Afficher le menu
Information and comments (0)
<<   <   1, 2, 3   >   >>

[RP ouvert] Gargote : Au Tengu Immaculé.

Ria
[Parce que l’on a toujours un jardin secret…]

…Et que l’on devient souvent ce que les autres souhaitent que vous soyez, parfois au mépris de ce que vous êtes réellement.

Elle s’était réfugiée dans le secret de sa chambre en ces heures où la chaleur vous accable et où nul client ne vient. Profitant d’un peu de liberté et d’un moment bien à elle, Ria se tenait agenouillée au centre de la pièce plongée dans la pénombre, une boite oblong disposée avec soin devant elle.

Là se tenait le dernier souvenir de sa mère. La seule chose qu’elle ait conservée après le décès de ses parents et qui n’avait pas été vendu ou saisit. Elle n’en avait jamais parlé ni même montré ce que contenait la boite étroite. Son bref passage à Kumamoto l’en avait dissuadée et le long voyage qui avait suivit ne lui en avait pas offert l’opportunité.

Parce qu’elle manquait d’assurance et que ce qu’elle avait vu des femmes l’avait assez ébranlée pour se convaincre de la futilité de la chose, elle avait laissé de coté les enseignements de son enfance, se privant d’un art qu’elle appréciait.

Aux questions que lui avait posées Tsune sur ses capacités à chanter ou danser, elle avait toujours répondue par la négative. Demi mensonge qu’il avait été aisé de proférer de par la pudeur et la réserve qu’elle avait toujours eut pour elle-même. Elle n’aimait pas parler d’elle et encore moins des qualités qu’elle jugeait ne pas posséder.

Pourtant, ce jour, l’envie fut la plus forte et laissant de coté les souvenirs de ces femmes qu’elle jugeait plus gracieuses qu’elle ne le serait jamais, elle avait sorti la boite du fond du coffre où elle plaçait ses affaires. Après tout, personne ne la verrait et elle ne pouvait changer sa nature de femme.

De gestes emprunts de respect et délicatesse, elle ouvrit la boite et sorti les deux éventails soigneusement entreposés. Comment sa mère avait pu être en possession de ces deux objets, cela elle ne le saurait probablement jamais. Si elle s’était posé la question à plusieurs reprises, elle n’avait jamais été bien certaine de réellement vouloir le savoir. Elle avait toujours été convaincue que certain secrets n’étaient pas fait pour être révélés et celui-ci en faisait parti.

Effleurant du bout des doigts le bois finement gravé, elle saisit un éventail dans chaque main et lentement se releva, repoussant du pied la boite. Fermant les yeux, elle se plongea dans ses souvenirs, recherchant les moments où accompagnée du Shamisen de sa mère, elle dansait comme elle le lui avait enseigné.

La musique, qu’elle seule percevait, guidait ses gestes. Le petit claquement sec accompagnant le bref mouvement des poignets débuta la danse avec l’ouverture simultanée des deux éventails et lentement, avec des gestes précis, elle commença à exprimer les sentiments inspirés par les sons d’un instrument imaginaire mais bien vivant. Tout comme la musique, la danse ne s’explique pas, elle se vit par les mouvements et les expressions du corps.

Si les gestes furent quelque peu timides pour débuter, elle s’abandonna bientôt au seul plaisir de se mouvoir avec la grâce que confère l’exercice. Silence troublé par le léger glissement des pieds au sol et de l’air coupé par la lente course des éventails, elle laissa libre cours aux sentiments de paix intérieure la guider. L’esprit vide de toutes pensées, elle se livrait corps et âme à cet art depuis trop longtemps délaissé.
Himi
[Du port au Tengu… À la recherche d’un terrier]

A-t-on des réactions toutes faites pour certaines situations ? Comme si l’esprit savait exactement ce qu’il fallait faire pour aller mieux, pour se rassurer, pour s’oublier ?
C’est une question ouverte, peut-être, peut-être pas, laissons donc quelques mystères à la vie.

Mais dans le cas de l’Himi, voir mourir sous ses yeux poupons, un enfant à peine plus âgé qu’elle ? Quelle est la réaction à avoir une fois arrivé chez-soi…
Il y a mille réactions que la fillette aurait pu avoir. Mais surtout beaucoup de critères qui décident de ses réactions.
Déjà il était tard pour rentrer, enfin tard pour une enfant de moins de dix ans. Plusieurs lanternes et lampions étaient d’ailleurs déjà allumés. Elle était donc en faute, une petite ligne de plus à son ardoise. Oh elle était généralement plutôt sage, juste assez pour que Ria et Tsune en soient satisfaits. Ça n’existe pas un enfant totalement sage. Elle en était un bon exemple.
La grande salle était vide, ce qui était assez rare ces derniers temps, et elle en était soulagée. Ses parents adoptifs devaient vaguer à d’autres activités, mais tant mieux, rien de pire que de se faire surprendre à rentrer à cette heure là, la morve au nez et les yeux humides.

Si elle avait été plus âgée ça aurait été différent, déjà elle devrait avoir un visage propre et surtout afficher un air stoïque. Pour se calmer et se changer les idées elle aurait longuement fait infuser un thé, qu’elle aurait bu brûlant, et ensuite, ça aurait été mieux.

Mais voilà, elle n’avait pas cet âge-là. Elle se contenta simplement de renifler bruyamment et d’essuyer son nez d’un coup de manche pour se diriger vers le coin de la salle qui l’inspirait le plus. Quand on a honte, froid, peur, il n’y a qu’une seule chose qui nous attire: une cachette rassurante.
Sa cible, une des petites tables sur laquelle on servait les boissons. En deux trois mouvements elle s’était glissé dessous et avait posé sa joue contre la moiteur du tatami. Puis, elle s'était recroquevillée sur elle-même pour en faire dépasser le moins possible deux trois bouts de kimono et un pied, au pire.

Ici, même si elle tremblait de froid, elle pouvait librement laisser couler quelques larmes aussi salées que la mer, et lorsqu’elle se sera bien fatiguée, elle pourrait même s’endormir à même le sol.

S’ils la trouvaient là, ils ne comprendraient pas… Mais en cas de crise, qui comprend les réactions humaines ?
Ria
Elle était à vaquer à ses occupations au sein de la gargote, rangeant et nettoyant tout ce qui pouvait l’être. Peu de passage en cette journée, aussi avait-elle profité de l’occasion. Himi était repartie vagabonder sitôt le repas de la mi-journée englouti et Tsune, toujours fort occupé s’était également absenté. Rien ni personne pour troubler cette après midi paisible et bien occupée.

Elle n’avait pas vue le temps passer et personne n’était d’avantage venu la tirer de ses occupations pour le lui rappeler, aussi terminant son nettoyage méticuleux, se trouva-t-elle quelque peu ennuyée de voir que le soleil amorçait sa descente. Ne souhaitant pas se mettre en retard pour le repas, elle dévala les escaliers et obliquant aux pieds de ceux-ci, alla pour s’engager dans la pièce qui servait de garde manger quand quelque chose l’interpella.

Elle s’arrêta net dans sa course et revenant sur ses pas, chercha du regard ce qui n’allait pas dans la pièce, un peu perplexe. Elle mit un certain temps avant de comprendre de quoi il en retournait puis s’approchant doucement, s’agenouilla à coté de la table d’où dépassait un petit pied qui ne lui était pas inconnu. Elle n’avait guère eut besoin d’entendre les faibles reniflements pour se rendre compte que quelque chose n’allait pas.

Ne souhaitant pas la surprendre au risque qu’elle se blesse, elle l’interpella doucement :

Himi-chan ? Que ce passe t-il ?

S’il y avait bien une chose que Ria ne supportait pas, c’était le mal que l’on pouvait faire aux enfants et surtout à sa petite Himi. Et la voir ainsi, recroquevillée sous une table à renifler son chagrin lui rappelait le jour où elle l’avait trouvée dans une posture similaire, à la différence qu’elle était assise sur une pierre.

Tendant doucement une main pour l’inviter à la saisir et sortir de sa cachette, elle attendit patiemment que la fillette veuille bien lui expliquer les événements qui la bouleversait au point d’en pleurer en cachette.
Himi
Son petit coin était si rassurant qu'elle était à la limite du sommeil, les bruits aux alentours étaient toujours présents à ses oreilles, bien qu'un peu plus étouffés.
Elle entendu pourtant Ria s'approcher et l'appeler avec douceur, il ne fallait généralement pas plus à l'enfant pour réagir.
Sa petit main quitta donc la sécurité de la table, elle resta quelques instant dans l'air, hésitante, avant de répondre à l'invitation en posant sa paume contre cele de sa sauveuse.
Himi resta sans un mot quand elle sortit en rampant de sa cachette. Le regard bas et le chignon qui se faisait la malle. En deux trois mouvements la fillette s'aventura dans les bras de Ria, posant son front contre son kimono, elle commença son récit d'une voix enrouée.


- Ça a commencé par une bêtise...


Il fallait bien commencé par quelques chose, alors autant aller de suite à l'essentiel.
Himi lui raconta comment elle s'était aventuré toute seule sur la plage en début d'après-midi. Comment elle avait vu ce garçon qui pleurait. Comment il était spécial. Comment il ne parlait pas, comme les fourmis. Comment il l'avait emmené au port.

Elle se tut pendant quelques secondes, à partir de là, ça s'embrouillait.

Là, elle parla de comment le garçon s'était presque transformé en mouette. Comment l'esprit de la mer, Susanoo, l'avait fait tomber dans l'eau. Comment il s'était noyé. Comment l'ancêtre était arrivé et avait emmené le garçon au pays des ancêtres. Comment elle était rentrée ici et finalement son mal-être.


... Et moi, j'ai rien pu faire pour l'aider et j'ai peur aussi.

Sa fin de phrase se ponctua d'un nouveau silence et d'un regard fuyant empli de culpabilité.
Tsunesaburo
[Vol au dessus d'un nid de Pygargue]

Parfois, il y a des jours où l'on sait en se levant le matin, que l'on ferait mieux de rester coucher. Ce jour là n'en était pas un. Mauvais, mais plus traitre, il avait l'apparence d'une belle journée. Le climat indulgent y était peut être pour quelque chose. Quoiqu'il en soit, Tsune avait décidé, pour la première fois depuis bien longtemps de retourner à la forge. Le village était calme et prospère, il avait enfin assez de temps pour œuvrer à un projet qui lui tenait à cœur.

Les fourneaux rugissaient déjà depuis un moment quand la première douleur se fit ressentir, perçante et traitre, premier signe d'une journée ensoleillée qui n'attendait qu'une seule chose pour virer à la tempête. En levant le lourd marteau de forgeron, la dure réalité s'était rappelée à lui. La cicatrice sous son aile droite le brulait vivement, à tel point qu'il avait cru sur le moment avoir touché une pièce de métal chauffée à blanc. Le projet qui ne devait prendre pas plus d'une heure malgré sa taille imposante, allait donc lui prendre toute la matinée, au prix de la sueur et de la douleur, mais aussi de l'amertume. Ce qu'il ne supportait pas avant tout, c'était d'être diminué, et de devoir agir comme tel.


Dans l'après midi, donc, il fit demander de l'aide à quelques paysans du coin pour l'aider à porter l'étrange objet sorti de sa forge. Une longue barre de fer, souple, surmontée d'une boule, avec un câble de métal tressé intégré au bout d'un anneau. Bien des gens n'avaient jamais rien vu de tel, et il faut dire qu'il avait mis bien du temps à réaliser ce projet, depuis le temps qu'il en parlait. Certains avaient même peur de s'en approcher, ce qui n'aide pas beaucoup à trouver des volontaires pour ramener la chose jusqu'à la gargote.


La gargote, justement, était déserte. Himi...sans doute partie jouer, quelque part, jamais très loin...peut être même sous le plancher sur lequel il marchait. Il y a toujours un peu d'espace entre la terre et le rez de chaussée. Ria, sans doute était elle allée chercher quelque chose sur le marché pour le repas du soir. En vérité, il ne savait pas vraiment, mais comme chacun avait ses habitudes et n'y dérogeait pas trop, il ne s'inquiéta pas du remue ménage qu'il allait provoquer. Le plan était simple, porter la longue et fine masse de fer jusque dans la pièce principale. Puis, il monterait sur le toit, ferait pendre une corde assez solide pour supporter la masse, et remonterait le tout par le conduit, bien large, de la cheminée. Ni une, ni deux, en deux temps, trois mouvements, c'était fait. Il ferait l'effort de tirer le tout sur le toit seul, mais comme on l'avait aidé jusque là en échange d'un saké gratuit... il lui restait des forces.


En revanche, ce qu'il n'avait pas prévu, c'était l'état du toit. La dernière fois qu'il y était monté, c'était lors du séisme, l'année d'avant, qui avait ravagé les mines. Il était alors en Uchi. Depuis cette rénovation rapide, le climat local avait bien entamé le reste du toit. Et pas seulement, une colonie de mouettes était venue élire domicile sur les ardoises du bien mal nommé Tengu. Couvert de fientes, le toit était glissant et dangereux, d'autant plus que certaines ardoises étaient brisées et risquaient à tout moment de céder sous le poids du visiteur pas si aérien que ça. Plusieurs heures de travail imprévues avaient été nécessaires pour percer une encoche étanche dans la toiture, afin que le poteau vienne s'encastrer à l'étage du dessous ou un travail minutieux avait été réalisé pour accueillir l'ouvrage, et enfin rénover les alentours le plus sommairement possible. Le porte drapeau était fièrement dressé, droit vers le ciel, et Kokura comptait un nouveau sommet, monument de hauteur, mais à l'image du reste du village, modeste et raisonnable. Il patienta un instant pour vérifier que les effets du vent ne remettaient pas en cause tous ses efforts, et se mit même à le secouer comme un ours s'acharne sur un arbre pour faire tomber quelques fruits.


Enfin, il pouvait se reposer, oublier la fatigue de cette déjà trop longue journée, faire abstraction de la douleur ravivée sous son bras... se coucher un instant sur le toit, profiter du soleil en observant le paysage marin...et... se rendre compte que son kimono, ses cheveux, et sa main droite trempaient dans du guano de mouette encore frais, et en quantité. Pire encore, son porte drapeau était déjà colonisé. Le Tengu immaculé était à présent souillé de fientes, épaisses, verdâtres, nauséabondes, tantôt liquides et coulantes, et parfois sèches ou agrémentées de plumes collées. C'en était trop. Relevé dans un geste de dégoût, il brandit son poing vers l'affreuse mouette qui avait déjà élu domicile sur la pointe, comme un explorateur pose à juste titre un drapeau sur un sommet inexploré. Les insultes fusèrent, il en perdit haleine, et se mit même à jeter des débris d'ardoise brisée pour essayer d'atteindre le volatile profane, en vain. Trop occupé à regarder vers le haut, il ne vit pas le terrible spectacle qui se jouait au port, ni même Himi qui venait de rentrer à toute vitesse.


La mouette se redressa soudain, alerte. Il y eut un instant pesant dans l'air parmi les volatiles, qui tous semblaient se regarder. Pour Tsune, pourtant fier de la richesse de son vocabulaire d'insultes étendu, il y eut aussi un instant de flottement, et de silence, à court de mots et à bout de souffle. Et puis le calme revenu sur le toit de la gargote se brisa d'un seul coup, en une volée de plume, un assaut soudain, invisible et silencieux. Toutes les mouettes paniquèrent en même temps et s’envolèrent dans le plus grand désordre alors même qu'elles avaient tout juste daigné s'écarter un peu quand lui, armée de ses outils de forge et de son énorme porte drapeau, était apparu sur le toit. Par prétention peut être, ou en tout cas par contentement, Tsune s'imagina un instant être la source de cette fuite et jura de nouveau, maudissant les oiseaux de malheur. Mais bien rapidement, un bruit étrange, désagréable, comme celui d'ongles sur un tableau, ou plutôt de serres acérées griffant du métal dans son dos, lui firent changer d'avis.


En se retournant, il ne put que se baisser, par réflexe, écrasé par la surprise, et aussi par appréhension. Sous les rayons perçants du soleil de ce mois d'été, une masse énorme, avec de longues ailes plus larges que l'étendue des bras d'un homme, venait de détrôner la mouette. Le rapace majestueux, comme Ulysse à son retour en son palais, scrutait les prétendants au trône en fuite. Tsune l'observa un instant du mieux qu'il put, en se protégeant du soleil d'une main, et finit par s'incliner totalement, mais cette fois par respect. L'homme au regard aquilin regardait l'animal, qui venait de poser son regard sur lui. Un pygargue empereur, énorme rapace en vagabondage, une femelle sans doute au vu de sa taille, mais pour l’ornithologue occasionnel, un Tengu, en visite sur son toit. Le silence s'était fait, et une drôle de relation s'installait dans ce si bref instant. Et puis soudain, l'animal se lança si fort et si bien, que le bruissement des ailes et le souffle de l'air persuada Tsune que l'oiseau, ou peut être le Kami, s'élançait sur lui, pour lui arracher les yeux, alors qu'il ne faisait que passer au dessus de sa tête pour donner la chasse à une mouette, ou qui sait, aller se rabattre sur un poisson flottant dans le port.



Il n'eut guère le temps de se remettre de son émotion. Un Tengu, ici, chez lui, ce ne pouvait être qu'un signe. Surtout à la manière dont il l'avait regardé! Restait à savoir quel signe. Il suivait l'oiseau des yeux, tournoyant, et piquant dans la zizanie des lourdes mouettes qui semblaient épinglées dans le ciel en comparaison. Méditant à l'augure, il essayait de se remémorer les particularités du Tengu véritable. Évidemment, il pensa à des nouvelles, qui ne pourraient être que mauvaises, en provenance de sa famille. Puis, comme Otomo était en alerte, il se demanda si cela ne pouvait être présage de guerre à venir. Mais iie...iie... ce ne pouvait être cela, le Tengu est défenseur du Shintoïsme, et grand pourfendeur du Bouddhisme... Il n'y avait pas trop de risques à Kokura.



Puis il haussa un sourcil en songeant à une dernière caractéristique, celle de protecteur des orphelins et des enfants perdus. L'oiseau avait disparu à l'horizon, déjà, et il se trouvait bien bête, sur son toit, avec le nouveau jouet de la petite Himi (et aussi le sien, il faut le dire). Il était monté pour installer un cerf volant sur le toit, qu'on remarque la gargote de loin, même en dehors de la ville. Il songeait à Himi, et peut être à l'éventualité qu'on ait retrouvé ses parents quelque part, ou que quelque chose soit arrivé la concernant, quand il entendit appeler depuis la rue. Et c'était lui qu'on interpellait. La rumeur enflait vite à Kokura, le village était petit. Un paysan, sans dents, criait à tout va qu'il était arrivé malheur au port, et qu'un enfant flottait, inanimé entre le bord et le Susanoo. Peut être était ce parce qu'il n'avait pas de dents, ou parce que la peur rend sourd, mais il fallut un certain temps et quelques répétitions pour qu'il réalise. La journée avait si bien commencé...ce ne pouvait être possible.


Sans plus de réflexion, parce qu'il avait soudain peur pour Himi, parce qu'il était Shomin, parce que le paysan criait, parce qu'il y avait un Tengu qui lui avait apporté un mauvais augure, il quitta le toit de la manière la plus rapide et la plus paniquée qu'on ait connue dans tout le Nippon. Plutôt que de redescendre en passant par l’intérieur de la gargote, il saisit la corde arrimée au toit, et se jeta plus ou moins en rappel le long de la façade, abandonnant ses zoris dans la chute, pour courir en tabis dans la rue jusqu'au port, débraillé, couvert de fientes, un bras en écharpe alors que l'autre baltait au rythme de la course effrénée. Le Susanoo...la silhouette d'un vieille homme...les saccades de la course et le souffle qui ne reviendrait pas avant un moment, un vieil homme, figé, le bord, puis... plus rien.


Dans le ciel, la mouette qui rêvait d'autres sommets y avait laissé des plumes.

(hrp: pour des informations sur le pygargue...commencez par regarder le lien de la chanson dans le titre. L'oiseau sur la couverture en est un, plus connu sous le nom d'aigle américain. Le pygargue empereur est originaire du Japon et de Russie, notamment Hokkaïdo, mais il vagabonde parfois jusqu'en Chine.
Ria
Elle referma doucement les doigts sur la petite main qui vint se poser en confiance sur la sienne, l’aidant à quitter l’abri tout relatif de la table et accueillit la fillette entre ses bras comme si souvent. Elle ne pu retenir un léger sourire au premier propos de l’enfant. Beaucoup de choses survenaient à partir d’une simple bêtise et pas seulement que des mauvaises, mais elle garda pour elle cette réflexion, sentant bien qu’Himi avait besoin de parler. Et en effet, elle parla. D’abord avec cohérence, bien que le débit fut quelque peu rapide, mais Ria avait pu saisir et comprendre.

Himi avait désobéit, c’était un fait, mais Ria ne comprenait pas réellement pourquoi elle se mettait dans cet état pour cette bêtise avouée et donc à demi pardonnée. S’il y avait bien une chose que Tsune et elle-même appréciaient chez Himi, c’était sa franchise, même dans les situations où elle était en faute. Enfant vive et intelligente, il n’y avait jamais eut besoin de la punir et c’était peut-être ce qui faisait que la fillette se confiait si facilement à eux. Discuter, expliquer et trouver ensemble des solutions à tous les problèmes qui pouvaient survenir.

L’enfant fit une pause dans son récit, l’étreinte de Ria se resserra. Et les mots finirent par revenir, s’enchainant les uns aux autres, devenant parfois incompréhensible. Son cœur se serra vivement, pour cet enfant mort tragiquement mais également à la pensée que cela aurait pu être Himi et elle n’avait même pas été présente au port à ce moment là… Aurait-elle pu y changer quelque chose si elle avait été présente à son poste ? Elle n’en était pas certaine mais songer que cela s’était déroulé sur un lieu dont elle avait surveillance la mit mal à l’aise. Elle ne comprenait que trop bien le sentiment qui étreignait la fillette.

Himi…

Déposant les lèvres contre le sommet de la tête d’Himi, elle la berça doucement, cherchant les mots qui auraient pu la réconforter.

On ne peut lutter contre les kamis et tu n’es en rien responsable de ce qui est arrivé Himi. Tu as essayé de l’aider, les kamis en ont décidés autrement… Pleure Himi, cris si tu en ressens le besoin mais tu n’es pas fautive. Cela devait arriver, avec ou sans ta présence.

Cruelle punition que venait de ce voir infliger la fillette et dur réalité des choses pour Ria. Tsune avait raison, on ne pouvait préserver ceux qu’on aime du malheur. Il faisait parti du quotidien et fermer les yeux n’y changeait rien si ce n’est qu’on en souffrait toujours plus que nécessaire.
Himi
Pleurer ? Elle le pouvait donc. La question était bête, mais pas forcément pour la fillette. Avant son arrivée au Tengu elle avait l'interdiction de montrer le moindre sentiment au risque d'être durement réprimandée. Cela l'avait marqué et la rendait quotidiennement moins pleurnicharde qu'un enfant "normal" de son âge.
Mais tant de choses avaient changé depuis son arrivée ici, on l'écoutait quand elle parlait et surtout on la croyait. Alors Himi osait dire la vérité et se confier dès qu'elle le pouvait.

De plus sur ce coup Ria ne mettait pas en doute sa version des choses, elle n'avait pas levé le ton, même pas durant un quart de seconde.

Himi s'en surprenait toujours.
Ici, on tenait à elle.

Elle écouta la réaction de Ria le visage enfoui contre son kimono, humant à plein poumon l'odeur rassurante qui collait aux tissus. Ça allait déjà mieux. L'explication des kamis était convaincante, injuste, mais convaincante. La gamine ne mettrait jamais en doute des kamis. Ils ont tous les droits.

Bercée et entourée comme une petite chose fragile, ce qui en soit n'était pas si loin de la vérité, Himi osa pleurer librement, et fort en plus durant de longues minutes. L'exercice et la dure journée qu'elle se trimballait eurent le dernier mot.
Entre deux hoquets, elle s'endormit tout contre Ria, pas vraiment le sommeil le plus réparateur du monde, mais celui qui nous aide à aller mieux.
Ria
Elle se sentait désarmée face aux pleures de la fillette, mais elle savait qu’il était nécessaire de laisser évacuer cette tension. Elle ne pouvait faire mieux que de la soutenir dans cette épreuve et laisser ses sentiments maternels prendre le dessus. Himi avait ce don inconscient de se faire aimer sans jamais rien exiger.

Peu à peu, les sanglots s’étouffèrent, laissant place à une respiration plus profonde et régulière, indiquant à Ria que l’enfant avait finie par s’endormir. La gardant blottie contre elle, elle se leva et la porta à l’étage avant de la coucher délicatement dans son futon.

Il faudrait probablement du temps à l’enfant pour accepter le destin du jeune garçon mais petit à petit, le souvenir s’estomperait tout comme le passé dont Himi se refusait à parler.

Elle resta auprès de la fillette un long moment, s’assurant qu’elle n’aurait pas besoin d’elle avant qu’elle ne retourne dans la grande salle pour y faire ce qu’elle avait à faire.

Chassant doucement les mèches qui barraient le front d’Himi, elle vint y déposer un baiser en murmurant : « Dors Himi, tu es en sécurité ici. » puis sans un bruit, quitta la chambre pour retourner vaquer à ses occupations, sans trop s’éloigner cependant.

Elle espérait le retour de Tsune afin de lui parler de tout ceci et peut-être en savoir d’avantage sur les événements survenu.
Ria
De retour de voyage

Quelques jours de repos loin des charges habituelles avaient fait le plus grand bien. Pourtant, c’est avec une certaine hâte qu’elle avait retrouvée l’univers familier de la gargote où elle logeait depuis quelques temps déjà.

Himi avait bien vite reprit ses habitudes, disparaissant dès que possible avec ses jouets pour inventer mille et une aventures qu’elle s’empresserait de raconter le soir venu.

Le stock de galettes avait été reconstitué, emplissant la gargote d’une douce odeur de pâte de riz cuite sur la pierre du feu.

Ria avait retrouvée ses amis avec un réel plaisir. S’était proposée pour aider Asami à la préparation de ses noces, trompant ainsi la vague de mélancolie qui l’avait saisit à Nagasaki et qui n’avait cessée de grandir à mesure que passaient les jours.

Parfois distraite, souvent distante, elle accomplissait machinalement ses tâches quotidienne, répétant des gestes maintes fois effectués avec un détachement frisant l’indifférence.

Et le soir venu, elle s’enfermait seule dans la chambre qui lui avait été attribuée à son arrivée, restant de longues heures prostrée, assise sur son futon. Retarder autant que possible le moment où les rêves prendraient le dessus sur sa raison, jusqu’au moment ou l’épuisement l’emportait.

Les souvenirs se bousculaient, se mélangeaient sans plus aucune signification que celle de sa plus grande peur, occultant les visages, les situations et les dénouements. L’immense solitude se matérialisa sous la forme d’une vague, dévastant tout sur son passage et l’entrainant dans les profondeurs.

Résignée, elle s’abandonnait à l’oubli, cessant de lutter contre le courant… Pour se réveiller en sursaut, haletante et fiévreuse. L’état du futon disait assez la lutte qu’elle avait menée et la douleur lancinante qui lui barrait le front, assez la fatigue qu’elle accumulait. Pourtant, comme chaque jour, elle se leva pour honorer les tâches qui lui incombaient.
Ria
[Départ]

La décision s’était imposé d’elle-même, créant un vide bien plus grand encore que ce qu’elle avait osée imaginer. La discussion avait tournée court. Pas un geste, pas une parole pour tenter de lui faire changer d’avis. C’était peut-être mieux ainsi, au moins avait-elle réussie à garder le peu de courage qu’il lui restait et ne pas fondre en larme devant lui.

Il n’avait pas comprit ce qu’elle avait essayé de lui expliquer. Peut-être qu’elle s’était mal exprimé ou peut-être pas assez ouvertement. Elle avait eut peur de voir son argumentation balayé comme un château de sable par la marée et céder une fois encore sans que soit résolu le problème. En dehors de ses kobans, elle n’avait jamais rien pu lui refuser.

La passion des premiers mois s’était éteinte ne laissant qu’un vague sentiment d’habitude. Elle le voyait bien, ainsi que le fossé qui se creusait un peu plus chaque jour sans qu’elle ne puisse rien y faire. La complicité s’estompait, l’affectif disparaissait. Elle aurait volontiers donné quelques années de sa vie pour retrouver ces moments simples et tendres de soirées à se blottir l’un contre l’autre pour discuter de tout et de rien.

Peut-être était-ce sa faute à elle. Dans sa crainte de mettre mal à l’aise les autres, elle avait prit des distances, ne glissait plus ses mains dans les siennes discrètement, ne venait plus s’appuyer entre ses bras. Ce sentiment d’être acceptée à défaut d’être aimée, d’avoir un quelconque rôle affectif pour cet homme dont elle ne savait jamais ce qu’il pensait ni ce qu’il ressentait.

Cruelle ironie de la chose, il lui avait demandé ce qu’elle pensait du mariage en retour à une question qui lui avait été posée par Asami plus tôt. Non, elle n’y songeait même pas. Comment l’aurait-elle pu ? Comment pourrait-elle se bercer d’illusion alors qu’il n’avait même pas été capable de lui dire ce qu’elle représentait pour lui ? Rien. Elle n’était absolument rien.

Elle n’avait pu dormir de la nuit et l’aube n’était pas sitôt apparue que ses effets étaient empaquetés soigneusement et la chambre rangée. Comme chaque jour, elle était descendue pour préparer le repas du matin, accueillant Himi d’un sourire et d’un baiser affectueux. Le plus dur restait à venir. Expliquer à la fillette qu’elle ne vivrait plus avec eux. Qu’elle avait besoin de remettre de l’ordre dans sa tête.

Himi protesterait peut-être mais Ria la savait intelligente. Elle comprendrait. Rien ne changerait de leurs habitudes en dehors du fait qu’elle ne dormirait plus ici. Elle viendrait chaque jour s’occuper d’elle et elles iraient jouer, se promener et apprendre comme à leurs habitudes. Elle ne l’abandonnait pas, elle serait toujours là pour elle. L’enfant aurait une fois de plus raison : les histoires de grands, c’est toujours compliqués.

La journée ne faisait que commencer et peut-être qu’Himi prendrait plaisir à l’aménagement de la petite cabane au milieu des rizières, trouvant prétexte à mille jeux de son imaginaire. Il y aurait également l’aide au mariage d’Asami et Lujan à fournir. Il y aurait de quoi s’occuper et laisser de coté les tristes nouvelles. Au moins pour quelques heures…
Himi
Depuis le retour à Kokura beaucoup de chose avait changé dans l'univers de la petite Himi, de un les abris qu'elle avait fourni à ses fourmis c'étaient tous effondrés durant une nuit pluvieuse écrasant sans ménagement quelques dizaines de ses petites protégés. Un drame dans son monde. Mais il y en avait un deuxième de choc, et celui-là bien plus grand qu'une fourmi rouge : Ria vivait ailleurs.
Et ça, elle ne pouvait pas le concevoir. Elle avait chouiné, supplié et même tenté d'expliquer avec ses mots pourquoi elle ne pouvait pas partir.
La gargote c'était la sécurité, le foyer, c'était l'endroit où on se sentait le mieux. Pourquoi vouloir partir, et sans elle, ni Tsune ? C'était à ne plus rien y comprendre.

Dans la tête d'Himi "le Tengu Immaculé" était comme son nom l'indique un grand oiseau, Tsune c'était la tête, avec un bec tout piquant pour faire partir ceux qui effrayent, mais une tête gentille et duveteuse avec ceux qui le méritent, Ria était comme les ailes, toujours là quand il le faut et d'une efficacité rare, Himi se voyait comme une petite plume qui virevolte de droite à gauche. L'image la faisait toujours sourire.

...Mais si on enlève les ailes... Plus rien n'allait aller ! Et ça serait la chute assurée.

Elle l'avait beau l'expliqué de droite à gauche ça, personne ne semblait croire à son argument. Les grands étaient trop complexe pour qu'elle arrive à les comprendre.

Résignée l'enfant c'était un peu renfermée dans son monde, celui fait de cailloux et d'insectes boueux, restant aussi de nombreuses heures à faire le guet en attendant une visite de Ria.
Avec une pointe d'espoir à chaque fois, qu'elle décide de revenir vivre au nid.
Ria
Peu à peu une certaine organisation se mettait en place. Les visites de Ria se faisaient aussi fréquentes qu’elle le pouvait, pour le bien d’Himi mais également pour le sien. Parce qu’au fond, le « Tengu » restait le seul lieu où elle se sentait vraiment chez elle. Finalement, c’était peut-être ça le bonheur. Passer du temps avec ceux qu’on aime sans rien attendre en retour. Vivre les instants présents, tout simplement.

Plusieurs jours s’étaient écoulés depuis son coup de froid, elle se sentait à présent parfaitement remise. Ce soir là, c’était à son tour de raconter une histoire à la fillette. Sacro-sainte habitude qu’il n’était pas question d’oublier sans risquer un rappel à l’ordre. C’était comme la toilette : obligatoire. Et quoi de mieux pour l’imaginaire mais également pour apprendre certaines valeurs qu’un conte où tout était permit, ou presque ?

On s’émerveillait parfois soi-même, jouant avec les ombres se dessinant sur les parois fines ou au plafond, illustrant les personnages et les situations à la lueur d’une lampe. C’était bien souvent tout autant un jeu pour celui qui racontait que pour celui qui écoutait. C’était du moins le cas pour Ria, qui prenait un grand plaisir à mettre en scène les histoires qu’elle contait à Himi.

Laissant le temps à Himi de s’installer confortablement, elle commença enfin son récit…


Citation:
Il était une fois un grand-père et une grand-mère. Ils n'avaient pas d'enfant, et cela les rendait bien tristes, aussi priaient-ils les dieux de leur en donner un :
"Même s'il n'est pas plus grand qu'un doigt de la main, nous aimerions tant avoir un enfant."

Et un jour, ils eurent un bébé, en effet pas plus grand qu'un doigt de la main. Le grand-père et la grand-mère étaient heureux de voir leur souhait exaucé, ils désiraient tellement avoir un enfant! Comme le petit garçon n'était pas plus haut qu'un doigt de la main, ils l'appelèrent "Issunboshi", ce qui veut dire "tout petit, minuscule", et l'élevèrent et le choyèrent.

Les années passèrent, mais Issunboshi ne grandissait pas : à trois ans, il était toujours aussi petit, à cinq ans aussi, et à dix ans il avait toujours la même taille qu'à sa naissance, la taille d'un doigt de la main. Cela causait bien du souci au grand-père et à la grand-mère, et ils avaient beau s'occuper de lui de leur mieux, le faire manger tant et plus, Issunboshi ne grandissait pas d'un centimètre.
Issunboshi était si petit qu'il ne pouvait pas aider la grand-mère à la maison, et quand il allait travailler aux champs avec le grand-père, il ne pouvait porter qu'un brin d'herbe à la fois.

Issunboshi était habile au chant et à la danse, mais il ne pouvait pas aider au travail à cause de sa petite taille, et cela l'attristait. De plus, les enfants du village se moquaient sans cesse de lui et l'appelaient "le nain, le nabot". Tout cela rendait Issunboshi fort triste, et il décida de partir en voyage. Il dit au grand-père et à la grand-mère :
"J'ai décidé de partir à la capitale, pour y trouver du travail."

Le grand-père et la grand-mère étaient bien tristes de se séparer d'Issunboshi, mais ils lui donnèrent un bol, une baguette et une aiguille et lui souhaitèrent bonne chance. Le petit garçon se coiffa du bol comme d'un parapluie, mit l'aiguille à sa ceinture en guise de sabre et s'appuyant sur la baguette à la façon d'une canne prit le départ.

Il marcha, marcha, mais la capitale était loin et le chemin encore bien long. En cours de route il rencontra une fourmi et lui demanda si la ville était encore loin. La fourmi lui dit :
"Coupe en diagonale par le pré de pissenlits, traverse le champ de prêles et suit la rivière."
Issunboshi la remercia et marcha au milieu des pissenlits puis des prêles jusqu'à ce qu'il arrive à la rivière. Là, le bol qui lui tenait lieu de parapluie devint un bateau, la baguette une perche et Issunboshi s'embarqua sur la rivière, ramant vigoureusement. Enfin, il arriva auprès d'un grand pont sur lequel passaient beaucoup de gens; voyant cette foule, Issunboshi se dit :
"Je suis arrivé à la capitale!" et descendit de bateau.

La capitale était une grande ville très peuplée et partout il y avait des gens qui marchaient d'un air affairé. Pour le tout petit Issunboshi, c'était un lieu dangereux, il risquait de se faire piétiner par les gens qui ne le voyaient pas, aussi se dit-il :
"Prenons garde à ne pas se faire écraser!" et se dirigea vers des rues plus calmes.

Il marcha au hasard et se trouva bientôt devant une magnifique résidence; c'était la résidence d'un puissant seigneur. Issunboshi s'avança jusqu'à l'entrée et appela :
"Excusez-moi! Y a-t-il quelqu'un?"
Un homme vint voir qui appelait, mais ne voyant pas le minuscule Issunboshi, il grommela :
"J'ai cru entendre appeler, mais il n'y a personne.", et allait repartir quand il entendit de nouveau appeler.
"Je suis là! A côté des chaussures!"

L'homme regarda vers les chaussures qui étaient posées devant la porte, et aperçut enfin Issunboshi; jamais de sa vie il n'avait vu un être aussi petit! Il se pencha, ramassa le minuscule enfant, le posa sur sa main, l'examina avec curiosité et l'emmena dans les appartements de la princesse. Là, Issunboshi dansa et chanta, et il était tellement gracieux que tout le monde fut enchanté. la princesse fut particulièrement charmée par cet enfant pas plus haut qu'un doigt de la main, et souhaita qu'il demeurât à ses côtés. Issunboshi resta donc à la résidence du seigneur et aidait la princesse : si elle lisait, il tournait les pages du livre; si elle faisait de la calligraphie, il préparait l'encre. Il s'entraînait également au maniement des armes avec l'aiguille qui lui tenait lieu de sabre. Il vivait ainsi aux côtés de la princesse, qui ne manquait jamais de l'emmener lorsqu'elle sortait se promener.

Un jour que la princesse était allée prier au temple Kiyomizu, et alors qu'elle revenait vers son palais, un bandit de grand chemin se précipita sur elle et tenta de l'enlever. Mais Issunboshi, qui accompagnait la princesse, dit de sa plus grosse voix :
"Arrière! Moi, Issunboshi, je suis là! Prends garde à toi, bandit!"
Le bandit, apercevant le minuscule Issunboshi, éclata de rire.
"Que peux donc une fourmi comme toi? Avorton!", lui dit-il méchamment, et il goba le pauvre Issunboshi comme une mouche. Mais Issunboshi, plein de courage, donnait des coups avec son aiguille dans l'estomac du bandit et remontait le long de sa gorge, le piquant de toutes ses forces. Le méchant se tordait de douleur et criait :
"Aïe, aïe!!", mais Issunboshi continuait de plus belle, et sortit d'un bond par les narines du bandit, qui s'enfuit en courant.

La princesse ramassa alors un objet que le bandit avait abandonné en prenant la fuite; c'était un maillet magique! Elle expliqua à Issunboshi :
"Ceci est un maillet magique, un trésor! Il suffit de le secouer en faisant un voeux, et celui-ci sera exaucé."

La princesse était reconnaissante à Issunboshi de l'avoir sauvée, aussi lui demanda-t-elle : "Que souhaites-tu?"
Le minuscule Issunboshi, pas plus grand qu'un doigt de la main, répondit immédiatement :
"Mon souhait est de devenir grand."

La princesse agita donc doucement le maillet magique devant Issunboshi, tout en prononçant ces paroles :
"Grandis, grandis! Que le petit Issunboshi devienne grand!"
Et il grandissait à vue d'oeil; bientôt la princesse eut devant elle un charmant jeune homme.
Le seigneur se réjouit en apprenant les exploits d'Issunboshi et sa métamorphose et lui donna la princesse en mariage. Le grand-père et la grand-mère vinrent les rejoindre à la capitale, et tous vécurent heureux





Source du conte : Issunboshi
Asami...
Asami était entrée timidement dans la gargote, comme si elle allait déranger quelqu'un.

Comme il était étrange de ne pas voir Ria installée à cette place qu'elle occupait tout le temps, quand elle était là.
Comme il était étrange de savoir qu'à l'étage, Himi n'était pas en train de jouer, et qu'il n'était pas dangereux de s'aventurer dans les escaliers où des billes pouvaient, parfois, être échouées, oubliées.
Comme il était étrange de ne pas s'attendre à ce que Tsune apparaisse de derrière les panneaux aux rideaux vert séparant la pièce principale d'un endroit qu'elle n'avait jamais découvert.

C'était tellement étrange qu'Asami se contenta de contrôler que tout soit en ordre avant de ressortir, un peu mélancolique.
Himi
Promenade hivernale

Peu de doute là-dessus, mais c'était l'hiver sur Kokura. Le froid, la neige, la brise glacée qui secouait les arbres nus, tout y étaient ! ça faisait sûrement des grognons mais surtout une heureuse, Himi-chan, la fillette était d'une humeur excellente, d'un matin jusqu'au soir. Son sourire, encore partiellement édenté, s'étendait constamment sur son visage rond.

Mais aujourd'hui plus que les autres, car la petite s'était donnée une mission ô combien importante, faire découvrir le monde à sa nouvelle amie, Keiko-chan !
Ce n'était un mystère pour personne Himi était pratiquement la seule enfant à vivre et à fréquenter les gargotes de Kokura, on dira que ce n'est sûrement pas la place pour une gamine d'environ 7 ans, mais c'était son choix : elle vivrait au "Tengu" et nulle part ailleurs ! De ce fait, elle croisait presque jamais des enfants...

Jusqu'à Keiko-chan !

Elle était belle, le visage lisse et le dos droit, un regard humble mais tout de même malicieux, elle semblait être solide et joueuse. Son kimono, crée à sa taille, rendait l'ensemble parfait... Ses petits bras en bois la rendait bien maniable...

Bois ? Oui, Keiko était une jolie poupée offerte par Ria.

Mais qu'importe pour Himi, elle la considérait comme une personne à part en tiers, elle s'adressait à elle avec détermination et ne la laissait jamais seule dans une pièce. Liée comme les 5 doigts de la main.

Toute la journée, la fillette fit visiter les moindres coins de la gargote, zigzaguant même parfois entre les clients pour atteindre un bout de table ou un coin de tatami spécialement intéressant.

L'extérieur n'y échappa pas, armée de son petit manteau et de ses zoris tout-terrain, la gamine fit des va et vient dans le froid afin d'apaiser la curiosité sans fin de son nouveau jouet.

Si Ria ou Tsune la surprenaient dans son aventure hivernale, ils s'inquiéteraient sûrement pour sa santé. Mais soit ! L'amusement avant tout ! Voilà le maître mot d'Himi.
Ria
[De la mort de l'âme vers sa renaissance...]

Qu’y a-t’il de plus beau que le sourire d’un enfant, de plus agréable que le son d’un rire librement exprimé ? De l’avis de Ria, rien d’autre. Voir Himi grandir et s’épanouir était une source inépuisable de contentements. Elle pouvait passer des heures à la regarder jouer, l’écouter raconter les histoires enchantées inventés au fil des expériences que la fillette faisait.

Et lorsque il était temps de laisser de cotés les jeux pour des choses un peu plus fastidieuses, elles s’installaient à l’écart pour apprendre la lecture et l’écriture quand il n’était pas question d’histoires sur les choses qui faisaient leur quotidien. Himi, sa fille, sa raison d’être. La seule qu’elle n’aurait jamais.

Tout tournerait dorénavant autour de la fillette, ne laissant plus place à quoi que ce soit d’autre. Elle lui avait rapporté sa collection de peignes et les deux éventails qu’elle avait conservée de sa mère avec la promesse de lui apprendre à danser pour pouvoir les exhiber lorsqu’elle le souhaiterait. Elles auraient tout temps pour cela.

Dans un autre coffret, elle avait réunie les outils et les différents cadeaux que Tsune lui avait fait au cours de leur vie commune. Des objets personnels qui n’avaient plus aucune valeur hors de leurs contextes et qu’elle abandonnait au même titre que sa vie de femme pour ne plus se concentrer que sur ses responsabilités de mère.

Il en ferait ce qu’il voudrait, ça n’avait plus vraiment d’importance. Elle l’avait déposé dans sa chambre, sachant que nul ne s’y rendait lorsqu’il était absent de la gargote. La seule chose qu’elle avait conservé était le grelot, mais pour le passer autour du cou d’Himi. Nul doute que la fillette apprécierait ce jouet inattendu et tintinnabulant.

Tourner le dos au passé et se consacrer au présent. Un jour peut-être, racontera-t-elle l’histoire des voyages de l’Ours et de la Chevrette, peut-être…

Il était temps de rejoindre Himi et sa poupée. Poursuivre la journée dans la gaieté et la tendresse. Le reste n’avait plus lieu d’exister.
See the RP information <<   <   1, 2, 3   >   >>
Copyright © JDWorks, Corbeaunoir & Elissa Ka | Update notes | Support us | 2008 - 2024
Special thanks to our amazing translators : Dunpeal (EN, PT), Eriti (IT), Azureus (FI)