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[RP] Etre ou ne pas ętre une Corleone…

Erwelyn
[A Nevers, poil au derrière, fin novembre 1458]

Ahem… Lynette ?


Le toussotement gêné qui venait d’arriver jusqu’à ses oreilles avait été formulé par les deux sœurs les plus célèbres du royaume, celles qu’on ne présente plus tellement leur réputation les précède avant même qu’elles aient pensé à partir. Lynette, coupe à la garçonne et cheveux qui repoussent tout doucement, parchemin en main et fiole de liqueur de poire devant elle, était assise sur le rebord d’une fontaine. Poneybouboule, cadeau de sa suzeraine préférée de elle lors de son ennoblissement, broutait non loin l’herbe qui commençait à bien geler en Bourgogne.

Levant la tête, la mainoise observa donc un instant ses deux amies. C’était pas trop le moment de la déconcentrer dans la mission qu’elle s’était fixée ce jour, mais les ponettes passaient tout de même avant tout. Elle laissa de côté le plan qu’elle avait commencé à dessiner.
Pourtant, elle y était presque, elle le sentait ! Pis son plan était quand même superbement illustré, elle s’était vachement bien appliqué : un Vaxichou représenté avec un bon bide de nobliau, un sourire débile sur le visage, une fausse épée en bois, qui s’approchait d’un piège intelligemment concocté. Le Duc en question allait mettre le pied sur un tas de feuille qui recouvrait un énorme trou béant, creusé à même le sol de la forêt. Celle-ci étant représentée par un tas d’arbres et plusieurs poneys roses en train de manger. Elle-même s’était dessinée plus loin, avec une robe rose, planquée derrière un arbre. Et puis elle avait mis des flèches partout : « avancer ici, super piège de la mort qui tue » au-dessus du tas de feuilles, « Lynette stop » derrière l’arbre, « poneys roses » devant la clairière aux poneys, et bien sûr « réserve d’alcool pour faire la fête » avec une flèche pointée sur sa besace.

Le plan infaillible quoi !

Il suffisait juste à la mainoise d’amener son faux-futur-mari jusque là, le faire marcher sur le tas de feuille, et il s’écraserait au fond du trou. Soit il mourait tout de suite, soit il se pétait une jambe et agoniserait des jours durant, crevant de faim en prime. Autant dire que Lynette préférait largement la seconde solution, histoire de se délecter quelque peu de la fin du Vaxichou.
Bon, il lui fallait aussi creuser ce foutu trou, mais avec les écus qu’elle se trimballait depuis des mois après la vente de ses champs et de son échoppe, ça devrait être jouable. Y aurait bien un ou plusieurs gamins qui seraient prêts à s’y mettre moyennant finance.

Le plan fut donc enroulé et rangé dans sa besace, à l’abri des regards curieux des sœurs Bogdanov, qui étaient encore persuadées que Lynette vouait un amour sans faille au duc bourguignon. La fiole de liqueur de poire, cadeau de son parrain invisible lors de son baptême fut tendue à la blonde et la brune, après en avoir bu une gorgée.


Oui ?
C’est à dire que… on a travaillé dans un champ cette semaine…
Et ? Vous l’avez cramé c’est ça ? Vous voulez que j’aille voir le propriétaire pour arranger ça ?
Non, non… mais c’était une femme…
Et elle s’appelait Manon ? Bon, toutes les Manon veulent pas forcément sauter sur Roudoudou tu sais Mahaut. Y en a des biens chuis sûre. Et pis bon, c’était qu’un bain fina…
Hiiiiiiii
Rha mais non, pas Manon !
Bon, quoi alors, elle a essayé de vous chouraver tous vos tonneaux ou quoi ?
Mais non Lynetteuuuh ! C’était ta tata Sad !


Et là, grand silence de la part de la mainoise. Sa tata Sad… ça faisait un moment qu’elle n’avait pas pensé à elle. A vrai dire, elle évitait même d’y penser depuis leur dernière rencontre. La Corléone avait refusé de lui raconter quoi que ce soit sur sa mère, et c’est amère que Lynette avait repris la route vers le Maine. Y avait eu quelques courts échanges de courriers, mais rien qui ne pouvait créer un véritable lien entre la tante et sa nièce. Et en aucun cas elle n’aurait pu imaginer sa tante posséder un quelconque lopin de terre à Nevers, elle l’imaginait plutôt arpentant les routes du royaume

Ses lèvres s’entrouvrirent plusieurs fois, sans qu’aucun son n’en sortit. Enfin, c’est un minuscule son que produisirent ses cordes vocales.

Je…

Avant de se lever d’un bond et de reprendre la fiole de liqueur des mains d’Orka, buvant deux ou trois gorgées cul sec.


Ben si elle croit que j’vais aller la voir, elle se fourre l’œil dans le doigt, j’vous préviens !

Au fond d’elle, elle avait surtout peur d’en découvrir plus sur sa mère. Floraine avait été pour elle un exemple à suivre, l’avait mis en garde contre nombre de choses, lui avait fait découvrir les plantes, la façon de soigner les gens… Oh, évidemment, ça n’avait pas toujours été facile. Pas le droit de parler aux garçons, des hivers rigoureux, aucun contact avec quiconque de sa famille durant toute son enfance… mais qui pouvait se targuer d’avoir eu une enfance facile et dorée ici bas ?

Trouillarde de tomber sur elle, Lynette se dirigea vers Poneybouboule et attrapa ses rênes avant de le tirer en direction du centre bourg. Si elle se planquait dans sa chambre jusqu’à leur départ, elle minimisait les chances de croiser la Corleone.

J’vais à l’auberge, faites-moi signe quand on repartira de ce trou.

Soucieuse, elle fit quelques pas avant de se rendre compte qu’elle avait été assez sèche avec les ponettes. Se retournant, un petit sourire leur fut adressé.

Merci…

Et la fiole tendue…

Tenez, prenez-en soin, j’y tiens comme à la prunelle de mes yeux

C’était juste une fiole certes, mais pas n’importe laquelle. Yeux fixés sur la terre battue puis sur les pavés du bourg, Lynette se remémora la discussion houleuse qui s’était déroulée en Touraine avec Sadnezz. Concentrée sur ses bottes, elle ne vit pas arriver la forme qui la percuta sèchement et l’envoya valser au sol, sa jambe gauche étant encore un peu faible. Mine boudeuse, c’est d’un ton agressif qu’elle invectiva le responsable de la chute, rattrapant les rênes au passage pour essayer de se relever.

Pouvez pas faire attention où vous marchez, spèce de…

Et ses mirettes tombèrent enfin sur le visage de la personne qui se tenait en face d’elle.

Bordel…

Comment aurait-il pu en être autrement ?
Si ce n’est pas toi qui vient à la Corleone, la Corleone viendra à toi…

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Sadnezz
Spèce de...? Vieux relent bonnifié* ? Vieille tante presque évitée mais pas assez?

Son sourcil droit devint accent circonflexe et ses lèvres se pincèrent . Pas changée Lynette, peut être un peu plus péteuse qu'avant, pour preuve elle se cachait d'elle. Alors bien que les parentes n'étaient pas fusionnelles pour un sous, Sadnezz avait quand même pensé que sa nièce viendrait la saluer avant de se terrer dans son trou avec sa bande de trublionnes. Mais non, vas-y que j'tenvoie mes copines faire le sale boulot et que j'fais comme si j'savais pas que t'étais là. Tout à fait Corleone ça. Sad secoua la tête doucement en agitant ses doigts osseux.

Deux, pas une mais deux! La Mao et la Orka blondasse. Deux de tes amies , les mains dans la bougnasse de mes terres, forcement ça passe pas inaperçu.

Elle ajouta en levant les yeux au ciel:


Si au moins elles savaient récolter les épis... Correctement.


Et de prendre un air de parrain Corleonien qui te la joue tres déçu, avec cet air navré qui cache la vengeance qu'il a dejà assouvie en trucidant toute ta famille et le chien... Bon, pas la famille, vu que c'était elle la famille, disons toute ta bande de poneys multicolores. Et le chien. Elles étaient de passage dans la région et n'étaient pas du genre a se pointer incognito...

Lorsqu'elle l'avait vu marcher tête basse, filant vers on ne savait quel trou de souris pour s'y cacher... Son sang n'avait fait qu'un tour. D'où la violence proportionnelle du choc. Une envie de crier un théatral " Haaaa je t'y prend Lynette Corleone!!" , envie vite ravalée pour en laisser poindre une plus - ou moins - discrète. Les poneys rose, c'est comme les Penthièvres : T'en trouve un, tu peux être sûre qu'il y en a vingt derrière.

Sad se frotta machinalement l'épaule, qui allait certainement bleuir sous peu. Bordel... Bordel... Et grossière avec ça. Une vraie j'vous dis, une vraie Corleone malgré elle. La Belladone pointa un index accusateur sur sa nièce et plissa les yeux.


Et elle va où comme ça la bleusaille?? Mhh??


Rabaisser, prendre sur le fait, humilier... Pour sûr qu'une vraie Corleone surenchérirait, pour l'honneur.


* Nom de baptême trucmachichoïste de Sadnezz.
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" L'époque est affreuse, que voulez vous. Alors place aux affreux! "
Erwelyn
La vache, la vieille tata lui avait explosé un sein ! Elle y était pas allée de main morte la Sadnezz, surtout quand on savait qu’elle s’était littéralement jetée sur elle. Ah c’est comme ça qu’on traite la famille chez eux ? Ben dis donc, ils avaient de drôles de façons de souhaiter la bienviendue les Corleones. Bon, elle avait failli casser sa pipe plusieurs mois auparavant, perdre une jambe, s’était retrouvée avec une main explosée et une cicatrice qui courrait sur une bonne partie de son crane, maintenant cachée par sa tignasse qui avait commencé à repousser, elle arriverait bien à survivre à cette attaque sournoise et douloureuse. Mais quand même, c’est pas gentil…

J’aurais plutôt dit spèce de vieille tante qui a même pas le cran de raconter ce qu’elle sait à sa nièce !

Dans un grognement, Lynette finit de se relever, ponctuant mentalement les interventions de sa tante par des gnagnagna. Et c’est qu’en plus la Sad osait critiquer ses propres amies ! Fallait pas s’attaquer aux ponettes, ça s’fait pas. Surtout que les deux sœurs Aubeterre mettaient de la bonne volonté à effectuer les travaux qu’on leur confiait.

Bon, d’accord, elles avaient la fâcheuses tendance à briser, brûler, abîmer, déchirer – ne barrez pas la mention inutile, y en a pas – tout ce qu’elles touchaient. Mais ça n’était pas leur faute, juste un peu de malchance quoi.


Ouais ben, si ça avait été moi, ton champ de maïs ressemblerait à une auge pour cochons à l’heure qu’il est !

Sous-entendu, elle lui aurait tellement pouillavé son champ que le maïs n’aurait plus jamais émis l’idée de pousser sur ses terres.
Main gauche toujours gantée serrée sur les rênes, l’autre repoussa énergiquement le doigt accusateur pointé sur elle. La mainoise n’avait plus cinq ans, tudieu ! A croire en plus que c’était elle qui était partie en plein milieu d’une discussion et avait laissé l’autre dans l’expectative.
Et le regard se fixa franchement dans celui de sa tante, étrange sourire aux lèvres et fière comme un… ben comme une Corleone, tiens.

Où je vais…
Ça va dépendre…


Menton levé encore un peu plus, lueur de défi dans les yeux et bras croisés, pour la peine.

Si toi même tu te fais pas la malle pour éviter de m’en dire plus sur tes histoires tordues de liens familiaux qui nous lient.
Si tu parles, je reste.
Si tu fuis, je continuerai moi aussi à te fuir.


Provoquer, chercher, elle aussi savait faire. Alors la Belladone, vas-tu encore te défiler aujourd’hui ?
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Sadnezz
[Coincée, poil au nez]

Te te te... T'es mal placée pour m'accuser de cacher des choses, c'est pas moi qui me suis inventée pendant je ne sais combien de temps une certaine Nathalie....

Comment avoir des reponses à ses questions si on fuit la seule personne qui pourrait nous les donner? Foutrement paradoxal me direz vous... Typiquement Corleone je répondrais!

Lui parler du pourquoi du comment, c'était ressasser un passé qu'elle avait depuis longtemps laissé dans un recoin poussiéreux de sa conscience, mais il était complètement illogique de réclamer quoi que ce soit à Erwelyn - comme venir visiter sa tante de temps en temps - si elle s'obstinait à nier toute implication dans ce qui faisait d'elle ce qu'elle était... Vous suivez? Pour faire court, la bouche de la vieille Corleone se tordit a nouveau, foutrement scellée. Complètement Corleone.


C'que tu m'agace...Bon, pose moi des questions si ça te chante , mais le prix à payer sera conséquent. Tu ne pourras nier que je t'ai prévenue...


Le nombrilisme se sa défunte soeur semblait réapparaitre parfois sous des traits plus jeunes... Elle connaissait encore trop peu Lynette pour s'avancer mais il était certain qu'elle avait hérité de certains de ces défauts, aussi sûr qu' il y avait des ses yeux l'éclat de bien des choses surprenantes ; restait à découvrir lesquels....Sadnezz croisa les bras sur sa poitrine.

Bon, elles sont où les zigues?


Tentative de détournement, vaine, of course.
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" L'époque est affreuse, que voulez vous. Alors place aux affreux! "
Erwelyn
[Victoire, poil à la mâchoire]

Bras croisé et nez levé, ce coup-ci. Humpf, elle avait complètement oublié cette histoire de Nathalie, mais techniquement, le mensonge n’avait pas été adressé à la Corleone, d’après ce qu’elle se rappelait. Il lui semblait bien que c’était aux ponettes que la mainoise avait raconté cette salade. Alors, autant tenter la feinte.

Tsss, à l’époque je savais même pas qui t’étais, c’était pas à toi que je mentais ! Ça compte pour du beurre.

Poil au facteur…
Son regard se fixa sur la tante, attendant qu’enfin elle lâche le morceau. La brune semblait être en plein dilemme, et Lynette ne comprenait pas vraiment ce qui l’empêchait de tout lui raconter. Elle avait beau s’être ressassé encore et encore la même question depuis leur rencontre, aucune réponse cohérente ne lui venait à l’esprit. Pour elle sa mère avait tout simplement décidé de se couper du monde pour vivre une vie tranquille avec sa fille.

Et enfin, Sadnezz ouvrit la bouche. Bon, elle l’agaçait, soit. Dans un premier temps, Lynette s’apprêta à faire de mi-tour, vu que la tante ne voulait toujours pas parler. Elle préparait une sortie du genre dramatique, bras levé, paume de la main posée sur le front et soupir de déception « Tu me brises le cœur, mais soit, je respecte ta décision, adieu Sad ! ». Sauf qu’à peine le bras levé, le reste de sa phrase lui monta tout doucement au cerveau.
Oui ! Elle avait dit oui ! Toutes les questions qu’elle voulait qu’elle avait dit. Hiiiiiiiiii.
Le regard de la mainoise s’éclaira d’une flamme depuis longtemps éteinte. Sa mère, elle l’avait adorée, adulée. Et rien que l’idée de savoir qu’enfin elle allait mieux la connaître la mettait dans tous ses états.


Oooh, t’en fais pas, je sais qu’elle était râleuse quelque fois, mais pas de quoi fouetter un chat hein ? Pis c’est pas parce qu’elle voulait pas que je rencontre du monde et que je parle aux garçons que ça faisait d’elle une mauvaise mère.

Faisant glisser les rênes de Poneybouboule dans le creux de son coude, elle chopa le bras de sa tante, bien décidée à ne pas la laisser filer avant qu'elle lui ait tout déballé. Et hop, voilà une Sadnezz embarquée par sa nièce vers la fontaine où les ponettes avaient été laissées peu de temps auparavant.

Les filles sont par là, et en plus elles ont à boire.

Avant de s’arrêter brusquement.

Enfin euh… elles devaient pas travailler dans ton champ aujourd’hui hein ?

Rhaaa, si c’était le cas, Lynette s’était fait avoir comme une bleue ! Elle reprit quand même sa marche, songeuse. En fait, elle n’avait même pas pensé aux questions qu’elle aurait pu lui poser sur sa mère. Aussi, elle sortit la première chose qui lui vint à l’esprit :

Où est-ce que tu l’as connue ?

Bon question con… continues comme ça Lynette et tu peux être sûre que la Corleone va se barrer en courant dans deux minutes. Enfin, un flot de paroles commença à se déverser.

Enfin j’veux dire, elle était comment étant jeune ?
Vous vous aimiez bien ?
C’était elle la plus vieille ?
Elle était jolie ?
Et c’est qui mon père ?

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Sadnezz
Et voilà une Corleone en emportant une autre, dans un flot de questions plus ou moins sensées, plus ou moins raisonnées... Le fait de se faire mener bras dessous bras dessus lui arracha un frisson. pas qu'elle n'aimait cela, mais avec le temps et l'amertume, la Corleone avait perdu le sens des relations disons normales entre humains. Mis a part sa Cousine Attila, personne n'avait eu de contact physique avec l'italienne depuis bien bien longtemps... Pour la comprendre, il aurait fallu savoir qui elle était... Avoir connu sa vie... Erwelyn ne pouvait forcément pas comprendre pourquoi le visage de sa vieille tante restait trop mutique, pourquoi ses yeux ne désiraient plus vraiment refléter la chaleur de celle des autres...

Neanmoins elle ne mit aucune barrière à l'élan de sa nièce, bien que son engouement curieux et vaguement excité lui rappelait cruellement qu'elle ne l'était pas assez. Elle l'écouta en se laissant entrainer, ponctuant le monologue de Lynette par des "Mhhh" et des hochement de tête évasifs. Les filles par là, ha , les filles c'est vrai... La joyeuse bande. Arrêt brusque, ha? travailler... travailler? Sad sortit de sa torpeur .


Heu.. Non, non pas aujourd'hui, je n'embauche plus jusqu'à la semaine prochaine.


Pas le temps de réfléchir plus que la marche reprend, pour en venir à des questions plus essentielles certainement aux yeux de sa petite nièce. Où .. Où est-ce qu'elles se sont connues? Ouais, question con bella, suivante. La Corleone tenta de répondre à chaque interrogation sans penser à tout ce que pouvait lui rappeler le fantôme de sa feue soeur.


Enfin j’veux dire, elle était comment étant jeune ?
Conne. Haem, enfin je veux dire... égocentrique et despotique.. Non sad, pas ça, enrobe un peu!
Elle avait des idées .. Bien arrêtées.
Vous vous aimiez bien ?
Non, nos relations étaient chaotiques.
C'était compliqué... Nous n'étions pas très proches.
C’était elle la plus vieille ?
Tu connais plus vieux que ta tante?
Non j'étais l'ainée. Flo avait deux années de moins que moi, je crois.
Elle était jolie ?
Oui, d'ailleurs ça n'était aucunement le reflet de son intérieur.. Moi non plus tu me diras.
Tres...
Et c’est qui mon père ?
Tu le sais toi?
Helas, je n'en ai aucune idée , elle a emporté son nom dans sa tombe.

Sad scruta les prunelles de Lynette d'un air éteint.


Je sais... Ce ne sont peut être pas les réponses que tu attendais, mais il faut que tu saches que je n'ai jamais beaucoup entretenu de relations avec la famille... Elle me l'a bien rendu d'ailleurs.

Famille déchue, famille maudite, maudite déchirure, déchirantes pertes, pertes et fracas, fracassante disparitions. Parler pour ne semer que vérités désarmantes ou souvenirs qui sonnent creux... Une tignasse blonde au loin la sortit de son nuage d'amertume. Ha!

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" L'époque est affreuse, que voulez vous. Alors place aux affreux! "
Erwelyn
Les trente cinq ans de Lynette s’étaient envolés comme par magie. Aux côtés de la Corleone, elle se comportait maintenant comme une adolescente avide de savoir, de connaître, de poser des questions. Sa mère avait toujours gardé le plus grand des silences sur sa famille, la mainoise s’était donc naturellement dit qu’aucune famille ne devait exister. Une grand-mère qui avait abandonné sa fille, peut-être, voilà ce qu’elle s’était imaginé. Alors quand Sadnezz était venue lui parler en Touraine, la surprise lui avait coupé le souffle.

Mais la brune s’acharnait à lui donner des réponses brèves, qui finalement ne l’avançaient pas à grand chose. Bon, d’accord, ses questions n’étaient pas des plus pointues, voire même complètement banales, mais elles étaient censées faire parler la tante là ! A première vue, cette dernière freinait des quatre fers, évitait de creuser un peu trop dans les méandres de sa mémoire pour lui en dire plus.

Avoir une relation de famille ne serait pas chose facile, pour l’une comme pour l’autre. A voir si d’ailleurs elles en avaient envie toutes les deux et si elles en étaient capables. Lynette était peut-être de caractère beaucoup plus enjoué que sa tante, mais ça ne l’avait pas empêchée de fermer hermétiquement son cœur à tout sentiment pendant de nombreuses années après la mort consécutive de Meiryl et de sa mère. Des deux, elle se sentait responsable. Le premier car elle n’avait pu le protéger cette nuit là, et la deuxième car elle l’avait abandonnée pour aller vivre ce nouvel amour. Aussi, la façade enjouée qu’elle montrait depuis fort longtemps cachait certains tourments qu’elle essayait de faire taire jour après jour.

Erwelyn souffla quelque peu et stoppa la Corleone quelques mètres avant les chevelures brunes et blondes, qui semblaient se chamailler encore une fois de plus et qui ne les avaient pas encore remarquées.


Oui, hmm, pour moi aussi on peut pas dire que la famille ait été très présente. D’ailleurs, quand j’en ai retrouvé une partie, elle n’a pas eu l’air de beaucoup vouloir s’intéresser à moi…

Petit regard réprobateur en direction de la tante Corleone. Lynette n’avait vécu qu’avec sa mère jusqu’à ses quinze ans, âge où elle avait rencontré Meiryl. Aujourd’hui, elle avait la possibilité de retrouver ses racines, ce qui à son âge semblait complètement inespéré. Elle en avait clairement voulu à sa tante de filer comme elle l’avait fait, la laissant remplie de doutes et d’interrogations, voilà plus d’un an de ça. Et même si la colère était loin de s’être estompée, elle voulait tout de même savoir. La Corleone ne serait donc pas lâchée de si tôt.

C’est donc un regard beaucoup plus fermé qui fit place à la gaieté de l’instant précédent qui se tourna vers la brune.

Écoutes, j’vois pas quelles questions je pourrais te poser.
A vrai dire, je m’en tape qu’elle ait été jolie, ou douée en couture, ou encore pour allumer un feu. Ça m’est complètement égal, je l’ai connue, je sais ce qu’elle valait.


Un coup d’œil vers les ponettes, espérant au fond d’elle que les filles ne s’apercevraient pas de leur présence tout de suite, ce qui permettrait à la Corleone de se défiler une fois de plus. Il ne fallait pas croire que Lynette était tombée de la dernière pluie, elle aussi était très douée pour faire dévier les conversations, y avait qu’à demander à Reese ! C’était sans doute un trait de famille…

Ce que je veux savoir c’est pourquoi on s’est retrouvées seules toutes les deux, pourquoi j’ai été élevée cloîtrée dans cette foutue forêt, pourquoi je n’avais droit de parler à personne.
Qu’est-ce que… pourquoi, pourquoi… qu’est-ce qui s’est passé ?


Et paf, les pieds dans le plat.
Immobile et bras maintenant croisés, la Corleone miniature planta son regard dans celui de la plus âgée. Un regard qui exigeait des réponses concrètes et tangibles.

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Sadnezz
[D'la vérité en veux tu, en voilà! poil aux dessous de bras.]

Et d'enchainer

pourquoi pourquoi...

Tout ça c'est ta mère qui l'a voulu Lynette! Peut être qu'on était pas assez bien pour elle, peut être qu'elle avait envie de faire sa vie seule, égoïstement comme toujours, seule avec SA fille, dans SA petite vie tordue de Madame qui sait tout mieux que tout le reste de ce pauvre petit monde qu'elle méprisait...


Reprends toi, tu t'emballes Sad.. La petite veut savoir, mais y'a des façon de balancer, faut qu'elle puisse digérer apres...


C'est donc plus calmement qu'elle continue:


ta mère , elle a disparue de la circulation un beau soir, réapparaissant un an plus tard avec un ventre a faire peur une none. Pas un mot d'explication, ni aucune indication sur le géniteur, salut la famille, j'suis juste venue recupérer deux trois affaires, adieu!


Sad se tape frotte les mains vigoureusement façon "je m'en lave les mains" puis croise les bras en plantant ses yeux dans ceux de sa nièce.


Erwelyn Corleone, pour mes propres enfants je suis morte, enterrée au pied d'un arbre en anjou, pauvre Sadnezz qui malade s'est administrée une saignée fatale et a disparu laissant le coeur serré à amis amants et liens de sang. Alors tu comprendras - ou pas - que revenir sur une partie de ma vie dont ma vieille tête a effacé la plupart des bienheureux souvenirs est assez embarrassant.

hé ouais, qui n'a pas de cadavres dans les placards...

Je ne te dis pas grand chose pour la simple et bonne raison qu'il y a si peu à dire de ton coté, de celui de ta mère, elle était certainement mille fois plus hostile à sa famille que moi même! Et elle a probablement eu raison. C'était une originale.


Tout comme toi sad, tout comme toi.


Cela n'empêche pas qu'il y a le reste de l'arbre, une bonne branche pas trop pourrie, plus jeune et plus vigoureuse que les vieilles racines porteuses...


Quale grande famiglia... La brune esquisse un vague sourire, tout en se remettant de son interminable bavardage. Pas l'habitude de parler autant la vioque.
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" L'époque est affreuse, que voulez vous. Alors place aux affreux! "
Erwelyn
Pif paf, un crochet du droit, un du gauche, et pour finir un bon coup de pied qui l’étale au sol. Les paroles de la Sad, c’était encore pire que si ces coups elle se les était pris vraiment. Comment pouvait-elle balancer tout ça ? Comment osait-elle raconter ce tissu de mensonge sur sa mère ?
Floraine était tout sauf une égocentrique nombriliste et égoïste. Et à l’écouter, ces défauts la caractérisaient complètement.

Après avoir purement et simplement marqué sa surprise par une bouche grande ouverte, le visage de Lynette se ferma. Évidemment, c’était pas du tout à ce genre de révélation auxquelles elle s’attendait. La mainoise avait plutôt imaginé un "ta mère a été très courageuse, ton père t’a lâchement abandonnée et elle s’est occupée de toi toute seule". Ou pourquoi pas, plus glauque, mais tout aussi mélodramatique "ma pauvre sœur a été violentée par un soudard qui l’a foutue enceinte, mais ne t’inquiètes pas, on s’est occupé de lui". Bref, le genre de choses qui vous fait dire fièrement que votre mère était pas une traînée qui s’est fait engrosser par le premier venu.

Et de tout ça découle le très logique "si ta mère t’a fait vivre loin de tous, c’est pour te protéger du monde extérieur, parce qu’elle a trop souffert". Ouais, ça aurait quand même été la classe d'entendre ça. Et c’était juste ça, juste cette petite chose qu’elle aurait préféré voir passer les lèvres de Sad, pas cette bouillie infâme à écouter.
La pauvre devait être bien amère contre sa propre sœur pour déballer tout ça. Sûrement une histoire d’homme, ou ptet même d’argent, pourquoi pas.

Toujours est-il qu'elle allait tourner les talons, bien déterminée à laisser là sa tante, prête à tout pour descendre l'image de sa mère, alors même que la pauvre n'était plus là pour se défendre. Tsss, vraiment, la famille ! Y avait encore tout plein de trucs qu'elle devait apprendre la Lynette, parce que jamais elle n'avait vécu ce genre d'histoires familiales où personne ne sait rien mais tout le monde se fait la gueule… Enfin, c'est du moins ce qu'elle avait retenu des personnes qu'elle avait pu croiser dans sa vie et qui étaient en pleine crise à cause du cousin Machin qui a volé le collier du vieux Louis qui l'avait promis à Béatrice la gironde qui avait épousé en seconde noces Robert le boiteux alors qu'elle avait couché avec son frère jumeaux.
Pis quand on voyait la Corleone qui faisait croire à ses enfants qu'elle s'était coupé les veines, ben on était en plein dedans…

En tous cas, sa dernière phrase n'était pas tombée dans l'oreille d'une aveugle. La famille comportait d'autres membres, et sûrement que ceux-ci avaient dû connaître Floraine. Si Sad continuait à s'enfoncer dans le mensonge et la calomnie en ce qui concernait sa mère, ce ne serait peut-être pas leurs cas. Et la seule personne qui pouvait la mener à eux n'était nulle autre que la brune qui se tenait devant elle à ce moment précis. A ne pas perdre de vue, donc… Voire même à s'y accrocher sérieusement si elle voulait enfin savoir la vérité. De là à se comparer à un morpion, il n'y avait qu'un pas, qu'elle ne franchirait pas parce qu'elle avait encore un minimum de dignité, nameho.

Aussi, le visage froid de Lynette fit place à un sourire qui s’agrandit de plus en plus, et enfin un rire franc et sonore éclata, accompagné d'une grande claque sur l'épaule de la tata Corleone.


Mwaahahahahahah ! J'ai cru que t'étais sérieuse pendant un moment, pfiou !
Faut pas me faire des frayeurs comme ça hein, chuis plus toute jeune moi non plus tu sais…
Bon, c'pas grave si tu veux pas tout me raconter maintenant, je suis très patiente comme femme, tu verras.


Et, tapotant son menton du doigt :

Hmmm, alors comme ça y'a d'autres membres de la famille ?
Et on peut les rencontrer où tous ces gens ?

Tenace la Lynette ? Ouais, ptet un peu. Un trait Corleonnien ? Ouais, sûrement…
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Sadnezz
Sad se mortifie , et c'est le regard vide qu'elle regarde sa nièce rire et rester complètement incrédule à tout ce qu'elle avait pu lui déballer. Quelle vie. Des autres, bien sûr qu'il y en avait d'autre, les Corleone poussaient pas sur les arbres. Dépitée, sad prit une grande respiration .

Ben... en Bourgogne t'as Attia, elle fait les plus belles robes du royaume... N'a pas la même prédilection pour les ciseaux que celle dont je jouis.


Ricanement, non c'est clair l'humour c'était pas trop le cheval de la Sad. Effacant aussi vite qu'il était apparu son rictus elle regarda dans le vague avant que de ne continuer.

T'as la Griotte, mais par contre je sais pas où elle est celle là, peut-être en bourgogne auprès de son pater Eusaias.

Haussement d'épaules.


T'as Elilie et isa. Isa elle doit être en mer avec son mari Gorborenne... Mais alors quelle mer, j'en sais foutre rien. Elilie en Poitou? J'sais pu.

La Corleone se sentit un peu ridicule à ne pas savoir guider plus que cela Lynette sur les pas de ses propres frères pendant quelques secondes, puis... Finalement son coté - j'en ai complètement rien à cirer- revint au galop. L'est pas un parchemin ho!! C'pas facile de sortir les anales du vieux Corleone de but en blanc! Dejà qu'elle avait des pertes de mémoires.... Sad fouilla dans sa besace.

Le vélin râpé de la famille, celui là même qu'elle avait gardé dans un vieux bahut le jour où elle avait eut sa première discussion avec Lynette , y était soigneusement roulé. Elle lui tendit d'un air ronchon.


V'la, y'a pas les adresses mais t'façon j'en sais pas plus.


Et maint'nant qu'on lui foute la paix avec les Corleone!

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" L'époque est affreuse, que voulez vous. Alors place aux affreux! "
Erwelyn
Ah, enfin elles y étaient !
Alors que sa tante énumérait les membres corleonniens, Lynette s'en imprégnait de toutes ses forces, notant chaque nom, chaque syllabe. Bon sang, y en avait une liste longue comme le bras ! Elle qui pensait n'avoir aucune famille, voilà qu'elle se retrouvait avec une tripoté de cousins, d'oncles, de tantes et tutti quanti.

Alors, une qui fait des robes… hmm, y aurait donc moyen de la rencontrer celle là, d'autant plus si elle se trouvait aussi en Bourgogne. Avec le mariage de Mahaut qui se préparait, si Roudoudou ne rendait pas l'âme jusque là, les ponettes auraient une multitude de robes à faire confectionner. Quant au sien de faux-mariage, elle comptait bien le faire capoter avant même de se rendre à l'église, donc pas besoin de commander des robes pour ce jour là.
Et la liste continuait, des navigateurs et des bourguignons… Décidément, ce duché devait être une sorte de triangle des bermudas, où tout le monde s'échouait. Y compris les ponettes qui comptaient y passer quelque temps.

Un sourire, sincère, même si elle l'avait encore mauvaise de tout ce qu'elle avait pu lui balancer sur sa mère. Un sourire parce que grâce à sa tante, Lynette savait enfin qu'elle avait une famille. Bon, ça n'avait pas l'air de l'enchanter, mais elle le faisait quand même, la Sad.


Merci...

Les mains légèrement tremblantes, la mainoise saisit le vélin tendu par la brune qui avait repris son attitude ronchonne qu'elle lui connaissait. Avidement, son regard parcourut chaque ligne, chaque délié, chaque prénom. Fianchtre, la tante avait donc trois gamins ! Han ! Et la grand-mère s'était tapé un autre homme que son mari ! Oooh, et le grand-père aussiiiii ! Ouah, il devait y avoir de sacrés histoires de famille là-dessous…
Ça valait vraiment le coup de rencontrer tout le monde, ce qu'elle se promettait de faire avant d'aller ad patres.

Parchemin sous le bras, bien décidée à le recopier mot à mot afin d'en avoir une trace avant de le rendre à la Corleone, son index pointa les deux sœurs encore en pleine dispute pour savoir qui garderait la fiole de Lynette le temps que celle-ci la récupère.


Aller viens, on va voir les ponettes !
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Sadnezz
Sad suivit le doigt qui la rappela à l'ordre. Erf, oui, maintenant qu'elle avait craché le morceau, elle devait se farcir le gang des ponettes... Les accrocs du câlincâlin et des mamours foudroyants. Sad restait d'ailleurs persuadée que la blonde avait un faible pour elle, toujours à vouloir lui coller ses bises dégoulinantes de mièvrerie. Rude. Entre ses dents déjà serrées, elle siffla imperceptiblement .


Ho non, pas les Ponettes...


Et pourtant, si , elle y couperait pas. Tant qu'à aller à l'échafaud , autant s'amuser un peu avant... Pourvu qu'aucune de ces jeunes barges n'avait gardé souvenir de son surnom de baptême, un soir de gros alcool dans une taverne paumée. Dire que le groupe avait complètement asséché les cuves, du jamais vu en toute une vie bien arrosée pourtant. Sad se préparait dejà psychologiquement aux longues soirées qui l'attendaient. Elle songea aussi que fuir restait une bonne option, mais lasse, elle n'en fit rien. Que ne ferait-elle pas pour quitter un peu sa monotonie actuelle.... Vaille que vaille.
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