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[RP fermé] Tout est dans la manière

Enzo.blackney
RP faussement fermé. Une demande par MP est juste demandé.


Sud-Est du Languedoc
Printemps 1460
Il fait soleil.



                  « Le temps d'apprendre à vivre, il est déjà trop tard. »
                  de Louis Aragon


Aux pieds des reliefs Languedocien, Enzo observait, attentif aux bruits, mystérieusement silencieux. De où il était, il pouvait remarqué, en contrebas les plaines sablonneuses qui lui rappelait un peu le Mont Saint-Michel, quoique ce fût bien différent. Rivage jalonné d’étang, pour le jeune homme, la géographie Languedocienne avait de ces particularités qui lui étaient bien étrangères. Non loin, un ruscaïres* prélevaient plusieurs types d’écorce, ce qui attira l’œil du Blackney un instant. Il y avait aussi de ses ramasseurs de lavande sauvages que le jeune homme observait avec plus d’attention. Les chaleurs des derniers jours avaient sans doute favorisé la monté de l’essence, ce qui amenait les ramasseurs à faire le tour, bien avant l’heure de la récolte. Puis, ils trouveront bien un médicastre pour leurs racheter leurs récoltes, ou pas. Mais ça lui importait peu. Sans doute allait-il prendre lui-même quelques feuilles de cette aspic, mais sans plus. Il lui connaissait quelques vertus qui pourraient bien lui être nécessaire. Ou pas. La vie filait, les gens travaillaient, les sons percutaient ses oreilles, et lui était là, aux pieds des reliefs, dans ce que plus tard on appellera la garriga**. Des bouquets de cistes s’agitaient alors que le vent sec se levait pour venir dépoussiéré les alentours. Un léger sourire vient s’afficher sur le visage du jeune homme, appréciant tout de même ce vent, aussi sec qu’il était, venir frôler sa peau et agité sa chevelure brune. Les sinoples retournèrent fixer ses plaines sablonneuses. Le soleil était à son zénith, et pour une fois, la mer ne semblait pas agité par la Tramontane, ce qui n’était pas à négligé vu la violence de ce vent. Certains diront qu’il rend fou, Enzo serait du genre à hausser les épaules sans autre commentaire. Il était comme ça, et on n’allait pas le changer, même si, parfois, il lui arrivait de parler. Un peu plus. Mais rarement des choses importantes.

    Quelle importance de parler des choses importantes après tout ?


C’est un après-midi de début juin à Narbonne, et le jeune homme avait décidé d’en profiter à sa manière. À son réveil, Gabrielle se retrouverait seule. Il était parti dès l'aube, peu de temps après qu'il l'ai laissé en plan dans cette taverne à Carcassonne.Il avait fait sa toilette, changé ses braies avec laquelle il avait passé sa courte nuit, chercher une chemise qu’il s’était ensuite passé par dessus la tête. Il avait ensuite mis ses canons d’avant-bras en cuir bouilli, et après nettoyage de ses bottes les avaient enfilé. Il s’était garni d’un chapeau, puis avait attaché son épée contre sa hanche gauche. Enzo était aussi comme ça. Très méthodique dans la façon de s’habiller. C’était toujours un peu négligé, mais constamment propre. Jamais la moindre trace sur ses bottes, et ses chemises devaient être impeccable. Ce jour, il avait opté pour une chemise colorée. Ce qui ravivait son teint bronzé et venait faire ressortir ses yeux verts. Le jeune homme avait ensuite agit avec ruse pour se départir d’Audoin. Rare était les fois où Enzo « fuyait » la vigilance de son garde, il s’était donc installé, au fil des années, un lien de confiance qui amena Audoin à ne pas douter des propos de son jeune maitre. Le but : Paraître le plus naturel possible. Ne rien dire à propos de cette taverne, et surtout, montré que cela va être une journée comme une autre.

C’est donc ainsi qu’il s’était retrouvé à quelques centaines de mètres d’altitudes à regarder les vagues en contrebas, et les bateaux qui cherchent a accosté au port de Narbonne, alors que la veille il était encore à Carcassonne. Le jeune homme avait les cheveux indisciplinés, et son allure négligée lui donnait un air d’adolescent rebelle. Son physique avenant avait tendance, parfois, à faire tourné les regard vers lui, mais le Blackney ne s’en intéressait pas plus que ça. Il était grand, atteignant facilement le mètre quatre-vingt dix. Il avait tout d’un homme, malgré qu’il soit élancé. La musculature s’était bien formée à force des années à se préparer à une carrière militaire prédestinée. Il s’était gardé cette petite barbe de quelques jours que Gabrielle semblait apprécié, alors que lui, ça le grattait indéniablement. L’épée du jeune homme était posée à ses côtés, tandis que les jambes étaient allongées, et que ses bras, envoyés un peu en arrière, étaient utilisés comme appui. S’il n’était pas si pudique, peut-être aurait-il osé retirer sa chemise, mais l’embarras que cela risquait de lui provoquer lui retira vite l’idée de la tête. A sa gauche, sa besace était ouverte, laissant entrevoir la couverture d’un livre. Chose rare à l’époque, et qu’Enzo garde précieusement. S’il existe une chose qu’il ne pourra jamais remplacé, c’est cet ouvrage qui a pour lui une valeur sentimentale bien plus grande que le prix qu’il pourrait avoir sur le marché. Il n’était peut-être pas dans une prairie, mais il était bien là. Ça fourmillait en contrebas, et ses sinoples surveillaient, se sentent peut-être inatteignable de où il était. D’un geste las, il se redressa un peu, et Enzo entreprit de délacer ses canons d’avant-bras qui le gardait chaud à ce niveau. Non loin, un bruit l’interpella et l’amena à arrêter son geste pour regarder ce qui se passait.


- « Estolt ! A-per-aicí, ant e quora. Anar ven !

Un gamin, dans les quatre printemps peut-être, des fleurs de romarin dans les bains s’étaient approchées du Blackney. Des petits cheveux noirs et frisés tombaient devant ses yeux marrons et venait entouré son visage salit. Un petit corps élancé, pas bien gras mais qui semblait ne semblait pas maladif. Il portait de ses vêtements qui démontraient qu’il devait y avoir deux, voir peut-être trois frères avant lui, vu l’état d’usure. Le gamin fixait l’épée d’Enzo, ce qui fit lâcher un petit rire de la part de ce dernier. La mère venait tout juste d’empoigner le bras du gamin qui était alors forcé de suivre sa mère. L’accent rocailleux, la voix rauque et imposante, le Blackney releva un peu le menton, et fit un geste nonchalant de la main, comme pour renvoyer le garçon.

- « Escota ta maire ! »

Léger sourire amusé, avant de ramener ses sinoples et son attention sur les canons d’avant-bras qu’il finit de délasser et qu’il retire au plus grand bonheur de ses poignets. Une fois cela fait, le Blackney entreprit de sortir sa chemise de ses braies, et délassé un peu plus sur le torse pour laisser le vent sec venir s’y frôler. La journée avançait, de cela faisait maintenant une journée entière qu'il avait disparu. Audoin devait s’en être rendu compte depuis le temps, ce qui, potentiellement le ferait paniquer. Quoique qu’il ne fût pas très démonstratif le garde. Mais bon, il devait sans doute pas faire causette avec la catin du quoi. Ou peut-être que si. Peu importe. Il avait l’âge de construire sa vie de façon indépendante, mais n’assumait pas toujours toutes ses actions. Encore moins ce qu'il avait osé dire à Gabrielle la veille. Les choix qui s’offraient aux jeunes Blackney depuis une nuit de mars, à Orthez, n’étaient pas des plus faciles et l’emmenait à se questionner fréquemment et de façon très égocentré. L’oubliant un peu, Elle, dans toute cette histoire. Elle, c’est Gabrielle. Une brune, presque noir, les yeux sombre comme l’océan, quelques années à peine de plus qu’Enzo, qui en a alors dix-sept. Pas bien voluptueuse comparé aux critères de mode de son époque, mais elle avait un petit quelque chose, indéfinissable, qui faisait d’elle, ce qu’elle était. La tête tournée vers la mer, et les étangs narbonnais, sa main droite glissa le long de ses cheveux pour replacer quelques mèches qui avait la mauvaise habitude de lui tomber devant les yeux. Les trapèzes commençaient légèrement à lui faire mal quand il se décida à s’accouder au sol. Le regard enzesque se perdit donc dans les horizons tandis que derrière lui, plus loin, des paysans s’apprêtait à s’installer, chapeau sur la tête, à la sieste du sud. Enzo lui, restait là. À la fois, bien et impatient. Il attendait tout, et personne. Il l’attendait Elle, alors qu’il savait qu’elle ne viendra pas. Non, elle ne viendrait pas. Et lui…

Il allait partir…
Il était déjà parti...



Titre : Tu peux partir – Daniel Bélanger
*Écorceur
** Garrigue
- « Estolt ! A-per-aicí, ant e quora. Anar ven ! = Estolt (prénom occitan) par ici, tout de suite ! Aller viens ! - « Escota ta maire ! » = Écoute ta mère !

_________________

© JD Alcalnn pour la citation. Création originale de JD Marin. - Déménagement dans 7 jours, répond au RP comme je peux.-
Gabrielle_blackney
[Parle-moi de tes silences
Avec ta bouche et tes bras
Entre dans la danse et danse avec moi
Parle-moi de ces distances
Qui ne nous séparent pas
Dis-moi que l'amour ne s'arrête pas*]


Pétrifiée. Stupéfaite. Abasourdie. Coite.
Gabrielle était debout dans cette taverne de Carcassonne, seule, en plein milieu de la nuit. La porte venait de se refermer sur Enzo. Ou peut-être qu’il était parti depuis un moment déjà, elle ne savait pas bien.
Elle ne savait pas bien non plus pourquoi elle ne lui avait pas couru après, et pourquoi elle ne le faisait pas maintenant. Enfin, si, elle savait. Pourquoi faire ? Pour dire quoi ? Elle était encore sous le choc des paroles. De la révélation. De la déclaration ?
Oui, à bien y réfléchir, ça y ressemblait.
Une déclaration, un aveu, une confession. Et Gabrielle ne savait pas quoi en faire. Et elle ne saurait pas quoi lui dire.
C’est qu’il en a pris des chemins de traverse, des tours et des détours. Tellement qu’elle se demande si elle n’a pas rêvé. Alors, elle réfléchit. Elle repense aux lettres, aux discussions, aux gestes, aux nuits.
Et elle se demande si c’était tellement évident qu’elle ne l’a pas vu ou s’il l’a tellement bien caché que c’était invisible. Ou si elle ne voulait tout simplement pas le voir.
Elle se demande aussi pourquoi c’est si compliqué pour lui de l’admettre. De le dire.
Elle se demande enfin pourquoi il est parti et ce qu’il attend d’elle.
Gabrielle est perdue, la tête qui résonne de mots qu’elle n’attendait pas. Des mots qu’elle n’espérait même pas.

Enzo l’aime. Enzo pense qu’il n’est pas grand-chose sans elle. Enzo veut l’épouser.

Et une fois ces choses dites, de manière enzesque évidemment, il l’avait plantée comme une idiote dans cette taverne déserte.
And now what ?**
Qu’était-elle sensée faire ? Et pourquoi toutes ces circonvolutions ? C’était si incroyable qu’on puisse l’aimer ? C’était si inavouable ? C’était si honteux ? L’esprit de Gabrielle était embrouillé, un mélange de plaisir, de panique, de soulagement, d’agacement, d’amour, de colère, toutes ces émotions tournaient dans sa tête sans qu’elle ne sache vraiment ce qui dominait.

Elle devait lui parler. Elle devait comprendre. Elle devait savoir.
Mais elle connaissait suffisamment bien Enzo pour imaginer que pour lui non plus les choses ne devaient pas être simple. Il devait déjà regretter ses paroles. Elle se doutait qu’elle n’obtiendrait rien de plus éloquent cette nuit.
Alors elle allait lui écrire. Et elle verrait bien.


Citation:
A toi, Enzo
De moi, Gabrielle


Enzo,


Parfois, je me dis que si les tavernes n’existaient pas, notre vie serait bien terne. Pas pour l’alcool qu’on y boit, mais pour les mots qu’on s’y échange la nuit, très tard. A une heure où les autres dorment, nous, nous parlons, de tout et de rien, et puis parfois, de choses plus importantes.

Cette nuit, je t’ai écouté. Je t’ai entendu. Je t’ai compris.

Tu ne m’as pas posé de questions. Alors j’imagine que tu n’attends pas de réponse. Ou pas tout de suite. Je suis un peu perdue je dois te l’avouer.

Je vais quand même te le répéter. Elle a beaucoup de chance.
Et elle le sait.
Parce qu’elle est peut-être idiote, comme tu l’as dit, mais pas au point de ne pas se rendre compte de ça. Elle aussi, peut-être, elle trouve que certaines choses ne sont pas faciles à dire et à partager. Et pourtant, elle les pense ces choses. Elle te les aurait bien dites avant, mais tu menaces toujours de fuir, alors elle les tait. Pour te garder tant qu’elle le peut, j’imagine. Pour préserver ce qu’il y a entre vous.
Ca n’est peut-être pas ce qu’il fallait faire, je ne sais pas bien. Tu es si compliqué parfois.

Mais tu sais, Enzo, elle aussi elle t’aime. Et elle aussi ça lui fait peur. Un peu.

Gab.


*Marc Lavoine
** Et maintenant quoi
Enzo.blackney
                « Le monde peut quitter le monde quand il veut
                Partir où bon lui semble quand il veut Faire d'avril un mai, d'un mai un novembre
                Tout est dans la manière, dans la manière […] »

                Tu peux partir – Daniel Bélanger


Quelque part dans le Royaume
Le soleil au Zénith
Début juin.


Bonheur : Le bonheur est un état durable de plénitude et de satisfaction, état agréable et équilibré de l'esprit et du corps, d'où la souffrance, le stress, l'inquiétude et le trouble sont absents. *

Trois jours. Trois jours qu’il avait reçu la lettre de Gabrielle. Qu’Audoin avait été semé et que le jeune Blackney était seul. Au sens propre comme au figuré. Une solitude qu’il avait choisit et entreprit au péril des souffrances que cela pouvait causer. À lui comme aux autres. Certains diront qu’il a été lâche ou agit comme le petit égoïste qu’il est. Pourtant, c’est tout autre. Il a tout. La richesse, la beauté, les femmes, un grand avenir.Des connaissances, des positions s’il le voulait aussi. S’il regagnait ce que tous appel l’honneur. Mais il n’était rien. Il n’était rien, parce qu’il n’assumait pas ses sentiments. Il n’était rien, parce que sa moitié lui était interdite. Rien, parce que l’amour et la haine lui interdisaient cet état de satisfaction que semble être le bonheur. Ainsi, il était parti. Un dernier moment dans l’atmosphère sec du Languedoc, et il avait pris quelques chemises, pareils pour les braies. Ça devait être léger et rentrer dans une sacoche accroché à une monture. Quelques écus, mais sans exagération, et aucun alcool, sauf sa flasque de calvados. Plus par symbole qu’autre chose .Aucune lettre n’avait été laissée à Audoin. Même pas quelques mots court, un peu salaud, peut-être, comme attitude mais ce n’était pas le but. Disparaître. C’est ce qu’il voulait que tous croient. Qu’il soit disparu, comme son frère Hervald. Qu’il n’existe que dans le passé, et ne fassent plus parti du présent des gens qui l’entouraient. Et de la même façon, fuir son propre présent et avenir.

Où il était n’avait aucune importance. Ce qu’il comptait faire aussi. Et c’est ainsi qu’il était là, les sinoples caressant le présent d’un triste regard. Il était parti. De manière odieusement enzesque. Typiquement lui. Ainsi, personne ne se poserait de question. Il serait reconnu disparu, et lui détaché complètement de ses responsabilités. Libre. Elle coûtait cher cette liberté, mais il assumait le Blackney. Il assumait sa décision, alors qu’une main alla caresser l’encolure de la jument qu’il s’était trouvé pour faire le chemin. Pour l’instant. Trois jour déjà, et il se sentait impuissant. Comme un bébé venant juste de naître qui doit prendre sa première respiration, gouté sa première seconde de vie dans le cri et la douleur. Le soleil doré du début de l’après-midi venait frôlé la peau bronzé du jeune homme, alors qu’un soupire quitta ses lèvres et que ses yeux s’abaissèrent sur l’étrier dans lequel il mettait pied pour reprendre position sur la jument. Il n’y avait plus de minutes à perdre. Cette ville devait être quitté rapidement. À la prochaine, il laissera la jument, ses affaires, sauf son épée, la lettre, sa besace et quelques écus.Enzo n’était pas dupe, il connaissait un minimum Audoin. Rien n’allait être laissé au hasard donc. Il n’avait donc pas répondu à la lettre de Gabrielle. Et personne ne le retrouverait à Carcassonne, ville de départ. Tout serait plus simple, s’il était resté. Il aurait pu faire comme tous ses bons hommes amoureux qui rejoignent rapidement leurs compagnes après avoir eu la révélation que tout est réciproque. Sauf qu’Enzo n’est pas ainsi. Amour-Haine. Toujours. De plus, Gab n’est pas n’importe qui. Un même sang coule dans leurs veines. Alors la manière avait été radicale. Il devait partir. C’était une certitude. Pour l’instant…

Qu’allais t’il se passer maintenant ?

Le Blackney lui-même ne le savait pas trop, même s’il avait organisé sa disparition pour que ça soit crédible. Le reste, il ne savait pas ce qu’il allait faire. Allait-il se trouver un nouveau nom pour continuer à voyager tranquillement ? Trouver quelques malfrats qui contre quelques écus lui donneront une nouvelle identité ridicule ? Se faire couper les cheveux plus court, osé les vêtements de rotures ? Peut-être. Pour l’heure, le jeune homme chevauchait vers les portes pour y sortir. Dans le sens opposé de son entrée. Il faisait levé la poussière sous les coups de sabots qui tapaient le sol. Trois jours. Et elle lui manquait terriblement, même s’il tentait de ne plus y penser. C’était la meilleure solution. Pour lui. Pour elle. Pour eux. Là-bas, tout sera terre inconnue. Il se risquait à vivre autrement, à penser d’une façon qu’il n’avait encore jamais pensé. À jouer avec les flammes. Ce n’était pas juste une fuite comme ça l’avait été au deuil de sa mère. Non. Du tout. La manière, le pourquoi, tout. Tout était différent. Et il était bel et bien seul cette fois. Audoin n’arrivera sans doute pas à la retrouver si vite. Surtout qu’il était parti de façon si surprenante. Le plus crédible serait de croire qu’on a enlevé le jeune Blackney, mais comme une lettre demandant rançon n’avait jamais été envoyé… Bref. Les gens pourront bien croire ce qu’ils veulent. Enzo, penché un peu vers l’avant galopais vers d’autres lieux, mettant encore plus de distance entre ce qui devenait son passé à chaque seconde, à chaque minutes, à chaque heure, à chaque jour.

Lui pardonnerait-elle si elle savait ?

Plus loin. Quitter le monde à sa façon. Sans se donner la mort. Juste disparaître. Qu’on l’oublie, peut-être. Comme tout les hommes. Qu’on creuse un trou qui restera vide. Le temps soulagera les maux, et Enzo ne sera plus qu’un souvenir. Un bon, ou un mauvais, ça n’avait plus d’importance maintenant. Non. Il chevauchait vers tout et rien, les cheveux dans le vent, les mains agrippées aux rênes. Trois jours déjà, et il lui semblait que le manque s’intensifiait, et que la distance n’arrangeait rien. Mais tant pis. Il devait continuer.

Plus loin encore. Toujours plus loin…
Pour son bonheur, à Elle.
Peut-être.


                Plus rien n’était sur, maintenant.


*Wikipédia, oui. J'ai osé. - Désolé toussa pour la musique pop québécoise aussi.
_________________

© JD Alcalnn pour la citation. Création originale de JD Marin. - Déménagement dans 7 jours, répond au RP comme je peux.-
Gabrielle_blackney
[Now that I've lost everything to you
You say you wanna start something new
And it's breakin' my heart you're leavin'
Baby, I'm grievin'
But if you want to leave, take good care*]


Trois jours. Il était parti depuis trois jours. Une disparition volontaire à n’en pas douter. Il en avait parlé à Gabrielle. Elle ne l’avait pas pris au sérieux. Mais il l’avait fait. Il avait pris quelques affaires et il était parti.
Elle n’avait parlé à personne de cette discussion évoquant son envie de disparaître, pas plus que ce qu’il lui avait dit en taverne la veille de sa disparition, répondant vaguement quand on l’interrogeait, faisant semblant de s’inquiéter quand le sujet était évoqué, mais elle cacha bien soigneusement à tous, y compris à Audoin, les discussions qu’elle avait eu avec Enzo.

En ce troisième jour, elle était en colère. Là tout de suite, s’il osait réapparaitre devant elle, il se ramasserait la plus grosse gifle de sa vie. Quel odieux petit s*alopard, petit con qui n’assumait rien, sale gamin qui jouait avec les sentiments. Comment avait-il pu la planter comme ça ? Il la laissait seule avec le cœur en berne, l’esprit perdu et le corps vide.
Il lui avait dit que s’il disparaissait, peu lui importait qu’elle en souffre ou pas.
Les hommes sont des salauds. Celui-ci était leur souverain. Qu’avait-il eu besoin de lui déballer ses sentiments avant de disparaître ? Qu’il veuille être libre, elle ne le comprenait que trop bien. Qu’il fuit, elle s’en fichait bien. Il ne lui devait rien après tout. Mais pourquoi donc être venu lui confier tout ça avant ? Que devait-elle faire ?

Rien. Elle n’avait rien à faire.
Alors elle ne faisait rien.
Elle se forçait à ne pas l’attendre, à ne pas espérer son retour, à ne pas lever les yeux à chaque entrée en taverne, à ne pas se retourner à chaque silhouette plus grande que la moyenne qu’elle croisait, à ne pas vérifier qu’une lettre l’attendait.
Elle se forçait aussi à ne pas trop penser à lui. Mais la nuit, seule dans son lit, elle était submergée par les autres sentiments qu’elle refoulait dans la journée. Où était-il ? Allait-il bien ? Que faisait-il ? Pensait-il à elle ? A eux ? Regrettait-il ? Et s’il regrettait, reviendrait-il ? Hésitait-il à lui écrire ? Le reverrait-elle un jour ?

Et elle lui en voulait pour tout ça.
Elle lui en voulait de ne pas lui laisser l’âme en paix. Elle tournait et se retournait dans son lit et finissait par s’endormir au petit matin dans une chemise trop grande pour elle. Une chemise qu’elle était allée emprunter dans ce qu’il avait laissé. Emprunt dérisoire et vain. Il n’était plus là et rien ne remplaçait l’absence. Geste un peu désespéré qui tentait de combler le vide.
Oui, elle lui en voulait. Terriblement.
Mais plus que ça, il lui manquait. Atrocement.

Bloody bastard, I miss you. And I think it will kill me.
Go to hell, Enzo Blackney. But I still love you.**


*Maintenant que j’ai tout perdu pour toi
Tu me dis que tu veux démarrer quelque chose de nouveau
Et ça me brise le cœur que tu partes
Bébé, je suis en deuil,
Mais si tu veux partir, prends soin de toi
(Cat Stevens)
**S*alopard, tu me manques. Et je pense que ça va me tuer.
Va au diable, Enzo Blackney. Mais je t’aime toujours.

_________________
Enzo.blackney
                  « […] Tu veux pas d'moi, tu veux pas m'perdre,
                  Alors ce choix, j'le fais pour toi
                  C'est moi qui pars […] »

                  Tout S'efface - Patrick Bruel


Ici, ailleurs, nulle part.
4eme jour.
Sevrage.


Terre hostile, qui plus est quand elle n’est pas là. Les mains jointent, le regard vert est perdu, envolé, embrumé par une brise qui lui est si inconnu. La jument attachée un peu plus loin broute quelques herbes vertes, et le silence est le seul confident. Sauf qu’il ne répond pas beaucoup, et qu’Enzo n’a pas tant envie de parler. Pourtant la dissonance frappe dans sa tête et vient perturbé ses idées qui ne sont déjà pas très clair. Le léger tremblement dans ses mains le fait déglutir, alors qu’il s’attarde un instant à regarder autour de lui. Réflexe qu’il reprend doucement, depuis qu’Audoin n’est plus là pour surveiller ses arrières. Enfin, depuis qu’il a faussé compagnie au garde surtout. Soupire, autre tremblement, les yeux se ferment un instant. Même l’horizon est troublant. La caresse du vent le fait frissonner, s’imagine que c’est sa main à Elle qui vient se glisser dans sa nuque et mélanger ses doigts avec les mèches. Le désordre continue. Opposition, résignation, manque, trouble… peine ? Peut-être. Oppression ? Certainement. Il a le cœur qui se serre, les bronches qui semble se bloquer, la respiration qui s’efface et le corps qui se balance ridiculement comme pour chercher un appui. La bouche s’ouvre, cherchant l’air qu’il n’a pas besoin, les joues s’empourprent et tous acclament les battements rapides par un tumulte incessant.

Alors le Blackney ouvre les yeux vers le ciel, la jambe gauche tremblante, le corps en chaleur, l’esprit angoissé. Pas besoin de fièvre, ni même de troubles sensoriels, pas d’hallucination, ni d’état d’hyperactivité, ou tout autres symptômes. Juste de l’insomnie, de l’angoisse et une bonne dose d’irritabilité. Un manque d’Elle profond. Un sevrage affectif qu’il s’imposait, qui le rendait un peu fou. Il s’était isolé, partant du fait que tout son trouble venait d’Elle. De eux. De ce sentiment qui germait bien malgré qui. Un sentiment interdit. Sa damnation. Car la luxure ça se pardonne, si on regrette. Enzo, lui ne regrettait pas. Il ne regrettait pas, et il aimait croquer dans ce fruit interdit. Il l’aimait Elle. D’un amour fou, d’un amour éphémère peut-être, d’une passion inavouable, il l’aimait et ça le rendait dingue. Parce qu’aimer c’est prendre un risque. Le risque que l’autre disparaisse et laisse dans son sillage qu’une trainé de larmes qui ne servent plus à rien. Le deuil. La mort. La crainte même du Blackney est basée sur ça. Depuis…Le jeune homme secoue alors violemment la tête, tentant de trouver l’air qui semble lui manqué dans cet état de panique. Il se lève alors, un peu chancelant, direction la rivière qui n’était pas très loin. Pierre, racine, tronc. Tous ont failli faire trébucher le jeune homme paniqué qui dévalait vers la source d’eau. Il y arriva toutefois sans souci, glissant ses mains tremblantes dans le liquide froid, et se l’envoyant directement dans le visage. Le corps frissonne, se raidit un instant tandis que les gouttes d’eau coulent le long de ses joues, son nez, son cou et sont venu tremper le col de sa chemise blanche. L’inspiration se fait profonde, et l’expiration lente. Doucement. Et plusieurs fois, calmant légèrement le concert gratuit qui s’est imposé plus qu’autre chose. Les sinoples fixent le reflet un instant, quelques secondes à peine avant qu’Enzo envoi sa main avec violence brouiller ce qu’il y voyait. La main se glisse ensuite dans ses cheveux, alors qu’il recule légèrement, butant sur un arbre. La tête est alors déposé sur l’arbre, la respiration se calmant doucement, les mains sur les cuisses.

Devait-il lui répondre ? Lui donner de ses nouvelles ? Devait-il couper les ponts avec tous, même Elle ? Serait-elle vraiment plus heureuse sans lui ? Arriverais t-il à l’oublier ? Était-ce réellement la meilleur chose à faire ? La liberté qu’il jouissait actuellement valait t-elle le coup s’il ne pouvait en jouir avec elle ? Allait-elle bien ? Pensait-elle à lui ? Le haïssait t-elle de l’avoir abandonné comme un lâche ? Que pensait-elle ? Qu’il était parti de son plein gré ? Qu’il s’était fait enlevé ? Perdu ? Attaqué ? Dormait-elle aussi mal que lui ? Tant de questions sans réponse. Voulait-elle vraiment de lui, dans sa vie, quotidiennement ? Où avait-elle plus peur de perdre le jeune homme à qui elle s’était attachée ? Elle pourrait être heureuse, avec quelqu’un d’autre, même si l’idée répugne au Blackney. Il est parti. Certainement pas comme un homme. Les yeux d'Enzo fixe l’étendu d’eau devant lui et déglutit de nouveau. Les tremblements se sont calmés et la dissonance est moins violente. Et il respire. Lentement et doucement. Gabrielle. Si tu voyais mon état. Mes bottes sont sales. T’imagine. J’ai envie de vomir de les voir dans cet état. J’ai envie de les récurer comme je voudrais le faire sur ma mémoire, pour que je puisse t’oublier, et oublier ce mal qui me ronge. Cette absence qui me tourmente. Je voudrais que tu sois là, que le vent qui s’engouffre soit tes paroles, ton sourire, ta main, ton souffle. Tu me manques…

Et le jeune homme de se relever, frappant violemment l’arbre d’un poing rapide. Ça fait mal. Il sent un liquide chaud glisser entre ses doigts, la main qui tremble sous le choc et la douleur le prendre de façon éphémère, le temps de l’adrénaline, concept encore inexistant à l’époque. Plus tard, la douleur allait revenir, plus vive sans doute. Pour l’instant il attend des battements, un engourdissement et une rage qu’il ne comprend pas. N’est-ce pas lui qui est parti après tout… alors pourquoi tant de vacarme, de violence et de trouble ? Inspiration. Expiration. Enzo retire sa chemise, et l’envoi près de l’eau avant de se diriger vers la jument, de fouiller la sacoche et de sortir une seconde chemise. Bleue cette fois. Un dernier regard aux alentours avant de monter, et d’envoyer l’animal à petit trop, tenant les rênes de la main gauche, la droite déposé doucement sur sa cuisse. Le village n’est pas spécialement loin, s’il ne s’est pas trompé. Cette nuit, il y restera, le temps de s’occuper de sa main, de boire un peu – beaucoup – et faire quelques provisions. Il avait prit un peu de retard sur ce qu’il avait prévu de faire aujourd’hui. Sur son sillage, quelques écus sont fait tombé volontairement, comme la chemise auparavant. À partir de demain, il ferait le reste à pied…Revenir ? Non… N’était-il pas trop tard pour regretter ? Il l’aimait. Elle le savait. Il était parti…


                  « […] Laisse-moi venir de temps en temps
                  Laisse-moi me dire qu'c'est comme avant...
                  Laisse-moi partir, même si je mens,
                  Laisse-moi me dire qu'avec le temps...

                  Même si je sais... […] »*


                  Que je ne t’oublierais pas…


*Idem.
_________________

© JD Alcalnn pour la citation. Création originale de JD Marin. - Déménagement dans 7 jours, répond au RP comme je peux.-
Gabrielle_blackney
[I'm waiting for my man
Twenty-six dollars in my hand
Up to Lexington 1-2-5
Feeling sick and dirty more dead than alive
I'm waiting for my man*]


I don't know who you are. I don't know what you want. If you are looking for ransom, I can tell you I don't have money. But what I do have are a very particular set of skills; skills I have acquired over a very long career. Skills that make me a nightmare for people like you. If you let my man go now, that'll be the end of it. I will not look for you, I will not pursue you. But if you don't, I will look for you, I will find you, and I will kill you**.

Voilà exactement ce qui traversa l’esprit de Gabrielle quand on vint la prévenir que la jument d’Enzo avait été retrouvée ainsi qu’une partie de ses affaires. Une chemise et quelques écus ayant également été abandonnés dans une prairie près d’une rivière. Le tout, pas dans le Languedoc. Ailleurs. Loin.
Les supputations allaient bon train. Avait-il été enlevé ? Attaqué ? Etait-il encore vivant ?
Gabrielle ne pouvait même pas imaginer le contraire. S’il était mort, elle le saurait, elle en était persuadée. Et rien que de penser de manière fugace à cette possibilité, elle avait le cœur qui semblait stopper le temps de quelques battements.
Elle ne savait pas ce qui s’était passé, mais si par malheur, quelqu’un avait fait du mal à Enzo, oui, elle le chercherait, elle le trouverait et elle le tuerait.
Et elle rageait de ne rien pouvoir faire, de ne rien savoir, d’être là, coincée dans ce comté de malheur, impuissante, à se demander ce qui lui était arrivé, s’il allait bien, s’il n’était pas blessé, ce qu’il faisait, ce qu’il pensait.

Elle était inquiète.

Cependant, elle ne pouvait s’empêcher de penser que les choses étaient un peu trop carrées. Une disparition volontaire qui tournait mal, ça devait pourtant arriver. Et il était seul. Et il n’avait plus personne pour veiller sur lui. Mais tout de même, tout semblait tomber au bon moment pour lui.
Alors, elle se demandait s’il aurait osé aller jusque là. Oser penser sa disparition de manière si machiavélique. Oser brouiller les pistes et leur envoyer ce dernier message que, de manière triviale, elle comprenait comme un « foutez-moi la paix ». Un message pour tous ceux qui pouvaient avoir envie de le rechercher. Un message pour elle.
Quand elle pensait à ça, elle était partagée entre une colère froide, un agacement profond, une tristesse sincère et, même si elle ne se l’avouait qu’à moitié, un amusement certain. Oui, de l’amusement, qui lui faisait venir un petit sourire. Parce que si c’était le cas, elle ne pouvait que s’incliner devant son talent.
Mais aussitôt, un soupir d’agacement venait chasser son sourire. Soupir qui faisait vite place à une angoisse sourde, et à un peu de culpabilité d’imaginer de telles choses alors qu’il était peut-être mourrant dans un bas chemin ou aux mains de malfrats qui le maltraitaient.

Oui, elle était inquiète.
Parce que finalement, peu importait qu’il ne veuille plus d’elle, qu’il ne veuille plus de sa vie, qu’il veuille fuir, et s’il était blessé, enlevé ou mort, tout aussi atroce que soit cette idée, elle devait savoir.
L’ignorance la rongeait, la consumait, l’empêchait de manger, de dormir, de sourire, de s’intéresser aux autres. Elle se sentait comme une morte en sursis. Comme si sa vie était suspendue à une nouvelle. Bonne ou mauvaise. Mais une nouvelle. Elle espérait presque qu’on lui annonce que son corps avait eté retrouvé. Au moins, elle ne serait plus dans cette attente insupportable. Et en même temps, si on venait à lui annoncer ça, elle savait qu’elle en mourrait dans la minute.
Et s’il allait bien, s’il était en train de chevaucher vers son avenir, elle lui souhaitait de ne jamais plus recroiser son chemin.
Elle le tuerait pour lui avoir fait subir ça.
Elle le tuerait oui, ses mains s’enrouleraient autour de lui, autour de son corps, elle plongerait une dernière fois dans ses yeux verts, elle passerait une dernière fois ses doigts dans ses cheveux, elle ferait danser une dernière fois sa langue avec la sienne.
Et ensuite, elle le tuerait.
Ou pas.

Odieux petit con. Même ça, tu me le ferais rater. Je serais bien capable de tout te pardonner sur un sourire.
Dis-moi que tu es heureux, que ta vie là bas est plus belle, que je ne te manque pas, dis-moi que ton choix était le bon.
Dis moi que tu n'es pas mort.
Mais envoie moi un signe.

*J'attends mon homme
Vingt-six dollars dans ma main
Jusqu'à Lexington 1-2-5
Me sentant malade et sale et plus morte qu'en vie
J'attends mon homme
(The Velvet Underground)
**J'ignore qui vous êtes, J'ignore ce que vous voulez, Si c'est une rançon que vous espérez je vous dis tout de suite que je n'ai pas d'argent. Mais ce que j'ai en revanche ce sont des compétences très particulières; je les acquises pendant une longue, très longue carrière. Et elles feront de moi un véritable cauchemar pour vous. Si vous relâchez mon mec maintenant, j'oublie tout et ça s'arrête là . Je vous laisserai tranquille. Je ne vous poursuivrai pas. Mais si vous le gardez, je vous chercherai, je vous trouverai, et je vous tuerai.
(Brian- Liam Neeson, dans le film Taken – Juste changé « daughter/fille » pour « man/mec »
Et, oui, je me suis fais plaisir)

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Enzo.blackney
                      « Là-bas
                      Tout est neuf et tout est sauvage
                      Libre continent sans grillage
                      Ici, nos rêves sont étroits
                      C'est pour ça que j'irai là-bas [...] »

                      Là-bas - J-J Goldman


Quelque part, personne ne sait trop
5eme, 6eme ou 7eme jour ?
Juin 1460


Une nuit à l’auberge. Une seule. Chambre 7 réservé au nom de Edmund. Prénom qu’il avait compté donner au Boudoir des sens, il y a de ça plusieurs mois, si on lui aurait demandé. Sauf que finalement, on lui avait pas demandé et de surcroit, il avait donné son prénom, et nom de famille à Désirée. Peut-être inconscient d’ailleurs, mais peu importe. Et surtout plusieurs mois plus tard ! Le Blackney avait donc profité, si l’on pouvait dire ainsi, du lit trop grand, trop vide, trop silencieux, sans Elle. Même le confort lui semblait bien égal si elle n’était pas là pour le partager avec lui. On s’habitue rapidement à une présence… mais tout de même un peu moins à son absence. Un soupire vint quitter les lèvres du Blackney qui était alors assis dans la chambre d’auberge. La tête entre les mains, le cœur au bout des lèvres, voilà ce qui se passait qu’en on buvait trop la veille. Tout semblait bouger autour de lui, alors que tout était immobile, dans sa tête, sa cognait le ridicule d’avoir autant bu, juste pour oublier et passer la nuit. Juste pour ne pas sentir cette oppression qui le tenait et l’empêchait de respirer. Il avait bu, parce qu’il n’était pas d’accord avec ses propres décisions, et parce que Gabrielle lui manquait terriblement. Sauf qu’il devait partir. Il devait quitter ce monde qui les liait tout les deux, disparaître à jamais. Il n’y avait pas de place pour eux dans cette vie, peut-être plus tard, dans un avenir plus loin, quand l’époque actuelle sera révolue, peut-être qu’ils pourront s’aimer, se haïr, se détruire et se reconstruire. Mais pas maintenant, pas là. Ils ne pouvaient pas. C’était ainsi, et Enzo devait s’en faire une fatalité. Alors il était parti. Là-bas, il ne sait pas vraiment où, gouté à la liberté, loin de sa noblesse de sang, loin des obligations, loin de tout ce qu’il avait connu, mais surtout loin d’Elle.

Une remonté gastrique lui brûla la gorge et alla s’étaler sur le plancher de la chambre en une étrange et visqueuse masse. Ce qui fit grimacer le jeune homme qui se laissa retomber sur le lit. Il devait partir. Il ne pouvait rester ici. La jument avait été abandonnée plus loin, ainsi que plusieurs de ses affaires, mais pas tous. Il comptait laisser le reste sur les routes. Des vêtements de la roture avaient été achetés, tout comme un mantel usé, au cas. Tout ce qu’il avait gardé étaient ses bottes, son épée et sa bourse d’écus. Mais pour l’instant, le jeune homme ne pouvait pas aller bien loin avec ces nausées qui venaient et allaient, sans parler de ce concert musical dans sa tête. Puis la fatigue le gagnait de plus en plus avec ce manque de concentration, qui était prouvé par cette chemise qu’il avait enfilé à l’envers. Non, définitivement, Enzo était dans un sale état, et une belle gueule de bois qui l’empêchait de bouger. Pourtant, il était clair que s’il restait ici, il y avait de forte chance qu’on l’apprenne, malgré toutes ses précautions. Une main déposée sur son front, la respiration saccadé, les nausées qui perturbe son confort, il était clair que le Blackney avait fait le mauvais choix de partir. Qu’il s’y perdrait, et qu’il la perdrait aussi. Pourtant, c’était la seule solution. Il en restait certain, même s’il en souffrait actuellement. Même s’il s’était mis dans un sale état pour elle. Une envie de vomir soudaine le repris, ce qui le fit se relever, et le contenu de son estomac se déversa de nouveau, rejoignant la flaque précédente. Jolie spectacle. Le Blackney se leva péniblement, rejoignant un sceau d’eau qu’on lui avait laissé et dans lequel il trempa un linge pour le passer sur son visage et son cou.

Respiration haletante, la tête qui se dépose contre le mur, les yeux qui se ferment. Qu’a t-il bien bu pour se sentir dans cet état ? Il n’a jamais bien tenu l’alcool, mais tout de même. Enzo ne se rappelle pas très bien de sa soirée. Taverne miteuse, remplie de gonzesses voluptueuses. Un homme étrange qui lui lançait des regards tout aussi étrange, et lui offrait des verres avec un goût tout aussi bizarre. Puis d’autres qui chuchotaient et semblaient le fixer d’une drôle de façon aussi. Puis, il se souvient qu’une des gonzesses est venu le porter… et à garder la clé. Est-elle restée ? Il ne sait pas très bien. Il s’est réveillé avec ses braies, c’est déjà très bien, mais quelques écus en moins, et même que sa flasque a disparu. Le linge est passé de nouveau dans son visage de nouveau, tandis qu’il tente de se redresser de nouveau, prenant son épée, ce qui lui reste d’affaires, les vêtements beaucoup moins noble étant déjà sur lui – donc la chemise est à l’envers si vous avez suivi. Il sursaute quand une « boom » vient s’abattre sur la porte et qui est ouverte ! Comment ! Ouverte ? Mais Enzo est un paranoïaque. Il ferme TOUJOURS le verrou… Et qui est cette jeune femme qui pointe son visage ?


- « Messer Edmund. Cé’que c’est l’heur’ d’rend’ l’chambrine ! »
- « Eh… Oui…oui. Je quitte.


Déboussolé, Enzo sort avec ses affaires, comme il peut. Chancelant, les nausées reprenant de plus belle et ce mal de crâne qui lui empêche de bien se situer. Il ne sais même plus où il est. Mais il s’en va, quitte l’auberge avec une sensation étrange. Les jambes un peu molle, et la gueule de bois empirant du fait qu’il ne reste pas calme, il se retrouve dehors. D’ailleurs, la situation est vraiment étrange. C’est quand même pas le genre d’Enzo de se laisser faire mettre dehors ainsi, tout chancelant. Et pourquoi n’a t-il pas, à a la limite, prit la chambre pour la journée ? Définitivement, le comportement du Blackney est étrange. Il marche, pas spécialement droit, vers la sortie de la ville, rejoignant les routes vers ailleurs. Là-bas. Loin. Toujours. S’il y a bien une chose qu’il sait, c’est le pourquoi il s’en va. Parce que rien n’est possible avec elle. Et parce que malgré lui il l’aime. Et même s’il est incapable de lui dire de façon franche, et qu’il doit toujours prendre des moyens détourner, c’est vrai.

Sauf que les pas du jeune homme se font de plus en plus incertains. La vue se trouble, les nausées reprennent, faisant vomir de nouveau Enzo sur le côté des sentiers. Le corps amolli se laisse tomber au sol à la suite, et la vision s’efface levant un voile noir devant ses yeux, tandis qu’il s’effondre, le corps roulant plus loin dans le bas-côté, salissant et blessant un peu le Blackney au passage. Le corps s’arrête alors près d’un courant d’eau qui là. Une rivière ? Peut-être, il ne sait pas trop, le jeune homme. Il tente alors de se relever, mais une douleur vive dans l’épaule le prend, et la tête qui tourne, le noir qui reste devant ses yeux. La tête retombe dans un « toc » sonore. Une main dans l’eau, du sang ? Une dernière pensée…

Gabrielle.


                      « […] J'ai beau me dire
                      Que c'est comme ça
                      Que sans vieillir
                      On n'oublie pas
                      Quoi que je fasse
                      Où que je sois
                      Rien ne t'efface
                      Je pense à toi
                      Et quoi que j'apprenne
                      Je ne sais pas
                      Pourquoi je saigne
                      Et pas toi […] *»


*Pas toi - J-J Goldman
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© JD Alcalnn pour la citation. Création originale de JD Marin. - Déménagement dans 7 jours, répond au RP comme je peux.-
--Gevaudus


T’as eu beau te cacher derrière tes vêtements de moindre facture, j’t’ai repéré moi. Un petit noblieau qui s’est perdu dans ce bordel de campagne c’est pas si fréquent. La Jeannette et ses filles aussi t’avaient repéré, mais tu les as déçu mon gars, c’pas une fille que tu voulais, tu voulais boire, alors tu as bu, et j’t’ai fait boire. De la mauvaise bière et du mauvais vin, et puis moi, j'me suis dit qu’un type comme toi, ça devait se balader avec des choses intéressantes pour un type comme moi.
Mais la Jeannette m’aurait étranglé si j’avais tenté quoi que ce soit dans son établissement, c’est peut être une mère maquerelle pour les gueux, mais elle a encore un peu de moralité. C’est elle qu’a insisté pour qu’une de ses filles te raccompagne dans ta chambre, sans te toucher ni te dépouiller même qu’elle a précisé.
Mais moi, j’t’avais repéré, et j’ai moins de moralité qu’elle. Alors j’ai un peu pimenté tes verres pour être sûr que tu t’écroules, quand on peut éviter de tuer, autant en profiter. C’est moins risqué, c’est moins fatigant, c’est plus simple et toi, tu étais une proie si facile.

Alors quand t’as quitté la chambre de chez La Jeannette, j’t’ai suivi, t’étais pas bien frais, j’ai même pas eu besoin de me faire discret. Ca tombe bien parce que j’ai pris Le Gamin avec moi, il débute lui et il est pas encore bien rôdé. Tout excité qu’il était le petit, son premier noble tu penses. Mais du coup, il est pas encore bien doué en filature, il en fait toujours un peu trop tu vois, du coup il devient suspect. Mais bon, il va apprendre et je dois lui reconnaître qu’il est très doué pour vider les poches, alors ça me va, je le garde… Mais tu t’en fous toi, j’imagine, du gamin et de sa vie.

Alors voilà, on t’a suivi. Tranquillement, derrière toi, ni trop près, ni trop loin, t’avais une de ces dégaines, un vrai pochtron. J’étais un peu contrarié parce que t’avais pas l’air de balader grand chose sur toi. Mais comme tu m’auras pas demandé beaucoup d’effort, c’pas bien grave.
On t’a suivi et on a attendu que tu tombes.

On se rapproche pendant que tu roules jusqu’au ruisseau. Tu dis un mot, mais j’fais pas attention, moi je regarde ce que j’peux récupérer. Pas grand chose. Je sais pas qui tu y es mon gars, mais t’as sûrement des choses à cacher, une histoire à fuir, enfin, je m’en fous un peu j’dois dire.

- « Gamin. Vire lui ses bottes… Ca fait longtemps qu’ j’ai pas eu de nouvelles bottes moi. Son épée aussi, fouille-le, doit avoir des écus quelque part

- Il est mort ?

- Chais pas. Possible. J’ai peut-être un peu abusé avec ma potion. »


Et pendant qu’Le Gamin s’occupe de ton épée et de ta bourse, moi j’mets tes bottes. Elles sont trop grandes pour moi, mais juste un peu, ça ira. J’te laisse les miennes, chuis pas un chien.
Ceci dit si t’es clamsé, ça te servira pas. Tant pis. Ca sera mon acte de bonté pour ton éternité.
Le gosse m’amène ton épée. J’te l’aurais bien piqué, très bel ouvrage. Mais trop voyante, et en plus, elle est gravée. Avec ça, si t’es recherché par ta famille de privilégiés, j’finis au bûcher, alors tant pis, j’la plante à côté de ta belle petite gueule. J’te regarde un peu et je me demande quand-même c’que t’as fait pour en arriver là. Pauvre gosse trop beau et trop gâté.

Le Gamin veut vérifier si t’es mort, alors j’le laisse s’amuser un peu avec toi pendant qu’je compte les écus de ta bourse. C’pas la misère mais c’pas la joie. Enfin, z’auront été vite gagné, j’vais pas pleurnicher.
Le Gamin te file quelques coups de pieds pour l’amusement. Tu bronches pas. Même pas un gémissement.
J’crois bien qu’on t’a tué mon gars. Désolé, j’voulais pas vraiment, mais c’est la vie. Chais pas de quoi était faite la tienne mais j’crois bien qu’elle vient de s’arrêter là sur ce bas côté.
Triste fin. Dure époque.


- « Bon, Gamin, t’arrêtes un peu d’le taper ! Faut respecter les morts ! »

Et on est r’parti sur les chemins.
Ce soir mon gars, j’te l’promets, j’boirai à ton âme avec tes écus.
Gabrielle_blackney
[On reste Dieu merci à la merci
S'un nimbutal,
Du plafond décrépit,
Qu'on observe à l'horizontal,
Le soleil est parti,
La neige tombe sur les dalles,
Quelle aventure, quelle aventure…

On flâne, on flaire,
On flaire la flamme singulière..
On gagne,on perd
On perd la gagne, la superbe...*]


Celui qui a dit que le temps arrangeait les choses et permettait l’oubli est un crétin.
Plus les jours passaient, pire était l’absence. Gabrielle avait quitté Carcassonne, traversé Narbonne, Béziers et était maintenant à Montpellier. S’il revenait, c’est là qu’il la chercherait… Elle chassa cette pensée, il ne reviendrait pas, et quand bien même, il ne la chercherait pas. Il s’en foutait bien d’elle, de sa vie, de ses sentiments. Il s’en foutait bien qu’elle soit en train de dépérir loin de lui, que ses journées soient vides, qu’elle reste là, attendant elle ne savait trop quoi. Enfin si, elle l’attendait Lui, même si elle savait qu’il ne reviendrait pas. Mais l’esprit n’est que rarement raisonnable dans ces histoires et s’obstine à espérer l’impossible. Alors elle l’attendait malgré tout.

Elle essayait de se persuader que ça allait, qu’il ne lui manquait pas, qu’elle s’en foutait. Alors elle allait en taverne, où elle trouvait tout le monde ennuyeux, où les conversations lui semblaient creuses. Elle avait envie de secouer les gens, de leur crier en pleine face qu’il était parti et que plus rien n’avait d’importance, que le ciel s’était assombri, que le soleil avait pâlit et qu’ils devraient se taire et rentrer chez eux.
Plus rien n’avait d’importance. Il n’était plus là.

Et la minute d’après, elle pensait qu’il était peut-être mort. Elle voulait aller là où le cheval avait été retrouvé, voir s’il n’y avait pas d’indices, n’importe quoi, quelque chose. Mais les temps n’étaient pas cléments, et elle serait morte dans les deux jours en partant seule sur les chemins. Pourtant elle devait savoir.
Alors elle avait contacté la seule personne qu’elle connaissait qui lui aussi – en son temps - avait fuit, qui lui aussi avait voulu changer de vie, changer d’identité même. Son oncle, Marin. Elle ne le connaissait que depuis peu , mais elle savait qu’il connaissait du monde un peu partout, des types pas très recommandables, des types qui trainaient et fouinaient dans les tavernes et les ruelles, qui se baladaient sur les chemins, qui trafiquaient sur les marchés et dans les ports. Des types qui finiraient peut-être par découvrir où il était.
Mais pour l’instant, rien. Il était trop tôt de toute façon, le temps de prévenir tout le monde un peu partout aux quatre coins du Royaume. Alors Gabrielle songeait aux lacs sombres, aux falaises abruptes, aux dangers.

Elle se demandait où il était. Mais elle se demandait surtout pourquoi il était parti comme ça. Elle tentait de comprendre. Elle avait cru comprendre et puis non, l’esprit d’Enzo restait insaisissable, tortueux et complexe. Et elle ne comprenait pas.
Elle n'était certaine que d’une chose - ou du moins elle voulait en être certaine, parce que penser le contraire était trop douloureux. Il ne lui avait pas menti, il avait été sincère.
Et ça rendait son absence encore plus difficile à supporter.

Alors elle repartait dans un accès de rage et de colère. Pour éviter d’exploser, pour se défouler, elle partait parcourir les remparts de la ville à grandes enjambées jusqu’à s’épuiser, elle chevauchait si longtemps que ses cuisses en devenaient douloureuses, elle s’entrainait à l’épée jusqu’à en avoir des crampes, elle malmenait son corps pour se rappeler qu’elle était encore vivante, qu’elle n’était pas aussi morte que son âme semblait lui dire.

Et Lui, finalement. S’il était mort, quelle aura été sa dernière pensée ? Et s’il était vivant, l’oubliait-il un peu plus chaque jour ?
Elle se demandait s’il se doutait de son état à elle, s’il imaginait à quel point elle souffrait.
Et elle repensait à son crime, à cette mort donnée dans cette chambre d’auberge. Et elle se sentait encore plus coupable, encore plus maudite. Un geste impardonnable qui n’aurait servi à rien. Un geste qu’elle regrettait chaque jour un peu plus. Elle voulait le retenir et il l’avait quittée. Il avait fuit, à cause d’elle, elle le comprenait à présent. Ou elle croyait comprendre. Elle n’en savait rien… Et puis qu’importe.

Gabrielle n’en pouvait plus, sa flamme s’éteignait, il n’était parti que depuis peu, mais déjà elle s’amenuisait, la vie lui devenait indifférente et la mort la tentait, mais personne ne s’en rendait vraiment compte.

Alors cette nuit, dans son lit, fixant le plafond à la lueur vascillante d’une bougie, elle s’interrogeait. Une vie maudite valait-elle vraiment le coup d’être vécue ?
Et avant de sombrer, elle eu cette dernière pensée...

Enzo.


*Benjamin Biolay (pour info, le nimbutal est un des somnifères les plus puissant du marché)

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Marin_bellay
[La fuite en amour ne vaut que pour celui qui a cessé d'aimer.]*


Furieux!

Il était encore furieux même si le vélin en provenance de Gabrielle lui était arrivé il y a déjà plusieurs heures! Furieux de voir sa nièce s’être ainsi amouraché de ce sale gamin qui se conduisait comme le dernier des imbéciles! Il l’avait rencontré, il y a quelques temps, lors d’une mémorable partie de Ramponneau. Il l’avait vu jouer les noblieaux qui veulent se donner un peu de relief en jouant aux mauvais garçons. Et il avait déjà été agacé par l’arrogance du jeune coq. Mais elle l’aimait et ça, Marin savait le respecter. C’est ce qui leur avaient manqué à lui et sa fratrie, et il ne ferait certes pas les mêmes erreurs que ses parents!

Voilà donc que, malgré ses sentiments plus que mitigés envers le jeune homme, il mettait tout en oeuvre pour qu’on le retrouve! Il avait immédiatement contacté son fidèle Grognard** et lancé le branle-bas dans ses réseaux! Le Lépreux s’occupait des recherches dans les bas-fonds auprès des mendiants et autres estropiés spécialisés dans la manche et le petit larcin, tandis que La Belette, quand à elle, se renseignerait dans les Bordels du Sud. Grognard, pour sa part, faisait jouer ses relations dans les administrations et les milices. Quelques écus bien placés permettraient de savoir si l’idiot s’était retrouvé au cachot… Ce qui était encore la meilleure chose qui pouvait lui arriver.

On avait retrouvé le cheval et une chemise du Blackney, ça leur donnait au moins un point de départ. Enfin plusieurs, puisqu’ils n’avaient pas été retrouvés au même endroit. Quelqu’un voulait brouiller les pistes. Mais qu’importait! Une toile aux mailles serrées était en train de tisser à la vitesse d’un cheval au galop. Le bouche à oreille de la lie du Royaume était le plus sûr moyen d’obtenir rapidement des informations. Le jeune homme commettrait bientôt une erreur et Marin serait là pour le cueillir! Peut-être avait-il réellement intérêt à disparaitre pour éviter le courroux d’un oncle un peu trop protecteur!
Mais pourquoi Gabrielle était tombée amoureuse de cet animal! Et son cousin en plus! Ceci dit, ce n’était pas un souci pour Marin, il n’avait que faire des règles. Non, il était juste agacé de le voir incapable d’assumer ses sentiments pour sa jolie cousine.

Prend garde à toi Enzo Blackney! Tu as intérêt à avoir de bonnes raisons d’être parti! Mes hommes sont en marche et bientôt, où que tu sois, ils te retrouveront! Et ce jour là, tu regretteras amèrement d’avoir fui comme un lâche!



* Eugène Cloutier
** Merci Monsieur Leblanc…
Asphodelle
[abandonner après voeux de bonheur l'être aimé est le moyen de torture le plus cruel et le plus meurtrier que l'homme ait jamais crée]*



Elle ne parvenait pas à faire continuer d'évoluer les courbes de sa plume, sur ce papier dont elle sent toutes les aspérités au bout de la matière cornée.

Elle ne parvenait pas à terminer le projet sur l'Intendance de la Garde Episcopale, que ses soldats attendaient, depuis deux semaines.
Chaque jour, les yeux se faisaient plus vague, plus suspects. La fatigue du corps n'était pas gênante, la plus difficile à surmonter était celle de l'esprit.

Son mariage était dans quatre jours...pourquoi alors, ses yeux sont-ils si secs de joie, et si mouillée de peine? Ne devrait-elle pas caracoler comme elle caracolait il y à quelques semaines?

Elle n'avait même plus l'emprise de se poser de questions. La solitude était la seule ombre qui répondait à ses interrogations, et elle était en soi, la pire des réponses, et la pire des interlocutrices.

Déposant avec lassitude la plume sur le buvard, elle pose son front dans sa main...comme pour tenter de trouver résignation, ou bien force, à cette humeur qui l'étouffait.

Tout à coup, un pigeon.
Mot de demande particulière d'un de ses Gardes? mot de son Cardinal Connétable? elle n'avait guère d'autres genres de missives que cela...à moins que ce ne fut une lettre de Philippe? une lettre d'amour qui pourrait la rassénérer?

Elle s'approche et ouvre la fenêtre.

Elle offre quelques graines, et prends le pli.

Faisant retomber sa main, le reste de graines s'éparpillent, tandis quelle regarde le pli qu'elle venait de sortir de son étui...pli...ou plutôt "carnet d'invitation" adressé à Enzo pour son mariage...et qui lui revenait sans avoir été ne serait-ce que décacheté.

Ses yeux déjà sombre, se liquiéfient dans un reste de découragement.

Pourquoi?

Qu'était la raison de ce pli non ouvert? lui était-il arrivé quelque chose? C'est sa première angoisse, car une mère aime et continue d'aimer même si son fils la rejète. Et Asphodelle qui n'avait pas de lien avec son nom, l'aimait encore comme on aime sa progéniture.

Est-ce qu'Enzo ne voulait plus avoir affaire à elle? après tout...la dernière fois qu'ils se sont vus, il lui a vertement fait comprendre qu'il n'avait plus besoin "qu'on s'occupe de lui comme un gamin"...

A cette époque, il était Garde Episcopal, et pour lui était né dans le coeur d'Asphodelle l'amour d'une mère. Devant sa façon destructrice de vivre, de vivre? de brûler sa vie et d'aimer cela plutot, elle avait tenté de lui montrer le côté du sentier qui ne franchissait pas ronces, pièges dangereux voire mortels, et surtout, affublé d'armes à foison, destinées contre lui ou les autres dans son égoïsme et sa froideur déferlantes. Il l'avait repoussée puis finalement rejetée sans scrupules. Il préférait le danger, et la falaise au sentier bordé de paix et d'amour du prochain.

Il y avait en lui une fragilité, une brisure qu'il tentait de réparer par tous les excès possible. Il y avait en lui un ascendant qui réclamait d'être réprimée par la violence et des gifles!! qu'il comprenne ce qu'est être un homme!! Qu'il se secoue par tous les Saints!!

Mais sa léthargie dans ce cloaque de mélasse négative et mal tournée ne semblait pas s'être détournée de son but auto-destructeur...à la vue des quelques lettres distantes et dépourvues d'humeur claire qu'elle avait reçu depuis leur dernière vue...Enzo semblait être un bateau à la dérive...elle n'avait pas réussi à l'amarrer...et il refusait de l'être...

Et depuis? quel port d'attache avait-il trouvé? en avait-il seulement trouvé un? était-ce un endroit clair, et lumineux? reposant et le poussant à combattre, puis tuer ses démons? Etait-ce cette crique reposante qui apaise l'âme, et ne pousse plus qu'au bonheur et à la chaleur humaine, parce que le manque est comblé, parce que le coeur est réparé, et la fissure comblée?

Les chiens blessés mordent sans cesse...et Enzo était égal : tout comme être humain portant en eux une blessure profonde qui saigne, ils se défendent en mordant, en montrant les crocs, en feignant ou en embrassant l'apathie, tous les cotés désagréables possible, et cherchant à éviter l'amour des autres, ou leur aide, par une arrogance qui ne rends plus personne dupe.

Et avec les femmes? s'était il calmé ou là aussi, avait-il toujours besoin de trouver des cuisses aisément entrouvrables et des filles pas trop farouches pour lever la jambe, afin d'y puiser son besoin de lacérer ce qu'il y à en lui de raisonné, et donner libre cours à sa peine sous la couverture risible et grotesque d'un soi-disant plaisir!!
La dernière fois...ce n'était certes pas le plaisir qu'elle avait vu brillé dans ses yeux lors qu'il conta son escapade éhontée au Boudoir des Sens.

Et l'amour? cette Gabrielle réussissait-elle là où la vie échouait, là où son père ou son propre amour à elle avait lamentablement échoué? Que faisait-elle de lui Gabrielle? et lui? que faisait-il d'elle? Etait-il toujours seulement avec elle? ou alors...ou alors...

Il y avait ce pli...et le pigeon n'avait amené que des interrogations...mais aucune réponse.
La peine du mal-être constant d'Enzo la poursuivait chaque jour, même dans ses moments heureux...mais il était vrai que par-dessus tous, c'était la crainte pour sa vie qui dominait. A vivre dangereusement, on met son coeur au bord de l'impasse...là où les battements s'agitent...puis cessent.

Il y avait un peu trop de tristesse et de réponses non découvertes...un peu trop de déception aussi que ce ne fut ceci et non un cachet du Plantagenêt...
Asphodelle dans un geste de désespoir et d'énervement, attrape le premier truc qui passe et le fait voltiger à travers la pièce : une pièce ramenée d'Orient...un morceau de frise chypriote...qui se brise...comme son coeur.

Le pigeon attendait.
Elle attendait.

Après le ras-de-marée, le silence.

Les bras ballants...elle pose doucement le pli sur son bureau.

Devait-elle écrire au père d'Enzo? en savait-il plus qu'elle?
Mais si le jeune homme ne voulait plus la voir, par lassitude ou oubli, elle ne recevra pas plus de réponse, le père d'Enzo n'était pas non plus connu pour sa grande charité d'âme.

Elle ne voulait pas remplir sa vie d'un peu plus d'attente...elle ne voulait plus rien attendre d'ailleurs...ni de la vie...ni des autres...ni de l'amour.

Il fallait reprendre ses esprits...et raisonner. Le coeur, pour aider et soutenir autrui, les sourires aussi, pour apporter un peu de baume aux gens malmenés dans cette tourbe ... mais elle devait se considérer exclue du manège. Une prière pour Enzo. Une prière pour son Fiancé. Une pensée pour l'avenir...long ou court, peu importe. Une fraise des bois au diner. C'était tout.

Elle renvoie le pigeon : avec lui s'envolaient ses dernières illusions.


* de Moi-même.
Isleen
Pas de nouvelle, bonnes nouvelles
dicton


Pas de nouvelle, bonnes nouvelles, la rouquine doute de la véracité d'un tel propos, mais pourquoi se préoccuper de ne pas avoir de nouvelles de son boss, hein pourquoi ? Il peut se passer longtemps avant qu’il ne fasse appel à elle, avant soudain un matin de se réveiller, de se souvenir qu’elle existe et de lui trouver une occupation pour la journée, la semaine ou plus longtemps, selon la mission confiée. C’est ce qu'elle pense qu'il doit se passer dans la tête d'Enzo, l’irlandaise, lorsqu’il la convoque après une longue pause. mais ça lui convient parfaitement à la rouquine, elle gagne de quoi vivre et à coté elle fait ce qu’elle fait toujours et encore : elle cède à sa pulsion sans retenue aucune sans trop se soucier de savoir si demain, le soir même, elle aura de quoi manger. Alors, s’il ne fait pas appel à elle, c’est que tout simplement il n’a rien à lui confier, aucune raison donc de se préoccuper plus que cela, surtout tant qu’Audoin ou Gabrielle ne vient pas lui demander de l’aide pour chercher le disparu, et lui apprendre tout bêtement qu’il a disparu. Logique non ?

Pas de nouvelle, bonnes nouvelles

Isleen pourrait s’inquiéter pour Enzo, si elle savait qu’il a disparu. Ca peut en étonner plus d’un, en rendre jaloux un autre, qu’elle s’inquiète pour cet homme antipathique aux yeux de beaucoup, mais pour elle, il a tout simplement un caractère de chien, rien de plus, pas de quoi fouetter un chat. En gros, il a un caractère tout aussi déplorable que le sien ou presque, il le fait juste à la façon d'un jeune noble plein de manières et bourré d’écus, c’est tout. La rouquine comprend bien ce qui peut se cacher derrière justement mais c’est son soucis, chacun ses problèmes et sa façon propre de les résoudre. Alors oui elle peut s’inquiète, en plus elle est pragmatique, s'il lui arrive malheur elle perd son job, et elle y tient.

Pas de nouvelles, bonnes nouvelles

La vie de la cleptomane continue dans ce Languedoc qu’elle découvre, elle travaille de-ci de-là, farfouille des poches, chipe des fripes, emprunte un couteau... bref fait ce qu’elle sait faire. Elle continue sans se soucier de l’absence de nouvelles. Elle continue d’aller en taverne, dès fois que Monsieur y pointe le bout de son nez, et que soudain ça lui fasse tilt : "Isleen j’ai un truc à te faire faire ! "

Pas de nouvelles, ça commence à faire long !


_________________

pas là jusqu'à début juillet
Emeline.
Dis, quand reviendras-tu?
Dis, au moins le sais-tu
Que tout le temps qui passe
Ne se rattrape guère...
Que tout le temps perdu
Ne se rattrape plus! *



Carcassonne- Languedoc- un champ d'olivier.

Depuis combien de temps ces petites soirées n'avaient plus le gout des jeux d'enfants ? La môme ne pouvait que constater l'état de Gabrielle, elle ne pouvait qu'écouter les brides d'informations que la noiraude lui transmettais et les mots qui revenaient sans jamais prendre fin : '' Des nouvelles ?'', ''une personne me manque'', '' Des nouvelles ?'', ''Je vais le tuer'', '' des nouvelles'' ? Mais personnes n'avaient de nouvelle du Blackney et tous semblait perdre le peu de courage qui leurs restaient, tous sauf elle. Emeline en avait un peu prêt rien à faire que le Grand, le Beau, le Fort soit Dieu seul sait exactement ou.

Elle aurait put même continuer sa petite vie tranquille, en compagnie de ces macarons et de sa bonne humeur, mais cela touchait son amie et là était tout le problème. Entre soupir et attente, Gabrielle n'était plus vraiment là-même, plus sensible, plus colérique, moins patiente sans doute. Ceci était le point de vue d'une étrangère et peut-être avait-elle tort. Mais alors qu'elle voulait revoir la joie sur le visage de la délaissée. Emeline ce surprit à penser à Enzo.

Ou était-il ce petit sottard ? Pourquoi au moment ou elle commençait à l'apprécier ce petit nobliau disparaissait de la circulation laissant une partis de son sang angoissée ? S'appuyant sur le tronc d'un olivier, la petite soupira. Rien n'était facile et l'abandon en amour était pire que tout sans doute, mais pourquoi était-il partis et surtout ou est-il ?

Un soupir quitta ses lèvres et elle ferma les yeux un instant, Gabrielle arrivera-t-elle à tenir sans lui ? Arrivera-t-elle à rester debout ? Les jours passaient et Emeline en doutait de plus en plus. Dieu qu'il était horrible de constater que vous êtes impuissant et l'autre qui ne montre pas le bout de son nez et l'autre qui ne pense pas à la souffre qu'il provoque et l'autre qui... que fait-il finalement ?

Et ses phrases qui revienne sans arrêt, toujours les même tournant en boucles : '' Et s'il meurs ?', '' Des nouvelles ?'', '' Mais, s'il meurs''. Emeline aurait tant voulut répondre :'' Et s'il était mort Gabrielle ? S'il était mort... Ton Enzo.''

Soupir qui quitte les lèvres de la petite, et alors qu'elle ouvre à nouveau les yeux sur le soleil du Languedoc, elle espère qu'il reviendras. Ton image la hante, elle nous parle de toi tout bas, elle as le mal d'amour, et elle as le mal de toi. **






*Barbara
** Barbara modifié légèrement.

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Enzo.blackney

                  Ô Mort, vieux capitaine, il est temps ! levons l'ancre !
                  Ce pays nous ennuie, ô Mort ! Appareillons !
                  Si le ciel et la mer sont noirs comme de l'encre,
                  Nos coeurs que tu connais sont remplis de rayons !

                  Verse-nous ton poison pour qu'il nous réconforte !
                  Nous voulons, tant ce feu nous brûle le cerveau,
                  Plonger au fond du gouffre, Enfer ou Ciel, qu'importe ?
                  Au fond de l'Inconnu pour trouver du nouveau !

                  Le Voyage – VIII – Les Fleurs du mal, Charles Baudelaire


La main dans un ruisseau
Un jour. Lequel ?
Juin 1460


Les yeux fermés, tout est calme. Ou tout semble l’être tout du moins. Il n’a pas senti les coups de pieds qu’on lui a assenés, ni les voix, ni le fait qu’on lui a retiré ses bottes et son épée. Il est hors du temps, l’esprit bien loin abandonnant le corps aux gestes de violence qui le martèlent. Stupide mort. Oui, Enzo est là, étendu près du ruisseau, les doigts ne sentant même plus le courant qui avance et vient se glisser entre eux. Il est là, tranquille. Presque trop serein. Il est là, et ne bouge plus. Respire t-il ? Qui le saurait ? Il a été naïf dans son besoin d’oublier Gabrielle. Si naïf qu’il a voulu faire croire qu’il n’était pas noble, que sa condition était la roture, s’oublier, changer d’identité, surtout pour l’oublier Elle. Et toute les responsabilité de son rang. Il a agit en pauvre crétin. Qui n’a pas fait attention, qui n’a pas surveillé qu’on avait deviné qu’il ne venait pas de la roture, que ses allures, sa façon de parler, et le reste, démontraient qu’il n’avait pas eu l’éducation de la rue. Il a été assez naïf pour croire que quelques vêtements pourraient le faire devenir aussi roturier que le gueux du coin de la rue. Pourtant, c’est qu’il n’est pas si bête le Enzo, et il était presque impossible de comprendre comment il a pu réussir à se mettre dans un tel merdier. Il avait eu besoin de boire. Beaucoup. Il voulait éviter les auberges, les tavernes et les bordels dans lesquel un homme comme lui aurait pu aller. Et dans la boisson, dans cette douleur vive qui le martelait depuis son départ, il avait réussit à délaisser sa vigilance, une part de lui-même et son tempérament de défection. Il s’était rendu aveugle à des choses évidentes, et s’était mis dans un pétrin monstre. Oui, monstre, car il était toujours là. Au sol. Inerte. Même le torse semblait ne plus se lever à chaque nouvelle respiration. Il n’y avait pas de doute à avoir. Enzo devait être mort. Comme ça. Stupidement. Inéluctablement. Il avait voulu qu’on l’oublie, disparaître à jamais, ne plus exister aux yeux de sa famille, d’Asphodelle, de Gabrielle, d’Isleen et tant d’autres. Bien, franchement Enzo… c’est une réussite. Toi, là… étendu sur le bord du ruisseau, de ton sang qui se mélange un peu à l’eau, cette main qui ne tremble pas. Ce corps qui ne répond pas. Je pense que tu es mort. Putain, tu as largué ton narrateur, faut le faire ! T’es vachement con, finalement…Le soleil est haut dans le ciel et vient brûler ton corps endormi, tandis que la vie semble continuer autour, malgré l’arrêt de la tienne. Dans ce décor en désordre. Dure époque. Stupide fin. *

Et après…?


                      Là, tout n'est qu'ordre et beauté,
                      Luxe, calme et volupté.

                      L'invitation au voyage – Baudelaire



Tout est si calme. Les yeux clos, je pourrais presque sourire de ce sentiment de sérénité. Je me sens ailleurs, et la douleur fulgurante ressentie dans mon épaule, ce flou dans les yeux qui m’a fait paniquer, cette envie malsaine d’arrêter ma vie, incapable d’être si loin de toi, s’effrite et vogue au-delà. Je me sens bien, libéré des maux que je n’ai jamais été capable de communiquer en mots. Rien ne diverge, tout est ordonné et il n’y a plus cette sensation qui me tourmente à chaque instant, cette dualité qui me ruine et m’empêche de dire bien des choses, mais me fait faire des choses tout à fait indécentes. Je me sens bien, et c’est tout à fait étrange. Comme si j’étais…Mort. J’ouvre les yeux, mais rien. Tout semble si doux et paisible, je sent une chaleur venir caresser ma joue, et le vent s’engouffrer dans mes cheveux. Il n’y a personne, et c’est magnifique. Je balotte, je prends de la hauteur, de la distance. Je me sens voyager dans un endroit qui m’est si inconnu, et je me demande ce qui se passe. Suis-je mort, véritablement ? Je regarde donc autour de moi. Un silence, des plaines et des vallons, de la chaleur et le bruit de l’eau qui coule… L’eau qui coule. Je me souviens alors. La sortie de la chambre, je chancelle, je tombe et roule avant de voir que du flou, et ressentir une douleur vive. Oui, je me rappelle. Mais alors… que fais-je ici ? Et mon cœur qui ne s’affole pas alors que je suis inquiet, et cette beauté qui se dresse devant mes yeux. Un paradis… Suis-je vraiment mort ? Je déglutis, même si mon corps ne ressent aucune angoisse. C’est si étrange. Alors j’avance légèrement, parcourant ces chemins inconnus et voyant devant mes yeux ce qui semble être ma vie…

                      Left for dead, heaven is only in my head
                      In my head, in my head
                      In my head, in my head

                      The Well And The Lighthouse – Arcade Fire


* JD Gevaudus, même si je l’ai un peu changé.
Trad.
Laissé pour mort, le paradis est seulement dans ma tête
Dans ma tête, dans ma tête
Dans ma tête, dans ma tête.

_________________

© JD Alcalnn pour la citation. Création originale de JD Marin. - Déménagement dans 7 jours, répond au RP comme je peux.-
--Frere_noal


Frère Noal s’en revenait d’une vente de vins et de fromages pour son monastère. Il était de fort bonne humeur, le Très Haut ayant été à ses côtés lors de la négociation. La journée était magnifique, l’été arrivait, l’air était chargé de senteurs lourdes de fleurs. Pour tout dire, il se sentait un peu engourdi et aurait volontiers donné les rênes à son novice Aymon pour aller s’allonger dans la charrette, désormais vide, et piquer un petit somme. Mais Aymon, bien que fort dévoué, était un simple d’esprit et Frère Noal avait peur qu’il coince une roue dans le bas fossé ou qu’il casse un essieu en faisant cavaler l’animal plus vite que de raison.
Mais, malgré l’impossibilité d’une petite sieste réparatrice, il était de bonne humeur et il souriait à son bêtat de novice tout en chantonnant.


"J’ai hâte de retrouver notre monastère, pas toi, Aymon ? Nous y serons avant les vêpres et nous ne devrions pas râter le repas."

Oui, car voyez-vous, bien que dévoué Aristotélicien et homme fort vertueux, Frère Noal était légèrement gourmand. Sa panse bedonnante était là pour le prouver. Mais il pensait que le Très Haut saurait lui pardonner ses quelques malheureux excès dont il se confessait souvent. La vie d’un moine n’est pas toujours très amusante et il faut bien trouver quelques compensations, la bonne chaire n’étant pas le plus coupables des plaisirs en ce bas monde après tout.
Bref, ils étaient donc tous les deux sur les chemins de ce coin du Royaume, et Frère Noal se demandait si Frère Martin, le responsable des cuisines, aurait fait sa délicieuse soupe au lard quand Aymon s’agita, faisant trembler la charrette. Il se tortillait mais le pauvre ne parlait guère que par onomatopées et il était parfois difficile de le comprendre. Mais Frère Noal le connaissait bien et comprit vite que le novice devait aller assouvir un besoin bien naturel.


"Calme-toi, Aymon, je vais m’arrêter."

Chose dite, chose faite. Le novice fila sur le bas côté et Frère Noal se dit que se dégourdir les jambes lui ferait du bien. Il descendit donc de sa charrette, de manière moins souple que le jeunot et fit quelques pas sur le chemin. Il était en train de se demander si lui même ne profiterait pas de la pause pour arroser les pâquerettes qu’il entendit le novice qui riait.
Le moine fronça les sourcils et se dirigea vers le rire.


"Aymon !"

Le moine tomba sur la scène choquante du novice urinant sur les braies d’un homme allongé sur le sol, inconscient, du sang dans le cheveux. Blessé ? Mort ? Il ne saurait le dire. D’un geste peu patient, il poussa Aymon et le regarda d’un œil sévère.

"Tu seras battu pour ce geste ! A quoi penses-tu donc !"


Puis il reporta son attention sur l’homme au sol. Un jeune homme. L’âge d’Aymon, un peu plus peut-être, difficile à dire. Il se baissa et tenta de saisir une respiration, un battement de cœur… Il lui sembla bien que. Mais il ne saurait en être certain. Quoiqu’il en soit, il n’allait pas le laisser ici. Il méritait au moins une sépulture décente.

"Aymon, tu vas m’aider, nous allons charger ce pauvre hère sur la charrette. On verra ce qu’on peut faire pour lui."

A vrai dire, Frère Noal pensait qu’il était trop tard et qu’on ne pourrait guère que prier pour que le Très Haut accueille l’âme de ce jeune homme au paradis.

"Tu prends les épaules, je prends les pieds. Aymon ! Ne touche pas à cette épée ! Ca n’est pas un jouet ! Tu pourrais te blesser !"

C’est qu’il était lourd le bougre. Faut dire qu’il est grand aussi. Soufflants et transpirants, Frère Noal et Aymon réussirent à remonter le corps jusqu’au chemin, le trainant parfois plus que ne le portant, et à le hisser sur la charrette.

"Va me chercher ses bottes et son épée. Et que je ne te vois pas la brandir comme un chevalier pourfendeur de dragon, sinon il t’en cuira !"

En attendant le novice, il fixa le jeune homme et adressa une prière au Très Haut pour qu’il accorde la grâce de la vie à cet inconnu, personne ne méritait de mourir aussi jeune et le Trés Haut se montre parfois miséricordieux.
Il adressa également une deuxième prière rapide pour arriver à temps pour la soupe au lard. Le Très Haut est mystérieux et on ne connait pas toujours ses priorités, alors tant qu’à discuter avec lui.
Une fois le novice revenu, et l’épée et les bottes déposées auprès du corps de leur propriétaire, la charrette se remit en route.

Frère Noal était de moins bonne humeur, il ne chantonnait plus et se tint silencieux jusqu’à l’arrivée au monastère.
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