle appartenait à mon frère" lui avait-elle dit. Armand ne connaissait pas l'histoire de ce frère mais il n'était pas difficile de deviner la blessure qu'elle semblait cacher. Un mort, juste un de plus. Il avait faillit le lui rendre en l'apprenant mais il en voulait trop à cette rousse inconsciente. Tant de vies avaient été mises en danger et pour quoi au final? Un pardon?! Armand avait alors gardé l'anneau voulant lui donner une leçon. Les hommes, chevaliers ou mercenaires diront toujours qu'ils sont prêt à donner leur vie pour des raisons qui leurs sont propres mais trop souvent ils oublient que la vie n'est pas leur plus précieux trésor et que parfois, un simple anneau peut avoir plus de valeur que l'existence elle même.

Soupir, les yeux du blond se posent de nouveau sur la chevalière. Lui, d'ordinaire si prétentieux n'éprouve aucune envie de lui dire la vérité sur cette nuit là. Qui l'a aidé? Il n'en sait rien, version officielle de laquelle il ne démordra pas. Regrette t-il son geste? Non. Il ne veut simplement pas lire de gratitude dans le regard de cette rousse. Il a agit pour lui, parce qu'il n'aime pas faire comme les autres. Il n'est pas son ami, il ne veut pas de merci. Le poing se serre autour de l'anneau, les azurs se durcissent. Il l'aidera à se remettre sur pied, à retrouver les siens. Il l'aidera car il exècre cet air abattu qui semble se peindre sur ses traits. Elle est venue de son plein grès, elle a agit sans tenir compte des conséquences, elle n'a pas le droit d'être triste à présent!

Armand dodeline de la tête, respire et comme la veille il se détourne de la fenêtre et quitte la chambre. Mais cette fois, nulle porte dérobée, c'est par l'entrée qu'il pénètre dans la cour silencieusement. Sans un mot, avec toute le calme et la froideur qui peut le caractérisé le jeune mercenaire vient prendre place au près de la licorneuse sur le banc de pierre.

Vous connaissiez les risques en venant ici, alors pouquoi cet air perdu à présent?

Le silence revient et Armand laisse son regard se perdre devant lui comme comme pour laisser à Cerridween un peu d'intimité. il a posé sa question avec calme et détachement, il veut juste savoir... savoir ce qu'elle envisage à présent... Peut-il y avoir une vie, après une petite mort?

Des réponses obtenues, il choisira ou non de lui rendre ce qui semble tant compter.


**édit pour les fautes
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Cerridween
[Sur un banc... à la croisée de deux mondes]

Sourire en demi lune sous la neige qui tombe et qui s'amasse doucement sur les cheveux en les piquetant de blanc.
Tu vieillis Pivoine, tu vieillis.

Elle n'a pas bougé de sa position hiératique quand le blondin s'est installé là.


Vous connaissiez les risques en venant ici, alors pourtant cet air perdu à présent?

Elle sourit amèrement, comme un goût de bile dans la gorge. Elle voudrait cracher, c'est la moindre des choses, pour que sort ce venin qui reste encore. Ce goût un peu amer, aigre-doux. Elle le connaît depuis longtemps... on s'habitue... presque.
Celle de l'abandon, du don de soi sans contrepartie. Des autres avant soi même. Du devoir jusqu'à fleur de peau, jusqu'au sel des larmes et jusqu'au sang coagulé. Jusqu'à un bras qui dort peut être à jamais, mort d'avoir trop donné, que ce soit les coups ou les offrandes.

Il n'a pas comprit encore. Elle comprend. Il est difficile de comprendre cette abnégation. Elle paraît irrationnelle, démente. Qui après avoir prononcé des mots, s'y tient à la lettre ? Soupir diffus qui s'échappe de son coeur jusqu'à ses lèvres avant de se matérialiser dans l'air et de s'y confondre en mourant. Et pourtant les règles sont si simples. Si droites. Carrées. Même si elle dévie de sa trajectoire, elle n'en perd jamais le fil. Chaque acte, chaque parole est conditionnée, pesée, réfléchie, calibrée, calculée. L'équilibre est précaire sur cette balance, mais il essentiel.
Justice et Bravoure.
Honneur et Devoir.
Sombres héros de l'amer qui ont su traverser les océans du vide... elle surnage maintenant.

Elle laisse passer le temps puisqu'il n'y a que cela qui lui reste et qu'elle peut le dépenser sans compter.
File les secondes comptés par les flocons qui continuent mollement leur descente doucereuse.
Tu t'endettes, Pivoine...
Un instant passe son vœu à la mémoire de ses frères dont les sanglots si longs faisaient couler l'acide.

J'ai si souvent sauvé la face à bien d'autres que moi...

L'ironie est palpable même si discrète.
Mais tout est vrai. Elle en a sauvé tant d'une manière ou d'une autre. Comme il l'a fait Lui même. Pour elle. Elle se rachète à chaque vie sauvée. A chaque minute gagnée. A chaque bougie allumée au milieu de l'ombre. Elle est sa propre rédemption.
Pour cette faute qu'elle n'oublie pas et qu'elle ne peut oublier. Pour ce don qu'on lui a fait et qu'elle rend au centuple. Par l'engagement prit et jamais délaissé.
Elle a sauvé la face à bien d'autres qu'elle en perdant la sienne. En perdant morceau par morceau sa chair et son âme. En épuisant ses forces à se battre contre le Destin à bout de bras.
La voix est hachée. Expliquer est si difficile...


Se perdre pour respecter la parole donnée. C'est ma vie. C'est ainsi. J'ai perdu une raison de vivre, j'ai clos une histoire. Par un pardon, je lui devais. J'ai une vie à réinventer et la mélancolie est une des seules choses qu'il me reste.

Respecte la...


Le sourire, il ne le verra presque pas quand elle tourne la tête pour le présenter au Blond.
Il est sincère.
Triste mais sincère.
Elle a le vague à l'âme, du peu qui lui reste.
Elle est chevalier. Elle est maître d'arme. Elle est Capitaine. Elle est Tyran. Elle est Poison. Elle est dure et froide.

Mais elle est humaine.

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Lady_antlia


[Des retrouvailles- Une trouvaille ]

Un flot de souvenirs, DES flots de souvenirs qui viennent l'assaillir sur le commencement de sa vie.. il y a bien longtemps, ville de son enfance! Montélimar .
Sa rencontre avec Karine, cette idée folle de l'auberge des trois bonheurs et sa sœur: les deux blondinettes dont une qui n'était plus. La douceur d'une vie telle la sensation qu'une friandise pouvait laisser dans la bouche. Elle la serra fort cette blondinette là contre elle, lien avec le passé, omettant les quelques nuages qui avaient pu voir le jour sur leur relation, ou les relations entre sa sœur Nadia et la Blonde se trouvant en face d'elle. Elle l'avait serrée fort sur son cœur, durant un long moment, y croyant à peine.
Puis les questions, de leur vie passée, des enfants de l'Etoile, en omettant leurs occupations présentes ... jusqu'à ce que la Blondinette de Karine demande :

Dis.. T'viens faire quoi dans l'coin?
Il est vrai qu'elles n'avaient parlé que du passé, mais point du présent et ne parleraient certainement pas de l'avenir vu le sujet qui allait se profiler :
En fait... Notre cap'tain nous a demandé de venir sur La Rochelle , une affaire importante. Mais toi ?
Karine la zieute du coin de l'oeil Ton Cap'?

Antlia lui sourit avec douceur, tellement heureuse de l'avoir retrouvée après autant de temps
Attends, nous n'avons même pas fêter ça !rit amusée . Oui mon Cap'taine, Ethan de son petit nom. Mais tu ne m'as point répondu, toi que fais tu à la Rochelle? Que deviens tu ?

Karine hèle le tavernier la première: Deux binouzes m'sieur..Puis enchaine : Ethan? Ethan.. le Licorneux.. Avec sa barbe toute douce com' que j'les aime.. C'bien lui?
Elle fait de gros yeux ne se rendant pas compte que Licorneux rime avec Némésis.. Nan.. Ténébreux, mieux.
Tlia lache son sourire et la regarde étonnée levant un sourcil et lui demandant si Karine le connait..

Karine hoche alors la tête:
Yep..Sa barbe est si soyeuse.. Peux pô l'oublier..Mais.. Atta..
Elle marqua une pause mais Antlia enchaina de suite : Mais tu l'as connu où?
L'Etoile alors prend les chopes et en pousse une vers sa blondinette qui sourit: La première fois j'l'ai croisé à Valence, juste avant qu'j'aille vivre dans l'Comté d'Toulouse. Pis, sa soeur s'est installée là bas 'ssi..
Tlia rattrape sa cape azur aux deux licornes argent vers elle , la replace à ses côtés prenant alors une chope à la main . On va trinquer alors aux retrouvailles !
Karine la regarde faire du coin de l'oeil jusqu'à ce que ça fasse tilt dans sa caboche. La blonde montre alors la cape du doigt. Mais...T'fais partie de la Licorne? en la regardant ahurie.
Je suis en effet Chevalier Errant de la Licorne, pourquoi cela?
Il y eu un laps de temps peut être infime mais elle perçu comme une gêne, un je ne sais quoi entre els deux femmes comme un flottement.
Ben.. Z'êt' pas les seuls dans l'coin t'sais.
Nous sommes venus à plusieurs... en fait nous sommes à la recherche de mon autre cap'taine , du Tyran en fait, la Pivoine .

Ah.. Euh.. Vous la cherchez pourquoi donc?
Légère gêne qui persiste entre elles sans qu'Antlia puisse comprendre pourquoi.
Ethan a reçu un courrier de sa part, inquiétant d'après lui. Cela a suffit pour que l'on parte à sa recherche. Nous venons de Limoges ou elle semblait chercher un certain Jules .
Nous sommes sans nouvelles de sa part depuis un moment....ce qui est anormal.

Karine grimace alors avant d'entamer le terrible récit de ce qu'il s'est passé... du passé proche de la Pivoine .
Ya eu une baston.. Ca fait quelques jours maint'nant..
Ben euuh.. Comment dire..
Elle plisse alors du nez. La Pivoine a été blessée.. Mais t'en fais pas hein.. Elle s'en r'mettra!
Et l'Errante de se lever d'un bond. Comment ça blessée? et où elle alors? Que s'est il passé? Elle la regarde, sentant son estomac se serrer tout à coup , la main se crispant sur la chope. Karine lève le nez vers elle la chope au bord des lèvres.
Ben euh.. T'veux vraiment l'savoir? Mmmh.. Elle se racle la gorge comme pour se donner du courage . T'sais que l'Colosse est dans l'coin? S'sont entretués tous les deux..
Elle est où là ? Quelqu'un l'a soignée ?
Karine essaie de l'appaiser mais la tension se faisait sentir chez la Licorne. Elle se r'pose à l'étage d'une taverne.. Elle va bien.
L'Errante commence à comprendre la relation de Karine avec la Zoko, mais elle ne fera aucun commentaire. Elle reste la blondinette, son amie de longue date. Alors elle pose une main sur la sienne .
Il faut que je prévienne mon cap'tain . Si elle est bléssée il lui faut des soins .
La Licorneuse passe sa cape sur ses épaules nerveusement .
Je te remercie pour ces précieux renseignements et .. je te vois plus tard ?
La "paillaisse" la zieute, le nez en l'air, toujours assise dans le fauteuil confo. Elle va bien.. J't'assure..

[ RP effectué à 4 mains , merci à LDJ Kar1 ]

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E_newton
[Quand tout n’est plus que non-dit …]

Une taverne à l’ouest de la ville dans la zone portuaire, Jules le rouquin, la Zoko … Tous les éléments du puzzle commençaient à se mettre en place, et déjà le ténébreux se préparait au pire. Si le rouquin avait rejoint les rangs du colosse, Cerrid était allée se coller dans la gueule d’une meute de loups. Il les avait déjà croisés, et pas plus tard que lors du conflit Berrichon. Ils étaient devenus mercenaires, et bon nombre d’entre eux étaient rompus au combat. Même pour un Maître d’Armes aguerrie telle qu’elle, elle n’avait que peu de chance d’échapper à une sévère correction, et c’était la moindre des choses qui aurait pu lui arriver. Il tentait tant bien que mal de réfléchir à la meilleure des attitudes à adopter, mais son esprit s’enlisait dans les tourments qui l’accablaient.

Sur la place, le calme semblait être revenu et le géant poitevin avait disparu. Mais les regards des passants qu’ils croisaient étaient lourds de jugements. Une fois encore, il ne s’était pas fait d’amis en ces lieux le Licorneux. Mais s’ils pouvaient tous savoir comme il s’en moquait. Il en était ainsi de sa vie, on le requérait pour protéger les opprimés, mais on le jugeait quand il mettait à terre un despote. Il hésitait encore entre rallier directement la taverne où la Cap’ s’était évanouie et aller informer les autres des nouvelles informations qu’il avait en sa possession, quand une voix l’interpella. Une voix qui ne lui était nullement méconnue, mais qu’il n’avait pas entendue depuis bien longtemps. Il chercha du regard en direction du lieu d’où cela provenait, et y découvrit Mackx. On ne pouvait pas dire qu’il faisait dans la dentelle le Poitevin. Désormais, toute La Rochelle saurait quel était le « David » qui avait abattu l’un de leurs « Goliath » d’un simple coup de poing … armé d’un gantelet … Et en parlant de balaise, le Licorneux Poitevin n’avait rien à envier au géant qu’Ethan venait de terrasser.

En d’autres circonstances, Ethan l’aurait certainement accueilli avec un sourire aimable. Mais étant donné les événements et les révélations dont il venait de bénéficier, il n’en fut rien. Il était vrai qu’il n’avait jamais été réputé pour être avenant, le Capitaine. Le Cavalier n’en serait donc certainement pas désappointé. Il n’y avait nulle raison de tergiverser, et à peine l’avait-il rejoint en quelques enjambées qu’Ethan lui exposa les raisons de sa présence en cette cité. Sa décision avait été prise au fur et à mesure qu’il énumérait les derniers éléments en sa possession et il en informa le Poitevin.

Mackx, tu vas aller quérir nos frères et sœurs éparpillés aux quatre coins de cette cité, puis vous viendrez me rejoindre en la taverne.
Pour ma part, je pars immédiatement repérer les lieux et déterminer de la façon dont nous interviendrons.


Il n’attendit aucune réponse, sachant pertinemment que ses ordres seraient exécutés à la lettre. Mackx n’était pas de ceux qui cherchaient midi à quatorze heures et savait quand il fallait s’en tenir à agir. Déjà le blondinet se dirigeait d’un pas empressé vers le port. Tout en ce faisant, il vérifia méticuleusement que son armement était au complet et bien en place. Il ne savait pas ce qu’il allait rencontrer là bas, ni ce qu’il allait devoir affronter. Sa cape azurée ne pourrait pas passer inaperçue, et il se doutait grandement qu’on n’allait certes pas lui réserver le meilleur des accueils. La cité n’était pas des plus étendues, et ce furent le cri des mouettes et l’odeur quelque peu nauséabonde de poisson gâté qui le guidèrent.

Quand il arriva dans la cour faisant face à la fameuse taverne, il laissa bien malgré lui un long soupir silencieux lui échapper. Elle était là, seule, de dos, assise sur un banc, sa chevelure rousse reconnaissable entre mille commençant à se parsemer de flocons blancs. Nulle autre présence aux alentours, et en tous les cas rien de ce qui pouvait ressembler à une horde de mercenaires. Il parcourut les quelques mètres qui le séparaient du banc en prenant la peine de respirer, et vint se planter silencieusement devant elle.

La tension de l’éventualité de l’avoir perdue s’était soudainement envolée. Mais en lieu et place, se furent tout un tas d’émotions diverses et variées qui vinrent l’envahir. La colère tout d’abord. Celle née de la découvrir en vie et qu’elle n’ait pris nulle peine de l’en avertir. Qu’elle ne l’ait en rien informée de la quête qui était la sienne, et de ne jamais lui avoir demandé de l’accompagner. Celle de savoir qu’elle avait mis sa vie en danger, sans même avoir pris soin de réfléchir aux conséquences possibles de sa décision. L’envie de la baffer l’effleura, mais alors qu’il levait les yeux sur elle, il put découvrir l’affreuse vérité qui lui sauta au visage. Sa joue était désormais marquée d’une longue cicatrice encore boursouflée, et son bras était supporté par une écharpe.
Puis vint la douleur sourde et muette. Celle née du fait qu’il n’avait pas été là pour la protéger, et encore moins pour la secourir. De celle qui vous étreint quand vous vous sentez impuissant, voire même inutile pour ceux que vous chérissez. Il avait failli à son devoir. Il n’avait pas su deviner les desseins qui étaient les siens. Il n’avait pas su lire en elle. Il n’avait pas été ce frère d’armes sur lequel on sait pouvoir compter en toutes circonstances. Ce fut l’envie de la serrer tout contre lui et de lui demander pardon qui l’étreignit, mais là encore il dut y renoncer.
Enfin, la tristesse l’envahit. De celle qui lui fit prendre conscience qu’en fait, elle ne lui avait pas prêté suffisamment confiance pour lui avoir jamais parlé de tout ceci. De celle qui vous rappelle qu’avec ou sans vous la terre continuera de tourner. Que vous n’êtes que l’un des nombreux rouages remplaçables d’un monde où l’individu n’a de valeur que celle que l’on veut bien lui prêter.

Il l’avait fixé de ses prunelles de braise dont l’intensité devait avoir baissée au fur et à mesure que ses sentiments l’avaient traversé. La neige continuait à tomber nonchalamment, comme voulant effacer de son manteau de virginité tout ce qui s’était déroulé en ces lieux. L’atmosphère feutrée de ce jour d’hiver ne parvenait pas à estomper l’étrange complexité du dénouement qui se jouait dans le cerveau du Licorneux. De nouvelles déterminations venaient de poindre en son esprit, mais de cela, seul lui saurait à jamais lesquelles elles étaient.
Il n’avait rien à ajouter à ce que ses yeux avaient exprimés, le capitaine silencieux. Aussi, se contenta-t-il d’ôter le gantelet de sa main droite, et de la tendre à Cerridween. Il était désormais temps pour eux de quitter cette cité devenue maudite aux yeux d’Ethan.

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Armand.
[Quelques minutes avant l'arrivée d'Ethan]

La mélancolie est une des seules choses qu'il me reste. Respecte-la...

L’emploi du tutoiement l’a surpris bien qu’il s’applique à ne rien laisser paraitre. Stoïque, Il reste silencieux, les azurs perdus à la contemplation de la neige qui tombe mollement sur le pavé. Seul un léger hochement de tête est venu répondre à la requête féminine. Comprendre cette femme lui est possible. Ne vient-il pas après tout de lier sa vie à celle d’une troupe de mercenaires par un serment ? Trop fier, le jeune zokoïste a simplement des difficultés à composer avec sa mélancolie affichée, légitime certes mais qu’il perçoit pourtant comme une faiblesse, lui qui s’est toujours refusé à les laisser transparaitre. Mais de quel droit imposer telle rigueur à d’autres ?

Les Azurs se meuvent à la rencontre des sinoples, détaillent ces miroirs de l’âme. L’on peut tant apprendre d’une personne par un simple regard. Armand n’approuve guère ses choix mais les respectera, ses yeux en font la promesse. Et les prunelles se détournent, caressent les lieux environnant une nouvelle fois. La pluie a nettoyé le pavé avant de laisser place à la neige qui peu à peu recouvre de son blanc manteau les derniers vestiges d’une nuit d’orage. Le temps efface tout…

Le poing abritant l’anneau se resserre, l’azur se teinte à l’instar du ciel et la voix du mercenaire s’élève de nouveau calme et détachée :
Je n’ai pas à juger de vos choix ni des raisons de ceux-ci. J’ose seulement espérer que vous tirerez leçon de votre venue. Parfois, il y a plus à perdre que sa propre vie mais je ne vous apprends rien… La tête se tourne, les yeux se posent sur l’épaule meurtrie. Non, le temps n’efface pas certaines blessures…

Le silence un temps reprend ses droits. Armand hésite. La chevalière qu’il tient cachée au creux de sa main pourrait lui rapporter surement beaucoup d’écus, peut-être même cela pourrait lui servir si d’aventure il reprenait ses anciennes activités. Il a passé d’ailleurs de longues heures à étudier cette bague dorée à large chaton gravé d'armoiries, celle de la famille de Vergy surement. Un anneau d’une grande valeur à n’en pas douter. Les yeux d’Armand remontent de l’épaule vers le visage de sa vis-à-vis. Que serait-elle prête à donner pour le récupérer ? L’idée lui trotte dans la tête depuis des jours déjà. Que pourrait-il bien lui demander en échange ? La question le taraude. Il soupire, la cupidité est un vilain défaut sur lequel il à basé sa vie entière mais à présent les enjeux sont différents. Il est devenu traître pour sauver une femme pour qui la mort aurait été une échappatoire trop douce à ses yeux. Elle devait vivre pour voir ce qu’elle avait engendré et il est là à présent, à ses côtés. Traitre il est et pourtant…

La bouche s’entrouvre, les mots s’échappent doucement en volutes de fumée blanche vers un ciel faisant grise mine.
Si vous voulez votre bague, il faut me promettre que le jour où la zoko vous appellera pour une aide vous et vos hommes répondrez à l'appel. Promettez-moi également de ne plus jamais verser la moindre goutte de sang d'un des membres de la zoko ad eternam"

La condition est posée, si la première partie ne vise qu’à tester la rouquine, l’autre est en revanche sincère. Plus de sang versé, plus de duel comme celui qui vient d’avoir lieu. Éliminer une menace pour ses frères d’armes en oubliant un temps sa cupidité. Un rire diffus s'élève en réponse... elle rit doucement la chevalière tandis que son poing valide se serre et Le silence revient, lentement, alors que la neige tombe encore avant qu'elle ne brise la glace :
Je ne peux te promettre la première... encore si c'est pour une raison qui ne va pas contre mes principes... la deuxième elle est hors de question. Cela voudrait dire que si un Zoko m'attaque, je devrais mourir sans lever le petit doigt....

Étrange négociation qui s’engage sur le banc, lui voulant connaitre les limites de cette chevalière autant que protection pour sa compagnie, elle expliquant qu’on ne peut tout remettre en question même pour le plus précieux des objets. Et puis… Je m'engage à ne verser aucune goutte de sang de l'un des membres de la Zoko... c'est la seule promesse que tu auras… accord est finalement trouvé.

La discussion se poursuit pourtant, il veut comprendre cette mélancolie, veut voir la femme qui se cache derrière. Elle tente de lui expliquer, la vie n’est pas en noir et blanc. Et un secret est partagé, le regard du jeune homme change, la dureté tranchante de ses mots s’évanouit :

Comprenez- vous que d’un je veux protéger les miens, de vous, de vos tourments, de vos promesses, de vos devoirs et que je veux également vous faire comprendre que tous ces choix, vous les avez fait de votre propre chef. Relevez la tête cerridween, cette mélancolie ne vous apportera rien. Vous avez fait des choix, difficiles certes, mais quitte à les assumer allez y jusqu'au bout... et ne devenez pas cette femme posée sur un banc à attendre je ne sais quoi que j'ai là, sous les yeux, qui regarde ce qu'elle a perdu plutôt que ce qu'elle a encore.

Je comprends... j'ai fait cela toute ma vie... Armand... je relèverai la tête... mais accorde moi, seulement, le répit que je souhaite avec moi même... la mélancolie est aujourd'hui tout ce que je possède... respecte la,
se contente-t-elle de répondre.

Je la respecte... pour le moment mais pas à jamais. le jeune homme détourne le regard, le pose sur la cour une dernière fois et poursuit : Nous devrions rentrer, il commence à faire froid. Vos amis ne tarderont pas à arriver, il semble qu'ils soient déjà en ville à votre recherche. Vous pouvez rester ici à l'auberge, le temps qu'ils arrivent, votre chambre est payée. Puis il pose le regard sur elle : Faites quelque chose pour moi, n'oubliez pas cette conversation. Je comprends vos raisons d'être venue ici, je comprends votre mélancolie d'avoir tant perdu mais je n'accepte pas qu'elle dirige votre vie, regardez plutôt ce qu'il vous reste encore.

Il se tait un instant, la regarde silencieux, azurs plongés dans un océan émeraude. La neige continuer de tomber, les secondes passent et sans un mot de plus, Armand se détourne et s'éloigne doucement. Bientôt, la cour redevient silencieuse, ne reste plus qu’une chevalière sur un banc et dans la neige à ses côtés, brille un éclat ….
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Mackx
[La Rochelle toujours ... à la recherche d'un ORL (Ordre Royal de la Licorne bien évidemment, pas Otorhinolaryngologiste)]

Le Chevalier se retourna, dans un geste flamboyant ... et en tirant la gueule ! L'instant était épique et les regards grandiloquents, celui, dur et inquiet, d'Ethan contre celui, apparenté à celui d'un veau à qui on vient d'apprendre le sens du mot "implémentation", du Cavalier.
C'est durant ce moment mêlé de vitesse et de lenteur que le blond s'ouvrit au brun quant aux raisons qui le poussaient à être à La Rochelle armé comme un mercenaire des balkans. C'est également à ce moment que toute la lumière se fit dans le cerveau du brun alcoolique et que les pièces éparses du puzzle se mirent en place dans un grand fracas que l'on entendit heureusement pas à l'extérieur du crâne.


Mackx, tu vas aller quérir nos frères et sœurs éparpillés aux quatre coins de cette cité, puis vous viendrez me rejoindre en la taverne.
Pour ma part, je pars immédiatement repérer les lieux et déterminer de la façon dont nous interviendrons.


Quelques six dixièmes de seconde plus tard, le Capitaine licorneux était parti, laissant le rochelais à ses pensées dont la plus importante était : Et comment tu veux que je trouve un nombre indéterminé de licorneux dans cette ville alors que je ne sais pas où ils sont ?

Comme dans chaque situation où sa perplexité l'emportait sur sa raison, le Vicomte ne bougea pas pendant quelques dizaines de secondes, mettant ce temps à profit pour tirer de sa ceinture une gourde de cuir élimé par les ans avant de se verser une rasade du contenu de ladite gourde dans la bouche. Il remit ensuite la gourde à sa place habituelle et laissa sa magique amie qu'était la fine faire son effet sur le cerveau.
La réponse ne tarda pas à venir et elle s'afficha rapidement dans sa tête comme, si pas l'unique, en tout cas, la plus intelligente des solutions qu'il avait trouvé.

Premièrement, il devait sortir sa cape de la besace où il l'avait enfermé ... fini le mode sous marin. Deuxièmement, il devait l'enfiler, ce qu'il fit non sans mal puisqu'un de ses bras, le gauche pour être plus précis, se prit dans un repli de l'étoffe et le fit ressembler durant un instant à un fou placé sous camisole de force.
Troisièmement, il devait maintenant faire le tour des rues de La Rochelle, en visant particulièrement celles dans lesquelles il y avait des tavernes, parce que licorneux et boire pour deux, ça rimait et ça rimait bien.

Mais il fallait faire venir à lui tous les braves licorneux et Aristote savait qu'il n'y avait pas de millions de solutions à part aller sonner les cloches, mais le Vicomte ayant été échaudé par une expérience encore fraiche n'avait pas trop envie de retenter le diable qui sommeillait en chaque curé.
D'une voix forte, il entonna alors un vieux chant qu'il avait appris de la bouche d'une rousse à une époque où elle leur avait donné un cours d'escrime. Ce chant, parlant de la Licorne, ne manquerait pas de faire sortir les licorneux de leurs caches quand bien même ils n'auraient pas été là pour le cours en question.


Ce sont les chevaliers Licorne
De la Bretagne en Anjou!
Bretteurs et têtus sans vergogne,
Ce sont les chevaliers Licorne !
Parlant blason, lambel, bastogne,
Tous plus nobles que des filous,
Ce sont les chevaliers Licorne
Encore et toujours debout

Oeil d'aigle, jambe de cigogne,
Moustache de chat, dents de loups,
Fendant la canaille qui grogne,
Courage en étendard, en proue,
Au moindre soin se renfrognent,
Se fichant des plaies et des trous,
Irritables, butés, sale trogne,
Refusant de se mettre à genoux!


Un premier bruit lui répondit, comme un sploch. Jetant un regard autour de lui, il ne vit rien ...
Saisi d'une impression néfaste, il ôta alors son chapeau et y jeta un coup d'oeil. Ce qu'il craignait était arrivé, une mouette venait de déféquer ardemment vers lui et ledit chapeau en avait pris plein la gueule.

Râlant comme de juste envers ces satanés volatiles inutiles, bruyants et scatophiles, il remit son chapeau et repartit à la chasse à l'ORL tout en répétant le chant des écuyers licorne d'une voix plus soutenue au fur et à mesure qu'il avançait. Pendant le même temps, il priait pour que sa prochaine rencontre possède des pieds et non des ailes ... ça lui éviterait de devoir faire nettoyer sa cape en plus de son chapeau.

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Cerridween
Fatigue...

Fatigue sur les traits, qui souligne les yeux de bleu, rehaussé par la craie du teint qui se fige.
Pendant que la neige tombe un peu plus.
Ses doigts engourdis ramassent l'anneau délaissé. Avec difficulté elle le met dans sa main droite et l'enfile en tremblant à son annuaire gauche, en bagarre. La pointe de l'écu ciselé dans le métal est tourné vers l'intérieur de sa main.
Toujours...
Parce que son cœur est prit depuis Carcassonne. Parce qu'il a été perdu et est ressuscité de ses cendres en faible phénix.

Elle vient de signer son arrêt de mort.

Que n'ai-je fait pour garder ton nom...

Elle vient de signer son arrêt de mort.
Du bout des lèvres et en serment.

Je m'engage à ne verser aucune goutte de sang de l'un des membres de la Zoko... c'est la seule promesse que tu auras…

Si jamais elle était attaquée par l'un d'eux, elle ne pourrait que parer ou dévier les coups. L'attaque lui était impossible. Elle sait a maître d'arme qu'il n'y a bien d'autre manières de tuer sans faire couler le sang. La corde, le poison, le lacet... mais tant qu'elle sera Licorne, jamais elle ne pourra en user.
Il n'a pas comprit. Elle l'a senti. Il n'a pas comprit. Il ne peut pas encore comprendre. Même si elle sait que la souffrance n'attend pas le nombre des années. Elle a bien senti qu'il n'avait pas fait de choix qui font souffrir vraiment. Elle a bien senti qu'il ne pouvait envisager sa vie. Il n'a pas comprit non plus le but de sa... visite. Elle n'en a jamais voulu aux mercenaires. Elle avait un châtiment à poursuivre, une vie à prendre. Que le rouquin eut été Zokoiste ou non, n'y aurait rien changé. Le Colosse s'était mit en travers de son chemin. Le sang avait coulé cette fois, alors que la précédente avait vu leurs deux mains se tenir un instant... Elle a promit. Pour garder ce bout de métal vissé au doigt. Elle y perdra la vie peut-être... sûrement...

La neige tombe et elle reste là...
En caressant doucement la bague qui est à son doigt. Elle se sent moins nue. Mais pas moins seule. Les doigts passent et repassent, comme pour frotter la lampe qui le fera apparaître. Mais il n'y a que le vent qui vient murmurer à son oreille et rien ne vient troubler le blanc immaculé qui s'étoffe devant elle.

Elle n'a pas entendu les pas feutrés, sur le manteau blanc qui orne le sol et qui se sont approchés.
Les sinoples remontent lentement le long du corps qui lui fait face jusqu'aux deux yeux qui la regardent.
Sa bouche s'ouvre de surprise, proche de la grimace tant la cicatrice en déforme la grâce, à en devenir sinistre.
Et elle a mal.
Parce que dans les yeux trop connus et reconnus, de cet homme devenu son double, par la fonction, le poids des charges, la longueur des chemins, elle a lu. Comme un livre ouvert et monstrueux dont les lignes défilent. Elle a vu. Le chagrin et la tristesse. Et... la déception. Son corps se pétrifie pendant qu'elle baisse la tête pour fuir la déraison de son geste que les braises marquait au fer rouge sur ses rétines. Pour fuir l'horreur de son visage qu'il avait découvert et qu'il ne pouvait cacher. Il n'y a pas de mots qui passe sa gorge nouée par l'inquisition de ce regard qui la dévoile, pour fuir ce sentiment qu'elle ne connait que trop, de n'avoir su, de n'avoir pu. Et ce silence qui lui déchire les tympans...

On ne fuit pas Pivoine... Fuir est pire qu'un crime, c'est une faute.

Lorsqu'elle ose relever ses yeux vers son frère d'arme, c'est une main qu'elle trouve tendue. Son bras senestre se détend lentement et attrape les doigts comme s'ils étaient irréels.
Elle se lève, gauchement, difficilement, la main agrippée à la sienne comme une morte de faim.
Les sinoples rivé à son regard, comme une ancre, lui racontant, tout, les comètes qui lui passent une à une au travers de la tête. La douleur. La peur de l'après. La joie aussi immense de le retrouver qui scintille là, au fond. D'avoir enfin un visage ami, après ses jours qu'elle n'a pas pu compter, cette éternité sans soleil, sans eux. Chez les Damnés du Roy, on ne cause pas, monsieur, on ne cause pas... on murmure du bout des yeux.

Elle s'approche, hésitante. Il ne bouge pas. Lentement, elle se serre dans ses bras, faisant fie de son épaule... ça fait mal et ça fait rien. Elle respire lentement cette odeur familière, elle pose sa joue valide contre la sienne. Il peut sentir les larmes qui sont montées. Elles sont mêlées de soulagement et de doutes, de rémission et de peine. Les lèvres tremblent un instant, cherchant quelque chose avant qu'elles ne se tournent vers son oreille et qu'un murmure s'échappe en guise de prière, de confession :


Pardonne moi de ne pas avoir voulu te damner toi aussi...

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Fauconnier
[ Comme un dindon farci, qui se lèverait dans le four pour mieux voler. ]

C'est l'histoire d'un Errant, qui passait à travers les rues en chantant une chanson d'un autre temps et d'un autre lieu. C'est l'histoire de la rencontre du feu et de la glace.

Ignes et Glacies.

Il y avait plusieurs jours qu'il tournait et virevoltait dans les rues de la Rochelle. Des jours que Rufus prenait son énervement perpétuel en pleine figure, alors que son jeune maistre ne parvenait à retrouver son Chevalier. Plusieurs jours que les rues de la Rochelle étaient devenues un terrain de jeu où le jeune Vicomte ne s'amusait plus : il cherchait des réponses. Grand adolescent dégingandé, il donnait alentour l'impression de ces enfants qui, porteurs de trop lourdes charges à un âge trop précoce, ont grandis d'un coup sans en passer par toutes les étapes intermédiaires indispensables. Comme un jeune adulte mal dans sa peau et dans sa tête. Ainsi avançait en déambulant Adrian Fauconnier, Vicomte d'Isles et de Montbarrey, cherchant désespérément la seule femme qui le fasse encore tenir debout. Maigre, grand, il portait les bras longs et fins, comme des ailes de corbeau déplumées et trop grandes. Il avait un nez crochu un peu proéminent, et deux charbons d'une grande taille à la place des yeux, qui scrutaient avec fixité le monde qui l'entourait en cherchant à percer les secrets des hommes et des sols. Des cheveux qui lui arrivaient au cou, maigres et vite rendus gras par les surplus hormonaux qui caractérisent l'adolescence. Il avait maintenant perdu la majorité de l'acné juvénile qui peuvent manger le visage des adolescents ; mais possédait encore cette sensation d'échassier marionnettiste qui fait que les adolescents vous paraissent toujours comme des éléphants dans un magasin de porcelaine ; ou l'inverse, selon les adolescents. Il avançait avec des habits convenables, des bottes maculées de boue et la sueur au front.

Son lien avec Cerridween de Vergy avait oscillé au fil du temps entre des extrêmes quasi-incompatibles. Débuté par la haine, il avait pris dans sa colère pour son père une bonne part qu'il lui avait expédiée à la figure, comme pour la punir d'avoir remplacé son géniteur dans un rôle que le jeune garçon aurait voulu faire tenir à cet homme qu'il avait peu connu, et qui était mort trop tôt. Il avait ensuite été nourri de la décrépitude de l'oncle, de la démence maternelle, pour ne plus être qu'un lien qu'Adrian avait voulu distant, mais qui était d'une force pour lui qu'il ne concevait pas consciemment. Une force qui s'était dégagée lors de la découverte de sa disparition à Limoges. Un mélange ténu d'admiration, de gratitude, et d'amour quasi-filial, qui faisait de son Chevalier la personne à laquelle il tenait à l'heure actuelle le plus au monde.
Il avait quitté Limoges un jour plus tard que le groupe des Licornes, envoyant Rufus dans les bas-fonds pour récolter les informations possibles, et préparer le voyage pour La Rochelle. Ils étaient partis le lendemain, à deux, voyageant à bride abattue au galop le plus pur, parcourant les lieux et les campagnes en quête de celle dont l'absence lui déchirait maintenant le coeur, maintenant que cette absence s'était teintée de la culpabilité de l'avoir laissée partir seule. Dormant dans des auberges où il avait systématiquement pris la chambre la plus confortable, ils avaient ralliés La Rochelle en quelques jours.
Ils avaient cherchés les autres Licornes, sans les retrouver ; elles avaient probablement été discrètes. Et, installés dans une auberge à proximité de la place Monseigneur Childebert, face à l'église saint Benoit, il avait réfléchi à comment retrouver Cerridween de Vergy, et surtout, à comment elle aurait pu faire cela.

Bande sonore

Il est parfois étrange que de constater comment un simple évènement peut nous faire basculer dans l'âge adulte plus rapidement que nous ne le demandons. Chez Adrian, ils avaient été nombreux, comme si le destin s'était ingénié à le rendre plus indépendant, plus adulte, pour que l'enfant le reste le moins possible. Il y avait eu la mort de son père ; la disparition de son beau-père ; la démence de sa mère ; l'incurie de son oncle. Et tous ces éléments réunis avaient réussis à façonner un jeune homme qui se protégeait du monde en se donnant une image de supériorité feinte, de celles qui ne tiennent pas la route mais sont nécessaires à la survie ; comme ces personnes qui se répètent "sois fort", alors qu'elles ne le sont que peu ou prou. Et l'absence du Chevalier de Vergy avait renforcé cela, sous un aspect complètement différent : celui de chercher à faire comme elle ; à presque devenir elle. Sentiment qui l'avait empli de plus d'affection encore envers celle qui l'avait éduqué en chevalerie.

Et c'était alors, plusieurs jours après son arrivée mouvementée à La Rochelle, et les quelques évènements mouvementés qui la suivirent(1), que Adrian Fauconnier, alors qu'il déambulait au beau milieu des échoppes et des badauds du marché, entendit ce simple chant qui lui redonnât espoir, et foi.


- " Ce sont les chevaliers Licorne
Encore et toujours debout ... "


Un beau matin, alors que l'heure du déjeuner approchait, Adrian Fauconnier retrouva l'espoir, et la trace de l'une des seules personnes au monde qui comptaient peut être encore pour lui. Et, se dirigeant vers l'origine du chant, il tombât fort logiquement sur... Maxime d'Alesmes, Vicomte chantonnant gaiement dans les rues de La Rochelle un chant de chevaliers, de frères d'armes, qui y avait autant de place qu'un requiem dans un bordel.
Voyant flotter derrière Mackx la cape bleutée des Licornes, le jeune garçon sourit, d'un sourire qui n'échappa pas à son vieil acolyte, Rufus ; un sourire qui marquait une brèche dans les défenses du jeune garçon ; un sourire qui trahissait le bonheur sourdant de lui, qui battait à l'air libre à l'idée de, peut-être, parvenir au terme de ce qu'il cherchait.

Le monde est parfois ainsi, que l'on recherche parfois longuement ce qui a le plus de valeur et d'importance pour nous.


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(1) : Evenements racontés plus en détails dans la suite de ce RP.
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