Afficher le menu
Information and comments (0)

Info:
Unfortunately no additional information has been added for this RP.

[RP]Through the locking door, and what Alice found there

Alice_liddell
Ceci est un rp privé entre Eilinn Melani et Alice Liddell. Si vous voulez y participer, merci de contacter l'un des protagoniste.

Le titre du rp est une référence au second livre des aventures d'Alice par Lewis Caroll, Through the looking glass, and what Alice found there, traduit en français par De l'autre côté du miroir, et ce qu'Alice y trouva. Une traduction possible du titre, si on voulait garder la référence, pourrait donc être "De l'autre côté de la porte close, et ce qu'Alice y trouva".


http://www.youtube.com/watch?v=iNCXiMt1bR4

Le froid, la neige, le vent. Les flocons tourbillonnaient autour d'elle dans une valse folle. Alice leva péniblement la tête. Ses mains tenaient les bords d'une cape miteuse qu'elle fermait au mieux autour de ses épaules. Sous l'effet d'une bourrasque plus forte, elle plissa les yeux, laissant tout juste apparaître la moitié de ses iris pâles veinées de sang. Un très léger strabisme, quasiment invisible, rapprochait sa pupille gauche de son nez. Sa peau était d'une pâleur mortelle. Il semblait que la vie pouvait la quitter à tout moment, surtout par le froid mordant qui régnait dans la rue en cette nuit d'hiver. Derrière elle, ses cheveux de neige flottait dans le vent, se perdant entre les flocons. Grelottant, les lèvres tremblantes, elle saisit une nouvelle fois l'étoffe qui recouvrait ses épaules pour couvrir son corps, tout juste protégé de la tempête par une robe. Elle allait mourir ici. Elle en était sûr. La Bête Sans Nom allait rappeler l'être qu'elle avait créée.

Elle s'effondra sur un perron. Devant ses yeux, les dernières semaines défilèrent. La manière dont elle était traitée à l'orphelinat. Moins bien qu'un chien. On balançait les auges des enfants sur le sol. Il ne fallait pas gaspiller le précieux argent du diocèse pour des enfants qui n'en valaient même pas la peine. La vaisselle était tout juste rincée une fois l'an. En dehors des repas, on les laissait se terrer dans les coins sombres du bâtiment ou dormir sur les planches de bois de ce qu'on ne pouvait nommer autrement que leurs cellules. Enfin, ça c'était ce que les autres pouvaient faire. Elle, elle n'avait même pas le doit de sortir. Elle, elle était enfermée en permanence dans une pièce sombre. Tout ce qu'elle connaissait du monde, c'était ce qu'elle avait vu part la petite lucarne qui ornait le mur du fond de sa prison. Pour elle, l'univers se limitait à cette cellule et le carré qu'elle pouvait voir de sa fenêtre. Elle ne connaissait pas d'autre lumière que celle qui filtrait à travers ces barreaux. Mais c'était mieux ainsi. La lumière, ça faisait mal, ça brûlait les yeux. Il fallait mieux ne pas la voir.

Elle était maudite, elle le savait. Depuis sa naissance, elle le savait. C'était pour ça que sa mère l'avait amenée ici. Tout juste lui avait-elle laisser un nom. Parce que c'était obligé. Alice. Alice Liddell. Bien sûr, personne ne s'appelait Liddell dans la ville. Il fallait juste qu'elle ait un nom. Pour qu'elle puisse s'en débarrasser, de cette enfant maudite. Le révérend ne se lassait pas de lui décrire l'air de soulagement qu'avait sa mère quand elle est partie sans elle. Mais ça ne la faisait même plus réagir. Elle s'était habituée, à ça. Alors ça ne calmait plus le prêtre. Il était obligé de passer ses nerfs autrement. Elle recevait parfois tellement de coup dans le ventre qu'elle crachait du sang. Mais ce n'était pas grave. Ce n'était pas un péché. Elle n'était pas humaine. Ces yeux veinés de sang, cette peau trop pâle, cette peur du Soleil le prouvait bien, non ? Elle était juste un rejeton de la Bête Sans Nom. Une aberration qui n'aurait jamais du exister. Tout juste était soignée après cela. Ça aurait nuit à l'établissement que quelqu'un meurt entre ses murs.

Elle s'inventait tout un monde, seule, au fond de sa cellule. Un monde où elle n'était pas isolée, un monde où les gens acceptaient de lui parler. Un monde grand. Un monde beau. Et elle parlait ainsi, seule, dans la nuit de sa cellule. Elle parlait avec les gens qui peuplaient son esprit. Il fallait bien. Sans cela, son esprit se serait perdu depuis longtemps. Ils étaient gentils. Ils devaient bien exister quelque part, non ? Elle les trouverait. Elle se l'était promis.

Et puis un jour, alors qu'on lui apportait l'eau et le pain dur qui consistait son seul repas de la journée, il y eût un incident. Elle ne sut pas lequel. Elle s'en fichait. De toutes manières, c'étaient aux Autres que ça arrivait. A Ceux qui la détestaient. A Ceux qui se moquaient d'elle. A Ceux qui la maltraitaient. Quoiqu'ils leur arrivaient, c'était bien fait. Celle qui la nourrissait sortie cependant presque en courant en entendant le bruit. Elle oublia de fermer la porte. Il n'en fallut pas plus à Alice pour décider d'aller découvrir le monde. Sans plus réfléchir, elle prit le pain qu'elle glissa dans le col de sa robe dont la jupe partait en lambeau et sortie dans le couloir. Elle parvint à se glisser par une fenêtre dans le rue. Le soleil lui piqua les yeux, lui brûla la peau, mais elle pouvait enfin aller trouver les gens de ses rêves. Un grand sourire naquit sur ses lèvres.

Elle avait perdu le compte des jours, depuis ce moment. Elle ne faisait que marcher. Elle dormait le jour, dans des maisons abandonnées, sous des arbres ou au fond des ruelles les plus sombres. Elle n'arrivait pas à marcher le jour. La lumière du soleil lui faisait trop mal. Celle de la Lune était plus douce, plus calme. Elle arrivait même à la regarder en face. Elle était belle. Elle n'avait pu s'empêcher de sourire quand elle l'avait vu ronde. Elle la guidait dans sa quête, elle en était sûr. Alors, elle avait marchait. Elle avait suivi cette douce lumière, toute les nuit depuis qu'elle était partie. Elle mangeait ce qu'elle arrivait à voler au matin dans les villages. Ou ce que certaines personnes gentilles voulaient bien lui donner. Ou alors des baies qui lui semblaient jolies. Elle arrivait à survivre.

Mais plus maintenant. Là, sous ce porche, elle sentait peu à peu le froid l'envahir, ses membres devenir de plus en plus lourd, ses paupières se fermer. Elle avait été idiote de croire que le Très-Haut pourrait bénir un être comme elle. Il n'avait fait que ce jouer d'elle, Lui aussi. Il lui avait fait croire qu'elle pouvait vivre, Il lui avait d'abord donné l'espoir avant de le reprendre. Il n'avait fait que faire comme les autres. Et maintenant, on la rappelait. C'était peut-être mieux ainsi. Peut-être que Là-Bas la vie serait meilleure. Il y aurait peut-être d'autres personnes comme elle, qui pourront la comprendre. Le sommeil commençait peu à peu à engourdir ses pensés en plus de ses membres. Oui, dormir. Dormir et ne plus jamais se réveiller. Doucement, comme une plume, son petit corps s'affaissa, devant la porte, sous le regard ardent d'une salamandre.

****************

C'était un matin comme les autres pour Paul. Cela faisait six mois maintenant qu'il servait la maison Melani et la vicomtesse d'Avize. Il n'était qu'un simple serviteur, et ça lui suffisait bien. Il était logé et nourri de manière raisonnable, et la paye n'était pas mauvaise. Bon, parfois, la maîtresse était un peu capricieuse. Mais on ne pouvait pas attendre beaucoup d'autres choses d'une enfant, non ? Bien sûr, il serait peut-être temps qu'elle grandisse un peu. Mais enfin, elle était noble et connaissait suffisamment de personnes pour se permettre des excentricités. D'accord, certaines étaient un peu irritante, et il était parfois énervant de voir que les grands pouvaient se permettre d'être totalement déraisonnable quand pour sa part il avait du être adulte à douze ans. Mais ce n'était pas comme s'il pouvait y faire quelque chose, hein ?

On manquait justement de pain, aujourd'hui. Et s'il n'y en avait pas, la vicomtesse risquait encore de piquer sa colère. Enfin, si elle avait justement envie de pain. Mais on était jamais trop prudent. Alors on lui avait demander d'aller en acheter au plus vite, avant qu'on ne doive servir la maîtresse. Ce n'était pas vraiment son rôle habituel, mais il y avait plus désagréable que de courir jusqu'au meunier le plus proche. Prendre l'air lui permettrait en plus d'un peu mieux se réveiller. Se lever tous les jours à l'aube, en se couchant à point d'heure pour pouvoir satisfaire tous les désirs de la vicomtesse, ça aidait pas à un bon réveil. Il ouvrit donc la porte et pris son élan pour se rendre le plus vite possible à son but.

Sa marche fut stoppée nette. Et son esprit réveillé instantanément. En effet, tomber la tête la première dans une couche de plusieurs centimètres de neige, habituellement ça réveille efficacement n'importe quel être humain. Utilisant tous les jurons qu'il avait pu apprendre alors qu'il trainait avec les gamins des rues dans ses jeunes années, il se retourna pour voir ce qui l'avait fait ainsi tombé. Les mots s'étranglèrent dans sa gorge. Sur le seuil gisait une petite fille à la peau pâle et aux cheveux blancs, dans une robe blanche suffisamment légère pour qu'aucune des femmes qu'il connaissait n'acceptent de la porter même en été. Elle devait avoir huit ans, tout au plus. Paul resta quelques instants interdit. Elle semblait ne pas bouger. Elle était morte ? Non. Doucement, une main esquissa un signe et ses paupières semblèrent se plisser imperceptiblement, tandis qu'un petit gémissement sortait de sa gorge. Elle s'assit difficilement sur le seuil, comme si ses membres étaient gelés, puis, serrant d'une main la fripe qui la recouvrait jusqu'alors et s'essuyant les yeux de l'autre, elle demanda :


"Je suis où ?"

******************

Tout était noir. Alice avait l'impression de sombrer dans quelque de profond. D'infiniment profond. Elle se sentait tomber, encore et encore, sans fin. Elle sentait ses tourments s'en aller un à un. Pour la première fois de sa vie, elle se sentait presque bien. Elle aurait voulu que jamais ça ne s'arrête. Elle aurait voulu rester dans cet état pour toujours, sentir ses soucis s'envoler petit à petit. Se sentir de plus en plus légère, avoir l'impression de voler. Sauf que...

Elle eût l'impression qu'un cheval au galop lui rentrait dedans. Elle se sentit d'un seul coup durement ramené dans son corps. Elle sentit sa couverture glisser et la pierre froide lui mordre la peau. Elle sentit à nouveau la lourdeur de ses membres. Elle ne parvint tout d'abord pas à faire le moindre geste. Et puis, lentement, elle sentit à nouveau son bras, puis ses jambes, puis tout son corps. Tout était douloureux, et ce fut tout juste si elle arriva à se remettre debout. D'une main, elle se frotta les yeux. Elle sentait son esprit encore embrumé, grisé par la liberté de son rêve. Puis elle parvint à faire la netteté devant elle. Il y avait un homme avachi dans la neige qui la regardait avec de grands yeux. Encore ensommeillé, elle demanda sans bien s'en rendre compte :


"Je suis où ?"

Et puis, soudainement, une dure réalité s'imposa à elle. Son estomac décida de se rappeler à sa mémoire. La douleur envahi tout son ventre tandis que celui-ci se tordait pour lui faire comprendre qu'il avait besoin de nourriture. Elle baissa des yeux où se livrait une bataille entre l'étonnement et le sommeil, et dit d'une voix pâteuse :

"J'ai faim."

Elle ne vit ni n'entendit ce que répondait l'homme en face d'elle. Mais, après quelques instants, elle sentit qu'on la tirait par la main et qu'on l'entrainait à l'intérieur. Elle était trop faible pour faire quoique ce soit. Elle n'arrivait même pas à voir réellement net. Son corps refusait tout simplement d'obéir. Ils arrivèrent dans une grande pièces d'où venaient des odeurs qu'elle n'avait jamais senti mais qui arrivèrent à rendre son ventre encore plus douloureux. Des voix s'élevèrent autour d'elle. Elle n'arrivait pas à voir qui parlait ni ce qu'ils disaient. Puis on l'assit à la table. Elle n'avait jamais manger à une table. Comment elle devait faire ? On disposa alors de ces choses qui sentaient si bon devant elle. Les manières furent alors le dernier de ses soucis.

*****************

"J'ai faim."

L'enfant devant Paul semblait faible, au bords de l'évanouissement. On l'avait habitué faire ce qu'on lui demandait. Ce fut donc surtout par réflexe qu'il obéit. Il tendit gentiment une main à la petite fille en lui disant de le suivre. Elle sembla ne pas réagir. Elle semblait le regarder sans arriver à le voir. Elle avait quelque chose de dérangeant. Il n'arrivait pas à mettre le doigt dessus, mais elle avait quelque chose qui vous mettez mal à l'aise.

Mais ce n'était pas vraiment le moment de chercher. Elle semblait prête à rendre l'âme à chaque instant. Il se demandait même un peu comment elle pouvait être encore consciente. Sans plus attendre de réponse de la part de la gamine, il lui prit la main et l'entraîna jusqu'au cuisine. Là, il demanda au cuisinier de lui donner quelque chose à manger, quoique ce soit, puis l'assit à la table et lui dit qu'il allait revenir. Elle sembla, comme jusqu'alors, ne pas noter sa présence. Il sortit de la pièce. Il fallait quand même aller prévenir la vicomtesse de ce qu'il se passait entre ses murs. Sinon, c'était sûr, il allait en prendre plein la figure, et peut-être pas qu'au sens figuré.

Alors qu'il avançait à travers les couloirs, il parvint à mettre le doigt sur ce qui le dérangeait tant depuis qu'il avait vu la gamine. Ses yeux étaient rouges. Irisés de sang. Il accéléra le pas.

****************

Alice dévorait tout ce qu'elle avait devant elle en prenant à peine le temps de respirer. Elle ne savait pas depuis combien de jours elle n'avait pas pu manger, mais elle avait l'impression de n'avoir jamais rien connu de meilleur que de manger en cette instant. Ce qui était probablement vrai. Peu à peu, tandis que son estomac se remettait en marche pour digérer ce qu'on lui envoyait, ses esprit lui revinrent. Elle était dans une grande pièce, avec une table en bois au milieu, et plein d'ustensile en métal autour d'elle. Les derniers relents de fatigue quittèrent son esprit. Elle se rendit compte alors où elle était vraiment.

Dans une maison. Chez des gens.

Non. Elle ne pouvait pas être ici. Elle devait partir. Sinon, ils allaient la ramener là-bas. Elle allait encore être seule. Ils allaient encore la frapper. Elle allait encore avoir mal. Elle devait partir. Vite. Avant qu'ils l'enferment.

Sans plus réfléchir, elle posa ce qu'elle était entrain de manger, aussi bon que ce soit, et elle commença à se relever. Mais l'homme devant elle se retourna. Non. S'il la voyait, il allait l'empêcher de partir. Il allait lui faire du mal. Il ne fallait pas qu'il la voit si elle voulait pouvoir s'enfuir. Mais elle ne pouvait pas se cacher.


"Tu as finis de manger, demanda-t'il ?"

Alice continua de la regarder avec de grands yeux horrifiés. Elle n'écoutait pas ce qu'il lui disait. Il allait la frapper, c'était sûr. Elle hocha doucement la tête de droite à gauche, avec une peur intense peinte sur son visage. Elle allait encore avoir mal. Ils allaient encore lui faire mal. Elle ne voulait pas.

Se préparant à prendre un coup, elle se recroquevilla sur elle même, les larmes aux yeux. Rien ne venait, mais elle était sûre que ça allait venir. C'était toujours comme ça. Tout le monde la détestait. Tout le monde lui voulait du mal.

Ce fut à cet instant que la vicomtesse entra dans la pièce.
Eilinn_melani
La plume grattait le vélin sans douceur, crissant parfois dans le silence morne de ces premières heures du jour, arrachant alors une grimace à la Vicomtesse d'Avize. La chandelle allumée éclairait faiblement le bureau, prodiguant uniquement la lumière nécessaire aux travaux d'écriture de la noble, et laissant dans l'ombre le reste de la chambre, les draps défaits, la tunique de nuit laissée à l'abandon sur le sol froid.

Seul parfois tranchaient les bruits de la maisonnée, les domestiques s'agitant pour préparer les repas du jour, apprêter la demeure de la jeune Melani au cas ou une visite ait lieu, et veiller au grain de l'humeur de la noble. Le matin était toujours une étape délicate, la jeune fille se levant toujours avant l'aube dans le respect des usages cisterciens, accomplissant ses prières, et s'attelant ensuite à la lecture des écrits saints, ou bien l'écriture avant d'envisager le petit déjeuner.

Ce matin-là, l'agitation était assez inhabituelle dans la maisonnée, mais Eilinn n'abandonna pas son travail d'écriture pour autant, tandis qu'elle rédigeait sa lettre de démission de la Nonciature Apostolique. Elle savait que si l'affaire était importante, on viendrait la trouver pour demander son avis, ou simplement l'informer des évènements.
Ce fut Narcisse, sa gouvernante, qui entra dans la pièce après quelques coups discrets frappés sur la porte. Eilinn déposa la plume, sabla le vélin pour faire sécher l'encre et souffla doucement dessus pour enlever l'excédent de poudre. Satisfaite, elle fit chauffer la cire rouge à la flamme de la chandelle, et scella de son sceau au macaron la lettre qui serait envoyée à Rome dans la journée. Elle reporta alors son regard glacé sur Narcisse.


- "Paul... il a trouvé une petite fille perdue sur le pas de la porte, et l'a ramené."

Eilinn appuya son dos contre le dos de son siège et se frotta les yeux en soupirant.

- Narcisse, nous ne pouvons pas recueillir tous les miséreux du Languedoc... Donne-lui de quoi se nourrir et quelques vêtements si tu en trouves, et tu sais bien qu'elle voudra bientôt de toute façon repartir en quête d'une herbe plus verte... Probablement nous dira-t-elle qu'elle a des parents nobles et très riches et qu'elle doit repartir les trouver...

Eilinn étant profondément aristotélicienne, elle faisait ce qui était en son pouvoir pour aider son prochain. Don d'écus deux fois la semaine, excédents de nourriture donnés aux vagabonds. Parfois les domestiques se piquaient de recueillir un miséreux, mais ceux-ci partaient en général au bout de quelques jours en se rendant compte qu'il fallait travailler pour gagner sa pitance au sein de la maison Melani. Il n'y avait pas de place pour les feignants, au sein de la demeure à la Salamandre, mais ceux qui savaient obtenir les bonnes grâces de la Vicomtesse ne s'en plaignaient guère.

- Mais elle est... spéciale... Elle fait peur aux autres domestiques, déjà le bruit court que nous avons recueilli un démon.

Sans ces mots, peut-être qu'Eilinn aurait scellé le destin d'Alice sans avoir posé le regard sur elle. Mais une lueur s'alluma dans le bleu des yeux de la future aspirante à la Confrérie des Exorcistes.

- "Un démon ? Quelle billevesée est-ce là encore..."


Le ton était froid, mais Eilinn se leva et enfila une cape doublée pour réchauffer son corps endolori par la station assise.

-" Ou est-elle donc ?
- Dans la cuisine, Edwards est avec elle."

Narcisse, la gouvernante, gérait au jour le jour l'habillage, et tout ce qui concernait de près la Vicomtesse. John Edwards, d'origine anglaise, lui était lié à la jeune Eilinn de par une promesse faite à sa mère au bord de la mort. Il s'occupait des domestiques et plus particulièrement de la sécurité de la jeune fille. D'antiques menaces pesaient encore sur la petite Eiilinn, et jamais, dans l'ombre de la Salamandre aux yeux d'azur, il ne baissait la garde.

Eilinn descendit les escaliers qui menaient au rez-de-chaussée et entra dans la cuisine. La bouffée de chaleur qui lui sauta au visage lui procura un instant de bien-être, et ses azurs fouillèrent la cuisine pour trouver le vieil Anglais s'adressant à la jeune fille. Les pupilles s'écarquillèrent un instant tandis qu'elle détaillait Alice. Elle reconnaissait ce teint pâle et ces yeux rouges, pour les avoir déjà rencontré par le passé. La sanction sonna comme un couperet à destination des domestiques qui chuchotaient.


Ce n'est pas un démon.

Le silence se fit, tandis qu'elle s'installait à la grande tablée qui meublait la cuisine, sans regarder la petite fille.

Edwards, mon petit déjeuner. Vous autres, sortez.

Les quelques domestiques s'évanouirent tel une nuée d'oiseaux effrayés par un chat, et bientôt la cuisine retrouva le silence, tandis qu'il ne restait plus qu'Eilinn, Edwards veillant au bien être de sa maitresse, et la jeune Alice, sale, en guenilles, l'air effrayé.
L'anglais déposa devant Eilinn brioche et confiture, tandis que la vicomtesse reportait à nouveau son regard évoquant les lacs du nord de l'Italie sur la petite fille. Le ton était doux, tandis qu'elle tentait d'apprivoiser le moineau échoué sur la table de sa cuisine.


Comment t'appelles-tu ?
_________________
Alice_liddell
http://www.youtube.com/watch?v=pFLdJQmJGOs

L'homme était devant elle. Alice se recroquevillait, certaines qu'elle allait être frappée. Elle avait voulu s'enfuir. Mais ils ne comprenaient pas. Ils étaient méchant, là-bas. Ils allaient lui faire mal alors qu'elle restait juste dans sa chambre. Elle ne voulait pas y retourner. Elle ne voulait qu'on la ramène là-bas. Elle préférait encore marcher. Elle était sûr qu'elle trouverait ceux qu'elle cherchait, si elle allait assez loin. Elle ne voulait pas retourner là bas. Ils allaient encore la frapper. Ils étaient tous comme ça.

Et puis une porte s'ouvrit. La petite fille regarda entre ses bras. Peut-être qu'elle pourrait partir par là. Mais non, il y avait une silhouette devant la porte. C'était une jeune femme. Elle ne la voyait pas bien. Ses yeux étaient embué par les larmes de peur, de crainte. Mais il y avait quelque chose qui se dégageait. Une prestance, une présence qu'elle n'avait jamais vu ailleurs. C'était à la fois quelque chose de doux et de sévère. On sentait que cette personne ne vous aurait jamais fais du mal. Mais il y avait en même temps quelque chose de droit et de dur en elle. Quelque chose qui faisait qu'on aurait jamais voulu aller contre sa volonté. Une autorité naturelle. Les tremblements de peur de son petit corps se calmèrent un peu tandis qu'elle se redressait, un peu rassérénée par cette aura si puissante.

Mais derrière elle, il y avait encore des personnes. Beaucoup de personne. Qui parlaient. Qui chuchotaient. Comme des démons. Et puis :


« Ce n'est pas un démon. »

Les mots tombèrent comme la hache du bourreau sur le gibet où repose la rumeur. Mais pour Alice, ils sonnèrent comme les cloches annonçant la venue des anges. Elle sentit son coeur se réchauffer, comme si un baume l'enveloppait doucement. Elle ne la disait pas rejeton de la Bête Sans Nom. Peut-être qu'elle était différente. Peut-être qu'elle voudrait bien l'accepter. Peut-être qu'elle accepterait de la protégeait contre les méchants de dehors. Doucement, elle s'était redressée et un sourire avait commencé à naître sur ses lèvres. Peut-être qu'elle avait enfin trouvé ceux qu'elle cherchait.

A peine les mots étaient-ils tombés que les bruits s'étaient tus. On aurait pu croire que sa parole avait force de loi. Tout devint silencieux. Le monde avait cessé de respirer dans l'attente de la prochaine action de la nouvelle arrivante. Sans même qu'elle s'en rende compte, le souffle d'Alice avait été coupé. Et puis, avec une grâce digne d'un ange, elle entra dans la salle. Elle la traversa en quelques enjambé et s'assit à la table. La petite orpheline ne put la quitter des yeux. Subjuguée.


« Edwards, mon petit déjeuner. Vous autres, sortez. »

Alice entendit à peine ces paroles. Mais les autres le firent, apparemment. A peine les mots avaient-ils franchis les lèvres de la jeune femme que ceux qui les entouraient et la dévisageaient disparurent. Il ne resta que trois personnes, et les reliquats de présence qui règne pendant quelques secondes dans une pièce qui a accueilli plus de monde qu'elle ne pouvait. Il y eût un bruit de couvert que l'on pose sur le bois et, au même instant, une douce odeur s'éleva. Le ventre de la petite fille en profita pour se faire sentir à nouveau. Mais elle n'osait plus rien dire. Elle n'avait pas peur. Mais aucun mot ne pouvait franchir ses lèvres. C'était comme si, dès qu'elle allait ouvrir la bouche, ils allaient la ramener Là-Bas. Mais elle, elle voulait juste rester auprès d'Elle, qui l'avait protégée. Alors il valait mieux ne pas parler.

Cependant, ses yeux n'étaient pas vraiment aussi obéissant. D'instinct, ils se dirigèrent vers le plateau de la table pour la lui faire voir à nouveau rempli de plein de bonne chose qui faisait venir à ses narines de si bonnes odeurs. L'eau lui monta à nouveau à la bouche tandis que son estomac lui demandait encore de quoi se remplir. Mais la volonté de rester était plus forte. Ce fut alors qu'Elle se tourna vers elle :


« Comment t'appelles-tu ? »

Pour la première fois depuis qu'Elle avait pénétré dans la pièce, la petite fille entendit distinctement ses mots. Elle s'adressait à elle. Elle devait lui répondre. Alors... Il fallait regarder les gens à qui on parlait. Sinon, elle serait frappée. Elle s'efforça donc de détourner son regard des brioches et de la confiture qui emplissait la table pour se tourner vers Elle. Mais quand elle croisa son regard d'azur, à la fois doux et bienveillant, ils se baissèrent tout seuls. Elle avait l'impression qu'elle ne pouvait la regarder sans être gênée. Froissant un peu la jupe de ses mains, sans oser tenter de recroiser son regard, elle répondit d'une petite voix :

« A... Alice. »

Elle n'arrivait toujours pas à relever les yeux vers son interlocutrice. Par contre, la faim se faisait toujours sentir et l'attraction des victuailles étaient assez forte pour qu'elle ne puisse empêcher sa tête de se tourner tout seule vers elle. Avant qu'elle ne ramène son regard sur ses pieds. Et que le manège ne recommence.
Eilinn_melani
Le silence s'était installé dans la cuisine nimoise. Seul parfois l'âtre laissait échapper quelques crépitements sonores, rappelant qu'au dehors des murs épais, le temps s'écoulait.
Eilinn Melani regardait l'enfant assise à la table, dont le ventre grognait, maigre à en faire peur, la peau pâle, les cheveux blancs, et ces yeux rouges si particuliers. La vicomtesse d'Avize n'aurait pas rencontré Aymeric de Saunhac quelques mois plus tôt lors de festivités à Bolchen qu'elle aurait probablement réagi comme tout le monde, considérant que le Sans-Nom avait maudit l'enfant.

Mais le Vicomte de Saunhac, qu'elle avait pu approcher, même si il n'avait pas décroché un mot excepté pour râler, n'aurait pas pu obtenir la place qu'il occupait si il avait été démoniaque. Et l'on avait fini par poser des mots sur cette mine étrange : albinos. Tout comme certains lapins de Jehanne Elissa au poil blanc et aux yeux effrayants, comme le lapin tueur des Monty Python, qui se révélaient plus fragiles que leurs congénères.
L'origine de ces albinos ? Certains arguaient d'une vie précédente chargée de péché, ou bien du péché parental qui se transmettait à l'enfant, ou encore l'accomplissement de l'acte charnel pendant les menstrues de l'épouse... Eilinn ne s'était jamais interrogée plus avant sur cette particularité, considérant Aymeric comme l'unique représentant de cette anomalie. Et il ne fallait pas être sorti du Collège Saint Louis pour deviner que l'avenir de l'enfant devant elle, pauvre, sans attaches, ne promettait pas d'être reluisant, ni très long.

Dépiotant sa brioche, tandis que l'Anglais versait dans deux timbales du lait chaud accompagné de miel et d'épices avant de les déposer sur la table, Eilinn réfléchissait. Déjà elle devinait dans l'avenir les entrelacs des choix qui lui étaient proposés en cet instant. La vicomtesse finit par ôter sa cape, la chaleur dans la cuisine l'ayant assez réchauffé, tandis que l'enfant continuait à regarder vers le bas, sans oser lever les yeux sur elle. Etait-elle donc devenue si effrayante ces dernières semaines ?


Alice. C'est un joli prénom.
Et tu peux encore manger, si tu as faim.


D'un geste de la main, elle poussa une brioche devant l'enfant, ainsi que la timbale de lait chaud.

D'ou viens-tu, Alice ?
_________________
Alice_liddell
Ses yeux ne cessaient d'aller et venir entre le sol et la table. Elle avait l'impression que La regarder l'aurait souiller. Elle était maudite. Elle ne pouvait pas regarder un tel être. On lui avait déjà dit. Elle n'en avait pas le droit. Le Très-Haut le lui avait retiré. Irrésistiblement, ses yeux étaient donc attirés vers le sol. Mais dans le même temps, son ventre grondait et se rappelait durement à son esprit par quelques vagues de douleur et d'envie. Envie qui lui faisait remonter les yeux vers les victuailles entreposé devant elle, juste de l'autre de cette barrière qu'elle ne pouvait pas regarder. Tirailler entre deux forces irrésistibles, ses pupilles faisaient donc des aller-retours incessant, bien que leur position basse soit en général un peu plus longue que celle parallèle au sol.

Son interlocutrice sembla tout d'abord ne pas vraiment remarquer ce petit manège. Quand elle Lui dit son nom, elle se contenta de lui répondre d'une voix douce qu'elle n'avait jamais entendu que dans ses rêves :


« Alice. C'est un joli prénom. »

Et puis il y eût un très léger raclement sur la table. Comme si on faisait glisser quelque chose sur le bois. Toute résistance vaincue par ce bruit prometteur, les yeux écarlate de la petite fille se levèrent soudain pour voir une timbale remplit de lait encore fumant et un brioche s'avancer vers une place libre sous l'impulsion de Sa main.

« Et tu peux encore manger, si tu as faim. »

Cette dernière phrase s'avéra somme toute inutile. D'ailleurs, Alice ne l'entendit même pas. Sa volonté entière s'était éteinte d'un coup. Sans plus réfléchir, elle se jeta sur la nourriture qu'on lui offrait et entama la brioche à belle dents. Elle était bonne. Douce, sucré, chaude. Comme les mains d'une mère. Le lait coula dans sa gorge. Tandis que sa bouche s'emplissait de saveur qu'elle n'aurait jamais imaginés, tout son corps se réchauffait. Comme sous l'étreinte d'une parente. Avidement et avec délice, elle avalait tout ce qu'on lui présentait avec un plaisir évident.

Et puis...


« D'ou viens-tu, Alice ? »

Tout sembla soudainement s'arrêter. Elle ne pouvait pas lui dire. Elle était gentille avec elle. Elle voulait rester ici. Mais si elle savait, elle voudrait qu'elle retourne Là-Bas. Là-Bas où elle aurait mal. Là-Bas où ils étaient méchant. Là-Bas où il se moquaient d'elle. Là-Bas où ils la frappaient. Elle ne voulait pas retourner Là-Bas.

Comme si la question lui avait aussi mal qu'un coup, la petite fille se recroquevilla sur sa pioche, mâchonnant encore un bout de temps à autre, penchée au dessus de son bol comme si elle avait voulu trouver un moyen de se cacher dedans. Elle jeté de petits coup d'oeil d'oisillon pris au piège vers sa sauveuse. Le silence s'installa. Elle ne pouvait pas lui dire. Non, elle ne pouvait pas.
Eilinn_melani
Ayant terminé de manger, Eilinn regardait Alice engloutir la brioche encore chaude. C'était à se demander comment un si petit être pouvait absorber une telle quantité de nourriture, et surtout aussi rapidement. La fillette dévora la brioche comme si elle n'avait pas mangé depuis des lustres.
Et peut-être était-ce le cas.

Eilinn s'était attendue à beaucoup de réponses de la part d'Alice concernant ses origines, et à vrai dire, ce n'était pas tant les mots qui l'intéressaient. Dieu avait décrété que chaque homme était l'égal de l'autre, mais la société avait établi une hiérarchie stricte qui définissait bien des choses à la naissance d'un enfant.
Eilinn était sortie des cuisses d'une vicomtesse, et probablement que si elle était née dans un contexte plus pauvre, elle ne serait plus vivante à cet instant. L'argent et les relations maternelles lui avaient permis d'aller vivre en Languedoc pour être suivie par l'université de Médecine de Montpellier et de profiter du temps clément du sud. Eilinn avait eu de la chance, une étoile avait brillé sur son destin au moment de sa naissance, mais Alice n'avait point eu cela.

La petite fille ne semblait pas vouloir en tout cas vouloir retourner d'où elle venait, en adoptant cet air d'oisillon affolé. Parfois certains maigrichons qui trouvaient refuge dans les cuisines de la vicomtesse repartaient l'estomac plein en quête de parents richissimes, ou bien pour vivre de rapines dans les cours des miracles des grandes cités françaises, ces destins semblant bien plus prometteurs que celui proposé par le service auprès d'une noble. Mais il était aussi possible aux esprits vifs de faire table rase de leur passé pour entamer un nouveau départ.

La noble réfléchissait donc au champ des possibles qui lui était offert en cet instant. Une paire de bras supplémentaire pouvait toujours être utile, mais il était peu certain que la domesticité, avec ses croyances paysannes profondément ancrées, accepte la petite fille. Son regard coula un instant en direction du majordome anglais, qui lui ne laissait rien transparaitre. Les azurs d'Eilinn se posèrent à nouveau sur Alice.


Veux-tu repartir d'ici ?

La question était de pure forme, mais on pouvait avoir des fois des surprises. Et c'était également une invite pour la petite fille à mieux expliquer sa présence ici.
_________________
Alice_liddell
Le silence s'instaura. Il ne resta plus dans la cuisine que le bruit des mâchoires qui se refermaient à intervalle régulier sur la brioche. La petite fille n'osait plus relever les yeux de son lait. Elle était sûr qu'en relevant la tête, elle allait voir un regard sévère sur la figure de sa sauveuse. On n'aimait pas qu'on ne réponde pas aux questions. Elle le savait. Il fallait répondre aux questions. Mais elle ne pouvait pas répondre à celle là. Sinon, elle devrait partir. Sinon, elle devrait retourner Là Bas. Mais en même temps, si Elle était en colère, elle devrait partir d'ici, c'était sûr. Alors qu'elle avait trouvé quelqu'un de gentil. Quelqu'un qui avait dit qu'elle n'était pas un démon. Mais elle l'avait mis en colère. Elle n'allait plus pouvoir rester. Elle allait devoir retourner dehors. Où il faisait froid. Où les froides étendues blanches la tuerait sûrement. Alors qu'elle L'avait trouvé, la personne qu'elle cherchait. Elle avait tort. Le Très-Haut l'avait bien rejetée.

Le silence devint de plus en plus pesant. Ayant fini la brioche qu'on lui avait donné, l'enfant pris maladroitement le bol à deux mains et, manquant d'en renverser une bonne partie en le soulevant de la table, finis à grande gorgée le liquide chaud qui réchauffa une dernière fois son corps gelé. Le reposant, son regard suivit son fond, comme si elle avait voulu rentrer dedans pour se cacher. Elle allait devoir partir maintenant. Elle allait bientôt lui dire de s'en aller. Alors elle devrait partir. Elle commençait déjà à tourner sur le banc pour sortir quand :


« Veux-tu repartir d'ici ? »

Le mouvement se stoppa net. Elle était presque face à elle. Le petit sursaut de surprise et d'appréhension qu'elle avait eu en l'entendant prendre la parole l'avait ramener devant les yeux azurs. Et maintenant, elle la regardé, la bouche à moitié ouverte, les yeux grand ouvert et les pupilles dilatées. Elle mit quelques secondes à comprendre ce qu'avait dit son interlocutrice. Partir... d'ici ? Non ! Non, elle ne voulait pas ! Mais elle allait la mettre dehors, hein. Elle ne pouvait pas rester. Elle ne voulait pas partir, mais elle devait retourner dans la neige. Mais elle ne voulait pas partir !

Elle secoua vigoureusement la tête de droite à gauche. Plusieurs fois. Comme pour bien faire comprendre que c'était ici qu'elle voulait être. Et puis elle fixa cette fois-ci la vicomtesse. Droit dans les yeux. Sa figure avait un air décidé comme elle n'en avait jamais eu. Si elle pouvait rester, alors elle le ferait. Elle ferait tout ce qu'Elle lui demanderait, si elle pouvait rester avec Elle. Elle était sûre que c'était ce qu'elle voulait faire. D'une voix tout à fait en accord avec son visage, elle ajouta :


« Tu es la seule à être gentille avec moi ! »
Eilinn_melani
La petite fille secoua vigoureusement la tête à la question de la Melani, et la réponse fut toute aussi claire.

« Tu es la seule à être gentille avec moi ! »

Les sourcils d'Eilinn se haussèrent de surprise à cette phrase. Elle ne considérait pas qu'offrir une brioche et du lait chaud pouvait véritablement être considéré comme gentil, et cela laissait deviner qu'Alice n'avait guère eu de moments de bonheur dans sa courte existence. Quelques mois plus tôt, Eilinn s'était plainte de la fin de son enfance au Comte de Scye, sans qu'on lui ait laissé le choix de rester dans cette tranquille insouciance que la vie lui avait offerte autrefois.
Et elle se trouvait désormais devant une enfant qui elle, n'avait probablement jamais rien vécu qui pouvait ressembler ... à une enfance. Un élan de compassion soudain pour Alice s'insinua dans le cœur de la Melani.

Pouvait-on rattraper le temps perdu, panser les blessures infligés à l'enfant ?

Les yeux rouges d'Alice la fixaient, l'enfant semblait déterminée. Les azurs d'Eilinn, eux, ne manifestaient qu'une tranquille impassibilité, comme si rien ne pouvait la toucher.

Pouvait-elle s'attacher à cette enfant ? Elle s'était liée à bien des personnes, et parfois le goût de la trahison avait été trop amer. Combien lui couterait alors de recueillir Alice et de lui offrir une place ?


Je peux t'offrir un lit, et de quoi manger.

Eilinn se demanda un instant quel avenir était réservé à l'enfant. Peut-être pourrait-elle améliorer le destin de l'albinos, si cela lui était possible... N'était-ce pas le but de chaque aristotélicien, pratiquer la vertu, et aider son prochain ?

Aimerais-tu apprendre à lire et à écrire ?
_________________
Alice_liddell
Les rubis d'Alice restait rivés aux azurs d'Eilinn. Ses traits ne se relâchaient pas gardant cet air déterminé à la fois enfantin et mature. Elle voulait vivre ici. Elle voulait rester auprès de celle qui l'avait sauvé. Si elle pouvait ne pas repartir, elle ne repartirait pas. C'était la seule chose qu'elle savait en ce moment. Elle ne repartirait pas. Elle ne voulait rien savoir d'autre. Rien savoir d'autre que savoir qu'elle pouvait rester ici. Elle était sûre qu'ici, elle ne serait pas frappée. Elle était sûre qu'ici, elle n'aurait pas mal. Qu'ici, il y aurait au moins une personne qui ne la verrais pas comme un monstre. Alors elle voulait rester. Elle voulait être auprès de cette personne. Elle voulait aider cette personne. Elle était grande maintenant. Elle pouvait aider les gens ! Et elle pouvait choisir qui elle aidait. Et elle voulait aider celle qui l'avait sauvé; Celle qui se trouvait devant elle. Alors ses yeux ne la quittait pas. Alors son visage restait plus déterminé que jamais. Elle savait qu'elle avait trouvé son rêve.

Le visage de son interlocutrice restait par contre de marbre. Il était impossible de lire la moindre émotion dans les prunelle de ciel de sa sauveuse. Rien si ce n'est de la tranquillité. Comme un certains bien être. Alice n'arrivait pas à les comprendre. Elle ne cherchait pas à les comprendre. Tout ce qu'elle voulait, c'était leur faire comprendre que son seul souhait était de rester ici. Alors elle continuer de fixé le regard insensible, sans ciller, sans départir son visage un seul instant de cette expression.


« Je peux t'offrir un lit, et de quoi manger. »

Enfin, les traits de l'enfant changèrent. Ils coulèrent comme de l'eau sur une pierre; passant d'une de la dureté du granit à la chaleur du soleil. Un large sourire éclaira le visage de la petite fille tandis que tout son corps se réchauffait d'une douceur qu'elle n'avait encore jamais connu. Elle pouvait rester ici. Elle n'aurait plus mal. On ne lui ferait plus mal. Elle n'aurait plus à connaître Là-Bas. Elle allait pouvoir rester auprès d'Elle. Et elle allait pouvoir l'aider. Elle resta sans rien pouvoir dire, en prise à une la plus grande joie que sa courte existence lui ait donné de connaître. Ses yeux brillaient de plaisir. Son visage brillait comme la jeune neige au soleil d'hivers. Elle rayonnait littéralement de joie. Tant que cela l'empêchait de faire le moindre geste. Elle était heureuse, c'était tout.

La vicomtesse resta silencieuse quelques instants. Silence que ne put ou même n'aurait jamais voulu rompre la petite fille. Elle restait simplement béate de ce que lui proposait sa sauveuse. Et puis, elle reprit la parole, avec un peu plus de douceur :


« Aimerais-tu apprendre à lire et à écrire ? »

Lire ? Écrire ? Le sourire d'Alice s'élargit encore, si c'était possible. On lui avait toujours dit que c'était réservé aux nobles et aux hommes saints. Elle ne pouvait de toute évidence pas faire partie de la première catégorie, et la première lui avait été fermé à la naissance. Mais Elle lui proposait de lui apprendre ! Elle allait pouvoir lire ces objets si beau. Elle allait savoir tenir une plume. Elle allait pouvoir faire comme les grands. Elle n'aurait jamais rêvé qu'elle puisse trouver quelqu'un qui pourrait lui dire comme faire. Elle avait vraiment trouvé son rêve.

Comme si cette proposition l'avait libéré de l'état de béatitude dans lequel elle se trouvait, elle reprit le contrôle de son corps. Ou plutôt, son corps reprit son contrôle. Avant même qu'elle n'ait pu se rendre compte de ce qu'elle faisait, elle s'élança dans les bras de son interlocutrice et se blottit contre sa poitrine. Elle sentit la chaleur de son corps l'envelopper tandis qu'elle nouait ses bras autour de son torse. Finissant de se lover, fermant les yeux, elle cria, extatique :


« Oui ! »
Eilinn_melani
Le visage d'Alice était en perpétuel changement, comme si chaque muscle était en mouvement pour trahir les pensées et volontés de l'enfant. Eilinn était-elle ainsi quelques années plus tôt ? Elle se souvenait seulement de sa naïveté et cette gentillesse permanente qui lui avait parfois amené bien des problèmes.

Tout comme Eilinn autrefois, Alice ne semblait pas faire preuve de malice ou de manipulation et la Melani se retrouvait presque dépourvue face à la démonstration de joie de l'enfant. Quand avait-elle perdu cette faculté à s'émerveiller ? Les derniers évènements avaient-ils rendu son cœur de pierre, alors qu'elle ne cherchait seulement qu'à se protéger ?

L'enfant vint alors se blottir contre elle, dans un élan inattendu et puéril, prenant par surprise Eilinn. Au bout d'un instant les mains d'Eilinn se posèrent sur les épaules d'Alice, dans une étreinte douce et presque... maternelle.


Un sourire vint enfin orner les lèvres de la vicomtesse d'Avize.

-Fin-
_________________
See the RP information
Copyright © JDWorks, Corbeaunoir & Elissa Ka | Update notes | Support us | 2008 - 2024
Special thanks to our amazing translators : Dunpeal (EN, PT), Eriti (IT), Azureus (FI)