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[RP] Dans le secret des Dames...

Asophie
Oane Vira - l'Alabrena.

Enfin, elle était revenue de ce voyage interminable et glacé qui l'avait menée jusqu'à des contrées bien trop lointaines pour être agréables, si ce n'est certains aspects de leur richesses culinaires... Ou viticoles. Ainsi, Sophie s'était-elle faite complice de certains péchés mignons de la Comtesse et durant son séjour en solitaire dans la capitale des Gaules, avait-elle réussi à dégotter chez un négociant en vins une bouteille d'un succulent chablis. L'ayant maquillée, protégée et calfeutrée dans son sac durant tout le voyage du retour afin qu'il échappe à la vigilance du féroce bourreau des vins de Bourgogne en Montauban, elle venait enfin en faire livraison, à la faveur d'une nuit qu'elle savait longue et souvent solitaire pour la Comtesse.

Néanmoins, le présent n'était pas anodin et la visite pas tout à fait désinterressée. Elle venait aussi ramener Soara, la haquenée qu'Agnès lui avait prêtée pour ses pérégrinations outre Rhône. Quoique, la concernant, elle n'était pas allée plus loin. Que le Rhône. La jeune femme espérait à peine secrètement que le destrier qu'elle avait fait livrer à Son Infâme Grandeur lui convenait... Et qu'elle pourrait ainsi garder la jument alezane qui s'était fait sa meilleure amie ou presque durant un mois, le remède contre ses peurs des équidés depuis l'enfance...

Dans le silence de la nuit montalbanaise, elle fit résonner la cloche d'entrée, sachant que la moitié de la maisonnée serait probablement encore debout pour satisfaire les demandes de leur auguste maîtresse.

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"Connais-toi toi -même et tu connaitras l'Univers et le Divin."
Gnia
Contrariée.
Le mot restait faible pour décrire l'état d'esprit de la Saint Just en cette soirée qui tirait inexorablement vers la nuit, l'angoissante, l'oppressante. Celle qui réveillait cette peur panique de s'endormir et d'être hantée. Les heures les plus sombres qui faisaient naître cette angoisse de s'endormir et ne plus jamais se réveiller.

Contrariée.
A tel point que les domestiques avaient rapidement pris le pli de raser les murs dans l'entourage de la Comtesse, que la visite quotidienne des enfants après le souper avait été prestement écourtée, que même la présence pourtant habituellement tolérée du jeune dogue de Bordeaux ne l'était plus. L'animal avait été écarté, relégué à la porte de la chambrée et avait fini par trouver à se consoler en se collant aux basques du Vieux Georges.

Contrariée.
Et le vin n'avait pas aidé. Même en excès. La mâchoire serrée, le palpitant au bord de l'implosion, la Saint Just avait tenté de lutter, le regard perdu dans les flammes de l'âtre. Puis soudain, mue par une impulsion, elle avait ouvert la boîte de Pandore. Le couvercle d'un délicat coffret déverrouillé, son double fond soigneusement soulevé et le regard austère avait un instant hésité. Et la main nerveuse avait délaissé le minuscule écrin de thériaque pour se saisir d'une flasque ouvragée.

Un profond soupir, une infime hésitation, les doigts caressent la croix et son ichtus d'argent lovés au fond du coffret, puis le couvercle est refermé. La boîte aux incrustations de nacre est maintenant lestée d'une bague que l'on aurait dû ôter depuis longtemps tant elle n'a plus guère de valeur et les doigts allégés se serrent autour du flacon précieux qu'ils y ont prélevé.

Retour lascif sur une banquette qui fait face à la cheminée, prélèvement carmin sur la carafe de vin, une gorgée puis le verre est reposé. Le cachet du petit bouchon de liège est brisé, la fiole débouchée et le nez se fronce, agressé par l'odeur nauséabonde qui s'impose sur celle du miel et d'autres plantes.
La bouche se tord en une grimace et la main verse quelques gouttes, probablement trop, dans le godet de vin encore plein.




Au prix d'un incommensurable effort, la tête lourde se soulève, les paupières s'ouvrent sur une vision d'effroi.
Milles serpents de feu sortant d'une bouche béante et noirâtre.
Mouvement de recul arrêté par le dossier de la moelleuse banquette.
La langue pâteuse cherche un peu d'humidité dans la bouche sèche, le tout au prix d'efforts démesurés.
Le coeur s'affole, les serpents se tortillent toujours devant elle, menaçants, sans pourtant l'atteindre.
Il faut s'en éloigner.

Lorsqu'elle essaie de poser ses pieds sur le lourd tapis au sol, elle découvre qu'elle... ne touche plus le sol.
Dans sa grande miséricorde, le Très Hauct lui a fait don pour cette énième épreuve de la capacité de... voler.
Et heureusement.

Car si les serpents semblent ne pas pouvoir se libérer, les murs grouillent d'horreurs fantasmagoriques.
Mi-bêtes, mi-hommes, assurément entièrement démons.
Un meuble arrête la fuite précipitée.
Le sol est dur, la main se crispe sur la fourrure.
Le visage se relève pour découvrir que les doigts n'enserrent que des milliers de larves aux crocs acérés.
Un cri. D'horreur évidemment.
Une issue. Vite.
La porte est devenue herse hérissée de pointes ensanglantées.
La chambre, une prison.

Une pensée, diffuse.
Dieu, est-ce cela l'Enfer ? La Montagne de la Désolation ?
Des cloches, si loin.
Là. Un abri.
Un rencognement à l'angle des murs.
Contre les pierres froides.
Près du lit.
Elle se recroqueville.

Ils sont là.
Les lourds rideaux du baldaquin se font linceuls.
Ils cherchent à l'étouffer.
A noyer ses cris.

La herse s'ouvre dans un bruit assourdissant.
Un hurlement.
Une prière.
Une supplique.


A moi ! Faites les partir ! J'vous en prie...
Aidez moi


Qui meurt dans un gémissement empli de sanglots.
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Asophie
Sophie suivit le vieux Georges dans les couloirs de l'Alabrena, peuplés d'ombres et de fantômes en guise de domestiques. Peu à peu l'atmosphère oppressante devenait irrespirable au point qu'elle avait l'impression que les murs se rapprochaient pour l'écraser. Chassant cet étrange sentiment d'une profonde respiration pour ne pas faire demi-tour sur le champ, elle finit par arriver devant la grande porte des appartements chaleureux et confortables de Son Infâme Grandeur... Le vieux semblait hésiter, comme s'il tendait l'oreille. Avec un froncement de sourcils, il pose la main sur la poignée... Un hurlement. Inhumain. Sauvage. D'un même mouvement, le vieux domestique et la vicomtesse se ruèrent à l'intérieur comme un seul homme...

A moi ! Faites les partir ! J'vous en prie...
Aidez moi


L'Infâme Grandeur n'était plus qu'une poupée de chiffons recroquevillée au visage déformé par une terreur indicible. Et le vieux Geaorges, un piquet planté au milieu de la pièce... A la porte, le gros molosse hurlait à la mort... Mais c'est quoi ce cauchemar!? Vite se reprendre... Respirer... Quelle odeur!... L'odeur. C'est ça qui la secoue : cette odeur acre et nauséabonde qui flotte quelque part dans l’air.

Des yeux, elle fait le tour de la pièce. Un verre. Du vin… Elle renifle, avise le petit flacon et le porte sous ses narines : Jusquiame. Et vu l’état de la Comtesse, en trop forte dose. Vite se rappeler, se rappeler… Le domestique est toujours tétanisé au milieu de la pièce, bégayant et bafouillant. Pas le temps de le secouer, celui-là !

D’un pas décidé, elle revient vers Agnès et lui soulève les paupières. Les yeux aux pupilles dilatés sont en train de se révulser.


« Agnès ! Agnès ! Revenez avec moi… ! C’est Sophie… »

Penchée sur la comtesse, Sophie la secoue, lui donne des petites tapes avec sans doute un peu trop de retenue. Alors, à la guerre comme à la guerre, même si elle n’en a jamais vu. Avec un bel élan, elle administre à la Saint-Just un aller-retour vigoureux, suffisant pour que les yeux reviennent en face de trous. Elle n’a même pas le temps de penser que certains, à sa place, y auraient pris un délicieux plaisir. Elle-même, il y a quelques temps encore.... Bref, donc, les gifles. Et ensuite, la panacée universelle et radicale pour ce genre de chose : deux doigts dans la bouche. Avec un minimum de dignité, tout de même : en glissant son bras sous le buste de Sa Grandeur et lui retenant les cheveux et la tête par la même occasion…

Et tandis que la Saint-Just régurgite la moitié de sa cave, l’esprit de Sophie carbure. D’une voix sèche, elle sort le pauvre vieux de sa prostration en quelques mots :


« Georges ! Secouez-vous… Il me faut de la moutarde, des graines de moutarde en grande quantité et des orties. Ouais, je sais, on est en janvier… Si vous n’en trouvez pas, foncez chez moi et réveillez ma gouvernante. Dites lui de me ramener ça ! Alleeeeeez !!! »
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"Connais-toi toi -même et tu connaitras l'Univers et le Divin."
Gnia
Présences humaines ? Ou sont-ce encore quelques élucubrations du Sans Nom ?
Un cerbère flamboyant hurle à la mort et me vrille les tympans.
Un vieillard à la face familière mais singulièrement grotesque semble voir la même chose que moi aux vues de ses yeux agrandis de terreur.

Et celle qui vient d'entrer... Mère ? Est-ce toi ?
Hmm, non.
Mère est juste une ombre, une silhouette au souvenir des traits du visage depuis longtemps délavé par les ans.
Mais Mère n'a certainement pas une tête de Gorgone...
Une sorcière !
Elle m'appelle et me demande de venir avec elle...
Un prince démon qui aurait pris une apparence femelle ?

Mais heuuuuuu !
V'là que la garce me frappe, qu'elle tente de m'étouffer en fourrant ses doigts griffus dans ma bouche.
Et si je les mordais ?
Trop occupée à tenter de me défaire de la poigne qui me retient, trop tard...
Pouah, ils ont le goût de bile et de vin !
Dégueulasse...

Mais au moins les murs ont cessé d'exsuder leurs créatures immondes, les rideaux sont revenus immobiles, le sol semble ne plus vouloir grouiller d'infâmes larves...
Pour l'instant.


Ils... Ils sont partis ?

Non !
Là ! Le cerbère de feu !
Il se précipite sur moi !
Trois gueules immenses, dégoulinant de bave visqueuse entre les crocs comme des poignards.
C'est donc ça...
La sorcière me retient pour qu'il puisse me dévorer.
Salope !

Lâche moi ! Démon !
Saloooooope !
Lâche moi, j'te dis !


Un coup de coude qui rate les côtes.
Une tentative de coup de tête arrière qui effleure un menton.
Quelques ruades avec l'énergie du désespoir.
Et me voilà libre !

Je vole.
A nouveau.
Et rencontre avec une dureté insoupçonnée un épais tapis de... larves ?
C'est est trop.
J'abandonne.
Ou plutôt c'est mon corps et mon esprit qui me quittent...

Oh !
Purée... Un papillon rose et bleu, énorme, au visage avenant et jovial, qui m'invite à le suivre...
Oui, toi oui, je te suis.


Si j'en étais consciente, je pourrais dire que j'offre un bien pitoyable tableau à ma meilleure ennemie. Là, recroquevillée sur le sol, à quelques pas de ma gerbe, à m'effrayer de visions qui n'existent que dans mon pauvre esprit malade et possédé par la jusquiame.
Heureusement, je n'ai pas conscience ni de mon état ni de sa présence.
Pour l'instant.

Le Très Hauct réserve toujours ses meilleurs morceaux lorsque l'on est à même d'en bénéficier pleinement.
Le réveil sera autrement plus douloureux.
Je lui fais confiance.
Surtout pour ça.

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Asophie
Un coup de coude qui rate les côtes mais pas le foie!
Un coup de boule dans les dents.
L'Infâme Grognasse se débat comme une furie avec une énergie hystérique, toutes griffes dehors, couinant, gémissant, beuglant des sons gutturaux et inarticulées hormis un petit nom d'oiseau charmant qu'elle identifie à la perfection et qu'elle-même reprend en écho lorsqu'elle se retrouve le cul par terre dans le vomi :


"Ah la S'lope, foutredieu!"

Tandis que sur le seuil, le clébard devient dingo et se mêle à la symphonie discordante par des couinements et des hurlements à vous faire dresser les poils, sa meilleure ennemie a eu le temps de faire trois pas avant de s'étaler de tout son long, griffant le pauvre tapis, chassant devant elle des démons imaginaires. Et la Sophie de franchir à quatre pattes les mètres qui la séparent d'Agnès avant que celle-ci n'aille chercher une aide secourable auprès de la cheminée. Alors même qu'elle s'apprête à lui enserrer la cheville pour l'empêcher d'avancer, la Saint -Just s'écroule, raide, immobile. Et là, c'est clairement la panique!
Se précipitant auprès de la comtesse qui a décidément perdu toute se Grandeur, elle l'attrape, la secoue, la baffe, avec pour la première fois des cris désespérés auxquels répondent les gémissements du molosse :


"Agnès! Agnès meeeerde! Me faites pas ça.... Agnèèèèèès ! P'tain Agnès, rev'nez, me faites pas ça...!


Et de la secouer encore, en appelant à Dieu, ignorant le contentieux qui règne de façon intime entre Sa Grandeur et le Très-Haut. Sans s'en rendre compte, elle se retrouve à la blottir contre son sein, la berçant comme une enfant, passant des doigts nerveux dans ses cheveux.

"Agnès... Il m'en voudra à mort si vous vous en sortez pas... S'il vous plait... Me faites pas ça....



Déboulent alors dans la chambre tout un troupeau de serviteurs dont au moins une qui a du comprendre le drame puisqu'on amène un baquet et de l'eau brûlante, et visiblement tous les stocks de graines de moutarde qu'on a pu trouver. Une goute-sauce propose même du poivre au milieu de tout ce foutoir. Un domestique essaye vainement d'embarquer le chien et renonce alors qu'il est à deux doigts d'y perdre sa main...
Retrouvant son calme, Sophie fait dégager tout ce beau monde et ne garde près d'elle qu'une servante qui a l'air un peu moins paniquée que les autres et entreprend de dévêtir la Saint Just, s'improvisant camériste tout en guidant la bonniche dans ses préparations.
Curiosité mal placée? Sophie détaille le corps débarrassé de sa simple robe sombre et de sa chemise. Sur la peau de nacre s'inscrivent diverses stigmates d'une existence meurtrie : la balafre qui lui vaut parfois son surnom désobligeant ou effrayant, court du menton jusque sous l'aisselle contournant avec pudeur un sein rond et lourd, tandis que son voisin y a visiblement échappé belle, une cicatrice en forme d'étoile sur l'omoplate retrouvant son écho sous le sein gauche. Et, sur la cuisse, une autre, vilaine, rongée, dont Sophie détourne les yeux avec une petite grimace. Avec un bel effort, elle soulève sa meilleure ennemie avec toute la délicatesse et le respect craintif que lui inspire la mort qui plane dans cette pièce, priant en silence que le Vieux George et sa Gouvernante auront trouvé sa purée d'ortie et plonge le corps inanimé dans le bain de moutarde...


"Allez Agnès... Rev'nez... Seigneur, j'vous en supplie... "

C'est qu'elle en chialerait...

Puis soudain... La porte qui s'ouvre... l'Espoir revient...
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"Connais-toi toi -même et tu connaitras l'Univers et le Divin."
Gnia
C'est chiant la mort.
Chiant à mourir.
Ha ha ha...

Le noir complet. Rien.
Un peu comme une salle d'attente où l'on attendrai pour l'éternité. Même pas de revues people pour passer le temps.
L'angoisse.

Evidement que le beau papillon géant n'avait été en somme qu'un mirage.
Elle aurait dû le savoir, elle qui finalement ne poursuivait que des chimères.

Et il 'avait planté là.
Toute seule.
Au milieu de nulle part.
Dans toute la splendeur de son sens littéral.
Impression de déjà vu.
Ha ha ha...

Bon... Et maintenant ?
P'tain, Dieu, tu chies là...
C'est nul ton affaire.
L'est où le Jardin des Délices hein ?
Et ta Montagne de la Désolation ?
C'était ça ?
C'est tout ce que tu peux faire ?
J'dis ça j'dis rien, mais...
L'angoisse.

Ouais ouais, la provocation à deux deniers, pas très honorable... Ultime recours de ceux qui se font chier...
Oh ?! Tiens... Ca bouge...
Ca crie aussi...
Et ça pue.


"Maman les p'tits bateaux
Qui vont sur l'eau
Ont-ils des jambes ?
..."


Les lèvres remuent.
Est-ce que le son sort ? Probablement.
Est ce que c'est intelligible ? Probablement pas.

Les yeux s'entre-ouvrent.
Oh... Quelle est jolie cette fille échevelée aux yeux embuées, penchée sur elle.
Son corsage s'en ouvre largement et laisse deviner la poitrine à la peau qui a tout l'air de sembler soyeuse.
Puis cette couleur de caramel clair...
Si proche...
Hmmmm...

La main sort lascivement, lentement, de l'eau.
Oh ? Les sels de bains n'ont pas fondus.
Les doigts sont couvert de petites excroissances rondes, sombres, comme des oeufs de poisson.
Ca pue.

Elle penche doucement la tête sur cette épaule si proche pour lover son visage au creux du cou.
Aaaahhh.. ici, ça sent meilleur.
Si on exclut cette fragrance lointaine et un peu aigrelette qui sent la peur.


Faut pas avoir peur...

La main trouve enfin la force nécessaire pour s'accrocher à l'épaule libre.
Une étreinte aux grains de moutardes.
les doigts abandonnent l'épaule, glissent, légers, le long du corsage fin et atteignent enfin leur but premier.
La peau nue et...
Le versant à la pente douce d'un sein.

La main se fait plus hardie.
Le visage effleure le cou.

Si ça sentait pas autant la moutarde, on serait pas loin du Jardin des Délices.

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Asophie
Enfin seules...

Amendine est repartie avec sa robe souillée et ses prières. Le vieux Georges, avec le chien et ses larmes. La servante, avec la toile et le vomi.

Tout est là. Le feu et sa chaleur vivifiante. Les plantes de la Terre-Mère. L'eau de la renaissance. Il ne manque que le dernier élément de la formule.

Déjà la Reyne Morte frémit. Une main blafarde émerge de l'eau, s'agrippe à elle, la touche, l'effleure, à la recherche de son cœur, siège de sa vie ; de son sein, offrande maternelle. Alors-même qu'il lui semble entendre un dernier murmure au coeur d'une respiration sifflante et difficile : "Faut pas avoir peur...", elle répond en elle-même :
"Visita Interiora Terrae Rectificandoque Invenies Occultum Lapidem*."

Et la Sophia Albeda plonge en elle-même, chassant sa colère, ses récriminations, sa jalousie, sa méfiance, sa peur... "Faut pas avoir peur...", "car la peur tue l'esprit... La peur est la petite mort qui conduit à l'oblitération totale..."**. Ainsi, elle livre un combat, contre elle-même, se défaisant un à un de ses ennemis intimes, triomphant de ses démons intérieurs jusqu'à pouvoir enfin, effleurer dans les replis de son âme, cette parcelle du Divin. La Lumière. L'Amour... De tout cela, elle forme un souffle, qu'elle enferme dans une maille d'or, l'Aleph... Le premier mot, le dernier acte. Je te l'offre, Agnès...

La main sur son sein, le visage contre les sien... Les lèvres s'effleurent, les souffles se mêlent...


Voyage sur un souffle... Vertige. Elle flotte comme un voile éthéré, au delà de la chair, au delà du monde. Entre la lumière et l'obscurité. Le prix à payer quand on joue avec les forces du monde auxquelles, encore apprentie, elle n'est pas prête à faire face, il est là : l'Oubli l'attirant comme un aimant, menaçant de la broyer, de l'annihiler...

La main sur sa peau, des lèvres contre les siennes, les souffles s'échangent et se mêlent... La chair, la chaleur, le désir, l'amour... La vie. Elle revient au monde.


"Je n'ai pas peur..."

Et je n'ai pas honte non plus...




*Acronyme de Vitriol. "Visite l'Intérieur de la Terre, en (te) Rectifiant tu trouveras la Pierre cachée".
**F. Herbert. Dune. Litanie contre la Peur du Bene Gesserit."Je ne connaîtrai pas la peur car la peur tue l'esprit. La peur est la petite mort qui conduit à l'oblitération totale. J'affronterai ma peur. Je lui permettrai de passer sur moi, au travers de moi. Et lorsqu'elle sera passée, je tournerai mon œil intérieur sur son chemin. Et là où elle sera passée, il n'y aura plus rien. Rien que moi."

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"Connais-toi toi -même et tu connaitras l'Univers et le Divin."
Sancte
Navré pour le débarquement, je m'accroche au RP comme je peux.


Les visites de courtoisie, à dire le vrai, ça ne mange pas de pain. Surtout lorsqu'on avait des choses à se faire pardonner. Ô pas grand chose bien sûr. Et sans doute même trois fois rien. Mais pour une femme, et plus encore chez une femme de pouvoir, vouée par essence à la solitude, c'est important. De ces petits détails insignifiants découlent toujours les grandes amitiés ou les profondes inimitiés, suivant la règle selon laquelle des petites causes bourgeonnent inlassablement les grandes conséquences. Il était cependant loin d'imaginer à quelle impudeur il allait avoir affaire en débaroulant dans une maison aux employés hystériques qui ne prêtèrent aucune attention à lui -ce qui est en soi très vexant- et en trouvant les deux femmes qu'il connaissait sans doute le mieux au monde en bien singulière posture.

La Guyenne est décidément pour ce Royaume rongé par le vice bien davantage qu'un décor exotique. Il s'avère que c'est la province du Grotesque dans toute sa splendeur, avec ses gueux plus nobles que nobles et ses nobles plus gueux que tous les gueux, en un renversement parfait et systématique de la pyramide des valeurs sociales. Ah vous n'avez pas peur, que vous dites ... Sanguienne, vous devriez ! Dieu n'est pas margoulin à laisser ce genre de spectacle immonde, païen, et décadent perdurer jusqu'à l'infini sous sa juste approbation.
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"Aux hommes la droiture et le devoir, et à Dieu seul la gloire !"
S.I. - Chevalier Errant de la Réforme Aristotélicienne.
Gnia, incarné par Sancte


Il parait que frôler la mort ou avoir ressenti une peur profonde réveille un instinct irrépressible de chercher la chaleur humaine.
Avec une douceur tranchant résolument avec les manières hautaines de la Saint Just, celle-ci goutait à petites et délicates bouchées les lèvres offertes, effleurait la gorge frémissante, cherchant sous la pulpe des doigts le rassurant battement qui caractérise ceux qui sont en vie.

Etait-ce tout simplement l'action conjuguée de l'astringence d'une friction à la purée d'orties et d'un bain à la moutarde ou le souffle et la chaleur nécessaires à la résurrection qu'elle avait bu à même sa compagne d'ablutions ?
Toujours était-il qu'elle trouva la force nécessaire de se hisser, debout, dans son baquet, d'en enjamber le rebord et de faire face à son infirmière de fortune.

Un regard trouble, une lueur indéfinissable au fond des pupilles encore dilatées par les effets de la drogue, toujours présents, bien que se faisant sentir avec moins de force, l'Ombre se presse contre la Lumière.
Des larmes d'eau courant sur la peau frissonnante, elle étreint avec délicatesse la jeune femme dont la chemise fine et trempée joue là un rôle de voile impudique.
Ses mains courent sur les parcelles de peau dénudée, sa bouche frôle la finesse du cou, du visage, des lèvres.


Et là... C'est le drame.

Jamais là où on est en droit de l'attendre.
Depuis combien de temps est-il là ?
Relevant lentement la tête, quittant à regret chaleur et douceur, mais les bras se faisant plus fermes et retenant Sophie contre elle, elle esquisse un imperceptible sourire en coin à l'expression indignée du Ministre de la foi réformé.
Un murmure.


Après Dieu, ses hommes de main.
Normal...


Le regard se fait amusé, laissant poindre un court instant l'éclat d'une rare et intense perversité. Elle revient alors à celle qu'elle serre contre elle, prenant d'autorité ses lèvres entre les siennes en un baiser à la sensualité sauvage.
Un fin sourire, une main légère qui effleure une pommette, un dernier regard à la Lumière et l'Ombre abandonne enfin sa source de chaleur, la poussant doucement vers l'importun.


Et Dieu a su faire en sorte de vous placer là afin que le spectacle ne se prolonge pas...


Et vous permettre de reprendre ce qui vous appartient... Dommage...
Elle hausse les épaules, les mouvements encore hésitants se saisit d'une toile dont elle se drape et fait quelques pas pour quitter la salle d'eau attenante à sa chambre.
A peine l'épaule musculeuse de Iohann dépassée, le discret sourire en coin se fait plus marqué.
Victorieux ? Amusé ? Qui sait...
Immoral et inconvenant ? Certainement.


____________________________________________________________
Sancte
Ben voyons ...

Si Iohannes, en n'ayant de saint que le nom, avait pu meurtrir la Comtesse à quelques reprises déjà par son comportement assez libéral et cavalier, il eut tout de même l'impression qu'elle lui chargeait sérieusement la mule en retour. Faussement indifférent à cette scène pour le moins surréaliste, l'homme de main du Créateur se raffermit dans son pourpoint chamois en espérant conserver sa dignité intacte.

A beau mentir qui vient de loin. Mais puisse cela être vrai.
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"Aux hommes la droiture et le devoir, et à Dieu seul la gloire !"
S.I. - Chevalier Errant de la Réforme Aristotélicienne.
Asophie
"Mon enfant, ma soeur,
Songe à la douceur
D'aller là-bas vivre ensemble ?
Aimer à loisir,
Aimer et mourir
(...)
Là, tout n'est que (dés)ordre et beauté,
Luxe, calme et volupté..."*

D'un voile éthérée, la voilà transportée dans les vapeurs oniriques d'une indolence toute sensuelle. Frôlement des lèvres, caresses enivrantes, soupirs d'abandon, dans les vapeurs subliminales de cette salle d'eau devenue délicieux hammam... Une peau marmoréenne se confond à l'or de la sienne. Un sein doux qui qui n'est pas le sien emplit sa main. Une voix qui ne sort pas de sa gorge et qui semble provenir de profondeurs caverneuses trouble la douce langueur de leurs soupirs...


"... Guyenne... exotique... bla bla bla... gueux nobles, nobles gueux, et ce qui est haut est pas comme ce qui est en bas,... bla bla bla... spectacle immonde, païen, décadent...!"

Hein?!... De quoi ça s'agit?! Qu'est-ce qu'il fait là, lui? On l'avait pas invité! Cauchemar, douche froide, bad trip... Elle n'a pas pourtant consommé de jusquiame... Ou, alors, rien qu'en le respirant? Désagréable hallucination. C'était mieux avant...

"Et Dieu a su faire en sorte de vous placer là afin que le spectacle ne se prolonge pas..."


Soupir : Dommage... Ah non, flûte, pas dommage, oh la la, c'est mal, tsss... c'est pas bien... Tape imaginaire sur la main qui reste accrochée à un corps brûlant. Aaah... Le rêve revient... Un baiser fougueux, sauvage, merveilleux auquel son corps s'abandonne avec indolence tandis que son esprit est toujours aux abonnés absents... Le corps s'éloigne, un petit tour et crac! LA, c'est le drame...!

Plantée au milieu de la pièce, face à celui qui, trop sévère, n'a plus du tout l'air d'être une hallucination, va falloir réussir à se trouver une contenance. Parce que si on fait figure de favorite au concours de T-chaisne mouillé de Palavas-les-flots, là, tout de suite, la situation se révèle plus qu'embarrassante, dans l'immédiateté présente du moment actuel. "Merdum"..? "Ah non, c'est un peu court ma vieille, va falloir trouver autre chose!"
Innocent : Agnès voulait m'prêter une robe pour les allégeance mais on est tombées dans le baquet.
Campagnard : Crévindiu! Vlà ti pas qu'on est toute mouillée maintenant!
De mauvaise foi : Bha Iohannes! Vous auriez pu m'ram'ner une houpelande quand même!
Pratique : Bha comme ça, au moins, je peux aller au lit directement...
Ironique : Ah bha la prochaine fois que j'viendrais, j'prendrais soin de prévoir du rechange...
Provoquant : Je peux crécher chez vous? Traverser la ville à poil, ça risque de faire jaser...
Dramatique : Je vais mourir pour vous, Agnès, à rentrer dans le froid ainsi dévêtue...
Agressif : Moi, Monsieur, si j'débarquais comme ça, j'aurais quand même pris soin de me rendre utile et d'amener une robe de rechange!
Insolent : Dites, Vot'Grandeur, maintenant qu'on s'est léché le morveux, ça vous dérange pas d'me prêter une culotte?
Voilà ce qu'à peu près, ma chère, on aurait dit , si on avait un peu d'esprit!* Bha oui, mais l'esprit est aux abonnés absents on vous a dit... Donc on reste plantée comme deux ronds de flan tandis que Sa Grandeur, parée dans un drap et sa dignité toute magnifique, quitte la scène telle une reine...

Quand soudain... Ô bienheureuse petite servante à la prévenance toute opportune qui vient de déposer un petit paquet de vêtements là, sur une chaise, près de la porte... Je te bénis, demoiselle anonyme à la discrétion d'une petite souris... Profitant de ce que Iohannes balance sa dernière répartie en suivant des yeux la Saint-Just, Sophie se faufile telle une anguille jusqu'au petit tas d'étoffes et ni une, ni deux, enfile la robe de laine sombre qui va lui rendre sa pudeur et son assurance. Attrapant d'un geste rapide sa cape et ses chausses, elle les enfile, ni vu, ni connu et peut enfin LUI faire face, avec tout l'aplomb qui caractérise ceux qui n'ont plus grand chose à perdre.


"Hum... Iohannes, nous devrions rentrer. Je suis rassurée désormais sur l'état de santé d'Agnès mais elle a besoin de repos, désormais... Allons-y."

On va pas en rajouter une couche et éviter de trop se rapprocher pour lui prendre le bras mais on plante à la porte alors même qu'on est guère pressée de se retrouver en tête-à-tête là... Néanmoins, la question demeure : qu'est-ce qu'il fout là, quand même !?


* : Baudelaire : Les Fleurs du Mal. "L'invitation au voyage". (1857)
** : parodie de la "tirade du nez", Cyrano de Bergerac, (Acte 1, scène IV), Edmond Rostand (1897).

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"Connais-toi toi -même et tu connaitras l'Univers et le Divin."
Sancte
J'essaye de poster rapidement, j'aurais plus accès à la halle sous peu.


Hum...

Quel ressort dans la difficulté ! Cette instinctive faculté de faire flèche de tout bois quand les choses tournent mal, voilà ce qui caractérisait sans doute le mieux le tempérament naturel de la femme exclusivement développé au détriment des hommes, indubitablement plus gourds et fort maladroits en la matière si d'aventure il leur venait à l'esprit de vouloir les imiter. Car c'est là, au fond, que le contemplateur se voit susceptible de dénicher la différence majeure entre le féminin et le masculin, soudainement jetée dans la lumière, comme s'il eut toujours s'agit d'une pure évidence. Néanmoins, cette esquive enjôleuse et pleine de tact, lui présentait Sophie sous un jour nouveau qu'il avait eu le loisir de deviner sans jamais y être directement confronté. Du moins sous cette forme.

Allons-y.


Oui. Rentrons. Il est des âmes torturées qui pourrissent tout ce qu'elles approchent.

Et le génépi attendra.
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"Aux hommes la droiture et le devoir, et à Dieu seul la gloire !"
S.I. - Chevalier Errant de la Réforme Aristotélicienne.
Gnia
Quelques pas encore un peu chancelants la mènent devant un large coffre dont elle extrait une chainse. Elle poursuit un trajet connu d'elle seule qui implique quelques virages plutôt mal négociés tout en passant non sans difficulté la chemise de fine toile de lin.
Enfin elle atteint sa destination, bien sourde à ce qui peut se dérouler à présent dans la salle d'eau.
Elle se saisit de son godet de vin, en jette le fond dans l'âtre et l'emplit à nouveau. Elle s'affale ensuite sur la moelleuse banquette qui fait face au feu ronflant, les yeux perdus dans le vague, là où tout à commencé.

Une éternité s'écoule et le regard se lève sur le couple qui semble sur le départ, elle saisit les mots acides de l'ancien sicaire et rétorque d'une voix moqueuse mais étrangement dénuée de cette pointe de méchanceté qui fait la différence entre ton juste léger ou véritablement aigri.


Oh que oui... Voyez ce qu'à votre trop intime contact nous sommes devenues... Scandaleux...

Un rire clair, presque candide.
Facile ?
Certainement autant que de la désigner bouc émissaire d'une situation qui n'avait rien de calculé jusqu'à ce qu'il s'y immisce avec sa pudibonderie de façade et son indignation bien réelle, certes.
Certainement aussi peu utile que de lui reprocher cette âme sombre qui l'avait pourtant attiré à elle aussi surement qu'un aimant et dont l'attrait ne cessait visiblement pas, bien que l'effet en fut amoindri.
Mais pouvait-on reprocher au mâle à l'orgueil bien souvent démesuré de vouloir tout rapporter à soi... Avec celui-là, valait mieux faire une croix dessus, ferme et définitive.
Ce qui avait fini par exclure d'office toute tentative d'user de réprobation aigre pour répondre à une réaction somme toute légitime de mâle blessé dans son orgueil et d'homme de foi plus prompt à condamner l'Autre dans ses errances que de tenter d'oublier une seconde la mauvaise foi caractéristique qui posait un voile faussement vertueux sur ses propres frasques.

Alors qu'elle s'étonne de la clarté de ses pensées, lui donnant pour la première fois depuis qu'elle le connait la capacité de réagir autrement qu'avec passion, elle ajoute un nonchalant et sincère


Vous nous quittez déjà ? C'est pitié...
J'avais hâte d'ouïr les détails de votre voyage et de partager avec vous ce que vous avez eu la bonté de songer à me rapporter comme présent.


S'adresse-t-elle plus à elle qu'à lui ? Plus à lui qu'à elle ? Dieu seul le sait.
Quoique le discret coup d'oeil qu'elle coule à celle qui se terre dans l'ombre omniprésente du cheveu sur la soupe de la soirée se passe de tout commentaire.
Et puis il s'avère surtout que les effets de la jusquiame se dissipant, la Saint Just n'a aucune envie de rester seule avec les interrogations qui ne manqueront pas de poindre quant aux étranges circonstances qui ont mené à cette délicate posture.

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Sancte
Changement de sujet. Mise aux oubliettes du préjudice. Classé sans suite, dans un tiroir de vieux dossiers qui ne manquerait pas de s'ouvrir pour être évoqué lorsqu'il serait placé dos au mur dans dans une dispute totalement hors-sujet. Une sorte de cartouche ultime. Un procédé classique mais de bon augure dans l'immédiat.

Subséquemment à son arrivée, Iohannes s'était empressé de retrouver dans la douceur de son Quercy natal ce qui lui avait manqué dans les Alpes: un tablier de boucher et la clairière au sein de laquelle il aimait tant se recueillir. Deux motifs identifiables pour constater que plus généralement, il avait cet endroit collée à la peau. Le soir même, il avait croisé la Comtesse en ville. Autant dire qu'elle n'avait pas mis beaucoup de temps pour lui signifier son mépris, mettant en cause ce départ précipité qui dura tout de même plusieurs semaines. A croire qu'il n'était plus libre de s'absenter sans en référer à son entourage. Ce constat amer combiné à ces petits jeux érotiques contre-nature ombrageaient son esprit. Revenir sur l'incident ? A quoi bon. Elles feraient négation de leur responsabilité. Pris entre deux murènes aux dents longues et à l'oeil acéré, le pasteur eut soudainement envie de disparaître et de fermer les yeux sur cet écart, tout en priant intérieurement pour que ces métamorphoses du climat ne deviennent relativement fréquentes. La langue passablement desséchée, il se fit néanmoins un point d'honneur à suivre les balises de courtoisie d'une situation qu'on lui imposait.



C'est que notre voyage fut des plus tristes et monotones, votre Grandeur, et nous ne voudrions vous indisposer par un récit qui ne pourrait que répondre à ces critères. Beaucoup de détours pour éviter rançons et embuscades, quelques négociations hypocrites avec les autorités, un ou deux procès, un court séjour en Savoie aux frais de la princesse, et c'est à peu près tout. Sur le chemin, aucune rencontre digne d'intérêt à se mettre sous la dent. Quoi que Terrides a pu rencontrer en la capitale des Gaules le Grand Maître de France, mais rien de plus divertissant. C'est dire la vacuité actuelle du Royaume.

Enfin, pour le dit présent que nous avons déjà eu le loisir d'évoquer, je l'ai remis à l'entrée à votre personnel afin qu'il se charge de vous le transmettre.



Ce qui était faux. Mais s'il portait effectivement les deux bouteilles dans sa gibecière, il n'avait aucune intention de s'abaisser à lui remettre quoi que ce soit en mains propres en la présente situation.
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"Aux hommes la droiture et le devoir, et à Dieu seul la gloire !"
S.I. - Chevalier Errant de la Réforme Aristotélicienne.
Asophie
Depuis quelques mois, la vie de Sophie aurait du n'être que paix et bonheur. Mais ce à quoi elle avait tant aspiré et qui correspondait à ses vœux les plus chers semblait se refuser à elle. L'ordre des choses. Chacun sa place. Et la vie ne devrait être qu'un long fleuve tranquille. Oui, mais quelque chose ou quelqu’un -le Destin, le Très-Haut ou son ennemi, le papillon bleu et rose à l'effet bien connu et chaotique ou... la loi de l'emmerdement maximum- avait décidé de déposer sur son chemin bucolique et bienheureux des troncs de baobab dans ses roues! Autant d'épreuves où elle échouait lamentablement... Parce que la chair est faible. Parce que le cœur a ses raisons. Le jour où Sophie saurait se montrer digne du prénom qu'elle portait si mal et où son esprit rationnel foutrait une branlée monumentale à ses deux comparses -le corps et le cœur-, peut-être qu'on arriverait à naviguer sur le long fleuve tranquille de la sérénité... Bha oui mais la chair est faible, le cœur à ses raisons, etc... Et voilà donc où l'on en arrivait.
De ce trio passionnel et improbable qui semblait avoir trouvé une certaine stabilité même bancale, un "puppet-master" à l’esprit pervers avait décidé d'en redistribuer les rôles. De mélanger les cartes. Tricheur! Et aux marionnettes de s’en débrouiller…
On essaye donc tant bien que mal de prendre une contenance. De faire bonne figure, de déposer un voile d’illusion courtoise sur ce qu’on voudrait oublier. Ou en tous cas, y repenser au calme. Car il faudra bien y repenser. Mais pas là, pas tout de suite… Alors on fait semblant. On retourne dans les costumes précédents des rôles qui semblaient bien établis même s’ils n’étaient guère confortables…

« Notre voyage, madame la Comtesse ? Chiant, long et froid ». Carrément le mauvais sujet pour détendre l’atmosphère. Et puisque Iohannes répond, on hoche la tête. On approuve. On s’assied pas. Autant se cantonner à la posture attendue de petite femme soumise et charmante. Ca nous va mieux, là, tout de suite. Elle relève vaguement les yeux…

Captivée… L’échange est long même s’il ne dure que quelques secondes. De ces secondes d’éternité qui remplacent un long discours. Lourd de sens, de trouble, de promesses peut-être, de questions sans réponse. Pour l’heure. Les obsidiennes rencontrent les bleus sombres, se croisent, s’accrochent, plongent l’un dans l’autre. Les contraires s’attirent. Mon opposé, mon autre… nous voici liées par tant de choses. Si nos corps n’ont fait que se frôler, nos âmes se sont étreintes dans un autre monde… Nous nous retrouverons, mais pas maintenant. Pas tout de suite.
Alors on revient au monde et à la réalité de ces façades courtoises. On joue le jeu.


« En effet, oui, j’ai croisé Marie-Alice à Lyon… Après-midi agréable… bla bla bla… »

On parle quelques minutes de choses sans intérêt pour garder la face. Pour écarter le flot d’émotions qui oppressent. Oui, je sais Agnès… Tu n’as pas envie de rester seule, surtout maintenant. Mais moi, j’en ai besoin. J’ai besoin de tout ranger, de mettre de l’ordre dans ma tête, de comprendre, de faire le point. Seule. Et avant cela, je vais devoir affronter un nouveau face-à-face qui sera sans doute pas piqué des vers… Alors, on va partir.

Salutations courtoises, recommandations aimables,
« Au plaisir »… Euh, c’était ptet pas la bonne formule pour se dire au revoir. Quoique…


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Les rues qui séparent l’Alabrena de l’Escarboucle sembleront interminables. D’abord le silence, puis on reprendra la discussion banale. On continuera de faire semblant ou presque. Mais faut pas rêver, ça ne pourra pas durer…


« Oui, d’ailleurs ! C’est quoi ces histoires ?! »


On jouera la carte usée du « C’est pas ce que vous croyez ». Mais ça ne prendra pas. Naturellement. Alors on se rabattra sur la fin de non-recevoir. On ressortira des vieux dossier une réponse de la bergère au berger.


« Je ne souhaite pas en parler. »

Lourd de sous-entendus… Si tu veux qu’on cause de ma paille, je vais te ressortir tes poutres. Bien sur qu’il ne manquera pas de jouer sur sa culpabilité pour mieux balayer les siennes. Bien sur qu’il finira par retourner les rôles. On le sait. On s’y attend. On s’y prépare. Mais en attendant, fin de la partie : pat.

Pour le moment…

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