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[RP]L'Hostel d'Harlegnan

Ilargia
Soulagée la blondinette. L'oncle ne semble pas outré de la question, il s'abstient de la renvoyer se mêler de ce qui la regarde, et même il répond. Et sa réponse laisse l'Aélis songeuse, à plusieurs titres. D'abord parce que malgré ses dires, le cousin semble déjà mordu de sa flamande. D'ailleurs, il ne traverserait pas tout le royaume du sud au nord sans avoir déjà une idée, ou une espérance, de la réponse qu'il trouverait là-bas. Et puis.... Et puis elle ne peut s'empêcher de penser que décidément les hommes ont la vie belle de ce côté là. Envie de voir une femme? Les voilà qui prennent la route et qui vont la rejoindre, tout simplement. Alors qu'évidemment, l'inverse soulèverait des tollés de protestations. Suffit de voir les réactions _ la sienne autant que celle des autres d'ailleurs _ face à la récente obstination maternelle à se remarier avec une raclure indigne d'elle. La môme laisse échapper un soupir qui vient faire écho à celui de son vis-à-vis et ajoute, pensive.

Je vous envie mon oncle..

Oui elle l'envie. Car au fond, qu'est-ce qui l'attend, elle? Un vague et décevant mariage d'intérêt, à supposer même que sa famille mette la main sur un noble prêt à accepter de s'unir à une bâtarde. Pour l'inclination, tu repasseras fillette... Le simple fait d'aimer celui pour lequel tu soupires suffirait à faire pousser des cris d'orfraie à tout ton entourage, alors le mariage, pas même un rêve pour toi...
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Phillau
Elle l'envie...
Mais envier quoi ? Le fait d'avoir le droit d'aimer ? Il est certes très facile de comprendre ce qui pousse une jeune fille, dont le futur est d'être donnée comme épouse à un puissant, à croire que le vrai amour est le plus fort.
Mais dans ces choix et ses conséquences, celui-ci offre peut-être bien plus de bonheur mais il cause par la même une multitude de tracas et de malheur auxquels cette enfant n'aura jamais à résister.

C'est ce que Phillau faisait en ce moment, tenter de résister aux tracas et aux lettres d'autre prétendant, qui, alors que lui n'était pas encore en Flandres, l'incitaient à les quitter et à ne plus y revenir. Ces lettres le désolaient encore plus et lui imposait d'intense réfléxion pour savoir ses actions futures.


Ce que j'envie en vous, c'est cette insouciance de votre jeunesse... Dans ces réfléxions et ces choix, j'ai parfois l'allure d'un homme à qui rien ne donne plus envie de vivre.

Se voir éconduit le laisserait pour mort, surement, mais se savoir séducteur le rendrait Homme, au grand sens du terme. Et c'est pour ce pari que Phillau se sentait prêt à traverser la France au mépris de quelconques manants franc-comtois.
Ilargia
La blondinette fronça légèrement le sourcil. Fichtre! Désabusé, le tonton !

Oh mon oncle, vous parlez comme un vieillard! Que diable, vous n'êtes point si âgé ! Et puis vous ne pouvez pas vous présenter devant la dame de vos pensées dans cet état, avec la mine de quelqu'un qui n'attend rien. Attendez au contraire, et montrez-vous sûr de vous!

"Comme l'a fait mon beau-père" songea-t-elle brusquement. Ecouter aux portes et faire cancaner les servantes restaient ses sources d'information favorites lorsqu'elle passait à Lesparre, et faire raconter à Margaux dans les moindres détails ce qu'elle savait des entrevues de sa duchesse de mère avec son godelureau de second époux avait été d'une facilité déconcertante. On pouvait reprocher beaucoup de choses au feu butor, mais avoir réussi à ranimer quelques mois la matriarche de Vergy-Harlegnan confinait tout de même à l'exploit. Exploit dont il avait peu profité d'ailleurs mais là n'était pas la question.

Secouant ses boucles, la môme se détourna de ces pensées furtives et en revint à son cousin-oncle et à ses projets galants en le questionnant avec malice.


Dites-moi mon oncle, qu'avez-vous prévu d'offrir comme présent à cette dame pour lui faire votre cour?
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Tithieu
[Même lieu, quelques temps plus tard]

    Paris, Citée des Rois.


Dans les rues pavées de la capitale de France, une voiture allait bon train, escortée de 4 cavaliers respectablement armés et habillés de cottes de mailles surmontées de tabards de bonne facture.
2 devant, 2 derrière. Et aux armes de Couesmes, s'il-vous-plait. Tout comme le coche. L'ensemble, équipage intrépide, bringuebalait dans les rues de la ville, manquant à de nombreuses reprises de renverser échoppes et piétiner marchands clandestins, trop pauvres ou avares pour s'acquitter de l'impôt, trop incultes pour savoir le danger que comportait pareille manière de se dédire de ses obligations et de se soustraire à la Prévôté du Guet.
Pour épargner quelques Sous, nombre d'entre eux manquaient chaque jour de passer sous les roues d'un noble véhicule, ou sous les sabots de leurs destriers d'escorte. Et que dire alors de la perte des marchandises ?

La scène put d'ailleurs paraitre aberrante et attirer l'attention des badauds, comme elle le fit ailleurs, si elle n'était pas un acte quotidien de la grande pièce qui se jouait en Paris, au jour le jour.
A force d'habitude, presque de coutume, plus personne ne prêtait attention aux équipages de Nobles gens qui, sans vergogne ni attention, piétinaient sur leur passage le fruit d'un labeur misérable.
Personne pour se retourner sur le passage de cette voiture, pareille à toutes les autres, escortée de Provinciaux dont la paie et l'existence -martiale mais sûre et confortable- étaient l'objet, chez les petites gens et les hommes en âge d'épée tenir, de toutes les jalousies.
Personne, pas même les gardes de la citée, affiliés directement à l'un des Grands Offices auxquels Sa Majesté prêtait le plus d'importance.
Personne, sauf peut-être ces quelques vendeurs à la sauvette, qui ne devaient leur survie qu'à une agilité miraculeuse.
Un bond en arrière, un juron ou un geste éloquent de la main, puis une génuflexion pour ramifier ce qui peut l'être, embarquer le tout et détaler au plus vite. Toujours de la même manière, pour la même cause, contre les mêmes poursuivants.

Finalement, même à Paris, les jours se suivaient et se ressemblaient. La routine, les rituels propres à toutes les castes et corps de métier.
Paris, ville de province ?

Ce n'était guère le soucis du Balafré.
Lui qui n'était point friand de l'ambiance nuancée-métissée de la capitale, ni des paradoxes que l'on y trouvait à chaque rue, ne s'inquiétait guère du quotidien de ses gens.
Il avait noté, toutefois, à l'occasion de l'un de ses passages obligés en Paris, combien les carrosses aux armoiries des plus grandes Mesnies de France étaient, de tous les moyens de se mouvoir en Paris, celui qui était le plus discret.
Non pas que ces calèches soient passées inaperçues, non. Le brouhaha, les heurts et les émeutes qu'elles entrainaient dans leur sillage ne le permettaient pas.
Mais à force de routine, ce vas-et-vient bourgeois, ce relai de noblesses emmitouflées dans de lourds édredons et protégés du dehors par quelque tenture tirée, cet étalage de puissance et de richesse, finit par se fondre dans le décors. Les équipages traversant la ville à bride abattue, sans raison donner, les cavaliers intrépides qui se donnaient -ivres de jeu ou de haine- la chasse dans les ruelles, c'était Paris !
Et la Prévôté était la dernière à s'en inquiéter.

C'est pour la cause que le Penthièvre, resté en Anjou pour mener ses troupes et rallier la bannière de oncle de Duc chiffré, avait choisi pour le transport d'offrements aussi précieux qu'onéreux d'envoyer son unique carrosse, légèrement escorté.
Ainsi il s'était assuré de la sécurité du coffret qu'il tenait à faire livrer, trimbalé sur les banquettes capitonnées de velours de la voiture par son bailli, le vénitien Alvise Zorzi.
S'il n'avait pas usé de la ruse, il aurait dû accompagner de lui-même ce trésor, duquel ses propres gens d'armes étaient défendus de s'approcher, confié aux bons et loyaux soins du bailli de la Vicomté de Brissac.

Dans ces conditions, point n'était besoin de sa présence, ni d'armée pour escorte. Du dehors, l'on croirait au cheminement d'une personnalité quelconque venue de la Province. Et on laisserait passer. Brigands, soldats. On laisserait passer.

Le présent, commandé puis livré par Tithieu à l'endroit du "Cerf" et de sa neuve épouse, était donc parvenu à bon port, et sans dommages. La ruse du Balafré avait porté ses fruits, Domaine Royal et ville de Paris avaient été traversés dans l'incognito le plus absolu. Equipage perdu dans la ruée des courtisans qui allaient et venaient de la capitale, du Louvres et de Vincennes. Equipage recelant en son sein trésor de valeur 10 fois supérieure à celle de la vie de la plupart d'entre eux, de ces petits Seigneurs d'alentours qui se pressaient aux portes du Louvres, ou sur le parvis de Notre-Dame lorsqu'il fut l'heure de célébrer l'anniversaire du Sacre. Equipage secret mais point mystérieux, de banal anonymat qui avait été un renfort heureux.

Le cortège -4 cavaliers, 1 carrosse- s'immobilisa devant l'Hostel d'Harlegnan, Rue Saint-Honoré .
Les cavaliers de queue mirent pied à terre, les premiers, selon l'habitude prise au cours de ce voyage qui avait fort éprouvé les nerfs des hommes du Balafré, vainement et sottement la plupart du temps.
Ils lièrent leurs hongres à la voiture, sans tarder, avant de signaler au bailli vénitien que tout allait pour le mieux, d'une tape sur le bois fin de l'habitacle.

Dispositif bien rôdé. Et ici il faisait jour. Pas de "qui-vive" lancé au tout hasard, avec pour seule réponse le hululement d'une chouette ou, pire, le silence de l'obscurité campagnarde.
Ici, quelques badauds erraient, ivrognes ou banquiers, valets ou soldats. Ici, on voyait venir de loin. Et d'ailleurs, tout serait bientôt terminé.
Flanqué de 2 soldats -les 2 autres demeurant en selle-, le bailli du Vicomtal balafré avança devers le portail de l'Hostel du Flamand, sur lequel il avait reconnu les armes des Harlegnan. On les lui avait décrites, puis montrées en dessin sur un registre héraldique.
Histoire de ne pas remettre les riches offrements de noce à un destinataire béni par le bonne fortune du hasard.

Les hommes armés poussèrent les grilles de cet imposant portail, à peine intéressés par l'architecture du lieu, pourtant généreusement fenestré.
La bâtisse était d'allure banale, et se fondait fort bien dans le paysage de tous ces Hostels de famille que les courtisans de Paris élisaient "lieu de villégiature".
Mais les vitraux gigantesques, et fort nombreux, ne laissaient nulle place à l'équivoque : pour s'acheter à prix si cher -car le vitrail, c'est coûteux- le luxe de la lumière, le maître des lieux devait avoir fortune. Grosse fortune. Seigneur féodal ou courtisan créancier, Alvise Zorzi, en bailli scrupuleux, n'en savait que trop peu. Mais l'ostensible de la richesse du bonhomme ne pouvait que le séduire, et lui prêter à sourire.
Son mestre déployait considérables efforts pour que parvienne au Vicomte qui résidait séant le présent qui devait le féliciter de ses noces, et au jugé des apparences de ce bel Hostel, leur amitié n'avait rien de surprenante ni de fortuite.


Hola, de la mesnie ! Présent pour le Vicomte de Poperinge et maistre de séant !

La voix mal assurée, dont le timbre vibrant était teinté d'un accent aux senteurs méridionales, le bailli délégué-émissaire par le Balafré s'adressait à l'inconnu, à l'invisible.
Il se tenait au milieu de la cour, chargé de ce fameux coffret ouvragé de raffinements et de dorures. Il était là, paré de riches habits -apanage de sa charge mais également de ceux de sa race-, et encadré par deux colosses dont il avait interrompu l'élan, lorsque ceux-ci avaient jugé bon de s'adresser directement à une lavandière du cru.
Et s'il les arrêta, ce ne fut que pour mieux parler en direction de la porte de l'Hostel, ouverte -il ne savait pourquoi- à tous les vents.
Peu de chances qu'une réponse ne vienne de l'intérieur, mais sa tentative -si elle était entendue- ferait meilleur effet que celle d'un soldat, dont le franc langage et les simples moeurs à l'égard des dames du lieu risquaient fort de mal les engager.
Louishubert
    Paris, la moins-belle-que-Bruges.


Certes, la cité d'Eudes, résidence du Roy de France, avait un charme particulier, nul ne pouvait le nier. Même que, on aurait pu la mettre dans le lot des villes prestigieuses et grandioses, telles Londres ou Aix-la-Chapelle. Or, un tel statut résultait uniquement en une royale couronne posée sur un royal front en un royal palais: le Louvre. Mais si il appréciait dans son jeune temps ses passages en la Capitale, ceux-ci le démangeait de plus en plus à force que l'âge s'efforçait de lui courber l'échine tel qu'avant longtemps il en trouverait plus un fardeau qu'un plaisir. Ce n'était pas tant la ville qui le dérangeait, mais la distance le séparant de Bruges. La venise du Nord, dans sa somptuosité, savait calmer son coeur et ses angoisses. Les Flandres - cette terre bénie d'Aristote et de Sainte-Illinda - étaient telles qu'on ne pouvait la quitter bien longtemps sans en souffrir moralement. Même que, les vrais fils et filles de Sainte-Illinda s'efforçaient d'y revenir fréquemment, au risque de voir leur santé physique et mentale se détériorer gravement. Certaines langues sales diront que c'est lié à un alcoolisme aigu présent chez tout Flamand et que seul la bière flamande peut assouvir... et il n'aurait pas tord, mais loin s'en faut, il est évident que le houblon n'était pas la seule raison d'être des Flandres et son prestige, sa grandeur et son influence faisaient d'elle un élément important qui empêchait le Royaume de sombrer dans le chaos.

Cher lecteur, j'espère que vous excuserez la petite parenthèse sur la grandiosité (sic) de Bruges. Il arrive parfois que l'écrivain se laisse aller dans une envolée lyrique forte pénible à lire, mais ô combien amusante à écrire.

Bref.

C'est pourquoi l'hostel d'Harlegnan rue St-Honoré était peu utilisé ces temps-ci. Son cousin et sa nièce y avait résidé il y a peu et la résidence paraissait moins abandonnée qu'avant. Abandonnée n'étant pas le mot juste, disons plutôt "moins inhabitée", car la villa était bien entretenue, mais aucun éclat de vie. Alors le Cerf, de passage pour règler des tracasseries administratives, s'était félicité de venir ici peu après son cousin. La froideur des lieux qui l'accueillait habituellement avait laissé place à une douce ambiance bien familiale, ce qui n'était pas pour lui déplaire.

Assis à la tablée, savoureux mets flamands préparés par ses gens devant lui, il entamait tranquillement son repas, perdu dans ses pensées. Sa bonne, cette plantureuse blonde à la lourde poitrine et au cul bien rond, lui versait une nouvelle rasade de vin tout en tentant de coller ses attributs au corps du Cerf, sans résultat. Elle rageait intérieurement, elle qui avant son mariage n'avait besoin que de le regarder coquettement pour se retrouver avec une main vicomtale sur le pubis et l'autre sur le galbe du sein, aujourd'hui elle ne réussissait même pas à l'allumer. Certes, elle avait son amant, le jeune Godric, garçon d'ecuyer au service de l'hostel. Alors que le Vicomte était en ses terres et l'hostel inoccupé, on aurait pu facilement les surprendre dans l'acte, quelque part dans les quartiers des gens de la maison. De délicieux moments, mais elle s'étonnait parfois à attendre impatiemment le retour de son Seigneur, afin de profiter du lit du maître et de cette manière bien particulière dont le Cerf s'occupait d'elle. Juste à y repenser, elle en rougissait... et tentait en vain de reséduire son Seigneur.
Totalement indifférent, le Cerf.

Ce n'était pas pour rien qu'il ignorait ce genre de comportement des dames qu'il aurait habituellement amené bien plus que rapidement dans ses draps: il était marié, et il aimait sa femme. L'âge lui apportait tranquillement une sorte de sagesse. Bon, ok, le mot est un peu poussé. Disons simplement une sorte de maturité. Alors, quand une bonne lui collait le buste au corps, il continuait vaguement ses occupations sans même s'en soucier.


Hola, de la mesnie ! Présent pour le Vicomte de Poperinge et maistre de séant !

Triste, mais les paroles ne se rendirent au Cerf, dont la tablée était bien éloignée de la porte. Hors, un page passant non loin entendit vaguement quelqu'un appeler quelqu'un de la maisonnée. Il sortit sur le porche et vit l'interlocuteur entouré de deux hommes armés.

Le Vicomte est à table, qui dois-je faire annoncer?
Tithieu
    Hostel d'Harlegnan, rue Saint-Honoré.


Il fait froid, à cette époque de l'année. Partout ailleurs, oui, mais en Paris particulièrement. Du moins c'est le ressenti du Vénitien, qui -bien qu'habitué au climat très tempéré de sa Venise natale- a su s'acclimater aux caprices de la météo des terres Franques. L'Anjou n'était certes pas encore la Bretagne, et on s'y caillait bien moins que du côté de la Manche. Mais du moins, il n'était pas rare que les Angevins -et le transfuge Italien- aient pour seul horizon la noirceur des nuages orageux qui aimaient à arroser l'Anjou et ses vignes de leur pluie oblique. Et bien heureusement, hormis ces cycliques épisodes de gros temps, la terre d'asile et d'élection du bailli de Tithieu bénéficiait d'une météo relativement clémente.
Ce n'était pas le cas de la capitale de France. En tous les cas, à chaque fois que le Balafré avait eu à la visiter, le temps était maussade, l'environnement gris. Tout en nuance, car les éléments ne se déchainaient point pour autant.
Tout était simplement morne, terne, glacial. Tout à l'image de cette capitale et de ceux qui y siégeaient, de la Diplomatie des grands. Tout en demi-mesure, morne plaine dépourvue d'éclats et de panache.
Paris... Après-tout, qui devait s'en étonner encore ? C'est ici qu'avait élu domicile la lignée du Normand, accoutumée en tant que race à cette grisaille oppressante. Plus encore que le reflet de la manière d'exercer le pouvoir Royal qu'affectaient certains, la ville était peut-être tout simplement le reflet de ce pouvoir vieillissant, et de celui qui le détenait d'essence Divine.

Quoi qu'il en soit, le Vénitien, tout comme son maître, n'aimait pas Paris. Et le déplaisir qu'il avait à demeurer en cette ville allait croissant, à mesure que quelques bourrasques de vent balayaient la cour, que les bruits alentours se faisaient plus lointains, dans leurs oreilles qui commençaient à être rougies par le froid et dans leurs esprits enlisés de fatigue.
Alvise serra tout contre lui le précieux coffret confié par Tithieu, et d'une main qu'il libéra un instant il ajusta frileusement sa toge et sa cape.
Roulement d'épaules. Il tend à présenter le coffret du mieux qu'il le peut, et à trouver une chambre d'auberge au plus vite.


"Le Vicomte est à table, qui dois-je faire annoncer?"


Enfin ! Ils ont tardé. Du moins, les quelques instants de silence et de flottement qui ont succédé à son appel parurent au bailli longs comme des heures.

Alvise Zorzi, bailli de la Mesnie de Couesmes, au service de Monseigneur le Balafré. Fais-vite maraud, c'est là lourd et précieux fardeau que je transporte.


Un léger accent, qu'il se plait à entretenir. Le timbre de sa voix est teinté de son empressement, tant et si bien que l'autre opine du chef et, du perron, l'invite à le rejoindre avant même de l'avoir fait annoncer.
Si le coffret détenait ce que pressentait le valet, le Cerf ne pourrait qu'accueillir son porteur avec joie, et le décharger sans vergogne de son fardeau. Et ce, peu importe le commanditaire.

Alvise passa le porche de l'Hostel, flanqué des deux hommes d'armes que Tithieu avait délégués à son escorte. Il y faisait bien meilleur qu'au dehors, au moins à l'abri du tout-vent.
Il n'eut pas long à patienter. Le valet revint au bout de quelques instants, affectant le faciès neutre des serviteurs de si prestigieuse mesnie. Il les mena jusqu'en la grande salle, où le Vicomte était à son souper, aux petits soins des gens de son service.
Le bailli Vénitien, qui n'avait plus vu l'Italie depuis belle lurette, se présenta élégamment, se fendant d'une simple buste-révérence, son encombrement l'empêchant de mieux faire.


Salut et prospérité, à vous et vos gens, Vicom.

Etrange l'accentuation soudaine de cet accent aussi illustre qu'enfouis au plus profond de sa mémoire, tant et si bien qu'il n'en restait que lambeaux et vestiges qui ne réapparaissaient que lors des colères lyriques du jeune bourgeois. L'utilisation de la particule "Vicom", propre aux dialectes d'Oc et des pays du Sud, donnait sans doute l'illusion.

Je suis l'envoyé de vostre homologue Angevin, mon maistre.
Il m'a chargé de vous remettre ceci, et de tenir parole donnée par luy il y a de cela quelques mois.


Non sans un soulagement qui se traduit par une grimace fort peu courtoise traversant son jeune visage mât, Zorzi déposa sur un coin libre de la table, à même la nappe, le coffret vernis.
Sans trop se soucier des regards qui s'étaient rivés vers lui et ses deux compagnons, de toute la mesnie qui s'entassait à la porte de la salle, il sortit d'une poche de son gilet un pli encore parfaitement lisse.
Il opta pour la plus grande neutralité, face aux réactions muettes mais interloquées de quelques-uns. Mieux lui valait être prudent diplomate.
Il remit le pli au Flamand. Pas de scel, juste une griffe.


Citation:

Vicomte,

Des mois déjà que vous m'avez convié à vos épousailles, aujourd'hui révolues et -je l'espère- consommées. Je vous avais alors juré de vous faire remettre le plus somptueux des cadeaux de noces de tous ceux qu'ont pu vous offrir vos convives.
Comme le luxe et la grandeur ne tolèrent guère que l'on fasse preuve de précipitation et de trop de hâte, voici mon présent, avec un peu de retard.
L'aubaine fut qu'un maître monnayeur en exil d'Aragon et en route vers Paris face halte en ma forteresse. L'or provient du sac des villes du Maine, j'ose espérer que son tintement n'en sera que plus doux à vostre coeur de Magistrat Royal.
Pour la qualité de l'ouvrage, je vous laisse l'apprécier.

A bientôt, mon ami, et que vostre couche soit féconde pour vostre lignée.

La Balafre


Sans mot dire, l'émissaire du Penthièvre décadenassa le coffret, et en souleva le couvercle.
Il découvrit alors aux yeux de LouisHubert et de l'assemblée qui s'était pressée de rejoindre la salle à manger, quelques dizaines, voire centaines, de pièces d'un vieil or, réveillé dans son éclat par la refonte et par une nouvelle frappe. Le coffret était petit, il y en avait jusqu'à ras de bord.


On dit que c'est privilège de Roy de frapper monnaie pour marquer sa Souveraineté sur ses terres et étendre son aura. J'imagine que mon maistre a voulu là vous rendre un original hommage, à sa manière...

Et le Vénitien de se permettre un rapide coup d'oeil vers le coffret ouvert et ainsi dévoilé. Envieux.



[Tithieu n'est pas physiquement à Paris. Les actions décrites et les interventions sont celles d'un pnj, du bailli de Tithieu, incarné par moi en l'absence du joueur du personnage d'Alvise Zorzi.]
Rosa
[Arrivée à L'Hostel]

Le bruit du carrosse aux armes des Vicomtés familiales résonnait à travers les rues de Paris.

Aaaah, Paris, La Blonde des Flandres y avait à l'occasion mis les pieds, que ce soit pour faire acte d'allégeance à son Roy, saluer la dépouille mortelle de la Reyne, c'était toujours en de grandes circonstances et le temps se prêtait peu alors aux visites.

Cette fois-ci les choses étaient bien différentes. La jeune épousée allait découvrir la propriété de son mari, escortée par son fidèle garde, Athus, qui veillait à sa sécurité. Rosa avait profité de son voyage, détendue, à présent qu'elle n'était plus tenue à rester dans le Comté à tout prix, cette escapade tombait à pic, elle avait besoin de se détendre et se réjouissait, oh combien de visiter toutes les boutiques de toilettes de la ville. Sa dame d'atours, sa chère Merenwen, lui était indispensable. Elle seule parvenait à s'y retrouver dans toutes ses robes, fanfreluches, dentelles et armoires gigantesques qui servaient à contenir tout cela. Heureusement ils possédaient à eux deux suffisamment de demeures pour pouvoir y mettre autant de tissus... De plus Merenwen avait le chic pour trouver la toilette qui convenait à son humeur, en plus d'être une amie c'était une femme précieuse.

Une charrette suivait, plus lentement, remplie de fûts de bière... blonde bien sûr. Il ne s'agissait tout de même pas de se trouver mal, si loin de ses terres et de son houblon favori. Sans nul doute qu'en la Capitale du Royaume, on trouvait quelque bon breuvage. Mais en bonne flamande pure souche, Rosa d'Harlegnan doutait que l'on pût survivre un long moment sans boire de ce précieux nectar. L'on chuchotait par ailleurs qu'il faisait des bulles carrées....

Arrivés en la rue Saint-Honoré, le cocher cria:


On est arrivés, M'dame!

Rosa brûlait de curiosité et admira les grandes grilles de fer forgé s'ouvrir pour laisser entrer son équipage. Par Aristote, quelle demeure somptueuse, loin du pied à terre qu'elle s'imaginait. De grands escaliers devant l'entrée...Des valets accourant à sa rencontre, s'empressant de placer un escabeau et d'ouvrir la portière.
Le coeur battant, Rosa descendit, ne cessant de regarder tout autour d'elle, on la conduisit rapidement dans l'entrée, alors qu'on lui demandait:


Avez-vous fait bon voyage, Maîtresse? N'avez-vous point eu souci avec les brigands?

Oui... Non.... Rosa répondit d'un air absent, encore environnée par l'enchantement qui se dégageait de cette demeure. Contrairement à son habitude, elle ne salua même pas de la tête Athus, pour lui signifier que tout irait bien à présent, qu'il pouvait aller se reposer. Mais il savait ce qu'il avait à faire...

A ce tableau magnifique... ne manquait qu'une seule personne... Par Sainte-Illinda, qu'il lui tardait de le revoir, de poser ses lèvres sur les siennes, de sentir l'étreinte de son bras autour de sa taille...Son coeur battait à présent la chamade... Le voir... le revoir enfin...

_________________
Louishubert
[Avant l'arrivée de la belle Rosa, même quelques jours avant]

On lui annonça la venue du Bailli de son ami le Balafré. Certes surpris, le sourcil fronçant et l'air perplexe, il fit un bref signe de la main droite invitant ses gens à faire rentrer l'homme en question. De l'autre main, il buvaiit tranquillement sa coupe de bon vin Bourguignon - un arrivage particulier - tout en patientant l'arrivée de ce visiteur. Assis au bout de la table, il avait vue directe sur l'entré. Passant celle-ci, encadré de deux hommes d'armes et un coffre dans les bras. Autre froncement de sourcil, faire rentrer des hommes en arme chez lui, il semblerait que le Vicomte ait quelques sermons à faire à son Bailli...

Salut et prospérité, à vous et vos gens, Vicom.

Il coupa court aux salutations d'usage faisant encore un faible signe de la main pour signifier son intention. Au moins, se dit-il, il comprenait les comportements de la noblesse et il embraya sur le sujet de sa venue. Parole donnée? C'est que le Balafré lui avait promis de venir à ses noces... Mais parait-il qu'on ne fait cette cérémonie qu'une fois... Ou peut-être était-ce de lui offrir le plus majestueux des cadeaux de noce? Oui c'était donc cela. Le Bailli se pencha et tendit le bras du bord de la table pour lui remettre le pli. Autre signe de main silencieux et un homme de sa mesnie attrapa le pli et lui remit.

Sourire agard, au moins il s'était muni d'une bonne excuse pour le temps. L'idée ne manquait assurément pas d'imagination. Alors que le bailli ouvrit le coffre, le Cerf se redressa soudainement plus intéressé par le présent entretient qu'avant. On avança le coffre devant lui et il prit une pièce entre son majeur et son pouce droit pour en inspecter l'oeuvre.

Du joli.

Une tête de Cerf couronnée d'une croix de Sainte-Illinda, c'est qu'il savait le prendre par les sentiments le bougre. Et même racheter son absence.
Ouvrant finalement la bouche pour la première fois, il regarda le bailli.


Joli. Très joli.

Il se tourna aussitôt vers quelques gens de sa maison.

Parchemin, plume et encre je vous prie.

L'attirail lui fut amené. Sortant un fin poignard de sa ceinture, il tailla la pointe de la plume pendant qu'on chauffait légèrement l'encre pour faciliter l'écriture.

Citation:
Brissac,

Présent de bel apanage, somptueux même. Et les remerciements en prime. Douter que j'eusse consomméle fruit de mes noces est mal me connaître, et j'espère plutôt que tu eusses toi-même la possibilité d'utiliser ce dont mâles sont dôtés. Saches tout de fois que tu n'es pas pour autant excusé de ne point passer voir ton vieillissant ami du Nord. Tu sais combien quitter les Flandres me sont pénibles, j'attends toujours que tu viennes brûler ton foie à coup de vraie bière. Les gens du Sud ont-ils les sens assez aiguisé pour le Tarot? J'ose l'espérer.

Le Cerf.


Il tendit le pli au Bailli qui comprit qu'il servait aujourd'hui de messager. Aussitôt, il leur donna congé. L'entretien était terminé.
Rosa
Quittant la fraîcheur des vergers tournaisiens pour un court séjour à la Capitale, Rosa tenait à visiter un peu la ville, commander des robes et voir son époux, tant pris par ses fonctions avant que sa taille ne s'épaississe trop, rendant les déplacements malaisés. Alors qu'elle faisait déballer les malles dans sa suite, elle songea à ce bonheur encore tout neuf qui l'habitait. Bientôt cet hostel regorgerait de cris, tranchant étrangement avec le calme qui y régnait en permanence malgré les allées et venues des serviteurs.

Elle songea qu'il lui faudrait également prendre nourrice, par Sainte Illinda, un enfançon changeait la vie de ceux qui l'entouraient. Mais l'heure n'était point aux soucis. Elle se prépara pour sortir et fit appeler Athus afin qu'il l'accompagnât durant sa sortie. Une dame de sa qualité se devait d'être escortée, c'était plus prudent. Elle avait pris Bertine également afin de l'accompagner. La jeune fille était à présent presque une femme et ses rudes manières de paysannes bien affinées à son contact. Elle était presque prête, peut être même pourrait elle faire une dame de compagnie.


Bertiiiine, nous partons, prends ma bourse nous allons faire pas mal d'emplettes et profites-en nous ne venons point souvent en de tels lieux, ce sera l'occasion d'apprendre encore ma fille!
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--Bertine
La jeune fille mit sa coiffe, prit son panier ainsi que la bourse de sa maîtresse. Ses yeux brillaient d'impatience, elle n'était venue qu'une fois à Paris jusqu'à présent et toutes ces maisons ouvragées, la faisaient rêver ainsi que le contenu des étals, si diversifié. Non point qu'il ne s'y trouvât de belles choses en Flandres... mais c'était différent. Tout pour elle était spectacle, une fête des sens. Son enthousiasme faisait plaisir à voir.

J'arrive Maîtresse, me voilà, nous sommes fin prêtes, je crois.

Un sourire complice se dessina sur les lèvres de Rosa, répondant à son enthousiasme juvénile.

Rosa
Une voiture s'approchait de l'Hôtel d'Harlegnan, une femme à l'intérieur. Une fois celui-ci arrêté le rideau bougea légèrement, puis plus durant quelques instants, on sentait une hésitation avant que la porte s'entrouvrit. la Veuve du Cerf sortit du carrosse, toute en retenue. L'émotion l'étreignait. Voici l'endroit où feu son époux avait passé tant de temps à travailler, à user ses yeux sur tous ces actes judiciaires. Il fut Chancelier de France et passait bien plus de temps ici qu'avec son épouse.

Elle visita chaque pièce, s'imprégna d'un de ses pourpoints posé sur une chaise, comme si son propriétaire allait venir la remettre d'un moment à l'autre.
Après avoir soupiré encore et encore et usé toutes ses émotions en nostalgie, elle s'occupa des affaires courantes, régla des litiges entre valets, étudia les comptes avant de prendre un bon bain qui la détendit au mieux qu'elle le put.

Il avait tant compté pour elle. La page avait été difficile à tourner. La Blonde des Flandres ignorait encore quel serait son avenir affectif. Ce qui comptait par dessus tout c'est que son fils fût élevé comme son père aurait voulu.

Après une bonne nuit de sommeil, elle se réveilla plus gaie, aujourd'hui serait la partie agréable: visiter les ateliers de couture forts réputés à Paris. Tous étaient sur le pied de guerre: lorsqu'elle allait acheter, un véritable tourbillon de tissus virevoltaient dans ses malles à une vitesse incroyable.

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