Maelie
La jeune femme s'étira comme un chat, baillant à son aise avant de se redresser à demi, les yeux encore ensomeillés. Elle frotta d'une main ses paupières avant d'ouvrir ses yeux verts pétillants sur l'horizon azuré, inspirant à pleins poumons l'air iodé du port. Aaaaah...!
Ses hardes - autrefois une belle jupe et un corsage de belle facture dont elle ignorait la provenance - étaient imprégnés d'un mélange d'odeurs marines et poissonnières, mélange fort peu ragoutant au demeurant, mais dont son nez n'avait cure : on s'habitue à tout, que voulez-vous ! Elle se gratta négligemment la nuque en se levant, ses pieds nus jouant dans la gadoue pour trouver un peu de stabilité sur sa jambe boiteuse. Elle se tâta les flancs, comme à la recherche de quelque chose.
Ah! Te voilà, toi!
Elle tira joyeusement de ses poches un amas de tissus, qu'elle dénoua prestement : en son coeur, des filets de poisson fumé qui empesta l'air aussitôt, et un morceau de pain rassi. Son ventre grogna d'envie à ce festin, et elle l'entama sans plus de cérémonies. Elle prit soin, cependant, d'en conserver la moitié et de la remballer pour le souper : elle avait eu de la chance de pouvoir chiper ces morceaux-là, il n'était pas dit qu'elle aurait à nouveau à manger avant des jours.
En renfournant son paquetage dans ses poches, ses doigts glissèrent sur un parchemin. Avec douceur et mille précautions, elle le sortit et l'observa. La missive était usée d'avoir été manipulées milles fois par ses mains sâles, et par tout ce temps passé à côtoyer les divers festins improvisés qu'elle trimbalait. Pourtant, elle ne pouvait se résoudre à la jeter.
Avec une lenteur respectueuse, elle l'ouvrit à nouveau, ses yeux verts soudain emplis d'une lointaine nostalgie.
"Maëlie, douce amie..."murmura-t-elle, en lisant les premiers mots.
Qui que soit cette Maëlie, elle était aimée et attendue. La jeune femme se sentait envieuse, elle qui n'avait ni famille, ni foyer, ni passé, ni même un nom. Lorsqu'on l'appelait, on lui donnait du "la gueuse" ou encore "ma belle", dans ses meilleurs jours.
La missive était signée "Adrien". Tudieu, c'est qu'il y en avait un paquet d'Adrien, sur cette terre ! Il y avait un cachet de cire sur la missive, mais il était désormais indéchiffrable, et elle n'avait franchement aucune idée de ce qu'aurait bien pu signifier ce hibou. Quant à savoir comment elle était venu jusque dans ses poches, c'était un mystère totalement insondable pour la pauvre femme.
Avec un soupire rêveur, elle replia la missive et la rangea à nouveau avec délicatesse : l'amour, et tout ça, c'était pour ceux qui en avaient le temps. Pour elle, il était temps de filer, avant que la milice ne finisse par l'attraper !
Rhaaa, ceux-là ! Voilà seulement deux jours qu'elle était en ville, mais elle avait vite appris à courir plus vite qu'eux ! Ils étaient tenaces, les bougres. Il y en avait même un qui lui avait fait une farce de très mauvais goût, juste pour l'attraper.
"Mais... ne seriez-vous pas... l'ancienne Dame de Lauzières ?"avait bafouillé le milicien, en la fixant de ses yeux lubriques de merlan frit.
"Hey ! Regarde, mon vieux ! N'est-ce pas elle ?
- Ca y ressemble pas trop, tu sais. Elle était plutôt du genre bien habillée et rondement emballée, si tu vois ce que je veux dire."Le second avait éclaté d'un rire gras profondément désagréable.
"P'tèt qu'y y est arrivé des misères ? P'tèt qu'elle a faim ?"
Pour sûr qu'elle avait faim, mais ça ne l'avait pas empêché de prendre ses jambes à son cou ! Non mais sans blague. Une dame, elle... Pfeuh ! A d'autres.
Il n'empêche qu'elle savait lire, qu'elle connaissait des mots qu'une paysanne comme elle n'aurait pas dû connaître. Il lui semblait parfois entendre les rires et les musiques d'un banquet, comme un souvenir moqueur ou un rêve fugace que l'odeur de la mer chassait aussitôt. Ce n'était que depuis qu'elle était à Montpellier que son esprit se jouait d'elle, et elle avait peur. Une peur viscérale qui lui retournait le ventre à chaque fois qu'elle tentait de comprendre... comprendre quoi, au juste ?
Elle secoua sa longue chevelure d'ébène d'un mouvement vif, destiné à chasser ses mauvaises pensées. Allez, zou ! En route.
Elle avait du pain sur la planche... Elle s'enfonça dans les ruelles de Montpellier en chantonnant tranquillement, au rythme syncopé de son boitillement.
_________________
De l'art de recevoir...
Occitania per totjorn !
Ses hardes - autrefois une belle jupe et un corsage de belle facture dont elle ignorait la provenance - étaient imprégnés d'un mélange d'odeurs marines et poissonnières, mélange fort peu ragoutant au demeurant, mais dont son nez n'avait cure : on s'habitue à tout, que voulez-vous ! Elle se gratta négligemment la nuque en se levant, ses pieds nus jouant dans la gadoue pour trouver un peu de stabilité sur sa jambe boiteuse. Elle se tâta les flancs, comme à la recherche de quelque chose.
Ah! Te voilà, toi!
Elle tira joyeusement de ses poches un amas de tissus, qu'elle dénoua prestement : en son coeur, des filets de poisson fumé qui empesta l'air aussitôt, et un morceau de pain rassi. Son ventre grogna d'envie à ce festin, et elle l'entama sans plus de cérémonies. Elle prit soin, cependant, d'en conserver la moitié et de la remballer pour le souper : elle avait eu de la chance de pouvoir chiper ces morceaux-là, il n'était pas dit qu'elle aurait à nouveau à manger avant des jours.
En renfournant son paquetage dans ses poches, ses doigts glissèrent sur un parchemin. Avec douceur et mille précautions, elle le sortit et l'observa. La missive était usée d'avoir été manipulées milles fois par ses mains sâles, et par tout ce temps passé à côtoyer les divers festins improvisés qu'elle trimbalait. Pourtant, elle ne pouvait se résoudre à la jeter.
Avec une lenteur respectueuse, elle l'ouvrit à nouveau, ses yeux verts soudain emplis d'une lointaine nostalgie.
"Maëlie, douce amie..."murmura-t-elle, en lisant les premiers mots.
Qui que soit cette Maëlie, elle était aimée et attendue. La jeune femme se sentait envieuse, elle qui n'avait ni famille, ni foyer, ni passé, ni même un nom. Lorsqu'on l'appelait, on lui donnait du "la gueuse" ou encore "ma belle", dans ses meilleurs jours.
La missive était signée "Adrien". Tudieu, c'est qu'il y en avait un paquet d'Adrien, sur cette terre ! Il y avait un cachet de cire sur la missive, mais il était désormais indéchiffrable, et elle n'avait franchement aucune idée de ce qu'aurait bien pu signifier ce hibou. Quant à savoir comment elle était venu jusque dans ses poches, c'était un mystère totalement insondable pour la pauvre femme.
Avec un soupire rêveur, elle replia la missive et la rangea à nouveau avec délicatesse : l'amour, et tout ça, c'était pour ceux qui en avaient le temps. Pour elle, il était temps de filer, avant que la milice ne finisse par l'attraper !
Rhaaa, ceux-là ! Voilà seulement deux jours qu'elle était en ville, mais elle avait vite appris à courir plus vite qu'eux ! Ils étaient tenaces, les bougres. Il y en avait même un qui lui avait fait une farce de très mauvais goût, juste pour l'attraper.
"Mais... ne seriez-vous pas... l'ancienne Dame de Lauzières ?"avait bafouillé le milicien, en la fixant de ses yeux lubriques de merlan frit.
"Hey ! Regarde, mon vieux ! N'est-ce pas elle ?
- Ca y ressemble pas trop, tu sais. Elle était plutôt du genre bien habillée et rondement emballée, si tu vois ce que je veux dire."Le second avait éclaté d'un rire gras profondément désagréable.
"P'tèt qu'y y est arrivé des misères ? P'tèt qu'elle a faim ?"
Pour sûr qu'elle avait faim, mais ça ne l'avait pas empêché de prendre ses jambes à son cou ! Non mais sans blague. Une dame, elle... Pfeuh ! A d'autres.
Il n'empêche qu'elle savait lire, qu'elle connaissait des mots qu'une paysanne comme elle n'aurait pas dû connaître. Il lui semblait parfois entendre les rires et les musiques d'un banquet, comme un souvenir moqueur ou un rêve fugace que l'odeur de la mer chassait aussitôt. Ce n'était que depuis qu'elle était à Montpellier que son esprit se jouait d'elle, et elle avait peur. Une peur viscérale qui lui retournait le ventre à chaque fois qu'elle tentait de comprendre... comprendre quoi, au juste ?
Elle secoua sa longue chevelure d'ébène d'un mouvement vif, destiné à chasser ses mauvaises pensées. Allez, zou ! En route.
Elle avait du pain sur la planche... Elle s'enfonça dans les ruelles de Montpellier en chantonnant tranquillement, au rythme syncopé de son boitillement.
J'ai perdu beaucoup d'habitudes depuis le temps, mais est-il utile de préciser que ce RP est ouvert à tous ceux qui le voudront et qui se trouvent à Montpellier ?
_________________
De l'art de recevoir...
Occitania per totjorn !