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[RP] Entremets, desserte, issue.

Astana
L'eau, et puis le mélange d'herbes. Par trois fois. Le pavot somnifère... et d'autres verdures séchées dont elle ne voulait pas connaître la provenance. La vielle carne lui avait dit d'y aller doucement, avec tout ça. Qu'il fallait pas jouer. Ni trop en mettre d'un coup, de ce foutu mélange. Alors la Danoise s'y était reprise à trois fois avant d'estimer que ça devait être bon. Sauf que c'était dégueulasse, en bouche ; absolument infâme. La consistance du breuvage n'était guère ragoûtante non plus. Mais pour séparer le jaune d'oeuf du blanc, fallait ce qu'il fallait. Et si c'était le seul moyen : et bien soit. A la lueur d'une bougie, Astana avait avalé son repas cru et à la va-vite, pendant que Blondin sommeillait plus ou moins paisiblement. Combien de temps ça allait prendre ? — Ça dépendra de vous, m'âme. Avec ça, ils étaient pas rendus...

Le Silence, alors. Qui enveloppe toute la tanche, et la blonde avec. Plongée dans un mutisme assez confortable, néanmoins.

Un, deux, trois.
Trois verres, qu'elle aligne, encore et encore. Comme ça. Tout en jetant des coups d'oeil mauvais, presque hargneux, au tas de vélins lui faisant de l'oeil. Écris, qu'ils crient ! Tu devrais leur dire, qu'ils sermonnent. Ah ouais ? Et écrire pour dire quoi ? « Je suis grosse, mais ne vous inquiétez pas pour moi, je vais le faire décrocher » ? Non. Ils n'ont pas besoin de savoir tout ça. D'ailleurs... personne n'a besoin d'être au courant. Dégagez. Et c'est ce qu'ils font : ils déguerpissent. Aidés par une main rageuse, qui les envoie virevolter dans l'air ambiant.

Crampe au ventre. Pas à cause du mélange, non. C'est la nervosité. Ça lui remue les entrailles, de pas savoir quand ni comment ça va se passer. De leur coté, les paupières se font lourdes. Elles brûlent, et la blonde doit lutter pour garder les yeux ouverts. Du coup, elle retourne sur la couche avec l'Endormi. Toute blafarde qu'elle est, mine de rien. Elle chope un bras qui traîne par là, l'enroule autour d'elle et lorgne le plafond de leur nid en espérant que Blondin ne se réveille pas.

Combien de temps ça allait prendre ? – Ça dépend de vous, m'âme.

Soupirs.

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Johannes
« Arvi, arvi les amis ! », il crie Blondin, au départ des montagnes. Plus de besace qui ballote à la hanche, une lourde poche, goutte de cuir, gonflée d'herbes longues. Arvi, arvi ! Un vieux sur la route, peut-être qu'il a cent ans. Je suis vieux d'un siècle, annonce le vieux. Le blond savait déjà. Il marche encore, en lançant des saluts, arvi aux arbres, arvi aux fleurs. Le vieux le suit. Arvi au vieux ! Mais le vieux s'accroche ; il a des rides creusées comme des fossés, on en voit pas le fond. Il demande :

« Tu cueilles, Johannes ! »
« Arvi ! Ah, cueillette de juillet ça. »
« Et pourquoi tu cueilles des herbes en juillet ? »

Le blond hésite. Il ne sait plus. Pour les pois des murs, il se souvient. Il faut faire décrocher les pois des murs. C'est pour faire décrocher les pois, qu'il répond. Et tu vas faire décrocher les pois des murs, avec des renoncules et des potentilles des frimas ?, que le vieux interroge. Oui qu'il va faire. Il connaît un autre moyen le vieux, que de faire décrocher un pois du mur, qu'avec des renoncules et des potentilles ? Le vieux l'agace, ils se chenaillent, fort. Arvi au pois !


Mauvais réveil, de la sueur dans la tignasse – ce cagnard. Ça flotte un peu dans la tête un Blondin, le temps de retrouver où il est, avec qui, et pourquoi qu'il est là. La danoise pionce, ou fait semblant. Tu l'as bu, ton dernier bouillon ? Il tend la nuque pour se faire une idée de la scène, des vélins valsés, ce gâchis, et un pot vide. Oui tu l'as bu. Maintenant, je peux avoir peur, même si tu verras pas. Il se redresse dans les draps, difficilement, et se penche par-dessus la danoise. Lui appuie une main sur une tempe. C'est pas froid, c'est pas trop chaud. Ça va encore.

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Humpty Dumpty sat on a wall.
Humpty Dumpty had a great fall.
All the king's horses and all the king's men
couldn't put Humpty together again.


L. Carroll
Astana
Si elle pionce, qu'elle a de la fièvre ? Même pas.

Non. Elle pense juste, les billes closes. A quoi ? Des choses, et puis d'autres. Des trucs sans importance, de vieux souvenirs qui s'entremêlent. En fait, elle s'occupe simplement l'esprit. Pour pas cogiter sur ce qu'il se passe plus bas. Faudrait surtout pas se mettre à avoir des regrets maintenant. Et puis c'est trop tard. A partir de là, chacun son boulot. Fera, fera pas son effet, la tisane ? Le regard du blond pèse, ça se sent. A cause de la main qui s'attarde un peu trop sur sa tempe.


Arrêtez de me regarder comme si j'étais déjà morte, Johannes.

Paupières closes, toujours. Ce qui ne l'empêche pas d'attraper à tâtons une bouteille qui traîne. En fait non : pas soif.
La boutanche reste où elle est, et Astana de se caler dos au blond, pour une fois.


Ça ira. Même si ça s'passe pas comme prévu... ça ira.

Très certainement que ça doit sonner faux, parce que l'intonation n'y est pas. Bien qu'elle en soit convaincue, que ça ira. Pour lui. Faut pas s'leurrer.
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Johannes
« Pas comme si vous étiez morte. Je veille, c'tout. »

Et puis Blondin la ferme, oui ça ira. Pas qu'il y croit tellement, mais faut bien acquiescer, et puis il n'en sait rien, des choses. Il veille, c'est tout. Il se met à veiller sans toucher, esgourdes ouvertes. Il écoute son souffle, comment que ça lui sort par les narines, à quel rythme, à quelle longueur. Sans la regarder, pour pas lui lancer des œillades qui chatouillent la nuque, parce qu'elle râlerait encore. Si je le sais, je te connais de loin, des contours, mais je te connais quand même un peu danoise.

Fin de mâtinée, elle a fini par s'endormir. Lui aussi. Aussi qu'il ronfle en douceur. Le soleil qui tape sur un bout de drap, et une longe après qui tape sur un bout de front, alors Blondin se retourne, ronchonne, s'éloigne vers l'autre bout du pieu. Ça bouge dehors, ils vivent les gens, ils marchent, ils causent un peu, ça remonte jusqu'à leur étage par bribes. Le soleil passe l'arme à droite avec les heures. Blondin se réveille, la blonde aussi, un peu, avant de retomber dans un sommeil vague.

Pleine none, Blondin est sur une chaise, non loin du pieu. La bouteille et les vélins sont revenus sur la table, lui il est descendu en vitesse en bas, pour marchander une jatte d'eau, non râle pas Blondeur, c'est pas pour toi, c'est pour moi. J'ai soif. Il a pas bu, mais elle s'est assoupie. Elle a des petites grimaces qui lui agitent le museau, par secousses, toutes brèves. Peut-être que c'est juste des mauvais rêves, ou alors c'est le pois qui fait des siennes. Il sait pas, ça l'énerve.

Fin d'après-midi, elle respire lourd. Le blond vient reposer une patte sur sa tempe. C'est brûlant.

« Merdre. »
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L. Carroll
Astana
Ça résonne dans son crâne. On vient la chercher au fin fond de son cocon douillet. Fais pas l'enfant, on t'appelle. Faut remonter à la surface, en dépit des frissons qui la foutent trois pieds sous terre. Aucun souvenir des dernières heures passées. Y'a plus la notion de rien. Les crampes prennent toute la place ; un peu comme si elle n'avait pas bouffé depuis une bonne semaine et que c'était le dernier appel à l'aide avant la catastrophe. Mauvais signe ? Allez, debout Sa Blondeur. La Danoise ouvre des yeux cernés de gris sur Johannes. Toujours là, fidèle au poste.

Tout maladroitement, elle essaie de se redresser, se racle la gorge et retombe lourdement sur la couche. La mâchoire se crispe, et ses deux mains se fichent d'elles-mêmes sur son ventre.
Tu dois bien le voir, là, que je suis morte de trouille.

Elle roule sur le coté, la blonde. Et replie ses jambes contre sa poitrine, tant qu'elle y est. Après tout, une pression en plus ou en moins...


C'est pas... normal...

A tâtons, elle cherche un bout de drap à se foutre sur le corps. C'est le retour en plein hiver. Bien sûr que c'est la fièvre qui parle. Mais c'est pas la question. Je gèle sur place ! Ah, tu vas prendre vieille carne, si j'arrive à me relever et que je te retrouve ! Les crampes reprennent de plus belle, et la bouche de la rude se mue alors en une grimace douloureuse. Elle mord dans un bout de traversin :

Johannes !
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Johannes
Des bouts de draps sur son corps qu'elle fout, sa Blondeur. De la fièvre. De la fièvre qu'elle a. Elle se recroqueville comme un nourrisson, et ça lui fait bizarre, de voir son grand corps de danoise se refermer comme une huître. Non, c'est pas normal. Ça se sentait, que ça serait pas normal. C'est rien normal, tout ça. Alors elle se replie sur sa douleur. T'as froid sa Blondeur ? On a qu'un seul drap.

Et puis elle piaule son nom, le vrai, pas ceux qu'il se donne de duché en duché. Ça lui fait comme une frappe froide au blond. Elle n'a jamais fait ça, avant, sauf que ça se prenait le bec, mais le dire son nom comme ça, jamais. Même quand il lui a saigné une jambe une fois, quand il pleuvait et que son genou était rond comme un oignon, elle a rien sorti, elle a pas ouvert, rien.

Il peut bien regarder le blond, ça fera pas avancer ce qui se trame dans son bas cornet. Il amène la jatte, emprunte un bout de drap pour le tremper dans la flotte, frotte légèrement le drap sur sa nuque de danoise. Faut que tu reviennes sa Blondeur, que tu restes un peu sur terre, avec moi, à une toise de ton mal. Alors il la fait causer, même si ça mène à rien. Glisse une patte sur son ventre.


« R'gardez-moi. Qu'est-ce que vous avez, là ? C'est pas que la fièvre ? »

Au mieux, elle devra cogiter pour lui répondre, au pire, elle l'engueulera. C'est toujours mieux que de faire mariner sa peine toute seule, qu'il pense. Elle grincera des dents, de toute façon, mais faut pas que ça s'entende. Ça pourrait rameuter du monde. S'ébruiter. Mauvais. Alors il faut qu'elle cause, sa Blondeur, parce que ça s'annonce mal, son décrochage aux herbes et à l'eau.

Il tamponne la nuque avec le bout de drap mouillé, peut-être qu'elle voudrait qu'il tamponne ailleurs. Il sait pas franchement. Si qu'il en vu, faire des anges, mais jamais d'aussi près, jamais aussi longtemps, et toujours il s'en foutait un peu, c'était pas ses pois. Il montrera pas, mais n''empêche qu'il douille Blondin, il a les tripes qui mouillent de voir sa guerrière malingrer.

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L. Carroll
Astana
Billes rondes, qu'elle le regarde. Hé, tu te foutrais pas un peu de ma gueule en disant ça, Blondin ? Pour sûr que l'envie de beugler est là, bien ancrée. Mais entre la fièvre et les crampes lancinantes, y'a pas de place pour ça. Faiblarde qu'elle est devenue. L'eau lui fait du bien, ça lui remet un peu d'ordre dans les idées ; du coup elle le laisse tamponner. Les traits du blond ont changé, différents et à la fois familiers. Tu douilles ? Moi aussi. Faudrait bien qu'elle cause. Mais pour dire quoi ? Encore un tissu de conneries qu'il n'a pas envie d'entendre ?

D'ailleurs, c'est rare qu'il pose des questions comme ça, le Johannes. Ils font pas vraiment dans le questionnement, les deux. Parce qu'ils se heurtent toujours à un mur en face ; aussi aimable qu'une porte de prison. « C'est pas vos oignons ». D'habitude ils se contentent juste de dire. Ces vérités qu'on a pas assez dites, voire qu'on a aucune envie d'entendre. Ils causent, et les questions ils les posent en silence. Et sans questions officielles, pas de boniments à la clé. C'est tordu, mais ça marche.


J'ai... l'impression qu'on m'a foutue à poil dans un étang glacé. Voilà. Ça me prend jusque dans les tripes.

Un temps passe, pendant lequel Astana s'enfouit sous le drap, la main de Johannes avec.

C'est en train de me déchirer de l'intérieur !

Tout doux, le ton ! Plus un chuchotement agressif qu'autre chose. Le pire, c'est qu'elle déconne pas en disant ça. Ce truc est en train de lui ronger les entrailles pour lui décrocher un pois même pas désiré. Pour qu'il cesse de cuire, et qu'ils passent à autre chose. Dessous le drap, la danoise remue. Elle tourne, tourne, cherche une position comme une bestiole emprisonnée. Et puis elle voit... Ça, là. Une tache sombre, humide aussi. Par réflexe, elle broie la paluche du blond et remonte à la surface, paniquée. Non, ça ne va vraiment pas.
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Johannes
« Quoi ? »

Un museau ressort des draps, sale air. Quoi ? Qu'est-ce qui s'est passé là-dessous pour que tu refasses surface ? Un naufrage ? Le pois a causé ? Tes tripes ? Ta trouille ?

« Quoi ? », qu'il répète le blond. Borné. Et puis il relève un peu le drap, il voit rien. Qu'est-ce qu'elle lui chante sa Danoise ? Elle délire ? La grande fièvre, déjà ? Ça l'ennuie au blond, de rien voir de ce qu'il doit voir, il tire encore le drap, toise ses tripes à la blonde. Oui ça déchire, mais il entrave rien.

« Mais quoi ? »

Elle cause pas. Ça lui prend bien deux plombes, avant de comprendre que la bavure noire sur le drap, c'est de l'humeur. C'est qu'elle s'est pas foutu de toi sa Blondeur ta vieille, quand elle t'a vendu tes machins pour l'eau. Ça décroche. Un peu trop même. Blondeur et nausée. Ça cagne en plus.

Il remonte déjà ses manches le blond, puis repose une patte dans celle de la danoise. Regard contrit vers la tache. Même, de loin, elle s'est déjà agrandi un peu. Trois fois rien. Juste pour narguer son monde. Histoire de faire comprendre que ça saigne, là-dessous, qu'on le perd son pois.


« 'ttendez. »

C'est pas un fouineur dans l'âme, mais pour le coup il va déballer les affaires de la danoise, là, dans le coin. Il trouve son chanvre, pas sa pipe. Il prend la sienne alors, fait jouer l'amadou, revient poser son derche sur un bord de pieu. Les sourcils presque froncés, il présente la fumante à la blonde.

« Vous m'faites une pipe ? »

T'accrocher l'attention, ris, hurle, je m'en fous, mais reste ici. Blondin pose une paluche sur le front de l'avortante, pendant que les miasmes de chanvre lui remontent jusqu'au pif. En douceur. C'est toujours ça de gagné sur ce qui s'amène. Parce que si ça dure des heures, faudra que j'aille voir.
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L. Carroll
Astana
Elle se marre, les effluves de chanvre qui lui chatouillent les narines. Ah Blondin, c'est normal ça, qu't'arrives à m'faire rire même dans la pire des situations ? La blonde, elle se marre donc. Même si ça commence à faire mal. Que ça tire d'partout. Quelle grosse marade ! Et puis son rire, là, tout sincère qu'il était au début, se transforme en rire amer et nerveux.

Ah, ah ah... PU... tain !

Impossible de s'arrêter. Elle continue sur sa lancée, avec la sensation qu'on lui a foutu l'ventre dans un étau. Une larmichette pousse même jusqu'à faire son apparition au coin d'un oeil humide. Oh !? Tu vas pas te mettre à chialer, Sa Blondeur ? Tu peux pas nous faire ça. C'est pas le moment de flancher, pas maintenant ! Tout doux, on a dit !

T'y crois à ça, Johannes ? Foutue à terre par une TISANE !

Quinte de toux, et le drap qui remonte jusque sur le museau de la fiévreuse danoise. En dessous, elle serre les cuisses ; fort. Comme si ça pouvait arrêter le processus, ou... bref, elle serre. Ça lui fout des crampes supplémentaires, toute tendue qu'elle est. Une latte, puis une autre, et encore une autre. Le foyer chauffe, et Astana s'y accroche, le regard fou.

Je le sa-VAIS !

Délire ? Elle commence à s'agiter. Jusqu'à ce qu'un truc la frappe tout net : ce n'est que le début. Les prémices. Et les heures qui passeront n'arrangeront rien. Des gouttes lui mouillent les yeux ; elle cherche pas à savoir si c'est la sueur qui perle sur son front ou des larmes réelles. Non. Un hurlement brutal, pas étouffé pour un sou. Suivi de près par un autre. Et les mains qui prennent le ventre, qui s'y agrippent. T'es en train de t'épuiser, Danoise... avec quelles forces tu comptes continuer ? A ce rythme là, t'auras clamsé avant la nuit. D'accord. Quoi, d'accord ? Oui, mais toute seule.

Faut que vous sortiez ! Blondin ! Sortez !

Une main désigne la porte, alors que l'autre s'accroche par instinct à la pogne du blond.
C'est d'une logique implacable, té.

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Johannes
Mais qu'est-ce qu'elle mijote, sous son drap, pour bramer comme une louve ? Il l'écoute pas Blondin, il rejette le drap et ça montre une paire de cuisses serrées comme un étau, et des petites crevasses de raisiné sur le drap. Pourquoi tu serres, Blondeur ? Il décroche ton pois, c'est maintenant qu'il faut ouvrir. Il attend que sa Blondeur tire une dernière bouffée, et s'écarte pour éteindre la pipe. Manquerait plus qu'il mette le feu au pois. Il reprend une main dans la sienne, pour la relâcher.

« Quoi ? Voulez que j'aille faire un tour ? C'pas l'moment, et puis c'est la sorgue. »

Oui, c'est pleine nuit, et même que les autres michetons de l'auberge, ils doivent déjà ronfler comme des papes. Faut pas qu'elle hurle. Sauf qu'elle hurle. Alors, faut qu'elle morde, lui remplir le bec, et à défaut de pipe, il lui fout un côté de main entre les quenottes, le temps de réfléchir à quoi qu'elle pourrait mordre. C'est qu'il trimbale pas des petits bâtons dans ses poches le blond, quelques écus, de la poussière... Ou des chiffons. Du tissu, enroulé. Un bout de draaaaa...

« … AAAaaah ! Drap ! »

La garce ! Elle lui a croqué la patte, il l'a retirée net. Pas loin après, il lui propose un bout de drap tortillé. Le drap tu peux, vas-y, il s'en fout le drap. Il aime ça. Le blond grimaçant vient se poser près du champ de bataille. Faudrait qu'il sache. Pour savoir, faudrait qu'il ouvre, au moins la chemise, mais danoise est encore trop consciente pour permettre qu'il aille foutre son nez là-bas.

Alors il prend le parti de faire confiance au chanvre, un peu, à la touffeur et aux herbes de la vieille siphonnée. Il se frotte les mains le blond, avant d'en poser une sur chaque cuisse pâle. Qu'est-ce qu'elle fout, à serrer comme ça ? Tu crois que ça la fera partir, la douleur ? Q'nenni, elle s'accroche la douleur, et tu vas en baver d'avoir sifflé ton bouillon par trois fois, mon renard des landes.


« 'stana ? Faut qu'vous ouvriez ça. »
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L. Carroll
Astana
Mordre pour mordre, que ce soit dans une paluche ou un drap... Astana, elle fait pas la différence. C'est qu'c'est pas franchement le moment pour s'encombrer de menus détails pareils. Et puis d'ailleurs, pourquoi qu'il a beuglé ? Il aime bien ça, qu'elle morde, d'habitude. Bon. T'es jamais content, Blondin. Et qu'est-ce que tu veux j'ouvre ? Ça ? T'cheu dalle ! A la place, la nordique resserre les cuisses, même l'air y passe plus. Et puis elle le regarde, avec son bout de drap entre les dents qui dépasse sur le coté, et son air de vieux chien battu. Quel beau tableau ça fait.

Gouphrirèplékwiss !
J'ouvrirai pas les cuisses !

Comme je te sens venir là, avec ton air frondeur qui se pointe avec ses gros sabots !


Naon !

Elle fronce les sourcils, la blonde. Et sévère. Hors de question qu'il y jette ne serais-ce qu'un oeil, à ce qu'il se passe là dedans. Elle voit bien qu'il commence à perdre patience et que son attitude lui court sur le haricot. Mais comprends-moi, Blondin, essaie au moins. La fierté c'est toute une histoire, et il s'trouve que j'ai un égo surdimensionné, souvent. Les minutes qui suivent se font atrocement longues, ils se zieutent en chien de faïence, tandis qu'elle douille à souhait et n'a toujours pas écarté son monde.

Et puis...

Peu à peu, le tout se desserre, se détend. C'est pas tant qu'elle veuille ou quoi, mais y'a plus rien qui tient. Plus assez de forces pour jouer la crispée orgueilleuse croyant pouvoir s'en sortir au poil, et en solo. Ou alors c'est le chanvre qui fait son effet. Ou p'têtre un savant mélange des deux. Elle lui parle juste avec les yeux, au blond. C'est tout plein de leurs horreurs, qui en sortent, pendant un temps. Mais elle veut pas entraver la suite des évènements, pas même entendre, ni rien. Son corps fébrile retrouve sa position initiale : allongé. Un pan de drap vient couvrir son museau, le reste toujours entre les dents. Ça grince. Le traversin rejoint le drap à son tour.

C'est ça. Fais ce que t'as à faire... et laisse-moi crever de honte là-dessous.

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Johannes
Mais tu me fous les glandes, si que tu vas les ouvrir tes cuisses. Tu les a ouvertes une première fois, il y a de longues semaines de ça, et on se retrouve dans un joli merdier. Alors tu vas les rouvrir, tes jambons, pour qu'on puisse faire notre cuisine et réparer la bavure. Elle finit par ouvrir. Le blond il a un gros soupir qui lui remonte à la gorge, mais il le lâche pas. Nerfs à fleur de peau qu'elle est sa danoise, le moindre vent de travers et elle est capable de repartir pour la grande chevauchée – crevée de sa carne peut-être, mais pas du cornet. Se méfier de la blonde qui dort, même quand elle est embusquée derrière un traversin.

Bon. Il y est. Vrai qu'il aurait préféré un autre face à face, pour une pleine nuitée, mais pas le choix. Blondin, une paire de cuisse sanguinolentes. Bonsoir le pois, ta mère préfère se cacher la face, elle a pris de drôles herbes dans le ventre, guère en état. Moi c'est Johannes. Enchanté. Il remonte ses manches une seconde fois, comme un nageur un peu frileux, qui se prépare à sauter dans un lac sans fond, un matin d'hiver, parce qu'un zig lui chatouille sa lame dans le dos s'il saute pas. Pas enthousiaste, quoi. Et puis il remonte la chemise jusqu'aux hanches.


« Ouh. »

Ouh, c'est moche. C'est pas beau. C'est quoi ? Enchanté. Par Aristote. Si, qu'il a vu, gamin, son paternel, faire des anges pour quelques sonnantes. Mais pas d'aussi près, pas sous le voile. Pas ça. Oh non, d'Aristote. Les billes noires clignent un long moment, se rouvre sur la vision d'horreur. En haut du pieu, la tête de sa Blondeur a refait surface, horrifiée. Vite, rassurer son monde.

« J'm'en remettrai. », qu'il déclare Blondin. Pour un peu, il aurait l'air gouailleur. Sauf qu'il y a plus important que la dive susceptibilité de la danoise, là, c'est le naufrage, devant ses yeux. Paraît qu'on se fait à tout. Blondin pas. Blondin opte pour un air de convenance, et c'est la gueule toute marmoréenne qu'il va attraper sa jatte d'eau, histoire d'y voir plus clair, dans cette compote de sang et de... c'est quoi, ce truc gluant sur son index ? Pourquoi il se décompose un peu plus, le blond ? Et pourquoi elle se crispe régulièrement, danoise ? Et pourquoi de plus en plus souvent ?

Est-ce qu'elle pige seulement, ce qui est en train de se passer ? Il espère Blondin, parce que lui, il a pas envie de piger ce qui se passe. C'est pas possible, en plus. C'est trop tôt. Ça fait pas ça, aussi tôt, la fièvre, il veut bien, quelques crampes, un peu de sève pour le théâtre, si fait, mais pas plus. C'est déjà aussi grand son pois, pour faire autant de boucan à se faire évacuer ? Il pouvait pas sortir sagement, par la petite porte ? Non, toi, faut que tu chamboules tout sur ton passage ! Bien comme ta mère tiens. Pourquoi faire simple, hein ? Blondin éponge, il colmate, il parle pas.

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L. Carroll
Astana
Voilà, on y est ; qu'elle se dit. C'est maintenant. Depuis la vision d'horreur qu'elle a eu quelques minutes plus tôt, la danoise n'arrive pas à se sortir l'image de la caboche. Et le cramoisi qui souille les draps, et les mains de Blondin qui s'affairent, et sa trogne toute déconfite qui en dit trop long, et, et... Un haut le coeur. Tiens ça f'sait longtemps ! Ça s'annonce si mal que ça, Blondin ? Tu peux rien faire pour limiter les dégâts ? Parce que moi j'suis qu'une faiblarde planquée derrière un traversin, alors que tu sais y faire toi. J'ai rien entre les jambes, moi ! Enfin maintenant si, mais c'est que temporaire, hein ?

Elle vendrait bien sa peau, la blonde, pour être inconsciente juste quelques secondes. J'pas envie de rester. Assez pour s'échapper, arrêter de chouiner et oublier sa douleur. Parce que son pois, là, déjà d'une ça doit être un gars ; et puis c'est qu'il doit avoir des griffes pour lui lacérer l'intérieur du ventre avec une telle hargne ! Erreur ! Te mets surtout pas à penser à ça, la carnivore. Donne-lui un foutu prénom tant qu'tu y es ! ... C'est quoi ce bourdonnement dans les oreilles ? Et cette bouffée de chaleur soudaine ? Pourquoi j'ai la tête qui flanche ? Ah, c'est ça tomber dans les vapes ? Alors on peut y aller.

... Nenni. De furieuses crampes l'empêchent de fuir, et elle mord dans son pan de drap aussi fort qu'elle peut. Il a encore les mains dans le coin. Qu'est-ce que tu fous en bas Blondin ?! Vas pas me...


Mais... M...ERDE !

Ce seront ses derniers mots.

Les tous derniers avant qu'elle ne pose les yeux sur ce que le blond tient entre ses mains. Gluant à vue de nez. Qu'est-ce que... La blonde blêmit et ravale immédiatement sa salive. Là, c'est le palpitant qui tarde pas à s'emballer, et au reste du corps de sursauter... à la bourre. Prise de conscience subite, et tout aussi en r'tard : c'est réel. Ils sont en train de la décharger de ce qu'elle a dans l'ventre. C'est réel, palpable, et c'est... barbare. Elle causera plus. Intérieurement, elle se bouffe les joues pour pas hurler, ni fondre en larmes... ou pire. Elle se bouffe les joues, parce que si le blond est capable de faire ça sans ciller ni tourner des billes... faut lui retourner la politesse. Suffit des joues, serres plutôt les dents. Ce qu'Astana fait, les yeux vrillés sur un point fixe. Là, près du cou mais pas tout à fait.

Pas vraiment qu'elle est devenue insensible d'un coup. Mais y'a certains moment, vaut mieux laisser les émotions au placard.

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Johannes
Le blond a fait le tour des choses, il pense, pour l'instant. C'est bien beau, de recueillir les coulures, mais ne fera rien avancer. Aucun pouvoir, qu'il a. Alors il essuie encore un peu, par-ci, par là, pour donner le change, faire croire qu'il y a des choses à faire, pour décoincer tout ça. Et puis il essuie ses pattes, referme le drap sur les jambes. Pas la peine de faire durer le tête-à-tête. Il cause à la danoise.

« 'stana ? »

Ecoute-moi bien mignonne, parce que je sais pas comment on dit ces machins-là. Je sais déjà pas dire beaucoup de choses, mais alors ça... ça quoi ? T'accouches d'un fantôme ? Tu vas le pondre, ton truc mort, tu vas le pondre, et je sais même pas si on va le voir passer tellement qu'il doit être larveux, vu la taille de ton ventre. Mais tu ponds, là, présentement.

Il lui caresse le front comme un idiot, c'est pratique qu'elles aient un front, les souffrantes, au moins là on sait qu'on peut y aller, ça fait pas mal.


« J... Vous êtes en travail, là. Enfin j'crois. Enfin ça y ressemble. »

En fait c'est tellement engagé là-dessous qu'on y rentre comme dans du beurre normand.
« C'est... avancé. Enfin c'est commencé. »

Sauf que je ne sais pas combien de temps ça peut durer.
« Alors faut... attendre, que ça se fasse. »

Ni même si ça finira un jour.
« Que ça se finisse. »

Parce qu'il va bien falloir que tu nous le sortes, notre pois, et j'ai pas envie d'aller cureter pour vérifier ça.
« Mais... enfin, c'est un travail, quoi. »

Et vu comment tu douilles déjà, et vu les heures qui passent, je vais te faire gober tellement de fumée magique que tu en oublieras même ton nom.
« Va falloir qu'on vous garde vos forces... j'vais refaire une pipe. »
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Humpty Dumpty sat on a wall.
Humpty Dumpty had a great fall.
All the king's horses and all the king's men
couldn't put Humpty together again.


L. Carroll
Astana
En travail. Ça y ressemble. Que ça finisse. Pipe.

Elle opine du chef avec vigueur. Du moins, ça y ressemble, à de la vigueur. Maintenant, est-ce que ça en est vraiment, ça... Non. A vrai dire elle s'efforce d'entraver chaque mot, chaque geste. Histoire que ça imprègne bien. Des yeux inexpressifs au possible se relèvent sur Blondin qui tient sa pipe, généreusement fourrée. Machinalement, la blondeur la prend en main, et fait jouer l'amadou pour l'allumer. Et après ? Après tu fumes. D'accord, d'accord. Bien docile comme y faut. Elle tire quelques lattes peu convaincues, s'envoie la fumée en plein dans les naseaux.

Astana se mure dans un silence inébranlable. Parce qu'elle peut pas, non, causer et faire sortir Ça en même temps. Pas plus qu'elle peut s'autoriser à se laisser aller. Faut choisir, et surtout en finir avec toute cette histoire affreuse. Fumée grise, encore. De son coté, elle avait déjà vu faire aussi, la Danoise. Comment mettre bas, et tout ça. Mais de loin, et surtout jamais bien longtemps. Mais elle a pigé un truc : quand y'a les crampes qui se font pressantes, faut pousser. Et ainsi d'suite. Dès lors, ce n'est plus qu'une suite d'actions logiques et de réactions physiques.

Pour un gosse normal, ça marcherait. Mais pour un mort-né ? Ou plutôt même pas né qu'il est déjà crevé ? Faut faire pareil ? Elle essaie. Une fois, deux fois... pendant une heure entière, elle tente. Sans résultat. Faut avouer qu'elle sent plus grand chose en bas... Pas pour autant qu'elle va chercher ce que Blondin a pu trafiquer, ou si c'est le chanvre qui lui fait un drôle d'effet. En vrai, Astana est complètement à l'ouest. Tellement focalisée sur le fait de décrocher leur pois, qu'il pourrait se passer n'importe quoi à coté... elle verrai même pas. Alors pour ce qui est des réflexions... faudra repasser plus tard.

La deuxième heure s'annonce avec la percée discrète du petit jour à travers le rideau. C'est moche à voir, ce qu'il reste de la blonde. Guère plus qu'une carne à la respiration saccadée, trempée tellement elle a sué, et qui commence à douiller... mais ailleurs. Plus haut. Vers la poitrine, à gauche. Ça lui vient, petit à petit. Comme un pincement. Mais elle pige pas, ou plutôt veut pas piger. C'est qu'ça doit bien crever les yeux, t'façon. Lui il a dû piger, Blondin. Alors seulement, elle l'observe. Elle en dit long, tout en disant rien.

« Et dessous le drap, à ton avis, il est parti ? »

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