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[RP] Carte postale de Corse

Semias
[De Montaigut...]

Fichus Conseillers Ducaux qui ne parlent que de chiffres, de calculs et d'estimations ! Comment pouvait-on s'exalter devant une feuille remplie d'équations aussi parlantes d'une meute de carpes ? Non, franchement ! Il faudrait songer à les enfermer, des gens pareils. Plus qu'un danger pour eux-même, ils l'étaient avant tout pour les autres. Parce que le Balsac était solide mentalement, mais pour le coup avait grand mal à résister. Et puis... Les relations diplomatiques avec on ne sait quel Duché du fin fond de la France étaient sans nul doute intéressantes. Les premiers jours du moins. Aussi, il fallait l'avouer, il commençait à trouver le temps long.

Blanche...

Oui, la pièce de vélin devant lui était toujours blanche. C'était d'ailleurs bien la seule, en réalité, puisque de toute part, la table qui servait de bureau était envahie de rouleaux en tout genre. Les traités, voilà sans doute ce qu'il y avait de plus ennuyeux, en somme.

Réflexe acquis depuis qu'il savait coucher les mots sur le papier, quoiqu'à ses débuts, il s'agissait sans doute plus de caractères difformes que de mots, le fils Balsac porta l'extrémité de la plume en sa bouche, adoptant alors un regard pleinement inexpressif pendant un instant. Puis, lentement, la plume quitta la bouche, s'approcha du vélin jusqu'à l'effleurer. Et de nouveau un arrêt. La main, hésitante, recula. De toute évidence, la composition qu'il avait devant lui n'avancerait guère. Le cousin-Duc lui avait donné une tâche ardue cette fois-ci.

Blanche...

Oui, la pièce de vélin l'était définitivement. Tout comme le rebord de la fenêtre. Alentour, il semblait encore faire bien froid d'ailleurs, et Montaigut avait lui aussi revêtu cette inlassable teinte blanche, du moins était-ce ce qui transparaissait au travers des carreaux embués du bureau. Fallait-il y voir un signe ?

Blanche !

La main s'approcha une nouvelle fois du vélin, et cette fois, s'avéra bien plus productive que durant l'heure précédente. L'inspiration n'était finalement qu'une affaire de temps, il lui faudrait s'en souvenir. A moins que ce ne soit le sujet qui lui était soudainement venu à l'esprit ? Quoiqu'il en soit, l'extrémité de la plume glissait désormais à une vitesse folle, s'arrêtant de temps à autre pour plonger dans le pot à encre, faisant par moment crisser discrètement la matière.


Citation:
A Montaigut en Combraille, le vingt-deuxième de février mil quatre cent cinquante-huit.

A l'indéchiffrable cousine qui, fatalement, intrigue,
Salutations.


Vous ayant deviné plus joueuse que ne le laissait présager votre éducation, permettez-moi de vous convier en mon bureau de la chancellerie clermontoise. Il est certain qu'ici l'ennui s'avère édifiant et qu'alors qu'il me faut rédiger quelque texte diplomatique, me voilà à coucher plus d'un mot à votre attention.

Et d'ailleurs, cela ne m'étonne guère, vous êtes bien meilleure source d'inspiration.

N'ayez crainte cependant, devant le forfait que vous avez déclaré face à ma précédente lettre, j'ai renoncé pour cette fois à y glisser une quelconque énigme. A moins que je ne me laisse tenter, finalement ?

Ensuite il n'appartient qu'à vous de creuser vos méninges. Vous êtes bien plus maligne que vous ne me le laissez entendre. J'espère qu'il ne s'agit pas d'une de vos ruses pour m'inviter à abuser de vos présupposées faiblesses. Prenez garde d'ailleurs, je cède aisément à ce genre de tentation, au grand dam de mon confesseur...

Zeste de ce qui vous attendra en ces lieux, vous trouverez, jointe à cette missive, ce qui fera également office de droit d'entrée. Pardonnez-moi de ne plus en raconter, il vous faudra trancher avec si peu. Tâchez de ne pas la perdre, auquel cas nous nous verrions bien embêtés pour poursuivre l'activité que je vous propose.


Cordialement,

S. de Balsac Penthièvre.


Le jeune homme releva la tête, parcourant déjà du regard la lettre fraîchement rédigée. Oui, cela semblait bien. Il replia le vélin et se leva. Fouillant dans la besace qu'il avait ramené avec lui de Clermont, il en ressortit un tas de cartes. Décidément, les bohémiens pouvaient s'avérer utiles, en plus d'être divertissants. Il tourna la première du tas, puis la seconde, et glissa la troisième dans le pli. La jeune femme couronnée qui y était dessinée se prêtait parfaitement à l''occasion. Il scella alors le tout.


[... A Clermont]

Quelques jours plus tard, affalé dans son fauteuil de Chancelier, les talons de ses bottes reposant sur le bureau, il tenait en main un exemplaire d'un texte qu'il tentait d'assimiler. Hélas, une nouvelle fois ses pensées furent absorbées par un sujet tout autre. Quelle drôle d'idée avait-il pu avoir là, en fait ? L'impression que quelque part, à des centaines de lieues, la demoiselle trouverait ça intéressant, sans doute, ou bien ludique, peut-être ? Quoiqu'il en soit, les quelques échanges avaient fini par lui manquer bien trop rapidement. Et il ne regrettait pas cet envoi.

Mais bon dieu, qu'il était parfois difficile de se mettre à la tâche.

_________________
Blanche_
[... à Roc'han]

Princesse ? Prin-ceeeesse ?
Hum ?
Une lettre. De... de Sssssss.
Sss ?
Ssss.


Elle soupire, s'extirpe de sa position nonchalante devant sa fenêtre, où elle goutait aux bien-faits d'une cure de soleil, et se dirige à pas énervés vers son valet, des mains duquel elle arrache le vélin voyageur.
Ssss de Balsac, inculte ! Mon grand oncle par alliance, petit cousin du tonton du fils par adoption de... Sss, quoi !
Bordel, je suis entourée que par des illettrés. Dégage de ma vue, et va ferrer mes chevals, idiot !
Chevals ?
DEHORS !


Hormones en ébullition, comme depuis qu'elle doit s'occuper seule de son potentiel mariage avec l'éclopé français le plus agaçant, la blonde bretonne savoure la lecture de la missive, once de calme dans son champ de bataille.
Alors, profitant de l'accalmie passagère, elle pose un arrière-train royal au sommet d'une colline de fringues, et entame sa réponse à son parent à la plume si légère, et à la drague si discrète.


Citation:
A Vous, S. de notre B, Petit cousin par alliance, ou grand tonton selon les envies,
De Nous, PdD, Délice Breton s'il en est.
Noz vat,

Il était bien tard, mon cousin, lorsque j'ai reçu vostre missive. Mais l'envie m'était si grande, de connaitre le fond de vostre pensée, que j'eus pu tout aussi bien la lire à la lumière d'une bougie, et que l'excitation ne m'en aurait pas été moins grande.
Déception... Il n'est nulle part question de cailloux, or c'est par là que tout avait commencé. Je vous en prie, répondez moi vite, et éclairez moi en géologie, car je suis friande de ces pierreries glaciales.

Permettez que je garde en otage cette délicieuse illustration. La gente damoiselle me ressemble assez, si on regarde bien. Mis à part ce profil qui ne la met pas du tout en valeur, et ce colifichet ridicule qui s'impose à son apparat. Quelle idée, que de parader avec ce misérable pic à son coté...
On m'informe qu'elle en est la Reyne. Choix judicieux...

Un jeu de carte, donc ? Il me tarde de vous voir perdre. Préparez la France a subir l'une de ses plus pitoyables défaites... car il n'est pas de règle que j'ignore.

Votre cordiale ennemie,
Gwenn.

_________________
Semias
[Et à Montaigut, la boucle est bouclée]

Dix heures du matin, ou approximativement. Le soleil semble enfin poindre derrière ces fichus nuages qui ternissent le ciel depuis... Fiuuuu ! Une éternité, au moins ! Et le Balsac, exténué de devoir chaque jour travailler d'arrache-pied, se réveille à peine. Allongé sur le ventre (ça ne servait finalement pas à grand chose de se coucher assis...), les yeux encore à moitié endormis, il aurait bien profité d'une grasse matinée. Un peu plus grasse encore, en fait. Mais (Saleté de valet !) on avait ouvert le rideau qui passait devant le carreau et désormais il devenait difficile de feindre le sommeil...

Les yeux s'habituèrent à la clarté inhabituelle de la chambre à coucher. Et puis, le jeune Balsac se leva. Lahire, le fidèle valet, se tenait debout à proximité de la porte, et une demoiselle à ses côtés tenait en ses mains quelques victuailles réservées au petit-déjeuner. Caractéristique du jeune noble au réveil ? Il était d'une humeur exécrable, en règle générale. Aussi, lorsqu'il s'extirpa du lit entièrement nu, et que la servante tourna poliment la tête, il maugréa. Vexé ? Ptet bien...


"Hmpf... Jamais vu un homme ou quoi ?... Tssss ! 'Core une nouvelle ça..."

Lahire, le valet, s'empressa de lui apporter de quoi se vêtir sommairement, sorte d'ignoble chasuble dans des tons ocres. M'enfin ça suffisait bien pour ne pas prendre froid durant la séance d'habillage, moment crucial de la journée s'il en est.

"Une lettre d'une certaine Gwenn est arrivée.
- L'as-tu au moins apportée ?
- 'turellement !
- Tu t'améliores..."


Le valet tendit la lettre, et le jeune Balsac la saisit d'un geste sec. Il s'approcha de la fenêtre, déplia le message à la lumière du jour et le parcourut des yeux. Un sourire s'afficha au coin des lèvres, s'étirant à mesure que la lecture avançait. Si seulement toutes les cousines pouvaient être aussi originales... Il s'approcha d'une petite table où l'encrier est toujours prêt à servir.

"Pour le déjeuner nous...
- Plus tard !
- Heu... Oui !
- Va, et laisse-moi réfléchir, je te chercherai quand j'aurai fini."


Le personnel de maison quitta la pièce discrètement. Le fils Balsac était déjà penché sur le vélin.

Citation:
A G, ou peut-être est-ce B, auto-proclamé délice breton auquel il me tarde de goûter,
Salutations, naturellement.


De mon côté, il est fort tôt lorsque je vous lis. A croire que les messagers des terres du ponant travaillent la nuit durant également, sans même dormir avant de n'avoir trouvé leur destinataire. Je n'ose imaginer combien ils doivent endurer, de fait. Soyez assurée que l'envie de vous lire est toute aussi grande, néanmoins, fut-ce au réveil. J'en ai même oublié de me repaître avant de prendre la plume, pour tout dire.

Naturellement, vous pouvez conserver la carte que je vous ai fait parvenir, ou du moins le pourrez-vous une fois que nous en auront terminé avec elle. Le pique me semblait en effet approprié, à premier abord, bien que Pallas, voici son nom, représente d'avantage la sagesse que la vivacité. Cette carte saura devenir le souvenir d'une défaite cinglante. Car la France vous attend, et se prépare d'ores et déjà à mettre un terme à vos vains espoirs de victoire. Avec l'art, et la manière, bien entendu.

Aurez-vous le courage de faire la route ?


Cordialement,

Le Balsac.


La lettre pliée et cachetée, le nom du valet retentit dans les couloirs de Montaigut. C'est qu'il aurait pu rester en place, le nigaud... La lettre était d'importance !
_________________
Blanche_
Il la séduit. Ouvertement. Essaye, là où tant se sont brûlé les ailes... Mais la lumière attire toujours. Les joyaux, la beauté, la parure en façade qui cache un dessous moins reluisant.
Elle n'en a cure. S'amuse, frivole, vogue où le jeu la mène, en l'occurrence sur un chemin bien long jusqu'à son cavalier du soir.

Trèfle.
Vert, sombre, lueurs parfois de quelques demeures dans les sous-bois. Terrée au fond du carrosse, mules ôtées de ses pieds endoloris, elle guette. Silhouette effacée entre les coussins brodés, qu'un chemin escarpé, parfois, sort d'une rêverie profonde.
Sémias.
Le nom lui est rabâché, sans repos. Par sa sœur, ses amis... Il a suffit qu'elle énonce en public sa parenté éloignée avec l'héritier, pour que les rumeurs tissent des liens invisibles. Alors elle est là, gâtée, amusée autant par son emportement que par la soirée qui s'annonce délicieuse, et la partie de chasse qu'il lui propose. Le Balsac, bien plus aguerri qu'il n'y parait. Mais on n'a pas besoin de croquer la pomme pour en connaître le goût...

Carreau.

Ils défilent, sous ses pas. Le claquement sourd de ses vénitiennes sur le sol glacé, le passage furtif d'une étoffe sombre sur une avancée carrelée sombre et clair. Pierres grises, pierres noires... Qu'elle enjambe docilement, brebis égarée à la recherche de son berger. Il lui avait dit, qu'ils parleraient de cailloux... Elle sait maintenant.
Arrivée devant la porte. Close, mais l'ouverture lui est acquise. Il lui faut décider.
Indécision qui la gagne, car elle sait à quoi engage l'entrée dans son sanctuaire. Partager bien plus qu'un vélin mensuel, bien plus que des mots échangés par pure convenance.
Et la carte, dans ses doigts inquiets, qui trahit par un crissement clair son angoisse profonde.

Pic.

Elle pique, tord, joue, blesse, s'amuse. Se prépare à goûter à sa soirée, à l'amusement qu'il lui propose. Aux éclairs de joie, à la frustration et l'excitation de la chasse...
Traquer. Elle l'a suivit, en proie docile, jusqu'à sa tanière reculée. Elle s'offre, s'incline, se laisse dominer un instant, suffisant pour qu'il la croit à ses pieds.
Et lorsque le Leu se croira sauf, elle renaîtra en phœnix désabusé, et laissera jaillir de ses cendres un ramage flamboyant. Elle est pure, immaculée, mais aussi sauvage que les Hermines, et aussi peu obéissante qu'une indigène. Farouche jeune fille, idiote parfois, qui toque désormais, et déclare ouvertement le début de la partie.

Cœur.
La Reyne entre. Gants de velours blanc à ses doigts frigorifiés, qu'elle ôte avec lenteur. Lorgne d'un œil amusé l'effet sur son public.
Et après un moment d'une longueur insupportable, elle supplante le silence de sa voix cristalline :

Noz vat, mon Cousin.
Elle ne faillit pas. Cache, avec un talent incroyable, le rythme effréné de son cœur qui bat la chamade. Et la peau, pâle comme la mort, qui défie de sa blancheur son observateur privilégié. Elle tend la carte, Noire Reyne au Roy Carmin.
On ne peut décemment pas mettre en doute le courage breton, Sémias...

Mais il sera assez tôt pour tester le tien...
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Semias
Aurait-il du parier sur cette entrée pour le moins théâtrale ? Il n'en avait aucune certitude, et pourtant il l'avait pré-sentie. Une raison peut-être pour que lui-même, dans une position bien informelle, l'accueille en Auvergne avec un sens du drame finement aiguisé, et prêt à trancher. Car à l'heure ou la Bretonne pénétrait dans le bureau, le fils Balsac, lui, faisait mine de lire quelque parchemin hautement intéressant. L'on frappe à la porte, le valet en poste depuis le début de la journée l'ouvre, découvrant ainsi aux yeux des deux hommes le divertissement de la soirée. A moins... "A moins que ce ne soit un peu plus que cela ?", savante réflexion mentale dudit valet.

Joker !

Un gant tombe, puis le second. D'un oeil faussement surpris, et sans doute bien plus intrigué, le nobliau observe la scène. Quelle douleur de voir le dépouillement arrêté d'aussi bonne heure. Plus franchement alors relève-t-il la tête. La vision prometteuse est pourtant gâchée. Il demeure, en effet, dans la petite salle une chose qui dérange. D'un léger mais autoritaire signe de tête, le Balsac fait sortir le valet. Ils devraient réussir à faire sans assistance, normalement. Et voilà qui est mieux désormais ! Lui ne quitte pas l'invitée des yeux, mélange de ces quelques secondes faisant l'effet d'une éternité, ou d'une poignée de minutes s'égrainant à la vitesse de la lumière.


"Noz vat, mon Cousin."
Ainsi-donc aura-t-elle lâché la première...
"On ne peut décemment pas mettre en doute le courage breton, Sémias...
- Loin de moi cette idée, désormais."


Elle semble en pleine forme, il est donc inutile de s'en informer, ne serait-ce que par politesse, d'autant que la conversation risque de tomber dans la banalité. Le faussement intéressant parchemin qu'il tenait en ses mains s'enroule alors, il le dépose sur un coin du bureau. Et d'un geste, invite la demoiselle à jeter un oeil au coin de la salle. Une cheminée s'y dresse, ainsi que trois fauteuils, installés autour d'une sommaire et petite table ronde de bois. Au centre de cette dernière, un tas de cartes trône, tas dont l'ombre danse sur la table au gré des oscillations de l'âtre.

"Voyez, il manque à ceci l'une de ses pièces maîtresses. Mais puisque vous avez franchi l'entrée, je tends à penser qu'il n'est pas nécessaire de s'en inquiéter."

Un léger sourire vient alors fendre le visage du jeune homme. Celui-ci se redresse lentement, laissant ses bottes retomber au sol. Et sur ses jambes, auparavant croisées négligemment sur le bureau, désormais il se dresse. A pas lents, et ne quittant toujours pas la Bretonne des yeux, il s'en approche, les bras croisés en son dos, jusqu'à se tenir si proche qu'il en aurait entendu les battements de coeur dans la poitrine de la demoiselle... S'il n'avait pas été si bavard, une fois n'étant pas coutume.

"Prenons place, le voyage n'a pas du être de tout repos."

Sans dire mot, il montra d'une main la table au jeu de cartes, et glissa l'autre au dos de l'autoproclamé délice pour l'y accompagner.
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Blanche_
Elle a traversé des déserts brûlants, des blizzards hurlants, des oasis mouillant, des forêt verdoyantes, des... Et tout ça, parce qu'elle le vaut bien.
Et c'est maintenant, qu'elle tremble. Maintenant, que le choix est fait, qu'elle s'est livrée sans trop réfléchir dans l'antre du loup, qu'elle songe à son manque de réflexion.
Regrettes tu, l'immaculée ? Vois tu, ce que tu t'apprêtes à faire ?
Elle obtempère, plus par convenance que par envie. Sous la ribambelle de rubans et de tissus, le corset qui l'enserre bien plus qu'il ne faudrait, son cœur bat la chamade. Alimenté par la pression brûlante de sa main sur sa peau, son esprit s'embrume. Sombre, divague... Et chute dans les méandres de l'indécision.
Ôte ta main, l'homme ! Je ne suis pas n'importe qui.

Alors elle fuit, s'écarte brusquement de ce contact inconvenant, terrassée par un rapprochement inattendu. Elle ploie, s'assoit en face de lui, tandis que sur sa nuque rosie, l'empreinte de sa peau, invisible, semble y demeurer comme par enchantement.
Les obsidiennes se redressent. Fixent, effrontément, leur adversaire audacieux. La partie commence... Enfin.
Alors, d'une main qui se veut sincère, et convaincue, elle fait glisser la fine carte jusqu'à lui. La Reyne se livre, rejoint le Roy. Il y a quelques minutes, le valet les a laissé.

Seuls.
Le constat, tardif, lui vient à l'esprit. Et dévisagée ainsi par un presque-inconnu, elle sent toute sorte de sentiments monter à son esprit, et s'entrechoquer les uns contre les autres sans ordre aucun.
La peur, de se savoir en présence d'un homme, sans aucune protection que son courage, et sa dague attachée contre sa cuisse. Sans aucun échappatoire, si ce n'est l'issue que son seul courage pourrait lui offrir. Trembles tu, Hermine bretonne, de te savoir sans défense face à l'un de tes prédateurs ?
La dextre quitte la table, et fuit en direction des pans longs de sa robe. se faufile sans y parvenir, au plus près de la peau blanche, jusqu'à ce qu'à travers le vêtement, elle sente la lame pointue de son unique arme.

Le désir, alimenté par la chaleur de l'âtre, et l'inexpérience. Elle voit, découvre, sent instinctivement, ce que les souffles croisés semblent se dire. Mais refuse, en victime têtue, de se laisser guider par des hormones en hausse. Il ne sera pas dit, non, qu'elle se laissera ainsi dominer !
Alors elle sourit, mystérieuse, à cet adversaire en face d'elle, et tend une main pâle vers le tas de cartes pour le scinder en deux. Maudissant, malgré elle, le tamtam continu de sa poitrine en effervescence.

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Semias
Douce sensation que celle de cette robe aux étoffes finement travaillées et choisies avec soin. Mais la bête qui l'habite est farouche, et s'échappe bien vite de se contact inattendu. Vexée ? Sans doute pas. Ils prennent place et le jeu de scène continuent. A Rome, pour sûr, on les aurait ovationné du temps de l'Empire... Rater ainsi cette chance pour une quinzaine de siècles. Hmmm, il ne le regrettait pas, à la réflexion. La Reyne rejoignant le Roy ? Oui mais lequel des quatre ? Lui prend place, bien en avant sur le fauteuil, l'air plus imposant qu'il ne le souhaiterait sans doute. Mais il ne souhaite rien manquer au spectacle offert ce soir. Le regard flamboyant de la Bretonne, encore moins. Flamboyant ? L'âtre donne définitivement à l'atmosphère quelque chose de mystique, d'impalbable.

La main de la demoiselle s'avance et coupe le tas de cartes en deux. Une occasion de tenter une nouvelle approche ? Ce serait trop s'empresser. Il attend que la main s'en retourne à sa propriétaire, puis saisit la seconde moitié de tas, la pose sur la première.


"Hmmm..."

Il détourne un instant son regard vers le feu qui crépite, l'air songeur. Dans une main, le jeu de cartes prêt à être distribué, la seconde passe rapidement dans ses cheveux aux teintes blondes. Puis revient à lui. Les pensées qui traversèrent son esprit, à ce moment précis, demeurent inconnues. Quoiqu'il en soit...

"J'avais pensé à quelque variante un peu plus osée du traditionnel ramponneau."

Il commença à distribuer les cartes, désormais les batailles pouvaient débuter. Celle des cartes, celle des mots... Et celle des sentiments. Sentiments en ébullition, d'ailleurs. Un sourire s'installa sur son visage, un sourire mêlant auto-satisfaction et sens exacerbé du défi tendu à l'adversaire d'un instant.

"Mais il serait dommage de vous contraindre à vous effeuiller en une telle saison. Connaissez-vous l'île de Corse, Blanche ?"
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Blanche_
En langage d'jeuns, issu d'un apprentissage laborieux auprès de la Duchesse Azilliz, la Walsh-Serrant aurait pu affirmer, d'un air amusé, qu'elle allait "lui niquer sa race sévère. Même qu'il va pas comprendre son leurma, hein."
Mais Blanche avait aussi, en plus de passé quelques journées en tête à tête avec la zézettée, reçu une éducation étrangère à ce genre de propos. Elle se contenta donc de hocher la tête discrètement, lui indiquant par là-même qu'il allait perdre, et qu'elle était prête à lui mettre la plus belle déconfiture de sa vie.
Il bat les cartes, lui parle d'une île insignifiante au sud de la France. Quand bien même elle était adepte de géographie -ce qui n'était pas le cas, du reste. Aucun intérêt à connaître les provinces françoyses, sa seule patrie lui suffisait amplement-, elle n'aurait pas connu ce petit îlot isolé. Peuplé de braillard et de cochons sauvages, carnivores, aux yeux injectés de sang. Paysages dangereux, comportant falaises escarpées, pas la moindre plaine ni une jolie plage, où elle aurait innocemment pu proposer à ses galants une course de natation.
Non, Blanche n'aimait pas la corse. Elle n'aimait pas le toscan, elle n'aimait pas le soleil, elle n'aimait pas le Diu vi Salvi Regina, elle n'aimait pas le fromage puant, elle n'aimait pas les chèvres. Mais si elle avait connu des rebelles résistant à l'envahisseur, pour sûr, elle les aurait aimé.


De nom seulement, mon cousin. Mais j'avoue connaître et apprécier le jeu qui porte le même nom.
Vous n'avez pas peur de vous abimer les doigts, Sémias ?

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Semias
A s'abimer les doigts tour à tour, il avaient finalement pris malin plaisir. Non pas qu'un élan de masochisme se soit emparés d'eux, ou du moins n'était-il pas plus grand qu'à l'accoutumée, mais comme deux grands enfants qu'ils étaient encore, ils profitaient de ce moment d'insouciance parfait pour s'amuser. Simplement. Une main frappa l'autre, un sourire s'afficha aux lèvres de la demoiselle, et le Balsac, bien que ne sentant plus grand chose de cette main endolorie, ne put retenir une grimace.
Par chance, il avait précautionneusement ôté la chevalière léguée par son père et qu'il portait d'ordinaire. Ca n'atténuait pas de grand chose la douleur perçue à chaque coup, mais c'était tout de même mieux que rien... Et puis, reprenant bien vite une expression du visage plus joviale, il tenta une pique.


"On m'avait conté les Bretons particulièrement puissants, je constate qu'il n'en est rien !"

Le visage se fendit d'un sourire narquois pendant qu'il récupérait le tas de cartes au centre de la table.

"Quoiqu'il en soit, je n'aurais pas pensé nos premiers contacts physiques aussi... Passionnés !"

Faisant ainsi référence à l'ardeur qu'ils déployaient tous deux dans le jeu, il ne put retenir un rire discret. Passionné... C'était sans aucun doute le sentiment qu'il éprouvait depuis qu'il l'avait croisée lors de cette soirée à l'Hostel de Gilraen. La seule chose qu'il avait retenu de "la petite sauterie" ? Oui, à défaut du nom de l'organisatrice, bien trop âgée de toute façon... Le regard aiguisé en direction de la Bretonne, il attendait ses réponses. Elle ne se laisserait pas faire de la sorte, il l'aurait parié sur le vieux Pâté-en-Croûte* (pauvre bête !). Et profitait en même temps, le plus discrètement qu'il pouvait le faire, des courbes que la robe de la demoiselle lui offrait à la vue.

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*Pour info : Pâté-en-Croûte est la mule qui fut offerte à Semias, par une mère un peu trop protectrice qui avait peur qu'il tombe de trop haut, en guise de première monture. Une bête vieille avant même d'avoir été jeune, aussi rapide qu'une limace descendant une pente raide, et au caractère bien trempé. Une bête si vieille qu'elle en vit encore...

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Blanche_
La Reyne épousa son Roy, se coucha sur lui sans moins de protocole. Le repoussant sur la table, elle l'agrippa à elle, et sans explication aucune s'allongea à son coté.
Sourire aux lèvres, sceptre dans les mains, la carnassière couronnée embrassa de son corps entier celui qui frémissait sous ses mains. Remonta une main audacieuse jusqu'au visage de son amant, où elle mourut dans un sourire. Les regards se croisèrent, jusqu'à ce que...

Je l'ai !

La main de la blonde s'abat sur le paquet de cartes, écrase la dulcinée rouge et son pantin noir. Bah oui, c'était que des cartes... Bandes de pervers, vous aviez cru quoi ?
Donc, je disais, Blanche écrasa les phalanges de Semias, main sous laquelle se trouvait le couple adultère. Une reine rouge et un roi blanc, quelle horreur !


J'ai gagné !
Bon, en fait non. Mais elle arrache la carte des mains du vainqueur légitime. C'est quoi qui l'ai, d'abord ! Ma mienne, de carte. Veux tu la lâcher, sale voleur ? En va-toi, je t'aime plus ! Et c'est pouce, on joue plus, là.
Il faut avouer pour sa défense qu'à Rennes, lorsqu'elle jouait aux cartes à la cour de son royal grand-papa, on ne contredisait jamais ses victoires.
Gwenn saute toujours plus haut que les autres petites filles à la corde à sauter.
Gwenn a toujours la fève.
Gwenn remporte tous les plis.

Donc, Gwenn gagne. Plisse la carte, la tord, manque d'arracher un doigt à son adversaire. Mais elle gagne.
Réajuste une mèche tandis qu'elle se rassoit. Main fébrile qui lisse les pans de sa robe, et l'une de ses jambes glisse sur l'autre dans un ballet silencieux.
Cette bataille improvisée a fait monter le rouge aux joues de la pomponnée princesse. Poupon en taffetas clair qui arbore quelques tâches de son délicieusement printanière. Et ce rose sur ses pommettes glaciales ajoute une dose d'humanité à la maline donzelle.


Quoi ? Je gagne, admettez le.
Ahah !
Et une seconde main s'abat sur la table sans plus de précaution.
Je suis désolée, Semias. J'aurais dû vous prévenir de mon talent inné pour ce jeu. A tous les jeux, du reste. Je me souviens d'une fois, où à Rohan, nous nous sommes follement amusées, mes amies et moi, à un jeu de petites chevaux gé...
BOUM ! Deux valets. Plis remporté. Elle ramène les cartes vers elle. Petit paquet qui grossit au dessus de son nombril.
...ant.
Et sinon, j'aime bien jouer aux échecs. Sauf avec le Prince Riwan, qui est exaspérant quand il s'y met. Surtout à tripoter sa da...
BOUM ! Aïe ! Mais vous allez arrêter de taper, vous aussi ? Je gagne, admettez le.
... à caresser sa Reyne dans tous les sens. Indécent, devant les damoiselles.

Et sinon, vous venez quand en Breizh ?

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