Felina
La réponse ne se fait pas attendre, et la curieuse a soudain le sentiment davoir peut être été un peu loin à la réaction de Sophie qui soudain lui apparaît mélancolique. Mais on ne la refera plus notre ex mercenaire, ses trop grandes oreilles ayant toujours eu cette propension maladive à traîner un peu trop. Mais le silence évocateur de la brune lui fait réaliser quil est grand temps de changer de sujet de conversation et den revenir à la raison de sa visite, qui si elle a pris lapparence dune discussion de salon mondain entre deux amies nen reste pas moins purement commerciale au départ.
Elle est venue monnayer un service et maintenant arrive lheure de faire des affaires. La Rastignac na jamais été particulièrement douée à cet exercice, étant nettement plus rompue à la corruption de fonctionnaires de type mâle à grands renforts dillades enjôleuses et de roulement de hanche indécents. Elle ne comptait plus le nombre de relaxe, vice de procédure et autres arrangements obtenus par ce seul moyen et depuis quelle avait lâge douvrir les cuisses, elle avait toujours su le faire à bon escient, sans aucun complexe.
Mais là, face à une femme, et de noble condition, le jeu était tout autre. La gentillesse de Sophie la, même si jamais elle ne se lavouera, ébranlée, et lespace dun instant elle hésite à vouloir en profiter. Pourtant, elle ne peut se payer le luxe dêtre généreuse, ses maigres richesses et ses poches percées ne lui permettant guère. Alors, elle opte pour la pitié, et commence un long monologue dans lequel la sauvageonne expose quelle est sans le sou, quelle ne parvient quavec difficulté à nourrir son fils (bien largument des enfants pour faire flancher les dames, imparable !), et que si elle ne parvient pas à se faire pardonner lerreur de parcours qui les ont ainsi éloignés de lOcéan, jamais Karyl ne sen remettra. Toute à ses simagrées, théatrale, la Rastignac na même pas réalisé que tout cela est inutile et que dès le départ son hôte du jour était toute disposée à ne lui faire payer que le prix du fer nécessaire à louvrage. Totalement convaincue davoir fait une excellente négociation, et presque fière davoir ainsi su rouler dans la farine la si gentille Sophie, notre Rastignac se fend même dun geste généreux en rajoutant quelques pièces pour lapprenti. Pour un peu elle se persuaderait quelle a enfin acheté sa place au Paradis, si tant est quelle croit en son existence.
Scellant la négociation dun serrement de main, la gauche bien évidemment, il eut été de très mauvais ton dachever cette fructueuse séance dun coup de griffes malheureux, Félina se lève alors en souriant, étrangement aimable.
Mdame De LEscarboucle, oserai je encore abuser de vot'gentillesse en d'mandant à vot'palefrenier de m'ner mes bêtes Aux Quatre Vents lorsquil aura achevé son uvre.
Et pourquoi pas les étriller, les choyer tant quil y est ? Hum non
nabusons pas plus, à force ça finira par se voir.
En tout cas jvous remercie beaucoup d'vot' diligence.
Et oui, aussi étonnant que cela puisse paraître, cest quelle savait (à peu près) bien parler la vagabonde lorsquil sagissait daffaires de sous.
J'vous souhaite une belle fin de journée et jsuis persuadée qu'nous nous reverrons bien souvent lors d'mon séjour dans votre patelin.
Elle ne croyait alors pas si bien dire et qu'au fil de leurs rencontres un profond respect naîtrait chez elle pour cette femme d'une simplicité et d'une générosité déconcertante, même pour la Rastignac.
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Repose en paix Rastignac ...
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Ljd Falco a écrit : "Jouons. Peu importe la victoire, pourvu que le spectacle soit beau."