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[RP pour Tous] Incroyables conversations.

Umbra
[Nuit languedocienne – prémices d’été 1462]

Des traces de charbon imprimées sur le cuir livide comme si le faciès était calciné, des lèvres sèches s’entrouvrent pour suffoquer la moiteur ambiante. La peau transpirante d’avoir sué toute la journée à six pieds sous terre : là-bas, l’air y était insoutenable. Ardent, il s’engouffrait dans les poumons pour vous consumer de l’intérieur. Sous les cris et gémissements des uns et des autres, le vacarme des coups répétés, on se brisait les reins et le dos à la tâche pour une misère. Ingrate éternité. Les tenebres étaient éclairés qu’à la lueur de longues flammes dansantes, narguantes. Le pire, c’est quand on pensait avoir touché le fond...parce qu’il fallait encore et toujours gratter. Percer la roche jusqu’à creuser sa tombe. Vous l’aurez bien compris, l’Enfer, c’est ici-bas.

Les iris de jais cernés d’une intense fatigue se sont enfin clos pour fuir ce calvaire. Les muscles encore contractés de l’effort du jour se dénouent peu à peu et bientôt, c’est à l’esprit de divaguer...


*

Une sombre silhouette erra sur des pavés tortueux dont chaque pas modifia le décor environnant. Des arbres noueux laissèrent place à des lierres grimpants qui se muèrent à leur tour en pans de mur délabré. La féerie vrilla au cauchemar et la joie à l'effroi. L’ombre brumeuse marcha longuement dans ce que l’on crut un dédale infini où le temps sembla être en suspens. Ce cheminement aboutit devant un large miroir. Tous les parages disparurent dans l’obscurité pour ne laisser que ce terrifiant reflet à la vision de l’âme vagabonde. Toute de noir vêtue, le teint blafard, la chevelure de cendre et les lèvres pâles, le regard éteint fixa le semblable jusqu’à ce que la bouche de la réflexion s’ouvrit :

Alors, c’est toi.
- Oui, c’est moi.


Les deux corps se dévisagèrent un moment en silence. Avant que le premier ne tourna les talons en lâchant un hautain :

Il me reste encore quelques heures devant toi.

La seconde entité prisonnière du verre observa tristement son reflet disparaître de sa vue, ce dernier ne laissant dans son sillage que solitude et désolation.

Les hématites s’écarquillent alors qu’Umbra se redresse en sursaut de son lit. Son poitrail décharné se gonfle d’oxygène bouillant pour aussitôt se vider de carbone brûlant. Le coeur battant à tout rompre dans tout son être, des sueurs froides serpentant et hérissant son épiderme, Ombeline pantelle bruyamment.

Vient-elle réellement de voir sa Mort?

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Kit by JD Gygy
Vasco.
    “Chambéry, mai 1462...Entretien avec un vampire.”

    - Hé! Ho! Réveille-toi! C'est pas le moment de flaner! Y'a du boulot qui t'attend!

    Des relents métalliques plein la bouche, l'oeil vitreux, l'impression que la tête allait voler en milles éclats, le Visconti émergeait à peine des brumes de l'inconscience lorsque l'individu s'adressa à lui. Assis près d'une vieille table pleine de gris et de mousses, dans un coin ombragé, un inconny mystérieux observait le corps désarticulé du sicilien qui se trainait au sol. L'homme était vêtu d'une soutane pourpre d'une mitre blanc et un baton tordu qui devait faire office de crosse. L'inconnu tirant sur sa pipe, des odeurs de sauge et de lavande venaient titiller les fosses nasales du sicilien qui cherchait à grand peine à se remettre sur ses jambes. De la pointe de son bourdon, le religieux harcelait les jambes du Visconti pour le presser à se redresser. L'homme, quasi immobile, le suivit du regard lorsqu'enfin il prit place à table, soufflant et ahanant comme un vieil asthmatique.

    - Eh bien! Tu en as mis du temps. Tu as faim? Tu veux boire quelque chose?

    - Au cas où vous ne l'auriez pas remarqué, je me suis battu hier soir! Et ça n'a pas été une partie de plaisir, croyez-moi!

    - Hum...Oui. C'est ce qu'on m'a dit. Pas terrible le résultat.

    - Non. Pour ça, on a déjà vu mieux. Vous êtes qui vous?

    - Une chose à la fois Visconti, tu veux? Bière? Vin? Oh, c'est vrai...Tu ne bois pas beaucoup...

    - Ouais! Mais comment savez-vous ça?

    - Si tu savais tout ce que je sais sur toi Vasco! Tu sais, je te suis depuis ta naissance... Dis-moi Vasco, tu te rappelles de la fois où tu as trop bu à Langres, dans le duché de Champagne? Hum?

    - Mais pourquoi me parlez-vous de ça? Bien sur que je m'en rappelle! C'est la fois où j'ai croisé Satine et où j'ai pris une cuite phénoménale...Pourquoi?

    - Oh... pour rien...pour rien! Tu sais que Satine fait partie de l'armée des Sept? Hum? Tu le sais. Oui, je sais que tu le sais. Et tu sais aussi que c'est l'armée des sept qui vous a taillé en pièces?

    - Dites...C'est quoi votre nom pour savoir tout ça? Jeandalf le gris? Sypous? Douzpous? Ah non, je confonds... Douzpous, c'est le nom d'un courtisan à l'aphrodite! Un peu surfaite d'ailleurs sa réputation parait-il... Pourquoi vous me parlez de Satine? C'est elle qui m'a tué?

    Et sur la table, comme par magie, une gravure apparut en lettres cursives enluminées : "Satine m'a tuer". Les lettres de feu restèrent présentes quelques instants. L'inconnu leva ensuite la main et les effaça, simplement en les survolant.

    - Pas loin Visconti! Pas loin... Dis Visconti, tu sais comment on fait les bébés? Non, parce que sinon, je pourrais t'apprendre tu sais...Parait que tu vas en avoir besoin?

    - Mais qu'est-ce que ça peut bien vous faire? Et qui vous l'a dit? Ina? Et puis, c'est très impoli ce que vous faites, vous savez? Vous connaissez mon nom...mais la réciproque n'est pas vraie.

    Sortant de l'ombre, précédé par une nuage de fumée, le visage de l'inconnu émergea à la lumière du jour.

    - Mon nom est personne Visconti!

    - Aristokolès!

    Visiblement satisfait de sa mise en scène, Personne-Aristokolès se leva péniblement à son tour pour venir toiser de toute sa hauteur le sicilien.

    - Bravo Visconti! Bravissimo! Il parait effectivement que c'est ainsi qu'on m'appelle dans certains coins là-bas, sur terre. Je t'avoue que ce n'est pas le nom que je préfère. Il manque...d'éclats!

    - Alors qui êtes-vous?

    - Tu me déçois Visconti! Tu me déçois beaucoup tu sais. Si tu faisais un tant soit peu fonctionner ce qui te sert de cervelle, tu devrais le savoir pourtant... As-tu donc tout oublier? Tu as une mémoire de poisson Visconti? Faut-il que tu te balades avec un bocal sur la tête pour respirer? On en parlait il y a un instant pourtant Visconti. Tu te rappelles ce que tu as fait hier? Je veux dire...après avoir pris du bon temps? Hum?

    - La guerre!

    - Bravo! Et il s'est passé quoi à cette guerre Visconti? La bataille, tu l'as gagné?

    - Non! White est arrivé en renfort. J'ai d'ailleurs été gravement blessé. Je pensais même être...

    - ...Mort! Bravo! Mais que tu es brillant soudain Visconti! Et dis-moi donc Visconti, les morts ils deviennent quoi? Hum? A qui rendent-ils visite? Enfin...quand ils sont brigands et infects comme toi bien entendu! ...ou quand ils sont nobles. Avec eux, pas besoin de mettre d'adjectifs pour les différencier d'ailleurs. Tous dans le même panier! C'est plus facile à gérer ainsi que les brigands, tu sais?

    Avez-vous déjà vu un sicilien en pleine réflexion? Avez-vous vu le visage d'un sicilien s'illuminer quand il trouve la réponse à une question qu'on lui a posé puis soudain s'assombrir quand il prend conscience des conséquences de cette réponse?

    - Le Sans-nom! Vous êtes le Sans-nom!!!

    - Décidément, tu es en grande forme Visconti pour un mort! Bon, maintenant qu'on est intime toi et moi, on peut enfin parler sérieusement? J'ai besoin de toi Visconti! Votre mission mon cher, si toutefois vous l'acceptez, consistera à revenir sur terre pour mettre le plus de chaos que vous le pourrez. Prenez-vous en à l'église et à ceux qui parlent en son nom, volez les pauvres autant que les riches, pillez les mairies et les châteaux, violez ce que vous pouvez...mais tout ça avec classe et élégance! C'est pour ça que je vous ai choisi Visconti! Pour votre classe et votre élégance? Voilà la mission que je vous propose de remplir pour moi en échange d'un retour sur terre. C'est ça ou...l'enfer lunaire que vous voyez derrière moi!

    - Ina! Où est Agnesina Temperance Corleone!

    - Oh...pas loin de nous. Elle discute avec un bon ami à moi!


Quelques part dans une tente au dela des remparts de Chambery, là où avaient été entassé les reliefs de l'armée Spiritu Hydroleone Circus, un sicilien inconscient entre la vie et la mort avait visiblement un onirisme agité.

Drôle d'entretien n'est-ce pas? Vous ne comprenez pas tout? C'est vrai que la vie du Visconti est parfois assez compliqué. Allez va! Puisque je suis bon joueur, je vous donne quelques explications... Pourquoi la mort parle t-elle de Satine à Vasco? Eh bien, quelque chose me dit que ça pourrait être parce que Satine est l'ami de Vasco, que Satine est membre de l'armée de Septs et qu'il se pourrait bien qu'elle ait porté le coup fatal à Ina. Le destin fait parfois des clins d'oeil parfois ironique vous ne trouvez pas? Quant au fait de savoir si le Visconti sait comment on fait des bébés, il faut comprendre que Vasco et Ina ont justement parlé d'avoir un enfant ensemble quelques jours avant la bataille...et que non loin de là, la faucheuse était entrain de négocier avec la Corleone son retour sur terre en échange de sa fertilité.

Vous voulez savoir si Vasco a respecté son contrat avec le Sans-Nom? Eh bien oui. ll a été infernal à Chambéry. Il a houspillé la justice (comme d'habitude me direz-vous), il a envoyé une tête coupée au prévôt, est allé se plaindre de la politique de sottards menée par le conseil ducal, a donné des leçons de gestion municipale à une candidate, a fabriqué un faux pour la hérauderie de Savoie afin de faire reconnaître par White de Tiallaz deux enfants adoptés, a houspillé le maire autant qu'il le pouvait, effectué un faux recensement municipal, a fini par piller la marché en le vidant presque totalement du pain disponible, s'est battu en duel, s'est fait viré d'une taverne... et tout cela a mené à la détruction de son couple et de sa présence au sein de la Spiritu Sanguis. Si avec tout ça, le Sans-Nom n'était pas satisfait...

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Anitha
[Les Miracles - Septembre 1460]

Les aventurières du dimanches étaient partis dans l'espoir de retrouver quelques héritages de leur parents et cela aux Miracles.
Imaginez deux sublimes ritales, dans ce genre de quartiers, sans aucunes discrétions, car même si elles s'aiment cet amour se traduisait par des disputes, enfin la plus part du temps, sinon c'était à coup de dagues, bon d'accord parfois par des câlins.


Bref revenons à nos moutons, deux italiennes, Jeni et Ani Vitalis da Roma-Corleone, aux Miracles dans une grande quête au trésor quand une rousse fit son apparition, une aide fortuite, mais voilà les deux transalpines n'avaient pas vue l'étau se resserrer, quelques instants plus tard les voilà toutes les deux dans une pièces sombre, sous les mains de tortionnaires sans merci. Un peu plus tard une ombre approcha, celle que l'on nommait la faucheuse....

Jeni : « -Qui es-tu ? » En regardant la faucheuse

La Mort : - « Je suis celle que tout le monde redoute la mort ma chère »

Ani : « -Ah mince j'pensais que c'était un homme la mort pas toi Jeni chérie ? » dit elle en penchant la tête sur le coté intriguée

Jeni : « "- Pas bête ... Cela expliquerait la mort de Ronon, de la jalousie quoi. " regarde son ventre, plat, alors qu'elle est enceinte normalement. "- Où est mon enfant? "

La femme claqua des doigts, un nuage de fumée apparu autour d'elle, quand celui si disparu, un homme apparut, puis à la question de la plus jeunes des Vitalise, l'ange noir posa une main sur le ventre plat et avec un petit sourire

La mort : « Il est mort. »

Jenifael pâlit légèrement et murmura : « il va me tuer !»

La mort : « te tuer hum oui pourquoi pas cella pourrait être pas mal »

Sur ces mots la mort lui tendit la main en soufflant « viens avec moi »

Elle crache dessus

Jeni : « - Je préfère encore vivre seule, que mourir pour l'instant,l'homme que j'aime m'attend »

La mort se recula d'un coup puis regarda l'autre italienne

La mort : «-Et toi veux tu m'accompagner ? »

La Ritale tillta et regarda l'homme avec une moue, toujours avec sa grande bouche, et son orgueil surdimensionné elle répondit

Anitha: « -on se connait ? »

La mort : « -Non je crois pas mais... »

Anitha : « -Voilaaaaaaa l'on m'a appris à ne pas suivre les inconnus désolée donc ça sera sans moi et sans ma soeur »


Jeni se mit à rire puis répliqua sur un ton insolent

« -Au moins c'est clair. Bon la mort, tu nous sort de là où bien ? »

La mort regarda les deux femmes mais n'eut pas le temps de répliquer que la plus âgée des deux enchaina

Anitha :« -Ouai écoute la car franchement tu veux vraiment deux emmerdeuses comme nous ? Sache que si tu nous lâche pas et ben nous non plus, on sera sans cesse sur ton dos en gros on te fou la misère dans ton royaume et on prend le pouvoir, car oui les Vitalis on est comme ça! »

La Ritale avait toujours son sourire complètement nais, complètement moqueur car ce qu'elle disait était totalement vrai, les deux Vitalis ensemble c'était comme une immense tempête qui s'abbatait sur vous.

La mort : « - Vous êtes les pires que je n'ai jamais vue même pas une once de peur, je crois que je vais aller pointer au chômage et me reconvertir »

Dans un claquement de doigts voilà que l'homme en noir était partit et que les deux femmes se retrouvèrent de nouveau dans cette salle sombre mais avec une seule envie se barrer et en effet c'est ce qu'elles firent après quelques tours de passe passe.

Jeni- : « Elle fait chier la mort. Elle aurait pu être utile et nous faire sortire... »
Anitha : « -Si complètement inutile »


Rp tapé à 4 mains merci ljd Jeni pour ce moment

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Alysson
    «Dis leur qu'on arrive
    Dis leur que tant d'autres nous suivent
    Dis leur qu'on est plus qu'à quelques pas
    Et qu'on est par milliers
    Avec ou sans papier
    Des marchands de rêves»

    Les marchands de rêves
    Corneille


Les pieds nus foulèrent le pavé, dont une fine couche de sable avait recouvert. Les fins grains s'infiltraient lentement entre les orteils de la sauvage, créant une légère sensation désagréable lorsqu'elle les bouge chacun leur tour. La fin du jour donnait une belle couleur dorée à cette ruelle qu'elle emprunte. Elle ne sait pas pourquoi elle marche, et pourtant, elle le fait, dans une lenteur presque fantomatique. La faible brise faisait voler que légèrement cette crinière de boucles brunes au caractère rebelle. Ce brun s'alliait parfaitement au vert de ses prunelles, qui semblait se poser un peu partout, d'ailleurs. La bourgade semblait d'un calme inquiétant. Les rideaux couvraient les fenêtres des maisonnées, même pas une lueur semblait s'en échapper. Nulle âme qui vive débarquait dans les ruelles, ni même un son d'autres pas que les siens. Aucune âme qui vive était perceptible à des lieux à la ronde, elle en était certaine la sauvageonne. Pourtant, aucun malaise ne vient habituer le creux de son estomac, comme s'il était simplement normal qu'elle se retrouve là. Il n'y avait même pas un questionnement de sa part quand à ce calme étonnant.

La sauvage arpentait ce pavé, qui semblait s'allongé au fur et à mesure que ses pieds foulaient cette fraîcheur qui émanait de la pierre. Y avait-il un but à cette dérive nocturne ? Pourquoi était-elle donc là, d'ailleurs ? Elle devrait plutôt se trouver dans le confort de sa couche, enlacée dans les bras de l'être cher. Si elle ne se trouvait pas dans le douillet, elle se serait accoudée à un comptoir de taverne, à boire quelques choppes et à s’enivrer d'herbes magiques dont elle dépendait, désormais. C'était les deux possibilités les plus probables de ce qu'elle faisait de ses nuits. Alors, diverger dans des ruelles, il en était fort improbable. On l'avait guidé, et on l'obligeait à suivre cette route tracée. La bouclée ne s'y dérogeait pas, il n'aurait servi à rien de s'affoler. Cela ne lui aurait guère ressembler, d'ailleurs. Elle avait toujours possédé un sang-froid inquiétant face aux situations qui faisaient flipper. Les expérience de sa vie lui avaient appris à le faire. Elle n'était plus cette adolescente qui se cherche, qui tente de trouver ce qui lui plairait. La sanguinaire avait gagné en expérience, en maturité. Elle était à l'apogée de son être, de ce qu'elle devenait. Comme cette route incrustée à la terre, son chemin avait été dessiné dès la plus jeune âge. Sans qu'ils le veuillent, ils avaient portés à la naissance du monstre qu'elle devenait. Ils avaient tous mit, chacun à leur tour, leur grain de poivre. Ils l'avaient transformer à leur façon.

Enfin, quelques bruits vinrent chatouiller les tympans ainsi que briser ce silence qui commençait à se faire lourd. Désormais, les prunelles teintées de vert durent se refermer quelque peu, la lumière des torches parvenant à frapper la cornée. La tête bouclée se pencha doucement sur le côté, pour tenter de distinguer ce qui se déroule sous ses yeux. Des silhouettes se détachaient peu à peu de la masse sombre. Les couleurs apparurent également, les textures capillaires se développant. Il y avait une foule amassée à la place centrale. La sauvage n'arrivait même pas à compter les personnes qui s'y trouvaient, ni même à voir autour de quoi qu'ils se ressemblent. Elle grommelle même un peu, irritée de devoir se créer un passage dans ce troupeau. Et elle toucha les premières gens, les écartant lentement pour qu'elle puisse laisser passer son corps menu. Petite et athlétique, elle était. Elle parvenait alors à avancer, à un rythme d'une lenteur sans pareille. Le plus étrange, c'est que les habitants ne semblaient pas remarquer sa présence, où que leur corps soit bousculé d'un sens et de l'autre. Cette curiosité freina un moment l'élan de la sanguinaire, alors qu'elle se piqua devant l'un d'eux. Les iris émeraudes tentaient de comprendre, tout comme son audition. Cette foule semblait scandée la même phrase imperceptible pour la brune. Les sourcils se froncèrent, entraînant dans le même mouvement les globes oculaires, pour tenter de défricher ce charabia dont elle n'arrive pas à saisir. Sa main aux doigts effilés vint passer devant le visage de l'inconnu, pour tenter d'attirer l'attention. Rien, absolument rien ne se produisit. Cela la laisse perplexe, d'ailleurs. Pourquoi donc, on ne la voyait pas ?

Alysson abandonne sa quête de savoir, la curiosité l'obligeant à se rendre au devant de cette foule, tenter de comprendre ce qui les obnubilent autant. Tel un nageur, ses bras allaient de devant, écarter la vague humaine de son chemin, pour avancer, toujours. Elle semblait interminable, d'ailleurs. La sauvage avait l'impression qu'elle y passerait des heures, de fort longues minutes à se frayer un tunnel dans cette masse. Ils y avaient comment, de ses gens ? Pourquoi ils étaient tous là, ça l'obsédait, cette question. Ils étaient une heure tardive, et les villages étaient endormis. Tout le contraire, à ce moment précis. Que diable regardait-il. La masse de gens semblaient disparaître peu à peu, la fin approchait. Elle découvrirait dans les prochaines secondes. Elle n'aura pas du, d'ailleurs, vouloir comprendre. Le spectacle qui va s'offrir à toi, il va créer une plaie béante en toi. Cette vision, tu ne pourrais jamais l'oublier. Elle restera graver en toi, à tout jamais..

    -Moi, Grand Chef suprême de la Saint Inquisition, déclare cette sorcière coupable de tous les crimes dont elle a été accusée. En ce dix-neuvième de Juin de l'an mil quatre cent soixante-deux, je déclare Alysson Horn, coupable de sorcellerie. Elle sera brûlée jusqu'à ce qu'il ne reste plus rien de son corps, et que son esprit soit envoyé à son perfide maître.


Alysson était bouche-bée devant cette scène. Elle était là, attachée tout contre le poteau, dont les pieds nues touchaient les rondins. Elle portait une longue chemise blanche, comme là. Son visage était fière, son regard glacial. Il n'y semblait y avoir aucun regret de perceptible. Il y avait même quelques choses d'inquiétant, dans la sérénité dont elle faisait preuve. Étais-ce sa mort même qu'elle voyait ? Les yeux de la sauvage se regardait sur le bûché, puis elle-même, qui se tenait devant l'estrade. La chemise blanche qu'elle portait avec quelques trous qu'elle n'avait pas remarqué jusqu'à maintenant. Des tâches de suies y étaient, tout contre sa peau. Elle tente de comprendre, de saisir le fond de la chose. Elle en est incapable, cette scène défit les lois même de tout ce que l'on lui a enseigné. Comment peut-ton assister à sa propre exécution, d'ailleurs ? Avait-elle trouvé une façon de protéger son esprit par cette sois-disant sorcellerie dont on la rendait coupable, aujourd'hui ? Elle sent la gerbe lui monter à la gorge, le coeur palpitant douloureusement. Elle saisissait désormais ce que les gens scandaient d'une voix forte...

    -Brûlée cette sorcière !

    -Qu'elle crève et pourrisse en enfer cette garce !

    -Qu'elle souffre et supplie le Très-Haut de la sauver, femme impie !


Les vertiges prirent la sauvage d'assaut. Qu'avait-elle donc fait de si grave pour qu'on veuille autant la voir brûler ? Elle ne parvenait pas à saisir, alors qu'elle vit son bourreau s'approcher rituellement de la base de sa dernière couche. L'Alysson du bûché ne tressaillait même pas, alors que le feu fut mit. Elle restait de marbre, fière, comme elle le fut toujours. Était-elle donc prête à ce que son corps parte en fumée ? Il ne sorti même pas un son de sa gorge alors que la base des flammes léchèrent lentement ses pieds. Les vêtements prirent à leur tour, participant à ce feu de joie pour les habitants. Le corps brûlait, et l'odeur de la chair calcinée chatouillait toutes narines. Aucun son, rien ne fit émis. L'Alysson spectatrice, quand à elle, était à deux doigts de rendre son dernier repas tout contre le pavé sablonneux. Elle se pencha vers l'avant, jusqu'à ce qu'elle sente une main se déposer tout contre son épaule. Elle se retourne rapidement, alors que ses yeux se posèrent contre cet homme. Elle se retient de justesse la sauvage d'abîmer la richesse des étoffes qui couvraient ce dernier. Il lui sourit, un étrange sourire. Il la connait, elle le sens à la façon qu'il la regarde. La sanguinaire a elle-même l'impression de le connaître, comme des connaissances de longues dates.

    -Tu fais un joli brasier, Aly

    -...

    -J'ai toujours rêvé de ce moment où j'aurais à te montrer à toi-même

    -...

    -Suis-moi, tu risques de t'effondrer au sol et je n'ai pas terminé de toi.


Elle n'avait pas le choix de le suivre. Il avait prit un bonne poigne contre son poignet, si elle ne suivait pas, il la traînerait de force. Il n'y avait pas à douter. Ils ne marchèrent pas longtemps, et heureusement puisque les pieds de la sauvage n'auraient pas pu la porter sur une longue distance. Ils s'étaient juste bien éloignés de la foule, qui disparaissait lentement, tout comme elle était apparue. Un banc fit son son entrer, et c'est là qu'il la dirigeait. Sa deuxième main vint la saisir au niveau de l'épaule. Ordre tactile pour qu'elle pose le fessier tout contre le bois froid. Il prit place à ses côtés, et de ses pupilles, elle le regardait. Il lui disait quelques choses, mais elle n'arrivait pas à mettre un doigt contre le prénom qu'il possédait. En avait-il un, d'ailleurs ? Et où diable vous vous êtes rencontrer ? Tant de questions viennent s'entasser à un rythme fort rapide au creux de la boîte crânienne.

    -Nous nous sommes déjà rencontrer, Alysson. Tu ne te souviens pas ?

    -J'devrais p't'être m'en souvenir ?

    -Il aurait été préférable pour toi, certes.

    -Je n'voit pas pourquoi, et j'n'arrive même pas à m'souvenir où on aurait pu s'rencontrer.

    -La dernière fois, on s'est battu farouchement tous les deux. Tu ne voulais même plus que j'habite ta jolie petite tête.


    -J'saisi quand même pas...

    -À cet époque, je te faisais t'infliger une douleur physique. Tes cuisses sont les témoins de mon passage.

    -P'tain...

    -Tu croyais que tu m'avais chasser, han ?

    -J't'ais sûre que j's'rais immunisé contre tes attaques

    -J'ai bien réfléchi, Aly. Tu m'as battu, je l'avoue. Et c'est dans la défaite que l'on prend temps de monter un plan beaucoup plus intéressant. Tu sais toi-même à quel point la vengeance peut être alléchante.

    -...


    -J'ai des plans pour toi.

    -On fera si on partage les mêmes ouais.

    -Tututu insolente. Tu veux que je commence par le début ?

    -J'préfèr'rais pas la fin, s'moins long et emmerdant.

    -Mhm.. Non. Le début, tu vas peut-être toi-même comprendre qui tu es.

    -Pas compliquer d'le savoir, ça.

    -Ce que tu m'embêtes, à toujours vouloir le dernier mot. Saleté fierté, tu sais que tu devrais piler un peu dessus parfois ? C'est lassant, à la longue.

    -J'croirais pas non.


    -Enfin... T'sais qu'j'ai profité pour faire mon entrer quand tu étais fragile, au niveau de ta p'tite tête ? Arioce a dessiné ce passage mental, et tu l'as ouvert toi-même en mettant un terme à votre relation. Étonnant non ? Tu m'as donné toi-même la permission d'entrer. Tu es vraiment généreuse, Alysson. Enfin, je présume que tu ne veux pas entendre les éloges que je pourrais faire à ton sujet. Les premiers jours, je t'ai surveillé, fouillé dans ta tête pour tenter de comprendre qui tu étais. Tu sais que tu étais vachement ennuyante ? J'arrivais pas à croire que j'avais tombé dans une boîte à merde. J'regarde d'aut' démons qui ont eu une chance inouïe de tomber sur des êtres déjà pervertis. Moi, j'ai hérité d'une pauvre conne qui a des gamins. J'avais même pas envie de mettre quelque soit effort sur ta personne. J'voulais me débarrasser d'toi, et tu m'as aidé. J'ai moi-même guidé ta main sur ta lame la première fois que tu t'es mutilée. J'ai fendit ta chair avec toi, pour te montrer le chemin de ta décadence. Il te fallait qu'une petite aide pour que tu mettes fin à tes jours. Tu n'avais plus envie de rien, et moi, j'avais pas envie de rester là. Tu m'donnais pas beaucoup d'intérêts non plus. J'étais déçu, quand même. Tu avais de belles connaissances qui auraient pu être agréable à user et à travailler. Tu étais tellement dépressive. J'en ai presque eu un durcissement membranaire quand t'a pointé ta lame tout contre ton coeur. J'allais être libérer de ta stupide tête, et toi de ta misérable vie. J'ai été étonné, d'ailleurs, que tu viennes à moi tu sais. J'ai l'habitude de provoquer les rencontres, comme là, pas qu'on vienne me chasser. Enfin... Tu m'as confronté, et j'ai réalisé à quel point tu tenais à la vie. Une misérable, sans aucun doute, mais que tu y tenais. C'est étonnant, d'ailleurs...

    -Faut croire que t'es stupide, toi aussi. J't'ai fait t'barrer d'ma tête. J'vis ma vie comme je l'entend, sans que tu y foutes ta merde !

    -Tu vois, c'est justement là que tu me fait marrer. Tu te crois invincible, alors que je t'influence comme je le veux.

    -Laisse moi douter, j'fais s'que j'veux, comme j'le veux. S'pas toi qui va m'dire comment faire.

    -Justement, Aly. Je n'ai qu'influencer le courant de ta vie. Tu sais que t'es un être perverti à l'avance ? Ton père a travaillé longuement à ce que tu deviennes une machine à tuer. Évidemment, il voulait que tu n'abattes que quelques animaux sans que tu pleurniches. Il t'a donné une éducation sans pareille. Il t'a rendu monstre. Tu ne te souviens pas, les festins de sang que tu faisais, petite ? Tous ses hommes et cette femme dont tu n'as pas pu résister d'en lécher le ferreux. Je t'ai aucunement influencé de ce côté là. Tu as fait le travail toute seule. D'ailleurs, c'était comment, ton premier homme que tu as tué, avec Jurgen ? Tout naturel non ?

    -Je n'comprend pas. C'était comme si je l'avais fait tous les jours de ma vie. J'ressentais rien, absolument rien quand j'ai enfoncé mes lames dans le corps. J'en ai juste ressenti une excitation folle et ...

    -Tu vois toutes les merveilles que je peux te faire faire, ma douce ? Je t'ai ouvert la voie, une voie dans laquelle tu baignes, comme un poisson dans l'eau. Je t'ai même fait rencontrer un homme comme toi. Je t'ai ouvert à lui. Tu vois, à quel point je te rend heureuse, vivante ? Je baigne en toi, je me nourris de ce que tu fais. Nous sommes fait pour être ensemble, pour assouvir nos bas instincts.

    -Mais t'es un grand malade !

    -Comme toi, mon Alysson. Tu es moi, et je suis toi. Tu m'as laissé m'implanter dans ton crâne, et je doute que tu ne veuilles que j'en sortes. Oh et je sens déjà cette question du pourquoi je t'ai fait imaginé que je te faisais cramer. Je te montre la gloire que t'auras. N'est-elle pas belle, ta mort ?

    -Qu'a-t-elle à voir ?

    -Elle est l'ultime finale de mon projet, pour toi.

    -Quand commence-t-il ?

    -Il est déjà commencé, ma belle. Maintenant, réveille toi, et laisse mon ombre te guider...

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Selena., incarné par Jenifael..luna


[ Moscou - 1448 - Au palais]

Les yeux de l'enfant son emplit d'horreur. Sélèna, jeune fille de neuf ans était sagement endormie, quand elle apparut. Au début, elle pensa à l'une de ces attaques incessante, depuis la mort de sa mère la Régente, mais non, c'était autre chose. C'était le premier pas vers la Folie, quelque chose d'immatériel, mais bien réelle.

La silhouette est maigre, en faite il s'agit d'un squelette. Elle ne parvint pas à être effrayée, la silhouette s'incline, puis annonce, d'une voix doucereuse :


"- Enchantée, votre Altesse. "

Même la mort s'incline devant la jeune princesse de Moscou.

"- Qui es-tu? Nous nous connaissons? "

Le squelette secoue la tête.

"- Je vais t'accompagner désormais. Nous serons une. Je ne te quitterais qu'une seule et unique fois dans ta vie. "

Puis la mort partie, laissant l'enfant pleine d'interrogations.

[ France - 1451 ]

L'enfant n'en est plus une, désormais elle à bientôt quatorze ans. Elle rêve de nouveau. Cette fois-ci, le squelette est plus grand, plus menaçant et sa longue cape noir commence à se déchirer.

"- Bonjour princesse. "
"- Ne m'appelle pas ainsi. "
"- Si son Altesse insiste ... "


Un rictus se forme sur ce qui lui sert de bouche. Puis elle annonce, de sa voix qui semble vibrer de folie.

"- Tu es passée de princesse à putain, es-tu fière? "
"- C'est toi la chieuse, qui m'emmerde tout le temps? "


La mort s'inclina, pour confirmer les propos de la jeune femme.

"- Donc tu es dans ma tête ... Je peux te faire disparaître comme j'en est envie. Dégage ! "

La mort partie. Du moins, elle disparut des yeux changeants de la jeune femme châtain claire. Elle était toujours dans son esprit, à veiller à entretenir la folie de la jeune femme, lui murmura ses précieux conseils à l'oreille, se querellant avec.

[ France - Les Doigts d'Or - Le 7 avril 1461 ]

Oh bien sûr, depuis le temps, il y avait eu d'autres discutions avec la mort. La jeune femme avaient eu d'autres visiteurs dans son esprit également, esprit désormais fou, la couture l'avait aider à distingué ces voix, elle en compter quatre. Elle venait d'avoir 24 ans, en février. La belle et terrible blonde était enceinte aussi, elle se reposer désormais à l'atelier des Doigts d'Or, après son accouchement, le premier du mois. Elle repensa à sa vie, elle avait perdu ses deux premiers enfants, elle avait perdu ses amies, elle avait habillés les grands du monde, elle avait tué de nombreuses fois, mené à la ruine un bordel en le quittant, avait échappée à son destin. La Folie avait était une bonne compagne, au final. La jeune Théodora Ermelinde Vikilord était endormie, Sélèna venait de terminer d'écrire sur un papier ses dernières volontés, se sentant faible et ressemblant plus à la mort que jamais. Son teint d'or était pâle, ses yeux bleu vif, devenue légèrement voilés, ses membres ne la tenait plus, ses cheveux n'étaient que l'ombre de ce qu'ils avaient était, elle était épuisée de son accouchement.

Elle ferma les yeux. Sous ses yeux, apparut sa compagne. Elle était terriblement effrayante, le visage plein de sang, ainsi que les mains, les bras et les jambes, sa cape n'était que lambeaux désormais.


"- Bonjour. Comment va-tu? "
"- Mal. "
"- Pourquoi? "
"- Car aujourd'hui nous allons nous quitter ma douce. "
"- Tu ne peux pas, tu m'a promis de rester avec moi. "
"- Tu à assez pris de vie, tu à assez ruiné celles des autres, désormais tu peux te reposer. Enfin presque. "
"- Presque? "
"- Tu es folle. Les fous ne se reposent jamais. "
"- Parle plus, c'est un ordre. "


La mort s'inclina, puis développa donc :

"- Tu va mourir. Tu va laisser ta fille sur ce monde, sans qu'elle ne sache qu'elle est la seule héritière de la belle et puissante Moscou. Ni qu'elle sache qu'elle est l'héritière d'une des couturières les plus renommées qui soit de son époque. Dit comme cela, c'est tentant, non? "
"- Non. "
"- D'ici quelques minutes, lorsque nous aurons fini cette conversation, les autres, deviendrons des toi. Tu seras jamais en paix, ni en enfer. Tu va rester sur terre et tu ne seras pas seule. "


Puis apparut autour de la mort, quatre silhouettes. Quatre Sélèna en réalité.
La première était Sélèna à l'âge de neuf ans. C'est celle-ci qui avait toujours rappeler à la jeune femme les choses qu'elle avait oublier.
La seconde était Sélèna oui, mais vêtue d'une robe blanche, couverte de tâche de sang avec un sourire sadique qui planait que ses lèvres.
La suivante était une Sélèna vêtue de blanc une nouvelle fois, mais au port de reine, avec de sage paroles. Elle semblait néanmoins plus transparente que les deux premières, comme si elle était moins importante.
La dernière était une Sélèna d'environ quatorze ans, au regard froid, mais qui semblait en fuite perpétuel.


"- Voici tes toi, ma chère princesse. Désormais, meurt. "

Puis la mort disparut, Sélèna se sentie tomber dans un gouffre mais ne parvint pas à se réveillée, elle se cogna avec violence sur une sol et son corps immatériel se disloqua. Sans qu'elle ne sache comment, elle fût face à ses quatre autre moi, elle regarda ses mains, la voilà morte. Puis vint le retour à la réalité, elles étaient cinq fantômes, invisibles et silencieuses, dans la chambre de la jeune femme, désormais morte. Théodora pleurnichard, puis se mit à hurler à plein poumons.

L'Acoma rentra. Puis la Di Julii. Sélèna Vikilord venait de mourir, les deux femmes furent les premières à découvrir avec horreur le corps de la couturière dans le lit.


Cali
    « Rencontre chimérique et improbable »



Je ne sais pas.
J’ignore encore maintenant si je l’ai vécu véritablement, ou si, comme je préfère le penser, c’était un accident. Les cris résonnent encore dans ma tête.

Partout où mes yeux se portaient tout n’était que charnier, désolation, corps mutilés.
C’était la guerre, la grande guerre. Le royaume de France devenait fou. Les armées royales traversaient le comté du Poitou, ravageant tout sur leur passage comme une armée de criquets sur un champ de blé. Du plus humble des paysans aux nobles couronnés, du simple bâton à la plus rayonnante épée, tous s’étaient levés comme un seul homme, scandant plein de bravoure l’hymne poitevin. Moi aussi j’avais une épée, que j'avais forgée. Heureusement je n’eus pas à m’en servir pour ôter la vie. Sur un banal chemin j’en fus dépossédée , renversée par une armée Royaliste. Dés lors je fis ce que je savais le mieux faire. Mon métier de médecin me permit peut-être d’affronter l’horreur en plein coeur des batailles, mais il me permit de sauver des vies.

Et c’est là que je la vis....Elle.
Je devais avoir piètre mine, mais vivante. La sueur collant ma chemise plaquée contre mon corps, les cheveux défaits, du sang sur mes vêtements et sur les mains. Du sang qui n’était pas le mien... Et je m’acharnais, avec les moyens du bord, à récupérer les corps que le souffle n’avait pas quitté. Qu’ils soient d’un camp ou de l’autre, peu m’importait, je ne voyais que des hommes, des femmes, et parfois même de trop jeune gens qui souffraient, criaient et mourraient. La bataille faisait encore rage. J’évitais comme je pouvais de me retrouver en mauvaise posture. Les gens se battaient encore.
C’est pour ça que je l’ai remarqué. Elle ou Lui. Cette .. chose asexuée. Elle marchait lentement, avec prestance, sans être bousculée ou inquiétée, alors que tous bataillaient.
Rien ne pouvait l’atteindre et personne ne semblait la remarquer. Une silhouette longiligne, habillée d’une sorte de capeline dont la capuche cachait entièrement la tête. D’ailleurs quand j’y repense...je n’ai jamais vu son visage. Elle s’est soudain arrêtée devant le corps d’un blessé et s’est penchée sur lui. A ce moment là, je ne savais pas pourquoi, mais j’ai ressenti aussitôt un malaise si intense que je me suis dirigée vers elle, bousculée par les soldats et les poitevins qui se battaient.

- Hey! Vous! Qu’est-ce que vous faites? Vous êtes médecin?

Sa main... je l’ai vu et j’aurais préféré ne pas la voir. Elle me fascinait. Une peau qui paraissait si douce, apaisante, tellement attractive que j’eus soudain envie qu’elle se pose sur moi.
Sa main donc se retira lentement du blessé à mon appel, et sans se relever, la chose parla. J’eus l’impression qu’elle me répondait à contrecoeur d’une voix basse, presque murmurante, comme quelqu’un qui n’avait pas ouvert la bouche depuis bien longtemps.
Pendant un instant je me suis dit que c’était peut être un moine qui avait fait voeux de silence.

Non...
- Alors que faites-vous ici, près de cet homme?
Je ramasse.
Vous êtes un détrousseur de cadavre???
Je ramasse mon dû
- Quel dû? C’est quoi cette histoire? Ecartez-vous de lui! Je ne sais pas qui vous êtes mais je vous interdis de l’approcher.

C’est alors qu’elle se releva. De près la chose était encore plus grande, imposante. Puis elle se tourna au trois quart vers moi sans que je puisse apercevoir ses traits sous sa capuche. Pourtant mes yeux ne me trahissaient pas et je scrutais en vain ce gouffre sombre. Je commençais à me dire que quelque chose n’allait pas, que ça ne tournait pas rond, sans en saisir le sens. Je jetais un coup d’oeil au soldat allongé sur le sol, agonisant. J’étais épuisée, mais eux aussi. Alors je voulais me battre aussi, jusqu’au bout comme eux tous. Lasse, je reportais ce qui montait en moi vers l’inconnu, une rage , presque un désespoir que je ne m’expliquais pas.

- Qu’est-ce que vous voulez à la fin? Vous me faites perdre mon temps, et surtout celui de cet homme mourant!

De ses longues manches baillantes il leva légèrement les mains dans un geste fataliste et me répondit de cette voix que je commençais à détester.

Il existe une loi universelle qui va bien au delà de vos croyances, de vos consciences. Une sorte de balance dont l’équilibre dépend d’une logique qui vous dépasse, pauvres mortels.

“Ca y est” me suis- je dis. “ Il y a un illuminé et il faut que je tombe dessus.”

Ce que l’on donne d’un côté doit être repris de l’autre. La nature a horreur du vide, la mort aussi. Chaque jumelé à son pendant, les éléments s’affrontent pour garder cet équilibre. Parfois ils se lient, à d’autre pas.
Je suis venu chercher cet homme.


Pendant un instant j’étais comme envoûtée par ce qu’il disait, en comprenant la vérité désarmante. Jusqu’à ce qu’il parle d’emmener le blessé.

- Hein? Vous n’irez nulle part avec lui!

Je m’agenouillais aussitôt près du corps, le protégeant de mon bras.

Ha. Serais-tu prête à donner ta vie à la place de la sienne?

Je voyais doucement la vie du soldat s’en aller. Sans me soucier plus de la silhouette au dessus de moi comme une ombre malsaine, je sortis mon coutelas pour ouvrir la tenue du soldat et commencer à éponger le sang de son poitrail avec des charpies.

- Allez-vous en ! Vous ne l’aurez pas et moi non plus.

C’est à ce moment là que je ressentis une vive douleur à l’arrière du crâne, me faisant perdre l’équilibre avant de sombrer, évanouie sous l’effet de la douleur et du choc.
Quand je me réveillais, je ne sais pas combien de temps après, des bras me tiraient en arrière, puis je sentis qu’on me soulevait. Je me sentais si faible que je parvins à peine à me débattre.

- Non... le blessé.. il faut le secourir, vite..
On me répondit:

C’est trop tard m’dame. On peut plus rien pour lui. Vous, vous avez pris un mauvais coup.


Je sombrais à nouveau dans un sommeil profond et salutaire. Plus tard, bien plus tard, ma conscience me travailla. Je m’en voulais pour la mort du soldat inconnu. Bien plus tard encore, c’est mon subconscient qui refit surface en analysant ces événements étranges. Une part de moi me disait qu’ayant reçu un coup au sommet du crâne, je n’avais pas été en mesure de sauver le blessé. Mais.... une autre part m’assurait avec plus de fermeté que, peut-être, j’avais croisé la mort, et que lorsque la mort se déplace, elle réclame toujours son dû...
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Nicodemepetzouille
Toc,toc, toc ... Qui c'est ? C'est ton Destin ! Juillet 1462


Sur le bord d'un lac, quelque part en Touraine, le vieux Nicodème pestait. Il était assis, jambes tendues posées sur le sol, dos voûté, mains dans les poches dans une position pas confortable qui lui donnait l'occasion de pester sur un sujet de plus.
Il aime bien les lacs, le vieux : on y voit le ciel sans devoir lever la tête. Puis ça a un côté apaisant, un lac. Enfin, une impression d'apaisement. Comme le sentiment d'avoir plus chaud quand on voit une bûche léchée par les flammes dans l'âtre d'une taverne.


En relevant la tête, pour jeter son regard à la surface de l'eau, son huitième sens l'alerta. Il sentait qu'il allait encore tomber nez à nez avec son reflet qui lui ferait encore la morale.
Merde, trop tard.
Mais il eut tort pour une autre raison.
Cette fois-ci, à côté de son reflet, qui ricanait néanmoins moqueusement, se trouvait un reflet qu'il eut d'abord du mal à identifier, puis il tressaillit.


N'aie pas peur, mon ami ...
La voix semblait aimable, jeune, bien plus jeune.
N'aie pas peur, ce n'est que ... toi, ajouta le jeune avant de repartir d'un rire franc.
Le vieux grimaça.
Allez ne fait pas la tête ...
M'voulez quoi ?
Oh allez, pas de "vous" entre nous, tu me connais quand même.
Le vieux fit "non" de la tête
J'suis pas sûr ... Bon, m'voulez quoi ?
Je suis venu me réconcilier avec toi, vieux frère.
Le vieux haussa un sourcil. Ces familiarités de base lui avaient permis d'assimiler la situation, aussi particulière qu'elle pût être : il se retrouvait face à lui-même, 10 peut-être 15 ans plus jeune que maintenant.
Puis z'êtes quoi d'abord ? Z'êtes la mort ? Z'êtes mon subconscient ?
Le rire agaçant retentit encore, à la fois moqueur et réellement amusé.
Je suis ton meilleur ami, je suis le Destin, le Hasard, la Poisse. Autant de surnoms que tu m'as donné, mon ami.
Et t'es v'nu m'annoncer mon avenir ? ... ou mon pas d'avenir ?
Rien de tout ça, ce serait trop facile tu ne trouves pas ?
Mh ...
T'es bien là ? Tu t'amuses bien ?
Mh ... ?
T'es satisfait de ta vie ? T'es content ?
Mh ...
Oh non ... t'es content ...
Est-ce que j'te d'mande moi si t'as mis tes braies à l'endroit ou à l'envers ?
Le rire reprit encore une fois, rapide comme un moulin par grand vent, et le vieux s'en voulut d'y avoir apporté l'impulsion nécessaire ...
Je suis venu te voir pour savoir si je prendrais toujours autant de plaisir à ... travailler avec toi.
Tu pouvais dire "jouer" ...
Rires, encore
Mmmh, jouer avec toi oui, si tu veux ... T'es un pion particulier tu sais ?
Pourquoi ? J'me déplace qu'en diagonale ?
Le rire reprit encore une fois et Nicodème se passa une main sur le visage. Si ce type était une pâle copie de lui-même, plus jeune, il allait rire à chaque fois qu'il ouvrait la bouche : il comprenait son humour noir.
Tu as des mouvements bien particuliers, mon ami. Peu nombreux, peu significatifs, mais bon sang, outrageusement bien placés.
C'est un compliment ?
C'est alors moi qu'il faudrait complimenter, c'est moi le joueur, tu es le pion.
Mh ... Egocentrique de plus.
Ne fais pas l'hypocrite. Tu aimes ça, te savoir important. Et au fond de toi, ça te fait plaisir d'entendre ça. T'es qu'un pion ouais, mais t'es un bon pion. Ca doit être ton côté positiviste.
Cette fois, le jeune se fit rire lui-même
Mh ...
C'est tout ce que le vieux put répondre, le jeune avait raison. Aussi préféra-t-il embrayer
Et pourquoi tu viens me dire ça ?
Parce que j'ai encore besoin de toi mon ami. Je voulais que tu le saches.
Besoin de moi ? Pourquoi faire ? Bousiller d'autres vies ?
Le rire ne retentit plus, mais la voix restait claire et rieuse
Je ne fais que donner l'impulsion, mon ami. Je joue mon coup, puis je te regarde te déplacer selon tes propres mouvements. Parfois même tu m'étonnes.
Le vieux haussa un sourcil.
Et t'as besoin de mon accord pour ça ?
A vrai dire, non ... Mais pour le moment tu m'ennuies, tu te poses trop de questions. Alors je viens, comme qui dirait, remonter un peu le balancier.
Tu vas me rajeunir ?
Dis pas de conneries, je viens juste te titiller ce qu'il faut ...
Je veux plus ... Trouve un autre pion.
Chaque personne sur cette Terre est mon pion, chaque animal ... L'existence de chaque objet est le fil qui le relie à mon doigt. Mais j'ai mes préférés.
Et j'en fais partie, quelle chance ...
Tu n'es pas mon préféré, mais tu te laisses aller ... Si tu veux savoir, tu es le dernier sur ma liste des préférés.
Ben tiens, quel ... Hasard ...
Le jeune rit à gorge déployée.
Tu as tout compris, mon ami. Bon allez, je te laisse.
Heu, et va m'arriver quoi ?
Bonne question, ça dépend de toi ...
Le prochain coup c'est pour quand ?
Il est déjà joué, mon ami. Le pigeon va bientôt arriver ...
Le vieux haussa un sourcil que le jeune esquiva d'un demi-tour pour éloigner sa silhouette ondulante à la surface du lac.
J'ai donc, comment dire ... un libre-arbitre ?
Le jeune s'éloigna en riant tant et plus
Non, mon ami, le libre-arbitre, c'est l'autre type.
Puis il disparut en levant une main sans se retourner d'une manière un peu trop familière pour le vieux. Cela lui donna des frissons le long de la colonne vertébrale.
Dans l'eau, à sa gauche, son regard capta la silhouette souriante de son libre-arbitre qui s'estompait et était sur le point de disparaître.


Le vieux se força à ouvrir les yeux, tentant de chasser ce qui restait de sommeil dans son cerveau. Il resta là assis longtemps, à regarder le lac toujours aussi plat et calme, jusqu'au moment où un poisson en pleine chasse fit frémir la surface de l'eau. A ce moment, Nicodème cligna des yeux et se leva, et se promit de ne pas aller voir le pigeonnier ...
Ninon_
[Cour Brissel, février 1462]


Il s'appelle Tord Fer La Faucheuse, je l'appelle Choléra l'Invincible. C'est le plus joyeux et le plus puissant des princes de la Mort. Il a pour concubines les Terreurs qui sont mortelles, les Paniques qui sont folles et les Peurs qui sont bleues.

Il est noir comme les pensées des gens tristes et est habillé de noir comme les colporteurs de trépassés. Il chevauche sur les grandes Ténèbres chevelues et la neige noire qui fait rentrer les peuples dans leurs trous tombe à gros tourbillons lorsque je m'éveille la nuit en proie à de terribles cauchemars.

Il est fils de l'Ombre et de je ne sais quel Enfer mort depuis longtemps et lorsqu'on le voit passer il est trop tard.
Il était né pour les joies intenses et les fêtes éternelles et quand il était enfançon il se promenait dans les champs en chantant les refrains de sa contrée tout en cueillant des fleurs pour s'en faire des couronnes ; mais les fleurs se flétrissaient entre ses doigts maigres et on le repoussait loin des portes parce que il était noir comme la cervelle des gens moroses.

Là, les Dieux lui ont dit : " Petit, si tu ne veux pas mourir, va voir la Mort au pays de l'Ombre à la Cour Brissel et fais-toi capitaine de tes désirs et de ton bon plaisir."

Depuis il est devenu le plus grand génie du Deuil, et voilà pourquoi depuis ma rencontre avec Tord Fer, toutes les nuits je me réveille grelottante, vautrée dans la couche de mes Terreurs qui sont mortelles, sur le lit de mes Peurs, ces courtisanes bleues et sur le ventre de mes Paniques, odalisques de la Folie.

Il n'y a plus grand chose depuis que je puisse espérer, dire et penser.
M'en remettre aux mains de mon bourreau, m'enfoncer jusqu'aux tréfonds de la déchéance en attendant impatiemment l'instant de mon trépas.

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Jenifaelr
    "Ellle se retrouva face à elle-même, en veuve éternellement endeuillée, d'une beauté surnaturelle."

    [Nuit du 8 au 9 février 1463]

    La Mort. Quelle menteuse ! L’œil clair s'ouvrit pour se retrouver face à elle. Veuve endeuillée plus âgée qu'elle ne l'était aujourd'hui, pas de beaucoup d'ailleurs. La beauté Vitalis loin d'être fanée, elle semblait au contraire, encore plus belle qu'elle ne l'était en ce moment, surnaturelle et terrible. Elles étaient les mêmes. Jenifael s'en était fait la réflexion la première fois, désormais elle en était certaine, la Mort lui avait menti, ne mentez pas elle-même, souvent? Les voiles noirs qui recouvraient le corps de la Veuve Noir laissez entrevoir un ventre plat, parfaitement plat, un ventre qui appelait à voir les cotes et là, du côté gauche, en plus de la rose et la plume dessiner, se trouver d'autres dessins, qui descendaient sur les reines et inviter à descendre sur la courbe dans hanches.

    La Vitalis, prit la parole :


    "-Tu m'as menti, tu m'avais dit que tu ne me prendrais pas Floscel, que tu ne prendrais pas mes filles. Tu m'as pris Erika, Mélénia et Floscel. Tu vas ensuite me prendre Chloé, n'est-ce pas? Et tu me prendras mes amis aussi ... je finirais seule alors ..."

    Le regard était rempli de désespoir, la Mort eut une moue, et d'un mouvement, un jeune garçon apparut à ses côtés. Il avait les yeux d'un indigo clair et les cheveux noirs comme la nuit. La Vitalis l'observa.

    "- C'est ton fils. Tu t'en souvient? "

    Un sourire se dessina sur les lèvres de la Veuve et la jeune femme se leva, furieuse, lui sauta dessus et porta les mains à son cou, l'autre devint fumé et réapparut derrière la Vénitienne. L'enfant disparut et à son tour. Les aigues-marine se posèrent sur son double.

    "- Ta fille, je n'en veux pas, pas encore ... "

    Et sur un dernier sourire, elle disparut, laissant la jeune femme seule, désormais tremblante de peur.

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Nikkita
[Languedoc, janvier 1463]


Montpellier plage, son sable fin qui s’étend sans fin, ses mouettes rieuses qui ont laissé leur rire s’éteindre pour mieux cacher la tête sous une aile, ses bateaux gracieux grinçant du gréement sous le vent, sa mer intemporelle battant au rythme de ses vagues l’horloge à l’échéance inéluctable. Montpellier plage, son sable trempé de la dernière pluie, sa nuit froide. Sa vagabonde réfugiée dans un abri précaire, entre deux rochers, serrant dans ses mains fermées deux précieuses poignées de rêves.

Il est temps maintenant.
Hey ! Laissez-moi dormir…
Je t’offre bien plus qu’un sommeil éphémère.

Un œil hagard qui s’ouvre, tiré de ses rêves bien chauds. Des rêves qu’elle aurait voulu poursuivre toute la nuit, et même bien au-delà. Au froid mordant du réveil, elle oppose ses genoux remontés sous le menton, les bras enserrant ses mollets.

Mmmh ? Z’êtes qui, vous ?
Je suis la Mort.
Ah ? J’m’appelle Nikkita… Sans dame devant, sans titre derrière.
Je sais qui tu es. Je suis venue te chercher.

La vagabonde lâche un soupir, posant le menton sur ses genoux repliés, considère un moment l’intruse avant de secouer négativement la tête.


Nan… C’pas possible, z’êtes trompée.

Je ne me trompe jamais.
J’vous dis qu’vous vous êtes trompée ! D’abord, z’avez oublié d’dire ravie, enchantée, quel plaisir d’vous connaître…
Je te connais depuis ta naissance.
Hey, j’étais trop p’tite pour m’en rappeler… D’toutes façons, une figure comme la votre, j’préfère même l’oublier avant d’la connaître.
Et ensuite ?
Ensuite ? Eh bien…

Nikkita se gratte la tête du bout d’une griffe. Se faire tirer d’un sommeil bien chaud pour répondre à un tas de linceuls…


Ensuite eh bien, c’simple, z’êtes pas là et moi nan plus, passez vot’chemin.

Tu refuses la réalité. Tu préfères te nourrir de rêves qui n’auront pas plus de poids que cette poignée de sable qui file entre tes mains ?
‘Savez, entre un tas d’plumes et un tas d’sable… Un tas d’rêves, c’pas mal nan plus, en vous attendant.
Tu viens de le dire. Tu m’attendais. Tu m’attends. Tu m’as même appelée.
J’n’ai pas du crier bien fort…
Il suffit. Je ne me déplace pas pour rien. D’autres m’attendent.
Eh bien, j’vous retiens pas…

Elle se dresse, immense, surplombant le corps menu. Elle est là, tentatrice et terrible, un oubli éternel, un renoncement facile. Il est si aisé d’acquiescer… Nikkita soupire :

J’n’ai pas fini…

La Veuve se penche, son souffle inhumain caresse le cou de la vagabonde, vient se poser sur l’oreille comme un baiser glacé :

Tu n’y crois pas toi-même.

Les idées se bousculent. Partir, ici, maintenant, comme un bois flotté repris par la mer, disparaître, et laisser les pigeons atterrir, désorientés, lâcher cette douleur qui l’assassine à petits coups ? Un retrait du corps devant celle qui veut l’emmener, pêle-mêle les images se fondent, du cidre et des poiriers, des platanes, des mares, un foulard prêt à la couvrir… Un sourire triste :

Revenez plus tard. J’ai une sauce béarnaise à rattraper. ‘Savez, c’t’important, les sauces béarnaises, faut pas les laisser gâcher un festin…


La Mort se redresse. Nikkita a cru voir passer l’ombre d’une surprise dans ses yeux vides. Elle pousse son avantage, tentant d’insuffler une conviction dans sa voix qui file plus qu’elle ne se répand :


Laissez-moi une lune… Une lune bien brillante pour effacer une lune noire… Laissez-moi… L’soleil, qui efface la lune… Laissez-moi… Retrouver c’qui était… Laissez-moi maintenant…


L’ombre recule, se laissant happer par les premières lueurs du jour. De très loin, comme un écho, quelques mots s’attardent au creux du rocher :

Je finis toujours par gagner.

La vagabonde se pelotonne sur sa propre chaleur, serrant le sable à pleines mains, murmure les yeux clos :

C’finit toujours…
Jurgen.

                                                Und der Haifisch der hat Tränen
                                                Und die laufen vom Gesicht
                                                Doch der Haifisch lebt im Wasser
                                                So die Tränen sieht man nicht

                                                In der Tiefe ist es einsam
                                                Und so manche Zähre fließt
                                                Und so kommt es dass das Wasser
                                                In den Meeren salzig ist

                                                Man kann von uns halten
                                                Was immer man da will
                                                Wir halten uns schadlos
                                                Wir halten niemals still




    Bu jusqu'à plus soif, le teuton était allongé quelque part entre l'est et l'ouest. Sur le pont du Trompe la mort, dans la nuit. Il regarde le ciel dégagé. Les étoiles sont nombreuses. Mais étrangement, sur ce ciel, si immense et intrigant, il ne s'est jamais posé de questions. Qu'en aurait-il à faire ? Si les hommes étaient faits pour voler, ils auraient des ailes. Et s'ils étaient fait pour vivre sur l'eau, ils auraient des nageoire. Et c'est pourquoi le lendemain, dans la baie d'Ardencaple, le bateau coulerait.

    Jurgen boirait la tasse une demie douzaine de fois. L'eau salée le torturera, et il sera déshydraté. Il nagera tant bien que mal entre les débris de bois. Une planche lui amochera la mâchoire et il en gardera une cicatrice toute sa vie. Pour la recoudre, il devra sacrifier sa barbe. Et ce sera un sacrilège. Il retrouvera son visage d'enfant.
    Mais avant l'épisode traumatisant de la barbe, il échouera finalement sur la côte écossaise. Dans leur pays d'horreur. Il croisera une chimère.



      -Salut Rudolf.
      -M'appelles pas comm' ça, S*heiss'.
      -T'es susceptible, hein...
      -Ja. Et toi, t'es qui ?
      -Joue pas au con. Tu m'reconnais pas ?


    Ah. Ben si. A bien y regarder, il la connaissait, cette trogne putride.

      -S*heiss'.
      -Rudolf, faut apprendre la politesse.
      -Rien à carrer. Et arrêt' ça j't'ai dit.


    Le teuton l'avait déjà rencontrée, la mort. Une fois. A Dantzig. Mais elle était repartie bredouille. Et depuis, c'était sûr et certain, elle le traquait. Parfois, lorsque lui même tuait, il pensait qu'il l'aidait, la Mort, d'une certaine façon, et que le Très Haut lui même en était, si ce n'est ravi, au moins satisfait. La dextre était venue se ficher, droite, par dessus les yeux. Le soleil l'aveuglait. D'ailleurs, à cette époque, Jurgen avait en été le visage rouge, et blafard en hiver et en automne. Il ne tombait jamais malade. Ses plaies ne s'infectaient que rarement, et jamais trop gravement. L'équipage, avant ce naufrage, semblait bénit par Deos lui même, pour être en si bonne santé. Ou alors, personne ne voulait d'eux. Ni au paradis, ni en enfer. Et c'était tant mieux.

    Le masque putride avait alors esquissé un sourire. Enfin, non. Pas vraiment. Sans peau, c'est compliqué. Mais on aurait vraiment dit un sourire... Un crâne qui sourit. C'est comme ça qu'il le ressentait, le teuton.


      -Tu t'fous d'ma gueule ?
      -Ouais.
      -Qu'ess t'fais là ?
      -J'te rends visite. Ca faisait longtemps.
      -T'm'as pas manqué. T'viens jamais pour rien. T'es fait mett' une fois, et ça t'a pas suffit ? On trompe la Mort. Va. Allez, cass' toi, va ronger tes os.
      -Bon. T'es qu'un petit con. Vous croyez vraiment que vous me trompez ? Vraiment ? Viens là, je vais te montrer quelque chose.


    Il fut comme tiré par une volonté qui n'était pas la sienne. Il devait se lever, et suivre la chose. D'un geste de la main décharnée, le monstre engloba l'horizon. L'horizon, et les corps qui flottaient. Les corps qui flottaient et le Trompe la Mort en flammes. Le Trompe la Mort en flammes, et ce qui du moins en restait. Il reconnaissait parmi cet océan de cadavres quelques uns de ses frères. Les autres devaient être les attaquants. Les larmes lui montèrent aux yeux, mais il les ravala avec fierté. Qu'allait-il devenir, maintenant ? Il se tourna vers l'affreux.


      -T'es v'nu pour ça ? M'fair' une l'çon ? Va t'fair'. Vraiment.
      -Non, Jurgen. Je viens pour ton père.
      -Mon père ?
      Perplexe.
      -Ouais. Lars.
      -C'pas mon père... Crétin.
      -Ah ? J'ai toujours cru pourtant... T'es sûr ?
      -Ah ben quand mêm', j'sais hein.
      -Mouais. T'es pas le mieux placé pour savoir.
      -Ah ? Et ce s'rait qui l'mieux placé ?
      -Ton père. Et ta mère. D'ailleurs, ta mère était une pute. Tu vas pas me dire que tu croyais qu'elle était que la fille de pêcheur, hein ?
      -Tu dis de la merde.


    La Mort occupait Jurgen. Elle l'occupait alors qu'une cinquantaine de mètres plus loin, un autre barbu se débattait dans l'eau. Les vagues s'écrasaient contre les rochers dans des terribles bruits. Alors c'était comme si le capitaine était muet. Et pourtant, Jurgen irrité, embrassa à nouveau l'horizon du regard. Le masque, lui, voulait simplement lui détourner l'attention.

      -T'es pas le fruit de l'amour.
      -Ta gueule.
      La main avait été remise en visière au dessus des yeux. Il les plissait, et il faisait tant d'efforts pour reconnaître l'homme. Gott !


    Il se lança dans une folle course qui lui permis de se rendre compte qu'il n'était d'une part pas mort, puisqu'il avait toujours mal à la jambe (et où serait la justice, si on souffrait physiquement dans l'au delà?), et d'autre part, qu'une épaisse écharde s'était enfoncée dans son mollet. Il ignorait cependant la blessure à la mâchoire et, après avoir arraché la dite écharde, il plongea dans l'eau salée qui lui arracha d'affreuses grimaces.

    Lorsqu'il arriva à hauteur de barbu, il constata que la botte était prise au piège dans un filet de pêche, comme il en demeurait grand nombre dans la baie, malgré l'interdiction. Une bouffée d'air avait été prise, et la botte retirée. En effet, le filet s'était pris avec hargne dans une boucle. Corbeau râlerait à l'idée de la perte de la précieuse botte. Mais qu'il aille se faire foutre. S'il n'avait pas autant la poisse, rien de tout ça ne serait arrivé.
    Le Teuton s'était démené une dizaine de minutes, affublé d'un baluchon gros comme un homme, afin d'atteindre la côte. Et quand il y parvint, les deux barbus étaient seuls.

          A nouveau, ils avaient trompé la Mort.




Et le requin a des larmes
Qui coulent de son visage
Mais le requin vit dans l'eau
Aussi les larmes ne se voient pas

Dans les profondeurs on est seul
Et c'est ainsi que coulent des flots de larmes
Voilà pourquoi l'eau
Dans les mers devient salée

On peut penser de nous
Toujours ce qu'on veut
Nous restons sans dommages
Nous ne nous tenons jamais tranquille
-Rammstein, Haifisch.

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Umbra
[Nuit arlésienne - Hiver 1463]

Un mois que le Mal clouait l'Ombre au lit. Elle avait senti l'hiver s'infiltrer de part en part en son être. La bise cinglante lui avait glacé les os, courbaturé chaque muscle de sa personne, hérissé son épiderme de violents frissons, noyé sa peau de sueur tantôt froides, tantôt brûlantes comme sa fièvre. Malgré tous les soins prodigués et les remèdes ingurgités, le médecin, voyant les jours puis les semaines défilées sans amélioration, se disait que la Noiraude ne passerait pas la saison. Quelle maladie l'avait-elle saisi si brutalement? Umbra, adepte de substances bien plus dangereuses: les alcools, les drogues et les poisons dont elle avait cure ne sauraient la garder en vie. A vouloir tromper la mort en se familiarisant aux dangers létaux, l'apprentie avait oublié que la Nature avait tous les droits.

Alitée sous de lourdes couettes rembourrées, affaiblie au point que le moindre mot devenait un supplice dans sa gorge à vif. Régulièrement, de brutales quintes de toux secouaient douloureusement sa carcasse amorphe avant que cette dernière, baignant dans sa transpiration, se laisse choir sur un matelas moelleux mais trempé lui-aussi. Dans une chambre surchauffée par une cheminée flamboyante à toute heure, un linge humide rafraîchissant quelques instants son visage ardent, les hématites encrassées sondaient les vas et viens du médecin puis des infirmières à son chevet.

Des herbes médicinales empaquetées leur masquaient le bas de leur faciès, rendant leurs murmures inaudibles dans les oreilles bourdonnantes de la malade. Fallait-il déjà que ça finisse? Qui plus est ainsi? Alors que la Corneille commençait tout juste à se faire un nom dans sa branche, à connaitre l'amour au creux d'un nid ou au fond d'une tanière. Et son mentor, alors? Elle lui avait promis de lui venir en aide, de lui rester fidèle et surtout de finir son apprentissage. Pire, sa Soeur, celle qu'elle avait trahie...Son Unique qu'elle ne protégerait sans doute plus jamais. Ses pensées voguaient d'Anjou en Bretagne, de Brocéliande en Provence, de Provence en Italie. Dieu que le monde est vaste...Diable que la vie est courte.

Cependant, de son tragique destin, la mercenaire avait choisi de ne pas en faire une fatalité et de lutter jusqu'à la fin. Jusqu'à son dernier souffle sifflant et irritant. Les jours continuèrent de s'écouler, malgré les recommandations du corps médical, la Sombre quittait sa prison d'étoffes. Les premières fois, il lui était impossible d'aligner deux pas sans prendre un malaise. Les infirmières la ramassaient, la réprimandaient mais quelques heures plus tard, l'oiseau sortait à nouveau de sa cage. Elle puisait sa force dans sa volonté et sa détermination ne tarda pas à être récompenser. La fièvre diminua, les membres se désengourdirent. La maigreur restait encore visible et effrayante mais la Noiraude reprenait de l'appétit. Intimement, tout le monde crut à un miracle à la voir se rétablir si promptement.

La malade niait allègrement ces rumeurs, elle guérissait car elle le voulait tout simplement. L'Orgueilleuse reprenait de l'aplomb même si le mal mettait du temps à se résorber. Elle l'avait vaincu, faible et seule. Ses joues tristement creuses se déformaient lorsqu'un rictus de fierté se gravait au dessous de son regard encore éteint.


Je t'ai eu...
- Oh vraiment?


Une main décharnée et glacée se posa sur les paupières closes. Sur la paume sifflait encore bruyamment la profonde respiration de l'endormie.

- Crois-tu qu'il est si simple de m'échapper?

Les doigts glissèrent sur le front revenu à température normale mais semblant embrasé tant le contraste était impressionnant. Le contact si froid fit frémir la malade.

Je n'y échapperai pas non. Je résisterai simplement.
- Encore longtemps, penses-tu?


Les extrémités noueuses dérivèrent dans les boucles brunes éparses sur l'édredon. L'index et le pouce sillonnèrent le long de la mèche argentée.

C'est à toi de me le dire...
- Non, Ombeline. Non, je ne te préviendrai pas. Je te saisirai comme le froid cinglant. Corps et âme, je t'emporterai comme une bourrasque de vent et je te balayerai d'ici bas sans que tu ne t'y attendes.
Je suis née pour mourir...
- Alors profites de ma clémence et jouis de ce que je t'offre.
Pour souffrir davantage lorsque que tu me le reprendras. Quelle bonté...
- C'est mon cadeau pour ton anniversaire.


La pièce se réchauffa soudainement et les rayons d'un soleil blanc réveillèrent la Sombre. Une infirmière arriva à son chevet avec un broc d'eau fraîche et la dextre vint saisir la senestre de la jeune femme. Sa paume était tiède, presque chaude. Sous l'oeillade interloquée de cette dernière, la mercenaire relâcha son bras et questionna:

Quel jour sommes-nous aujourd'hui?
Le dix février, dame.


Les iris de jais s'écarquillèrent alors que l'infirmière quittait la chambre, embarrassée.

Aujourd'hui, j'ai dix huit ans... murmura la Corneille pour elle-même, figée dans ses draps. Et je ne suis pas morte! S'exclama-t-elle avec une soulagement infini avant de bondir hors de son lit, plus vivante que jamais.
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Kit by JD Gygy
Nikkita
[Languedoc… Quand on aime on ne compte pas… Mars 1463]


Nikkita tourne autour de l’alezan, soucieuse. Une belle hauteur de garrot, des membres robustes, une croupe solide, une encolure bien portée, ronde et fière, l’animal était le fleuron du maquignon local. Pourtant, il y a cette infime boiterie, ce tendon à peine gonflé au niveau du canon, engorgeant le paturon. La course échevelée de la veille sur les pavés inégaux de la ville laisse des traces préoccupantes, pour l’effort à venir. Même l’eau glacée de la mer n’a pu réduire l’inflammation.

La vagabonde se redresse, flattant de la paume la robe soyeuse, le coup de lance qui marque l’encolure, suivant ses lignes du bout des doigts. La nuit tombe, il est temps de se mettre en selle, rendez-vous est donné. L’allure sera moins soutenue, la distance moins grande. Tout va bien se passer… Montpellier est déjà derrière, et la cogue échouée lui envoie un signal amical. Comme une ombre, la légère silhouette se juche sur le puissant équidé.

Dans la lumière des étoiles, dans le silence rythmé par un galop de chasse, c’est soudain un fouillis d’éclats de lame, un barrage de boucliers, une rumeur qui monte et qui s’amplifie. La nuit s’est emplie de cris, de grognements, de claquements métalliques, de corps qui tombent, d’un carmin noirâtre qui se répand. La nuit s’emplit de l’odeur de la mort tandis que l’alezan trébuche. Il n’y aura pas d’autre course pour lui.

La jambe coincée sous le corps écroulé, Nikkita lève à peine le bouclier pour parer l’éclair qui la vise. Trop tard, il est déjà trop tard. Un visage inconnu à demi dissimulé sous un heaume, les yeux se croisent à peine, la nuit l’enlève.


Laissez-moi dormir…
Pas ici. Pas maintenant. Pas aujourd’hui.


Les bras l’emportent, sa tête ballotte, elle ne veut plus ouvrir les yeux. Les corps tombés de ses amis…

Laissez-les, eux…
Je sais ce que j’ai à faire.


Elle se mord les lèvres jusqu’au sang, la douleur monte et se répand, la conscience vacillante lutte encore… Et c’est bien pire.

N’avait des choses à faire…
Tu as toujours quelque chose à faire. La dernière fois, c’était une sauce béarnaise, tu t’en souviens ?
Et j’vous avais demandé une lune… Z’êtes bien ponctuelle.

Un sourire déchire les lèvres de la vagabonde, elle se laisse peser dans ces bras froids, s’en remettant à celle qui l’emmène.

Je tiens toujours mes promesses.
Z’auriez pu m’oublier, hein…

Et puis la colère. Une rage qui monte de ses entrailles et la fait se redresser pour regarder la Mort en face.

Mais eux… Eux ! Z’y étaient pour rien !
Tais-toi, et laisse-moi travailler. Je sais ce que j’ai à faire.


La tête se renverse, le corps léger ne pèse plus rien, abandonné. Un dernier sourire de défi avant de se léguer au tas de voiles qui l’enveloppe :

Ca, m’taire… ‘Pouvez toujours rêver…
Jenifaelr
    [le 05 juillet 1465]

    "- J'pourrais t'prendre de nouvelles choses. Tu as un jouet particulièrement intéressant. "
    "- Va te faire foutre. "
    "- C'est pas très gentil. "
    "- J'ai pas vocation à être gentille avec une immonde saloperie comme toi. "
    "- Langage peu châtier, Madame ! "


    Ricanement de la Mortuaire et une chope qui vole, qui s'écrase contre un mur.

    "- Ton jouet m'intéresse. "
    "- Pourquoi, t'en à pas assez d'vieux à d'mettre sous la dents ? "
    "- C'est plus marrant quand ça t'fait chier. "
    "- Tu n'es pas foutue d'me faire sortir d'un cachot, quand j'ai besoin, et tu a juste pour objectif de me faire perdre mon temps. "
    "- Au plus tu en perds, au plus tu t'rapproche de moi. "


    Nouveau silence.

    "- L'touche pas. "
    "- Si j'ai envie ? "
    "- J'te tue. "


    Rire sonore, de la Sombre.

    "- C'est bien, tu n'a pas perdu ton sens de l'humour ! Un peu moins piquante qu'avec ta sœur, mais c'est pas mal. Aller, ma petite Vitalis, tu peux faire mieux. "
    "- Corleone. "
    "- Vitalis da Roma. T'es une faible."
    "- Corleone. "
    "- Bâtarde. "
    "- Con**sse. "


    Et les deux silhouettes s'observent en silence. Puis la plus grande éclate de rire, un rire sonore, qui résonne jusqu'aux os et provoque un frisson.

    "- Voilà qui est mieux. T'as l'air en forme là au moins. "
    "- M'le prends pas. "
    "- Plutôt que de penser à quand il partira celui-ci, pense au temps que tu passe avec. "


    Après avoir fait sa B.A de la journée, elle disparut et Corleone se réveilla d'un sursaut. Elle avait trop bu, trop fumer ... et un rat était mort, écrasé lamentablement contre un mur, par une chope.

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Audric_
      [Genève, début juillet 1465]


    Affalé de tout son long sur la couche depuis quelques jours déjà, Audric s'agite. Chaque mouvement réveille les douleurs réparties sur son corps, perturbant son sommeil. Cette fois-ci encore, il n'est pas passé loin. Il le sait. Et pourtant si c'était à refaire, il le referait sans hésiter.
    Les images se bousculent dans sa tête. Elles apparaissent brièvement. Certaines sont floues, d'autres angoissantes.
    Il s'agite de nouveau, cauchemarde sans doute. Ou bien est-ce la fièvre qui s'empare de lui ? Il voudrait se dévêtir entièrement et ouvrir la fenêtre mais son corps refuse de lui obéir. Les paupières lourdes peinent à se soulever, la main refuse de chercher celle qui devrait, normalement, se tenir à ses côtés.

    Et puis Elle apparaît là. Devant lui. Si clairement qu'il a l'impression de pouvoir la toucher. Elle se tient bien droite, le regarde sévèrement. Il frissonne. Les lippes s'ouvrent et il se surprend à pouvoir parler facilement.


      - Ah. T'voilà, toi... Ca f'sait longtemps.
      - Je vois que tu m'as reconnue.
      - C'n'est pas la première fois qu'tu viens m'voir.
      - Non, c'est vrai. Tu vieillis mais tu as bonne mémoire.
      - Mmh.


    Le barbu soupire. La mort était déjà venue le prévenir à plusieurs reprises. Qu'il continu sur le chemin des bastons contre plus fort que lui et elle finirait par venir le chercher plus tôt que prévu. Il avait finit par écouter ses conseils jusqu'à il y a quelques jours.

      - Tu as fini par recommencer.
      - J'pouvais pas faire autr'ment. Il venait pour Cat'. Elle y serait passée.
      - Allons bon, tu la connais à peine.
      - Mmh. T'as pas autr' chose à faire qu'm'emmerder ? J't'ai offert un russe.
      - J'ai plutôt l'impression que tu t'es offert toi-même.


    Le front du mercenaire se plisse tandis qu'un semblant de sourire moqueur illumine la Faucheuse. Il ne veut pas partir avec elle. Pas maintenant. Plus maintenant. Pas alors qu'une étincelle d'espoir revient lui montrer le chemin. Ils restent là un moment, silencieux tous les deux, comme si elle attendait son accord pour venir l'embrasser. Mais il n'est pas prêt de lui donner. Il finit par briser ce silence qui lui donne froid dans le dos pour poser une question qui lui taraude l'esprit depuis quelques mois.

      - Est-ce qu'ils sont avec toi ?
      - De qui parles-tu ?
      - T'le sais très bien.

      Elle sourit de nouveau, il s'agace.
      - Est-ce qu'il est né ?
      - Je ne peux pas te le dire, Audric.
      - Bien sûr qu'si. C'mon enfant, j'ai l'droit d'savoir.
      - Non.
      - T'veux quoi, en échange ?
      - Veux-tu vraiment pactiser avec moi ?
      - S'il le faut.
      - Tu serais prêt à me donner celle que je veux ?
      - D'qui t'causes ?
      - Tu le sais très bien.

      Elle sourit de nouveau, il fronce les sourcils.
      - Tir'-toi. Et n'la touche pas. T'm'as déjà sur'ment enlevé Lina, t'peux pas recommencer.
      - Je peux recommencer autant de fois que je le veux. Et c'est toi qui a voulu du bébé, pas moi.
      - ...
      - Tu n'as pas belle mine.
      - J'fais d'mon mieux.
      - Ne refais pas les même erreurs, elles pourraient te coûter cher, mercenaire.
      - J'y pens'rais.
      - Et évite de te battre pendant quelques temps si tu ne veux pas me revoir.
      - J'y pens'rais aussi.
      - Et prend soin d'elle, si tu ne veux pas finir seul. Et arrête d..
      - C'bon les conseils, là ? J'peux retourner dormir, maman ?


    La Mort lui souffle un baiser, de loin, qui n'arrive pas jusqu'à lui mais qui lui glace les os. Comme une promesse. Le corps du barbu se tend jusqu'à lui faire mal, à rude épreuve. Elle s'incline. Peut-être un peu trop pour que ce soit naturel, puis disparaît comme elle est venue.

    Dans le noir, les yeux injectés de sang et cernés de noir fixent un plafond qu'il peine à voir. La main du mercenaire vient trouver celle d'une rouquine endormie à ses côtés. Étrangement il n'a plus chaud, ni froid. Les douleurs se sont légèrement dissipées. Son corps finit par profiter de ce répit et se détendre. Ce n'est finalement pas dans les bras de la Mort qu'il finit par partir, mais bel et bien dans ceux de Morphée. Un sommeil profond. Sans rêve ni cauchemars.


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