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[RP] Sernin, Cyprien, Augustin...c'est des potes.

Asphodelle
Elle écoute la jeune femme, et sans doute y avait-il un fond de cette lucidité propre à faire plier les combattants, car entre le regard de Calico et ses mains jointes sur ses cuisses, il y eut de nombreux allers-retours.

Tout était fragile, comme une membrane d'oeuf. C'était une course à travers bois. Les sentiers filent sous les pas, planqués sous les fougères. Rapidement, tout ce que l'on regarde est égal, un arbre est comme un autre, le genévrier est le même que celui croisé au dernier embranchement...rapidement, on se perds.

Telle était la vie à la recherche véritable du Très-haut. Une suite constante de doutes, et de chemins proposés.

On s'écorche les genoux sur les ronciers, son visage est fouetté par les brindilles, rien jamais, n'est en paix. Et quoiqu'il arrive, on avance, on avance....Mais où est donc, cette vérité que l'on nous promet quand tout saigne? Où sont donc ces éclats de paix dont on nous abreuve par les crédos, les chants sacrés, les phrases bienheureuses de Saints martyrisés pour avoir accès à ce Paradis qui semble si loin, et si près? Où est donc la route, celle qu'Il veut et celle où l'on sait que tout au bout, le sourire du Créateur vous accueillera? Car dans ce monde de fureur, tout le monde hurle et fait du bruit, à chacun sa Foy sera la plus belle, la plus vraie, celle qui est juste et qui est sorti du sein de Dieu ! Tous laisse exploser leur opposition et c'est le fer qui croise au final, et c'est lui qui soumet, c'est le fer qui oblige les masses, qui leur fait plier la nuque ! Où est le Très-haut dans toutes ces turpitudes, quand il dit à ses Créatures de l'aimer seulement, et de s'aimer les unes les autres?

"Paix, paix, il n'y à pas de paix"...et non....il n'y avait pas de paix.

Alors Asphodelle ne juge pas Calico.
Son coeur se serre pour elle, petite fille perdue et courageuse, qui brave la vie l'air de rien. Chevalier et guerrière sans en faire des tonnes, quand d'autres ont besoin de vivre dans des armures clinquantes et dont il faut bien entendre le cliquetis des plates, remarquer combien large est l'épaulière, et combien le plastron est luisant. Calico traverse ce monde, loyale, et droite sur sa ligne. Et c'est cela, qu'Asphodelle a lu dans ce visage à la peau claire : cette fragilité que dessine une vie peu facile, et cette force qu'elle a su extraire de ces embûches. Un regard peu sûr sur les grandes affaires spirituelles, dont le charivari étourdit, mais le coeur humble. Une main qui se laisse soigner sans protestations, mais une main qui peut brandir la lance et se jeter dans la bataille et à nul autre ne va autant de vaillance !

Alors que Calico se tenait là, persuadée d'être malaimée du Créateur, le coeur d'Asphodelle lui criait tout autre chose. La certitude en était si poignante, qu'un doux sourire heureux n'eut rien besoin d'autres pour naître naturellement.

Et c'est absolument convaincue, qu'elle serra l'épaule de la jeune femme, et qu'elle lui assura la chose suivante :


En réalité, Calico....si Dieu devait choisir ici entre vous et moi, pour entrer en Paradis, tandis que l'autre devrait peiner encore pour le trouver...ce serait vous qu'il choisirait, sans l'once d'une hésitation. Et son choix serait juste, vraiment juste....oh oui...tellement juste.

Elle souriait encore, d'une joie sincère de savoir l'âme de la jeune fille si affectionnée du Créateur, et ce, sans que la moindre sensation de doute ne puisse l'en détourner. Elle l'ignorait, parce qu'elle se trouvait toute petite, et trop insignifiante pour le Tout-Puissant, mais pourtant....Dieu n'avait que faire des énervés, des forcenés, de ceux qui brandissent sa volonté à tout bout de champ, comme si ce fut une pièce de vaincu à exhiber en vainqueur...sa volonté ! et qu'est-ce qu'ils en savent ces Jean-foutre de la gouaille de bénitier de ce qu'il veut ?! Il leur envoie un pli tous les matins envoyé en recommandé direct missioné par un Archange lorsqu'ils ont le cul sur les chiottes peut-être? Dieu aime les âmes douces, qui se voient petites alors qu'il les voit si grandes. Dieu aime ceux qui doutent, mais qui continuent de l'aimer quand même, à leur manière.

C'était rare de rencontrer un être si peu pétri de vanité. Tout le contraire de ce qui chute lourdement, et qui meurt dans l'organique de leur matière.

Asphodelle était devenue compliquée. Elle ne regrète encore aujourd'hui pas ses choix, ni même sa carrière, passée, et celle d'aujourd'hui, mais elle était devenue elle aussi, une brandisseuse de pièce de vaincu, exhibée en vainqueur. Elle n'était pas parmi les créatures les plus aimées du Créateur. Ce qu'elle défendait actuellement lui semblait juste, mais elle s'abimait dans ce qui précisément, devait lui permettre de continuer la lutte : la fierté !

Elle le savait d'autant plus qu'elle ne put que se trouver irradiée par cette innocence qui était venue poser sa serrure, et qu'elle avait perdu, il y à si longtemps.
Calico la voyait comme une belle personne...mais elle se garde bien de lui dire qu'elle se sentait parfois ne rien valoir de mieux que "les autres". Pour autant, le compliment la toucha profondément malgré son jugement sur elle-même : ces tronches de fromage blanc clairsemés d'inquiétudes tenaces sur leur valeur, ça ne sait jamais être en paix avec soi-même.


J'ai hâte de savoir comment vous avez rencontré Feue Sa Majesté. Elle eut un sourire peu convaincu..."Feue"...mais moi je dis, que tant que son oeuvre est debout, il est encore vivant !...derrière son sourire elle laissa flamber un instant le ravage brûlant de sa détermination : et je ne la laisserai pas s'effondrer sans me battre ! Ceux qui l'affublent de leur colère pour avoir agit comme des ânes quand il fallait agir comme des anges, je ne les laisserai pas l'imprimer dans l'Histoire comme un Anti-Roy ! Et en réponse à leur vue courte et à l'étroitesse de leur raisonnement, un jour, j'en ferai un Saint ! La menthe de son regard s'était tourmentée d'un ciel d'orage, un court instant...parce que...ça tombe bien, "me battre", c'est tout ce que je sais faire de ma foutue vie ! Mais elle se mit quand même à rire, se moquant de sa propre ritournelle. Surtout la tronche de la Curie devant une annonce faisant du Blanc-Combaz un Saint...alors là c'était sûr : c'était pas le Super-Anathema qu'elle prenait, c'était le Giga-Supra-Anathema Super Plus 2000 ! Wouualou le bûcher !

Elle se retourne et prends une petite bourse déposée sous son oreiller. Puis elle se lève et prends la bassine d'eau, la posant sur sa hanche ronde :


Ne vous en faites donc pas, pour ma serrure. Même si pas accrochée, elle est magnifique. Vous reviendrez quand vous serez guérie, nous aurons ainsi l'excuse pour nous retrouver. Tendant la bourse : et ça, c'est pour votre peine. Les deux. Prenez ou vous me fâcherez. Les jeunes filles ont besoin d'argent pour un tas de choses que les mecs n'ont pas ! et même si vous n'en avez pas besoin, c'est pas grave...par principe, une jeune fille a quand même besoin d'un tas de choses que les mecs n'ont pas ! même quans elle n'a besoin de rien !

Adage Asphodellien pur premium.
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Youp...youp...youp...
Calico
Une Madone aux cheveux de feu.
Voilà ce que voyait Calico quand elle écoutait...non, quand elle buvait les paroles d'Asphodelle. Et si le Très Haut existait vraiment, avait il fait exprès de lui mettre cette madone en travers de sa route?
La sauvage se sentait étonnamment proche de cette douceur incarnée. Même en sondant son regard, Cali ne voyait rien de mauvais en elle.


En réalité, Calico....si Dieu devait choisir ici entre vous et moi, pour entrer en Paradis, tandis que l'autre devrait peiner encore pour le trouver...ce serait vous qu'il choisirait, sans l'once d'une hésitation. Et son choix serait juste, vraiment juste....oh oui...tellement juste.

La Sauterelle se mit à rire. Pas un rire mauvais ou ironique mais un rire sincère qui sortit comme du cristal, pur et mélodieux. Asphodelle ignorait que par le passé Calico avait tué, avait volé, avait pillé. La brunette de dix-huit printemps avait un lourd passif malgré son jeune âge. Si Dieu existait, elle n'était pas sûre de franchir la porte du paradis attendant sa clé. Il y avait plus de chance, qu'elle se prenne une baigne. C'était drôle à imaginer, Dieu avec sa grosse main qui lui fout dans la gueule avec un "tiens c'est pour toi, cadeau!".

Elle préféra garder le silence sur ses agissements passés de peur de couper dans leur élan, les prémices d'une amitié. Elle la regarda amusée.


Moi je vous choisirais vous si j'étais lui.

Elle pointa en même temps son index vers le ciel.
Peut être Asphodelle avait telle commis aussi des bassesses pour estimer que Dieu ne la prendrait pas sous son aile. Ceci remettrait à zéro les compteurs entre les deux femmes.
La conversation fila vers Eusaias.


Si un jour vous connaissez le moyen de faire de lui un Saint et si dans cette entreprise je peux vous aider, alors n'hésitez pas. Ceci sera vraiment une petite obole à son encontre, avec toutes les gentillesses qu'il a eu à mon égard.

La Madone donna une bourse qui semblait lourde. Calico n'était pas une grande habituée des rétributions. Elle se sentait presque gênée. C'était ballot, l'ancienne voleuse n'avait pas éprouvé de scrupules à voler alors qu'elle se sentait un peu mal d'avoir travailler pour un salaire. C'était paradoxal. Mais après tout, elle prit la bourse sans regarder le contenu, ce serait très mal poli. Si la bourse contenait nettement d'avantage, Calico serait toujours à même de remercier la rousse d'une autre façon.

J'ai besoin de peu d'argent. D'ailleurs je vous dirais même que j'ai peu de besoin tout court. Je sais me satisfaire du nécessaire mais ceci est en quelque sorte mon premier salaire.

Elle lui sourit, reconnaissante.

Je vous remercie. Je vais mettre cet argent en lieu sur afin de pouvoir m'acheter un autre champs et pourquoi pas devenir une érudit.

Ce serait un beau pari sur la vie de commencer analphabète et terminer grande savante.

Nous nous reverrons, c'est une certitude.

Elle jeta un regard vers la madone avec sa bassine calée sur la hanche. Elle lui fit un clin d'oeil malicieux et fit sauter la bourse dans la paume de sa main, avant de la mettre à l'abri dans sa besace.

A très bientôt.
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Asphodelle
Je n'oublierai pas votre aide. J'espère pouvoir aller de l'avant dans cette grande entreprise. A très bientôt Calico...

Elle regarda dans l'encadrement de sa porte, partir la jeune femme. Après avoir jeté l'eau dans son maigre potager, elle revint dans sa cabane et ferma la porte.
Elle rangea un peu, se rassit et regarda de nouveau la serrure avec les initiales gravées dessus.
Elle eut un léger sourire, et songea qu'elle avait bien du chemin à faire pour tenter de rattraper ce qu'elle pouvait avoir perdu en chemin depuis quelques semaines.

La serrure sera posée plus tard. Pour mettre les chances de son côté, elle cherchera un baton de sureau qu'elle va évider, puis l'ayant glissé dans un papier, elle portera le nom de Calico dessus, et se contentera d'une tranche d'années pour la naissance. Cela devrait éloigner les fièvres.

Pensive, la rencontre avec la jeune femme suscite encore de l'émotion et surtout, de quoi faire tourner son esprit à la faire rentrer dans son monde un moment.

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Youp...youp...youp...
Asphodelle
Le silence est l'élément dans lequel se forment les grandes choses, pour qu'enfin elles puissent émerger, parfaites et majestueuses, à la lumière de la vie qu'elles vont dominer. Maurice Maeterlinck (1862 - 1949)



Assise au milieu de la pièce, elle regardait sa porte à travers les ombres chinoises de l'unique flamme. Le feu ne brûlait plus, il s'était tû en braises rouges.
Sa cabane de Saint Cyprien, était l'endroit où elle se sentait le mieux.

Elle portait un regard fixe et sans émotions au-delà des planches de bois cloutées sur deux couches croisées. Elle cille, d'espacement étrangement éloigné. Elle regarde la constatation claire de sa réflexion.

Depuis quelques semaines, elle se sentait un malaise persistant et amer au fond d'elle...ce n'était pas l'amertume du regret. Ni celle de la déception. Etait-ce bien amer d'ailleurs? n'était-ce pas plutôt, acide, parfois? Mais maintenant qu'elle avait enfin découvert la raison de cette sensation qui la faisait se tourner vers le plafond, souvent pendant la nuit...à la veille de l'âtre...qui la freinait dans ses tâches, et l'avait stoppée dans certaines de ses grandes décisions...qui avait d'ailleurs, finit par la rendre malade....elle se sentait étrangement apaisée. Apaisée ou vide? vide ou hébétée? La fiole du diacode arrivait à son terme...elle n'avait pas eu envie de se repréparer la potion salutaire. Pas envie ou pas pensé?

Derrière la porte...
Derrière la porte...

Les rues. La grand rue. La poterne. Le chemin. Les chemins. Les fossés, les champs, les forêts, l'inconnu, l'excitation de l'inconnu.

Sous son lit...
Sous son lit...

Un sac. Un savon à la menthe poivrée. Le Livre des Vertus en petit format. Une bande de cuir. Du fil et une aiguille à coudre. Des chaussures de marche, une planète, ses braies de daim, sa dague, celle de Caturix, et ses gants pour tenir la bride, la bride de son superbe Lusitanien argenté.

Partir.
Les heures s'égrainent à ses oreilles, jusqu'à ce qu'elle en ressente un bourdonnement à présent désagréable.
De façon mécanique, elle se lève, et elle bascule le chevron. L'huis s'entrouvre sur un bleu d'encre, pailleté des ors des torches aux croix des rues, des fenêtres où les ouvriers de la nuit s'activent pour l'ouvrage, des établissements nocturnes où les folies des sens remplacent celles de l'esprit.
La brise à cet endroit, tourne un peu, car derrière, l'élévation immense des remparts à quelques pas de sa maison, barre le zéphyr à l'arrière, et le contraint par le devant. Barrée. Contrainte.

T'en aller.
T'en aller, parce que tu ne sais pas rester. Parce que toute ta vie, c'est ainsi que tu vécus. Petite sur les chemins des Pyrénées, et les sentiers des pastoureaux, plus grande sur les pas de Petit Pierre pour tailler les bourgs, ensuite, pour survivre, et encore après, pour batailler, et même ensuite, pour l'aventure, et encore et encore au retour ! pour escorter. Toujours sur les routes ! toujours en mouvement ! Et maintenant, tu es là, sédentaire. Et au Conseil, tu n'as pas le droit de sortir des frontières. Et tu es là, chose parmis tellement d'autres, à découvrir le lien que tu t'es nouée à la cheville. Les matins sont-ils pesants? tes soirs sont-ils gâchés? valent-ils mieux dans les granges offertes au hasard? ou dans ce lieu qui est le tien? La Peste soient des Bohémiennes ! Le froid peut bien rentrer dans ta pièce unique, toi tu t'en fous, tu penses à fuir.

Fuir. Fuir !
Fuir quoi? les responsabilités? les gens? leur amour, ou bien leur haine? les histoires? les déceptions? une vie sans blessures est-ce bien vivre? en es-tu sûre?

Et devant l'étendue de la ville elle voit là-bas à chaque Tour, les chemins ! les départs ! les courses ! les grands galops ! Mettre entre elle et le Comté des lieues et des lieues de terre, de sable, et de mer...d'eau et de dunes...de fossés, de champs, de forêts, d'inconnu, et d'excitation de l'inconnu. Et devant ces tragédies de murs et de cheminées qui fument, appelle l'échappée belle, hurle la belle aventure, les chants des marins, les hymnes des nations, le bigarré des visages, l'impersonnel de leur matière, car tu les frôles seulement, pour mieux partir, tu les effleures...pour mieux les quitter. Parce que toi, tu ne sais pas rester. Tu ne sais pas rester.

Les étoiles sont-elles bien posées sur leur socle, pour que tu n'ais jamais que ta prunelle dessus pour te guider?! Est-ce donc cela le résumé de ta vie?! Ne pas s'attacher...trop...ne pas s'engager à poser bagages...pas trop longtemps...ne pas s'emmêler dans le bruit des gens, leurs volontés qui clashent d'autres volontés, et les égos qui s'affrontent, le mépris des uns, et la défiance des autres...les fureurs de tous, et la place que tu n'as pas, parce que tu pars ! à chaque fois tu pars ! Dès que cela devient trop personnel, que l'on commence à te faire une réputation, que les gens se font une opinion, que tu incarnes un être aux définitions douloureuses, que tu prends corps dans une image qui t'effraie...Dès que tu marques une empreinte. Dès que tu quittes l'état de nuée, pour prendre celle d'une matière pleine...toi, tu as peur. Alors tu pars.

Tu as peur.
C'était cela, qui te nouait le ventre, et qui la nuit, te tenait les yeux ouverts sur le plafond, jusqu'à ce que finalement, tu t'en rendes malade. La peur, la frayeur, la crainte. Tu peux braver la Curie, tenir tête au Camerlingue, risquer l'anathème, foncer sur le brigand, affronter le regard de celui qui veut ôter ta vie, lancer ton chant de guerre, marcher la nuit dans les forêts sombres où s'agitent les garrols et les bêtes faramines, approcher des réunions de sorcellerie dans les grottes sombres...mais vivre avec les gens te laisse effrayée et craintive.

Vivre avec les gens...c'était une autre sorte de combat. Les blessures étaient souvent invisibles, et les morts ne se voyaient pas. L'attaque jamais prévisible...l'arme toujours bien cachée...Vivre au milieu des autres, c'était être en danger. Etre aimée, ou aimer, être détestée, ou ressentir de la colère, être peinée...si peinée...tellement peinée...Il n'y à pas de règles à tout cela. Il n'y avait qu'à rester.

Rester.
Parce qu'étendre des étendues d'eau et de forêts, entre Toulouse et ta personne, maintenant, te ferait souffrir. Parce que ton corps est fatigué, aussi. Parce que de ton coeur part un lien, et que tu ne l'as pas vu venir celui-là. C'est trop tard. Les étoiles ne sont plus accrochées pour te guider, elles en guident d'autres maintenant. Mais que fait-on quand on reste?

La main tremble lorsque glacée, elle rejoint la joue perlée d'une unique larme.
L'exposition fut sans barrières, mais elle avait oublié, qu'elle ne pouvait pas partir, qu'elle ne partirait plus. A cette heure, et en temps normal...elle serait déjà loin...à revenir dans longtemps. Et Dieu fut un beau compagnon de fuite. Que cela était bon de pouvoir s'échapper avec lui. Et ses armes le prédicat parfait, pour déguiser une forme de lâcheté sous l'habit d'un courage éclatant. Il était tellement plus facile de braver sa mort, que d'affronter sa vie.

Maintenant qu'elle comprends, une série de mesures devaient être soigneusement érigées. Le siège était devant sa porte, et ses démons se pressaient. La panique remonte à sa gorge, elle tourne le regard de son désir d'évasion, et d'un pas en un seul tenant, se barricade, claquant la porte. Réfléchit. Rester. Trouver les clés. Celles que les gens avaient déjà...déjà depuis leur enfance...parce qu'ils n'ont pas grandi sur les versants des Pyrénées, à suivre un Compagnon, à servir le labeur, et à escorter...à vivre l'aventure et à partir en bataille....Ils étaient d'ici...Ici c'était leur maison. Ils appartenaient à cette terre comme s'ils en furent modelés. Ils étaient bien entre leurs remparts.
La bouche mordue, en premier lieu, ne pas le montrer. Les prédateurs sentent la peur....ceux des forêts et des nuits, elle connaissait, mais ceux des rues et des maisons...Planquer bien au fond d'elle, tout cet effroi, qui ferait d'elle une proie.

La main fermée au creux de son cou...elle regarde son unique pièce, et la bougie vacillante. Es-tu malheureuse de rester? ne vois-tu pas déjà, cet avenir qui s'ouvre à toi, traçant une route de soleil entre les champs immenses et les plaines douces, les bois parsemés remplis de charpentes, des charpentes pour le Comté?...ne vois-tu pas la douceur de ces matins à quitter ce lit sous les lumières claires, et l'envie de voir au bout du ruban...si un sourire s'y trouve? les pigeonniers de tes domaines...ceux que tu aimes déjà comme une mère...et ce qu'il y à de beau à construire. Pourrais-tu partir loin du propriétaire de ton âme qui a mordu dans ta chair? Le chemin est barré...les ornières trop dangereuses pour la monture. Tu es vendue ! et que la transaction te parait douce.

Mais l'ombre n'est pas loin. Le visage se ferme. Le coeur est inquiet. Le pas est hésitant.

Il fallait rester, et se protéger des flèches. Toute la crainte des gens reportée sur les routes était sa crainte à elle à l'intérieur de ces murs. Bouche mordue. Elle réfléchit. De longues minutes fébriles......lorsqu'enfin la donnée apparaît, par Augustin.

Jeûner. Manger. Les repas. Les repas monacaux selon la Règle III.
La parade. Le mirage. L'illusion. L'immatériel, présent, et indiscutablement là.

Leçon numéro trois : "faire voeu de silence".

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Youp...youp...youp...
Asphodelle
Oops ! I dit it again ! - Chanson éponyme, Britney Spears
Ou Buddy Parker réalise qu'il a dépassé la frontière depuis trois mois....mais, c'était au cactus à droite en passant l'gué d'la Red Creek?



Faisant le tri des longs clou forgés, elle prépare l'avancée de son écurie, à genoux sur la paille et les aromates du sol de sa pièce unique. Le feu craquotte dans son âtre-four, et ça fume toujours un peu, rendant le plancher haut de plus en plus gris.
Son frère n'est pas là encore...et à vrai dire, elle ne parvient toujours pas à se signifier sa présence ici. Alors elle continue comme si de rien...
Lorsqu'elle se regarde, parfois elle se dit qu'elle n'est vraiment qu'une sauvageonne qu'on en f'ra rien !

Elle continue son quotidien et avance sur le fil des projets, des envergures, des branches d'étoile, des ébauches de grandeur rêvée. Et puis il y avait... et lorsque son index frotte négligemment sur cette tête de clou immense, elle réalise.

Son regard cherche voir par là, s'il existerait une échappatoire, mais, elle avait oublié. Un instant, et l'oubli dura trois mois. Mais comment elle a fait ça?

Ouvrant la bouche, atterrée, scandalisée d'elle-même, elle se souvient de sa résolution lamentablement passée à l'as et sous l'os des atlas de l'inconscience.

Il faut un long moment de silence, et une sensation de rébellion bien vaine, pour se rendre compte de l'odieux piège. T'es faite comme un Rrrrrraaaat !!
Prenant son ciseau à bois, elle taille dans le morceau de chêne la cheville du premier lien côté Franc. Inquiète, soucieuse, en plein désarroi, des semaines et des semaines qu'elle laisse entrer le nuage par les pores de la peau, et ce n'est que ce soir qu'elle s'aperçoit que ça craint.

Elle s'était promis. Plus jamais ça.
M...Merdouille !! Ch...Chié ! Aller accroche toi va, ça va tanguer ! forcément...ça tangue toujours.

Niquedouille !!
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Youp...youp...youp...
Asphodelle
« Il y a une part de folie dans ce désir ardent de quelque chose de beau. » Hayao Miyazaki


Le dernier chevron solidement arrimé à la sablière, le cordeau ayant tracé par avance les écarts de liteaux, c'est au tour des fines lattes d'être clouées.

En construction, tout était soigneusement déterminé, les éléments calculés, pré-assemblés s'il faut. Rien ne peut jamais être laissé au hasard, et du plus petit au plus grand, chaque élément est vital à l'autre. Les mesures, les sections, le sens, les longueurs de portée, la triangulation, la charge, les poussées, les attaches, les scellements, l'arc de décharge, les chainages, harpages, les angles, les écarts, la matière, l'angle de toiture, et enfin, l'esthétique de l'ensemble...participaient main dans la main et sans souffrir d'être séparés à une apparition merveilleuse, solide, sécurisante, et indispensable.

Elevée dans l'univers des fées, monstres et zombies, nature sauvage en premier lieu, puis dans le cadre fermé et contingenté, puissant, réglé, des Compagnons, dans un second temps, l'herminette avait soigneusement dressé l'herbe folle, et la boucharde attendait parfois encore, la finition du tout. Construire était une seconde nature, un désir fou, réglé à la ligne* près, une nécessité un peu psychopathique. L'inversion des éducations avait sûrement fait naître une nature à la création, dans un tout ordonnancé, et ainsi, Asphodelle était devenue une composition de jardin à l'anglaise.

Les gosses se marrent en dessous, ils essaient de voir sa bache de dentelle, ou ses fesses, défi du jour bonjour, car elle ne porte plus que rarement les braies, s'étant réhabituée avec un certain plaisir à l'habit réservé au beau sexe. Les jupons remontés et coincés dans la ceinture de cuir, elle porte des bottes qui tiennent bien la cheville, et qui sont assez souples pour évoluer en hauteur comme un chat, et de fait, écureuil d'échaffaudage, elle n'avait pas le vertige.


Barrez-vous !! qu'elle leur crie, un peu brutasse mais toujours de bon coeur, attendrie par leur frimousse de garnements, qu'elle rêverait de débarbouiller et d'embrasser le soir, avant de souffler la bougie. Ca ricane en bas et ça s'échappe, tandis que les petites filles observent d'un air un peu admiratif, la "femme étrange" évoluer ainsi comme un cabri avec souplesse entre les écartements à une à deux toises** au-dessus du sol, tout en interjectant que vraiment : "l'garçons, c'trop nul!" d'un air supérieur, déjà consciente de la possession de ce mystère féminin.

Mais les enfants ne sont guères trop autorisés à rester près d'elle : les adultes déjà, se méfiaient d'elle...même au sein de son propre parti Politique, on s'en méfiait.

Elle se redresse et prends la brise au vol. Bien peu - aucun - ne savait à quel point du vice elle poussa la piquée de l'aiguille de la loyauté. S'ils veulent des notions de sacrifice, qu'ils regardent donc ses poches trouées ! Rome lui doit au bas mot, de 15 à 20 000 écus ! au bas mot ! C'est bien sûre d'elle et de sa route, qu'elle continue malgré tout et regarde, les enfants des autres s'éloigner. Arrivée à ce stade, son regard sur Toulouse ne vacillera ni ne s'imprégnera des vues castées des gens. Mais c'est avec bien de la peine qu'elle constatait qu'elle venait de plonger jusqu'au cou dans les méchants travers politiques.

A cette goutte du jour arrivée, ce n'est pas ce qui la tourmentait, pourtant.

Le genou blessé se tord étrangement, et le litelage avance. Trois clous dans la bouche, la ceinture de maçon autour de la taille, ça n'est pas le genre de la maison de fénéantiser.

Non...ses doutes et sa peur venaient d'ailleurs.
Elle parait concentrée mais son regard est vague. Les clés dorées sont à ses doigts et elle enfonce comme une machine. Dieu est plus près et pourtant, en ce jour, elle ne l'entends pas lui donner de réponse.

L'étoile brille haut déjà au-dessus de la ligne d'horizon, lorsque l'idée furtive la traverse de saborder l'Eglise de France.

"Aspho?" "mmm?" "t'es sûre d'avoir bien passé une bache non fendue ce matin?" "!!!! oh put...."
Les doutes, c'était terrible...



*la ligne = 0,2256 cm
**1 toise = 1,949 m
bache : sous-vetement féminin type caleçon

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Youp...youp...youp...
Asphodelle
«Quand le Chef Shoshones a ouvert les yeux de Buddy sur la guerre des Blancs et des Indiens, les couleurs sur Chimney Rock n'ont plus jamais été les mêmes.»
« Les larmes qui coulent sont amères mais plus amères encore sont celles qui ne coulent pas. » - Proverbe gaélique



Il n'y avait qu'un silence pesant, une lourdeur bien présente et différente d'un instant d'occupation particulier.
Elle s'était levée tôt, avait, encore une fois, dormi peu, mais ce matin la magie était loin d'être présente. Les corvées furent faites dans l'apathie, et les prières n'ont jamais trouvé de fin.
Bien que Casa Aria offrait un demi-bâtiment tout à elle et parfaitement aménagé, elle ne voulait pas abandonner sa cabane. C'était son chez elle, ses racines à la terre, l'ancre de son enfance. Elle y passa le peu de nuit là où elle rangeait toutes ses réflexions. Dans un tiroir, une malle, une claie de caillats.

L'avancée de la journée se passe. Tout n'est que rigueur et le coeur n'y est pas. Il n'y aura rien ce jour hormis le bruit du vent sur les carreaux, et les sensations de courant d'air sous la porte. Pas un son, ni même l'expression d'une suggestion d'émotion. A peine parfois, l'odeur subisiste d'à côté, du mortier de chaux encore tendre, et dans son crâne, mille mystères qui turbinent, milles tristesses qui tambourinent. Les longs soupirs ne trouvent pas même leur voie.


Las. Les couleurs sur Chimney Rock ne seront plus jamais les mêmes.

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Youp...youp...youp...
Asphodelle
« Quand Buddy tourne le dos au comté, les cactus font la gueule»
« Qui n’est jamais tombé n’a pas une juste idée de l’effort à faire pour se tenir debout.» - Multatuli


Au deuxième jour, elle ne repasse pas à la Casa.
Le silence est toujours de mise, les pointes de l'émotion ne font qu'effleurer.
Elle sort cependant, apprends qu'un Viking est aussi un Norse, que les Norses sont d'affreux jojos et que la moitié d'un vit à Bergerac, après quoi elle se fait le projet d'aller le voir par curiosité.

Apprends aussi à dire "à la bonne vôtre" en Calédonien Nouveau, et tout cela dans la plus pure tradition de l'inexprimée, pas plus que cette visite impromptue de Blaireau qui la laisse....sans expression. Du moins encore.

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Youp...youp...youp...
Asphodelle
« Quand Buddy Parker fête son anniversaire seul, avec une bouteille de gnôle et son cheval comme seuls amis, il trouve que le couchant du soleil lui révèle toute la nature de son destin, et ses rayons, d'autant de mystères dévoilés.»
« Le chagrin n'est pas un état mais un processus. » - Sinclair Lewis



Au troisième et quatrième jour, rien ne se dérouille. La mer toujours étal, l'air, toujours stagnant, bloque les voiles. C'était la suspension du temps, la lévitation des choses matérielles, et l'absence, ou la présence, sans parvenir à démêler, des passages de ressentis qui sont comme des nuages par grand vent.

Mais dans le fond, c'était plat. Elle n'avait pas encore le mot qui lui donnerait le déclic. Le mot, le geste, ou la pensée.

Au cinquième jour, elle ne songe pas qu'elle est, encore une fois après Saint Noël et le nouvel an, seule, pour le jour de sa naissance. Un bouquet cependant, et plusieurs roses, lui parviennent. De Valentin ou de l'anniversaire, ses fleurs s'apparentent mais le fait est vite avéré : elle ne clame pas la chose. Humant la composition offerte par son frère, elle met à sécher les autres roses avec leurs petits mots de tendresse. Elle les gardera, comme une vieille dame qui entasse déjà ses souvenirs pour se préparer à partir.

Lors de ce cinquième jour, elle ne songe pas à sa mère, et non plus aux temps à venir....pourtant, cette nuit elle ne fermera pas l'oeil, la prunelle fixée sur cette porte qui n'a pas encore sa serrure.
Plus qu'à aucun autre moment, le fond de l'air sent l'attente.
L'envie de se fermer à double tour commence à poindre. Tandis que les rouages de son esprit, arrêtés, attendent eux aussi de se remettre en marche.

Sans doute...l'hébétitude ne s'est encore envolée. Sans doute, il y eut trop de flêches ces temps-ci. L'ourse lêche ses plaies.

Mais pour la première fois, les jours passent...et elle n'a pas envie...elle veut regarder sa misère droit devant, la contempler et ne pas réagir, jusqu'à cette chose, qui arrivera et qui arrive toujours, et qui la mènera sur une autre route de détermination. Pas de gaieté, pas de larmes, l'instant est stoppé. L'absence de réactions, est une réaction en soi.

Il serait bon pourtant, qu'elle se remette en selle : le mariage a lieu bientôt. Elle doit être prête, et pour l'instant, elle n'en a pas même l'idée. Elle a écrit l'évènement dans cette suspension, au-dessus de sa tête, et elle laisse les jours passer sans rien y faire.

Elle attends. Elle attends que cette soirée là soit remplacée par autre chose.
Mais pour l'instant, rien ne se met à la place de ce qui fut détruit.

Enveloppée dans sa cape de solitude, Asphodelle s'enfonce dans le mutisme passif...et provoque d'un air bravache son infortune.

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Youp...youp...youp...
Asphodelle
«Journal de bord d'une Asphodèle, plante des morts, plante d'immortalité, plante des sorcières corsiques, poison et antidote.»

Rien !

Elle avait cru, un moment, suite à la mort de Bayard et son office au pieds levé, et suite à la demande du pipou.

Mais non, faux espoir : rien.

Neuf jours plus tard : rien.

Cinq jours plus tard : rien non plus.

Les hérétiques s'amusent à lui balancer des pièges de poudre sur le chemin. Elle fronce le sourcil, et se concentre : dans sa chambrée de Saint Sernin, chez la mère Acrobar, elle couds et elle couds très bien. Six années à servir soldat ça aide à manier l'aiguille. Chair ou tissu, l'aiguille pour tout tissage humain ou végétal, est dans son kit de survie.

Là elle crée sa tenue pour le mariage de Kronembourg.
Elle ne veut pas porter soutane ce jour ! pas d'étole ! pas d'aumusse !
Elle ne veut plus être tributaire d'un atelier...elle veut composer son idée, sa seule idée...la sienne.

Elle va proposer sa vision de cette Prêtresse qui ne parvient plus à retrouver dans ses veines les pulsations d'un mysticisme aux goûts d'abysses. Allier la sobriété religieuse, et l'allure. Puisqu'elle ne ressent plus rien...elle couds. Puisqu'elle ne voit plus rien...elle couds. Puisqu'elle s'adoucit, que ses angles s'arrondissent, que ses cheveux s'emballent, et que ce corps poursuit seul cette évolution d'arabesque langoureuse...elle couds.

Où est-elle? quand s'est-elle perdue? Est-ce Toulouse? Toulouse et son mécréantisme aux portes d'Oanylone? qui la grignote ou a atteint le centre vital de son organisme.
Où est-elle? quand a t'elle lâché le bord du gouffre? Depuis quand tombe t'elle?

Les prunelles s'assombrissent...il faut coudre, et attendre. Attendre, et coudre.

Cela viendra, et cela vient toujours. Dieu lui donnera l'indice, il le fait toujours.

Dieu oui...mais sa mère? pourquoi n'est-elle pas venue le 14 Février comme elle l'a dit?
Il suffirait d'un bout trempé dans le poison, et de se piquer le doigt. Inodore, invisible, le coeur s'arrête subitement, pas de traces, aucune explication. L'empoisonneuse et son art surpassent la mort elle-même et taille le fil avant les Parques.

Pourtant, elle manie l'aiguille. Dans sa cape de solitude, Asphodelle provoque d'un air bravache, l'infortune, et même sa mort.

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Youp...youp...youp...
Asphodelle
« Je suis Ennée Lucard, entité vagabonde et stable etc...»


Un vent de renouveau souffle. Ce n'est pas le vent des Fous, ni le Fen basque, ni le vent nordique qui bat en raffale sur les remparts de Saint Michel.

De ce labyrinthe sans issue, ce qui l'a bouleversée, le mariage et le retour, ce qu'elle a attendu, et qui n'est jamais arrivé, car il n'y à rien eu et aujourd'hui encore, rien encore, car les réponses se trouvaient dans ses errances.

Tout n'est qu'affaire de chances, et on ne maîtrise ni ne contrôle, ni les lendemains, ni les effets sur soi d'un passé qui se tisse à chacune des minutes créant par explosions, ses négatifs d'instants. Hasard, carrefours aléatoires, effets papillons, élections et contraintes, chances et évènements imprévus, l'être est à la merci des méandres d'une destinée non écrite, une destinée portraitisée par la seconde mais qui augure en avant l'infini des possibles, un infini vertigineux, aussi gigantesque que le macrocosme et ses planètes, ses galaxies et ses pouponnières d'étoiles.

Pourtant, le vent souffle ! il désable les plages, il fait reculer les dunes, et alors, sa vue est si claire. Le bracelet a changé la donne. Le serpent joue la boucle de l'infini, rassurante, et c'est le grand huit ... Il pose les nouveaux calculs, il dessine les traits aux gestes sûrs d'un fusain rouge si intense, et si net. Elle sent sur sa joue, la sensation de l'évidence.



« Je suis Ennée, et tant que je serai elle, je suis celle qui fait, j'agis dans la raideur des nécessités, et malgré l'ampleur des ravages, je continue mes labeurs. J'avance solide sur mes bases, je me tiens droite face aux outrages, et ma conviction me porte. Je vois loin, je puise dans l'essentiel, je prends ce qu'il y à prendre, j'attends à petites mesures, je raisonne avec sérénité, et je sais celle que je serai demain, peut-être, sûrement. Mon bras est armé de courage, mon esprit s'inhibe dans les détresses, et je porte mes pas sur le layon clair et limpide de ma Foy, car jamais je ne perdrai les trésors de la connaissance, pour peu qu'heureusement, je les ai cherchées. Je suis celle qui sait qui elle est, qui sait où le battement de coeur commence, et là où il finirait. Car il n'y aura jamais rien de pire que la mort de ceux que l'on porte en soi...jamais rien de pire que ces sourires que l'on ne reverra jamais...je suis Ennée, celle qui fait à travers ses larmes. Je pose mes pieds au sol au lever, je me redresse face à la journée, j'enchaine les gestes du matin, je pose mes pas sûrs et, sans décadence, je fais.»

Elle fait malgré ses larmes, elle pose ses pieds au sol au lever, se redresse face à la journée, et enchaine les gestes du matin.


Leçon numéro quatre : "AB JOVE PRINCIPIUM".

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Youp...youp...youp...
Asphodelle
    « On n'acquiert tout pouvoir sur les autres qu'en renonçant à tout pouvoir sur soi-même. » - Francis Bacon



Une nouvelle nuit, elle était parvenue à s'échapper.
Elle savait qu'elle n'en avait pas le droit. Dormir dans sa cahutte, sa cabane pourrie n'était pas digne d'une Comtesse, et la posait devant tout danger.
Elle ôtait ses beaux atours dès qu'elle avait fermé la porte, et se glissait nue sous les peaux : elle faisait alors l'espace d'une nuit, comme si elle n'était qu'une femme du peuple. Elle rallumait son feu, préparait son diacode, pelait quelques vieilles raves.

Pourquoi, lorsqu'elle se comporte comme une pauvre femme du petite peuple, se conduit-elle comme une dame de haute noblesse, et lorsqu'elle est la Souveraine d'un Comté, elle n'a qu'une envie : retourner à sa retenue et sa mesure entre quatre misérables planches?


Depuis quelques jours, elle se sentait bloquée. Ce n'était pas son Conseil. C'était en elle. Asphodelle ne retrouvait pas ce qu'elle avait dans ses mains quand elle dirigeait ses cinq Gardes Episcopales dans plusieurs langues, et qu'elle s'adressait aux Dirigeants des continents sans baisser la tête.
Privée de mentor, elle devait chercher en elle la solution, et ce qui pourrait enfin déployer ses ailes.
D'où vient le pouvoir? des élections? Mais mérite t'on le pouvoir seulement parce qu'on a été élue? Le regard des gens était tourné vers elle, et sa main se mettait à trembler alors, quand elle y pensait.

A genoux devant la croix d'Aristote, elle implore le Très-Haut, et cherche dans les voies de Saint Augustin la lumière qui ouvrirait ses portes intérieures. Elle devait le sortir d'elle-même, apprendre à lever le menton, apprendre à donner des ordres à d'autres qu'à des soldats, apprendre à traverser la foule sans baisser les yeux, se sentir incarnée d'une autre mission, être au-dessus d'elle-même car ce qu'elle porte sur ses épaules ne lui appartient pas, mais appartient au Peuple.


Au petit matin, la fauvette chantait à sa porte, et les moineaux se disputaient les restes d'un diner frugal. Les rayons traversaient le carreau cassé, le soleil se levait, comme il se lève sur tous les jours de ce monde. Il se levait alors qu'elle n'existait pas encore, il se levait ainsi, depuis qu'elle respire, et il se lèvera encore lorsqu'elle ne sera plus que poussière. Elle se mit alors à penser à l'Eglise de France. Pour elle, elle n'avait peur de rien, ni de personne. Parce qu'elle savait que c'était un combat juste, et honorable, pour la paix, et l'éducation des gens, pour qu'ils apprennent à regarder le ciel et leur Dieu en face, sans rougir.

Dieu.
A genoux devant la croix d'Aristote, elle implore le Très-Haut, et cherche dans les voies de Saint Augustin la lumière qui ouvrirait ses portes intérieures. Elle devait le sortir d'elle-même, apprendre à lever le menton, apprendre à donner des ordres à d'autres qu'à des soldats, apprendre à traverser la foule sans baisser les yeux, se sentir incarnée d'une autre mission, être au-dessus d'elle-même car ce qu'elle porte sur ses épaules ne lui appartient pas, mais appartient...à Dieu.

Le Très-Haut a posé en commande la gestion de ces terres. Toulouse est sous sa responsabilité, et c'est le Très-Haut qui la lui confie pour ce peu de moment.


Elle relève la tête...se laisser aller à la frayeur et au repliement sur son insignifiante personne serait un grave péché devant Lui. Elle fut choisie, elle ne devait pas décevoir. Il fallait accepter de ne pas être aimée, toujours, et accepter d'être plus impérieuse, même si elle préfère être douce, et tendre la main.

Pour ces quelques semaines encore, elle devait se redresser, et comprendre que le pouvoir qui est posé dans sa main, elle l'a fermement dans sa paume, et devait en user, pour le bien du Peuple de Toulouse ! pour faire de grandes choses, et améliorer ce qui doit l'être.
Si elle l'a toujours su, être plongée soudainement dans ce bain l'avait surprise, et elle s'était sentie vacillée, petite, si petite devant sa grande responsabilité. Mais c'est ce qu'elle avait voulu, en fondant cette liste. Et elle en était capable !

Où est ta couronne Asphodelle? Le Roy te la confie, et toi tu la laisses au Chateau Narbonnais pour rejoindre ta masure? Pour qui te prends-tu? Tu penses pouvoir être nommée au-dessus des autres, et continuer ta petite vie comme une femme du commun? Relève toi, et remet ta couronne. Comportes-toi en Comtesse, ou que les Démons des sept enfers t'attrapent et te donnent aux chiens comme un os moisi !

Tu n'es plus "Asphodelle"...tu es une charge, et une main qui agit ! Alors cesses tes atermoiements, et agis !

Elle se redresse et se rhabille de ses soies, et sortant de sa cabane, elle avise la ville qui se déroule sous son regard.
Toulouse, Castelnaudary, Foix, Castres, Albi...ces villes t'attendent.

Il fallut une inspiration, et l'air frais qui s'enroule sur ses poumons, pour la faire se tenir debout, et enfin, tourner le dos à ses "chez elle". Désormais, elle ne devait plus vivre dans ce qu'elle connaissait et qui était à elle.

Désormais, elle dormira au Chateau, se lèvera à l'aube, se couchera après le soleil. Et elle portera les couleurs du Comté avec fierté, pour eux.

Jéricho Saint Louis devait être bouchonné, ses parures devaient être multipliées par trois, ses coiffures devaient s'aggrémenter de noblesse, et le menton haut, ne plus baisser les yeux, ne plus craindre, et avancer l'oriflamme dans sa main dressé !

C'est ainsi, que son Lusitanien et elle, rejoignirent le Chateau Narbonnais, et ce levé de jour venait de voir la transformation de celle qui a grandi pieds nus sur les routes de Compostelle, a servi toute sa vie comme servante...et en définitive, ceci, ne changeait pas ce jour. La servante porte une Couronne, ce qui la rends plus encore servile qu'avant !
Ainsi qu'est l'ordre des choses...ainsi, car tu es draculéenne. Ennée.
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