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Info:
Premier récit concernant les Sans Visage qui fût retrouvé dans les archives de la ville de Takayama dans le Daimyo Oda

[RP] Sous la lune noire.

Murakawa
La forêt qui bordait Takayama était sombre et épaisse lorsque la nuit venait à la couvrir. Lorsque comme cette fois là la lune était invisible, elle se métamorphosait en labyrinthe inextricable où même les animaux nocturnes faisaient silence tapis dans leur antre.
C'est à l'abri de cette inquiétante végétation que Murakawa marchait avec attention sans même un lampion pour s'éclairer. Sa mine était sombre et soucieuse comme jamais un habitant de Takayama ne l'avait vu jusqu'alors, tout comme le kimono et le hakama noir qu'il portait juraient avec ses oripeaux habituels. Même la jarre de saké qui pendait habituellement à sa ceinture avait été remplacé par un jitte discret.

Plus tôt dans la nuit il s'était levé en silence. Avec précaution il avait sortit de derrière un panneau dissimulé dans le mur un petit coffre qui contenait le jitte et les vêtements sombres. Puis, prenant grand soin de ne pas réveiller Neko et sa "tante", il avait enjambé leur couche pour sortir furtivement. Himme avait miaulé lorsqu'il passa près d'elle mais elle s'était sitôt rendormi.
Murakawa s'était vêtu dehors avant de suivre le courant de la rivière qui le mènerait hors de la ville. Alerte, il s'assurait de pas être vu se fondant dans la nuit lorsqu'un passant venait à croiser sa route. Il n'était pas passé par la grande porte de Takayama de peur d'être vu de la garde mais avait escaladé le mur d'enceinte avec souplesse.
Puis, dans un pas de course tout à fait silencieux, il avait traversé les champs à grande vitesse pour rejoindre l'orée de la forêt.

Alerte, Murakawa s'avançait dans la végétation, prenant grand soin de ne pas déranger le silence. Il stoppait net de temps à autre, lorsque le bruit d'une branche qui se cassait tout prêt ou le remue d'un taillis venait troubler la quiétude sombre du décor. Murakawa observait les alentours, chaque sens aux aguets, puis se remettait en chemin lorsqu'il était sûr que personne ne le suivait ou ne zonait dans le coin.
Il marcha ainsi une heure sous couvert des arbres pour aboutir à une petite clairière perdue à flanc de montagne. Au milieu, comme une ile sur un lac d'eau noire, une petite cabane en ruine s'élevait péniblement, un ancien abris de bucheron qui auraient déserté cette zone trop difficile d'accès à leur goût.
Murakawa resta un instant à couvert des arbres, observa alentours, puis, sûr de ne voir personne, il traversa la clairière de son pas silencieux avant de pénétrer dans la cabane branlante.

L'intérieur était miteux, minuscule et sans âme. Une petite table était renversée dans un coin, deux tabourets s'évertuaient à combattre la poussière, et quelques ustensiles de cuisine en proie aux toiles d'araignée formaient toute trace de civilisation. D'un regard circulaire Murakawa constata qu'il n'y avait personne. Il n'était pas encore arrivé, et Murakawa préférait cela.
Il referma la porte en pénétrant dans la cahute et alla se fondre dans l'obscurité d'un coin de la pièce. Bientôt Il serait là, et Murakawa sentit un malaise monter à cette idée.

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--Sans_visage_kuchi
Venue du nord, une ombre encapuchonnée traversait elle aussi la forêt. Elle semblait flotter au dessus du parterre mousseux que sa longue robe noire frôlait en douceur sans qu'un bruit de pas ne se fasse entendre.
Elle perçut tout près un mouvement dans un buisson, et dans un bruit de cape son bras s'étira sur le coté avant de se rétracter aussitôt sous la robe. L'allure n'avait pas faibli ou forcé, aucune tension n'était venue troubler le corps de l'encapuchonné.
Derrière lui, dans le buisson qui avait frémis, un écureuil gisait maintenant sans vie, un senbon planté dans le poitrail.

L'ombre arriva bientôt à la clairière sur le flanc de la montagne où elle avait rendez vous. Elle n'avait jamais vu Te et aurait de loin préféré passer sa vie sans avoir à le rencontrer.
Elle avait tant d'aversion pour cet homme, ce qu'il avait fait était impardonnable, mais tel était la volonté d'Atama, elle n'était que le porte parole, seul Atama avait la vue d'ensemble et pouvait juger les actes de chacun.
Doucement l'ombre glissa sur l'herbe grasse et atteint la cabane qui était planté au milieu. Elle posa une main ganté de noir sur la porte, l'ouvrit lentement, et entra.

Te-shi, dit l'ombre d'une voix grave mais féminine, toujours à te cacher dans les coins.

L'ombre ôta son capuchon pour découvrir un visage impassible, celui d'un masque blanc poli où ne venait se refléter aucune lumière.
La femme masqué prit un tabouret et s'installa dessus. Chaque geste était fluide, sans à-coups, comme portés par les fils invisibles d'un marionnettiste.


Je suis ici pour entendre ton rapport, nous espérons de bonnes nouvelles, dit elle d'un ton sec.
Je suis également porteuse de la voix d'Atama-dono qui a une nouvelle mission à te confier au vu des récents évènements.
Mais allons! ne me fais pas perdre mon temps et dis moi ce qu'il en est.
Murakawa
Un frisson parcouru Murakawa lorsque la porte de la cahute s'ouvrit doucement pour laisser entrer l'ombre encapuchonnée. Bien que ce ne fut pas la première fois qu'il vit cette silhouette, les souvenirs qui y étaient associés opéraient toujours en lui ce type de réaction. Il s'avança lorsque kuchi parla, et s'inclina avec respect malgré l'insulte à peine déguisé qu'elle avait prononcé.
Kuchidono, répondit Murakawa sans un regard, je salue la venue du Porte Parole.
Il se redressa pour jeter son regard dans celui du Masque qui donnait leur titre aux Sans Visage, ceux à la face identique, anonymes et unis au sein du même corps. Cela aussi faisait remonter en Murakawa de déplaisant souvenirs, ceux d'une autre vie, d'un autre temps.

Un message? se demanda Murakawa. N'ai je donc pas encore remboursé ma dette envers eux qu'ils me confient une nouvelle basse besogne? Mais que pouvait il bien y faire, il n'avait pas vraiment le choix.
Les nouvelles sont bonnes Kuchidono, dit enfin Murakawa, les évènements tournent en notre faveur après la nomination écrasante d'Avatar et l'éviction des Tokugawa. Le travail fait en amont sur le plan monétaire commence à porter ses fruits, et bien que nous ayons dût influer quelques crises, tout rentre dans l'ordre à présent.
Je m'inquiète des évènements qui vont advenir à Nakatsugawa, je crains que n'ayons pas assez d'assise financière pour parvenir à supporter l'inflation nécessaire comme nous le souhaiterions. Mais je pense que Hadono pourra dans ce cas appliquer ses... méthodes.


Devant le peu de réaction de Kuchi, si tant est qu'un Sans Visage réagisse à quoi que ce soit, Murakawa compris qu'elle n'était pas venu pour cela. De toute façon il ne lui revenait pas de tenir le Porte Parole au courant des Grands Évènements, cela était la prérogative de Mimidono. Mais vous savez déjà tout cela n'est ce pas? lui demanda t il comme pour confirmer ses soupçons. Si vous êtes venu me voir c'est pour l'entendre de ma bouche ... pour vous assurer qu'il est bien mort hein?
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--Sans_visage_kuchi
Les yeux de Kuchi s'emplissaient de mépris à mesure que Te déblatérait son petit discours. Bien sûr le masque qu'elle portait avait cette vertu de ne laisser transparaître aucun sentiments, et c'était bien là une de ses fonctions premières, après bien sûr le fait de protéger l'identité de son porteur.

Te, lui, n'avait pas droit au masque, seul les Dix avaient ce privilège, et Kuchi ne tirait aucune fierté de cela. La responsabilité des Sans Visage allait bien au delà de la question de sentiments personnel qui auraient été une gène dans l'accomplissement de La Mission. Ceux qui s'étaient perdu dans de tels considérations l'avaient payé le prix fort.

Le doigt ganté du Sans Visage tambourinait sur sa cuisse en s'impatientant. Kuchi aurait voulu remettre à sa place ce méprisant sous fifre, mais bien qu'elle ait autorité sur lui, l'étiquette lui interdisait de l'interrompre.
Bien évidement Mimi avait déjà fait son rapport sur les évènements d'Oda et d'ailleurs lors de la réunion des Dix, et les décisions qui s'imposaient était déjà en œuvre partout dans le Shoguna.

Reste donc à ta place Te-shi! dit Kuchi à Te dans un geste imperieux.
Tu sais que nous sommes déjà au fait de ces choses, comment oses tu croire que ton avis sur la question nous intéresse? Comment oses tu même m'en parler ou t'y intéresser? Je devrai te trancher la gorge sur le champ pour avoir eut cette présomption.
Malgré le fond de la phrase, la voix de Kuchi était restée froide et tranchante comme la lame d'un katana.
Bien sûr que je suis là pour savoir si il est mort, pour connaître les circonstances de son trépas et si tu m'as apporté ce que nous t'avons demandé, voilà la seule question qui doit t'intéresser Te-shi.
Murakawa
Lui trancher la gorge. Murakawa savait qu'elle en était capable, et savait aussi qu'il ne ferait rien pour l'en empêcher, son serment lui interdisait. Et même s'il l'avait voulu, il n'était pas sûr de pouvoir se mesurer à Kuchi, il l'avait déjà vu à l'œuvre alors qu'elle était Yubi, là bas, en Otomo.
Pardonnez-moi Kuchidono, s'inclina humblement Murakawa, je suis allé au delà de mes fonctions et cela ne se reproduira plus.

Il se redressa et garda un instant le silence afin de rassembler ses souvenirs. Ceux qu'il rangeait bien au fond de sa boite crânienne et qu'il recouvrait d'une bonne couche de saké afin de les noyer, de les enfouir au plus profond de lui même afin qu'ils ne le hantent pas chaque heure du jour et de la nuit. Les tristes missions des Sans Visage.
Murakawa prit une grande inspiration, et commença son rapport.


Ça s'est passé il y a trois nuits de cela. J'avais appris que sa voiture devait arriver en Oda par le chemin détourné de Gifu afin d'éviter les embuscades. Le saké à vite raison des plus grand secrets, surtout auprès des ronins désœuvrés. Celui auprès duquel j'appris cette information avait été renvoyé du convois qui m'intéressait pour la même raison qu'il me parla : une sobriété plus que lâche.
Ainsi je suis parti dés la nuit tombé, prétextant un travail tardif à la mine. Il me fallut quelques heures au pas de course pour atteindre la portion de route que j'avais repéré sur les cartes. A cet endroit le chemin était à flanc de montagne et bordait un profond précipice, le lieux idéal pour le piège que j'avais en tête.
Je me cachait derriere une éminence rocheuse, et attendit à la faveur d'une demi lune que le petit convoi arrive.
Il ne se passa pas une heure que celui ci se montra. Deux ronins d'avant garde, une voiture à quatre porteurs et deux autres ronins d'arrière garde constituait toute la caravane. J'eus vite raison des deux hommes de têtes en les précipitant dans le vide du précipice grâce de l'effet de surprise. Je tuais deux porteurs en quelques coups de sabres, mais fut assaillit par les deux ronins de queue qui s'étaient précités. Le combat fut âpre mais rapide, et malgré que l'un d'eux me blessa grièvement la cuisse, j'en vint à bout suffisamment rapidement pour pouvoir rattraper le reste des porteurs qui s'étaient enfuis et mis fin à leur jour.
Lorsque je revins à la caravane, le représentant du clan était sortit de sa voiture et s'enfuyait lâchement dans un cri de panique. Je n'eut aucun mal à lancer le tanto que vous m'aviez confié dans le dos de ce large potentat qui s'est effondré aussi sec.

Comme vous l'aviez spécifié j'ai emporté et jeté plus loin tout les objets de valeurs et récupéré la missive dont il était le porteur.
Murakawa avala la grosse boule d'angoisse et de honte que sa propre histoire lui avait fait monter dans la gorge. Et ce faisant il sortit de dessous son kimono noire un rouleau de papier de riz aux scellés ouvragés qu'il tendit à Kuchi.
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Neko_girl
Tant de nuits s'étaient écoulées depuis sa fugue, tant de nuits passées à chercher l'oubli dans le sommeil, pour au final devoir revivre à chaque fois cette scène détestée,encore, toujours... A peine arrivait-elle à fermer les yeux que déjà son esprit s'angoissait de ces choses qui viendraient le tourmenter. Alors pas étonnant qu'elle ait un peu de mal à s'endormir.
Oh elle avait bien tenté de s'épuiser à faire consciencieusement tout ce que lui faisait faire Murakawa, mais rien ne suffisait, ni la coupe du bois, ni les corvées d'eau, rien ne venait à bout de son mal et chaque nuit le manège recommençait.

Et cette nuit ne faisait pas exception aux autres.
Sauf que cette nuit elle avait eu beau compter dans sa tête jusqu'au moment fatidique où son senpai entamerait sa série de ronflements, cette fois elle n'entendit rien qui puisse ressembler à un ronflement, de près ou de loin. A la place, un silence profond, même Rika et Hime dormaient déjà paisiblement. Puis un bruit ténu, une sorte de glissement très doux, suivi de quelques autres bruits qu'elle ne réussit pas à identifier, tournée qu'elle était vers le mur. Intriguée au plus haut point elle émit un petit gémissement ensommeillé et fit mine de se retourner de l'autre côté. Elle aurait pu lui demander directement, mais nan, elle préférait espionner. Plus marrant.
En plus, ce qu'elle vit la conforta dans sa décision.

Murakawa s'était levé, ouais, mais pas le Murakawa qu'elle connaissait. Celui-ci se tenait droit, son senpai adorait s'avachir dans sa position favorite du roseau-qui-ploie-dans-le-vent même en station debout, celui-ci se déplaçait sans un bruit à travers le bric-à-bras rangé à l'à-peu-près de la pièce, son senpaï à elle arrivait à peine à éviter les murs des maisons quand il rentrait de la gargote, et encore, quand il ne s'écroulait pas dans un fossé, celui-ci... non, ce ne pouvait être son Murakawa à elle.
L'impression étrange qu'elle avait déjà ressentie face à lui le soir où elle avait tenté de le priver de sa bouteille de saké lui revint en mémoire, aussi brève et faible que le vacillement d'une flamme de bougie.
Hime miaula, et Neko l'observa à travers les longs cils de ses yeux légèrement entrouverts lorsqu'il se glissa hors de la maisonnette.

Murakawa...
Qu'allait-il faire vêtu de cette façon ? Pourquoi tout ce secret ? Elle en était sûre, c'était un jitte qu'elle avait vu luire dans sa main.

A peine était-il sorti qu'elle se glissa rapidement hors de sa couche. Vite.
Elle enfila en hâte son hakama, un heureux hasard l'avait fait choisir noir, ce serait plus discret pour ce qu'elle comptait faire. Mais pas très pratique. Tant pis, elle n'avait rien d'autre à mettre et de toute façon avec un peu de chance elle serait vite revenue. Elle voulait simplement jeter un coup d'oeil, après tout c'était peut-être un... rendez-vous galant..? Avec un mari jaloux, d'où le jitte ? Bah, elle verrait bien.

Neko se glissa dehors sans un bruit et se mit à suivre son senpai, glissant de mur en mur en s'attendant à ce qu'il gagne un endroit discret du village. Ses pronostics quant au rendez-vous sentimental s'évaporèrent lorsqu'elle le vit dépasser le chêne centenaire qui aurait fait un excellent point de rendez-vous pour grimper le mur d'enceinte.
La curiosité raviva en elle une impétuosité qu'elle avait un peu perdue dans le malheur de ses souvenirs nocturnes, et tandis qu'elle grimpait à son tour la haute palissade aussi habilement qu'un chat, un semblant de sourire étirait les commissures de ses lèvres.

Murakawa se faufilait avec une aisance telle qu'elle mit un petit bout de temps avant de s'habituer à son allure, surtout qu'elle devait redoubler de précautions pour ne pas se prendre les pieds dans des branches tombées ou même les faire craquer. Heureusement elle avait pour elle sa jeunesse et son endurance, mais, surtout, sa curiosité à toute épreuve qui la faisait bouillir de hâte tout en l'empêchant de trop réfléchir du pétrin dans lequel elle était en train de se fourrer.
Parce que oui, vu l'aspect de la cabane plantée au milieu de la clairière, soit il avait plusieurs années de retard sur son rendez-vous, soit ce n'était pas vraiment une belle femme en kimono de soie qu'il s'apprêtait à rencontrer.

La prudence choisit de se réveiller à ce moment là dans l'esprit bourré d'adrénaline de la jeune fille, et au lieu de suivre tout de suite Murakawa elle préféra attendre dehors, protégée par l'épaisseur d'un buisson touffu. Le dos appuyé contre un arbre elle passa ses bras autour de ses jambes et posa le menton sur ses genoux, immobile et sage.
Quelque chose finirait bien par se passer.

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--Sans_visage_kuchi
Kuchi s'empara de la lettre et en examina le sceau. C'était bien cela, le clan **** . Le Sans Visage brisa le sceau sans vergogne et déroula le message pour faire apparaitre les premiers symboles. Elle put y lire :



    Au Chef Tokugawa Kotaro Takezo,

Veuillez recevoir cette missive et son porteur comme offre de paix durable...


Cela lui suffisait, il s'agissait bien de la lettre qu'il importait d'intercepter. Kuchi prit deux pierres à feu et enflamma le papier de riz qui se consuma rapidement avant de terminer en petit tas de cendre sur le sol dans lequel vin s'écraser le sceau à demi fondu.
Tu as fait ton travail Te-shi, les Dix en seront informés, ainsi que de l'outrecuidance dont tu as fait preuve à l'égard de la hiérarchie.
Kushi souriait sous son masque de voir Te dans l'inconfort de sa situation. Elle aurait voulu plonger son poing dans ses entrailles et le voir se tordre de douleur à ses pieds, mais savait se contenter de ce que ces mots lui arrachaient.

D'un balaiement de pied au sol elle éparpilla les cendres qui se perdirent dans la poussière de la cahute.
Bien, passons à ta nouvelle mission, dit elle. Atama-dono te fait passer le message suivant :
La lanterne de soie
Pendue sous le toit de l'okïya
Une présence Silencieuse

Elle n'avait aucune idée de ce que cela pouvait bien signifier. Chacun des Dix avait un code particulier pour communiquer avec ses phalanges, et Atama-dono était le détenteur des haïku, les codes des exécutions que seuls lui et les assassins comme Te pouvaient comprendre. Mas cela importait peu à Kushi. Sa mission n'était pas de connaitre les détails mais de transmettre la parole d'Atama-dono et des Dix.
Elle appartenait au conseil et participait aux Évènements, en influençait le court, et c'était cela qui importait.

Pourtant elle avait été comme Te avant, elle aussi avait tué sans comprendre, sans vouloir comprendre où les actes de chacun menaient l'ensemble d'une société. Sans vouloir comprendre qu'il suffit de pousser le bon domino pour que le reste s'effondre, et qu'il suffit d'en ôter un dans la file pour que la chute s'arrête.
Mais maintenant, oui, maintenant c'est elle qui plaçait les dominos, elle, Sans Visage Kuchi, qui avait pouvoir sur eux...
Neko_girl
...d'ailleurs elle faillit louper le quelque chose qui allait déterminer sa nuit.
Ses pieds s'étaient déjà endormis, engourdis par la fraîcheur et l'immobilité et elle sommeillait elle-même à moitié malgré sa position inconfortable. A son âge une course pareille nécessitait un temps de repos important et ce n'était pas les repas frugaux qu'elle partageait avec Murakawa qui l'aidaient à tenir le coup.

Ce fut donc le hasard qui lui fit lever la tête au moment où une ombre quitta celle des arbres pour se diriger vers la cabane. Neko écarquilla les yeux comme des soucoupes en voyant cette chose étrange se déplacer sans un bruit, sans déranger aucun élément du décor dans lequel elle se mouvait. De toute sa jeune vie c'était bien la première fois qu'elle voyait un spectacle aussi étrange... fascinant. Il se dégageait de cette ombre quelque chose de froid, d'inquiétant, on ne pouvait percevoir ses mouvements assez distinctement pour prévoir où elle se trouverait dans la seconde qui suivrait.

La jeune fille tout à fait réveillée eut envie de prévenir Murakawa de l'approche de cette ombre, en criant, en tentant quelque chose du moins. Était-ce elle qu'il attendait dans ce lieu secret ? Mais pour quoi faire ?? Quel lien entre son nonchalant senpai et cette créature ? C'en était trop pour qu'elle reste là à ne rien faire. Et puis maintenant qu'elle était venue, autant que ça ne soit pas pour rien.

Ses membres fins se déroulent comme du papier roulé, lentement elle déplia son corps froissé et courbaturé, puis après quelques hésitations tout de même elle finit par quitter l'abri de son buisson. Fort heureusement pour elle on lui avait enseigné à se déplacer sans émettre un seul bruit, et aussi peu d'efforts qu'elle avait mis dans la pratique de ses leçons, elle ne se révéla finalement pas trop mauvaise dans la pratique en situation d'urgence.
Se déplacer ainsi à découvert la mettait mal à l'aise, s'il prenait l'envie soudaine aux occupants de la cabane de sortir à cet instant ils ne pourraient pas manquer de la voir.
Lorsque son pied encore insensible buta contre une branche à moitié enfouie il lui sembla que le vacarme provoqué aurait suffi à réveiller tout le bois. Elle se tapit aussitôt contre terre dans une tentative désespérée de se fondre dedans, sans grand espoir. Le coeur battant à tout rompre elle tendit l'oreille, guettant le moindre bruit suspect en proveance de la cabane.

Une minute passa, et rien.
Ouuuuuf...

Le manège reprit et elle atteignit bientôt son objectif.
Neko se colla tout d'abord contre les planches pour écouter. Arf, ils parlaient à voix basse et de totue manière ce qu'elle arriva à entendre échappa totalement à sa compréhension. Enfin pas tout à fait, elle comprit quand même une vague histoire de guet-apens, de mission... et de Tokugawa...
Que faisait là le nom de sa famille ?
Il lui sembla que le dialogue touchait à sa fin ou du moins ralentissait, et la jeune curieuse ne put retenir une pointe de déception à l'idée de ne pas connaitre l'identité de l'interlocuteur de Murakawa malgré la méfiance naturelle qui commençait à faire effet face à un être dangereux et puissant. Et puis même, si sa famille était mêlée à une histoire étrange, il fallait qu'elle sache à laquelle.

Elle inspira profondément, une fois, deux fois...

Puis elle risqua un coup d'œil par la fenêtre....

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Murakawa
Murakawa regarda la Sans Visage bruler le courrier en rassemblant tout ses efforts pour contenir la rage qui montait en lui. Neufs vies perdues, neufs vies qu'il avait lui même ôté pour qu'un simple message n'arrive pas à son destinataire. Neuf vies pour un petit tas de cendre dans une cabane branlante.
Soudain l'oreille du takayamite fut troublée par un bruit à l'extérieur. Le sol foulé legerement par une présence tout près de la cahute. Kushi ne semblait pas l'avoir perçu, chose étrange car elle n'avait rien à envier aux perceptions de Mimidono. Mais elle semblait perdue dans une pensée qui obscurcissait sont jugement. Aussi Murakawa ne dit rien, espérant de toute son âme que celui ou celle qui était là s'enfuie à toute jambe avant que le Sans Visage ne se rende compte de sa présence. Avant qu'il signe son arrêt de mort.

Il en était là de ses réflexions lorsque Kushi donna les instructions. Les trois vers qui formaient un lieu, une date et un nom lorsqu'on savait les décrypter.
La lanterne de soie
Pendue sous le toit de l'okïya
Une présence Silencieuse
Ici, ce soir, ... Avait il bien compris? était il possible qu'on lui demande une telle chose? Était-ce un test pour éprouver sa loyauté et son jugement? En serait il seulement capable? Cette mission pourrait fort bien signifier son arrêt de mort car jamais sa cible n'avait été d'une telle envergure, d'une telle force, à ce point dangereuse.
Te prit alors le pas sur Murakawa. Son esprit devint claire et attentif, plus rien n'existait que le haïku et le visage de ce jeune garçon qu'il n'avait pas revu depuis tant d'années. Un rapide inventaire de ce qui l'entourait et des armes dont il disposait. Il aurait souhaité être davantage pourvu que de quelques shurikens et d'un jitte, mais devrait s'en contenter.


Kushidono, dit Te comme la coutume le voulait, le message est transmit et Te accomplira la volonté d'Atamadono et des Dix.
Mais Murakawa refit surface à cet instant. Il ne souhaitait pas le faire, non, qu'ils arrêtent de lui réclamer la vie des autres comme on vend un champignon sur le marché. Qu'ils lui rendent son trésor, sa vie, et qu'ils le laisse en paix vivre une vie de paysans, lorsque les seuls préoccupations sont d'avoir le temps de se rendre à l'Obaké et de souhaiter un ciel clément pour pouvoir faire une partie de go sous un cerisier du jardin du Sô.

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--Sans_visage_kuchi
Kuchi eut peur de coprendre la réaction étrange de Te lorsqu'elle lui avait transmit le message. Elle avait toujours été attentive au langage du corps qui était bien souvent plus révélateur que les mots, et bien que Te se maîtrisa parfaitement, elle perçue dans la tension de son corps et dans les gestes maîtrisés un danger imminent. Serait il possible qu'Atama-dono ait demandé son exécution? Elle qui avait servit les Sans Visages bien au delà des prérogatives qui étaient les siennes. Elle qui avait été jusqu'à mettre fin aux jours de sa propre famille pour le bien des Dix. Comment osaient ils? Quelle insulte de croire qu'elle se laisserai faire, que de croire que Te serait capable de la vaincre. Si ils souhait...

C'est alors qu'elle perçu le mouvement. Léger, à peine une ombre à la fenêtre dans le coin de son regard. Elle se blâma de na pas s'être rendu compte de la présence d'une troisième personne avant de l'avoir vue. Alors qu'elle n'était qu'une simple phalange elle l'aurait entendue venir, l'aurait senti approché , et en aurait fini avec elle avant qu'elle ait pu même la voire. A croire que les responsabilités vous émoussaient les sens.

C'est donc en traitre que Te voulait en finir avec elle. Par le concours d'une autre personne qui était surement là pour l'attaquer dans le dos. Mais ton projet est éventé. C'est toi méprisable traitre qui finira égorgé sur l'herbe grasse de cette clairière, et qui que soit ton renfort, tu le verras mourir avant qu'il ne tente quoi que ce soit.


Bien, dit Kuchi de sa voix neutre, accomplit ta mission. Je vais rentrer à présent car on m'attend, je ne suis pas...

Elle ne finit pas sa phrase. Dans un mouvement étrange elle se leva tout à coup de son tabouret en entrainant sa cape noire qui sembla occuper un instant tout l'espace de la vieille cabane. Dans la confusion ainsi créée, un tanto fendit les airs. Il filait droit vers la fenêtre, droit vers le front qui en dépassait, droit vers la menace extérieure...
Murakawa
Elle ne semblait se douter de rien, et Murakawa était tout près à la laisser partir. Il savait fort bien ce qui lui en couterait de désobéir aux ordres, de la laisser en vie alors que de toute évidence les Dix avaient estimé qu'elle représentait un danger pour l'exécutions des Évènements à venir. Enfin les Dix, les Neuf plutôt, il doutait fort qu'elle eut participé au vote de sa propre exécution.
La laisser en vie signifierai qu'il devrait les affronter tous, retourner dans le sanctuaire sans visage pour le récupérer au risque qu'ils se fassent tuer tout deux, mais il fallait mettre un terme à cette situation, et Murakawa était maintenant bien décidé à leur tenir tête.

Il la vit alors. Cela ne faisait aucun doute dans son esprit. La petite tête qui venait d'apparaître à la fenêtre était celle de Neko, il reconnaitrait ce regard curieux entre mils maintenant. Et la peur s'empara de lui.
Si Murakawa avait remarqué la jeune fille il ne faisait aucun doute que le Sans Visage l'avait vu lui aussi. Et Kuchi ne la laisserai certainement pas en vie. Personne n'avait contemplé le masque blanc sans y être invité et avait put le dire à qui que ce soit. C'était pour eux le visage de la mort, impassible et froid, le dernier souvenir qu'ils emportaient avec eux.

Murakawa n'eut guère le temps de réfléchir, et Te reprit à nouveau le dessus dés que Kuchi entra en action. Dés que l'éclair du tanto fusa dans les remugles de tissus noir de la cape, Te décocha un shuriken qui alla frapper le couteau dans sa course et le déviait juste avant qu'il ne passe à travers l'encadrement vide de la fenêtre et ne termine sa course entre les yeux de Neko.

Fuis! cria Murakawa en se ruant sur Kuchi, Cours Neko! les bois! dépêche toi! l'implorait il en s'armant de son jitte.
Mais Kuchi ne s'en laisserai pas compter, Murakawa pouvait être sûr qu'elle vendrait chèrement sa vie. Le jitte qu'il avait décoché avait loupé son coup pour ne déchirer que le tissus noir du vêtement du Sans Visage, et Murakawa sentit la douleur d'une lame qui venait de pénétrer dans son flanc...

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Neko_girl
Il avait fallu quand même une petite dose de courage pour prendre la décision de suivre son senpai hors du village, encore un peu plus pour le filer pendant une bonne heure à travers une forêt qui lui était totalement inconnue, et plus encore pour se décider à quitter l'abri tout relatif de son buisson et oser regarder par la fenêtre sans savoir ce qu'elle y verrait.
Parce que même si Neko n'était pas une héroïne absurde comme dit ailleurs, elle était tout de même issu d'une grande famille d'Oda et son éducation avait été pourvue par une famille alliée non moins digne de respect. Alors même si le tempérament égoïste et vaniteux de la fillette avait causé quelque souci à ses maîtres, elle n'en gardait pas moins ce qu'on pourrait appeler "un bon fond", modulé et taillé par des générations d'hommes et de femmes d'honneur.

Pourtant au moment où la lame courte accrocha un rai de lune sous les replis noirs de l'ombre, on eut dit qu'elle n'en possédait plus une once. Ses lèvres au dessin enfantin s'ouvrirent de surprise et ses grands yeux prirent un expression étonnée, vaguement réprobatrice, mais ce qui se reflétait dans ses yeux était bel et bien de la peur.

Il est des secondes qui prennent toute leur importance par le danger qu'elles recèlent, et lorsque l'adrénaline pulse dans le sang, inonde les muscles, ces secondes là semblent une éternité pour celui qui va mourir.

Elle aurait voulu courir pour échapper au tantô. Elle l'avait vu manié par des maîtres, elle savait la dangerosité qu'ils représentaient au poing ou au lancer.
Elle aurait voulu fermer les yeux pour ne pas voir cet éclair froid foncer sur elle.
Elle aurait voulu dormir dans les bras de Rika, là-bas dans la cahute de Murakawa et que sa course folle n'ait été qu'un cauchemar.
Elle aurait voulu... encore plein de choses...

Une morte en sursis, c'est ce qu'elle était. Encore un fragment de seconde et sa vie se briserait, frappée de plein fouet par le poignard. Elle pouvait entendre la plainte presque inaudible de l'air déchiré, elle le voyait s'approcher, une lumière si ténue, bleutée, elle la trouva jolie, captivante.
Elle eut une pensée amusée pour le paquet à forme oblongue qu'elle avait caché sous son baluchon défait. Peut-être qu'il lui aurait été utile ici.
En tout cas il était bien trop tard, mais cela ne l'effrayait plus.

Bientôt elle pourrait retourner se reposer...



*dzinng*


Le bruit résonna dans son esprit vidé comme une de ces clochettes qui marquent la fin d'un envoûtement. Elle vit le tantô qui l'avait tant hypnotisée tomber par terre, intercepté en plein vol par autre chose. Donc quelqu'un était là, quelqu'un qui venait de lui sauver la vie.

NON !

Un cri intérieur.

L'existence suspendue de la jeune fille reprit tout à coup son cours et les sens qui lui avaient été ôtés par la lame assassine s'engouffrèrent dans son corps avec la force d'un torrent.
Elle ressentit les quelques échardes qui s'étaient glissées sous ses doigts, le goût de sa salive qui avait prit la saveur de sa peur, suffoqua sous la forte odeur de bois et de poussière et surtout, surtout...


Fuis! Cours Neko! les bois! dépêche toi!

Le déclic final.
Murakawa était là, c'était lui qui venait de la sauver, son senpai, le même avec lequel elle se chamaillait à longueur de journée, Lui !
Neko articula un mot que personne n'entendit, sa pâleur était extrême lorsqu'elle se remit debout pour obéir à son senpai.

Elle était un faon que son instinct pousse à courir de toutes ses forces lorsque le prédateur l'a découvert malgré son camouflage, sur des jambes qui vacillent, l'esprit tendu vers un unique but : survivre.

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--Sans_visage_kuchi
Elle avait vu son tanto dévié de sa course par un éclaire blanc et plongé son regard masqué dans celui de la jeune fille apeuré. Te ne lui avait fournit qu'un maigre répit, Kuchi prendrai plaisir à traquer l'animal, à l'acculer et à le saigner. Elle aimait la chasse et se grisait à l'avance de pouvoir jouer avec cette nouvelle proie.

Te s'était jeté sur elle dans un geste désespéré et maladroit. Ne se rappelait dont il pas de ses leçons, des émotions dont il devait faire fie s'il voulait que ses mouvements gagnent en rapidité et en souplesse? Décidément il n'avait rien à faire chez les Sans Visage, et Kuchi se ferait une joie d'ôter ce poids mort de leurs troupes avant de s'occuper elle même du reste de l'organisation qui avait voulu l'évincer.

Un pas de coté avait suffit à esquiver le jitte qui transperça la cape noir. Kushi enroula le tissu autour de son bras et le tendit pour emprisonner l'arme. Un demi tour sur elle même pour entrainer Te dans son élan, sa main s'était déjà armé d'un autre tanto, et elle termina son mouvement en l'enfonçant profondément dans le flanc de l'assassin qui stoppa net.

Kushi passa un bras autour du cou de Te en maintenant la pression sur sa lame qu'elle tournait doucement afin d'accentuer la douleur. Ainsi immobilisé elle l'entraina doucement au sol. Le masque s'approcha de son adversaire et elle lui souffla doucement à l'oreille.


Tu connais cette fille Te? Tends l'esgourde et écoute la nuit, sifflait elle en tournant la lame dans la blessure, tu l'entendras crier, supplier que je l'achève avant que tu ne la rejoigne, tel est le prix que tu paieras pour ta traitrise.

Et elle donna une pression supplémentaire sur le tanto qui s'enfonça jusqu'à la garde dans le flanc de Te.
Ainsi elle sûr qu'il ne bougerai pas d'ci et que la vie ne tarderai pas à le quitter.

Elle se redressa dans un froissement de tissu et sortit de la cabane en laissant Te agoniser derrière elle. Dans la clairière le masque blanc se tendit comme un radar dans la nuit, et lorsque Kuchi perçut la course folle de la jeune fille elle s'élança à sa poursuite dans la forêt.
Sa proie était jeune, affolée et désorientée. Kuchi n'eut aucun mal à suivre la piste, silencieuse et précise. Et bientôt elle la vit devant elle, entendait son souffle court et distinguait son odeur parmi les fragrances de la forêt humide.
Le Sans Visage disparu soudain dans sa traque, il n'était plus sur les talons de Neko.

Kuchi avait rapidement dépassé la jeune fille, furtive entre les arbres en prenant grand soin de ne pas être vue ni entendue. Elle aimait la théâtralité qui distillait chez l'adversaire une peur de l'inconnu, du surnaturel. Et ainsi elle se ménagea une apparition dont elle avait le secret.
Sa proie dépassée, elle se mit soudain en travers de son chemin, la grande silhouette noire ornée d'un masque blanc comme une apparition immobile devant Neko.

Tu vas quelque part jeune fille?, lui dit Kushi sans émotions.
Neko_girl
Rien n'existait plus, ni les feuilles qui lui fouettaient le visage dans sa course, ni les branches tendues comme des serres qui la retenaient sournoisement par ses vêtements. Elle essayait de ne pas penser à ce qui se passait dans la cabane, s'arrachant à l'emprise des arbustes griffus par des gestes désordonnés, les yeux hagards et perdus.

Courir droit devant sans se soucier de la direction, mettre le plus de distance possible entre elle et cette ombre.
Allez, ignore tes poumons qui brûlent.
Ignore tes pieds délicats zébrés de rouge.
Ne pense pas, fuis.

La fugitive n'entendait plus rien derrière elle, parfois l'envol d'un oiseau nocturne dérangé dans sa chasse ou la fuite d'un petit animal, mais mis à part sa propre respiration saccadée, rien.
Sans s'arrêter de courir elle s'autorisa une brève pensée. Est-ce que Murakawa l'attendrait à l'entrée de leur cahute pour la sermonner d'être partie se balader en pleine nuit ? Oui... oui ça ne pouvait finir que comme ça. Tout ceci n'était qu'un rêve, un rêve d'enfant fugitive parce qu'elle ne faisait que cela, fuir, depuis son départ du château. Murakawa serait là, elle le prendrait dans ses bras et elle oublierait tout, et elle ferait des efforts pour être comme lui, et elle ne se plaindrait plus jamais, et, et...


Tu vas quelque part jeune fille?

La mélodie de ses rêves ralentit, comme ses pas, et mourut sur quelques notes inachevées.
L'ombre se tenait devant elle, issue de ses peurs et de l'obscurité où stagnait la mort. Mais Neko était trop épuisée pour avoir peur, pour s'étonner de quoi que ce soit. Elle sentait que ses jambes allaient se dérober sous elle lorsque soudain une phrase franchit ses lèvres.


Alors, tu as tué mon senpai.

Ce n'était pas une question.
Si cette ombre était là c'est que le corps de Murakawa devait se trouver sur le sol de terre battue de la cabane.

Souvenirs...

Solitude...

Ils n'avaient été que de vagues silhouettes douées de parole qui avaient fini par la blesser, tous. Même Kazushi.
On n'avait voulu d'elle nulle part, ni au sein des Tokugawa, ni au sein des Miyamoto. Sans famille, sans personne pour lui expliquer ces choses qui la faisaient pleurer lorsqu'elle était enfant. Sans personne pour essuyer doucement ces perles qui roulaient sur ses joues, ni même pour les voir.

Mais Murakawa, il s'en fichait bien. Murakawa l'avait prise sous son aile sans rien demander, il avait patiemment commencé à élaguer l'arbuste sauvage qu'elle était sans se soucier des épines trompeuses, et...


... et on venait de le tuer.


La colère était une chose mauvaise pour ceux qui désiraient se battre, on le lui avait dit, répété cent fois. Mais là c'était différent. C'était quelque chose de froid qui apaisait la douleur qui menaçait de déborder, quelque chose qui lui faisait ignorer l'état de fatigue avancé dans lequel elle se trouvait, quelque chose de désespéré.

Neko fléchit les jambes pour attraper à tâtons une grosse branche qui trainait par terre et la brandit devant elle.

Elle savait bien que ce serait un rempart bien dérisoire contre l'art de tuer de cette ombre, mais en tout cas, elle ne tremblait plus. Murakawa serait fier d'elle.

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--Sans_visage_kuchi
Son senpai? tiens donc, voilà qui ajouterai encore au délice de voire cette fille tomber. Oh comme Kushi espérait que Te soit encore vivant, se tordant de douleurs dans une boue de poussière et de sang, qu'il soit encore vivant pour entendre ce qui allait advenir à sa petite protégée, pour l'entendre l'appeler, lui supplier de venir à son aide sans qu'il puisse bouger le petit bout du doigt. Et peut être que Kuchi serait chanceuse, peut être tiendrait-il le coup jusqu'à ce qu'elle lui rapporte la tête bien faite de cette fille, les yeux révulsée et loin, si loin de son cou.
Tant de petits plaisir espérés que masquait la face impassible du Sans Visage.

Les bras sous sa longue cape, il observait sa proie, en goutait la colère et la frustration. Oh comme tout cela était réjouissant.

Il a hurlé comme un enfant, supplié pour sa vie et pleuré dans son sang, voilà comment est mort ton "senpai", avec la dignité d'un porc, disait la voix sous le masque, sans haine et sans joie, une voix de fer blanc.
Et toi, toi il t'as bien enseigné, oh oui digne apprentie de Te. Tu l'as abandonné à son sort funeste, tu t'es enfuie pour sauver ta vie. Tu y as perdu ton honneur, et qu'y as tu gagné? Quelques minutes supplémentaires voilà tout.
J'espère qui tu en as profité.


Et devant l'arme de bois brandit par Neko, le bras du Sans Visage paru de sous sa cape, puis sa main gantée qui tenait une garde noire de jais, et enfin une lame, noire et interminable, comme extraite du trou béant de l'enfer.
Kuchi tenait son katana pointé vers le ciel, puis, dans un léger coup de vent qui souleva une mèche de Neko, le sabre se trouva pointe au sol, presque invisible devant le tissu noire qui vêtait le Sans Visage.

La branche de Neko se fendit avant que la plus grande partie ne tombe au sol dans un bruit mate. Ne restait dans les mains de la jeune fille qu'un tronçon de quelques pouces.

Le tranchant de la lame apparue soudain contre le cou de Neko, la pressant sans toutefois la couper, l'oppressant sans toutefois la blesser. La main du sans visage était ferme et d'une immobilité parfaite. Le masque spectral penchait lentement d'un coté et de l'autre, comme hésitant entre trancher dans le vif et faire durer le plaisir.
Oh comme tout cela était réjouissant.

Kuchi avait cette manie sadique des enfants et des chats. Cette manie qui consistait à faire durer leur proie, à jouer avec jusqu'à ce qu'elles n'en puissent plus, jusqu'à épuisement total, et seulement alors ils en terminaient avec elles.


Court, dit elle à Neko, allez! court pour ta vie!
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