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D'un voyage tant attendu loin des regards inquisiteurs et des jugements entre deux amants sincères

[RP ouvert] Loin des traitres yeux... Ou presque...

--Peut_etre_terwagne
Aimer à loisir au pays qui te ressemble *

Quelque part au sud de Macon :


Jetant un regard circulaire autour d'eux, elle laissa naître sur ses lèvres un sourire radieux qui n'avait rien à envier au soleil qui venait de se lever et inonderait bientôt la nature environnante.

Ses lèvres...

Il lui semblait y sentir encore le goût du calvados qui avait été prétexte à leurs baisers de la veille, juste avant le départ de Vienne, mais surtout du Lyonnais-Dauphiné.

Le Lyonnais-Dauphiné...

Cette terre où elle était allée s'installer en quittant le Berry, en compagnie d'un autre qui l'y avait abandonnée très rapidement. Cette terre surtout où elle l'avait rencontré lui. Lui qu'elle ne pouvait aimer librement là-bas, du moins pas pour le moment, pas encore.

Encore...

Son sourire s'élargit tandis qu'elle plongeait son regard dans le sien, laissant surgir en elle les souvenirs des derniers "encore" prononcés la veille, dans cette demeure où en cachette ils avaient pu s'aimer.

Aimer...

Ils étaient enfin libres de s'aimer! Pour la durée de leur voyage uniquement, mais peu lui importait la suite! Cette escapade à deux, c'était uniquement comme un avant-goût du futur, celui qui viendrait de toute façon. Dans combien de temps? Elle n'en avait aucune idée, et se refusait d'y penser pour l'instant, ne sachant que trop bien que le souvenir de ce lien officiel qui existait encore entre lui et une autre risquait de mettre des teintes tristes dans son regard, et surtout l'empêcher de profiter entièrement de chaque seconde à ses côtés.

A ses côtés...

C'est là qu'elle se sentait enfin vivante!

Posant sur sa bouche source de plaisir un baiser à la fois rempli de tendresse et de folie, ce genre de folie qui prend place dans le coeur des jeunes filles sortant enfin du couvent où on les a tenues enfermées trop longtemps mais pas suffisamment pour tuer en elles leurs envies charnelles, elle lui murmura deux simples mots, qui ne voulaient rien dire pour personne sauf pour eux.


Mon Ut...

Son Ut, oui, la clé nécessaire pour que puisse enfin s'envoler la mélodie formée des notes qu'elle avait tenues si longtemps silencieuses dans son coeur et dans son corps. Son Ut, celui qui permettait de lire la partition de sa féminité, depuis ses crescendo jusqu'à ses soupirs.

Elle leva ensuite les yeux vers le ciel, prit une profonde respiration, et cria, de toute la force de son amour et de sa passion...


Peut_être_Kernos, je t'aime !!!!!!!!!!!!!!

Enfin... Enfin elle pouvait le dire sans se retenir! Enfin elle pouvait laisser exploser cet amour sans crainte qu'on le salisse!

(* Baudelaire : L'Invitation au voyage)
--Peut_etre_kernos
Là, tout n'est qu'ordre et beauté - dans ce lieu que l'on nomme Belleville

Enfin! S'était la première pensée qui lui était apparue à l'esprit quand ils avaient dépassé les portes de Lyon. Oui, enfin! Enfin ils avaient pouvoir quitter leur masque, quitter cette politesse et cette retenue forcée par crainte des insultes, des jugements, de la jalousie qui viendraient à maculer, entacher la beauté, la sincérité de leur amour pourtant si pur, si intense. Ce sentiment de liberté le grisait, alors que le vent venait caresser sa peau et soulever ses cheveux, et qu'ils se tenaient là seuls, au milieu de nul part, sans personne pour les juger aux alentours... Enfin libre! Libre de l'aimer, libres de s'aimer.

Peut_être_Kernos promena ses yeux sur la région environnante avec ravissement, ainsi, cela ressemblait à ça la Bourgogne... Il avait été ambassadeur en ce duché pendant longtemps et c'était la première fois seulement qu'il foulait cette terre, d'ailleurs, hors du Lyonnais-Dauphiné, il n'avait guère voyagé depuis des années, prisonnier de ses obligations, de ses tourments... Mais pour la première fois depuis longtemps, aujourd'hui il était libre, grâce à elle, grâce à ce "eux" qui était né il y a un mois dans la neige des montagnes dauphinoises... Une renaissance, une vie nouvelle, voilà ce qu'elle lui avait offert en même temps que son amour.

Son regard se posa sur elle, et son sourire se fit plus grand en la voyant si heureuse, si passionnée... si vivante. Ses lèvres accueillirent avec plaisir les siennes, mêlant leurs souffles dans ce doux baiser, lui donnant sa tendresse et sa fougue retrouvée, celle d'un jouvencel découvrant l'amour et la vie, s'émerveillant de toute chose et se plongeant avec assurance et intensité dans cette existence, cette aventure nouvelle qu'elle lui offrait.


Ma Lune


Sa Lune, c'est comme ça qu'il l'avait surnommé, alors qu'ils n'osaient encore s'avouer leurs sentiments... Sa Lune, parce qu'elle avait illuminé la nuit dans laquelle il s'était perdu, lui offrant un repère, un guide mais surtout sa tendresse, loin de la clarté brûlante et aveuglante du soleil... Sa Lune qui cria son amour aux vents, aux cieux qui les dominaient, provoquant en lui un sentiment de bonheur parfait... Libres d'être eux-mêmes, enfin! Ne pouvant résister, il inspira profondément, gonflant son torse puissant pour crier à la nature alentour:

Je t'aime Peut_être_Terwagne !!!!!

Voilà, les mots étaient sortis, criés au vent pour qu'il les emporte à travers champs et qu'ils aillent couvrir le monde de leur vérité... Bien qu'au fond de lui, la seule personne a qui il lui importait vraiment de le dire, c'était cette femme qui se tenait à ses côtés et qu'il étreignit avec tendresse contre son corps.
--Peut_etre_terwagne
Les parfums, les couleurs et les sons se répondent* :

L'astre du jour devait être levé depuis plusieurs heures déjà lorsque quelques uns de ses rayons finirent par la tirer de son sommeil, s'infiltrant par l'interstice des planches de l'abri de fortune qu'ils avaient trouvé la veille.

S'imprégnant une dernière fois de l'odeur de sa peau, elle quitta la douceur de son épaule et se redressa sur un coude, laissant son regard s'habituer à la lumière avant de le poser sur les traits du visage aimé.

Comme il était beau!

Une fois de plus elle se surprit à envier les rayons du soleil qui parvenaient à caresser son corps sans le tirer de ses songes alors qu'elle-même se retenait de peur de l'éveiller. Ses yeux suivirent l'un d'eux qui semblait vouloir tracer encore et encore la ligne pure de son menton, frôlant au passage sa lèvre fine et charnue à la fois.

Son menton, c'était sans aucun doute la première chose qu'elle avait remarquée chez lui quand tous deux s'étaient rencontrés, dans cette taverne au creux des montagnes où chacun d'eux était allé chercher l'oubli d'une blessure de coeur. Elle s'en souvenait comme si la scène c'était déroulée la veille... Des semaines et des semaines d'isolement pour elle qui avait décidé de semer des graines d'Anamour, comme elle se plaisait à le dire, et puis enfin un bref passage en taverne, juste pour saluer une amie... Elle ne lui avait pas parlé à lui, du moins pas vraiment, et pour tout dire ne lui avait prêté aucune attention, pas plus à lui qu'à n'importe qui d'autre en dehors de cette amie qu'elle était venue saluer. Et puis, il avait suffi d'une flamme un peu vacillante au moment où elle commandait un verre pour qu'elle remarque son profil, s'y arrête un instant...

Souriant en y repensant, elle finit par laisser son index se poser entre son nez et sa lèvre, sur cette petite ligne dont on dit parfois qu'elle est la trace du doigt d'un ange. Plus que la douceur de sa peau, ce fut son souffle léger qu'elle avait envie de sentir à cet instant précis.

Son souffle, elle en aimait la caresse, mais aussi le son, presqu'autant qu'elle aimait celui des battements de son coeur quand elle l'entendait battre au même rythme que le sien. Car elle en était certaine, tous deux se répondaient, se faisaient écho l'un à l'autre.

De ce petit vallon, son doigt glissa vers ses lèvres, dont elle dessina les contours, avec toute la douceur dont elle était capable, avant de rejoindre son cou et le petit creu indiquant que son torse n'était plus très loin.

Sa peau... Elle en aimait non seulement la douceur, la chaleur, l'odeur, mais aussi la couleur. Cette teinte semblable à nulle autre et contre laquelle la sienne lui semblait soudain devenir belle aussi.

Fermant les paupières, comme elle le faisait parfois pour mieux marquer quelque chose dans ses souvenirs, elle remercia le ciel et le Très-Haut. Oui, quoi que puissent en dire certains, même si la situation les mettait tous deux en porte-à-faux avec les règles de l'Eglise, elle se disait qu'un amour si beau et si fort, si pur, cela ne pouvait pas être mal. L'amour, c'est bien dieu qui l'a créé, non?

Elle le remercia, de les avoir mis tous deux sur la terre, de les avoir faits se rencontrer et se trouver, se révéler, se comprendre. Elle le remercia aussi d'avoir mis en un seul être tout ce qu'elle avait toujours cherché sans même en avoir conscience. Elle le remercia de la faire se sentir enfin vivante, elle qui n'avait fait que survivre jusque là.

Du dehors, les chants des oiseaux lui parvenaient, ainsi que l'odeur de l'herbe encore mouillée par l'orage qui les avait surpris la veille et obligés à se réfugier dans cette grange qui avait abrité leur amour durant la soirée et la nuit qui avaient suivi. Elle s'en imprégna, parce que cette bicoque perdu au milieu de nulle part, la première nuit qu'ils auraient passées ensemble hors du Lyonnais-Dauphiné, elle voulait s'en souvenir dans ses moindres détails.

Dans quelques heures ils reprendraient la route en direction de Châlon, et là aussi ils s'aimeraient...



(* Baudelaire toujours)
--Peut_etre_kernos
Heureux celui qui peut d'une aile vigoureuse s'élancer vers les champs lumineux et sereins

Chaleur... était-ce les rayons du jour filtrant à travers les planches de bois humide de la grange qui venait caresser son visage endormi?

Douceur... était-ce le matelas moelleux de pailles qui s'étendait sous son corps nu, et qui leur avait servi de lit cette nuit?

Non, il entrouvrit ses yeux encore embrumés par le sommeil, sortant lentement du rêve pour s'offrir à la réalité, pour poser son regard brun sur celle qui était source de tout. La chaleur qui baignait son corps alangui, s'était elle qui l'avait mis en lui, une chaleur plus intense qu'aucun soleil ne pourrait jamais lui donner, une chaleur tendre, réconfortante. La douceur, s'était celle de sa peau contre laquelle il s'était endormi le coeur en paix, et dont la caresse ne l'avait pas quitté de la nuit, même ce matin, alors qu'elle s'était légèrement écartée de lui, il la ressentait encore sur lui. Lentement, il se redressa sur son coude pour dégager l'une de ses mains qui se posa contre sa joue, suivant son dessin jusqu'à son oreille pour glisser ses doigts dans sa chevelure de nuit.

Un sourire illumina son visage, un de ces sourires simples mais éclatants qui ne peuvent naître que dans un coeur habité par un bonheur pur, sincère, qu'il lui offrit, ainsi que ses yeux qu'il posa dans les siens. Amour, tendresse, liberté, c'était ce qu'on âme lui livrait dans cet échange de regards matinal alors qu'ils se tenaient là, tous les deux allongés dans la paille, dans cette grange perdue au milieu des champs qui leur avait servi de refuge contre les eaux célestes avant devenir leur logis pour une nuit... leur première nuit de liberté, loin du Lyonnais-Dauphiné et des regards indiscrets, des jugements... Peu importait que la grange soit vétuste, les boiseries usées et la toiture percée par endroit, cette nuit, elle était devenu un palais, un temple, parce qu'ils s'y étaient aimé avec force, passion et sans barrière, sans crainte ni réserve... parce qu'ils y avaient été vivants.

Ses lèvres souriantes s'approchèrent des siennes veloutées pour s'y fondre dans un baiser, goûter à nouveau son souffle avant d'y mêler le sien. Comme la pluie qui était tombée la veille pour abreuver la terre, son souffle, son amour, étaient venus irriguer son corps et son coeur arides, telle une hirondelle, elle s'était posée avec légèreté sur ses branches lui rappelant que le printemps existait après ce long et froid hiver où il s'était enfermé depuis des mois. Elle avait fait tomber la neige qui alourdissait ses rameaux, réveillé la sève gelée qui à nouveau vint battre sous son écorce rugueuse faisant renaître les bourgeons pour le recouvrir d'un feuillage abondant et vert frémissant sous la caresse de son souffle.

Lentement, il écarta sa bouche de la sienne dans un sourire, replaçant de ses doigts une de ses mèches derrière son oreille avant de lui murmurer ces quelques mots:


Bonjour mon bel amour.

Il déposa un nouveau baiser sur ses lèvres, trop friand de leur douceur et de leur saveur pour résister à leur appel, mais surtout parce qu'elle lui avait appris qu'ils allaient toujours par deux, comme eux à présent... Toujours par deux, c'est ce qu'il s'était promis avant de partir, scellant leur promesse d'un baiser, leurs mains enlacées en chaque lieu qu'ils traverseraient lors de ce long voyage qu'ils avaient tant rêvé et tant souhaité.
--Peut_etre_terwagne
Sans mors, sans éperon, sans bride, partons* :

Liberté... Un sentiment de liberté totale! C'est ce qui la prit ce jour-là au réveil, quelque part entre Autun et Sémur, dans une minuscule chambre de ce qui ressemblait plus à un relais de poste qu'à une auberge. En arrivant en milieu de nuit, elle s'était même demandé qui pouvait bien passer par ici et encore plus y loger. Il n'y avait rien ou presque alentour, juste deux fermes à une dizaine de longueurs de bateaux, et un étang qui semblait vouloir disparaitre dans un creux de vallon.

Qui? Et bien eux! Le monde se résumait de toute façon à eux seuls depuis leur départ de Vienne. Il était devenu sa raison d'être derrière ce que d'autres auraient nommé sa déraison au vu de la situation.

Il était sa déraison et sa raison... Il était tout, tout simplement! Son essentiel!

Elle se leva sans faire de bruit, se glissant hors des draps et hors de ses bras avec lenteur et presqu'à regret, mais elle avait décidé de profiter de cette journée au maximum, et de partir découvrir les images, les sons, les couleurs des terres alentours, pour pouvoir les lui offrir de ses mots lorsqu'il s'éveillerait.

Elle serait bien restée longtemps encore dans la chaleur de leurs deux corps, mais elle se dit qu'il y en aurait encore des tas d'autres, aussi belles, aussi douces, des nuits sur son épaule.

Elle enfila sa houppelande rouge, celle qu'elle avait commandée exprès pour ce premier voyage ensemble, car d'autres il y en aurait, elle en était aussi certaine que 1 et 1 font 1 dans leur cas à eux. Ensuite, elle se rapprocha de lui, posa un instant ses yeux sur son visage, avant de laisser s'envoler un baiser léger comme une libellule qui alla se poser sur son nez.


Je t'aime à tout jamais, Peut_être_Kernos.

A tout jamais, oui... Elle le disait ainsi, refusant d'utiliser cette expression de "toujours" qu'elle trouvait idiote et limitée.

"Toujours"... Tous les jours... Et les nuits dans tout cela? Ne comptaient-elles pas, les nuits? N'y avait-il que ce dont le soleil était témoin qui avait de l'importance et de la valeur? Rien qu'en y pensant, elle haussa les épaules, une moue dubitative sur le visage. Enfin, elle quitta la pièce, et sortit.

Dehors, l'air était encore un peu frais, mais elle ne sentit pas sa morsure très longtemps, puisqu'elle courut jusqu'à la première petite butte qu'elle aperçut, espérant y être haut assez pour apercevoir la silhouette de Tonnerre au loin. Tonnerre, cette ville dont elle avait si souvent rêvé et que demain elle découvrirait avec lui, grâce à lui, contre lui.

Elle fut déçue, en arrivant au sommet, parce que dans son champs de vision se trouvait une seconde butte. Regardant au sol, elle aperçut alors une souche d'arbre qui devait bien faire deux pieds de haut, et se dit qu'en y grimpant sans doute verrait-elle plus loin.

Ni une ni deux, la voila qui pose son pied gauche dessus, est sur le point de faire de même avec le droit, lorsque...

Roulé-boulé de la demoiselle qui se retrouve en moins de temps qu'il ne faut pour le dire (et pour l'écrire encore plus) au bas de la butte, surprise par la sortie d'un écureuil qui avait du trouver refuge dans le reste d'arbre pour la nuit.


Norf!


Put entendre l'animal, avant de s'enfuir quand son rire à elle s'éleva dans les airs.


(* Baudelaire)
--Peut_etre_kernos
Nous fuirons sans repos ni trêves vers le paradis de mes rêves*

Son oeil s'ouvrit sur le mur de la petite chambre qu'ils avaient loué pour la nuit. Aussitôt, il remarqua qu'elle n'était plus à ses côtés... la chaleur de son corps lui manquait mais son odeur, elle l'imprégnait encore, que cela soit les draps ou sa propre peau, elle avait laissé son empreinte. Il referma un instant ses paupières pour humer profondément son parfum, s'en imprimer d'avantage avant de se redresser sur la paillasse pour s'étirer en baillant. Cette chambre n'avait pas le confort de l'auberge coquette de Chalon où ils avaient fait étape la veille, mais il s'en fichait, l'important c'était d'être avec elle, peut importe que cela soit dans la chambre d'un Duc ou sous la voûte céleste étoilé, il ne connaissait pas meilleur matelas que ses bras, ni de couvertures plus douces et plus chaudes que son souffle sur sa peau. Lentement, il se leva pour récupérer ses vêtements et sortir de la pièce afin de profiter des rayons du soleil avant de la retrouver elle, sa lumière, son souffle.

Encore un matin, encore un après-midi et une nuit nouvelle à s'aimer, à rire et à vivre... Encore, un mot qui revenait souvent entre eux, à la fois invitation mais aussi réalité... Encore, parce que chaque heure passée ensemble renforçait leur amour, le poussant à se demander parfois s'il était humainement possible d'aimer d'avantage encore... Encore, parce qu'ils en voulaient toujours plus... Encore comme un rappel du bonheur qu'ils vivaient ensemble et qu'ils voulaient poursuivre à deux... Encore exister, encore s'aimer et être ensemble.

A son retour, elle lui avait raconté son périple, il avait rit de la belle aventurière terrassée par un terrible fauve, lui conseillant pour sa prochaine escalade de choisir plutôt le soutien d'un chêne. Elle l'avait regardé.


Je n'ai pas envie de gravir un chêne, moi... J'ai envie de l'épouser

Il l'avait regardé, plongeant ses yeux où l'émotion perlait comme la rosée sur les feuilles d'un arbre au petit matin, et l'étreignant avec tendresse et force, oui... lui c'était à la Lune qu'il voulait s'unir, dès qu'on l'aurait défait les liens qu'il l'unissait encore au Soleil, il la conduirait devant l'autel, parce qu'il ne pouvait pas imaginer de vivre sans elle à ses côtés... Le mariage de la Lune et du Chêne, un jour et une nuit, il en rêvait, il l'attendait avec impatience.

Il y eut un jour, et il y eut un matin, le matin de prendre la route pour Tonnerre dont le nom la faisait rêver depuis son enfance, ce rêve qu'il s'apprêtait à réaliser en l'accompagnant sur les routes de Bourgogne. La première fois qu'elle avait évoqué ce désir d'un jour poser le pied dans cette ville, le nombre deux fois où elle l'avait effleuré sans jamais pouvoir l'atteindre - maudite Fortune - c'était un soir dans les montagnes, devant un verre, avant qu'ils ne prennent conscience, ou du moins osent les écouter, des sentiments qu'ils éprouvaient l'un pour l'autre... étrangement, il avait eu immédiatement envie de l'aider à réaliser son rêve, peut être sentait-il déjà en ce temps là que leurs destins étaient liés? Il faisait encore nuit quand ils s'éveillèrent, l'aurore n'allait pas tarder à poindre le bout de son nez quand il quitta les draps pour allumer une chandelle. La flammèche tremblante dansait sur sa peau, caressant de sa lumière orangée les courbes de son corps, dessinant des ombres vacillantes venant en souligner la rondeur. Lentement, il s'assit à ses côtés, posant un regard amoureux sur son visage endormi et serein, avant de caresser tendrement son épaule de sa main pour l'éveiller doucement, en penchant ses lèvres sur son oreille pour lui murmurer.


Mon amour, il est l'heure de réalise l'un de tes rêves.


(*Baudelaire)
--Peut_etre_terwagne
Et dans mon âme inassouvie, verse le goût de l’éternel... *

Est-ce sa voix qui la tira du sommeil qui l'avait emportée juste après la vague de plaisir qui les avait fait s'échouer tous deux la veille au soir? Ou est-ce la douceur de sa main? A moins que ça ne soit son souffle... Mais quelle importance, au fond? Aucune!

Ce qui en revanche en avait énormément pour elle, c'était que la première image qui s'imprégna sur sa rétine lorsque ses paupières se soulevèrent fut celle de son sourire à lui. Son sourire... Elle le trouvait plus beau que tout ce que le Très-Haut avait pu mettre sur la terre. Il lui ressemblait ce sourire, il le définissait presque aurait-elle pu dire.

Un sourire qui avait quelque chose de fort et de volontaire, et en même temps des notes de timidité, de fragilité, de douceur, d'hésitation camouflée... Un sourire qui comme lui débordait de cette assurance en elle qu'il lui offrait, mais aussi de ce côté profondément humain qu'elle n'avait jamais rencontré chez personne d'autre avant lui... Un sourire qui la transportait, la rassurait, la troublait, et lui montrait pourtant que lui non plus n'était pas toujours sûr de lui. Et cela, c'était sans doute ce qu'elle y appréciait le plus, parce que chez lui il n'y avait pas de faux-semblants, pas de masque de "l'homme parfait et rempli d'assurance", ce genre de masque qui vous font vous sentir encore plus faible en face de l'autre.

Oui, décidément, ce sourire, il lui ressemblait.


Mon amour, il est l'heure de réaliser l'un de tes rêves.

Les mots qu'il avait prononcés ne parvinrent à sa conscience encore endormie que quelques secondes plus tard, et elle y répondit sans réfléchir, spontanément, en décalage avec ce qu'il avait voulu dire sans doute.

Mon rêve, il est juste là... C'est toi!

Oui, devant lui, contre lui, perdue et trouvée dans ses yeux et dans son sourire, elle en avait même oublié qu'ils étaient arrivés dans cette ville de Tonnerre qu'elle avait si souvent rêvé de voir et de connaitre.
--Peut_etre_kernos
Tu contiens dans ton oeil le couchant et l'aurore *

Comme le soleil se lève en inondant le ciel de sa lumière rougeoyante, brûlant le voile de la nuit sous ses rayons pour faire place au jour, l'éveil embrasa peu à peu son visage endormi animant ses traits fins et doux jusqu'à l'ouverture de ses paupières libérant les miroirs de son âme où il se plongea aussitôt pour en ressortir purifié par l'éclat de vie et d'amour qui s'y lisait. Même embrumé par les derniers lambeaux de sommeil, son regard conservait cette intensité, cette flamme ardente de liberté, de passion et de vie qui lui était propre et qu'il chérissait tant, aimant s'y réchauffer, la voir danser au coeur de ses iris qui lui faisaient l'effet de contempler l'immensité de la voûte nocturne étincelante d'un million d'étoiles. Belle oui elle l'était, même si elle avait tendance à le nier quand il lui disait à quel point il la trouvait belle, qu'il était partial, que sa beauté elle ne venait que de l'amour qu'il avait mis en elle... Pourtant, elle était belle, pas de ces beautés agressives ou artificielles des Dames de la Cours, qui vous jettent au visage avec ostentation leurs charmes, qui savent en jouer et se parent de fanfreluches et de pierreries pour se faire remarquer en les agitant sous l'oeil du galant pour l'hypnotiser de leur éclat... Non, sa beauté elle était naturelle, une beauté simple, fragile, sauvage, farouche... une beauté qu'il ne faut chercher à apprivoiser, qui n'a pas besoin d'être cultivé sous peine de l'amoindrir, de lui faire perdre de sa pureté, de son éclat... Une beauté de femme dans son essence même qui ne nécessite rien d'autre et qui la rendait d'avantage captivante et séduisante, parce qu'elle l'exprimait sans s'en rendre compte, sans chercher à le faire.

Mon rêve, il est juste là... C'est toi!

Sa réponse le surpris, même si elle était tout à fait dans son esprit, et son sourire s'élargit sous l'élan de tendresse et d'amour qu'elle éveilla en lui. Ses lèvres se penchèrent à la recherche des siennes, les effleurant avec douceur pour s'imprégner de la caresse délicate et chaude de son souffle, de la saveur légèrement sucrée de sa lippe avant de les presser pour un baiser, le premier de la journée.

Tonnerre, ils y étaient enfin. Avant qu'ils n'arrivent en vue des murs de la ville, il lui avait bandé les yeux d'un morceau d'étoffe, la guidant ensuite, main dans la sienne, sur la route menant aux portes de la cité. Il la mena sur l'une des collines surplombant la cité dont les premiers rayons de l'aurore léchaient les pierres grises, et avec délicatesse, il débanda ses yeux, lui offrant ainsi la ville qui s'étendait à leurs pieds. Puis, se furent côte à côte, serrés l'un contre l'autre, leurs doigts liés entre eux qu'ils pénétrèrent dans Tonnerre, franchissant ses portes pour fouler les pavés de la cité dont elle avait tant rêvé... Et aujourd'hui, ils s'étaient éveillés dans l'une de ses auberges.

Lentement, il écarta ses lèvres des siennes pour soulever les draps et s'y glisser de nouveau, pour profiter encore un peu de sa chaleur et son parfum. Il s'allongea contre elle, l'enlaçant de ses bras pour la presser contre lui, passant ses doigts dans sa chevelure noire avant de l'embrasser à nouveau... La découverte de la ville attendrait un peu, pour l'heure, il avait envie de partager un peu de douceur et d'amour avec la femme dont il était amoureux.


Ma liberté...
--Peut_etre_terwagne
Que nos rideaux fermés nous séparent du monde*

Une fois de plus, une fois encore, elle se surprenait à hésiter entre garder les yeux ouverts pour s'assurer qu'elle ne rêvait pas et les fermer pour mieux marquer en elle tout ce bonheur simple qui l'envahissait, imprégner dans sa mémoire chaque odeur, chaque sensation, chaque son.

Elle les ferma finalement, dans la douce lumière du matin, pour ne rien voir d'autre qu'elle et lui, leurs deux corps couchés côte à côte, main dans la main, en toute liberté, loin des regards jugeurs, loin de la bêtise et de la méchanceté, loin de tout ce qu'il leur faudrait supporter en rentrant en Lyonnais-Dauphiné. Mais qui étaient-ils tous pour juger de la beauté ou du pêché que contenait un amour? La vie n'avait-elle pas été assez dur jusque là pour leur deux pour qu'enfin ils puissent goûter au bonheur?

Le retour en Lyonnais-Dauphiné... Ils en avaient parlé quelques instants la veille au soir, en rentrant d'une longue promenade dans les rues de Tonnerre, mais très vite ils avaient mis le sujet de côté, la simple idée de ne plus pouvoir se tenir la main en public, de ne plus pouvoir rejoindre la même chambre, ayant eu trop rapidement pour effet de ternir la lueur dans leurs yeux.

Elle ne lui avait rien dit, mais depuis deux jours, elle se surprenait à se dire qu'elle avait de moins en moins envie d'y retourner un jour, d'affronter non seulement les jugements et coups-bas qu'elle subirait à nouveau de la part de certains qui se croyaient bien pensants, mais aussi les ragots, les tentatives de manipulations indirectes pour la faire le quitter et le rendre à son chagrin, les sous-entendus mesquins concernant certains regards qu'il lançait paraissait-il à son épouse et qui en disaient longs sur le fait qu'elle-même ne servait que de leurre à son amour déçu ailleurs. C'était sans doute cette dernière chose qui lui faisait le plus mal, celle qui la faisait le plus douter de l'avenir certains jours, et la seule dont elle ne lui parlait pas, préférant le laisser croire que ses quelques retraits parfois n'étaient dus qu'à sa peur à elle d'aimer.

Aurait-elle la force, dans deux semaines, en quittant le Berry, de retourner affronter les fantômes de sa vie à lui? Elle se le demandait ce matin-là plus que jamais... Et puis, au fond d'elle-même, elle se disait que ce n'étaient peut-être pas réellement des fantômes. Des fantômes on a envie de les chasser, de ne plus y penser, et était-ce bien son cas à lui?

Oui, elle qui pendant bien longtemps au début de leur histoire à tous deux s'étaient battue contre les siens, avait eu tant de mal à tirer un trait sur cette sale manie qu'elle avait de toujours se replonger dans les souvenirs d'un autre pour entretenir sa douleur et garder en vie le passé et la trace d'un autre sur elle, s'en était ouverte à lui, elle se surprenait soudain à se dire que peut-être que lui aussi faisait cela, mais sans le dire... Que peut-être qu'en silence lui aujourd'hui encore ne vivait pas totalement leur histoire à eux parce qu'il y emmenait l'empreinte d'une autre...

Pourquoi pensa-t-elle à cela à cet instant? Pour rien de précis... Pas suite à un geste, pas suite à un mot ou un regard différent des autres, non. Il dormait encore, le visage serein.

Aucune raison, donc, juste un doute brutal qui s'insinua en elle, et qui fit couler quelques larmes remplies de tristesse sur sa joue. Elle avait jusque là tellement pensé à ses chaînes à elle, s'était donnée tant de mal pour les briser avec lui, qu'elle en avait oublié les siennes à lui.
--Peut_etre_terwagne
C'était hier et c'est demain. Je n'ai plus que toi de chemin. *

Leur départ de Tonnerre c'était fait de la même façon que leur arrivée, leurs mains glissées l'une dans l'autre, leurs ombres se mélangeant sur le sol, éclairé par la lune qui ne leur semblait briller que pour eux. De temps à autre, elle levait les yeux vers elle.

La lune...

Elle qui l'avait vue si malheureuse en arrivant à Briançon. Elle qui avait bercé ses nuits d'insomnie et de solitude.

Ses nuits...

Ces nuits où elle avait eu si froid et si mal, où elle avait cru devenir folle, avait cent fois voulu se jeter par la fenêtre pour s'écraser sur le sol comme elle avait vécu, sans faire de mal ni de bien à personne, sans qu'on la pleure . Qui se rend compte qu'une certaine feuille vient de tomber d'un arbre? Personne.

Ces nuits où elle avait tendu l'oreille encore et encore, espérant follement entendre une lettre de Hugoruth se glisser sous la porte, une autre de Walan ensuite.

Ces nuits où elle se serait accrochée au bras du premier inconnu qui passait juste pour se donner l'impression d'être vivante malgré tout, mais où elle n'en avait même pas la force.

Ces nuits où elle s'était dégoûtée de seulement réussir à l'envisager et où pour se purifier de ses pensées qu'elle estimait trahison envers un homme qui ne voulait plus d'elle, elle s'était baladée jusqu'à l'aube sous la pluie, tremblante de froid et de douleur, espérant croiser quelque malfrat qui la viderait de son sang au coin d'une rue .

Ces nuits où elle avait bu plus que de raison, espérant que l'ivresse rendrait son visage trop flou pour qu'elle puisse encore s'en souvenir le lendemain.

Ces nuits où elle s'était détestée elle de ne pas avoir été assez bien pour qu'il l'aime encore et encore, qu'il ne l'abandonne pas, et où elle avait parfois été jusqu'à caresser son poignet avec la lame d'un couteau, mais avait été incapable de poursuivre son geste dès les premières gouttes de sang tombant sur le plancher.

Ces nuits où elle avait fini par chanter à tue-tête pour ne plus entendre le silence ne lui rappelant que trop que sa voix à lui avait disparu, où elle avait rempli des pages et des pages de son écriture en s'adressant à un ami imaginaire jusqu'à en avoir mal au bras, juste pour s'empêcher de penser que plus jamais elle ne lui écrirait à lui. Ces nuits où elle s'était usés les yeux à force de lire les mots d'autres, n'importe qui, des troubadours connus ou inconnus, juste pour ne pas penser que plus jamais elle ne lirait les siens.

Et puis, il y avait eu cette nuit-là... Celle où elle avait rencontré celui sans qui aujourd'hui elle ne parvenait même plus à imaginer une seule journée, une seule soirée, une seule nuit. Celui qui lui avait rendu confiance en elle et en la vie, aux lendemains.Celui qu'elle appelait son Essentiel.

Elle sourit à la lune...

Elle qui avait été le témoin de leur première rencontre, des premiers mots échangés, du premier frôlement de main, du premier baiser, et de tant d'autres choses encore.

Elle qui les avait tous deux vus attirés l'un par l'autre mais hésitants, retenant certains mots et certains gestes, maladroits dans leurs premiers pas, craintifs dans leurs aveux à mi-mots.

Elle qui aujourd'hui guidait leurs pas vers Cosne, cette dernière étape avant le Berry, avant la plongée dans le passé que cela représentait pour Peut_être_Terwagne.

Pour se rassurer, elle posa son regard sur Peut_être_Kernos, lui dont elle était certaine qu'ensuite, à leur retour en Lyonnais-Dauphiné, dans quelques temps, elle pourrait dire qu'il était le seul passé dont elle veuille se souvenir, et le seul avenir dont elle veuille rêver.
--Peut_etre_kernos
Pour que de notre amour naisse la poésie qui jaillira vers Dieu comme une rare fleur *

Cosne, aux portes de la Bourgogne et du Berry, aux portes du passé et du présent pour elle... Oui, quelque part c'est ce qu'il pensait en lui-même, ce Duché qu'elle avait quitté voilà près d'un an, laissant derrière elle les trahisons et les déceptions - elle avait eu son lot également après en Lyonnais-Dauphiné, mais cela avait changé ensuite - elle s'apprêtait, demain, à y retourner soutenu par le bonheur et l'amour qu'ils avaient trouvé l'un avec l'autre dans les montagnes briançonnaises, et comme ce petit bout de route, chargé de funestes souvenirs, qu'ils venaient de parcourir entre Tonnerre et Cosne, c'est sa main étreignant avec fermeté et tendresse la sienne, qu'ils passeraient la frontière.

Sa main... c'est avec celle-ci qu'il osa pour la première fois la toucher, l'effleurer, la posant sur la sienne, n'osant pas entreprendre d'avantage de peur qu'elle ne le rejette... qu'elle ne le griffe, tant elle ressemblait alors à un chat sauvage et blessé, s'esquivant brutalement quand vous essayez de la toucher par peur que vous ne cherchiez à la blesser comme les autres.

Sa main... encore elle, c'est sur son dos qu'il osa lui donner son premier baiser, caressant sa peau de ses lèvres hésitantes avec autant de légèreté qu'une aile de papillon... Si un simple battement d'ailes d'un papillon peut déclencher une tempête à l'autre bout du monde, peut être que ce simple baise-main eut-il l'effet d'un ouragan dans son coeur?

Sa main... un jour, il comptait bien la lui demander quand l'officialité se déciderait enfin à dissoudre officiellement son mariage qui n'existait plus dans les faits depuis de nombreux mois... même si, au fond c'est ridicule, ce n'est pas la main qu'on épouse et que l'on aime, mais la personne en son entier, son corps, son âme, son esprit... mais la main, cela reste un symbole fort malgré tout: c'est de sa main que l'on caresse, que l'on offre, que l'on transmet, que l'on échange... quelle plus belle union que des doigts s'entremêlant dans une assemblage parfait, parce qu'elles ont été crées pour cela?

Il se tourna vers elle, sentant son regard se poser sur lui, et lui sourit, avec tout l'amour, la tendresse et la force qu'elle lui inspirait par sa seule présence, par la chaleur et la vie qu'elle avait fait battre à nouveau dans ses veines. Un rayon de lune perça les nuages pour venir caresser son visage et le baigner de sa pâle et douce lumière, révélant à travers le voile de la nuit, la beauté de ses traits.

La lune... leur vieille complice bienveillante, c'était devant elle qu'étaient nés leurs premiers émois, leurs premiers aveux, leurs premiers gestes d'amour... Ce n'est que sous le regard de la lune qu'ils avaient pu s'aimer jusqu'alors, jusqu'à ce qu'ils quittent le Lyonnais-Dauphiné et puissent s'aimer sous le soleil pour la première fois.... La nuit et le jour, s'aimer sans interruption, sans avoir à se cacher...

Ses lèvres se penchèrent sur les siennes dans un doux baiser... un baiser comme une aurore... comme un avenir plein de promesses, d'espoirs... un prélude à une vie nouvelle, à un amour nouveau... Une invitation à ce grand voyage qu'est l'existence, et qui après Cosne, les mènerait en Berry et ensuite... peu importait au final? Après tout ce qui est intéressant dans le voyage, ce n'est pas la destination, mais bien le chemin que l'on parcourt pour y arriver et la personne avec qui vous décidez de le faire.
--Peut_etre_terwagne
( Après interruption en Berry, voir "J'étais partie pour me trouver, je ne reviens que pour t'aimer".)

Je suis auprès de toi comme un saule qui tremble... *

La route du retour vers le Lyonnais-Dauphinois, ils l'avaient prise la veille au soir, quittant le Berry où, forte de leur amour, elle s'était enfin sentie capable de tirer un trait sur son passé, sur ces pages jaunies et délavées par les trop nombreuses larmes qu'elles avaient fait naitre.

Son passé, elle ne l'oublierait jamais, il avait fait d'elle la femme qu'elle était aujourd'hui, mais dorénavant elle ne le laisserait plus hanter son présent, elle ne lutterait plus pour s'y engouffrer au moindre doute quand à son avenir, elle ne s'y enfermerait plus comme s'il s'agissait d'une prison humide, sombre et morne où elle choisissait de s'isoler pour souffrir tout en se protégeant de l'envie mêlée à la peur d'avancer, de rêver, de vivre les choses.

Oui, si d'apparence la femme qui repassa ce matin là la frontière entre le Berry et la Bourgogne était bien la même que celle qui l'avait franchie dans l'autre sens une semaine plus tôt, en elle bien des choses avaient changé. Aujourd'hui, elle était enfin en paix avec elle-même, mais surtout prête à aller de l'avant entièrement, de tout son corps, de tout son coeur, de toute son âme!

En un mot comme en cent, elle était simplement devenue enfin confiante en elle-même et en ses sentiments envers l'homme dont elle ne lâchait pas la main depuis des jours et des jours.

Ce n'était pas qu'avant ce passage en Berry, là où reposaient désormais en paix son passé avec Hugoruth, elle doutait de son amour pour Peut_être_Kernos, loin de là même, mais il lui arrivait pourtant de craindre de s'attacher à nouveau, de laisser l'amour prendre trop d'importance en elle, ayant bien trop peur de se leurrer et de se laisser aveugler par lui comme elle l'avait été par cet autre qu'elle avait aimé bien plus que lui ne l'avait sans doute réellement fait. Alors, elle luttait pour essayer de se faire croire que l'amour qu'elle éprouvait n'était pas si fort que cela, pas assez fort pour la détruire le jour où il l'abandonnerait lui aussi.

En Berry, elle avait ôté le dernier voile de flou qui était posé sur la force de son amour pour lui, et elle ne s'en sentait que plus légère, plus heureuse, plus entière. Même si, quelque part, elle tremblait devant lui... Oui, malgré la fin de sa lutte contre le vertige, elle ne pouvait s'empêcher de trembler devant le précipice qu'on nomme amour.


[* Louis Aragon : Elsa]
--Peut_etre_kernos
Tes yeux sont si profonds que j'y perds la mémoire*

Bourgogne... pour lui, ce duché avait quelque chose d'une terre de liberté. Oui, c'est en le foulant pour la première fois, tournant le dos au Lyonnais-Dauphiné, qu'ils avaient pu s'aimer sans crainte d'être découverts, d'être jugés pour ce qu'ils ressentaient l'un pour l'autre, sans peur que l'on ne souille cet amour si pur, si brûlant, si immense, si intense et profond qu'il embrassait l'univers entier au sein de leurs deux êtres... Liberté, oui c'est ici qu'il y avait goûté vraiment, dès leurs premiers pas où ils avaient crié leur amour aux vents et au ciel, sous la morsure du soleil, au lieu de se le murmurer sous la caresse de la Lune, derrière l'abri des murs de pierre, au creux d'un lit... non ce n'avait plus été de simples souffles, un secret gardé au fond d'eux, sur ces terres ils avaient pu s'aimer au grand jour, le crier à la face du monde et sous le regard de tous, sans se soucier d'y lire un jugement, de la jalousie.

La liberté... bientôt il devrait y renoncer lorsque les murs de Lyon seront en vue, renoncer à pouvoir l'aimer comme il en avait besoin, de pouvoir la prendre dans ses bras en tout lieu et à toute heure, de marcher dans les rues main dans la main, de s'arrêter pour l'embrasser avec passion... Reprendre ce masque qu'il avait jeté loin derrière lui et qui lui faudrait remettre, plus pesant que jamais... Il avait soudain une envie folle de s'arrêter là, de ne pas rentrer dans ce duché où ils devraient se contenter des nuits, renoncer aux jours... Partir, s'enfuir tous les deux loin, là où personne ne les connaissait pour vivre leur amour en paix, en toute liberté. Cette liberté, à présent qu'il y avait goûté, il ne pouvait s'en passer, il la chérissait, la vivait, y aspirait de tout son être... cette liberté qui était leur, qui portait son nom: Peut_être_Terwagne, elle lui était essentielle, vitale.

Lui qui l'avait tenu par la main tout ce temps, la guidant jusqu'aux terres de son passé, la soutenant de toute la force de son amour pour qu'elle puisse enfin s'affranchir du poids de son passé... aujourd'hui, lui tremblait. Il serait si tentant et si simple de changer de direction, de prendre la route opposée... fuir loin de tout ce qu'il avait été, ce qui l'attendait de l'autre côté de la frontière. Il ferma les yeux un instant... se laissant imprégner de sa chaleur à elle, s'enveloppant de l'amour et de la paix qu'elle lui apportait par sa simple présence... Courage, force, il puisa en elle comme le chêne plonge ses racines dans la terre nourricière pour grandir et se nourrir. Non, ce n'était pas la solution, cette amour, cette femme, ils méritaient que l'on se batte pour eux.

Son passé... elle l'en avait sauvé, lui ouvrant les yeux sur le présent et lui donnant une vision d'avenir à ses côtés, lui permettant d'enterrer définitivement la nostalgie d'un bonheur qui n'existait plus et n'existerait plus jamais... Le présent, c'était elle, c'était eux, mais aussi ses enfants, et ce présent, il se trouvait en Lyonnais-Dauphiné, face à eux, tout comme l'avenir, un avenir qui ne serait qu'à eux deux.

Reprendre la route, avancer encore et encore, surmonter les obstacles et les épreuves, voilà ce à qui il se résolu, peu importe ce qu'il faudrait endurer, il tiendrait pour qu'un jour, ils puissent enfin s'aimer et vivre librement.



[*Aragon, "Les Yeux d'Elsa"]
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