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[RP] Lettres. Mémoires d'une femme de Cour.

Madame.de.


Citation:
    A la Maréchale de.


Amie,

Voulez-vous mon avis de la Bretagne ? Il est simple, à dire vrai. Il s'agit là d'un groupuscule de mauvais joueurs. Ils ne sont en tout cas rien de plus.
Le Grand Duché qui n'a de Grand que l'orgueil est le refuge de ces hommes et de ces femmes qui, il y a encore peu, ont prétendu à une indépendance.
Pourquoi mauvais joueurs me direz-vous ? L'affaire est aisée, très chère. Leur Cour est pitoyable, leur influence déplorable et ils s'ennuient, dans leur coin de France. Et que font huit abrutis qui ne savent que faire, parce qu'ils ont trop voulus, et qu'ils furent seuls ? Ils vont embêter les autres, parce que la chose est simple : ils n'assument en rien l'indépendance trop vite cédée par le Roi Fol. Voyez, l'on leur offre la liberté, l'autonomie, et les voilà bien vite empressés d'Alliance, et une alliance vous attache.

Ces importuns sont en réalité bien faibles. Ils tirent leur force de la crédulité de Provinces lassées d'une Couronne qui, trop longtemps, les a dédaigné. Mais à qui le doit-on ? Ne sont-ce pas des Nebisa et autres Armoria qui oublièrent le sens même de Diplomatie ? Qui, imbues, ne cessèrent d'isoler ce qui devint le Ponant ? Elles sont la cause de bien des choses. Pourtant, un manteau de Pair aurait parfois été une carotte suffisante pour éviter la sédition.
D'aucuns blâmeront Béatrice, mais à son arrivée, elle n'a fait que contenir ce que la grosse avait déjà embrasé.

Est-ce leur faute, à elles, ces femmes inutiles ?
Je ne sais. Elles ne sont pour rien en la bêtise des hommes. Bretagne, Provence : ces gens nous pourrissent. On leur dit : bien, prenez votre envol, allez au diable et laissez-nous. Ils partent le temps de six mois, et reviennent quémander de l'attention ensuite. Pauvres, pauvres bretons. Je les plains, avec leur vue sur un Mont Saint Michel que ma foi, je n'ai jamais trouvé qu'humide.

Voulez-vous connaître l'issue de cette guerre ? Lorsque la Reine Nebisa passera à trépas, tous ceux qui ont rejeté Couronne et Royaume de France - entendez poussins et autres créatures à fausses plumes - se jetteront sur iceux. Le Royaume ; ils y reviendront, parce que ce n'est pas l'oppression dont ils souhaitent s'affranchir, nenni. Ils souhaitent en fait l'appliquer aux autres.
Mais les conséquences de cela sont simples. Là où ces mauvais bretons, ces sales angevins, ces flamands versatiles se sont amusés, là où ils ont causé un brouillard géopolitique indéfinissable, une situation d'où se tirer sera décourageant, ils ne laisseront qu'un vide. Tous ces enjeux furent mal réglés. Tout cela fut traité par des enfants sans conscience de leurs actes. La France est un terrain de sable, et les chiens y vont faire leurs étrons les plus gras. Lassitude est un mot idéal : la lassitude aura dépeuplé le Royaume, ou le fera.
A l'issue de cela, nos terres seront défigurées, et le cours même de notre Histoire aura perdu son sens, sa nature.

Que le Très Haut entende mes prières. Qu'il nous offre un retour en le temps, et qu'il éradique la peste bretonne, où lui donne de quoi se faire les dents. Nous ne demandions rien.

Mais le Très Haut. La moitié du clergé n'est-il pas breton ? Et sous couvert d'universalité, n'a-t-il pas propagé le choléra ? N'a-t-il pas laissé impunis les hérétiques, pour peu qu'ils se rachetaient en travaillant pour le félon ? N'a-t-il pas failli à garantir la paix ? Le clergé est une plaie, une plaie.
Un Sancte von Frayner vaut peut-être douze Clodeweck de Montfort. Ce nom même est un vomissement quotidien. Je ne me confesse plus, tant je crains que mes colères du soir ne servent à l'ennemi. Tous des fourvoyés, que l'on appelle Princes.

Non, Athénaïs, vous n'aurez pas les nouvelles de la Cour aujourd'hui. La Cour, elle survit, elle se donne l'air de vivre, mais ces danses macabres ne sont qu'un voile.

Mais enfin, n'ai-je pas entendu un jour qui si nous voulons que tout reste tel qu'il est, il faut que tout change ? L'expansion d'un Royaume Ponantais ne fera que recréer un Royaume de France ; et chacun le sait, les Rois se valent tous, à peu de choses près.

Lisez cette lettre à votre cercle. Dites-moi leur pensée.

Adieu. Saint Louis bénisse le Royaume de France, ou ce qu'il en restera.

    Madame de.
Madame.de.


Citation:
    A Mademoiselle de.


Mon enfant,
Mon coeur est en émoi, et Dieu sait que depuis le trépas de votre père, il eut peu d'occasion d'être en pareille condition. Mon âme rit des circonstances, mais savez-vous donc, du fond de la Provence, ce qui me mène à vous l'esprit en joie ?
Certes non, de là-bas, vous êtes si loin, et entourée de tant de sots ! Mais laissez-moi vous compter ce que tout Paris sait, ce que tout Paris hurle, ce que toute la France brûle d'apprendre.

La Reine, oui ma fille, il s'agit d'elle, mais le Très Haut me soit témoin que c'est la dernière fois que je couche son nom, la Reine est trépassée. La pauvre âme gèle sur la Lune à l'heure même où je vous parle. Et devinez encore, pas même assassinée, pas même poignardée, pas même à coup d'épée, la voilà morte naturellement dans un lit ! Vous voulez mon avis ? Tout cela est bien pire qu'une abdication. Nul honneur à sa fin, pas même celui de donner la vie.

Bah ! Est-il utile de vous mander la façon dont l'on se rue autour du trône ? Les vautours sont sur leurs branches, le regard frondeur, et déjà prêt à nous gouverner. Ces instants me réjouissent, et Dieu me permette de voir mourir tant de Roi, puisque chacun de leur trépas est tant d'amusement à chaque fois qu'il en faut choisir un autre. Quelle idée affriolante eut donc le Fol, lorsqu'il décida d'une Monarchie Élective. Il nous offrit ainsi de quoi écrire pour des siècles et des siècles.
Allons ! Vous périssez de savoir qui souhaite la Couronne ? Devinez ! Vous ne le pouvez ? C'est pourtant simple.

Icie de Plantagenêt. Non mais vraiment, pensez-vous qu'un Grand Maître de la Garde Robe puisse prétendre à un trône ? C'est à s'en brûler le doigt dans un pot de cire. Du reste, nous avons vu le brio de sa prime régence. Non, non, vraiment. Et par ailleurs, cette femme n'avait pour apanage que d'être Dauphine, sans cette malencontreuse publicité, jamais elle n'aurait pu espérer passer au Premier Tour, j'en mets ma main au feu. Il est dommage que le destin ait choisi de mettre en avant telle femme. Mais allons, il fallait bien, pour représenter le Ponant, quelque chose de cette trempe, quelque chose de fade et répugnant.

Parlant de fade, j'ai ri, ô combien j'ai pu rire en apprenant la candidature de Laure de Troy. Ainsi donc, celle qui se fait appeler Princesse par son miroir souhaite devenir Reine ! D'ailleurs, je me suis étonnée de la connaître même de nom, puisque de mémoire...Et bien non ! De mémoire, rien. D'aucuns ont pensé que la fortune a une quelconque influence, la grâce divine sans doute. Bah ! Qu'ils prient ces imbéciles, ou mieux, pour la citer, qu'elle "rêve".

Dans la famille des invisibles, prenons Strakastre - j'ose espérer que ce nom ne vous écorchera point l'oeil, j'ai moi-même quelques difficultés à m'en rappeler l'orthographe. Cet homme issu de nulle part. Pourtant, il est Comte, mais voyez-vous, Laure de Troy m'est plus évocateur que Strakastre de Bramafaman. Oh, je suis bien mauvaise langue. C'est une vieille gloire sans doute, un homme digne d'être Pair émérite, si vous suivez mon propos : ce fut utile en son temps, ça ne l'est plus, mais c'est joli dans un coin.

J'en viens aux candidats potentiellement sérieux. Vonafred, lui aussi fait des songes, quand Princesse-Sarah fait des rêves. Cependant, je le soupçonne d'être l'âme damnée d'une politique Nebisienne. Après tout, le Périgord à tiré son épingle en cette guerre, et cette épingle était tout à fait royale. De bons élèves, pour sûr. Et du reste, qui, qui à part quelques sudistes en manque d'une Yolaine complètement hors propos pourraient débourser pour cet homme ? Je ne sais guère.
Et Yolaine d'ailleurs, je vous parie 13 écus qu'elle en sera ! Il nous faut bien un fou du Roi.

Enfin, le candidat Couillu. Celui que l'on appelle le légendaire, celui dont le menton volontaire me mène aux souvenirs d'une jeunesse où l'on distribuait nos linges aux jouteurs. Blanc Combaz. Voilà que ce rustre souhaite nous gouverner. Eh bien si je lui trouve une tenue tout à fait inappropriée, et que jamais je ne le voudrais en mon salon ; je dois l'avouer charmeur. Son programme est édifiant. Point de rêve, point de songe, mais des faits ! Des idées concrètes ! L'on ne nous parle pas d'orfèvrerie nébisienne, l'on ne parle pas de redorer des lys ! L'on nous conduit ! Voilà ce que j'en vois ! Moi !
Ma fille, si la France devient Bouillonne, alors c'est pour le moins pire, et je puis vous dire que nous aurons là un homme un vrai, et aussi vrai qu'une femme n'est point faite pour régner - et nous avons quelques exemples cuisants -, la sienne saura mener une Cour, c'est à n'en point douter. Lui fera des campagnes et nous offrira un Royaume historique, une Royaume tel que la France fut et devrait être encore, un Royaume où l'ingérence royale sera vaine, où le Domaine du Roi sera fort, où ses vassaux seront sûrs, riches et où, plutôt que de nous envier d'un Comté à un autre, nous créerons l'envie de l'Empire.

Mon enfant, c'est à dessein que je vous dépeint cela, puisque pour moi le choix est fait. Il faut un Roi, il faut un homme, il faut un poing. Voyez-vous même ce que l'on vous propose.
Je fus toujours d'avis qu'en choisissant des poires, toutes creuses fussent-elles, il faut prendre la moins pourrie.

Mon enfant, vous écrire m'échauffe les tempes, je m'en vais un instant pour mieux vous conter bientôt. D'autres se déclareront sans doute.

Mon affection vous protège.

    Madame de.
--Mademoiselle.de.


Citation:
      A Madame de.


    Mère, il y a si longtemps que je n'avais eu le plaisir de vous lire. Je vois que votre plume a toujours la grâce et la légèreté que vous aviez naguère. Je suis heureuse d'avoir de vos nouvelles, moi si loin de vous depuis mon mariage. Ils sont si rustres ici, vous ne pouvez imaginez combien Paris me manque. La Cour est ce qu'elle est mais au moins elle a du raffinement, enfin elle en avait du temps de la Reine Béatrice. D'ailleurs vous ne m'avez point parler des tenues de la reine trépassée. Quelle était donc la mode sous son règne ?

    Mère ne parlez pas de malheur, imaginez un Malemort de plus sur terre si elle était morte en enfantant. Vous ne pensez pas point que leur nombre est déjà assez suffisant ? Remercier le Très Haut ou le sans nom de l'avoir rappelé, il a compris qu'il ne fallait point laisser telle personne sur terre. Regardez l'état du Royaume ...

    Il est vrai que le Roy Levan nous a fait un beau cadeau, surtout à vous Mère. Je n'ai aucun doute que vous vous amusez follement malgré tout ce que vous dites. Regardez de qui s’entourait le "prince" bâtard ... il y avait matière à écrire là aussi. Je vous soupçonne de ne rester à Paris rien que pour cela.

    Mère. Quand on s'occupe de froufrou on ne peut prétendre savoir s'y prendre en politique, déjà qu'elle a été condamné en Haute Cour de Justice, cela bien des gens l'ignorent ou l'ont oublié. Comment peut on la prendre au sérieux ? Et pourtant je suis sure qu'il y en a qui la soutienne. Comme la Laure, mise à part localement, je ne pense pas qu'elle ai quelques soutient et encore il ne faudrait pas que les autres candidats lui volent des voix. Elle n'est pas bien redoutable. Votre Stramachin, que ce nom est laid mais quand on voit la famille on comprend mieux aussi. J'ai ouïe dire qu'il fut un temps quelqu'un de fiable mais ce temps est si lointain, la preuve j'étais encore auprès de vous et Père. Concernant le dernier, Mère il est du Sud et vous savez comme moi qu'au Sud les gens sont bizarre, regardez la Provence où je survis grâce à vos lettres. Quand je lis vos paroles sur le Bouillon, Mère je suis affolée, comment le trouver charmeur, il est si vieux ! Ah Mère je sens bien que l'homme ne vous laisse pas indifférente. Pensez vous qu'il ne risque pas avec son caractère ... assez bourru de provoquer des discordes au sein du Royaume ? De mémoire il n'est point homme à se laisser dicter sa conduite. Des étincelles pourraient faire plus de mal que de bien.

    Enfin vous êtes plus au fait des on dits parisiens que moi, isolée dans ma lointaine Provence. Mère faites tout de même attention à vous, je crains en vous lisant que votre santé ne s'affaiblisse. Si tel était le cas je rentrerais directement à la maison soyez en sure. Reposez vous Mère.

    Avec tout ma tendresse.

      Mademoiselle de.
Madame.de.


Citation:
    A Mademoiselle de.


Mon enfant,

Ne vous avais-je pas promis des nouvelles de la Cour ? En voilà, et de bonnes. Comme vous avez du l'ouïr, les élections se sont terminées. Je n'ai pas honoré mon serment de vous aviser des candidats s'étant ajoutés à ma première liste, le cas de Yolaine était bien trop connu, traité, et ridicule pour mériter une lettre.
Ne croyez pas que l'exercice m'épuise, mais la guerre a nécessité bien du courrier, et l'encre vient souvent à manquer. Paris est devenu un bouge empli de vendeurs d'esclaves et de filles de joies, par ma foi, l'on se sent partout à la Cour des Miracles, et les marchands honnêtes deviennent rares, à tel point que l'on refuse, parmi mes gens, de se déplacer en place de moi-même, pour acquérir des broutilles.

Jusqu'à récemment, les quais de Seine étaient encore peuplés de fournisseurs luxueux, mais il semblerait que le règne de Nebisa, qui n'a pas brillé par son intérêt pour les Beaux Arts et l'habillement, si chères à la Teutonne Béatrice, a ruiné ce qu'il y avait d'attrayant dans la capitale. La succursale des Doigts d'Or semble avoir fait banqueroute, les macarons se font discrets, et jusqu'à sa mort, jamais l'on ne vit Reine si mal vêtue que la Malemort.
Vous parlerais-je des festivités, que dis-je, des cérémonies du Grand Deuil ? Il y avait peu de monde, et la surprise à revoir les membres de la Maison Royale était à la mesure de leur absence lors de ce règne qui ne mit point à l'honneur les cérémonies, ni le faste. Je crois que le banquet qui fit le plus de bruit est celui que donna un Von Frayner en Bourgogne, pour fêter le trépas. De mauvais goût me direz-vous, ma foi, l'on sait que Son Horreur la défunte n'était guère encline à respecter la mémoire d'autrui, pourquoi lui faire l'honneur de la révérer dans la mort ?

Bah ! Le temps passe et déjà un nouveau Souverain est sur le Trône, et les choses deviennent intéressantes, ma douce enfant.
Sachez que bien des doutes planent sur la légitimité de ce Vonafred, que l'on dit déjà l'Usurpateur. Voyez-vous, les crieurs de la Capitales annonçaient le Couillu Eusaias Roi, le soir des élections, quand, deux heures plus tard, l'on avait fait pendre iceux, et d'autres proclamaient notre actuel Souverain. L'on murmure un peu partout que les urnes ont été bourrées par de noctambules énergumènes sans grande morale, et je vous le dis tout net : ce sont bien là les méthodes du Périgourdin. Son trône, il l'a payé, et sans convaincre quiconque, sa légion de sbires, qui sont par ailleurs les mêmes que ceux de la Morte, a fait l'oeuvre, ils ont payé Duchés et Comtés. Le Trône est usurpé, et déjà à Saint Germain, l'on crie à la Fronde.

Les Grandes Maisons du Royaume s'affolent, Condé, Bouillon, Nemours, tous en seront, je le gage. Quoi que Condé est un couard, et l'on raconte qu'il épouse Chantilly, comme si cette femme qui hante la Bourgogne depuis des siècles était encore apte à donner un héritier à quiconque. La conception sera, pour vrai, immaculée, et j'en ris par avance.
Mon enfant, si Armoria de Mortain devait enfanter, gagez que l'on fera de Menessaire un lieu de pèlerinage !

Allons ma bonne, je vous quitte sur des rires, il vaut mieux cela que les larmes. Les puissants nous donnent bien assez souvent l'occasion de pleurer sur leur ridicule, de rire sur leur incompétence.
Un jour peut-être vous conterais-je la régence, là encore, ce fut épique !

Avec la tendresse d'une mère,

    Madame de.
--Mademoiselle.de.


Citation:
      A Madame de.


    Mère,

    Certes Yolaine ne méritait pas une lettre mais moi tout de même. Vous faites votre vilaine des fois, enfin si vous dites que l'encre se fait rare. Vous auriez du me prévenir je vous aurais fait parvenir le nécessaire. Vous êtes ma mère tout de même.

    Ah ça Mère, j'ai eu copie d'un journal sur la Haute Couture venant de la GFA. Vous en avez entendu parler sans aucun doute, ce sont les couturières insultés par la limousine qui l'ont écrit. Quand j'ai vu les reproductions des tenues de la reine, mon dieu Mère, comme j'ai eu honte. Même ici, en Provence, la mode est plus ... à la mode. J'étais horrifiée ! Sans parler du détail. Ça pour faire la guerre elle s'y entendait la Malemort, encore que ... il n'y a pas eu de victoire à proprement parler il me semble. Remarquez Mère que son nom était prédestiné à insuffler l'agonie sur notre pays. Au final, le Von Frayner n'a fait que lui rendre hommage, il a festoyé sur ce qu'elle avait fait ... semer la mort.

    Une fronde Mère ? Mais n'est ce point dangereux pour vous ? Décidément votre vie est trépidante comparée à la mienne. Seulement, est ce que le couillu va garder son soutien d'avant les élections ? Les gens sont tellement enclin à retourner leur veste en cas de perte de pouvoir. Est ce que cette fronde a les moyens d'aboutir ? C’est ça qui est important Mère. Et honnêtement quand on voit qui succède sur le trône on se dit que finalement le Couillu est mieux là où il est, loin des diverses nuisibles. Enfin nous verrons bien ce que cela donnera.

    Mère, ne soyez pas médisante avec la Chantilly, elle n'est point si mauvaise que vous semblez le dire. Regardez elle a essayer de nous débarrasser de nos nuisibles à nous. Non je vous trouve injuste envers cette femme. Par contre c'est sur que le prince aurait pu trouver plus jeune réceptacle pour sa semence. A moins qu'il ne veuille pas d'enfant et dans ce cas là, admettez Mère que c'est un bon calcul.

    La régence Mère, mais n'a t-elle pas été faite par le GMF comme cela est la coutume quand il n'y a pont de dauphin ? Vous m'intriguez Mère et j'attends avec impatience ce nouvel épisode de la vie parisienne. Ne tardez point trop, que je ne sois pas trop en retard sur les évènements. Sachez que mes amies provençales adorent vos histoires. Il faut dire qu'elles les sortent de leur provinciale attitude. Tout est si paysan ici comparé à Paris. Enfin, ainsi va la vie.

    Avec tout ma tendresse.


      Mademoiselle de.
Madame.de.


Citation:
    A Mademoiselle Anne Inès, du couvent de Sainte Justice,


Ma nièce,

Que de temps s'est écoulé depuis votre entrée en cloître, et Dieu que vous fûtes avisée d'agir ainsi. L'on vous promet déjà un mariage riche et votre mère oeuvre pour vous doter des plus chichement, tout en obtenant d'un parti avantageux les honneurs et les titres. Que vous êtes chanceuses ! Loin de tout, mais toute ici, et sans rien faire quand l'on fait tout pour vous.
Ne me dites point que Dieu est le seul époux auquel vous vous destinez, vous tueriez vos pauvres parents.

Madame ma soeur me disait que vous reveniez bientôt au monde, et il me semblerait criminel que vous paraissiez en Paris sans en savoir le vrai. C'est que la capitale et son monde à bien changé.
A votre départ, la Malemort régnait encore, à votre retour, son trépas aura laissé un sentiment amer à notre Royaume.
L'on ne m'invite plus au Louvre depuis longtemps, mon grand âge et mon veuvage faisant de moi un rabat-joie quand je me sens encore boute-en-train, mais vous savez que mes oreilles portent loin, et que l'on s'empresse de venir me conter les dernières nouvelles.

Saviez-vous que notre Reine est bretonne ? La belle affaire, eh quoi ! Là où nous aurions pu trouver la paix avec une bretonne féale à son pays, nous promettant avec le Grand Duché une alliance, nous nous retrouvons avec une paria va-nu-pied, qui ne fera qu'alimenter la guerre. Quelle étrange relation que celle-là.
Si je vous parle de la Reine avant que de vous parler du Roi, c'est qu'icelui n'est point couillu, et ma parole, Madame mène la maisonnée. L'on m'a raconté qu'elle ordonne à la Curia Regis, qu'elle impulse au Salon des Grands Feudataires, et qu'elle se promène à moitié nue dans les couloirs du Palais Royal, en mangeant des radis. Voilà une personne bien basse, qui se croit bien haute.
Le Roi, lui, ne quitte, dit-on, qu'à peine les cercles qui lui sont les plus proches, et qu'il s'emploie à gratifier de titres et distinctions.

Dernièrement, deux démissions firent bruit au sein du Conseil Royal. La Chancelière rendit ses attributs, malade parait-il. Le Surintendant fit de même, mais nous n'en savons point les raisons : on me les a dites. Figurez-vous que Sa Majesté le faisait surveiller ! Quelle honte ! Si l'on ne fait pas confiance à ses plus proches conseillers, à qui le peut-on faire ?
Ma foi, il m'est avis que le brave Duc de Thorigni fut poussé dehors. Le normand est intègre, et il aura refuser de gratifier le Périgord-Angoumois de la moitié des biens de la Couronne. Vous avez sans doute entendu que le Roi rétribue grassement ses soutiens, au détriment de son Domaine et de ses sujets Royaux.
Je tenais ce discours hier chez le Baron de ***, et l'on me disait vilaines et gargotière ! Pensez-vous, ce matin même, l'on lisait que le Surintendant serait remplacé "en interne", et sans appel à candidature publique, quand un autre traitement avait été réservé au Chancelier, lui, appelé à venir d'ailleurs que de l'Office.
Deux poids, deux mesures dont je ne tire qu'une chose, ma bonne enfant : l'on aura voulu offrir le poste de Chancelier à un ami du Roi, le Comte Valère d'Arezac, dict Varden, qui malheureusement, n'était point membre de la Cour de Justice.
Quant au Surintendant, l'on réserve sans nul doute une place au chaud à un autre, à qui l'on veut donner rapidement le siège, et qui par chance, est membre dudit office.

Vous ennuierais-je avec mes discours politiques ? Oh ma foi mon enfant, il faudra vous y faire, puisque tel sera votre apanage, ou celui de votre futur époux.
Notre monde, et notre Royauté sont gâchés le par népotisme, et je crois qu'il vous faudra lécher maints séants si vous voulez réussir et vous élever. Souffrez mon langage cru, car vous devrez souffrir bien plus. Ma chère, ne montrez point cela à vos soeurs religieuses, mais je vous enjoint à ne point offrir votre seul corps à votre promis : employez-vous à séduire les puissants, et votre époux vous sera reconnaissant de lui avoir permis une élévation par votre zèle sur le traversin d'autrui.
Du reste, nul n'a besoin - outre votre confesseur - de connaître cela de vous.

Vous enseigne-t-on cela au couvent ? J'en doute ma chère, et cela me fait sourire. Ecoutez donc votre marraine, elle est votre guide auprès du Très Haut.
Votre jeunesse est un gage puissant, et préservez-la. A mon âge, l'on doit vendre ses suivantes pour obtenir la reconnaissance d'un homme, ou bien son esprit. Il m'est souvenir d'un jeune soldat il y a quelques mois, taisez-le je vous prie. Ce brave homme ne m'apporta nulle gloire, et raconta l'affaire à tout un régiment. La morale est de ne vous laisser jamais prendre, et d'être farouche aux barons, comme vous serez généreuses aux marquis.

Ma douce filleule, je m'en vais donc conter à votre mère que je vous ai bien écrit, et mise en garde des dangers du monde. Je lui dirai que je vous encourage dans votre vertu.
Tout cela reste entre nous bien sur.

    Madame de.
Madame.de.


Citation:
    A la Maréchale de ***,


Chère amie,

Que de discernement vous eûtes en ne venant point au Royal Sacre de Reims. Ce fut une belle mascarade, un défilé des plus carnavalesques, un renversement du Monde !
Allons, vous ne me croirez jamais.
Une nouvelle et jeune couturière est en vogue. L'on dira peut-être que mon esprit est clos, et que mon goût est passé, mais enfin, j'ai trouvé ses productions qui hantaient la Cathédrale, simplement laides. Le Roi même était vêtu d'une tenue d'intérieur noire, et couvert d'un manteau qui respirait la fausse hermine, et dont les lys étaient bourrés d'un fil d'or de la plus vulgaire composition. Le Duc d'Orléans, qui avait une traîne plus longue que celle de la Reine passait presque pour un Roi, et j'ai cru reconnaître la la patte de notre bonne amie de Cassagnes.
Je savais que la Malemort avait détruit les Arts, mais pas au point que sa suite ne puisse se relever, et soit réduite à se présenter au Très Haut en guenilles. Je ne parlerai point de la Bretonne. Un haillon l'habille chaque jour, alors en un tissu plus fin, elle ne pouvait que paraître plus jolie qu'à l'usage.
Même la Ségur était plus belle à son sacre, et c'est là vous en dire long. Le Bois Doré a quitté la Cour, et la Plantagenêt semble une bien piètre esthète. L'on ne peut pas être tout à la fois Poitevine et avoir du goût, il est vrai.

Allons, allons. Saviez-vous que l'on brade Principautés en notre belle France ? J'ai ri du Marquis de Senlis en son temps, j'ai pleuré sa mise à l'honneur. L'on a fait pourtant pis ! Voilà que Namaycush dit le Traître est fait Altesse, de même qu'un sombre personnage, aveugle paraît-il, et autre frère du Roi.
Cela dépasse tout entendement. Ces gens n'ont pas eu même le bon sens de refuser l'honneur qu'ils n'ont pas le vécu d'atteindre ; je les crois à l'origine de ce douteux octroi, et il m'est d'avis que de Conseil, le Roi n'offre l'oreille qu'à ses deux frères, qui prêchèrent pour leur paroisse avant que de s'intéresser au Royaume. Et ma foi, Salmo Salar a le sang de la Trahison, dit-on, il ne fallait alors point s'attendre au prestige, ni à la grandeur. Bientôt, notre Hérauderie respirera l'Empire - et vous savez ce que je pense de l'Héraldique Impériale - et je plains bien la Duchesse d'Auxerre, dont la droiture doit tolérer tant de légèreté, et tant de caprices, dont on aura le mauvais goût de l'accuser.

Dieu j'espère avoir le temps de vivre encore assez pour voir la déchéance de ces vrais-Princes, moins encore légitimes au titre que les bâtards de la Malemort. Ils n'ont pas même la tenue du rang, ils empestent et le Louvre a, dit-on, revêtu une odeur de vieille graisse, qui n'est en rien due aux cuisines.

Puis-je vous dire encore la cacophonie nobiliaire qui approche ? Voilà que le Roi, dans sa grande intelligence, a trouvé bon de reconnaître Astrée, chevalier banneret de Fauquez, en Brabant. Or et toutefois, la Reine Nebisa avait déjà reconnu à ce titre le jeune Enguerrand de Vaisneau, que par ma foi je n'aime pas trop.
Voilà que la France reconnaît à deux hommes le même titre étranger. Et allons donc, le Brabant n'est-il pas, de Jure, terre Impériale et sujet à revendication par le SRING ? L'affaire deviendrait risible s'il ne s'agissait là que de l'erreur d'un copiste. Pourtant, il s'agit bien du discernement du Roi, de celui qui gouverne, ou plutôt qui s'en met plein les poches.

J'entendais hier soir parler mes valet. Il m'arrive de les écouter, car la valetaille est pleine des ragots que leur content les laquais des autres. L'on dit que le Roi a mandé que lui soit remises toutes les caisses du Domaine Royal, qu'il va pour bientôt s'enfuir, prenant avec lui et ses frères l'usufruit des terres qu'ils se sont auto-octroyées. En un mot, ils partiront tous avec la caisse.
Je crois que nous avons ici un bel exemple de rumeur erronée, mais c'est toutefois plaisant, et je pense bien qu'il n'est nulle fumée sans feu. Le vrai n'est point loin.

Voulez-vous mon avis sur la chose à faire ? Soit. Vous l'aurez :
Le combat de Bouillon ne lui sera pas bénéfique. Toutefois, il fera prendre conscience aux sujets de la Couronne qu'il n'est nul besoin de se rallier à la bannière parisienne. Le Domaine Royal devrait profiter de la folie de Vonafred et se faire la malle, laissant passer le temps de sa mort, et revenir lors, négociant avantages sonnants avec son successeur.
La Monarchie élective est une plaie, mais elle aura le mérite de donner à chacun ce qu'il souhaite, et dans maintes décennies, j'en fais le pari, nous aurons rétabli le Sénat Romain et sa République !
Après tout, celui qui du Ponant, voudra rentrer de nouveau en le rang, sera accueilli bras ouvert et sans punition. Il aura gagné sans doute le droit de négocier.

En outre, la religion aussi prend cher. Sa Majesté souhaitait octroyer au Réformé Sancte une armée en Bourbonnais Auvergne, aux frais de la Couronne. Bel exemple d'acte aristotélicien s'il en est.
Traîtres, Hérétiques ! N'aurions-nous pas un Roi-Brigand ? Un Roi-Despote ? Un Chef de Clan nordique ? Bah ! Un peu de tout cela.

Vous ennuierais-je ? Il est vrai que je vous alléchai de dépêches en soie, parlant de bon tissu, et me voilà de retour en politique. Je suis incorrigible, mais le monde et sa marche m'intriguent et me plaisent. Ce qu'en font les hommes me navre et alimente ma plume.

Je pourrais encore vous dire que l'on voit la Clairval fricoter avec le Duc d'Alluyes en toutes églises où ils paraissent en couple.
Le printemps est saison des amours, à n'en point douter. L'on a aussi marié celle qui se crut Princesse de France à un simple Seigneur, elle qui est redevenue Dame : Elisa de Lahaye Malemort.
La Reine trompe sans doute le Roi avec le nouveau Prince de Pontoise, ou est-ce de Montreuil ? Ou peut-être les deux. Ma foi, l'un comme l'autre sera le même. En la Memento Mori, l'on partage tout. Puisse la Prinzessin ne pas leur accorder trop longtemps son oriflamme. Je n'aimerais pas être de ceux-là quand viendra l'heure du jugement.


    Madame de.
--Le.duc.de.



Citation:
    A Madame de.,


Ma bonne amie,

Quelle surprise je vous fais, car il est connu pourtant par toutes les rues que je ne suis pas même porté sur la rédaction, préférant seulement dicter. Mais voyez ma chère amie, il est des affaires qui nécessitent de se salir les mains, de les entacher quelque peu d’encre de qualité pour mieux les voir aboutir sur des résultats probants et que l’on saura apprécier complaisamment.
Ainsi je vous accorde de mon temps, plus que je ne vous en ai, je le crains, octroyé depuis quelques trop longues années, et ce, parce que je ne vois que vous qui puissiez m’aider. Ne soyez pas mauvais cœur et acceptez par devant Dieu de seconder une âme en peine, une âme sur le chemin même de la rédemption, un ami qui vous a toujours estimée au-delà des innombrables afflictions.

Adoncques l’on vous dit grande marieuse, je vous ai connu mal mariée et nous le savons tous deux, cependant, souffrez d’entendre qu’il me faut prestement me ranger moi-même et qu’en cela, je ne pense qu’à vous pour me départir de ce guêpier fou qu’est pour moi la recherche de l’hymen véritable et des dots convenables.

Vous l’aurez comprise.
Adieu les boudoirs qui forgèrent ma triste renommée, je tire un trait là-dessus et je consens à ne plus guère m’enliser en les déboires des chairs délectables qu’offre si gentiment la liberté du libertin que je fus, que j’étais et que je ne serai plus.
Adieu les enfantillages d’une jeunesse passée et qu’il me sera toujours difficile de dispenser, car il est vrai que j’en rougis encore et qu’il est affreux d’avoir à se reprocher des turpitudes de cette sorte dont je ressens à présent tout le poids des remords.
Combien je me reproche l’encens dérobé, combien je ploie sous le fardeau de mes anciennes envies, combien je regrette les innombrables jupons soyeux, froufroutants et voluptueux si lestement troussés, mais qu’il soit su que s’il fallait, je promettrais un sacrifice expiatoire et que je me contente seulement de faire serment par devant l’autel de ne plus m’égarer de la vie. Toute cette folie m’aura fait sage et je vois désormais en le mariage la raison honorable à laquelle j’aspire, le pardon qu’il me faut prestement conquérir.

Je m’en remets dès lors à vous, qui êtes à ce point versée en les méandres d’une société que je ne survole plus qu’à peine, afin que vous mettiez à mon bras une gentille damoiselle qui me fera un héritier au sang pur, surpassant la tripotée de bâtard que j’eux pu avoir le malheur de semer jusqu’en les bas-fonds parisiens.

Bien sur m’aura-t-il été possible de mander soutien à la de Mortain, qui, je le crois, vous dépasse en renommée en ce domaine là, cependant, elle est par trop frigide et, en vérité, j’aime mieux à me tourner vers vous, car je suis assurée que point ce ne sont vos propres intérêts que vous serviriez, mais bien les miens, et que vous seriez mue par la volonté de ne guère faillir et de ne point propulser entre mes bras une donzelle qui n’a de noble que le titre et qui ne se tient pas.

Que Saint Jean vous garde.

    Le Duc de.
Madame.de.


Citation:
    Au Duc de ***,


Votre Grâce,
Cher et ancien ami,

La surprise est certes bonne, et il est grand mal que vous ne soyez point épistolier, car votre plume est avisée et bien droite, je le vois, et le plaisir vous lire est en bien des points égal a celui de vous voir.
Mais vous êtes bien vilain que de ne me solliciter que lorsque l'intérêt vous y pousse, et j'aurai grand peine à ne point vous en faire le reproche, mais vous vantez si bien les qualités de mon âme que je vais devoir plier.

Et qui donc me dit si grande marieuse ? Je n'ai fait que trouver bonne places à mes enfants, et sans la condition de feu Monsieur de ***, j'aurais eu bien des obstacles à les voir en leur rang d'aujourd'hui. Me dire mal mariée est médire. Vous êtes présomptueux, Duc, je vous en blâme. Je fus très heureuse, pour le peu que durèrent mes épousailles, et le veuvage est une liberté bien enviable, ne vous en déplaise.
Vous voir vous tourner vers le noble engagement est une grande surprise toutefois. Ainsi vous renoncez au péché ? Vous allez rendre triste bien de ces dames dont la vertu balance au gré des visites qu'elles reçoivent. Une belle retraite vous comblera, si votre épouse est jeune et vierge.

Si fait, il vous la faut dotée de ces qualités, sans lesquelles le mariage sera vain. A quoi bon une femme si l'on ne peut en tirer un héritier ? C'est en cela que la Mortain serait mauvaise marieuse, puisqu'elle se croit elle-même encore fertile. Elle vous aurait remis en les jupons de quelques matrones, et c'eut été du premier drôle. Non point, vous avez été bien guidé en m'écrivant. Trouvons donc à votre pied jeune femme qui saura à votre hymen faire l'honneur.
Elle pourrait être de grande noblesse, mais elle saura assurer la pérennité de ses terres et d'elle, vous ne tirerez pas grande richesse. Mieux vaut encore une baronne dont la rente vous sera entière, qu'une Marquise dont la dot ne sera que le titre et point les terres.

Allons, je crois que la jeune Josselinière est une héritière au renom incontestable. Son père, le Tri-Duc, est Pair de France et devient gâteux. Il a à coeur de bien marier ses héritiers, dont le premier fut par la noce fait Marquis. Un Duc, sans doute aucun, saura le flatter. Attention cependant, je crains que la graisse entre ses côtes n'en fasse guère une femme ardente. Ce sera pourtant là gage de la santé pour les futurs nouveaux-nés. Je la crois de douze années seulement. C'est l'âge où l'on marie ces enfants. Vite, vite n'hésitez point un moment.

Moins jeune peut-être ? Aimelina de Siarr. Vous me direz que son nom résonne de ce pénible accent d'Oc. C'est pourtant un parti des plus enviable. Déjà assurée d'un titre et d'un rang fixe et sûr, elle a la croupe charmante. Son bras gauche - où est-ce le droit - est atrophié, je dois vous l'avouer. Ne faites point le difficile, vous avez l'âge d'un grand père, mon ami, il vous faudra faire des concessions.

Alors ? Grosse ou manchotte ?

Chez Malemort vous trouverez de la bâtarde, mais celle du nom de Blanche est des rares légitimes. L'on la voit fleurir depuis le trépas de sa mère ; elle est Princesse. Voilà. Et outre un caractère de louve si elle tient bien de son sang, vous n'aurez nulle déconvenue avec elle. Je ne sais encore de quelles terres on l'a faite hériter, il faudrait vous en enquérir.

J'eusse été plus jeune, peut-être aurais-je cédé à vos passions, mais déjà mes menstrues ont cessé, et je me sens flétrir.
La chute de mon carrosse alors que je revenais de Champagne m'a causé bien du mal à la jambe, et les prix du bois touchant au zénith m'empêchent de me chauffer tant que j'en ai maints rhumatismes. La vieillesse est une tare. Vous avez bien raison de vous payer une nouvelle jeunesse par le mariage.

Je vous envoie bien du courage, Duc, et ne manquez pas de me faire savoir votre avenir.

    Madame de.
Madame.de.


Citation:
    A la Baronne de ***,


Liebe Baronin,

Je vous écris à dessein. Oh ! Ne me faites point de gros yeux, je sais mes torts, et vous direz que je ne prends plume pour votre personne que lorsque l'occasion fait le larron, et que je pourrai en tirer profit. Ma foi, je ne le nie pas, et même, j'irai le confesser si cela peut vous agréer, mais je vous prie de bien vouloir écouter mes dire, et répondre à mes interrogations.
Vous qui êtes à la frontières, non loin de l'Empire, tout de même en France, et proche de Bouillon, dites-moi tout.
Il se murmure en Paris que le Duché de Bouillon va être ré-octroyé par le Roi - lui ou ses sbires, après tout, nous savons tous que ce sont la Reine et Namaycush qui règnent en France. Je fus surprise : quel est donc l'état de la citadelle de Blanc Combaz ? Fut-elle prise ? L'a-t-on assiégée ? Car par ma foi ! Comment donc peut-on prétendre octroyer un lieu encore tenu par un rebelle frondeur ?
Oh certes, le nouvel anobli aura le titre, mais à quoi bon le titre si l'on ne peut jouir des terres, car après tout, il n'y a qu'un Duché de Bouillon, et nul n'en a délogé Eusaias et son épouse !

Il s'en passe de bien belles en la capitale, savez-vous. Oh si ! Croyez-le. L'on eut l'occasion il y a peu de mesurer les pertes de la ville après deux règnes de calamités. La bonne société était réunie chez Ella Durée, cette parvenue qui n'a guère d'autre mérite que la bonne cuisson du sucre. L'on vit là tous les amis de la Castelmaure : des gens raffinés.
Ailleurs, l'on ne voit plus rien. La Cour des Miracles est le nouveau marché. Si fait, je n'exagère pas ! L'on honore les brigands et les hérétiques, pendant que les bons et les pieux se font pendre et disgracier. Pardi, les déclarations de traîtrise n'ont jamais tant plu sur les royalistes pendant que l'on gracie d'anciens et présents vaut-rien.

Je ne blâme pas le Roi. Nul n'ira dire que je vais à l'encontre de sa lettre. Le Roi n'a pas de lettre, il n'ordonne rien, il ne fait rien. C'est bien simple, il signe ce que sa pintade bretonne lui mande de signer. J'ai appris qu'en Domaine Royal et à la Curia Regis, elle investit les offices pour y donner ses directives. Rendez-vous compte ! Une bretonne diriger ces hommes et ces femmes à qui la Bretagne pilla maints coffres et ôta tant de vies !
La guerre n'est pas même finie, l'on tarde à déclarer la paix. Pourtant, ce devrait être facile : elle mène les débats parait-il.
Si j'eus cru en sa bonne intelligence, je l'aurais même taxée d'user et d'abuser du syllogisme, mais non, elle préfère la grossièreté à la subtilité. C'est une idiote capricieuse.
Hier soir, je dînais avec le Maréchal de ***, qui revenu de campagne Toulousaine me contait sa surprise. De passage au salon des offices, le pauvre bougre a constaté avec effarement que la Curia Regis brasse du vent et se donne l'illusion d'avoir encore un pouvoir, pendant que le Roi et sa femelle du diable retrouvent les Princes de Pontoise et Montreuil - ceux-là même qui n'ont aucun mérite à prétendre à tels titres - pour décider de tout. Aux Grands Officiers le larbinat, aux incapables et aux passifs la gloire et le pouvoir. Tel est le nouvel ordre des choses.

Mais il me faut en revenir à Bouillon, puisque c'est là le motif de ma lettre. Les paris vont bon train parmi les médisants. L'on parle de Raoul de Montjoie, un Roi des lézards parait-il. Il y a tant de Rois de pacotille que cela ne m'étonnerait nullement, mais je ne sais foutrement pas qui est ce bougre. On le dit impérial. Soit. Je n'ai rien contre eux, mais pourquoi diantre donnerait-on à cet homme l'un des plus grand domaines Français ? Aurait-il apporté la Provence, la Lorraine et le Luxembourg dans le giron de la France ? Est-ce là ce que l'on appelle une Seigneurie vénale ?

Je le redis, si je ne l'ai déjà dit : élire son Roi est une foutaise ! Chacun nous a pris pour des pantins dignes de changer d'allégeance à la première pluie venue. Un jour l'on est fidèle à Dieu, le lendemain au Diable ! Allons, ce n'est pas sain. C'est ridicule.

Bien, je vous envoie mon fils pour deux mois, avec la présente. Allons, vous voyez bien que j'ai soin de vous, et que je ne suis pas ingrate. Votre réponse en revanche n'attendra pas son retour. Je vous presse. Ici, les choses vont vite.

    Madame de.
Baronin


Citation:

_______A Madame de ***



Meine liebe Freudin,



___Comment pourrais-je avoir l’once d’un reproche à vous faire étant moi-même fort damnable par mon silence. Ne suis-je pas autant coupable que vous de ne point avoir pris plume et vélin vous octroyant nouvelles de ma part ?
D’ailleurs vous êtes toute pardonnée de cet abandon partagé car je ne peux que louanger votre décision de me laisser votre chair et votre sang égayer les murs tristes de ma demeure.
Dieu m’est témoin, quel ravissement, quel trésor que vous m’avez fait là, d’avoir en mes lieux ce pinson si vif. Mille compliments à la bouche, l’insolence bravarde mais toujours finement dite et du ton le plus poli, quelle merveilleuse éducation que vous lui avez donnée, et j’ajouterai non sans quelques aigreurs à l’âme une éducation qui se perd en ces jours d’hui.


___Suivez néanmoins mon précieux conseil ma chère, mariez-le vite et sans trop tarder à un hymen bien né car j’ai pu observer votre drôle fort courtois avec le cotillon et qui au moindre mot de sa part battent du cil comme sottardes dans sa direction.
Choisissez-la point trop bêcheuse ni trop chaste comme cette Épine épouse d’un Josselinière qui fraichement en noce s’en va en pèlerinage loin de son mari pour soit disant se mettre dans les grâces du Très-Haut afin que celui-ci lui baille par miracle un fils. Soit cette Clémence est fort naïve, soit elle se sert de ce fallacieux prétexte pour fuir un époux qui n’est pas des plus fins à ce que j’ai pu ouïr.


___Mais me voilà bien mauvaise langue, moi qui me sers de mon veuvage comme une bonne excuse pour me complaire dans une existence recluse et j’y suis bienheureuse de ne plus subir les vilainies que cette "basse-Cour" amenée par la nouvelle couronne inflige au fleuron de notre noblesse.
Comme vous l’écrivîtes fort bien, amie, élire son Roy mais quelle gausserie que celle-là. Une foutaise de premier ordre et veuillez pardonner mon vulgaire, madame.


___Je dois quand même dire à mon corps défendant que le veuvage n’est pas la seule raison de mon éloignement de la vie publique, la panse me donne fort à souffrir malgré les nombreuses médecines qui ne soulagent en rien à mon pâtiement.
Et pour mettre une pierre sur le cairn, savez-vous que n’ose guère me déplacer en dehors de mes terres ? Il paraît que chez nos voisins champenois les armées ducales se comportent pire que mercenaires sans foi, donnant de l’épée à tout va jusqu’à ceux dont ils sont censés vie gardée.
Ah ma chère et bonne amie, plus rien ne m’étonne depuis que j’ai appris par mon cousin qu’en Gascogne on ne peut même plus faire confiance à l’amirauté royale qui canarde et coule sans raison des navires appartenant à la bonne et fidèle noblesse française. Tout se perd, tout va à bren dans le Royaume.


___Voyez comme je suis vile, je vous fais languir sur le sujet qui vous brûle de par son intérêt. Le Bouillon, votre couillu que vous affectionnez tant. Pour l’avoir vu de près, il n’est pas si bel homme qu’on le prétend, le nez bien trop proche du bec de rapace à mon goût, j’en fus déçue.
Ah, ma chère, maudissons ce fol de Roy Lévan troisième du nom qui on ne sait par quel courant d’air à travers les oreilles, se prit à décider qu’il fallait élire son Roy, et la décision ne revenant même pas à la haute noblesse qui aurait choisi avec un peu plus de discernement que le commun. Le populaire aura notre perte, je vous le dis et redis encore, je me répète. Gaussez-vous, peut-être la sénilité me guette, me voilà radotant comme vieille et chenue.


___Pour vous répondre avant que de me tancer et grincer des dents à mon sujet, et bien non, point de bannières royales sur l'horizon des terres du Bouillon. Pas le moindre vent mauvais annonçant des escarmouches dans la citadelle du duché souverain, pas un poil de soldat de la compagnie de notre souverain, pas même le reflet d'une lame, le néant absolu.
Le bastion étant bien gardé, je gage que notre Souverain dans un excès de prudence bien avisé n’a point voulu y envoyer ses armées s’y fendre crânes et os par là bas. Il est bien plus confortable d’offrir un titre sur papier avec son élégante signature en prime, et laisser le nouveau propriétaire des lieux s’y casser les dents. Quel cadeau empoisonné il a fait là à ce Lézard fait Roy.


___Si rien n’est venu effleurer mes oreilles concernant les terres du couillu, de la Bourgogne me vient des rumeurs par centaine et qui me semblent tant invraisemblables que je n’ose coucher sur le papier pareilles sornettes dans la crainte que vous me preniez pour folle à lier. Si vous savez quelque choses à ce propos, je vous serais gré d’éclairer mon ignorance, il est dit tant de chose que je ne puis y croire la moitié quand bien même crédule je sois restée malgré que jeunesse me soit passée.
Sur notre souverain, il y aurait tant à dire et à rire si cela n’était si grave, cet homme dirige nos vies et les affaires du Royaume quoique d’après la lecture de votre missive je suis plus encline à croire que c’est la Bretonne la vraie maîtresse de nos destinées.
A Dieu je demande le pardon de ma médisance, j’irai à confesse après messe et qu’Aristote me garde la langue et la plume d’ainsi vilipender sur notre bon Roy à qui je dois tout mon respect, je risque fort sinon de me mettre au diapason de la mode cette année, devenir traître/félon à la couronne et être ainsi déchue de mes titres et de mes terres tant chéries.


___Je vous laisse ma tendre et aimée amie, voilà notre pinson qui vient nous divertir de son verbe si exquis, et je dois bien vous avouer que ces deux mois vont me paraître bien court moi qui ai mes enfants si loin de mon giron. Ne vous ombragez pas d’inquiétude pour lui, je le traite à l’égal de mon aîné avec tous les égards d’une mère attentive, je veille sur votre oisillon comme s’il fut mien.


En la Sainte Garde de Dieu je vous laisse et prie pour que rien de fâcheux ne vienne vous pâtir.



______La Baronne de ***
Madame.de.


Citation:
    A la Baronne de ***,


Amie,

C'est le pompon ! Le bouquet ! La cerise sur le gâteau ! Le pichet qui fait déborder la cruche.
C'est officiel, le Royaume de France a une Dauphine, et quelle Dauphine ! Elle est à l'image de la Reine : une fille des rues, une gueuse sortie de la fange de la pire espèce ! Le Duc d'Orléans lui a donné le nom de son chien : Karyaan Lomalas.
Son nom, ma chère, est l'infamie même. En Maine, on la dit sorcière, et c'est à coup de charmes et de philtres qu'elle aura corrompu l'esprit faible monté sur le Trône. Le Roi est un faiblard, une quenouille. Il a le monde dans ses petits papiers quand tout le monde se rit de lui. C'est un naïf, en voici le cuisant exemple.
Lomalas léchait les contours de la chaise percée de la Malemort. Elle continua son ouvrage de Grand Lécheur Royal avec brio, et c'est ainsi que l'on en fit la Dauphine, la Régente.

Le Royaume pue, le Royaume empeste. Notre Roi parle chiffon avec la Guilde des Couturières, la Reine fait s'effondrer les Mines du Domaine Royal qui peut s'endetter alors au profit de son profond Périgord, de sa vieille Bretagne !

C'est une honte parmi toutes. Et pas la première de la semaine. La Justice a encore changé de main. L'immuable justice est le Fils instable de la Couronne. Un nouveau Grand Chancelier fut nommer. Que dis-je, nouveau ? Nenni. Grégoire d'Ailhaud, qui l'avait quittée après des années à végéter. L'efficacité de l'Office le plus long du monde n'en changera pas. L'on cherche à battre le record d'incapacité.
Serais-je un homme, et jeune, et fougueux ! Serais-je un Eusaias que j'appellerai la Pairie et la Curia Regis à la démission.
C'est se fourvoyer que d'obéir à ce Roi fantoche, à cette Reine sous influence, à ce Namaycush tout puissant et à cette nouvelle Dauphine qui n'a rien de Dauphinois. Lomalas, ça ne sonne pas Français. Qu'on la pende, qu'on la brûle. J'ai vu sa face. Elle est sombre. Elle a la couleur du gueux dans les champs, sa seule blancheur est du fard.

La nuit, l'on dit que de belles orgies ont lieu au Louvre. La Cour n'y est plus : il n'y a pas de vie de Cour. La Garde Robe se pique de faire du fromage. Les frusques empestent le vin. L'on voit les bigots se presser pour acclamer un Roi nu sur les tables, une Reine en prise à un Prince aveugle, et la Dauphine a genou tentait d'obtenir sa place : elle l'a eue. Sa langue a fait effet.
Quittez le Royaume, vous êtes proche de la frontière.
N'allez pas en Empire. C'est une vaste blague que cette immensité.

Allez en Castille. Allez en Aragon. Allez même en Bretagne, ils ont eu le bon sens de mettre dehors cette couronnée à coup de pied.

J'ai fait atteler. Je pars en Venise ! C'est l'été !

Adieu ma belle.

    Madame de.
Madame.de.


Citation:
    A la Maréchale de.


Ma chère Ahténais,

Venise pue et sombre dans les eaux ! L'on a beau les avertir, les vénitiens, ces drôles, ne pensent pas à fuir et croient qu'à faire grandir en hauteur les hôtels, ils resteront hors de l'eau. C'est singulier, et fort bête.
Je suis effrayée, et indisposée. L'air est humide, et le roulis incessant des canaux contre les murs et les gondoles me donnent l'envie d'uriner sans cesse.

Je sais ma foi que la France pue aussi et sombre tout autant, mais je ne résiste plus à venir me gausser de Messire Vonaffreux - il est ainsi nommé, même à Venise, et en latin : Vonaffrus - de sa bretonne et de son chien de chasse. Au moins, tout décadent soit le Royaume, il nous reste de quoi en rire.
Les Rois sont les bouffons du peuple, les fous de la valetaille.

Attendez-moi encore un peu, j'arrive.

    Madame de.
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