Afficher le menu
Information and comments (0)

Info:
Unfortunately no additional information has been added for this RP.

[RP] Maintenant et à l'heure de notre mort

Erwelyn
Silencieuse, la mainoise trotte doucement sur Tralala, Poneybouboule gentiment attaché à une longe et suivant le rythme du petit groupe. Sur le bout de ses doigts, elle compte. Un mois, deux mois, trois mois... jusqu'à arriver à neuf, voire dix facile. Cela fait trop longtemps maintenant qu'elle est censée se trimbaler un polichinelle dans le tiroir et il lui semble que cela fait une éternité que ce faux ventre confectionné par sa chambrière la pèse. Son dos en souffre même, à force. Elle a également dû essayer de prendre du poids pour faire diversion.

Mais là, Lynette sature, et de toute façon, il est grand temps de songer à cette naissance.

Quittant enfin le Périgord et commençant à traverser le Poitou, le poids pesant sur ses épaules après l'attaque de l'armée périgourdine se relâche peu à peu. Ces mauvais souvenirs sont derrière eux. Karyl et Ygerne vont mieux, malgré les séquelles qu'ils gardent tous deux de leurs blessures. Voir s'éloigner les murs d'Angoulême est alors un soulagement profond. Au fond d'elle, elle prie ardemment pour que jamais ses pas ne la ramènent dans ce comté maudit, qui par deux fois a fait tomber des amis proches.

Le temps est donc à songer à des choses plus légères. Enfin légères... y avait quand même un bébé à gérer dans l'histoire. Quant à l'homme censé être le père, par chance, voilà qu'il ne donnait plus signe de vie depuis des mois. Ce qui soulageait largement la mainoise. Encore un peu, et plus personne n'oserait parler de lui de peur de toucher la corde sensible et de lancer un sujet qui fâche. C'est vrai quoi, une femme enceinte, non mariée, qui se retrouve avec un promis absent, ça fait mauvais genre. Ou plutôt, ça fait pitié.
Et à bien y réfléchir, Lynette préférait faire pitié plutôt que de se retrouver mariée à Vaxilart. Elle n'avait cure de ce qui avait bien pu lui arriver. Qu'il se terre, qu'il ait fini blessé à la guerre, ou qu'enfin il ait pris une fillette en épousailles, pourvu qu'il ne donne plus signe de vie ! Elle pourrait même faire croire qu'une lettre annonçant sa mort était parvenue jusqu'à elle, ce qui justifierait enfin qu'on la laisse tranquille avec ces histoires de mariage.

Mais avant, il fallait s'occuper du bébé... Ygerne lui avait donné plusieurs idées, mais la seule qui avait retenue réellement son attention était franchement la plus glauque et la plus difficile à organiser. Et tout ça sans éveiller les soupçons des ponettes, dont la liste de mensonges déballés par Lynette dépassait l'entendement ces derniers mois. Arrivée en Normandie, il lui faudrait vraiment aller à confesse, et elle avait déjà en tête la personne qu'elle irait voir. Ben ouais, fallait pas tout balancer à n'importe qui non plus... s'agirait pas qu'elle tombe sur un curé qui la fasse chanter avec des péchés longs comme le bras.

Perdue dans ses pensées, son regard tomba sur la chevelure d'Ygerne, à côté de celle plus blonde de celle de Karyl. La jeune femme était la seule à être au courant pour cette histoire de bébé. Pour cela, elle avait du lui faire croire que – promis ! - elle ferait un vrai mioche avec le duc une fois le mariage célébré. Un mensonge de plus ou de moins, au point où elle en était...
Ygerne, donc, la seule qui pourrait l'aider à ce jour.

Chemin faisant, la mainoise essaya de mettre au point tous les détails nécessaires. D'ici quelques jours, leurs pas les mèneraient en Anjou, duché de tous les excès, de tous les vices, des coups tordus et des esprits les plus vicieux. Quoi de mieux pour réaliser son plan que cette terre fertile.

Talonnant légèrement Tralala, Lynette arriva à la hauteur de sa chambrière, assise tranquillement dans la charrette aux côtés du garçon. Essayant de ne pas éveiller les soupçons, c'est d'une humeur joyeuse qu'elle lui demanda de s'installer sur son poney afin de faire route ensemble.

Ygerne ! J'ai quelque chose à mettre au point avec toi pour … euh... cette nouvelle robe que je souhaite m'offrir !
Tiens, tu peux même monter Poneybouboule si tu veux, avec mon gros bide, on tiendra pas à deux sur Tralala.


Grand sourire, cheveux de Karyl ébouriffés et regard appuyé à la rouquine. Bon tu viens oui ?
_________________

*Une Corleone peut en cacher plein d'autres*
Ygerne
- Hey mais tu prends toute la place, t’as pas fini de me coller ?
Jeux de mains, jeux de vilain, pourtant la rouquine et le blondinet avait fait la route en se chamaillant d’Angoulême à la Rochelle.
- C’est pas bientôt fini vous deux ! je veux pas savoir qui a commencé.
- Mais il prend toute la place dans la charrette et se colle à moi, en plus il bave quand il dort.
- Si ça continue c’est fessée pour les deux.


Ils avaient fait une partie de la route en se boudant par principe.
Pourtant la jeune femme et le gamin s’adoraient et rapidement Ygerne reprit Karyl dans ses bras et le couvrit de petits bécots. La perspective de leur prochaine séparation à la Rochelle rendait la rouquine malheureuse : je te promets qu’on se retrouvera, t’es un p’tit frère pour moi tu sais.

C’était bien la première fois que la gamine s’attachait à un gosse. Elle avait compris ce que pouvait ressentir des mères ou des futurs mères. Elle l’avait couvé depuis leur mauvaise rencontre et maintenant elle était inquiète pour l’avenir de ce petit homme. Bref elle se sentait un peu plus femme depuis qu’elle voyageait avec les poneys.
Et cet élan de maternalisme qu’elle ressentait pour le petit Karyl, elle le reporta sur Lynette, son employeuse.

- Arrêtez de tripoter votre ventre… c’est pas un jouet !
- Vous l’avez mis trop sur la droite la ça va pas…
- Pssssssst… venez m’retrouver derrière les buissons, vous avez oublié vos faux seins, va falloir arranger ça.
- Non mais j’vous ai déjà dit que votre faux ventre faut pas l’utiliser comme oreiller… Regardez.. il est tout plat maintenant !

Une vie de chambrière...
Elle gardait précieusement le secret de la fausse maternité. Elle avait à cœur de servir au mieux sa maitresse et de ne jamais la voir salie par une histoire qui ferait scandale.
Mais le temps passait et elle avait conscience que bientôt cette grossesse qui s’éternisait, semblerait étrange. Elle savait que la question de son faux accouchement, hantait les pensées de la ponette.
Et pour couronner le tout Vaxichou ne donnait plus signe de vie. Elle n’osait plus interroger son employeuse au sujet de son fiancé, redoutant une crise de larmes qui cette fois ne serait pas feinte !

Celle-ci d’ailleurs s’approchait de la petite charrette dans laquelle se trouvait la gamine et Karyl.
Elle observa Lynette un peu désabusée. Elle avait bien tenté de convaincre sa maitresse de prendre la charrette et lui laisser tralala prétextant qu’une femme enceinte ne voyageait jamais à cheval ! C’était bien trop inconfortable quand le terme de la grossesse était proche et cela pourrait déclencher un accouchement prématuré. Mais Erwelyn n’avait rien voulu entendre !

Ygerne ! J'ai quelque chose à mettre au point avec toi pour … euh... cette nouvelle robe que je souhaite m'offrir !
Tiens, tu peux même monter Poneybouboule si tu veux, avec mon gros bide, on tiendra pas à deux sur Tralala.


La chambrière prit le temps d’allonger Karyl qui s’était endormi dans ses bras. Puis elle attrapa les rênes de Poneybouboule avec sa main gauche. Elle avait gardé comme séquelle de sa rencontre avec les armées, en outre des cicatrices, une main droite handicapée, la rouquine ne ressentait plus rien au bout de ses doigts ce qui l’empêchait de tenir fermement quelques choses et même d’écrire… elle devra apprendre à vivre avec.
Une fois à califourchon sur sa monture. Elle laissa le poney trotter à la même hauteur que Tralala.
Ainsi les deux femmes pourraient discuter à l’abri des oreilles indiscrètes.


- Vous avez vu comme les villageois nous ont regardés ? ils étaient choqué qu’on vous laisse monter dans votre état… vous devriez faire attention.

_________________
You have to kiss many Frogs to find a Prince
Erwelyn
Son état ? Lynette cligna des yeux quelques instants, ne comprenant pas trop où sa chambrière voulait en venir. Et puis ça lui fit tilt d'un coup, elle parlait de son gros bide et du duchinou qui était censé grandir en elle.
Sur les nerfs, elle râla un bon coup, baissant la voix pour que personne ne les entende.


Rhaaa, mais mon état ! J'en peux plus de mon état, il me fatigue tu comprends ?
Bouffer comme quatre, devoir aller pisser toutes les cinq minutes, j'en ai maaaaaaaaaarre !


La mainoise souffla pour reprendre son calme. La pauvre rouquine n'y était pour rien, elle, si son employeuse s'était mis dans des draps pareils.

Bref, faut y remédier, et vite. Parce qu'en plus ça doit faire dans les onze mois que chuis enceinte. Si on se pointe en Maine comme ça, ma suzeraine de moi va forcément se douter de quelque chose.

Un regard pour les poneys roses, et ce dernier revient vers sa chambrière.

Bon, les poneys c'est pas pareil hein ? Mahaut croit encore à cette histoire de cigogne et de vase à laquelle j'ai pas encore tout compris et Orka doit même pas savoir combien de temps un bébé reste dans le ventre…

Sur le ton de la confidence, elle continua.

Rappelles-toi notre discussion quand nous sommes arrivées en Périgord. Un bébé…

Gloups, déglutition de la Lynette. Finalement tout ça était quand même relativement gore, et elle n'était pas sûre de supporter la vue d'une telle chose.

Enfin, tu sais quel est notre plan.
L'Anjou est la meilleure des terres pour réaliser une chose pareille. Arrivées là-bas, nous partirons en quête d'une sage femme et pourrons mettre notre…


Deuxième déglutition. Argh, ce mensonge allait finir par la rendre dingue. Encore plus que ce qu'elle était déjà, et c'est pas peu dire.

On va pouvoir faire… ce truc là.

La conversation continua encore quelques instants, la châtain-mais-non-chuis-pas-blonde et la rouquine mettant au point les derniers détails.
De temps en temps, les deux têtes se levaient à l'unisson et les regards balayaient la compagnie pour voir si aucune oreille ne trainait. S'agirait pas que tout tombe à l'eau après ces longs mois d'attente…


[Anjou, Anjou, deux minutes d'arrêt]

Voilà, elles y étaient. L'Anjou.
Le cœur de Lynette battait la chamade depuis leur arrivée. L'instant semblait si proche, et en même temps si lointain.

Le soir de leur arrivée dans la capitale, à la nuit tombée, une ombre avec un ventre bien rebondi se faufila dans les ruelles angevines, accompagnée d'une autre, plus petite et plus menue. Capuches sur le visage, les deux silhouettes se dirigèrent vers les rues encore plus sombres et crasses que cachaient la ville. La journée, la mainoise s'était renseignée sur d'éventuelles femmes habituées aux accouchements, qui ne seraient pas trop regardantes à une situation bien étrange. Sa bourse commençait à se vider de plus en plus à force d'essayer de se dépatouiller de cette situation. Mais tant pis, il fallait bien utiliser les armes les plus utiles.

Lynette et Ygerne s'arrêtèrent devant une porte, celle là même qu'on lui avait montré l'après-midi même.


Viens Ygerne, c'est ici.

Trois coups brefs furent donnés sur l'huis, qu'elle eut l'impression de ressentir au plus profond d'elle même. Ça y est, elles y étaient…
_________________

*Une Corleone peut en cacher plein d'autres*
--Lancelle


[Trépas, l’histoire de toute une vie.]


« Il est temps de dormir. »

Les bras d’une femme aux longues boucles brunes étaient prostrés sous l’encolure d’un prématuré. Elle se leva alors difficilement de la couche et vint admirer à la fenêtre les étoiles envoyées par Aristote lui-même. Posant la tête faible de l’enfant contre son épaule, la bouche de cette femme vint effleurer délicatement les oreilles miniatures de ce dernier. Alors que le silence se faisait de plomb une voix douce et reposée résonna dans toute la demeure. C’est ainsi.

« Il a rejoint le Très-Haut madame, c’est ce que vous vouliez non? »

La femme qui venait de perdre -ou tuer?- son enfant était d’un âge plutôt avancé. Les rides commençaient à couler le long de ses joues. Elle avait donné naissance à quatre enfants tout au long de sa vie. Dans un moment de folie, alors qu’elle était tout simplement fatiguée par cette même vie, elle alla trouver cette femme sous les bons conseils du prêtre. Il fallait posséder une bourse d’une belle ampleur pour pouvoir pénétrer les lieux et le travail était fait avec passion. Lancelle aimait accompagner ces femmes vers un nouveau départ, bien disposée à se faire du blé sur le dos des gens. En échange, elle ne posait aucune question.

« Voulez vous que j’appelle le curé? »

Ce dernier était dans la combine depuis bien longtemps. Ils avaient un arrangement tous les deux, et se partageaient les bénéfices. De plus, il était plus simple pour lui de se procurer les ustensiles adéquats et personne ne questionne un cureton. L’Anjou y était pour beaucoup aussi, duché premier dans l’art de l’entourloupe.

Ainsi, dès qu’une femme venait à confesse à cause d’une progéniture gênante, il les envoyait directement chez Lancelle, une sage femme peu ordinaire. Elle avait trouvé le bon filon, lui aussi. L’option de la dernière chance, celle qui ne vous fait plus réfléchir à deux fois. Et pour cette nurse, chaque jour était comme un autre, chaque femme était comme une autre.

Ce soir là, trois coups brefs furent donnés sur l'huis. Elle ne courait jamais après le bénéfice, c’est lui qui venait à sa rencontre. La porte s’entrouvrit alors et deux femmes attendaient dehors. L'une d'elle avait le ventre bien gonflé, à terme.


« En quoi puis-je vous aider mes mignonnes? »

__________________
L0velune
Deux semaines avant l'arrivée de Lynette en Anjou

Voilà trois semaines que Vaxilart n'avait pas mit les pieds à Saint-Fargeau. Ça lui faisait deux semaines de retard, ça... Et c'était drôlement inquiétant! En effet, le Duc avait dit revenir dans un maximum de 8 jours. Bien sûr, il n'avait pas précisé sa destination, ni les raisons de son départ - as usual -, mais il n'était pas dans ses habitudes d'être autant en retard, sans donner de nouvelles.

Une lettre, une simple lettre pour rassurer la Mirandole qui se faisait du sang d'encre au domaine familial aurait suffit. Et bien, non! La rouquine faisait les cent pas dans l'immense maison, ne trouvant même plus la patience de s'occuper de sa fille comme elle le devait. L'hypocrisie, le faire semblant, n'étaient pas son fort à la Marylune. Elle avait menti une seule fois dans sa vie à son cousin et ça l'avait placée dans de beaux draps. Le fiancé, le faux père de sa fille, avait disparu en décembre... L'idée que son cousin ait pu disparaitre à son tour l'effrayait. Quelqu'un s'amusait-il à enlever les personnes qui lui étaient chères? Oui, Vaxilart, malgré... comment dire... malgré TOUT, elle l'aimait comme un frère.

Il lui fallait comprendre. Un matin, Marylune se réveilla sur les nerfs. Elle quitta ses appartements en robe de nuit, même si cela n'était pas approprié, laissant sa petite aux bons soins d'Anette, l'éternelle nounou. Elle marcha d'un pas décidé jusqu'à la porte close des appartements du Duc et l'ouvrit... enfin, ouvrir était un bien grand mot quand ce qu'on essaie d'ouvrir est fermé à clé. L'angoisse rageuse lui fit perdre la tête et elle cogna de toutes ses forces sur la stupide porte en criant des jurons en anglais, sa langue maternelle.


You, bastard, open or I'll crush the miserable wood that's blocking my way!

Les domestiques accoururent de tous les corridors pour calmer la baronne en furie avant qu'elle ne se transforme en horrible monstre à trois têtes aux six yeux carnassiers. Ils n'osèrent pas toucher leur maitresse, ce qui aurait été une offense, mais l'envie de la saisir de force et de l'attacher dans sa chambre, bâillonnée, jusqu'à ce qu'elle se calme ne leur manquait pas.

N'écoutant pas leur judicieux conseils, c'est à coups de pieds qu'elle défonça finalement la porte et viola ainsi l'intimité du Duc - dans son intérêt, toutefois! Elle s'empressa de fouiller le bureau du Duc sous les yeux inquiets des domestiques, sans rien y trouver concernant son départ. Elle vira les documents à l'envers, toujours rien. Vaxilart était peut-être parti avec chacun des indices concernant son départ. ARF!

C'est alors, qu'alerté par ses confrères, le serviteur personnel de Vaxilart entra dans la pièce dont le plancher était recouvert de paperasse. Un air découragé sur le visage, il dit d'une voix douce:


Madame, Votre cousin le Duc a sûrement prolongé son absence pour des raisons importantes et explicables.

Alors expliquez-moi pourquoi il ne m'en a pas averti par courrier!

Et bien... sans doute ne voulait-il pas que vous sachiez où il se trouvait.


Épargnez-moi vos cachoteries! Crachez le morceau!

Vous savez que votre cousin m'arracherait la langue si...

Je vais vous l'arracher, moi, si vous ne savez pas l'utiliser!


Marylune décrocha rapidement une dague de Vaxilart qui décorait le mur, souvenir de ses services dans l'armée, et menaça le serviteur avec. Celui-ci ne sut quoi dire sous l'effet de la surprise et la nervosité.

Vous savez que je suis capable des mêmes cruauté que mon cousin et que je sais aussi très bien m'en servir.

En effet, la rouquine avait elle aussi servi dans l'armée. Le serviteur déballa tout son sac après avoir fait disparaitre les simples domestiques. Sa révélation devait rester le plus secrète possible.

Je ne sais pas où il est madame, mais je l'ai entendu parler d'une femme.


Une femme? Encore? Dans quel bordel s'était-il encore fourré?


Quelle femme?


Une amie à vous...

Marylune fronça les sourcils d'étonnement. Il était donc dans le Maine? Le serviteur continua sur sa lancée.

Je ne me rappelle plus de son nom, mais elle avait été séquestrée en même temps que vous et le diacre de Mayenne.


Lynette!

Que lui voulait-il, non de Dieu? Sa haine envers elle l'aveuglait-elle tellement qu'il souhaitait sa mort? Ou alors il s'inquiétait du chantage qu'elle pouvait lui faire. Voilà qui expliquerait le secret autour de cette histoire... Et comme Lynette voyageait beaucoup, il ne l'aurait pas trouvé du premier coup à Mayenne et cela expliquerait le prolongement de son absence. Elle ne pouvait pas laisser faire une chose pareille.

Elle devait retrouver Lynette avant lui.

_________________
Erwelyn
La porte s'ouvrit enfin. D'un geste lent, la main de la mainoise alla prendre celle de sa chambrière. Tout ça n'était quand même pas commun. Ce n'était pas une sage femme à proprement parler que Lynette cherchait, mais quelqu'un qui saurait faire diversion et saurait surtout tenir sa langue.
Ses prunelles détaillèrent tous les traits de la femme qui se tenait maintenant devant elle. Erwelyn ne voulait pas se tromper, surtout pas.
Pour finir, son regard alla plonger dans le sien. On n'a jamais deux fois l'occasion de faire une bonne première impression. Et la mainoise décida que oui, c'était cette femme qui lui fallait pour accomplir ses surprenants desseins.

Je...

Oulà, sa voix avait des ratés. Essayant de paraître un peu plus sûre d'elle, elle se reprit.


Bonsoir brave dame. Je cherche une sage femme.


Ah ah, comme si elle avait pas deviné tiens ! Pourquoi que tu te tiendrais devant sa porte à une heure si tardive sinon hein ?

Une sage femme qui... qui ferait accoucher des bébés.

Fort bien, mais encore...
Regardant autour d'elle, avec la peur au ventre d'être surprise par une ponette qui aurait pu les suivre en pensant qu'elles étaient parties leur chercher un éventuel cadeau – rose, bien entendu – elle s'approcha un peu plus de l'embrasure de la porte.


Vous permettez que je rentre ? Cette conversation se tiendra beaucoup mieux à l'intérieur, à l'abri des oreilles indiscrètes.

Pis au moins elle aurait le temps de se reprendre pour débiter moins de bêtises à la minute.
Une fois à l'intérieur, elle parcourut avec attention la pièce des yeux. Personne ne devait être témoin de leur conversation.
A peu près sûre qu'elles soient seules, son cœur se remit à battre à une allure un peu plus normale.


C'est pas une demande courante, je vous préviens.
Je dois accoucher... cette nuit.


Et ouais, Lynette était de celles qui savaient quand elle devait accoucher ma p'tite dame. Et même que ce serait un garçon.
Avançant doucement à travers la pièce, elle passa un doigt ganté sur le dos d'une chaise, puis sur l'arrête d'un meuble, avant de se tourner à nouveau vers la femme. Du coin de l'œil, elle s'assura que sa chambrière était bien encore présente.


Ce sera un garçon, oui, un garçon.
Il va être beau, sans aucun doute. D'une belle lignée, fils d'un duc et d'une noble dame.
Les yeux de son père, le sourire de sa mère. Le caractère de chien de l'un, l'altruisme de l'autre.
Un bel avenir l'attend. Il sera chevalier, et duc à son tour. Bravant l'ennemi, le boutant hors de son territoire en temps de guerre. Faisant se pâmer toutes les femmes de la Cour, pour finalement épouser le meilleur parti du royaume.


Enfin ça, c'était dans un monde normal.
Sauf que celui de la mainoise était loin d'être normal. Un long silence suivit ce discours, avant de clôturer le conte de fée d'une fin assez inattendue.


Malheureusement, l'enfant va mourir à la naissance...

Son regard se fixa dans celui de la sage femme, attendant la réponse qu'elle souhaitait.

Cela vous pose-t-il soucis ?

Au pire, elle repartirait comme elle était venue. La femme n'avait eu son nom ni d'Eve ni des dents, et les poneys roses reprenaient la route dès le lendemain.
Si l'affaire se concluait, Erwelyn pourrait aller plus loin dans ses explications, à savoir qu'en vérité, il n'y avait jamais eu d'enfant.

_________________

*Une Corleone peut en cacher plein d'autres*
L0velune
Une semaine avant l'arrivée de Lynette en Anjou:

Lynette... oh Lynette... Si tu savais le malheur qui t'attend! Ce vilain cousin qui souhaitait ta mort. Pourquoi avait-il fallu que tu sois témoin de la cruauté de ma famille?!?

Marylune galopait à toute vitesse, s'arrêtant très peu pour se nourrir et dormir et davantage pour poser des questions.


Avez-vous vu une bande de femmes rigolotes?
Avez-vous remarqué des poneys roses dans les environs ces derniers temps?
Auriez-vous vu le Duc Vaxilart de la Mirandole?
Auriez-vous aperçu un vilain homme riche avec un air de boeuf?


Elle s'arrêta même dans les bordels, se fracassant le nez à un refus de divulguer les noms des clients. Même l'argent ne soudoya pas ses femmes, car en vérité, elle n'avait aucune réponse à fournir en échange.

Puis, en Périgord, elle trouva enfin la trace d'Erwelyn. Un vieil homme qui semblait avide de potins et spécialiste dans l'art d'espionner tous les voyageurs (et sûrement ses voisins), lui apporta l'information qu'il lui manquait.


Avez-vous vu... qui que ce soit?

Il faut dire que les questions de la baronne avait perdu un peu de description...

Bien sûr, mamzelle! Je vois des gens tous les jours!

Un voyageur, un homme ou une femme?

Vous cherchez quelqu'un?

Oui...

Et ne savez pas si c'est un homme ou une femme?

Je cherche les deux... mais je doute qu'ils soient ensemble. Du moins, je l'espère.

Vous êtes un agent?

Pourquoi perdre son temps à lui expliquer le pourquoi du comment... la semaine avait été longue.

Oui. C'est une question de vie ou de mort et ma tâche est confidentielle.

Ohhhhhh!!!

Les yeux du vieil homme s'écarquillèrent et il s'approcha, comme heureux (enfin!) de venir en aide à la rouquine. Il se transforma en une sorte d'espion à son tour et lui murmura tout ce qu'il savait.

J'ai pu observer de nombreux voyageurs ces temps-ci. Il y a eu un homme, faisant croire qu'il était chasseur, mais l'ayant vu à l'action, je puis vous assurer que c'était un mensonge. Très suspect, n'est-ce pas? Est-ce l'homme que vous cherchez?

J'en doute...

Vaxilart ne se serait pas fait passer pour un chasseur... point à la ligne.

Il y a eu un groupe de mainois la semaine dernière. Ils ont dit former une escorte, une agence d'escorte de... heum...

Marylune haussa un sourcil. Des nouvelles du Maine? Voilà qui pouvait être une excellente piste! Lynette était mainoise...

En fait, il y avait une femme dans leur groupe et un homme à leur tête, dénommé Tak...

La jeune femme soupira.

Une agence d'escorte de Montmirail, oui. Et la femme devait être Lys de Monty Saint-Pierre.

Oui! Oui! Oui! C'est eux que vous cherchiez???

Non.

Parce que je les ai trouvé louches, vous savez? Ils se disaient nobles et formaient une agence d'escorte. Vous savez, à mon âge et avec mon expérience, on ne le laisse pas embobiner facilement. Les nobles, ils ne voyagent pas de cette façon!

La baronne pensa à sa propre tenue, au fait qu'elle voyageait présentement à cheval et non dans un carrosse et à son mode de vie du moment.

J'ai aussi croisé, il a y quelques temps, un drôle de groupe. Une femme enceinte et, croyez-moi, à terme, sur le dos d'un cheval! Il y avait une rousse avec eux et d'autres personnes. J'ai pensé qu'il s'agissait d'enfants, parce que je les entendais se chamailler. Ils sont toutefois passé très rapidement.

Une femme enceinte à cheval? Et puis quoi encore... Marylune soupira et sortit quelques pièces de sa bourse.

Voilà malgré tout pour vos bons services, messire. Je suis désolée de vous avoir dérangé. Les personnes que je cherche ne doivent pas être passées par ici.


L'homme était visiblement malheureux. C'est qu'il croyait rendre service à la couronne en aidant une agente. De quoi se vanter par la suite!

Je sais que mes histoires sont étranges et farfelus, mais c'est la pure vérité. Le faux chasseur, il se nommait Thibert. Et vous avez bien vu que l'agence d'escorte était réelle, vous les connaissiez vous-mêmes! Et puis, je sais que c'est ridicule de mettre une femme enceinte à cheval, mais je vous jure que c'est ce que j'ai vu! Et je sais différencier une femme enceinte et une femme tout simplement grosse. Même que je les ai entendu parler. Je me rappelle des noms de Ygerne, Karyl, Lynette...


Pardon?

Le coeur de la rouquine s'était arrêté. Avait-elle bien compris ou son imagination lui jouait-elle des tours à force d'espérer? Elle allait remonter sur sa monture quand elle s'était retourné d'un coup sec à en faire sursauter le vieil homme.

Je vous le jure, mamzelle! Et c'était à la femme enceinte qu'on s'adressait avec le nom de Lynette. Paraitrait-il qu'elle était noble d'ailleurs. Ils sont franchement bizarre les nobles du Maine!

Trop d'informations rentraient dans le cerveau de la jeune femme à la fois. Noble du Maine, Lynette, enceinte... C'est une farce?

Marylune sortit de nouvelles pièces de sa bourse.

Par où est-elle allée?


Hum... je les ai vu aller en direction du Poitou.

La baronne lui donna rapidement les pièces, noya l'homme sous les remerciements et galopa à toute allure vers le Poitou. Il y avait donc un peu d'espoir pour que son amie soit toujours en vie.

Elle repensa aux informations... Lynette? Enceinte? Impossible... Mais s'il y avait eu au monde une seule femme enceinte pouvant monter à cheval alors qu'elle était à terme, c'était bien Erwelyn. Malgré le temps, elle ne cessait de la surprendre.

Lynette? Enceinte...? Mais comment? Non pas comment, elle ne voulait pas le savoir. En fait, elle savait déjà comment... mais tout de même! Comment était-ce possible? L'éternelle célibataire? Un égard de conduite? La noblesse a du lui être un choc terrible pour en arriver à ce point!

Lynette? Enceinte? Mais de qui? Qui avait osé? Sûrement un bâtard d'ivrogne, sans aucun principe et sans aucun respect pour les autres. Il allait le payer! Oh que oui!

Lynette avait au moins une bonne amie pour la protéger. Elle allait l'empêcher de se faire tuer par Vaxilart, puis, ensuite, elle irait tuer elle-même le raclure qui l'avait enfanté!

Lynette? Enceinte? Bon sang, Marylune n'y croyait pas...

ET COMMENT SE FAIT-IL QU'ELLE N'AIT PAS ÉTÉ MISE AU COURANT???

_________________
Ygerne
La gamine avait une certaine habitude des quartiers chauds d’Anjou. Elle avait eu la chance, par le passé, de devoir rester plus d’un mois dans ce duchétruc merveilleux… Et d’y avoir glané quelques « souvenirs » mémorables.
Traumatisée par les chasses aux roux organisées régulièrement dans ce lieu de non droit, elle s’était juré de ne jamais plus y remettre un orteil.
Pourtant le destin est parfois farceur et s’amuse à nous faire revivre ce que l’on cherche à oublier depuis bien des mois, avec plus ou moins de succès.
Malédiction ? Non lubie de Nobliotes.

Toujours est-il que passer en Anjou, quand on a le bonheur de posséder une crinière d’un rouge flamboyant, c’est un peu comme se balader à Rome avec un écriteau en dessus de sa tronche qui dit : « Le lion c’est moi » en faisant des grimaces aux vieux singes de l’inquisition. La petite plaisanterie pouvait se terminer rapidement par un aller simple sur le bûcher. Autant dire que la Ygerne avait qu’une envie : si tirer de ce trou rapidement.

Et c’est principalement pour cette raison que la rouquine dénicha rapidement un remède à leur soucis : une « accoucheuse » dont on pouvait acheter la morale avec quelques sous. Il faut dire que cette profession là, était assez rependue dans le royaume.

Pourtant le cas de sa cheffe était pour le moins surprenant. Il n’était pas rare que certaines femmes se prétendent enceintes pour pousser un indécis à régulariser une relation qui, si elle durait trop, pouvait être considérée comme indécente.
Il était par contre plus rare que le futur époux soit complice de ce mensonge ! Et si c’était le cas, au moins avaient-ils la décence de confirmer les paroles par des actes et se m’étaient-ils au travail pour que le mensonge devienne réalité.
Dans cette histoire là, le promis avait pris la fuite avant d’avoir honoré sa promise. Ygerne en était maintenant persuadée, Vaxichou devait préférer l’autre sexe et cachait cette tare sous de faux airs. Quelle autre excuse pourrait justifier de tels comportements ?

Toujours est-il que Lynette, sa cheffe, était dans une bien mauvaise posture et Ygerne était bien décidée à ce que l’honneur de son employeuse ne soit pas terni par la lubie d’un mâle en mal de virilité.

Elle se faisait donc un devoir de soutenir Lynette dans cette épreuve difficile. Un jour Ygerne demanderait au Duc réparation pour les dommages moraux causés mais la maintenant il fallait agir.

C’est donc au côté d’Erwelyn qu’elle pénétra dans la petite maison. La gamine veillerait à ce que « l’opération » se déroule dans les meilleures conditions
Pendant que sa cheffe faisait connaissance avec la sage femme, la rouquine fit un tour dans la demeure.
Elle observa différent ustensile qui semblait bien étrange et se demandait si, pour arrondir ses fins de mois, Lancelle n’aidait pas la justice local à torturer les détenus.


C’est quoi ce machin allongé qui ressemble à un tube ?

Et oui jeune fille… tu découvres la vie, la vraie.

_________________
You have to kiss many Frogs to find a Prince
--Lancelle



Pas bien proprette sur elle, Lancelle accueillit les deux femmes une par une dans sa modeste et sombre tanière. Cette étrange infirmière n’avait jamais pensé à installer une couche au calme pour ainsi pouvoir se reposer pendant les nuits difficiles, attendant de nouvelles clientes alors que les femmes pleuraient la mort de leur enfant, en silence. Un mutisme qui vous pénètre les entrailles sans vous demander quelconque avis. A force, ce sentiment devenait insupportable mais l’infirmière résistait autant que faire se pouvait. Et bizarrement, son corps préférait toujours s’effondrer sur un bureau composé de tréteaux plutôt que de s’installer dans un lit confortable où les étoiles auraient pu servir de lampe de chevet. L’environnement était inquiétant et peu avenant. Les fenêtres étaient cloisonnées par de lourdes planches boisées irrégulières empêchant les passants d’imaginer ce qu’il pouvait bien se tramer à l’intérieure.

La sage femme faisait constamment de son mieux pour rester discrète. Le prêtre lui ramenait de quoi survivre lorsqu’elle était recluse dans cet antre mortel. Les voisins pensaient qu’une vieille carne vivait ici, du moins c’est ce que Lancelle espérait. Tout avait été calculé, la grand-tante creva en silence, timing parfait pour reprendre le contrôle de la demeure. Elle arrivait à combiner deux vies. Celle qui nous intéresse évoluait à l’abri des regards, se faisant passer pour une veille peau à deux doigts de la syncop’ tandis que l’autre se passait le plus naturellement du monde mais était d’un ennui à la limite de l’embarras. Une femme sans emmerdes que personne ne regarde, tout simplement. Par contre, lorsqu’elle enfilait son costume de nuit, femme bossue d’un certain âge, la nurse se trouvait sans nul doute dans son élément le plus total jusqu’à la porte de cette bâtisse, là où Lancelle pactise avec le diable.


« C’est moi qui pose les questions ici, et on ne touche qu’avec les yeux chez moi Rouquine. »

Il y a de cela dix ans maintenant, la nurse avait eu le cran de faire disparaitre son propre nouveau-né avec l’aide du curé, toujours dans toutes les combines celui là. Sa plus grande peur avait été que son fils ressemble trait pour trait à son agresseur. Elle croyait être hantée par le diable lui-même. Pas qu’elle se soit considéré victime dans cette histoire étant donné l’époque, mais imaginer à vingt ans un fils à la même sale gueule que son père, la sage femme ne put le supporter.

Après s’être cachée auprès du curé pendant des mois, Lancelle prit cette décision ultime afin de sortir les femmes de cette inconvenance indescriptible, en commençant par elle. Avec les années, elle y prit gout laissant naitre ce regard durcit qui admirait les deux jeunes femmes en perdition, ce soir là. Perdition, du moins, c’est ce qu’elle croyait car elle n’était pas au bout de ses surprises n’ayant jamais eu affaire à ce genre de cas de figure.


« Parlez donc »
La sage femme avait appris à peu s’exprimer et ainsi à écouter.
« Il ressemblera à qui vous voulez, c'est votre affaire. Une envie particulière sur la façon dont il doit mourir? »

Ce comportement n'était pas anodin, parler crument était une manière de déceler la moindre faiblesse chez la femme concernée. Lancelle sentait déjà avoir fait une erreur la nuit dernière avec celle dont elle s’était occupée avec hâte et qui n'arrêtait pas de pleurnicher depuis le coucher du soleil. Celles-ci sont lâches. Il est important de s’assurer que les femmes qui pénètrent ici ne parlent jamais. Voilà pourquoi elle voulu savoir de manière détournée ce que ces invitées cherchaient, mais rien de sembla transparaitre des les pupilles de son interlocutrice. Elle arrivait même à déceler de la hâte mêlée à de l’impatience. Son visage s’éclaira, elle avait trouvé cliente qu’elle apprécirait.

« Savez vous ce que celà va vous coûter? »

__________________
Erwelyn
Le regard d'Erwelyn courait à travers la pièce, se posant ça et là. Rien ne donnait envie de s'asseoir, de se détendre, aucune lumière ne pouvait filtrer de l'extérieur, les fenêtres déjà sombres barricadées derrière de grandes planches de bois. De quoi vous donner des frissons. Quelques gémissements se faisaient entendre, et la mainoise préféra ne pas trop chercher d'où pouvaient-ils bien venir. Tout ça était bien trop lugubre pour elle. Rien à voir avec les paillettes et les robes roses des poneys roses…
Elle si assurée quelques instants auparavant perdit de sa superbe en entendant encore une fois ce gémissement. Cette maisonnée sentait la mort. La faucheuse devait se tapir dans un coin, prête à frapper à tous les instants. Un frisson monta le long de son échine. Pourtant, elle essaya de ne rien laisser paraître et se força à nouveau à fixer leur hôte, qui venait de rabrouer sèchement sa chambrière, la laissant renfrognée dans un coin.

Si l'étrange sage-femme sentait ne serait-ce qu'un moment de faiblesse, sans doute la renverrait-elle dehors, et ça la mainoise ne l'envisageait pas. Le poids de ce fardeau était trop lourd à porter. Mais à aucun moment elle ne s'imaginait combien il le serait plus encore pas la suite.
Aussi, la dame de Sainct Antoyne de Rochefort se composa un visage neutre, dénué de sentiment, chose véritablement difficile pour elle. Il lui était aisé de sourire. Il lui était aisé de rire. Il lui était aisé de pleurer, seule dans sa chambrée à l'abri des regards amis. Mais rester stoïque devant la mort était on ne peut plus compliqué pour elle.

Je me moque de ce que cela va coûter. J'achèterai le prix de votre silence, et quelques heures de votre temps.

Sa mâchoire se serra. Décidément, sa bourse s'était vidée à vitesse grand v depuis qu'elle avait eu le malheur de recroiser Vaxilart en Périgord. Foutu Mirandole.
Mais elle se foutait de l'argent, en réalité. Si son cœur se serrait, ce n'était certainement pas pour sa bourse. La mainoise se dégoutait. Elle avait en horreur ce mensonge qui s'était installé entre elle et ses amies, sa deuxième famille. Espérant vraiment que cet accouchement simulé la libérerait de ce poids, elle avait déposé tous ses espoirs en celui-ci.

Et je me fous de la façon dont cet enfant va mourir.

Non. Non en réalité elle ne s'en foutait pas. Mais alors pas du tout. C'était complètement gerbant d'imaginer qu'elle allait avoir dans sa chambre d'auberge un petit être qui avait grandi dans le ventre d'une autre femme, d'une mère qui avait dû l'aimer dès qu'elle avait senti son premier mouvement. Comment un tel plan avait bien pu germer dans son esprit ? Était-ce réellement plus facile que de dire toute la vérité, rien que la vérité, oui je le jure ?
Ces questions, elle se les était posées cent fois, mille fois avant de se décider. Et au final, elle avait tranché : voir un bébé mort et le tenir dans ses bras serait moins douloureux que d'avoir posé sur elle le regard de ses amies trahies depuis des mois.

Il lui fallait se lancer. Les prunelles froides toujours fixées à celles de Lancelle, Lynette mit enfin les pieds dans le plat.


Il nous faut un bébé mort. Et pas le mien, en l'occurrence, je ne suis pas enceinte.

Et la mainoise d'écarter sa cape et d'enfoncer un doigt ganté dans le ventre mou. Dieu, comment se subterfuge avait tenu aussi longtemps ? De la part des ponettes, ce n'était guère étonnant en soit. Toutefois, arrivée en Maine dans peu de temps, ce faux ventre risquait de ne pas passer inaperçu devant sa suzeraine ayant eu plusieurs enfants, par exemple…
Enfin, le plan concocté depuis des semaines dans sa caboche fut dévoilé en entier, d'une traite, sans s'arrêter au milieu de peur de s'enfuir à toute jambe sans se retourner.


J'attends de vous que vous veniez avec un nourrisson ayant rendu l'âme en l'auberge du centre, celle placée à côté de l'église. Personne ne doit le voir, personne.
Si deux jeunes femmes vêtues de rose vous demandent ce que vous transportez, ne leur dites rien. Si elles tapent du pied, crient au scandale, menacent de vous faire enfermer par leur père, ne leur prêtez pas attention.
Elles n'auront pas droit d'entrer dans ma chambrée, seule ma chambrière pourra m'y accompagner. Vous n'aurez rien à faire, à part rester avec moi quelques heures, me crier des encouragements, puis vous pourrez partir après avoir annoncé que le bébé est mort né.


Silence, enfin. La mainoise ferma les yeux quelques instants.
Ça y était, elle avait révélé l'idée la plus folle qu'elle avait eu depuis bien des années à cette inconnue. Suivrait-elle ? L'enverrait-elle balader hors de sa maison ?
Son regard cloué au sien et la respiration suspendue, Lynette attendait que Lancelle se prononce enfin.

_________________

*Une Corleone peut en cacher plein d'autres*
See the RP information
Copyright © JDWorks, Corbeaunoir & Elissa Ka | Update notes | Support us | 2008 - 2024
Special thanks to our amazing translators : Dunpeal (EN, PT), Eriti (IT), Azureus (FI)