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[RP] Quand deux brunes prennent la tangente

Erwelyn

Assise à son bureau, Erwelyn vérifiait sa chèqueuh liste comme auraient sûrement dit les poneys roses. D’ailleurs à cette pensée de ses amies parties depuis plusieurs semaines déjà, une petite larme lui piqua les yeux. C’est que les bougresses lui manquaient, y’avait pas à dire. Depuis leur départ, Lynette n’avait mis que deux fois les pieds en taverne, c’est pour dire. Elle ne se saoulait plus, avait retrouvé un semblant de sérieux, et s’était plongée dans son travail à la Chancellerie pour que Rheanne puisse reprendre le flambeau derrière elle sans problème. En même temps, l’absence de poneys était bonne pour la santé, du moins bonne pour son foie qu’elle maltraitait depuis fort longtemps maintenant. Une moue se dessina sur son visage et elle ouvrit le deuxième tiroir de son bureau, fixant la bouteille de liqueur de poire qui s’y trouvait. Elle aurait pu se prendre une cuite là, maintenant, tout de suite, histoire de se replonger dans un état d’ivresse comme quand elle se trouvait avec les ponettes, ça atténuerait peut-être le vide provoqué par leur absence. Mais peut-être que ça aurait été mal vu par Rheanne qui n’allait pas tarder à la rejoindre.

Mouais…

D’un geste brusque, le tiroir fut refermé et après un soupir, le chambellan se replongea dans sa liste, rayant au passage les affaires déjà préparées et énonçant tout haut chaque point :

Liqueur de poire => chèqueuh !

Bah oui, vous aviez cru quoi ? Qu’elle allait partir sans alcool sur elle ? Faut pas pousser mémé dans l’eau du bain non plus…

Baumes pour Rheanne lors de ses essais de révérences et qu’elle se casse la figure par terre tout le temps => chèqueuh !

Oui, c’était utile ça. La vice chambellan était aussi douée qu’elle pour les révérences et le protocole que quand elle-même s’était pointé en Chancellerie pour devenir ambassadrice plusieurs années auparavant. Mais maintenant, elle connaissait tout ça sur le bout de ses ongles rongés, et espérait bien que la brune ferait de même.

Écrire une lettre aux poneys pour leur dire qu’elle les aimait et que bientôt elle allait se pointer en Périgord.

Quoi c’est pas bien de mentir ? Oui bon, soit. Elle devait d’abord aller se geler en Bourgogne, puis revenir en Maine, et ensuite filer en Artois pour jouer les témouines. Quelques mois de voyage en somme avant de revoir la frimousse des ponettes. Et puis de toute façon elle savait qu’elles étaient en pleine période électorale, donc fort occupées à vouloir repeindre tout le Périgord en rose et à le faire crouler sous des tonneaux de mirabelle ou d’alcool de gland. Rien que l’idée de la liste Partouze affichée au château périgourdin la faisait d’habitude sourire.
Mais encore une fois, les lèvres de Lynette se mirent à trembler. Elle était en manque, c’était un fait. En manque de poneys roses. Elle poussa un râle.

Rhaaaaa (Elle fait bien le râle hein ?)

Et rouvrit le tiroir avant de se jeter sur la liqueur de poire, dont elle but une grande rasade. S’essuyant les lèvres avec sa manche, ce qui n’était pas très protocolaire dans une ambassade, elle saisit ensuite un parchemin et griffonna quelques mots à l’attention des ponettes.

Citation:

Salut les ponettes !

Un petit mot du Maine, d’où je vais bientôt filer pour me rendre en Bourgogne, le pays de l’escargot il paraît.
J’imagine que vous êtes bien arrivées, que vous avez bien cueilli des champignons en route, p’tet même que vous avez eu l’occasion de faire rayonner votre art et votre don incontestable pour le chant et le pestacle dans les provinces que vous avez traversées, qui sait…

Ce petit mot en tout cas pour vous souhaiter bon courage et surtout bonne chance avec Partouze. Chuis sûre que vous allez assurer grave !

Je sais pas trop quand je vais vous rejoindre, mais je pense à vous.

Avec Partouze, on en a … plein les fouilles !

Lynette

De petite taches s’étaient formées par ci par là sur le papier. Non, son âge ne la faisait pas baver, du moins pas encore…C’était de petites larmichettes qui s’étaient écrasées alors qu’elle rédigeait son courrier. Tudieu, les mois qu’il lui restait encore à passer loin des ponettes allaient être difficiles…
Elle enroula ensuite le parchemin puis écrivit chèqueuh sur sa liste, qu’elle continua à vérifier.
Quelques points plus tard, elle arriva au plus important, au plus crucial, au plus décisif, au plus primordial, au plus… oui, bon, vous l’aurez compris, fallait surtout pas zapper celui là.

Enfermer Henry dans la salle des archives pour pas qu’il nous empêche de monter à cheval => Chè…

Hmm, ah non, c’était pas fait ça. Fianchtre et cornefichtre, il fallait absolument qu’elle s’occupe du vieux sinon il n’allait jamais la laisser filer en cheval.
Sa petite tête se mit en ébullition – oui, oui, ça arrive – afin de trouver LA solution pour qu’il ne lui court pas après avec son : Mais Excellence, vous devez prendre une voituUuUuUreeee pour vous déplaceeeeer !
Gnagnagna…

Elle tourna et retourna les solutions dans son esprit et enfin ! – quel suspense hein ? – l’idée lumineuse vint. Vérifiant toutes ses affaires, elle se dirigea en premier lieu vers l’écurie, zieutant à droite à gauche pour vérifier que l’intendant n’était pas en train de l’observer dans un recoin, et les attacha à la selle de Tralala. Ensuite, elle l’amena tout près de l’entrée pour que la fuite soit plus rapide, espérant que Rheanne ne tarderait pas trop.
Puis, parchemin sous le bras, elle se rendit l’air de rien dans le salon d’accueil, où Henry s’occupait des bibelots qui décoraient la pièce. Un air angélique et un toussotement plus tard, elle prit la parole.

Henry, pourriez-vous je vous prie vous rendre en la salle des archives, j’ai besoin d’un document important et je dois également envoyer ce courrier urgent. Je… il me faudrait le formulaire A32, vous savez le rose…

Tapotement de menton.

Hmmm, à moins que ce soit le vert et que ce soit le BXW40 ? Zut… Amenez-moi donc les deux, ce sera plus simple.

Un grand sourire ponctua sa phrase et l’intendant tourna les talons pour se rendre aux escaliers qui menaient au sous sol. Lui emboîtant discrètement le pas et essayant de ne pas éclater de rire, Erwelyn le suivit à travers les couloirs et s’arrêta derrière un mur, vérifiant bien qu’Henry soit entré dans la pièce. Au départ, elle avait carrément pensé à l’enfermer à clé là-dedans, mais elle n’était pas sadique à ce point…Quoi que…
Non, ça s’fait pas comme dirait Orka. Si l’intendant restait coincé là tout le long de son voyage en Bourgogne, elle risquait de le retrouver complètement desséché à son retour, c’était pas très protocolaire.
Mais avec la demande de formulaire qu’elle lui avait faite, il risquait d’y rester pour un moment. Ben oui, ces formulaires n’existaient pas, mouhahahaaaaaa ! La main fixée sur la poignée le rire sadique de Mahaut lui revint en mémoire et elle se remit à pleurer comme une madeleine. Décidément, cette propension à se mettre à chialer dès qu’elle pensait aux poneys roses devenait inquiétante.

S’essuyant les yeux, elle remonta les escaliers et se dirigea vers l’extérieur, attendant Rheanne à l’entrée, juchée sur Tralala. Enfin, elle vit la brune arriver, légèrement angoissée qu’Henry ne se pointe à nouveau. Lui tendant la main, elle s’approcha d’elle au trot, ne pouvant s’empêcher de crier :

Cours Rheanne, cooooouuuuurs !

Il fallait que la brune fasse vite, hors de question qu’elles doivent voyager jusqu’en Bourgogne dans une de ces saletés de voitures qu’Henry affectionnait tant !
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Rheanne

Le grand moment du départ en formation arrivait à grand pas pour la Vice Chambellan. Depuis qu’elle avait accepté le poste sans se rendre compte du traquenard, elle ne cessait de se faire balader de part les couloirs de la Chancellerie par son bourreau de Cheffe. Elle avait quelque mal à suivre traînant inlassablement un insidieux mal de crâne à mesure qu’Erwelyn ouvrait la bouche pour l’informer des devoirs et missions du parfait Chambellan.

Erwelyn poussait le vice à lui coller de nombreux ouvrages sous le nez et en les lui retirant quasi immédiatement tout en déblatérant sur les intérêts de connaitre l’histoire, le protocole, le contexte politique, la couleur du cheval blanc d’Henri IV, l’état de sèche des chaussettes de l’archiduchesse… Toutes ces choses indispensables. Et Rheanne opinait toujours du chef en souriant niaisement. Sûrement qu’Erwelyn se laissait berner à voir comment elle s’extasier à chaque sourire de l’élève brune. Elle semblait fière de son joujou mais elle l’aurait été beaucoup moins si elle avait entendu le bruit que faisait sa caboche en plein fonctionnement. Un vrai champ de bataille me direz vous pour engranger ces montagnes d’informations ? Que nenni, c’était le désert le plus complet, on pouvait même entendre les bourrasques de paille se baladant au gré du vent à l’intérieur de sa tête.

Alors quand l’Excellence en Cheffe proposa à Rheanne un petit voyage vers la Bourgogne, l’apprentie s’en réjouit. Ce ne pouvait être pire que rester enfermée dans les murs de la Chancellerie à respirer la poussière et s’endormir la joue coller sur un Traité de Coopération judiciaire d’on ne sait où.

Premier ordre de mission : relaxe de quelques heures pour préparer son baluchon pour les semaines de voyage à venir. La Bourgogne… Rheanne réfléchit quelques instants, il lui semblait bien que Cheffe lui avait dit où ça se trouvait mais elle était incapable de se rappeler. Il allait être urgent pour elle de se procurer une carte du Royaume et de se coller sérieusement à s’en bourrer le crâne. Pas question que la Chambellan se rende compte du pot aux roses et vienne à la conclusion que son apprentie ne ferait pas l’affaire. Cela devenait une question d’honneur pour Rheanne. Inimaginable qu’on puisse penser, ne serait-ce qu’une seconde, à la démettre de ses fonctions. Et puis après tout, la diplomatie se ne devait être que quelques passages de pommades sur les voisins pas contents. Enfin c’était ce qu’elle espérait…

N’ayant pas eu d’horaire de départ précis, Rheanne prenait son temps en sa chambre d’auberge de Mayenne pour régler ses quelques affaires et choisir ses tenues pour la formation. La tenue de voyage c’était pour… le voyage. Alors autant s’en équiper de suite. Ce qu’elle fit donc en enfilant ses braies. Elle sourit en repensant à la dernière fois qu’elle les avaient passées, c’était pour sa mission de protection de l’actuelle Comtesse, son amie Marylune, à l’époque enceinte à rouler en boule au moindre coup de vent. Elles en avaient fait du chemin et en étaient revenues entières. A la grande surprise de la jeune soldate. En parlant de ça, ne pas oublier l’équipement de défense. Erwelyn avait grandement apprécié quand l’élève avait parlé de sa formation de dragon à l’Ost. Mais si celle-ci se rendait compte qu’elle n’avait de dragon que le nom… Enfin avec un peu de chance, elle n’aurait pas à démontrer son peu de talent à manier les armes. Elle portait l’épée et le bouclier sans se blesser elle-même, ce n’était déjà pas si mal.

Une chemise toute simple, une paire de chausses sommaires mais confortables pour les randonnées, la pelisse en peau de renard, don de Marylune extrêmement choyé en ces temps hivernaux. Et voilà le tableau complet. Prête à partir.

Ah bah oui mais non.

Elle n’allait pas partir en simple balade, il lui fallait quelques changes et pas des moindres, elles se rendraient toutes deux dans les ambassades dont elles traverseraient les régions. Et arriver en tenue de voyage, pour sûr que leurs homologues la prendrait pour le palefrenier d’Erwelyn et non point comme son éventuelle successeur.

Léger frisson et soupir dépité. Et oui, c’était exactement ça le projet de la Chambellan, Marylune et Lyse. Et on appelle ça des amies ?! Elle continuait de maugréer en maudissant son penchant naturel à tout accepter si tant est qu’on mettait du « c’est pour le Comté » dans la discussion. Il faudrait réellement qu’elle arrête ça. Bientôt on lui dira que le Maine manque de sang et elle se couperait elle-même les veines.
Retour à ses préparatifs. Elle étala les tenues offertes par Mary pour que la brune délaisser son éternelle robe verte élimée et prête à craquer à divers endroits très incommodants. Mais que choisir ? Elle se maudissait de n’avoir pas ce don pour choisir les toilettes en fonction des circonstances. Et puis elle n’avait jamais vu la Chambellan à l’œuvre alors comment se douter des tenues attendues pour une ambassadrice du Maine. Parce que du bon goût, il faudra repasser, c’était loin d’être l’une des qualités de la brune.

Sans le savoir, elle perdait du temps à écarter les unes et les autres et au final de les remettre toutes au premier plan. Bon sang, si elle avait su, elle aurait posé la question à Cheffe avant de filer comme un lapin de six semaines de son bureau, trop heureuse de quitter l’endroit de son nouveau calvaire.

Bras croisés sous sa poitrine, elle faisait une moue des plus ennuyées. Puis elle eut une idée. Pas très lumineuse mais du moins, celle qui paraissait la moins risquée. Elle n’avait qu’à tout emmener ! Au moins, elle aurait moins de chance de se tromper. Bon elle se limiterait quand aux robes les plus chaudes et couvrantes. L’hiver avait tendance à continuer à se faire sentir.

Elle prit son sac de voyage et y enfourna toutes les robes, des poulaines plus faites pour jouer à la potiche qu’à courir les routes, quelques rubans. Oh et puis non, tous les rubans. C’était la seule manière qu’elle connaissait pour dompter ses mèches brunes et si elle portait un ruban détonnant trop de la tenue portée, pour sûr que ce serait un scandale.

Autant tout emporter.

Résultats de la tournée : un sac de voyage prêt à craquer et un baluchon pour compléter le tout. Elle fit appeler l’aubergiste pour qu’il monte ses affaires dans la carriole qui l’attendait. Elle lui indiqua le sac et le baluchon. Elle passa sur son épaule la bandoulière de sa besace contenant les effets personnels et indispensables, prit à main l’épée dans son fourreau et le bouclier. Voilà qu’elle était fin prête.

Arrivée à la Chancellerie, le cocher ne voulut point entrer dans la cour prétextant une autre course à faire. Il lui descendit tout de même ses quelques bagages et la laissa devant la grille. Oh le rustre !! Elle regarda toute penaude ses effets et regardant ses mains déjà occupées par l’épée et le bouclier.

Regard noir vers le cocher qui s'éloigne.

Me voilà bien maligne maintenant.

Pas le temps de tergiverser ou d’attendre qu’un quelconque page vienne lui porter secours. Se charger comme un âne ou laisser ses affaires devant la grille sans surveillance ? La deuxième solution lui semblait la plus appropriée. De toute façon, elle passerait bien par ici pour partir. Et qui viendrait à voler quelques fanfreluches de damoiselles ??

Elle retira sa besace, bascula son bouclier dans son dos et passa épée à la taille. Elle devait avoir fière allure la Vice Chambellan. Elle pénétra dans la cour et vit au loin un cavalier se diriger droit sur elle. Comment ? Un messager annonçant mauvaise nouvelle ?

Non mais il me voit pas ou quoi ?! Il va me foncer dessus avec son canasson.

Elle fit un écart sur le côté prête à lui asséner divers noms d’oiseaux dès qu’il passerait à sa portée. Mais déjà elle aperçoit une chevelure brune et une main tendue.

Cours Rheanne, cooooouuuuurs !

Sa Cheffe !! Mais qu’est-ce qu’elle foutait comme ça ? Rheanne était prête pour partir pour la Bourgogne et pas pour faire une chevauchée dans la campagne.

Mais l’ordre était donné. Courir. Comment ? Courir ? Et pourquoi courir ?
Coup d’œil vers la bâtisse de la Chancellerie. Quelle grande menace pouvait-il bien y avoir ?
A connaitre Erwelyn, sûrement son Intendant qui lui faisait encore quelques misères ou remontrances. Son expérience (enfin plutôt son formatage parfait) lui intima d’obtempérer et ses jambes prirent le relais sans que son cerveau ne les ai commandé. Elle tourna les talons et se mit à courir à la suite d’Erwelyn.

Rheanne entre deux halètements essaya de se renseigner sur les raisons de la fuite.

Qu’est-ce… qui se passe…. Cheffe ??
La Chancellerie… a été attaquée ??

La cavalière, le canasson et la Vice Chambellan courant à leur côté passèrent tous trois la grille sans encombre. Mais c’était sans compter la malchance de Rheanne (enfin surtout son étourderie !).
Des pas qui s'emmêlèrent et se terminant dans un bruit sourd de diplomate à terre.

Aaaahhh !!!

Les jambes répondant à l’ordre, le cerveau ne suivant pas, elle avait oublié la présence de ses bagages dans les parages et s’y étala de tout son long. Il n’était pas bon de suivre trop les ordres. Car là voilà à nouveau à terre mais dans la poussière cette fois-ci.
Au moins ainsi, elle pourrait reprendre son souffle. Elle se releva tant bien que mal et épousseta ses braies. Rouge de la course imposée, Rheanne haletait comme un troupeau de buffles. Mais réagir, ne pas se laisser déstabiliser, assurer la fuite de sa Cheffe. Il était pas l'heure de perdre une Chambellan alors qu'une Vice à peine formée était remplaçable...

Lynette !!!!! Ne m’attends pas !!! Sauve-toi !!!
J’assure nos arrières.

Rheanne ignorait à quoi voulait échapper Erwelyn mais elle sentait que c’était vital. Elle respirait difficilement mais reprit ses quelques réflexes de défense en dégainant l’épée de son fourreau et prenant son bouclier en main gauche. Position de défense comme le lui avait appris son maître d’armes privé, elle était prête à en découdre fermement avec les poursuivants de sa Cheffe vénérée.
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Pour le Maine et pour sa blonde chez les nonnes

Erwelyn

Et voilà que Rheanne s’était mise à courir. Y’avait pas à dire, son nouveau joujou était drôlement obéissante. D’ailleurs, elle passait ses journées à opiner du chef depuis que sa formation avait commencée, Lynette avait donc bon espoir que tout ce qu’elle avait essayé de lui fourrer dans le crâne était rentré et déjà bien assimilé. Ben oui, sinon elle l’aurait arrêté, lui aurait posé des questions, enfin ce genre de choses quoi. Mais non, sage comme une image qu’elle avait été la Rheanne, même pas un « J’ai envie de pipi » ou « Quand est-ce qu’on arrive ? ». Vraiment, son choix avait été le bon, elle l’imaginait déjà fort bien reprendre le poste de chambellan les doigts dans le nez. Enfin, pas vraiment dans le nez, c’est imagé. Imaginez un chambellan les doigts dans le nez en train d’accueillir un diplomate, c’est pas très protocolaire cette histoire.

Comme dans les histoires chevaleresques racontées aux enfants devant l’âtre un soir de pleine lune, ou pas pleine d’ailleurs, elle s’imaginait la scène : Rheanne courant, Erwelyn galopant, la brune attrapant la main tendue de la châtain-foncé-non-chuis-pas-blonde-j’vous-dis, celle-ci soulevant la vice chambellan dans les airs, qui atterrirait tel un chat derrière son dos et vogue la galère. Et évidemment, Lynette aurait ponctué la scène par un « j’adore qu’un plan se déroule sans accroc ». Bel effet de style en somme.
Mais non, rien ne se passa comme prévu.

Continuant à trotter dans l’entrée de la cour, Rheanne s’était de son côté mis en tête de courir derrière elle, mais sans monter sur sa jument. La main toujours tendue, Lynette zieutait aussi les grilles en avançant histoire de ne pas se les prendre de plein fouet. Aucune envie de se retrouver avec une grille imprimée sur le visage durant le voyage, ça aurait été du plus mauvais effet. Entre deux coups d’œil, elle essayait de comprendre ce que sa vice et presque chambellan voulait lui dire.

Attaquée ? Qui oserait faire une chose pareille ?
Je la défendrai corps et âme ma Chancellerie si quelqu’un s’y essayait !
Voilà ce qui attend le malandrin qui s’aventurerait à ça !

Freinant des quatre fers, le chambellan s’escrima à sortir son épée de son fourreau. Epée qu’elle n’avait pas du sortir depuis, pfiooouuu, au moins tout ça… Sans oublier qu’elle savait manier une épée comme une vache parle espagnol. Ou angloy, au choix, de toute façon ça revient au même parce qu’une vache ne sait pas parler. Finalement, elle réussit à sortir son arme à moitié rouillée par le temps, s’écorchant un doigt au passage.

Aiheu !

La mine boudeuse, elle porta son index où perlait une goutte de sang à sa bouche.

Oui, enfin, un truc dans le genre quoi…

Avant d’être rappelée à la réalité par le cri de Rheanne. Baissant la tête, le doigt toujours collé aux lèvres, elle ouvrit de grand yeux en voyant sa vice s’étaler comme une crêpe sur le sol. Bon sang, les deux femmes n’étaient pas sorties de l’auberge, voilà qu’elles étaient aussi maladroites l’une que l’autre…
Rouge pivoine, la brune se remit sur pied en s’époussetant et sortit à son tour son épée.
Diantre ! Elle aussi était prête à défendre farouchement l’ambassade du Maine. Pour un peu, Lynette en aurait pleuré d’avoir trouvé une personne si dévouée à son Comté. Sauf qu’elle avait déjà trop versé de larmes dans la journée, ça aurait été abusé tout de même.

Bouclier en main, la brune était tournée vers l’entrée du bâtiment. Henry était-il déjà ressorti de la salle des archives ? Tirant sur les rênes, Erwelyn fit faire demi-tour à Tralala, s’attendant à voir arriver en courant l’intendant mainois, mais la cour restait complètement vide.
Et voilà que la brune voulait maintenant qu’elle se sauve…
Fronçant les sourcils, elle accueillit les paroles de Rheanne d’un simple :

Gné ?
…

Puis elle essaya de la raisonner

Me sauver ?
Mais enfin Rheanne, je peux pas partir sans toi, oublies pas que c’est pour ta formation qu’on fait ce voyage !

Il y avait deux solutions, soit la brune était devenue folle soit… euh ben en fait y’en avait qu’une finalement, parce que Lynette ne comprenait pas trop pourquoi elle voulait tant assurer ses arrières si Henry ne s’était pas pointé jusqu’ici.
Les rênes encore bien en main – il ne s’agirait pas que Tralala se fasse la malle non plus, ça aurait été le bouquet – elle descendit de sa jument et s’approcha de la brune, l’air rassurant et confiant.

Du calme Rheanne, je sais que je t’ai demandé de nous protéger si jamais on se faisait attaquer sur la route, mais pour l’instant, tout va bien. Mes arrières vont bien, tu peux ranger ton épée.
En tout cas, je suis rassurée avec toi, les brigands n’ont qu’à bien se tenir !

Ouah, quel excès de zèle tout de même, Lynette était épatée !
Se dirigeant vers les bagages de la brune, elle les souleva, étonnée de leur poids. Qui aurait cru que la brune se chargeait autant pour partir en voyage ? Pour sa part, elle n’emportait toujours que le stricte minimum, deux robes pour les ambassades, au cas où un incident fâcheux survienne sur l’une des deux, et les habits qu’elle mettait pour voyager, ceux qu’elle avait sur elle et dans lesquels elle se sentait le plus à l’aise. Ce qui pesait le plus lourd dans sa besace était les bouteilles de liqueur de poire qu’elle n’oubliait jamais en partant.
Finalement, sa vice était beaucoup plus coquette que ce qu’elle essayait de faire croire…

Rapidement, elle attacha fermement les bagages, surveillant régulièrement l’entrée de l’ambassade. Elles avaient déjà perdu beaucoup trop de temps, Henry ne tarderait pas à sortir pour lui demander si ces fameux formulaires existaient vrai…

Cornefianchtre ! Le voilà !

Et en effet, voilà que l’intendant dévalait les marches du perron, fondant droit sur elles. Grimpant sur Tralala, elle tendit la main en direction de Rheanne, jetant des coups d’œil affolés au vieux qui avait déjà parcouru un tiers du chemin. Heureusement que son âge ne lui permettait pas de se mettre à courir comme un dératé sinon elle allait encore se prendre un savon et serait en prime obligée de se taper tout le voyage en voiture.
D’une voix ferme et autoritaire qui ne laissait aucune possibilité à une réponse négative, Erwelyn se baissa et attrapa la main de Rheanne.

Rheanne, dépêches-toi, monte !
Nous devons y aller, viteeeeeeeeuuuuhh !
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Rheanne

Alors que Rheanne était prête à en découdre, vlà t'y pas que la Chambellan fit demi tour et la rejoignit. Elle allait réitérer son conseil de fuir au plus vite mais Erwelyn semblait vouloir elle aussi défendre les lieux. Soit, elles ne seraient pas trop de deux.

La Cheffe descendit de cheval et voilà qu'elle commence à vouloir calmer la Rheanne alors que celle-ci était encore sous le coup de ses palpitations cardiaques. Mais comment pouvait-elle ainsi sourire et parler d'un ton calme alors que l'instant d'avant elle lui hurlait dessus de courir. Elle allait vraiment passer de sage petit mouton à chèvre dans le voyage qui les attendait. Enfin, si elles sortaient vivantes de l'attaque de la Chancellerie. Car Rheanne en était persuadée, elle ne voyait pas d'autres alternatives à la situation d'urgence des quelques minutes précédentes.

La Chambellan se rapprocha un peu plus de son jouet et tenta de la calmer. Le ton était calme et assuré. Rheanne s'était-elle fourvoyer ? Aurait-elle mal compris la précipitation de sa Cheffe ? Etait-elle si pressée de partir sur les routes ? Pourtant quand on fuit, ce n'est jamais rien de bon.
Obéir. Obéir.

Elle se détendit légèrement. Et suivit Lynette qui voulait s'occuper des bagages. Elle ne fit aucun commentaire et se chargea de les attacher à son destrier. Là, Rheanne blémit d'un coup comprenant avec effroi ce qu'Erwelyn avait prévu pour ledit voyage.
Avant de débarquer dans la cour de la Chancellerie, elle s'était attendue à voir un attelage avec un ou deux chevaux apprêté pour l'occasion. Mais elle n'avait rien vu de tel à part une folle se dirigeant vers elle à cheval.

A cheval. C'était donc ainsi que Lynette entendait se promener. Et là c'était loin d'être du goût de la vice chambellan.
Elle ne pouvait plus bouger et restait interdite tout en regardant l'autre s'affairer. Il était hors de question qu'elle monte sur cette bête. Il y a plusieurs mois, Altea avait promis à son amie de lui faire passer sa terreur des chevaux. Mais la oupsante n'en avait pas eu le temps avant de s'en aller chez les nonnes. Et Rheanne, même si elle avait perdue sa blonde, s'était réjoui d'échapper ainsi à ce genre de torture. Elle ne tolérait que peu ces bêtes énormes à quatre pattes. Tout juste si elle pouvait passer à côté d'un attelage. Alors monter dessus, Lynette pouvait bien s'y essayer, elle ferait de la résistance.

Elle serait même prête à démissionner sur le champ. Et tant pis pour la Diplomatie et tant pis pour le Maine. Elle se serait bien coupée les veines pour sa terre mais monter sur une de ses bestioles, jamais !!

Erwelyn sembla paniquée et sauta derechef sur sa bête. Et Rheanne de rester immobile. Regardant la main tendue vers elle, elle releva la tête vers la cavalière et fit non de la tête. Tout d'abord doucement, puis dans un mouvement de plus en plus appuyé.
Non elle avait dit qu'elle ne monterait pas, alors elle ne monterait pas.

Cheffe jetant de nombreux coup d'oeil vers la cour, Rheanne suivit son regard. Un homme arrivant en courant (enfin disons claudiquant comme il pouvait). C'était donc ça la menace ? Le fameux intendant ??

La Chambellan rappela son élève à l'ordre et lui intima de grimper.

Non Non Non!!! Plutôt mourir que de monter là dessus. Je préfère autant courir durant tout le voyage à côté que de poser mon séant sur cette bête.

Erwelyn lui attrapa la main fermement. Rheanne tenta d'y échapper mais bon sang, qu'elle a de la poigne celle là.

C'était trop pour Rheanne. Elle devait obéir mais ne pouvait pas s'exécuter. Elle avait une sainte horreur de ces animaux et là on lui demandait de faire corps avec un des ceux là pendant de longues heures. Elle aurait voulu retirer sa main et se pelotonner dans la poussière et pleurer comme une enfant ayant cru apercevoir le croquemitaine dans un coin de sa chambrée. Il lui sembla perdre pied et devenir complètement folle.

Mais elle se rendit compte rapidement que ses pieds ne touchaient réellement pied. Erwelyn faisant fi de sa crise de nerfs et des larmes qui commençaient à monter aux yeux, avait réussi à soulever quelque peu Rheanne en la basculant contre sa jument.

Sentant le contact du cuir vivant sous sa main libre, Rheanne eut un haut le coeur. Que faire ? Se débattre pour que la Chambellan lâche prise ou bien obéir et se laisser faire ?
Elle n'eut pas le loisir de trop s'attarder à sa réflexion car déjà une énorme pierre se rapprochait dangereusement. Enfin c'était plutôt le trio qui s'en rapprochait...
Si Rheanne ne bougeait pas, elle aurait tôt fait de s'y étaler. Et la chute sur les bagages aurait un goût de Reviens-y à côté de ce que la pierre lui promettait.

Elle n'avait donc plus le choix. Elle prit appui sur la bête de sa main droite libre et s'essaya à lever sa jambe gauche. Gros frisson de dégoût. Et juste avant la roche, elle réussit à passer sa jambe par dessus la croupe de l'ignoble animal.
La voilà maintenant à califourchon derrière Erwelyn lui enserrant la taille à l'empêcher de respirer.
A chaque pas de la jument, Rheanne sentait son coeur défaillir et manquer de s'arrêter.
La nausée la gagna rapidement alors qu'elles s'éloignaient de la Chancellerie.

Pâle et le visage ruisselant de larmes, Rheanne ne pouvait contrôler sa peur panique.

Pitié Lynette. Pitié. Arrête cette rosse. Il faut qu'on s'arrête. Je vais pas bien du tout.

Si la chevauchée imprévue ne cessait pas rapidement, Rheanne aurait tôt fait de vomir ses tripes en pleine lancée.
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Pour le Maine et pour sa blonde chez les nonnes

Erwelyn

Trop concentrée sur le fait d’échapper à la prise de tête qui ne manquerait pas d’arriver si l’intendant réussissait à leur tomber dessus, Lynette n’avait pas du tout fait attention à l’angoisse qui montait peu à peu chez Rheanne. Sa main avait attrapé fermement son avant-bras et la vice chambellan décollait peu à peu de terre. Encore un peu et elle réussirait à monter sur Tralala pour qu’elles filent enfin de là. Un non de la tête, voilà que le visage de la brune se crispait de plus en plus. Pendant un instant, elle crut que le refus venait du fait que leur intendant leur courait après. C’est vrai quoi, faire courir un vieux, ça s’fait pas. Mais bon, si c’était Henry, si ça s’faisait d’abord.

Aller Rheanne, ne t’inquiètes pas, j’lui fais tout le temps le coup à Henry, il m’en veut pas pour autant ! Pis on part un moment là, il aura oublié au retour, j’crois qu’il est un peu sénile le vieux à force…

Après ces paroles réconfortantes, Erwelyn espérait que Rheanne se calme un peu et qu’elle se décide enfin à enfourcher « la bête ». En plus, la brune avait de la chance, depuis quelque temps, Tralala s’était nettement calmée. Il fut un temps, elle aurait fini par cabrer et ruer dans tous les sens pour qu’on arrête de faire joujou sur son dos. Mais là non, sage comme une image qu’elle était sa jument. Tout comme sa vice lorsqu’elle suivait ses cours de diplomatie. Mais non, c’est pas qu’elle la comparait à un cheval non plus…

Bref, le fait de lui expliquer qu’Henry n’allait pas lui coller une fessée s’il les attrapait n’eut pas l’air de calmer la jeune femme, dont l’anxiété montait à vue d’œil. Elle ne voulait pas monter, et ce n’était pas à cause de l’intendant qui d’ailleurs, se rapprochait de plus en plus dangereusement. Avait-elle peur de Tralala alors ? La réputation de sa jument l’avait-elle précédée ? Elle l’avait peut-être vu faire des siennes sur les terrains de soule, à l’époque où Erwelyn était encore capitaine des Écureuils et qu’elle avait proposé à Rheanne d’intégrer l’équipe.
Encore une fois, elle prit une voie douce, tout en tirant un peu plus fort sur le bras de la pauvre brune complètement paniquée.

Faut pas avoir peur de Tralala tu sais. Bon d’accord, elle a un sale caractère, mais elle s’est calmé ces derniers temps, j’te promets !

Henry n’était plus qu’à quelques mètres d’elles, et Lynette commença à faire avancer sa jument, tout en essayant de tirer un peu plus fort Rheanne pour l’aider à monter.

Aller je t’en prie Rheanne, il faut monter !

Enfin, ses prières eurent l’effet escompté, et juste avant qu’Henry ne les rejoigne, la brune réussit enfin à grimper sur le canasson. Talonnant sa jument, Lynette partit au galop, laissant retomber la pression en un grand éclat de rire. Y’avait pas à dire, quand elle réussissait à jouer ce tour là à son intendant, elle était on ne peut plus fière d’elle.
Sauf que son rire fut vite étouffé par une Rheanne qui la serrait à lui en faire perdre le souffle. Tout en essayant de garder l’allure, la cavalière souffla à sa passagère.

Euuuuh… Rheanne… tu peux… serrer moins… fort s’il te plait ?

Mais non, encore une fois elle avait l’impression de parler dans le vide. Tudieu, si les voyages rendaient Rheanne dans cet état, elle aurait du mal à tenir le poste de chambellan dans le futur. Ou alors il faudrait peut-être qu’elle teste la camomille avant…
Prise encore dans l’étau de ses bras, Lynette jeta un coup d’œil à la brune.
Le spectacle qu’elle vit lui coupa encore plus la respiration. La peur panique de sa passagère était encore plus présente. Des larmes ruisselaient sur ses joues et son visage était blanc comme un linge.
Le galop les ayant emmenées déjà loin de la Chancellerie, Erwelyn tira sur les rênes pour faire stopper sa monture. Une fois arrêtée, elle se retourna vers la brune, inquiète.

Mon Dieu Rheanne mais…

Et enfin, elle comprit. Lynette comprenait vite, mais fallait lui expliquer longtemps.
La trouille, c’est tout.
Rheanne avait une peur bleue des bestioles à quatre pattes, ça ne pouvait être que ça. Mais pourquoi diantre ne lui avait-elle pas expliqué avant ? Bon sang, Lynette ne mordait pas tout de même.
Descendant de cheval et gardant toujours les rênes en main, Tralala ayant une fâcheuse tendance à filer dès qu’on ne la surveillait pas de près, Erwelyn attrapa la brune restée perchée tout là-haut et l’aida à retrouver le plancher des vaches.
Elle sortit un mouchoir de la poche de sa cape qu’elle mit dans la main de la jeune femme.

Rha là là, tu ne pouvais pas me dire que t’avais peur des canassons ? Et moi qui te forces à monter dessus, tsss.

Bras croisés, elle observa la brune quelques instants, réfléchissant à la situation. Voyager en cheval faisait gagner un temps certain. Mais avoir une vice chambellan qui vomirait à toutes les lieues ne leur en ferait pas gagner non plus…
Tapotant le sol avec sa botte, elle prit enfin la parole, se demandant vu la tête de son interlocutrice si elle n’allait pas lui dégobiller son petit-déjeuner sur les braies.

Bon.. et les charrettes, t’as peur des charrettes aussi ?
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Rheanne

Enfin le calvaire de la Vice Chambellan semblait prendre fin alors que Lynette tirait sur les rênes de l'équin. La cavalière venait de comprendre l'origine du problème. Une passagère victime du mal des transports, voilà qui la fichait mal pour la suite des aventures.
Mais pourquoi donc avait-il fallu que la Cheffe affectionne particulièrement les transports à dos de mulets !! Les carrosses étaient pourtant beaucoup plus pratiques et confortables que de chevaucher des heures durant. Enfin, Rheanne se laissait imaginer, elle n'avait jamais eu à vérifier cet état de fait. Et elle n'aurait jamais cru le tester de sa vie.

Alors qu'elle respirait profondément pour faire cesser les nausées, Rheanne leva les yeux aux ciel. Mais qu'avait-elle fait au Très Haut pour qu'Il mette sur son chemin une Chambellan complètement déjantée ? Il était clair que ces derniers temps, elle ne fréquentait plus trop les églises mais tout de même, c'était un peu fort comme punition.

Erwelyn se tourna vers elle et la gronda de n'avoir omis ce léger détail. Car oui cela n'était qu'un simple détail pour Rheanne. Elle s'était toujours bien débrouiller pour éviter ce genre d'incident. Et avec la fuite précipitée de la Chambellan, la névrosée avait été prise de cours.
Lors de son entretien pour le poste de Vice Chambellan, personne ne s'était avisé de lui demander une dissertation sur ses qualités ou ses névroses. Et en parfait petite élève, Rheanne n'avait répondu qu'à ce qu'on lui demandait.
Et puis, elle assumait finalement assez mal cette phobie des équins pour ne pas la crier dans toutes les chaumières. On lui avait déjà fait la remarque sur le fait qu'elle ne possédait pas de destrier, elle avait toujours pris soin de jouer à la péronnelle précieuse et exigeante qui ne supportait les lieues que confortablement installée à l'intérieur d'un carrosse. Et voilà qu'elle venait lamentablement de se faire griller par sa Cheffe. Fort heureusement, l'incident venait d'avoir lieu en petit comité et avec un peu de chance, Erwelyn saurait garder sa langue sur la névrose de son joujou.

Erwelyn descendit de son canasson puis attrapa Rheanne pour la ramener sur la terre ferme. Le sol semblait encore se dérober sous ses pieds et ses jambes tremblaient. Ne pas flancher. Respirer profondément. Ah !! et cette odeur de canasson !! Qu'elle allait certainement trainer sur elle jusqu'à la première étape.
Rheanne fit une moue et saisit le mouchoir tendu pour se le coller devant le nez. Il était certain qu'elle ne supporterait pas ce traitement de faveur. Il fallait absolument qu'elle trouve une solution. Quitte à démissionner et rentrer à pied à la chancellerie pour commander une voiture et rentrer à l'auberge pour pouvoir vider son estomac tout à loisir et se frotter la peau jusqu'au sang pour faire disparaître l'effluve équine qui lui chatouillait nauséeusement les narines.

Te dire que je supportais pas ces bestioles ?
Bah tu m'avais pas poser la question en même temps.
Et je pensais pas que t'avais prévu qu'on se tape tout le trajet à dos de mulet. Tu penses pas qu'il est plus raisonnable pour un Chambellan de voyager en carrosse ?

Raisonnable n'était pas forcément un mot accessible dans le vocabulaire d'Erwelyn. Pas sûr qu'elle se laisse aussi facilement convaincre. Mais elle serait obligée de se rendre à l'évidence. Une Vice Chambellan toute neuve à présenter ne serait pas du meilleur effet si celle-ci paraissait pâle et amaigrie. Que penseraient les ambassadeurs ? Que le Maine est un Comté d'affamé ?
Sûr que si Lynette avait une once de bon sens, elle saurait lui trouver une alternative.

Tralala maintenue par les rênes, paraissait en effet bien calme et détendue. Et tout à ses occupations, elle ne cessait de fouetter l'air de sa queue. Une légère brise se conjuguant au mouvement ramena une énième effluve dans les narines de la brune, ce qui fut la goutte d'eau. Enfin l'odeur de trop.

Rheanne posa sa main devant sa bouche pour retenir la nausée. Elle se pencha en avant et finit par s'agenouiller. Ne pouvant pas retenir plus longtemps ce qui semblait inévitable, elle posa ses mains sur l'herbe fraiche et y déversa le contenu en cours de digestion de son estomac.

Bon.. et les charrettes, t’as peur des charrettes aussi ?

Ne sachant si c'était le délestement de son estomac ou la remarque de Lynette qui la fit se sentir mieux d'un coup, elle finit par s'asseoir, s'essuya la bouche avec le mouchoir et leva les yeux vers sa Cheffe.

Charrettes ? Pourquoi veux-tu que j'ai peur des charrettes ?
Ma foi, c'est une très bonne idée. Enfin du moins, pour moi.

Se levant péniblement, elle vacilla légèrement – le ventre vide, ça n'aide pas à retrouver ses esprits. Elle jeta un oeil au canasson chargé comme une mule et sourit.

Je pense que cela ne déplairait même pas à ta « Tralalère » de se décharger un peu de mes bagages.

Elle se sentait gênée d'avoir autant chargé la mule en emportant autant d'effets mais elle avait vraiment pensé qu'elles voyageraient dans d'autres conditions et elle ne savait pas ce que devait être une garde robe de diplomate.

Regardant autour d'elle, ne voyant aucune masure ni ferme dans les environs.

Mais où est-ce qu'on va trouver ça ?

Sentant le piège se profiler.

Ah non, pas question que je remonte là dessus même ne serait-ce que pour trouver une carriole.

Le ton était ferme et sans négociation possible. Même si l'estomac était vide, rien ne semblait l'empêcher de rejouer au rebelle.
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Pour le Maine et pour sa blonde chez les nonnes

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Quand deux brunes prennent la tangente

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