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Deux amants en voyage pour se libérer du passé et faire place à l'amour présent

[RP]J'étais partie pour me trouver, je ne reviens que pour..

Terwagne_mericourt
J'étais parti(e) pour me trouver, je ne reviens que pour t'aimer... *


Le Berry...

Sentiment étrange et poignant au moment de passer la frontière entre la Bourgogne et ce Duché où ont été écrites les plus nombreuses et plus importantes pages de son existence.

Elle descend de sa monture, pose le pied au sol, attend que son compagnon de route fasse de même, plonge son regard dans ses yeux, pour y puiser une fois encore le courage qu'il parvient à lui insuffler sans un mot, glisse ses doigts dans les siens, hésite à lui dire une fois de plus à quel point elle le remercie de l'avoir menée de Briançon jusqu'ici, d'avoir veillé sur chacun de ses pas. Elle prend ensuite une profonde respiration, lève le pied, l'avance, et... Le temps s'arrête!


Plongée brutale dans le passé...

Première vision de Sancerre, où elle est bien loin de se douter que le destin la ferra poser sa besace de troubadour, acquérir terres, quitter chants et flûte, épouser les responsabilités, la politiques, et tant d'autres choses encore. A ses côtés, Zeltraveller, celui qui la ramène à Montargis pour l'épouser. Celui qui l'a surnommée "Sa Tempête".

Nuages passant dans le ciel, voilant sa vision, brume de chagrin se posant sur ses iris, odeur de fumée et de cendres. Zeltraveller s'en est allé rejoindre les cieux, emporté par le feu.

Visage se penchant sur elle... Visage froid, ressemblant à ces statues de marbre à l'entrée des Cathédrales, que rien ne semble pouvoir émouvoir. Et pourtant, derrière cette carapace, elle se rendrait vite compte que si, sa détresse avait touché cette femme qui se présente à elle comme la Dame de Baugy... Mentaig.

D'autres visages suivent, se mélangeant, dans l'ordre ou le désordre...Bragon, Astaroth, Maleus, Ysabeau, Homme-des-bois, Gallup, Jelubir, Icefly, Maybee, Aryan, PrincesseGeorgette, PrincesseAmélia, Valatar, Maryan. Ces visages devenus piliers de ce qu'elle tenterait de construire, dont certains s'avèreraient solides et irremplaçables, d'autres bien moins, voir leurre.

Et parmi ceux-là, un reste flou... Hugoruth!


Hugo...

Il n'est flou que parce qu'elle s'interdit de le regarder en ouvrant vraiment les yeux. Elle le sait.

Elle est partagée entre son désir fou de le revoir, de ré entendre sa voix, de retrouver son odeur, de se jeter dans ses bras, ne serait-ce que quelques instants, ne serait-ce que pour graver à jamais dans sa mémoire toutes ces choses qu'elle a crues éternelles et dont elle n'a pas suffisamment profité, et sa peur de sentir le gouffre de la nostalgie l'aspirer, lui faire oublier que la vie continue, ailleurs, autrement.

Partagée, oui. Exactement de la même façon qu'elle l'est par rapport à ce retour en Berry.

Elle en rêvait depuis si longtemps de se sentir forte assez pour venir les revoir tous, tous ces amis qu'elle avait quittés pour le suivre en Lyonnais-Dauphiné rejoindre ses nièces et son neveu, elle avait été tellement impatiente de voir arriver la fin de son troisième mandat de Bailli pour pouvoir prendre la route vers eux, enfin, et malgré tout elle avait peur, peur de ne plus pouvoir en repartir ensuite.

Partagée, déchirée... Comme on peut l'être du haut d'une falaise devant l'immensité de l'océan qui vous attire, vous aimante, vous pousse à vous y jeter sans réfléchir, et ce pas qu'on fait vers l'arrière parce qu'on sait que s'y jeter serait s'y perdre à tout jamais.

HUGO... Son LUI !

Celui pour qui elle a quitté tout ce qui avait été sa vie avant leur rencontre. Celui pour qui elle a brisé le coeur de Maleus qu'elle a tant aimé pourtant. Celui devant qui elle s'est sentie si peu de choses, futile et ignorante. Celui qui l'a émerveillée en lui parlant de politique et de l'histoire de ce Duché qu'il aimait tant. Celui pour qui elle a rangé ses chants insouciants et a eu envie de combler ses lacunes, de comprendre, de savoir toutes ces choses dont jamais on ne lui avait parlé. Celui qui a fait naître en elle ce sentiment si neuf, cette envie d'être brillante, intelligente, cultivée, de le rendre fier d'elle. Celui pour qui elle a rangé sa plume et ses vers pour mieux se jeter dans l'étude de toutes ces choses dont elle ne connaissait même pas les bases.

Hugo pour qui elle aurait pu vendre son âme, pour qui elle a perdu tous ses amis de son ancienne vie, les premiers la jugeant et lui tournant le dos, les seconds n'aimant pas ce qu'elle était devenue avec lui.. Hugo dont sa solitude porterait longtemps le prénom quand il la quitterait.

Hugo qui lui manquerait dans son sang et dans sa chair au point qu'elle en arrive à détester cet être qu'elle était et qui n'avait pas su continuer à se faire aimer de lui.


HUGO!

Comme il lui brûle les lèvres, ce prénom, à cet instant précis, alors que son image reste floue pourtant. Alors qu'elle lutte pour ne pas la regarder en face, surtout! Alors qu'elle se débat pour ne plus entendre cette mélodie qu'elle lui avait apprise, celle qui disait "Mon premier et mon second choix, mon rêve d'absolu qui ne tarit pas.."

Un combat, dont elle sait qu'elle sortira brisée, quoi qu'il arrive...

Dans sa tête, deux armées s'affrontent, dans le cliquetis de leurs armes s'entrechoquant avec violence, mais pas assez fort pour faire taire cette fichue chanson! Des troupes rendues folles par leur rage de vaincre, qui n'hésiteront pas à faire couler le sang, ce sang qui bat de plus en plus fort dans ses veines et dans ses tempes à elle. Une lutte sans relâche, avec des coups et des cris, des odeurs, et puis un goût de métal dans sa bouche où elle vient de se mordre la langue pour ne pas hurler. Une guère, dont les opposants hissent les couleurs de deux terres appelées passé et présent. A moins que ça ne soit haine et amour?

Deux uniques larmes naissent au bord de ses cils, et s'écoulent lourdement sur ses joues. Le voile de son regard se dissipe, elle est prête à voir. A LE voir.

Elle n'a pas besoin de lever les yeux, il n'est pas très grand. Son regard croise d'abord son nez.

Ce nez qu'il trouvait trop grand et sur la pointe duquel elle adorait poser le sien. Ce nez qui avait quelque chose de déterminé et de fier. Elle en caresse l'arête, arrive à l'espace entre celui-ci et ses lèvres, ce morceau de peau où chez lui "l'empreinte d'un ange" est si marquée que ça en a quelque chose de profondément troublant.

Ensuite, ses lèvres... Pas très longues, et plutôt fines, si ce n'est ce petit rembourrage si caractéristique au niveau de l'inférieure. Cette faible épaisseur qui lui donne à elle l'envie folle de le mordiller avec douceur, juste pour le faire sourire. Juste pour chasser ce qui le contrarie et ou le plonge dans ses pensées. Et puis, au coin de ses lèvres, il y a ces deux petits traits, un peu courbés, qui descendent vers son menton mais sans le rejoindre, lui donnant ce côté touchant et attendrissant qu'on les clowns tristes.

Son menton... Il est coupé sans l'être. Ce n'est pas un de ces mentons dont elle raffole à la base, tranchés nets. Non, le sien on a l'impression en le suivant du regard, de haut en bas, que cela va être le cas, mais soudain la ligne devient courbe, un peu hésitante, avant de s'achever sur un menton arrondi et légèrement saillant, mis en valeur encore par la petite fossette qui divise en deux la distance le séparant de sa lèvre. Cette petite fossette posée là comme une île au milieu de l'océan, et où elle aime à s'arrêter un instant pour reprendre son souffle au milieu de leurs baisers passionnés.

Enfin, trônant comme deux perles sur le haut de son visage, il y a ses yeux... Ses yeux qui ont quelque chose de touchant dans les doutes qu'on peut y trouver, et d'arrogant dans cette certitude en lui qui le caractérise trop souvent. Ce petit côté prétentieux qu'elle lui avait trouvé la première fois, mais qui au fond n'est qu'une armure comme nous en avons tous. Ses yeux qui ont cette couleur qu'on appelle toujours noisette mais qui elle la faisait penser à celle de certaines feuilles d'automne, avec quelques paillettes dorées dans le fond, quelques touches de vert à peine perceptibles... Un mélange poétique de toutes ces teintes chères à sa saison préférée à elle. Ses yeux où elle aimait tant voir le reflet de son sourire.

Ses yeux dont elle s'était si souvent demandée ce qu'elle aurait pu y lire le jour où il avait décidé de rompre, si il avait eu le courage de le faire comme un homme et non comme un bureaucrate ou un politicien, par simple missive, dans cette attitude qu'elle imagine si proche de celle d'un homme d'affaires réglant une affaire qui ne lui a déjà pris que trop de temps.

Ses yeux... Elle ne parvient plus à les lâcher, et la seule chose qu'elle abandonne alors, c'est la main dans laquelle la sienne a trouvé refuge, courage, force, confiance, pour venir jusqu'ici.

Immédiatement le froid l'envahit, et elle se rend compte du geste qu'elle vient de commettre. Elle ferme les paupières, très vite, très fort, ouvre les lèvres pour lui parler, mais aucun son ne sort, juste ce goût de regrets, de remords, de dégoût d'elle-même.



[* : Jean Jacques Goldman]
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Kernos
On n'avoue rien si l'on est innocent, les mots sont vains, les mystères indulgents.*

Le Berry, enfin... Terre redouté et attendue à la fois, première étape d'un long voyage qu'ils avaient entrepris tous les deux, il y a des semaines, au coeur de Briançon, veillant l'un sur l'autre, s'épaulant à chaque pas, avançant sur la route du destin en se tenant par la main pour être certain de ne pas se perdre en chemin, de se rassurer sur la présence de l'autre. Et cette route, aujourd'hui, les menait ici, à la frontière entre le Duché du Berry et celui du Bourgogne... Berry et Bourgogne, pour lui ceux n'étaient que des provinces où il avait exercé la charge d'ambassadeur pour le Lyonnais-Dauphiné, des lieux qu'il était curieux de découvrir, encore plus avec elle mais en même temps, à présent qu'ils se trouvait face à lui, une crainte venait s'insinuer en lui. Le Berry, cette terre où elle avait si longtemps vécu, cette terre qui avait joué un rôle si important dans sa vie, dans la femme qu'elle était devenue... Cette terre où elle avait partagé la vie d'un autre, cet autre qui l'avait brisé, abandonné, mais qui l'avait accompagné pendant des années... Cet homme pour qui elle avait quitté ce duché, sa vie, ses amis, pour l'accompagner jusqu'au Lyonnais-Dauphiné... Cet homme, ce fantôme de son passé qui l'avait tellement tourmenté, qui l'avait tellement fait souffrir, pour qui elle avait failli renoncer à la vie... Cet homme qui avait continué à hanter ses pensées, à se dresser entre elle et l'existence, la poussant à fuir, à repousser les autres... Cet homme qui voilait encore son esprit et son regard de chagrin, quand ils s'étaient rencontrés alors que lui-même souffrait du souvenir de son épouse, de l'amour qu'il éprouvait encore pour elle alors qu'elle l'avait rejeté depuis des mois.

Deux âmes tourmentées par l'amour, par leur passé... deux âmes qui avaient renoncé, deux âmes vacillantes qui s'étaient trouvées un soir, dans une taverne... Hasard? Destin? Volonté divine? Peu importait au final, ils s'étaient trouvés, ils s'étaient aimés comme si rien de plus naturel ne pouvait arrivé, comme s'il ne pouvait y avoir aucune autre issue que celle-ci: l'amour. Oui, il y avait eu des heurts, des larmes, des fuites, des tempêtes mais ils avaient tenu bon, ensemble, et trouvé un bonheur, une chaleur et une force de vivre qu'eux-seuls pouvaient se donner.... Son âme soeur, sa force, son existence, son souffle, elle était tout cela et bien plus à la fois: son évidence, son essentiel, son tout.

Voilà pourquoi il était là, sa main serrant la sienne alors qu'ils venaient de mettre pied à terre pour franchir la frontière séparant son présent et son passé, pour les fondre en une seule et même chose... du moins c'est ce que lui espérait. Affronter les fantômes de ce duché, oser parcourir les rues de Sancerre d'un regard neuf, loin des souvenirs, de leur emprise... chasser le passé pour l'emplir de leur présent, de leur avenir, qu'éclatent les chaînes du souvenir sous la déferlante, que la poussière des chemins et les pavés des cités soient purifiés et balayés par les trombes d'eau tombant du ciel... Sa main glissa hors de la sienne, comme elle semblait soudainement glisser dans ce passé qui tente de la broyer, de la noyer, de l'engloutir dans ses flots violents et obscurs.

Terwagne, ô belle Terwagne... à la fois si forte et si fragile... parfois tempête et tantôt brise... si passionné et si douce en même temps... Si femme, oui si femme, dans toute sa beauté et sa laideur, une femme véritable, humaine au sens le plus profond du terme et dans toute sa splendeur, avec ses doutes, ses rêves, sa violence et sa tendresse, ses peurs et ses joies... Elle se tenait là face à lui, les paupières clauses, les lèvres muettes... Il ne la laissa pas sombrer d'avantage, aussitôt il s'avança vers elle l'enveloppant de ses bras, la ramenant contre lui, l'étreignant de toute sa force et de son amour dévorant.


Si tu tombes, je te relève... si tu te noies, je plonge... Je t'aime Terwagne et je suis là, je serais toujours là quoi qu'il arrive.
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Terwagne_mericourt
Remplis ma tête d'autres horizons, d'autres mots. *

Ce ne furent pas ses bras qui l'enveloppèrent qui lui rendirent son souffle, même si forcément ils lui rendirent un peu de chaleur. Ce furent ses mots... Ses mots, comme une réponse à cette dernière lettre qu'elle lui avait écrite la veille et qui lui revint en mémoire.

" J'ai peur... Peur que la nostalgie ne s'empare de moi, je te l'avoue sans honte.

Si cela devait être le cas, si tu me sentais m'éloigner de toi en pensées ne serait-ce que quelques minutes, si soudain tu voyais naître dans mes yeux ce voile brumeux qui y était lorsque nous nous sommes rencontrés, je t'en prie, et même je t'en supplie, ne me laisse pas partir plus loin. Retiens-moi, avec tes mots, avec tes gestes, avec tout ce que tu voudras, mais retiens-moi! Avec douceur ou fermeté, avec tendresse ou passion, avec colère même si tu le veux, mais retiens moi, Kernos! Ne me laisse pas nous perdre, ne me laisse pas plonger, ne me laisse pas quitter le bonheur que tu as mis en moi... Je te le demande avec la même force et le même espoir que je mettrais dans une prière, parce qu'aujourd'hui, ma foi elle est en toi."


Ses paupières se levèrent, elle quitta les yeux de Hugo, et leva les siens vers la lune. Cette lune à laquelle l'homme contre qui elle était à présent la comparait depuis bien avant leurs aveux.


La Lune et Le Chêne...

Cela leur correspondait tellement bien, au fond. Il était en effet celui contre qui elle avait eu envie de prendre appui très vite, à qui elle avait confié ses tourments sans crainte d'être jugée, comme elle l'avait si souvent fait par le passé à des arbres de passage, elle qui avait toujours préféré leur compagnie à celle des hommes. Celui devant qui elle n'avait pas eu honte de ses larmes. Celui qu'elle avait senti si fort qu'elle avait eu l'impression d'en devenir elle-même plus forte. Fort et pourtant si fragile lorsque de ses branches hésitantes il était venu la frôler.

"D'un chêne à la lune"... C'était le titre d'une de ses premières lettres. Une lettre qui l'avait touchée, émue, et devant laquelle elle avait eu envie de retrouver sa plume d'antan. Il l'y avait comparée à cet astre qui "illumine l'obscurité de la nuit par sa douce clarté", et elle s'était dit que jamais sans doute on ne lui avait fait aussi joli compliment.

Sans quitter du regard l'astre diurne, elle inspira lentement, profondément, approcha ses lèvres de son oreille, et y glissa quelques mots à la fois légers et lourds de sens.


Envole-moi... Comme le "Ut" envole le "La".

Restèrent-ils ensuite longtemps serrés l'un contre l'autre de la sorte? Peu importe, au fond. Puisque pour eux tout n'était qu'éternité depuis bien longtemps. Ce qui en revanche est certain, c'est que cette frontière, elle finit par la franchir, sa main glissée dans la sienne, son âme unie à la sienne.

Le Berry, mais surtout son passé, elle allait non pas l'affronter, mais bien faire la paix avec lui, parce que son futur, elle voulait le construire sans plus de ruines dans le paysage.


[* : Goldman toujours]
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Terwagne_mericourt
Tu m'échappes déjà, là-bas... *

Le moment de quitter Sancerre et de reprendre la route approchait à grands pas, et malgré ses silences à ce sujet, plus l'heure se faisait proche et plus elle était angoissée, voir anxieuse.

Quitter le Berry ne lui posait pas de problème pourtant, aucun chagrin, puisqu'elle n'avait voulu y revenir que pour quelques jours, juste le temps de tirer un trait symbolique sur certaines choses de son passé afin d'ensuite pouvoir construire son futur en étant en paix avec son passé. Non, ce qui la mettait dans cet état de nervosité c'était de se dire que bientôt ils seraient de nouveau en Lyonnais-Dauphiné, dans ce Duché où son passé à lui se trouvait, où elle le croiserait à chaque coin de rue ou presque, où sans cesse elle craindrait qu'il n'en aie la nostalgie au point de...

Elle secoua la tête, naïvement, comme si ce simple geste allait chasser plus loin la pensée qu'elle venait d'avoir.

Retourner auprès de sa femme, tenter de recoller les morceaux, annuler la procédure d'annulation de mariage? Non, aucun risque! C'était idiot de se mettre à penser de telles choses! Totalement improbable! Il l'aimait elle, de cela elle ne pouvait pas douter, il le lui prouvait sans cesse, même si... Même si quelques fois ces derniers jours il semblait si "absent".

Une petite moue triste apparut sur son visage, alors qu'elle se levait pour rejoindre la fenêtre, étonnée qu'il n'aie toujours pas répondu à sa dernière lettre. Sans doute n'en avait-il pas eu le temps, après tout... Ou alors avait-il pensé que cela n'était pas nécessaire, puisqu'elle rentrait de Paris le jour-même? Oui, ça devait être cela... Il n'avait pas prévu qu'elle rentrerait alors que lui dormirait déjà, ni qu'elle se lèverait trop tard pour le croiser avant que lui ne parte le lendemain.

Et pourtant, malgré ses efforts pour trouver des raisons à cette non-réponse, elle ne parvenait pas à s'empêcher de se dire qu'au début de leur histoire, même lorsqu'il était certain de la retrouver à son retour de la Cour d'Appel, il lui écrivait... Il lui écrivait de jolies lettres, parfois longues, parfois courtes, mais qu'elle lisait en frissonnant d'émotion à chaque fois, impatiente de le retrouver, de lire dans ses yeux toutes ces choses qu'il avait couchées sur le vélin quelques heures plus tôt.

Après la moue triste, le soupir...

Un soupir tourné vers elle-même. Elle-même qu'elle aurait voulu moins craintive à la simple pensée de repartir vers le Lyonnais-Dauphiné, là où de nouveau ils devraient être discrets, se cacher, se comporter comme de simples "amis" partout tout le temps. Elle-même qu'elle aurait surtout aimé voir plus sûre d'elle, plus sûre d'eux, au lieu d'en train de craindre de le perdre au moindre souvenir d'Axel qui referait surface.

Axel... Comme il lui arrivait souvent de se sentir bien moins qu'elle, en toute chose, mais surtout dans son coeur à lui.

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Kernos
Remplis ma tête d'autres horizons, d'autres mots *

Le Berry, bientôt ils quitteraient ce duché pour regagner le Lyonnais-Dauphiné. Une semaine s'était écoulée depuis qu'ils avaient franchi la frontière ensemble, lui la serrant dans ses bras de toute la force et de tout l'amour dont il était capable pour l'aider à traverser cette épreuve, qu'elle puisse regarder son passé en face sans sourciller, s'en libérer pour ne laisser place qu'à leur présent et à leur avenir... Ensemble, comme à ce moment, ils l'avaient été à chaque instant, que cela soit à Sancerre ou à Thauvenay, c'est l'un contre l'autre qu'ils avaient vécu ce voyage... Prélude à ce que leur vie serait? C'est ce dont il rêvait, alors que le départ approchait.

Dans quelques jours, ils fouleraient les terres du Lyonnais-Dauphiné, alors qu'elle laisserait son passé derrière elle, en Berry, Kernos lui allait se retrouver à nouveau face à lui... mais était-ce vraiment le cas? Oui, une fois de retour là-bas, il retrouverait ses charges, ses amis, ses affaires et sa fille... mais aussi celle qui était encore son épouse, aux yeux de tous... Son passé était-ce cela qu'il allait retrouver en rentrant au pays? Debout dans la chambre, face à la fenêtre par laquelle il pouvait contempler les jardins et la région alentour, le Rouvray ferma les yeux... Les fantômes de son passé...

Autrefois il avait aimé une femme de tout son être, une femme qu'il avait rendu heureux, dont il avait affronté la maladie, les absences, la peur que la mort l'emporte, que le mal soit plus fort que sa vie... Cette femme qu'il avait épousé, avec laquelle il avait partagé sa vie durant maintes années, qui lui avait donné deux beaux enfants qui s'apprêtaient à rentrer dans l'âge adulte, avec qui il avait vécu tant de choses, des choses belles, des choses tristes... Cette femme dont il avait cru l'amour éternel... Cette femme qui l'avait rejeté avec haine en mettant au monde leur troisième enfant, mort avant de voir le jour... Cette femme qui l'avait plongé dans la solitude, le désespoir, la souffrance et le renoncement... Cette femme qui l'avait plongé dans un long hiver, qui l'avait fuit... Cette femme il l'avait tellement aimé qu'il avait consenti à demander que l'on dissolve leur mariage pour la libérer, qu'elle puisse vivre à nouveau dans le bonheur que lui ne pouvait plus lui donner, et même... aimer à nouveau... Cette femme, elle serait là à son retour en Lyonnais-Dauphiné... Axel... Son passé.

Le seigneur de Glandage ouvrit à nouveau ses paupières. Oui, ce n'était que passé tout cela, et rien d'autre. Ce voyage, ces jours passés en sa compagnie depuis Briançon, mais surtout ces nuits, car le soleil, leur amour ne l'avait connu qu'une fois le Lyonnais-Dauphiné derrière eux, n'avaient fait que renforcer sa conviction: Terwagne était son présent et son avenir, sa force, son bonheur, son rire, son souffle, son amour, son existence. Désormais, il n'y avait plus qu'elle qui comptait à ses yeux et dans son coeur, Axel appartenait à un passé bel et bien enterré, que même le visage ou la voix ne pourraient raviver... Ce feu était éteint depuis bien longtemps et les braises étaient devenues cendre qu'une tempête avait éparpillé aux quatre vents, nettoyant le foyer de son âme pour laisser la place à un brasier ardent illuminant son être entier d'une force nouvelle.

Le présent et l'avenir avaient désormais un seul et même nom, celui de Terwagne. Elle avait fait s'envoler le passé, le malheur, la fatalité qui l'habitaient lors de leur rencontre, chassant l'hiver pour lui donner un printemps nouveau qui avait refait naître des bourgeons sur ses rameaux desséchés et secs, emplissant son esprit et son coeur de mots, d'horizons qu'il n'avait jamais soupçonné... Sa Lune, elle lui avait donné une vie nouvelle, le tirant par la main hors du carcan dans lequel il se tenait jusqu'alors. Loin des tourments, loin du passé, elle lui avait ouvert les yeux sur une vie nouvelle, un amour jeune et neuf, intense au point qu'aucun mot ne pouvait le définir. Terwagne... elle lui avait réappris à vivre, à aimer et pourtant, tout cela était complétement différent de ce qu'il avait connu par le passé... Le passé, elle l'avait d'ailleurs noyé dans leur présent, au point qu'il se sentait un homme nouveau, neuf: comme la pluie qu'elle chérissait tant, elle l'avait purifié en faisant pleuvoir sur lui un flot continue de sensation, de sentiments, de gestes et de mots, balayant le reste pour en faire une terre vierge sur laquelle elle avait posé le pied.

Il avait beau appréhender le retour en Lyonnais-Dauphiné, parce qu'il faudrait à nouveau revêtir un masque face aux yeux des autres, attendre que les clercs le libèrent enfin des chaînes de son mariage qu'il traînait derrière lui comme un animal mort, pour pouvoir s'aimer à nouveau au grand jour et en toute liberté sans craindre les insultes ou les regards inquisiteurs... sans peur des jugements et de la jalousie... Mais sa conviction et son amour n'en étaient que devenus que plus fermes: sans Terwagne, pas de vie, car on ne peut vivre sans amour, et elle était la seule que son coeur espérait et attendait... la seule à mériter le nom d'amour, Terwagne.

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