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Sebelia, jeune mâconnaise de 19 printemps n'a point fait le deuil de son amour perdu, gardant espoir de reconquérir son cœur. Mais l'homme devenu franc comtois, invité à une cérémonie en hommage aux bourguignons partis soutenir la Savoie pendant la guerre, ne se présente point seul en la capitale dijonnaise. A son bras, est pendue une damoiselle. La bella ressent alors une immense colère qui se traduit par un excès de violence. Elle finit par sombrer dans les profondeurs d'un monde onirique.

[RP] Dans l'oeil d'une tigresse...

Sebelia
[Il était une fois l'opéra des gueux et des brigands]


L’ascension de la colline lui avait demandé moult efforts et de fines gouttelettes de transpiration traçaient de longs sillons noirastres sur son minois aux joues creuses recouvert d’une mince pellicule de poussière de bois. Elle avait quitté la bastisse où se situait son atelier de charpenterie à la mi journée souhaitant profiter de la doulceur d’un bel après midi ensoleillé, affublée d’une camisole de fine toile d’un blanc cassé et de braies de garçonne en cuir sombre. L’échine courbé, elle peinait à avancer la bouche entrouverte, expirant bruyamment, le pas incertain malgré la qualité de ses bottes neuves en chevreau souple qui lui avait cousté une jolie bourse d'écus.

Le corps nerveux plutost décharné la jeune femme était de petite taille, au casque de jais et à la peau hyaline. Sebelia, puisqu’elle se nommait ainsy portait sur son dos un sac de frappe d’un pied de diamètre. L’objet recouvert de grosse toile faisait la moitié de son poids soit près de soixante livres pour une hauteur de quatre pieds et demi. Quelque temps auparavant elle avait rencontré un marchand ambulant qui venu du Sud du royaume souhaitait déverser sur le marché local plusieurs sacs de sable fin. Ils avaient discutaillé longuement puis l’homme avait fini par troquer ses marchandises contre quelques grosses pièces de charpenterie. La jeune femme avait su en faire bonne utilisation. Enfin une grosse corde ceinturait la taille de la bourguignonne qui s'était immobilisée prenant appui sur un manche de bois finement sculpté.

Le souffle court, ses pas l’avaient menés jusqu’à une clairière où reposait un arbre centenaire. Les jambes flageolantes, laissant choir le sac dans son dos, la jeune femme s’était presque écroulée, les genoux reposant sur un lit de mousse oyant le silence d’une nature qui ne demandait qu’à s’éveiller et dont les températures fort agréables annonçaient les prémices d’un printemps tout en douceur. Les yeux mi clos, Sebelia inspira profondément puis se redressa lentement déployant sa petite silhouette aux fresles épaules. Elle tira violentement sur sa ceinture et saisit péniblement l’édredon de sable où plus exactement l’anneau cousu en son diamètre dans lequel elle passa adroitement la corde. Relevant le menton et d'un geste précis elle la lança par dessus la première grosse branche et tira de toutes ses forces évaluant avec précision la bonne hauteur du sac de frappe qu'elle arrima solidement vérifiant par deux fois la tension du cordage.

Satisfaite de l'équilibre ainsy trouvé, Sebelia releva ses cheveux sur le haut de son crasne et effectua quelques étirements. L'entrainement pouvait enfin commencer. Pendant une vingtaine de minutes la brunette effectua des levés de genoux, des pas chassés avant latéraux, arrière frontaux, des talons fesses et de course marche arrière. Puis elle enchaina sur des bonds verticaux avant de se poser devant le sac de frappe haletante mais le regard fixe concentrée à l'extresme. Elle sentait une colère sourde s'immiscer à travers tous les pores de sa peau qui durcissait davantage son visage en delta et dont les lueurs éclairaient le puits sans fond de ses prunelles noisette comme un ciel orageux zébré d'éclairs une belle soirée d'été. Regard vers ses mains faites pour la caresse du bois. Des mains nues que ne recouvrait aucun bandage. Une légère hésitation. Puis immergée sous une vague déferlante les poings se fermèrent et les coups plurent.

Direct avant. Direct arrière. Crochet avant. Crochet arrière. Des coups, des coups encore des coups jusqu'à ce que la douleur disparaisse anesthésiée par la rage et l'adrénaline les pupilles complètement dilatées. La grosse toile se teinta de rouge écarlate petites éclaboussures vers un océan carmin. Un cri rien qu'un cri lorsque des lambeaux de chair laissèrent apparaistre les os blanchis. Les coups cessèrent alors au profit de gémissements, au profit d'une douleur physique bien plus grande qu'un cœur brisé. De battre son cœur s'était enfin arresté. Hébétée Sebelia ne pouvait quitter des yeux ses poings ensanglantés. Elle essaya de tendre ses mains en vain. Ses yeux se révulsèrent et elle sombra dans les profondeurs d'une vie onirique.

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Et maintenant que vais je faire de tout ce temps que sera ma vie, de tous ces gens qui m'indiffèrent...
Sebelia
[Le serpent rouge]



Bien sur elle ne trouillait aucunement devant la mort... Mais force était de constater que la grande faucheuse affichait un registre de rendez-vous complet. Oui-dà sa dernière heure n'était point encore arrivée; elle devrait faire montre de patience. Ce qui pour tout un chacun pouvait paraistre surmontable s'avérait pour la bella tout autre. Si fait ! Icelle n'était point vertueuse, c'était le moindre de ses défauts. Pourtant elle ne quitterait point ce monde sans construire l'édifice de sa vie. Une vie sebeliesque. Sebeliesque un adjectif qu'il avait créé rien que pour elle... Elle gémissait à présent et tentait d'endiguer la poussée lacrymale qu'elle sentait poindre mais prisonnière de ce resve elle gardait les yeux grand ouverts, hypnotisée, spectatrice malgré elle des vicissitudes de son triste passé. Car loin d'avoir posé les premières pierres à l'édifice il fallait en premier lieu s'occuper de ses fondements. Malheureusement elle avait perdu connaissance et flottait dans un état de semi conscience entrecoupé de songes nocturnes ma foy fort chaotiques.

Elle devait se saisir de ces moments pour agir, plus ou moins, dans des conditions analogues à celles où elle serait dans un autre monde. Elle pourrait alors parler avec des amis ou des parents morts, remonter dans le passé, voyager dans l’espace, et peut estre rencontrer un guide. Dans cette autre dimension elle serait une projection charnelle de son soi onirique. Mais seuls les ténèbres l'enveloppaient. Le visage figé et le corps raide elle ne percevait que le néant comme si tous ses sens s'étaient altérés jusqu'à disparaistre inéluctablement. Alors dans la brumaille de ce jour dominical quelques vers déchirèrent le voile de ses attentes et se glissèrent insidieusement au creux de ses esgourdes. L'obscurité totale avait cédé la place à une nuit sans lune au fin fond d'une forest silencieuse. La neige recouvrait encore de son manteau blanc mère nature et une silhouette sombre se tenait agenouillée, un petit briquet à silex serré dans sa dextre, penchée vers quelques branchages déposés au sol. De petits nuages de vapeurs sortaient de sa bouche aux lèvres purpurines cherchant à insuffler la vie sur le feu ténu par l'amadou enflammé.



Si je pouvais t'offrir le bleu secret du ciel,
Brodé de lumière d'or et de reflets d'argent,
Le mystérieux secret le secret éternel,
De la vie et du jour, de la nuit et du temps,
Avec tout mon amour je le mettrais à tes pieds.
Mais moi qui suis pauvre et n'ai que mes rêves,
Sous tes pas je les ai déroulés.
Marche doucement car tu marches sur mes rêves.*



Son souffle chaud avait embrasé le petit bois pourtant bien humide. Mais ici tout était différent. La réalité avait cédé la place à l'onirisme et le fantasme. Pourtant elle pouvait sentir le froid mordant de l'hiver sur sa peau nu. Ses opalines noisette glissèrent sur son corps effleurant sa vesture de saison. Visage encapuchonné dans une fourrure aussi sombre que ses épis de jais, pelisse et chemise en grosse laine, jambes nues recouvertes partiellement par des bas blancs, bottes éculées et ses armes. La mâconnaise poussa un soupir de soulagement en caressant le pommeau de son épée. Il avait piétiné ses resves une nouvelle fois. Elle déferra sa bastarde du fourreau qui pendait contre sa hanche et glissa un doigt sur la lame aiguisée appréciant son tranchant. Quelques gouttes de sang perlèrent sur ses doigts fins et s'écrasèrent dans la neige. Il ne lui avait jamais pardonné cette trahison. Profondément marqué et blessé dans son ego de masle il l'avait chassée comme une malpropre et avait mis ses terres en vente. Elle avait alors intercédé auprès du genevois fraichement mâconnais pour qu'il acheta ces terres afin d'assurer un départ plus prompt qui lui permettrait de l'oublier vitement. Pourtant il avait tenu à la revoir en taverne une dernière fois et toutes leurs certitudes s'étaient envolées. Elle avait ravalé sa fierté car ils avaient encore des sentiments l'un pour l'autre. Mais Sebelia n'en demeurait point Sebeliesque, mesme à distance et le caractère de la bella indomptable balaya une nouvelle fois son bel amour qui demeurait dorénavant en Franche Comté.

Un sifflement obligea la jeune femme à relever son menton. Qu'est ce que... Ses prunelles claires s'étaient habituées à la noirceur des lieux et fouillaient à présent les buissonades oyant des bruits de grelots qui lui donnèrent la chair de poule. Les battements de son cœur résonnaient maintenant jusque dans ses tempes. Le souffle coupé, elle fixait l'animal qui entrait enfin dans son champ de vision. Il ne s'agissait point d'une couleuvre, ni d'une vipère. Un serpent inconnu, le corps gonflé, large maschoire ouverte. Elle s'était arrestée de respirer baissant doucement le rideau de ses longs cils. Aucun son ne pouvait sortir de sa gorge.

Hephaistos était revenu il y a peu pour une cérémonie donnée par la duchesse en l'honneur de ceux qui étaient partis défendre la Savoie sous la bannière Bourguignonne. A son bras était pendue une jeune damoiselle aussi insipide qu'un verre d'eau mais qu'il pouvait dominer pour son plus grand plaisir. L'histoire aurait pu en rester là si l'homme avait eu la décence de ne point venir à Mâcon se pavaner comme un coq et l'outrecuidance de visiter une harpie au bord de l'implosion. Làs l'explosion avait eu lieu et les murailles qui entouraient la ville en portaient encore les stigmates. Elle lui avait enjoint de ne plus chercher à la joindre de quelque manière que ce soit et de dégager fissa de la ville, sa gueuse sous le bras. Elle en tremblait encore.

Rideau relevé pour constater que le serpent s'était dressé devant elle, seul le feu les séparait maintenant. Il projetait sa teste vers l'avant sans la toucher. Elle imaginait la morsure douloureuse qu'il pourrait lui infliger, avec ses longs crochets recourbés qui s'enfonceraient profondément sans compter les effets du poison qui envahirait son corps lentement. Le poison... La jalousie qui s'immisçait à travers tous les pores de sa peau. Elle venait de comprendre. Elle serra les dents. La rage se peignit sur son visage en delta. Elle se dressa de toute sa petite taille au bec à bec avec l'immonde bestiole, son épée fendit l'air et un sifflement autre brisa la silence installé par les hostes de ces bois. La teste du serpent retomba dans les flammes du feu et s'embrasa. Les gargouillis de son estomac lui rappelèrent la faim qui dévorait toute son asme. L'asme et non le corps. Le chapitre était clos à présent. De battre son cœur s'était arresté. Adieu Hephaïstos adieu il mio amore...



*William Butler Yeats

He Wishes for the Cloths of Heaven

Had I the heavens' embroidered cloths,
Enwrought with the golden and silver light,
The blue and the dim and the dark cloths
Of night and light and half-light,
I would spread the cloths under your feet
But I, being poor, have only my dreams;
I have spread my dreams beneath your feet;
Tread softly because you tread on my dreams...

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Et maintenant que vais je faire de tout ce temps que sera ma vie, de tous ces gens qui m'indiffèrent...
Sebelia
Ce post commencé en halle de Dijon a été modifié et complété car il s'agit d'un songe dans la continuité de ce RP


[Le dernier souffle...]


La nuit devait s’effacer inexorablement au profit de l’aube. Longue et belle nuit sous la vouste d'un ciel étoilé… Il lui semblait que le voyage du retour avait duré une éternité, alors que quelques jours à peine venaient de s’écouler depuis son départ de la capitale bourguignonne. Cet appartement était sien à présent. Profond soupir. Esquisse d’un pasle sourire ses prunelles noisette tournés vers les cieux. Ces jours là seront déduits de la durée de ma vie alors que je les égrène avec impatience, murmura t-elle.

Malgré ses oripeaux d’homme, ses hanches épanouies ne laissaient point de doute quant à son identité sexuelle. Les paupières mi closes, allongée de tout son long au milieu des fleurs pourpres à motif en damier des fritillaires pintades avec leur étrange bulbe globuleux et de la salicaire, Sebelia avait baissé le rideau de ses longs cils qui caressaient doucettement ses joues pasles. Ses mains fines étaient croisées derrière sa nuque, tirant de fait légèrement sa camisole vers le haut dévoilant un petit carré de peau blanche. Sa respiration était lente et profonde.

Plusieurs heures s'étaient passées sans que la jeune femme n'ait bougé d'un pouce. Quelques battements de cils avaient troublé l'horizon velouté de sa peau lisse, à peine. Elle ne sentait point la rosée du matin pénétrer sa vesture tant elle savourait ces instants, tout à son bonheur de fouler à nouveau ce sol mâconnais qu’elle affectionnait tant. La nature s’éveillait, quelques bruissements de feuilles par ci par là et le clapotis de l’eau contre les berges. Prendre le temps d’écouter le rasle des genests, dont le chant venait d’estre interrompu par de petits cris perçants. Relever les paupières, se redresser lentement. Déplier sa petite silhouette et s’approcher silencieusement afin de surprendre l’animal au pelage brun où plutost d'apercevoir sa queue en forme de palette aplatie horizontalement avant qu’il ne se glisse dans son terrier à l’entrée immergée. Surprise dans les opalines claires de la bella et bouche s’arrondissant jusqu’à former un O parfait.

Le soleil se levait, teintant le paysage d’une belle couleur orangée, donnant des reflets de miel dans la chevelure couleur de lapis niger finement tressée de la mâconnaise qui jetait un œil sur les forests riveraines, jungle en miniature d’où s’échappaient une multitude de sons différents. La Saosne avait découvert peu à peu ses grèves et ses bancs de sables, et elle pouvait apercevoir au loin les sternes en queste de poissons. Afflux de souvenirs d’enfance alors qu’elle ramassait des coquillages, des moules perlières et qu’elle peschait le saumon sur ses terres natales en comté de Toulouse. Suivre l’envol d’un milan noir. Le rapace avait du repérer une proie. Faire preuve de patience et attendre, mesme si au fond de son cœur Sebelia savait qu’elle serait amenée peut-estre à repartir. Tout quitter pour lui.

L'écorchée vive esquissa un sourire gracieux découvrant de petites dents blanches, il finirait bien par rejoindre les berges de la Saône. Elle n'attendait que luy. Bien campée sur ses jambes, Sebelia embrassait maintenant du regard les murailles de sa ville. Quid du resve ou de la réalité alors qu'elle bayait sa rastelée oyant ses propres paroles.



Amour Ô mon amour je prononce ton nom et il sonne à mes oreilles comme une douce mélodie...


Premier regard échangé. Ce qu'elle avait lu dans les miroirs de son asme l'avait flattée mais effrayée quelque peu. Troublée la jeune femme l'était certes tandis qu'une petite voix lui susurrait au coin de l'esgourde laisse tomber ma fille faire la cour et l'amour souffrance nuit et jour. Résister... et surtout se souvenir de ses peines. Refroidir ses ardeurs et remiser au tréfonds de son cœur qui bat bat bat ses sentiments exacerbés. Et pourtant les défenses de l'ange brun avaient fondu comme neige au soleil. Ses sens enflammés, ses prunelles noisette plongées dans les siennes, elle s'était noyée dans le puits sans fond de son biau regard.


Amour Ô mon Amour qu'allons nous devenir ?


Cœur qui battait la chamade, la cible venait d'estre repérée. Vigilance toujours en éveil. La charmogne opérait l'homme venait d'apparaistre dans son champ de vision. Réfléchir très vite... Surprendre son énamouré. Il se tenait immobile de dos mais elle l'aurait reconnu entre mille. Iceluy était plongé dans ses pensées. Dix écus pour en connaistre le fond il mio piccole cuore, ce n'est pas cher payé.

La bella se fit prudente. Hors de la portée du regard de l'homme, elle détacha sa cape qu'elle laissa glisser à terre, puis son ceinturon, déposant délicatement le fourreau de son épée au sol. Faisant tomber ses braies elle se retrouva bientost en camisole. Elle le surprendrait par le fleuve. Glissant dans l'eau elle fut saisie par le froid et serra les dents. Ne point flancher maintenant. Plonger et nager vers le masle qu'elle aimait éperdument, ma foy une bonne motivation en soi. Sortir de l'eau discrètement, s'approcher à pas feutrés de l'homme. Poser ses mains sur ses yeux. Sentir le contact de sa peau et ne plus frissonner de froid mais de plaisir...

D'aucuns sont convaincus que l'amour rend aveugle... Sebelia venait de prendre la mort pour amant...

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Et maintenant que vais je faire de tout ce temps que sera ma vie, de tous ces gens qui m'indiffèrent...
Sebelia
[La clameur du silence]


La mort qui avait pris forme humaine s'était retournée et le corps de la bourguignonne venait d'estre envahie soudainement par une doulce chaleur. Plongeant ses opalines noisette dans les orbites vides de celuy qu'elle voyait comme son aimé, elle sentit la délicate pression de sa main autour de sa taille fine. Tandis qu'il la soulevait du sol et la déposait délicatement sur un lit de mousse l'exposant par là mesme aux premiers rayons chaleureux de l'astre solaire, Sebelia ne pouvait détacher ses prunelles bruslantes de celles de son ténébreux amant. Iceluy remonta sa camisole lentement exhibant davantage sa peau hyaline. Constatant avec ce qu'elle prit pour de l'inquiétude que ses pieds étaient glacés, l'homme tenta de les réchauffer sous sa propre chemise de pourpre l'interrogeant parallèlement sur la durée de son séjour icelieu.

Si fait il mio amore, je crains de ne point rester longtemps à Mâcon. J'effectue un pèlerinage sur les terres Bourguignonne et je repartirai d'ici quelques jours.

Puis posant une main diaphane sur la bouche sans lèvres de la grande faucheuse, sachant ce qu'elle allait exprimer.

Profitons de l'instant présent mon cœur. Ne perdons point de temps en discutaille stérile.

Les choses prenaient un tournant inexorable, la faute à cet amant. Ou presque...

Ce qui la retint d'abord...

A la réflexion rien ne la retint, les moindres considérations morales trouvèrent une contre-vérité.
Je suis libre de faire ce que je veux. Les autres, considérations d'empathie, furent balayées grand vent par des semaines de frustration accumulées, à provoquer un empourprement vermillon sur ses joues sans rien y pouvoir faire, à d'autres choses aussi, moins avouables, et les considérations temporelles, tu viens d'arriver et vous avez à peine fait treize pas, furent mises au ban derechef sans estre seulement entendues.

Sebelia baissa les yeux et fronça les sourcils, elle cherchait ses mots. Relevant le nez et lançant un regard jusqu'à l'appareil labial inexistant de la mort, se pencha et vint cueillir ses derniers mots au bord de ses lèvres imaginaires. La jeune femme passa son bras autour de son cou pressant son corps léger sur l'homme l'aidant ainsy à ne point s'affaler, sentant ses forces l'abandonner. Elle ne sut combien de temps cela dura. Étourdie par ce baiser, ne put retenir ses joues de rougir en suçotant ses lèvres pour en garder encore toute la saveur.

Quelque temps plus tard c'est allongée dans une barque que la brunette se retrouva, projetée à nouveau dans l'espace et le temps. La nuit avait recouvert le les berges de la Saosne de son sombre manteau. La période était estivale.

Les yeux tournés vers la vouste céleste, Sebelia écoutait avec émerveillement son doulx. L'homme encapuchonné s'animait avec passion. Il parlait avec enthousiasme assis à l'avant de la barque indiquant et nommant de son doigt les constellations. La brunette ne comprenait point tout, certes, comment aurait il pu en estre autrement. Ses connaissances es astronomie étaient quasi nulles. Si l'on exceptait l'héliocentrisme c'est à dire le soleil au centre du monde et qui devenait de nouveau une option à prendre au sérieux alors que la position de Nicole Oresme reposait sur l'hypothèse géocentrique, la Terre est au centre du monde, comme la plupart de ceux qui l'avaient précédé, cette situation devenait intenable.

Retour vers le ciel étoilé d'une nuitée d'été à point d'heure de relevés.

Peu lui importait; la mâconnaise aimait la doulceur de la voix de son amant, la flamme dans son regard et le contact de sa peau alors qu'il l'avait rejointe à l'arrière de la barque et qu'elle glissait sa main dans la sienne, entremeslant ses longs doigts aux siens osseux. Icelle avait repéré la ceinture nuageuse qu'il appelait la vouste céleste. Elle n'avait point osé l'interrompre alors qu'elle se questionnait sur ce peuple grec dont elle avait entendu parlé. Puis ses yeux avaient fouillé le ciel à la recherche des trois belles de l'été. C'est alors que la mort avait tendu son doigt vers Deneb l'étoile la plus brillante de la constellation du cygne. Les opalines noisette de la jeune femme avaient suivi sa direction, pressant davantage sa main en la sienne.

Puis tout doucement, la bourguignonne avait fermé les yeux, bercé par le clapotis de l'eau, recroquevillée tout contre son pasle amant. Un profond soupir s'était échappé de sa poitrine, la bouche légèrement entrouverte, adoptant le souffle régulier du sommeil, elle s'était assoupie pour un long moment lorsque...

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Et maintenant que vais je faire de tout ce temps que sera ma vie, de tous ces gens qui m'indiffèrent...
Sebelia
[Les portes du ciel]


Seb... Seb... Seb ouvre les yeux...

Nenniiiiiii !

Elle avait crié. Ce ne pouvait estre ! Cette voix sortie d'outretombe... Le visage torturé, la jeune femme se débattait pour chasser de sa vue les traits de l'homme qui venaient de se dessiner sous ses paupières baissées. Elle sentait la colère poindre de nouveau. Une colère sourde qui compressait sa poitrine et l'étouffait à nouveau. Elle porta inconsciemment les deux mains sur son palpitant qui battait puissamment la chamade.

Tu n'as pas le droit... Jamais plus jamais tu ne devais... Je te l'avais demandé. Rappelle toi !

Elle gémissait à présent. La bouche tordue par la souffrance, les muscles tétanisés.

Seb... Seb... Seb... ouvre les yeux...

La brunette avait la nausée. La sol tanguait dangereusement. Le silence s'était imposé. Elle ne pouvait qu'entendre cette voix. Ses mains s'accrochaient désespérément au bastingage de sa barque. Ô combien elle avait aimé cet homme ! Alors pour la énième fois elle l'écouta. Les mot échangés agirent comme un baume cicatrisant sur son cœur. Il avait eu peur de recommencer quelque chose avec elle, peur de faire le mauvais choix et de se casser les dents encore une fois, peur du regard des autres surtout... Et pourtant...

Oui il l'avait aimée avec force et tendresse.

Elle comprenait son manque de courage.

Les lèvres pasles de la mâconnaise s'entrouvrirent et l'écho de sa propre voix se perdit dans les méandres de la nuit.


Ne t'inquiète pas.

Un jour qui sait tu t'armeras de courage et de témérité...

Et nous serons de nouveau réunis et ce mesme au delà de la vie.


Alors Sebelia releva le lourd rideau de ses longs cils bruns et un éclair effrayant déchira l'obscurité. La bella se redressa sur les coudes cherchant son amant du regard. Un rire sarcastique sortit de la bouche de l'homme encapuchonné avant que la lame étincelante d'une faux ne s'abattist sur la jeune femme qui souplement roula sur le costé avant de se relever promptement. La barque déséquilibrée se retourna comme une coquille de noix renversant ses deux passagers dans la Saosne. Les algues s'étaient enroulées autour des chevilles fines de la Bourguignonne et la maintenaient dans les profondeurs sans fond du fleuve.

Elle avait gardé ses bottes. Plongeant sa dextre entre le cuir et son mollet, les doigts de la bella se refermèrent sur sa dague à couillettes. D'un mouvement habile, elle trancha les liens qui l'immobilisaient et nagea jusqu'à la surface de l'eau où elle se projeta violentement. Inspirant à plein poumon l'air qui lui manquait dans ses alvéoles elle regagna les rives et s'écroula haletante. Court répis car les sables mouvaient et Sebelia se sentit aspirée irrémédiablement vers les fonds. Elle cessa de lutter. Tout était fini pour de bon cette fois, le sable emplissait sa bouche, son nez puis ses yeux. Elle se présenterait devant le Très Haut l'asme nue entourée de masnes.

Mais il devait en estre autrement. Un coup de langue raspeuse et la douleur de ses poings ensanglantés la tirèrent vers la lumière. Un songe qui se déchirait sur la truffe fraiche d'un clebs puis un juron qui s'échappait des lèvres fines et craquelées.


Par les saintes couilles du Pape !

Le chien d'Yvon, frère de la brunette venait à nouveau d'échapper à la vigilance du soldat.

Encore estourbie, la jeune femme se redressa péniblement, handicapée par ses mains aux os apparents. Le canidé sur ses talons, Sebelia grimaça avant de prendre la direction de la maisonnée familiale jetant un dernier regard par dessus son épaule sur le sac de frappe teinté de rouge carmin.

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