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Info:
Castel de Couesmes en Anjou, séjour de la Comtesse de Ségur chez son ami le Vicomte de Brissac.

[RP]La Chieuse est dans la place.

La Balafre
Cataclop. Cataclop. Cataclop.

L'équipée avance au trot, remontant du Nord au Sud, vers le village de Couesmes et la Forteresse qui se profile derrière celui-ci, majestueuse et dominante, aussi inattendue dans ce paysage d'apparence tranquille qu'inaccessible, posée qu'elle est par dessus un ravin vertigineux, dessus un roc inébranlable.
Inébranlable, comme la Noblesse des familles angevines, comme la Noblesse de sa lignée et des gens de sa race. C'est le sentiment qu'inspire sa place forte à Tithieu, le Balafré.
Un sourire vient déformer les traits tortueux du visage aliéné du Vicomte, qui avance au petit trot devers son village et devers sa Forteresse qui le surplombe, à ceste pensée. Un bien-estre malsain, sensation étrange, l'envahit alors qu'il contemple les hauts remparts de son Castel. Plénitude seigneurale, matérialisme stigmate de son temps de décadence indécente.
La toute-puissance de ce Castel de paille suffit à flatter son égo, et à faire son bien-estre. Ivresse illusoire, aussi éphémère que les pierres qui finissent, indubitablement, par s'effondrer. Ivresse illusoire, pareille à celle d'un vieux libertin qui, pour son plaisir, n'a plus qu'à contempler les jeux de l'amour sans plus pouvoir y prendre part.
Mort le jeune Duc qui voulait conquérir le monde. Le Vicomte se contente de se savoir craint et haï par ses contemporains et ses ennemis les plus proches, cela suffit à son sommeil. Celuy-ci, d'ailleurs, n'est plus peuplé de rêves de grandeur, juste de cauchemars de déchéance.

Cataclop. Cataclop. Cataclop.


"La chasse fut bonne, Monseigneur ?"

Point ne compte la chasse, mon brave. Ta récolte est importante, ma chasse est accessoire.


Mots échangés à la volée avec l'un de ses gens de ferme qui travaillent la terre et récoltent le blé pour emplir ses greniers, alors que la petite équipée qui accompagne le Balafré au retour de la chasse traverse le village. L'autre semble surpris. Pour une fois, le Vicomte n'est ni d'humeur méchante, ni d'humeur bravache. Il ne faict que passer, drapé en hault de son cheval dans un lourd manteau et dans sa neuve bienveillance pour ceste terre qui luy a tant manqué. La bonté luy sied fort bien au teint.

Cataclop. Cataclop. Cataclop.

Les chiens devant, en meute d'une dizaine d'épagneuls racés et repus de course et de viande fraiche, renversent sur leur passage quelques étales. La meute désorganisée et prise de frénésie écarte devant les cavaliers fourbus un large passage : les chiens du Vicomte ont toujours esté craints par les gens du Seigneur. Pourtant, ni eux ni leur maistre ne se nourrissent d'hommes ou d'enfants. Juste de femmes, parfois, pour le Balafré. Mais au jeu du "je te chasse, je te mange", s'il est souvent vainqueur, il est aussi trop souvent victime. Victime de sa propre gourmandise, et mesme parfois de son amour immodéré pour les femmes, et pour l'Amour en général : à trop vouloir estre aimer, on finit soi-mesme par tomber en amour de plusieurs proies, d'un amour passionnel, de ceux qui dévorent les vicères sans permettre de salut.
Et comme tout bon chasseur le sait, courrir deux biches est une course vaine : bien souvent, le friand chasseur revint seul de ses expéditions libertines, terrant sa solitude en son krak imprenable.
Les pierres pour seules compagnes loyales, constantes. Il pourra faire toutes les infidélités du monde à sa Forteresse, jamais ses puissants remparts ne l'abandonneront... Est-ce cela, son matérialisme ? La résultante d'un dépit amoureux, comme un jeune fils de Baron revêt la Robe après avoir esté éconduit ?

Cataclop. Cataclop. Cataclop.

Au sortir du village, la petite troupe menée par le Vicomte Penthièvrique bifurque à dextre, empruntant le sentier en pente raide qui mène à l'entrée du Castel, fasce au Sud et à la route de Chasteau-en-Anjou.
Dépasser le moulin et le meunier qui y travaille à son entretien. Longer la vigne, en friche hivernale, toute à son exposition Nord-Ouest. Puis le rempart de bois, premier barrage pour qui voudrait s'emparer de "Couesmes".
Et enfin, la Poterne, et ses factionnaires endoloris par le froid de l'hiver aussi rude qu'un corps à corps en plaine.
La herse relevée laisse filtrer sans mal la caravane au retour de chasse. Et le bruit des sabots martelant le planché du pont-levi qui sépare la prime Poterne à la Grande Poterne succède à celuy de la neige craquant dessous le trot des destriers et palefrois qui ont pris part à l'expédition du Seigneur de la Forteresse.


Le gibier aux cuisines, il y aura du broquart et du sanglier à ma table ce soir !

Les hommes du Balafré ont pénétré en la basse-cour, où il règne une fébrile agitation, les tâches quotidiennes étant rendues plus ardues et pénibles encore qu'à l'accoutumée par le froid d'un hiver qui n'en finit pas d'empirer.

Jehan, va quérir la Comtesse. Dis luy que son hoste dresse festin en son honneur, et que je ne tolérerais guère que ce poison déserte ma compagnie ce soir.

Le page exécute les ordres, sur un sourire connivent, et le cortège se scinde en deux. Le Grand Veneur, ou ce qui en fait office, emmène la meute dans son sillage, direction le chesnil.
Le Penthièvre, quant à luy, s'engage dans la rampe qui mène à la cour elle aussi dangereusement enneigée en ceste fin décembre, flanqué de deux acolytes.

Le dernier pont-levi - la cour et son calme relatif.
L'angevin tire sur les rênes de sa beste fûmante et écumante, immobilisant le destrier fourbu au milieu de la cour, et alors qu'il flatte le flanc de l'animal d'une tape bienveillante et affectueuse, un palefrenier se précipite à sa rencontre, pressé sûrement d'en finir avec Penneg et de pouvoir retourner au confort de son dortoir, ou de la grange qui en faict office.

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nebisa
Le Vicomte, tout a son retour de chasse, n'avais pas remarqué au fond de la cour, dissimulée sous un épaisse cape de laine, sobre comme la misére, la silhouette d'une Comtesse tachant de regagner ses apartements sans se faire remarquer...

Fidéle à sa nature, elle s'était glissée à l'aube hors de la forteresse, revêtue de sa tenue marche habituelle, un caleçon de cuir moulant audacieusement le galbe de ses jambes, un pourpoint vert sombre retenu à la taille d'une ceinture de cuir noir ou pendait diverses bourses et des cuissardes noires . Ses cheveux étroitement emprisonnés par une tresses ruisselant dans son dos, elle avait passé plusieurs heures de la matinée à récolter les herbes et racines dont elle avait besoin pour ses potions et elyxirs, maudissant tour à tour le froid, la saison et la région. Le tout cumullé lui donnait en effet le plus grand mal à obtenir certaines plantes dont elle avait grand besoin.

Etait-ce sa prime jeunesse enfuie, le manque de pratique ou simplement la distraction ? Il lui avait fallut attendre le milieu de la matinée, d'être aussi crottée qu'un métayer et transie de froid pour finalement déniché un plant de corne du diable exploitable... Avec la poudre de colchique et les racines d'aubépines qu'elle possédait déjà, sa préparation serait prête avant la fin du mois. A cette pensée, un sourrire fin fleurit sur les lévres carmines de la Comtesse, plus Malemort que jamais...

Sa tâche achevée, elle avait pris le chemin du retour, priant pour n'estre vue de personne, encore que, n'étant que les gens de Couesmes ne lui prestait guére attention et que l'hoste l'évitait avec soin depuis bien trois jours... A cette pensée, une moue dubitative se peignit sur ses traits.. Avait-elle dépassé les limites et s'était-il finalement rendu à la raison ? Dans ce cas là, pourquoi ne lui avait-il pas signifié son congés ? Pou autant ; la Chieuse ne comptait pas s'enfuir comme une voleuse. Pour le moment, son séjour servait ses plans plus lointain, et elle avait aussi besoin de calme aprés cet exode nomade de Tournée Royale, quelques jours passés en compagnie de sa fille nouveau né, quelques jours sans déplacement, quelques jours pour se dérober au monde et prendre soin de ses concoctions dans le plus grand secret... Quelques jours pour y voir clair dans le maelstrom de ses pensées, émotions et décisions aussi...

Alors qu'elle longé la muraille de la cour, le tumulte annonciateur du retour du maistre des lieux la renseigna sur l'heure qu'il devait être. Contrariée de s'être par trop attardée en forêt, elle voit passer la meute de chasse, se demandant a nouveau comment les hommes pouvait trouver ces bêtes là intelligentes quand ils n'étaient guére plus que des loups apprivoisés, sans charme, sans sauvagerie, sans audace... Les loups... ses loups... Chabrières... Tout cela lui manquait chaque jours d'avantage, comme lui manquait l'odeur des herbes jetées au brasier sous la lune pleine, les chants des prêtresses et le gout du sang sacrificiel quand le pinceau de la matriache tracait dans son dos les symboles de la Déesse... Malemort qui renait sous le manteau mondain, Malemort brulant de défier à nouveau le monde... Retour aux sources pour mieux se noyer peut être... Qui sait... elle ne cherche pas à comprendre, elle se laisse aller, peu à peu, sur la pente d'un passé qu'elle croyait derriére elle...

Mais pour l'heure, ce qui l'intéresserait serait de regagner sa chambre sans être vue du Vicomte, ne sachant pas comment se conclurait leur rencontre et préférant ne pas avoir a expliquer sa tenue, son exploration des sous bois et leur motifs à tous deux...


Jehan, va quérir la Comtesse. Dis luy que son hoste dresse festin en son honneur, et que je ne tolérerais guère que ce poison déserte ma compagnie ce soir.

Poison ? Le rustre ! Pourtant, le rire la prend et elle ne parvient à le dissimuler . Il éclate et raisonne dans la cour, se heurte aux murailles, ricoche et s'envolle... Poison... S'il savait combien il est proche de la réalité en cet instant, le Vicomte en tomberait sur ce postérieur qu'il a de fort bien fait... Se sachant découverte, elle s'avance avec nonchalance jusqu'au Vicomte pour darder sur son hôte un regard rendu plus vif par la marche matinale où brille une flamme diffuse qui entre colére et amusement ne s'est point fixée...

Poison Messire ? Vous m'offenseriez en ne retirant pas ce terme désobligeant... Je ne suis guére plus dangeureuse que l'angélique...

Mains sur les hanches, tachant d'ignorer le froid qui la saisit à la gorge, se bornant à le trouver "rafraichissant" quand il seraut d'avantage "saisissant", elle affecte une insouciance craneuse... l'idée d'un retour en tout discrétion étant révolue.
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La Balafre
Un rire tonitruant retentit dans la cour, plus cristallin que grivois, plus féminin que soiffard.
Ce rire là est étrangement familier aux oreilles du Penthièvre, qui ne l'a pourtant que peu entendu.
De toutes ses entrevues avec la Malemort, la grande majorité terminait en colères et éclats de voix, lorsque les aultres viraient à tendresse et effusions amicales, révélations sincères.
Mais le rire qui secoua sa cour interpella le Balafré, le surprit. Toujours perché dessus son destrier, Penneg à la robe noire et à la gueule écumante, dont la nervosité et la noirceur profonde contrastait violemment avec l'atmosphère hivernale de la Cour.
Les uns à leur fébrilité transie, l'une à son incognito trahi, l'aultre à sa chasse et à sa grandeur décadente, tendant brides et serrant cuisses pour garder maitrise sur sa monture, survoltée, aussi sauvage qu'il pouvait l'estre sur un champ de bataille.

Oui, lorsque les temps estaient durs et la mort Loy, ils faisaient un binôme resplendissant, identiques et complémentaires. Tous deux livrés à leur folie effrénée. A celle animale du destrier dressé pour la guerre, à celle du cavalier éperdu de désespoir. Une harmonie d'épouvante, démence sur laquelle le Malin devait sans doute poser un regard doucereux. L'élévation de l'homme et de la beste dans la barbarie estait tradition depuis des temps immémoriaux, et ceste alchimie sorcière durerait toujours. L'osmose, comme la jouissance, puisait souvent sa source au flanc de quelque montagne de Grandeur subjective, illusoire et imaginaire, torrent malsain de certitudes inébranlables, et pourtant si souvent chancelantes.
L'eau de ces lacs où s'abreuvaient ceux qui se disaient de grands hommes, l'eau des nappes qui dévalait des montagnes helvètes que Tithieu avait jadis parcourues, n'estait aultre qu'un poison de l'âme et de l'esprit, véhicule sournois de la Parole du Sans-Nom, s'insinuant en le sein de l'innocence à la faveur d'une soif naturelle, telle la pomme dévorée par Eve. Eve... Poison.

Le visage de Nebisa apparut à "Couesmes", en souvenir net et évident, révélation de son esprit. Son regard amoindri mais clairvoyant fondit sur la silhouette qui semblait raser les murs avant qu'il ne s'y impose.
L'allure, la tenue, la démarche. Le visage, surtout. Il ne luy en apparait que quelques bribes, le reste est avalé, mangé par l'ombre de la capuche.
Mais ceste peau blanche, lisse comme la porcelaine malgré la dureté que pouvait parfois revêtir ce visage, il la reconnaîtrait entre mille.
Il réprima une grimace contrariée, juste au moment où Nebisa l'interpellait, contrecarrant son propre plan de fuite.


"Poison Messire ? Vous m'offenseriez en ne retirant pas ce terme désobligeant... Je ne suis guére plus dangeureuse que l'angélique..."

Comtesse, je désespérais de vous revoir avant que vous n'eussiez désertés les lieux sans laisser offrements ni traces de vostre passage en mes murs.

Prime mensonge. Mensonge qui ne le désarçonne pas, que du contraire.
Détournant son attention du dépeçage des gibiers pris lors de la chasse de la journée, qui commençait à mesme la cour enneigée, il tira sur les rênes qu'il serrait dedans sa main droite, et dirigea sa monture de quelques pas nerveux vers l'encapuchonnée qui furetait, à l'ombre des hauts remparts de sa cour.
Il la toisait de haut. Du moins, de toute la hauteur de son destrier. Il se voulait grand, pour ne pas être vulnérable. Il se voulait inaccessible, autant que faire se peut, autant qu'il le serait tout de fer et de cuir arnaché.
Mais point de heaume pour soustraire son regard à celuy de la Malemort, à son grand dam.
Mais si point il ne serait déshumanisé, il s'efforcerait de se conduire en animal, au moins aussi hargneux que la louve qui luy faisait face.


Puis-je savoir ce que faict mon hoste, dont je suis l'obligé, au beau milieu de ma cour et au jour tombant ?

Sans vergogne ni complexes, il éludait avec superbe les revendications de la Chieuse.
Un "splaffffff" se fit entendre, devant ce qui faisait office de cuisine.
On égorgeait ses prises, on les évicérait, les vidait. Alors mesme qu'il parlait, derrière luy, le sol d'ivoire se maculait de sang et les meilleurs chiens de la mesnie se régalaient des vicères qu'on leur livrait en récompenses.
Cela n'estait pas pour distraire le Penthièvre, trop habitué qu'il estait aux effusions de sang pour que la vue d'entrailles pendouillant d'un animal pendu par les pattes arrières ne puisse l'émouvoir.
Au moins, le broquart et le sanglier de ce jour là estaient bien morts avant que la lame du dépeceur ne tranche leurs chairs, et nulle supplication ni plainte pathétique ne venaient se répercuter sur l'immensité des remparts de Couesmes. Aucune similitude avec les horreurs qu'un homme de guerre avait à endurer sur l'autel des conquêtes ou de la liberté. Montreuil...
Un éclat fugace brilla dans son oeil, pour en disparaitre aussi vite. Le souvenir des tueries qui avaient ponctuées son règne ne fit que le traverser, à la manière d'une étoile filante s'écrasant dans le lointain. Non, jamais spectacle aussi anodin qu'une découpe ne devrait le troubler.
Il mit pied à terre, à 2 pas de Nebisa, sautant bottes jointes de sa selle, sans lacher de la main les brides qui retenaient à luy son bouillant cheval breton.


Regardez-vous. Vous estes méconnaissable, et trempée. On croirait voir une gueuse au retour du champ, ou une Noble poictevine à la parade. D'où vous vient cet estat déplorable ?

Point d'empathie. Du moins, il s'efforce de s'en défendre et de s'en garder.

Ou auriez-vous perdue vostre suite et auriez-vous tenté, vainement, de rejoindre Saumur à pied ?
Point ne s'oriente dans le paysage angevin qui veut...


Railler, pour conjurer la douceur de l'amitié.
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nebisa
D'humeur aigrie le Chandos ce matin se dit la Malemort qui ne daigne fléchir d'un pas face à l'étalon qui lui fait face. Si elle consent à lever la tête pour agripper l'oeil de l'Angevin ce n'est guére que pour le toiser avec malice, faisant fie de son allure qu'elle sait pour le moins déparaillée et de l'incongruité de la situation...

Pourtant, l'hote obligé ne parait vouloir oublier de se renseigner et il n'est pas dans les plans de la Malemort de confesser ses projets, le but de sa quête et les noirs desseins se propageant dans son coeur asséché et rongé par le désir de vengeance... Il lui faut une parade, il la lui sert sur un plateau...


Mon bon Vicomte... vous qui vous inquiétez tant de moi, plutot que de pérorrer sur mon allure, pourquoi ne pas me faire monter un bain ? Je vous fais grasce de venir me frotter le dos, mais l'idée de me délasser dans une eau parfumée représente la parfaite conclusion à cette innocente promenade que je fis dans vos bois... Vos préoccupations d'hote dévoué ne datent que de cet instant pour m'avoir oubliée ces jours durant, il fallait bien que je m'occupe et ... la marche apaise l'esprit, ne dit-on pas ?

Mens, brodes et pérrores... Crois tu le tromper ? Lui qui semble troner depuis son cheval, les paumettes rosies par la chevauchée, l'oeil brillant par la traque et pourtant... le visage dur et fermé, la bouche plissée en une expression austére, presque menaçante, hostile et défiante... Combien elle préfére le voir sourrire ou simplement détendu, ce qui n'est plus que chimére en sa présence d'ailleurs... Ce qu'il doit ignorer, comme il doit ignorer le reste de ses pensées le concernant, comme il doit ignorer ses projets à venir et le but de son errance dans la campagne voisine... Combien de secrets lui dissimule-t-elle au final... Serait-ce trahison ? Non... bien sur que non... Pour son bien seulement... Il est parfois si préférable de demeurrer dans l'ignorance...

Mais le voilà à présent qui met pied à terre, la jaugeant avec condescendance comme une génisse malingre sur une foire de province ... L'allure d'une gueuse ? Voudrait-il la mettre en fureur ? Non... elle ne lui fera pas ce plaisir là... Il lui importe trop de rester maistre de la conversation pour laisser son hote dans l'ignorance du contenu de sa besace ...


Mon cher, si mon apparence vous semble si... intolérable, vous saurais vous passer de ma présence durant vostre repas... D'ailleurs... les malheureuses proies que vous ramménez ne me semble guére suffisantes à nourrir toute la tablée...

Tiens le Titi prends ça dans ta tête semblent dire les yeux étincelants de la Chieuse, qui toute boueuse et souillée qu'elle soit, se donne à présent des airs de majesté outragée... Pourquoi ce besoin de le défier ? De le piquer dans sa fierté ? Pourquoi toujours en venir à l'affrontement ? Pour se protéger de lui, d'elle... de ce qu'il pourrait advenir sans ces heurts trop fréquent... Tout simplement parce que le feu qui les anime tous deux, ce feu commun aux esprits libres et à ceux qui refusent la soumission pour conduire de leurs propres volontés leur existnce, au prix de trop de souffrances suremment, ce feu là, les conduit à s'affronter pour se reconnaitre comme deux égaux quand bien même la prédominence demeurre, le besoin de s'affirmer, de se montrer libre et indompté par l'autre... Ou, plus simplement, parce que le souvenir de leur derniére dispute brule encore comme une plaie trop vive et qu'elle ne peut espérer revenir dessus sans faillir...

Et c'est pour cela, que toute misérable et tremblante qu'elle fusse, malgré ses lévres blanchies par le froid, ses méches folles encandrant son visible à la blancheur de statue, elle se doit d'affecter le détachement et l'insouciance qu'elle est loin d'éprouver... Aprés tout, n'aurait-il pu la convier à cette chasse ? Simplement lui faire porter unn billet l'en informant ? Tout plutot que de l'éviter comme la peste et la traiter de "poison"... D'ailleurs... à ce sujet, et même s'il n'a pas tout à fait tort, bien qu'il l'ignorasse...


Et... je crois que vous me devez des excuses non ? Mon honneur et ma vertu ne s'auraient s'apaiser autrement que par l'expression de vostre plus sincére contrition et de vos regrets les plus vifs...
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La Balafre
"Mon cher, si mon apparence vous semble si... intolérable, vous saurais vous passer de ma présence durant vostre repas... D'ailleurs... les malheureuses proies que vous ramménez ne me semble guére suffisantes à nourrir toute la tablée..."

*Que vois-je ? Qu'aperçois-je ?
Serait-ce une pointe d'agacement ? Une once d'exaspération ? Une pincée de vulnérabilité, saupoudrée d'un soupçon de rage difficilement réfrénée ?
Quel est cet éclat qui traverse votre oeil, ma belle Comtesse, s'évaporant aussi vite, comme l'éclair s'évanouissant dans la nuit après avoir frappé le sol ?*

Le Penthièvre se trouvait désormais à quelques pas seulement de la Comtesse. Autant dire à un bond, un saut.
Mais était-ce bien prudent de se mettre ainsi à porté d'une louve, par nature si imprévisible et indomptable ?
Quoi qu'il en soit, de là où il se tenait bride à la main, l'angevin avait tout le loisir de dévisager la Comtesse, de la détailler, de la contempler. Et, tout à son admiration silencieuse, muette autant qu'inavouable, le colosse restait de marbre. Un marbre fendu, certes, stigmatisé et martyrisé par le temps et par les Hommes. Mais un marbre tout de même, inébranlable, impassible... glacial.
De là où il se tenait, stoïque, il avait pu saisir cet éclat d'affolement animal qui avait brillé dans l'oeil de la Malemort. Non pas pour l'effrayer, ni pour briser son marbre d'un mouvement de colère ou de crainte, ce qu'il crut voir, lire et déchiffrer dans le regard, dans les traits imperceptiblement crispés de la Chieuse lui prêta à sourire, largement. Il n'y avait pourtant pas de quoi se réjouir, dressés contre le froid à se disputer quelque légitimité ou responsabilité dans les tourments de leur amitié, comme deux enfançons à la chamaille.
Mais le Penthièvre souriait. Ostensiblement, sans retenue, et franchement. Il souriait à s'en décrocher les lèvres, d'un sourire sans réelle joie autre que celle, malsaine, de la vengeance accomplie.
Tandis qu'il souriait, elle parlait, et il ne l'écoutait pas vraiment. Tandis qu'il souriait, sa poitrine semblait vouloir exploser, et l'endroit de ses côtes derrière lequel sommeillait son coeur lui brûlait, comme chauffé à blanc par un muscle devenu incandescent. Il avait mal, sans pouvoir rien en dire, trop occupé qu'il était à sourire de sa basse victoire, à sourire de la savoir vulnérable, de la savoir humaine et de se savoir vengé. Il avait mal, mal des batailles que se livraient en lui passion et raison, nature et retenue. Il avait mal, et le sourire de satisfaction que lui avait inspiré l'idée que la Malemort souffre de son propre fait ne fit que s'élargir, comme crispé, comme dénaturé. Il avait mal et il devait se taire, pour ne pas fléchir, pour ne pas céder une victoire si chèrement acquise à son vis-à-vis.

Elle avait dû rager de se sentir ainsi maltraité. Rager de se sentir ainsi mise à l'écart, après avoir été convié par lui en ses murs. Perdait-elle seulement ses repères ? Lui en tous cas, s'il n'avait craint d'en être castré, aurait pleuré d'avoir eu à entendre les derniers mots de leur dernière dispute. La meilleur des défenses n'est-elle pas encore l'attaque ?
Pour lui, tout n'était que justice et loi du talion. Il était chez lui, libre d'agir comme bon lui semblait. Libre de convier qui il voulait à sa table, et de traiter ses invités ainsi qu'il lui en prenait la lubie. Il était chez lui et elle était libre de partir, mais n'en avait rien fait. "Qu'elle me déteste, pourvu qu'elle me craigne." Des mots de souffrance et de désespoir résonnaient en son esprit, tiraillé entre conscience et passion, entre détresse latente, dormante, et souffrance bien réelle, aussi acérée que pouvait l'être la froideur hivernale. Si la folie avait un nom, celle de Tithieu prendrait celui de Nebisa.

Elle finit de parler. Il souriait toujours.
De son monologue il n'avait saisi que quelques bribes, quelques mots qui devaient, mis bout à bout, avoir un sens quelconque.
Voué et livré à ses émotions, aux sensations qui l'assaillaient de toutes parts, il en comprit qu'elle se refusait à manger à sa table, levant le bouclier pour contrer son estoc, répondant à l'affront par l'affront. Il souriait toujours.
Que répondre à pareille déclinaison ? Quelle esquive, pour éviter le choc et l'attirer à sa table, desseins qui se voulaient malsains et querelleurs mais qui trouvait sa source dans une envie, un besoin profond de la revoir, de lui parler à nouveau, de la faire bondir à nouveau, de la faire sourire... à nouveau.
Ses muscles se tendirent, en un imperceptible soubressaut, un discret tressaillement. Frisson épouvanté de se sentir lui-même si pitoyable, dont nous attribuerons la responsabilité à la froideur de l'atmosphère.

Son sourire s'élargit, explosa en un rire tonitruant. Un rire bruyant, grivois, franc, effréné. Un rire vulgaire, d'exagération, de gorge déployée, de résonance. Un rire vulgaire de faire ainsi vibrer ces murs, de faire ainsi vibrer ces âmes et leurs deux personnes, alors qu'ils n'aspiraient qu'au calme et à la tranquillité... Un rire qui cache, de derrière un masque de trop, d'excès, la vulnérabilité qu'il lui faut garder secrète.
Il éclata de rire, impulsivement, instinctivement. Pour ne pas se montrer acculé, désemparé. Il éclata de rire, riant de sa propre incapacité à trouver réponse verbale au refus de la Comtesse.


Point je ne mangerais seul ce soir, Nebisa. Vous estes mon invité et mangerez à ma table, parce qu'il convient que ce soit ainsi, parce que je l'ai décidé ainsi. Nous avons à discuter et ne nous sommes que trop peu vus de tout vostre séjour en ma Forteresse. Acceptez ces offrandes en gage de mon amitié, et parce que je les consens librement.

Malgré la teneur de son discours, il n'y avait dans l'intonation de sa voix, la vibration de ses mots, aucune émotion, aucune sympathie ni chaleur. Le marbre restait de glace, même s'il s'était mis à parler, donnant à son invitation des accents d'irréelle, sans être hypocrite ou mal pensée. L'ambiguïté allait fort bien au Penthièvre, et il savait en jouer autant qu'il avait aimé s'y éduquer.
Contrastes entre le discours est le ton. Lequel des 2 est à croire ? Lequel des 2 est le plus sincère ?
Lequel est le plus vrai, le plus représentatif de sa pensée, de ses sentiments, de son humeur ?
Il ne le sait que trop mal. Il ne se connait que trop mal, ne sachant que jouer, mentir et dissimuler pour perdre son interlocuteur. Il est si talentueux en la matière qu'il a fini par s'y perdre soi-même, s'échinant à rester fidèle à une personnalité qu'il ne sait plus, à garder des traits qu'il a oubliés.
Alors il se laisse porter, porter par ses sentiments, par ses émotions. Porté par les mots que crache sa gorge, que forment ses lèvres, parfois sans les avoir pensés. Parfois, aussi, il ne les a que trop ruminés... Et pour survivre au dictat de ce capharnaüm de despotes immatériels, enfouis en lui comme en un maquis, il se tue à se persuader qu'il garde le contrôle de lui-même, de ses réactions, de ses actions.
Là est la cause de sa fatigue physique et morale, quasi permanente depuis plusieurs mois, semaines.

Conquis par ses pensées, submergé par la bousculade de ses émotions, par la répercussion de ses mots qui résonnaient en son esprit en échos assourdissant, le Penthièvre ne vit pas arriver de derrière lui le palefrenier qui vint se saisir de la bride de son cheval, obséquieux valet pris d'une frénésie de courage et de détermination, détermination à s'illustrer devers ce maistre si puissant en ces murs.
Durant les quelques secondes d'intervalle qui avaient précédé l'intervention muette du petit palefrenier, auquel le Balafré abandonna son cheval après un regard sévère, la Comtesse de Ségur n'avait dit mot.
Se pensant alors tiré d'affaire et victorieux, son destrier tiré au pas vers les écuries, il fit volte-face et entrepris de rejoindre son donjon.
Mais à peine avait-il fait un pas, respirant à pleines narines l'odeur de cuir transpiré et de bête harassée de sa monture, que la voix de Sa Chieuse s'éleva à nouveau derrière lui, l'interrompant dans sa course vers un triomphe victorieux, ou pour mieux dire dans sa fuite pathétique.


"Et... je crois que vous me devez des excuses non ? Mon honneur et ma vertu ne s'auraient s'apaiser autrement que par l'expression de vostre plus sincére contrition et de vos regrets les plus vifs..."

Lui qui s'était cru un instant -hâtivement- tiré d'affaire, ne put être que contrarié par l'intervention impromptue de la Malemort, et par la substance de cette dernière. Qu'il s'excuse ? Non point, petit chaperon, tu n'avais rien à faire en ma cour et n'aurais dû surprendre mes mots.
*Ce castel est mien, j'y suis seul Dieu et maistre, je parle ce que je veux parler.*
Et le Balafré de tourner dédaigneusement la tête pour reprendre la Malemort dans son champ de vision, sur cette pensée...


Votre vertu ?...

Un rictus mauvais fendit son visage, élargissant ses lèvres aux piments de la moquerie. Il rit, doucement, par trois hoquets sans joie.

... elle s'en remettra, j'en gage.

Il pivota à nouveau en direction des escaliers qui menaient à l'étroite porte du maistre de la mesnie, au bas de son Donjon. En marche, et à pas pressés, pour ne pas être rattrapé par la porté éventuelle des éclats de voix de Nebisa.
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nebisa
Elle s'attendait à sa colére, à ses exclamations furieuses devant la condescendance qu'elle affichait pour lui, au lieux de celà, elle avait sourrit, il avait rit, comme si elle ne représentait plus guére à ses yeux et n'était plus capable d'atteindre, sinon son coeur, son orgueil...

Ce n'était plus là l'homme qu'elle cotoyait habituellement, comme si le fil tenu de leur relation tumultueuse, cette amitié tissé longue date et ponctuée de querelle enflamée s'était rompue sans qu'elle ne le veuille, sans qu'elle ne puisse pour autant s'exclure d'en être responsable, sans même qu'il ne daigne l'en informer... A cette pensée, l'espace d'un instant, son regard se fend d'un éclair douloureux, ses épaules se voutent sous le poid de l'irréparable et son coeur manque un battement... l'espace d'un instant seulement, un instant fugace et déjà effacé par le masque impassible de la Malemort qui étouffe si bien les sentiments et les douleurs de la faible Nebisa...

Son discour achéve d'enfoncer le clou, non le pieu de son indécision... Comment paroles si anodines, si courtoises peuvent être dites avec tant de froideur ? Pourquoi les mots prononcés se trouvent-ils démentis par le ton du Vicomte ? Ou veut-il en venir ? Pourquoi s'encombrer d'une compagnie qu'il rejette par là même ?

Ses pensées s'emmélent et se heurtent à l'incompréhension et à l'impossibilité dans laquelle elle se trouve de trouver satisfaisante réponse à ses questions et là... elle a bien conscience de lui laisser l'avantage d'une partie qu'elle n'admettra pas de perdre... Le Vicomte joue sur son terrain, il pense que celà suffira à vaincre ? Mais dans ces duels là, il ignore avoir face à lui une adversaire par trop habituée aux esprits retors et bien marquée par les âffres de la trahisons et les blessures stigmatiques infligées années aprés années pour tous ceux trop heureux de clouer au pilori celle qu'ils jugeaient indigne de leur constance...

Non il ne sait pas, il n'imagine pas ce dont elle est capable, se sentant acculée, pour préserver la seule chose qu'il lui reste en guise de protection... sa froideur, son apparente indifférence, son masque de morgue et d'orgueil... Nul jamais ne voit gémir la Malemort, nul jamais n'entend ses pleurs et ses sanglots, encore moins ceuix qui en sont les causes... Qu'il essait seulement de frapper qu'elle le mettra à terre, qu'il tente de la détruire et elle réduira à néans ses prétentions... Pour en suite se cacher le temps de guérir, ajoutant une marques de plus aux plaies purulentes de son coeur . Mais non.... elle ne pourrait pas... pas lui... pas lorsqu'elle sait avoir elle même aposer sur lui le fer rougeoyant qui l'a blessé et qui cause aujourd'hui l'inextricable situation dans laquelle ils se trouvent...


Votre vertu ?...

Et il se moque à présent ? Il la jauge avec mépris ? Il est bien placé pour savoir ce qu'il en est de sa vertu, lui qui se trouve victime des résolutions implacables qu'elle a pris concernant justement son honneur et sa vertu, au prix de nuits d'insomnies et de l'appel toujours plus impérieux de ses sens... La Malemort n'est pas faites pour l'abstinence, pour la Vertu en général... Et lui n'est pas le dernier à la tenter... Ne le lui a-t-elle pas déjà signifier ?

Aussi, il ferait beau voir qu'elle admette celà sans broncher... Mais déjà le Vicomte s'éloigne... Parfait, là et maintenant, boueuse et tremblante, elle ne peut frapper comme elle l'entend... Elle paraitrait ce soir au souper du Vicomte, avec les armes propres à lui faire rendre gorge... Le fou ne savait pas, ne pouvait imaginer ce qu'elle lui préparait... La Malemort savait exactement ou porter ses coups pour atteindre l'orgueilleux angevin...

Fixant sa nuque, dans un murmure qu'il ne doit pas percevoir, un sourrire gourmand aux lévres, se pourléchant déjà de sa victoire à venir, tant elle est sure d'elle, elle conclue avant de s'en retourner vers sa chambre


A ce soir Tithieu... Sois ponctuel pour la leçon que j'entend te donner...

L'esprit déjà projeté vers l'affrontement à venir, au premier valet qu'elle croise, elle ordonne de lui monter de l'eau chaude pour son bain, et lui signifie qu'elle l'assistera durant ce dernier, faisant office de chambriére puisque le Vicomte n'en a pas mis à sa disposition. En suite, alors qu'elle grimpe les marches, laissant pantois le valet qui lorgne sa croupe avec insolence, ne pouvant croire à sa bonne fortune, elle passe en revu le contenu de ses coffres, sélectionnant la parrure et la véture qu'elle arborera avec soin... Oui... le pauvre Vicomte ne peut savoir ce qui l'attend...
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La Balafre
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