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[RP] Si Margot m'était contée.

Jehanne_elissa
[Quelques jours avant]


C’était à vrai dire une scène devenue bien commune. Un véhicule aux portes frappées des armes Volpilhat et aux rideaux tendus de rouge masquant à peine la compagnie de l’habitacle traversait la grande place encombrée de Montpelhier pour se rendre au château Comtal. La petite équipée, composée de Martha, une dame suivante et la jeune Vicomtesse venait de Mende et s’apprêtait vers midi à s’arrêter manger avant de travailler au nouvel aménagement du bureau du Secrétaire d’Etat sis au cœur château, épicentre du pouvoir Languedocien et accessoirement de prises de bec remarquables. Ce jour, comme tant d’autres, la place était tellement encombrée que le véhicule s’obstinait à rester à l’arrêt au grand dam du cochet mais certainement pas de la petite rousse qui, en parfaite adéquation avec les prédisposition que la Nature lui a données avait trouvé un nouveau jeu pour passer le temps : elle dessinait sur un velin des visages de proches et tentait de les faire deviner à la suivante bien plus jouasse que Martha. Ainsi on voyait sous des traits caricaturaux un Actarius sublimé, un Cristol isolé, une Tante Pol bien en formes, un homme à tête de loup représentant collégialement les mâles Bourguignons, une dame trop apprêtée effigie des françaises dont lui avait si bien appris à moquer… Et a la fin de chaque esquisse s’était le rire pétillant de la jeune fille que l’on entendait par delà les rideaux. Mais quant elle eu fini de dessiner toutes ces figures, elle passa la tête par les fenêtres et demanda au cochet ce qui les retenait : elle avait faim, on ne brime pas la faim d’une enfant qui n’a jamais connu manque.

- « Un enfant qui pleure dans les j'pons d'sa mère! »

Froncement de sourcil et la petite Vicomtesse s’affale, presque avec colère contre le dossier du fauteuil. Les dames connaissent cette expression qui met fin à toute tentative de jeu : la petite Vicomtesse est contrariée. Les bras viennent se croiser sous la poitrine. Non elle ne sortira pas c’est encore une quelconque affaire de justice à laquelle elle ne veut pas se mêler et s’il avait été question de la mort d’un troupeau de moutons pour impayés au Comté elle ne s’en serait pas mêlée non plus mais par contre, elle ne s’en serait sûrement pas autant contrariée. Il est, même chez les enfants de nature joyeuse comme elle des sujets sensibles qui ne souffrent aucune explication.

Quelques heures plus tard, la jeune Vicomtesse avait refusé son repas et travaillé, sourcils froncés et muée dans un silence de plomb à trier les dossiers du Secrétariat d’Etat. En une phrase sur le sujet maternel le climat était passé de frivole à morose. Changement climatique bien trop commun ces temps-cis.



[Quelques jours plus tard]


La nuit avait enveloppé les terres du Languedoc de son manteau de ténèbres et sa parure de froid. A Mende, dans l’hôtel de la famille d’Alanha le calme régnait enfin. Les bruits de pas enfantins s’étaient tus, les rires étaient devenus des murmures et les représailles des contes aidant à faire venir le sommeil. Le Comte était à Paris, Eirwen était partie border les jumelles, Aimelina bien jeune dormait déjà d’un sommeil sans rêves, Lop Guilhem n’était pas encore parmi eux. Mais dans une autre pièce de la maison, dans la grande salle ou l’on mange deux personnes veillaient encore, toutes deux profitant d’un calme salutaire et de la douceur des sentiments réchauffant tout aussi bien les cœurs que le feu crépitant dans l’âtre réchauffait les corps. La Comtesse d’Alanha était assise face au feu, sempiternellement vêtue de blanc et caressait d’une main calme une chevelure rousse. Cette même chevelure rousse appartenait à une tête lovée contre les genoux de la Comtesse et elle même à un petit corps assis sur un tapis de damas à même le sol.

C’était un de ces rares moments de calme et de tendresse dont la jeune Vicomtesse, aux alentours de sa dixième année aimait tant profiter. Elle avait pris la suite d’Actarius par souhait mais en réalité en dehors du temps quelle consacrait au Secrétariat elle n’était qu’une enfant, une enfant rieuse et en quête quasi constante de douceur, d’amour et de quiétude. De toute sa vie elle n’avait été que choyée, maternée, aimée et protégée, elle avait toujours eu ce quelle désirait et bénéficiait d’une éducation plus que parfaite et exigeante : trivium et quadrivium ne lui avaient pas été épargnés. Jamais la jeune héritière Goupil n’avait manqué de quoi que se soit et ce malgré l’absence de parents et ça, elle le devait tout entier à celle quelle appelait sa Tante Pol dont elle était la bien trop aimée pupille. Plus le temps passait, plus Jehanne devenait possessive et demandeuse d’instants pareils, ces bulles temporelles, éphémères et additives, ou elle avait sa Tante juste pour elle, sans ses « frères et sœurs », justes elles deux et le lien tendre qui les unissait. Rien de plus. Mais plus le temps passait plus elle se rendait compte de substituer ce lien du coeur à un lien du sang, un lien d’un être sortant des entrailles d’un autre, un lien de mère et de fille. Quelle n’aurait jamais.

Les yeux verts se lèvent vers le visage marqué de sa Tante. Oh oui elle l’aimait. Mais contrairement à ce quelle s’était toujours évertuée à ressentir elle n’était pas sa mère. Elle était un être tendre et aimant l’ayant éduquée comme sa fille, mais elle n’était pas sa mère. Mais elle n’était pas sa mère. Mais elle n’était pas sa mère… Marguerite de Volpilhat, mariée à Louis-Raphaël d’Appérault elle l’a connait comme on bien voulu la conter au fil des discussions ou telle qu’elle l’a vue sur des portraits. Un être pur, pieux, bon, beau, presque évanescent et inspirant un respect et une déférence sans bornes. Aussi un être torturé, souffrant d’un mal peu commun. Et quelqu’un de jeune qui s’était vu enlever la vie bien tôt alors quelle venait de mettre au monde son second enfant. La personne elle pensait la cerner même s’il est très réducteur de penser comprendre un être aux dires des gens, la psychologie n’étant pas une de ces sciences d’affabulateurs et charlatanas mais, comme nous l’avons déjà dit, envers et contre tout elle l’adulait. Une idole pour un jeune pèlerin ; elle l’adorait comme on adore les images des disparus, comme l’on adore les représentations sculptées ou peintes de saints. Mais quelle mère aurait-elle été ? Aurait-elle eu avec l’adorée Marguerite de Volpilhat une relation aussi tendre qu’avec la Comtesse d’Alanha ? Cette personne inspirant le respect qu’on lui avait peinte était-elle une mère dans le sens plein du terme, aimant sans bornes ? Aurait-elle était dure ?

Elle soupire, la jeune Vicomtesse, et laisse à nouveau son regard se perdre dans l’âtre. Cette jeune fille avait un conte, un conte préférée quelle demandait très souvent à sa Tante. Si les autres enfants aimaient entendre de belles histoires de chevalier et de princesse, de troubadour et de Comtesse, de fées et d’ogres elle les aimait aussi ces histoires chimériques et naïves si douces au coeur mais préférait par-dessus tout une autre, plus spéciale, plus propre à elle, plus sentimentale. A chaque fois elle la demandait à chaque fois elle ajoutait une question. Un peu redondant ? Non car la pire crainte de ceux qui ont perdu est d’effacer le souvenir de ces êtres regrettés. Et quand on adore un être que l’on n’a jamais vu vivre, il est bien nécessaire de posséder des images, histoires et anecdotes pour lui donner vie dans l’intimité de son imaginaire. Alors pour la énième fois, sur le ton du murmure la jeune Goupil quémande…


- « Tante Pol, parle-moi de mère… »
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Polstephie
Cela leur arrivait parfois, mais trop peu souvent au goût de la Comtesse. Surtout parce que cela lui permettait d'oublier la solitude dans laquelle elle était enfermée depuis des mois maintenant. Ainsi, elle se retrouvait, caressant le cuivre des cheveux d'une enfant qu'elle aimait terriblement fort, alors que le feu jetait sur elles un jeu d'ombres qui leur apportait de la chaleur.

- « Tante Pol, parle-moi de mère… »

Et la Tante Pol alors de sourire. Beaucoup moins douloureusement que la première fois que la petite le lui avait demandé. Le temps avait passé. Et le fait d'évoquer son Âme-Mie permettait à la Comtesse du Gevaudan de "vivre mieux" la Disparition trop soudaine qui les avait privées de la Fleur d'Òc.


Ta Mère mon enfant...

Et un soupir mêlé de joie et de tristesse se fait alors entendre alors qu'elle se lance dans le conte.

Ta Mère ma Douce, était la plus grande Dame du Languedoc alors même qu'elle n'était qu'une enfant. Un visage doux et aimant. De longues boucles rousses lui cascadaient dans le dos, de la même couleur que tes cheveux mon Ange... Et elle avait des yeux verts magnifique. De vraies émeraudes parmi les plus pures. Celles que je t'ai montrées et dont tu héritera un jour ne sont rien à côté des yeux qu'avait ta mère.

Elle était aimante ma Margot, ma "Petite Baronne" comme je l'appelais souvent. Parce qu'elle n'était "que" Baronne quand nous nous sommes connues.

C'était une jeune fille merveilleuse qui savait se vêtir pour faire ressortir la couleur de ses yeux, ou pour rehausser l'éclat de ses cheveux. Alors que pourtant elle portait souvent du blanc.


Léger soupir de nouveau alors que la main qui ne caresse pas les doux cheveux de l'enfant vient lisser la robe blanche que porte la Comtesse. Ce blanc qu'elle avait demandé à Margot de ne plus porter, voilà maintenant près de 10 ans qu'elle-même l'arborait. Avisant un tableau représentant des fleurs, l'esprit de la Comtesse revint au conte et elle poursuivit.

Je me rappelle encore notre première rencontre, dans les jardins du Château de Montpellier. Je n'étais pas encore mariée.

Je me trouvais dans la Roseraie, à me promener et à observer les merveilles que nous devions à Vanyel. Elle s'était en effet chargé, dans le plus grand secret, de faire ouvrir les jardins au Public... Enfin bref... J'étais donc dans la Roseraie quand je l'ai vue pour la première fois.

Elle était si jolie ta Maman ! Mais elle était aussi si sérieuse dans sa petite robe blanche. Je n'ai alors pas eu le cœur de la laisser seule et nous avons lié connaissance. Je ne saurai t'expliquer par quel hasard, mais j'ai su en cet instant que mon destin était lié au sien. Ce fut la première fois que je l'ai prise dans mes bras. Elle, si frêle, si jeune, si douce et si perdue ! Elle se posait tant de questions devant les obstacles que la Vie et le Très-Haut mettaient sur son chemin. Et c'est dans cette roseraie qu'elle m'a offert le premier de ses sourires depuis des mois je crois. Un sourire sincère qui m'a ravi le cœur et qui a achevé de me persuader que nous étions liées.

Et depuis ce jour nous sommes restées Amies. Bien plus que Sœurs bien que ne l'étant pas. Bien plus liées qu'une mère et sa fille. Je ne crois pas qu'il y ait eu un seul autre mot que l'Amour pour définir la relation que nous avions. Car oui mon cher Ange. Ta Maman, je l'Aimais très fort. Et je crois, non, je sais, qu'elle m'appréciait aussi beaucoup.


Et la main qui caressait les cheveux de venir poser une caresse sur la joue de la petite fille qui ressemblait tant à sa maman.

Le temps a passé alors et nous avons appris à nous connaître. Grâce au Conseil Comtal où nous étions toutes deux. Elle en avait du courage ta Maman ! Elle ne savait pas refuser et faisait tout pour aider son Languedoc. Elle a ainsi été nommé juge par le Coms LeGueux alors qu'elle était très jeune.

Alors qu'elle prononçait le nom de son Époux, le cœur de la Comtesse se serre. Où était-il passé ce temps heureux où finalement les seuls soucis qu'elle avait n'étaient rien en comparaison de ce qu'elle vivait actuellement ?

Des mois qu'ils ne se voyaient plus. Depuis la Mort de Marguerite il avait changé. Leur fils était né. Elle avait cru qu'il en était fier, mais elle ne savait plus au jour d'aujourd'hui, si elle l'avait vécu ou rêvé. Peu de temps après, le Roy d'Armes les séparait, "pour le bien du petit". Il l'avait envoyé en Périgord-Angoumois, auprès de l'un de ses Hérauts. Et elle... elle, elle était partie en Touraine subitement. Pour cacher sa détresse, sa douleur et d'autres choses encore. Elle en était revenu avec sa douce Aimelina, si petite, si frêle, tout juste née. Cette enfant à qui il manquait des doigts et qu'elle aimait en mère qu'elle était. Cristòl avait ensuite reconnu sa fille et en avait confié la garde à Paula. Elle avait cru un temps que cela lui ferait oublier la douleur. Mais non. Et même si avoir les enfants auprès d'elle était un bonheur, Paula continuait de saigner de l'absence de son fils auprès d'elle, et d'autres problèmes encore qu'elle avait et dont elle ne s'ouvrait à personne.

Et puis il était parti en Croisade sans un mot, sans une lettre, profitant d'un de ses voyages pour rejoindre leur filleul et s'enfuir loin d'elle. Et elle n'avait reçu aucune lettre de sa part depuis. Lengadòc en avait reçues. Mais elle, l'Épouse, non. Aucune nouvelle. Et c'est en prenant conscience, lors de l'un de ses voyages à Paris, que son Époux avait disparu corps et âme au profit de
Montjoie qu'elle avait compris que jamais plus rien ne serait comme avant, et que si elle l'Aimait toujours, quelque chose était toutefois brisé de façon irrémédiable.


Le silence marquant la pause dans le récit était donc un peu plus long que d'habitude. Et elle était encore perdue dans ses pensées moroses, perdue dans ses sentiments, alors même que sa main ne cessait d'étreindre la chaleur du cuivre d'une Volpilhat.

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Jehanne_elissa
Et bercée par les paroles de sa Tante Pol aux mirettes vertes de la petite Vicomtesse de se fermer… Non pas pour dormir, non, diable, serait-il possible de dormir lorsqu’on lui conte sa mère ? Non, juste pour imaginer. Comme si elle y était, spectateur fantomatique fascinée, elle voyait sa mère et la Comtesse d’Alanha évoluer tantôt dans les jardins du château de Montpelhièr, tantôt dans des pièces richement meublées, et d’autres dans les plaines du Vaunage. Parfois même un sourire étirait la commissure de ses lèvres pour laisser voir les dents enfantines séparées. Sa mère était –forcément- belle et environ de l’âge de Catalina, sa mère était –forcément- douce, sa mère avait –forcément- le beau et juste parlé… Sa mère était forcément idéalisée. Elle écoute, se visualise sa mère au conseil Comtal avec son « oncle » LeGueux qui il faut le dire lui inspire plus la crainte que la tendresse au vu de sa taille et de son manteau de Pair. Elle voit sa mère et sa Tante parler au coin d’un feu, elle voit des lapins joyeux sautiller autour d’elle puis Marguerite chasser un vilain loup d’un seul geste de la main… Sa mère, son Idole.

Tellement absorbée dans ces tableaux idylliques quelle aime tant dessiner grâce aux pinceaux ô combien légers de son imagination, la petite Volpilhat ne se rend pas compte immédiatement que la Comtesse s’est murée dans le silence. Alors les yeux s’ouvrent et se lèvent sur le visage marqué de celle qui l’a élevée. Les sourcils viennent se froncer rompant et chassant la douceur des traits arrivés par l’onirique. Non, elle ne se demande pas pourquoi tante Pol semble si triste. Dans son esprit d’enfant la réponse est toute faite : son époux son Prince Charmant à elle lui manque tout simplement. Il n’y a rien de plus. Et pour une fois alors que d’habitude elle se contente de le taire pour ne pas se mêler des histoires d’amour –elle en a déjà bien assez à aimer son héros Parain qui aime tant aller se battre contre les méchants pour sauver les gentils et à aimer tout simplement chaque personne qui lui donne un sourire– elle est bien décidée à donner sa petite solution à Tante Pol. Que dis-je, sa Grande solution! La silhouette rousse se redresse et s’empare d’une main de la Comtesse.


- « Tante Pol, je sais que le Coms te manque, mais comme Actarius il va défendre le Royaume de tous les loups. Mais vu que je n’aime pas te voir ainsi et bien je vais lui écrire, à ton prince charmant, et lui dire de revenir.

Petite frimousse déterminée, mirettes vertes plantées gravement dans celles de sa Tante et elle reprend sa position, tête contre les genoux. Ah comme il est simple d’être une enfant, de penser que l’amour sauve tout, d’ignorer toutes les embûches que la vie met sur nos chemins, d’ignorer toutes les vicissitudes de la relation entre époux et femme, de ne rien savoir du sentiment d’être délaissée car on a toujours vécu dans un nid de tendresse et d’amour inconsidéré… Car oui, et attention ne riez pas, la petite Vicomtesse pense que sa lettre ferra revenir le Coms et qu’ensuite elle ferra revenir le sourire sur le visage de la Comtesse. Et oui ! Franchement, pourquoi les gens s’embêtent-ils à se battre, hein ?

Comme rassurée d’avoir en tête la solution qui va révolutionner la face du monde, comme si elle avait découvert le vaccin contre la stupidité ou mieux encore contre l’absence de paroles chez les lapins, elle ferme à nouveau les yeux, satisfaite. Elle se love un peu plus profitant dans le silence de la chaleur de l’âtre sur ses jambes et la lueur des flammes faisant danser une cascade de cheveux roux face à ses yeux fermés. Sa mère… Encore. Cette fois-ci de bleu vêtu comme elle si souvent, de ce bleu de Cocagne si beau et si profond qui d’un regard fait baisser les épées d’une armée d’hommes poilus, sales et barbus… Stop. Yeux qui s’ouvrent à nouveau. Tante Pol ne venait-elle pas de dire que… ?


- « Tante Pol, pourquoi ma mère portait-elle du blanc ? Pourquoi était-elle si souvent en deuil ? Et pourquoi se posait-elle des questions ?

Dans un mouvement vif elle se relève, et debout sur ses deux petits pieds, sourcils et nez froncés elle plante son regard dans celui de sa Tante.

- « Ma mère était-elle heureuse ? »
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Polstephie
- « Tante Pol, je sais que le Coms te manque, mais comme Actarius il va défendre le Royaume de tous les loups. Mais vu que je n’aime pas te voir ainsi et bien je vais lui écrire, à ton prince charmant, et lui dire de revenir.

Sourire léger mais cœur lourd à ces mots qui blessent finalement plus qu'ils ne réconfortent. Tellement de temps sans qu'il n'ait écrit un seul mot, sans aucune explication. Rien. Elle l'avait perdu et se perdait de le perdre. Mais il ne fallait pas se laisser gagner par la mélancolie, elle le devait à ses enfants.

- « Tante Pol, pourquoi ma mère portait-elle du blanc ? Pourquoi était-elle si souvent en deuil ? Et pourquoi se posait-elle des questions ?

Elle allait répondre à cette question quand la petite renarde se leva, et, plantant ses yeux dans ceux de Paula, lui posa "LA" question.

- « Ma mère était-elle heureuse ? »

Paula soupira, elle laissa ses Ambre dans l'Émeraude de l'Enfant et répondit.


Ta Mère l'a été parfois oui. Pas toujours. Mais elle l'a été. Et j'aime à penser que, parfois, j'y étais aussi un peu pour quelque chose.

Tu sais, même si elle s'épuisait et s'étourdissait dans le travail, ta Maman était heureuse de rendre service à Son Comté. Elle en était la Fleur ma petite Jehanne Elissa. C'est pour cela qu'elle était surnommée La Fleur d'Òc. Partout où elle passait, elle laissait dans l'air quelque chose de léger malgré le fardeau qu'elle portait elle-même. Elle savait vous réchauffer le cœur d'un regard, d'un sourire, d'un seul mot...

Pour répondre à tes questions mon Enfant, ta Maman portait le blanc du deuil parce qu'elle a été éprouvée par la Vie. Le Très Haut lui a envoyé énormément d'épreuves. La mort de sa Maman, ta Grand-Mère dont tu portes en partie le prénom, Elissa, retrouvée inanimée sans qu'on ait jamais su réellement ce qui c'était passé. La mort de l'un de ses amis chers, Apolon Haroué de Liercourt, peu de temps après. Le désintérêt de son père, ton Grand-Père, pour elle-même.

Croyante comme elle l'était, elle essayait de trouver réponse aux questions qu'elle se posait. Questions motivées entre autre par la Foi. Tu sais, ta Maman a été diaconesse. Elle a même failli nous marier ton Oncle et moi. Un mariage organisé en secret alors qu'il était le Coms du Languedoc et que je n'étais rien. Mais... j'ai reculé une fois devant l'Autel. Je ne voulais pas qu'il sacrifie ce qu'il avait mérité, ce qu'il aimait, ce que je trouvais juste qu'il ait obtenu. J'ai donc dit non. Et ta Maman a compris mon geste.

Elle a même proposé de m'ennoblir. Je sais désormais que ce n'était pas pour me permettre de me marier, et finalement je le savais déjà à l'époque, au fond de mon cœur. Mais j'ai refusé. J'ai refusé son offre parce que je ne voulais pas que l'on dise que je profitais de mes Amis pour acquérir un rang que je ne méritais pas. Comme je regrette d'avoir refusé. Cela aurait été un honneur que d'être Sa Vassale. Je crois que c'est le pire affront que j'ai pu lui faire. Mais malgré cela, malgré tout, elle a continué de me guider et d'être présente à mes côtés.

Ta Maman était merveilleuse. Vraiment. Il est dommage que la Vie l'ait tant marquée. Que ton Grand-Père ait abusé de sa position pour lui faire renoncer aux prétentions qu'elle aurait pu, qu'elle aurait du avoir, en lui faisant épouser ce vaurien...


Elle porta la main à sa bouche, surprise de s'être laissée aller devant la petite. Parler ainsi de son père... Elle ne devrait sans doute pas. Mais il est des vérités qui doivent être dites.

Pardonne-moi ma Petite... Je ne devrais pas parler ainsi de ton Père. Mais il a tellement commis d'erreurs avec Margot... Et puis, après tout, c'est sa faute si elle est morte ! Encore heureux qu'il a disparu depuis tout ce temps...

Et de caresser la petite joue alors qu'une larme venait brouiller la vue de la Comtesse.
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Jehanne_elissa
Et elle était là son petit corps fin figé devant le regard de sa Tante avec une expression proche du défi. Défi de quoi ? Un défi que de son petit âge elle semble aussi bien lancer au passé qu’à l’avenir. Au passé de trop la décevoir car elle ne se doute que trop bien des réponses et à l’avenir de tenter de l’amocher à son tour. Car cette vie de sa mère, même si c’est la première fois quelle pose la question elle n’en a que trop idée pour avoir entendu ça et là des bruits de couloirs qu’elle préférait accorder aux mythes que l’on colle aux grandes familles. Mais le mythe est ce qu’il est, n’oublions pas que parfois on y trouve un brin de vérité. Oui, le malheur est souvent l’ombre d’un grand nom. Car porter un grand nom est porter un grand devoir et le devoir ne s’accorde pas toujours avec le bonheur. Tout ça, elle en était innocemment consciente. On ne lui avait pas appris comme on lui apprend la musique ou le latin, c’était en elle, voila tout. Etait-ce la noblesse ? Non la noblesse est une attitude, une façon d’être, un cœur. Là, ce n’était que prédisposition.

Alors elle écoute, silencieuse, le récit de sa Tante. Elle écoute, silencieuse, le récit de sa mère. Des deuils, toujours des deuils, encore des deuils. Du travail comme elle le faisait pour le Secrétariat d’Etat et une dévotion dont elle avait hérité. Quoi de plus que des palliatifs et la recherche de l’oubli ? Durant les explications, toujours droite le défi a quitté ses expression pour laisser voir un aperçut du néant sur sa petite bouille. Pourquoi le néant ? Car elle ne sait qu’en penser, elle ne sait qu’en faire. Apprendre de la vie de sa mère ? Surement oui elle le ferrait. Pleurer de la vie de sa mère ? La plaindre oui mais ne certainement pas pleurer le passé qu’elle n’a pas vécu ; quoi de mieux pour mettre une entrave à son caractère joyeux qu’elle a juré à Actarius de garder ? Admirer la vie de sa mère ? Pour sûr. On ne nait pas fille de la Fleur d’Oc si c’est pour la renier et ça, ça, jamais elle ne le ferrait.

Mais c’était sans compter sur la fin de la tirade de sa tante qui menait sur le tapis aigre doux des confidences un sujet ô combien nébuleux pour notre Goupil en herbe : son père, ce grand inconnu. Il était rare, très rare que Louis Raphaël soit évoqué et lorsqu’il l’était ce n’était que de manière décidément négative. Elle l’entendait meurtrier de sa mère, français et même Appérault le patronyme de cet homme était dorénavant proche de l’insulte suprême chez Jehanne Elissa. Et maintenant vaurien. Elle ne peut s’empêcher de sourire en s’asseyant en tailleur face à sa Tante. C’était bien la première fois qu’elle l’entendait injurier.


- « Ce n’est pas grave…

Elle s’arrête. Que dire ensuite ? Il est le meurtrier de ma mère ; l’était-il vraiment ? Il est disparu il ne t’entendra pas ; depuis quand l’était-il ? Il était méchant ; là aussi, l’était-il vraiment ? Non, ne rien dire de plus. Et ça la gêne. Le silence se pose lentement dans la pièce et la jeune Vicomtesse, les flammes du feu lui réchauffant le dos est comme un apprenti équilibriste qui se demande si tomer serait un acte de lâcheté salvateur ou si aller au bout du fil serait plus risqué mais au moins bien tenté. Etait-ce le jour de demander à sa Tante des choses sur son père ? A vrai dire elle se posait plus souvent sur sa mère que sur son géniteur. Ayant grandit avec cette image maternelle d’idole et cette image paternelle inexistante il était plus normal que ses rêves et ses quêtes la mènent plus vers la première personne. Mais pourtant elle était le fruit de deux êtres et si elle tenait de sa Mère elle devait aussi avoir des traits de son père, aussi impossible et honteux que soit le fait de tenir d’un de ces français d’Appérault –insulte suprême !. Lentement, elle attrape une main de sa Tante et la serre dans les siennes. Elle voit le regard se brouiller, elle voit la peine mais elle sent les questions. Prendre le risque de remuer le couteau dans la plaie ? Ou se taire et ne jamais savoir ? La pression de ses dix petits doigts se serre sur la main Comtale.

- « Tante Pol, je sais que tu n’aimes pas aborder le sujet mais… Mon père. Pourquoi dit tu que ma mère est morte à cause de lui ? Qui est-il ? Qu’a-t-il fait ? Et pourquoi Grand-Père lui a donné cet époux au détriment des prétentions dont tu as parlé ? »

Sous la tignasse rousse c’est l’effervescence : vite, vite, préparer un sujet plus léger au cas ou elle essuierait un refus catégorique. Vite, vite, préparer une question plus douce pour amortir de chagrin de Tante Pol… Et continuer à pouvoir manger des nougats.
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