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[RP] " Poupée doppée , t'es ma beauté "*

Anaon
" Si l’Anaon est là, Paix à son âme " 
      - Issu du folklore breton -


    La cicatrice fascine autant qu’elle répugne, elle attire l‘attention, la mépris ou la pitié. Les premiers regards, on ne les oublie pas, puis on apprend à ne plus s’offusquer de rien. Parfois, elle se remémore le premier jour où elle a du affronter le miroir. Cette sensation de voir une autre, de ne plus être une femme. Profanée. Encore que le sourire de l’ange n’est pas la blessure la plus infâme qu’elle porte au corps. En réponse à l’index aventureux nul frisson, mais une crispation, légère. L’Anaon le laisse frôler le remord gravé dans sa chair, sans vraiment broncher.

    Si la main sur son visage n’a pas réussit à la faire frémir, le souffle chaud qui vient lui titiller l’oreille y parvient fort bien. Et c’est toute l’échine qui vibre. L’ouïe se fait des plus attentives, mais l’odorat n’est pas en reste. Les heures passées parmi les plantes lui ont exacerbé ce sens et maintenant elle hume la saveur du Von Frayner comme on savourerait la fragrance d’une fleur sauvage.

    D’un coup de langue elle vient finir ce qu’elle a commencé, faisant disparaitre la moindre poussière âcre qui lui couvrait les lèvres. Le discours qui s’épanche dans son oreille n’est pas des plus rassurants, mais au final c’était chose prévisible. Croyait t’elle qu’elle allait passé joyeusement la fin de la nuit au milieu des fioles?

    Judas s’éloigne alors, la sommant de le suivre… et vite. Anaon et sa très fidèle latence! Quand la machinerie de la survie est en marche, la mercenaire a des reflexes aiguisés, mais en dehors de ces circonstances, il lui faut toujours ses quelques secondes de réflexion. Dans son corps s’anime soudain une monté d’adrénaline. Comme un coup de sang. Une course contre le temps. En échos à sa phrase, la balafrée baisse les yeux vers ses mains qu’elle a encore sous contrôle. Plus que ses doigts, c’est son palais qui la picote. Ce n’est pas maintenant qu’elle va remettre en question la parole du Von Frayner.

    Sans plus attendre, l’Anaon emboite le pas de Judas, passe les tentures puis referme la porte une fois qu’ils l’eurent franchit. Etrangement, elle ne regarde plus le couloir de la même manière, comme s’il était devenu la route de tous les dangers. Un véritable chemin de jeu. Elle s’empresse de suivre les foulées rapides de Judas avant que celles-ci ne deviennent course. Courir? L’Anaon est robuste et elle ne souffre que très rarement des affres de l’alcool, mais courir après les lampées qu’elle a but, tout de même! Et pourtant elle ne se fait pas prier. Car elle le ressent alors, ce frisson à l’âme, comme si son cerveau lui-même frémissait sous l’assaut de la substance qui l’attaque. Sensation rarissime qui ne la prend qu’une fois l’absinthe Reyne de ses gestes. Là, il ne lui aura fallut que quelques soupirs pour la ressentir. Surprenant. Inquiétant. Excitant.

    Les pavés du corridor défilent sous ses enjambées nerveuses et elle ne lâche pas d’un centimètre Judas qui laisse derrière lui le doux froissement de sa cape.

    Elle a l’impression d’être une enfant. Une enfant qui joue à un jeu de grand.

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Images originales: Victoria Francès, Concept Art Diablo III ----[Clik]
Judas.
« Si vous entendez une âme prononcer les mots suivants : Sed libera nos a malo ! , répondez lui Amen, cette âme sera libérée. »
Croyances païennes

La drogue fait son nid, au creux des têtes; au sein des corps. La cape est semée en route, Judas court comme si sa vie en dépendait. Les parois de pierre donnent l'écho de leur passage, furtif et désordonné. Honni soit le premier homme qui se dresserait sur leur route! Il serait télescopé, réduit en hachi-menu, envoyé en l'air... Tantôt la senestre du gaucher vient trouver celle qui le suit, tantôt son rire chaud et cassé vient heurter la froideur marmoréenne de l'Anaon. Il l'entraine, puisqu'elle le suit, comme un guide fou dans les dédales d'un labyrinthe qu'il connait bien. Alternance des rythmes et des humeurs, les élans se complètent ou se freinent jusqu'aux premiers alignements de torches éclairant leur progression.

Etourdi par son absorption, Judas se rattrape à quelques meubles pour mieux se reprendre , souffle court. La vision qui lui fait face se déforme lentement, l'impression de tanguer l'étreint, faisant zig-zaguer sa course. Le Von Frayner se sent pris en étau dans le vacarme d'une houle terrible. Les jambes flageollent, son entêtement à arriver aux chambres tient encore l'homme debout, mais pour combien de temps encore..?

Monter, monter! Aérienne sensation de légèreté, comme si toucher au but donnait des ailes... Ses doigts fourmillent, ses lèvres bleuissent, mais qu'importe! l'envol est stupéfiant. C'est quasiment à quatre pattes qu'il franchit le seuil d'une chambre, se trainant jusqu'à la couche comme ivre mort, hoquetant, sourire béat , s'affalant dans un soupir jouissif, un presque râle.


mhhh....

La quiétude du cocon, s'enfermer dans sa chrysalide, mille murmures bourdonnant à ses oreilles. Sens en émoi... Pourvu que la reyne ne se soit pas perdue... l'oeil de Judas s'ouvre, pupille en grand dilatée. Oeil de chat qui croit voir quelques fantômes... Les fantômes de l'Anaon.
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Envie de jouer?.
Anaon
" La folie c’est la mort avec les veines chaudes " 
    - Xavier Forneret -

    L’Anaon suit sa course de damné. Tant bien que mal. C’est presque avec affolement qu’elle subit l’effet de la drogue qui lui ronge le sang. Sa vision se distord, ses membres s’engourdissent et le sol lui semble impalpable. Les pavés se dérobent sous elle sans qu’elle n’y comprenne rien, à moins que ce ne soit ses jambes qui ont ratés leur foulée. Elle se rattrape avant la chute puis se redresse comme elle le peut pour reprendre sa course endiablée. Paniquée. Ne pas perdre Judas! Ne pas perdre Judas! Cette idée instinctive plus que réfléchie lui martèle le crâne déjà prêt à imploser. Elle cherche à se saisir de la main qui se tend, mais ces doigts sont plus volatiles que l’éther. Quand elle veut s’y nouer la senestre lui échappe, avant de se saisir de la sienne à la volée.

    Le monde lui tourne. L’esprit s’ankylose dans un amas de bourdonnement. Néant instable. Sensation ineffable. L’épaule accuse le baiser brutal d’un mur. Ne pas perdre Judas! Ivresse sauvage qu’elle se prend comme un fléau en pleine figure. Les torches qui chancèlent sur les murs, elle ne les voit pas, seul Judas lui apparait comme un phare dans la nuit. La vision indistincte à ne pas perdre. Son point d’ancrage. Le sang tambourine dans ses tempes et les rires qui éclatent devant elle lui semblent trop loin. Ascension brutale vers les cieux de la folie. Et la silhouette de l’homme se fait ombre mouvante. Azurites qui s’affolent.

    Elle le suit jusqu’à ce qu’elle percute violement l’embrassure d’une porte. Elle s’immobilise devant la chambre dont elle ne distingue dans l’amas de flou qui lui sert de vision. Les pieds hésitants s’y aventurent, la main cherche l’appui d’un mur et ne rencontre que le vide avant de trouver le contact froid de la pierre quelques pouces plus loin. Ses yeux voient sans voir. Elle ne prend conscience de la présence de la couche qu’au moment où ses pieds butent dedans. Le corps cède alors et se laisse échouer lourdement. L’Anaon se retourne sur le dos, difficilement, la respiration heurtée, le cœur au bord des lèvres. Une main nerveuse vient tâtonner à côté d’elle, cherchant désespérément le corps de Judas. Et la respiration rassurante qui s’anime alors sous sa main lui fait l’effet d’un calmant.

    Long soupir qui vient détendre ses nerfs. Sa main libre glisse sur sa propre joue, remonte son visage avant d’agripper de ses doigts crispés les cheveux qui lui voilent le front. De l’unique pupilles qui reste visible, elle darde le plafond d’un regard hagard. Il n’est plus qu’océan informe. La naissance d’un rire s’étouffe entre ses dents serrées. De ses grand yeux bleus on ne distingue plus l’azur. Pupille noire élargie au point d’en ronger entièrement l’iris. Et l’hilarité éclate subitement dans un rire de possédée.

    Un rire irréfutable, incontrôlable. Elle rit tout ce qu’elle n’a pas rit depuis des mois, des années. C’est comme une frustration qui se libère soudainement. Sans raison. Elle rit jusqu’à ce que sa voix l’horripile, jusqu’à qu’elle en ait les tempes vrillées. Jusqu’à ce que cette joie imméritée l’insupporte et que son propre rire lui apparaisse comme une insulte. Et pourtant, elle ne se calme pas.

    La dextre abandonne le torse de Judas pour rejoindre sa consœur crispée dans les cheveux malmenés. L’hilarité se fait douloureuse. Tous les muscles se bandent, prêts à se déchirer. Vive cambrure. La gorge déployée n’enraye pas son délire. Cette folie enivrante. Elle l’a déjà ressentie. Plusieurs fois. Lorsque la mort était sur le point de la faucher. Même étau autour de l’âme, même langueur dans les sens. La peau frémit sous la neige qu’elle imagine et devant ses yeux trompés, elle croit voir la lueur de la lune pâle et ronde. Rire nerveux. Rire douteux. Une quinte de toux qui lui tire les larmes s’immisce dans l’éclat de sa voix qui s’entrave. La rage dans ses muscles s’estompe, ne laissant derrière elle que des mains tremblantes et un corps à l’abandon. Sous ses doigts, la sensation que les parois de son crâne se déforment. Déraison.

    _ Judas….

    Je te bénis. Je te maudis.

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Judas.
« Il faut oublier les folies d’un jour pour faire place à celles du lendemain. »
David Hume

Je suis là.


Le visage fin de Judas se tourne vers celui de l'Anaon. Ce qu'il y voit est bigarré, teinté d'ocre et de brouillard. Ainsi donc faut-il s'abrutir pour donner des couleurs à ses expressions? Le corps bercé en apesanteur, il lui semble qu'ils sont lovés dans le fond d'une barque, une barque qui tangue de plus en plus fort. Jusqu'à se retourner. La sensation n'est pas désagréable jusqu'au naufrage où le palpitant s'emballe, floué. Il serait long de décrire les milles effets psychotropes qui mèneront le Frayner par le bout du nez cette nuit là. Entre plénitude et terreur, cauchemards et visions enchanteresses, certainement qu'il regretta à un moment d'avoir croqué la pomme interdite.

Comme une constante rassurante, Il partage ses commentaires sans queue ni tête avec sa voisine et quelques inepties aussi. Dans la Grand salle, le feu s'est lentement tari, faisant fuir les plus frileux et se couvrir les domestiques. L'hiver est là, et nul ne s'amuserait à le laisser entrer, à le laisser régner. La gueusaille a pris peu à peu congé, désertant une salle commune souillée et désordonnée. Ha si les tapisseries pouvaient parler... Les heures défilant, le jour se leva. Prime retentit pour les petites gens et leur labeur, Judas lui dormait à poings fermés. Dans la nuit, quelqu'un était venu tirer une courtepointe sur les deux corps, comme on jette un linceul sur des morts.

Même s'il l'avait désiré, le Frayner n'aurait pu la toucher. Incapable, impuissant, imprégné de trop de délires. C'était mieux ainsi. L'Anaon semblait de roc... Au réveil ses surprises, et ses décisions, la fuite ou l'abandon.

Les lévriers vinrent fureter dans la chambre, à la recherche d'un petit coin de chaleur après s'être rempli la panse des restes jonchant le sol. Leur grands cous graciles frolêrent le lit pour finalement se recroqueviller au pied, sur l'oeuvre d'un fameux gipponier qu'affectionnait le maistre des lieux. Les chiens peuplaient le domaine, et seul les limiers et autres braques couchaient dehors. Bêtes de chasse, Judas appréciait particulièrement leur compagnie et leurs talents, comme un vieux célibataire aux moeurs rustres. C'était ainsi qu'il occupait son temps libre lors de la saison froide, chasser le lièvre ou le chevreuil avec sa meute de grande vénerie. Se rendre aux joutes, jouer aux jeux... Droguer les femmes.


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Envie de jouer?.
Anaon
" La véritable intimité est celle qui permet de rêver ensemble avec des rêves différents. "
    - Jacques Salomé -


    Les yeux s’agitent sous leurs voiles de chair. Les cils frémissent. Calmement, l’esprit s’éveille. Le son parvient aux oreilles indolentes. Plusieurs respirations paisibles comme des murmures de coton. Les doigts se resserrent sur la douceur d’une étoffe. Soupir. Et les azurites se révèlent au monde. Calmes battements des paupières de l’alanguie. La conscience se réveille alors.

    Des murs inconnus. Des souffles trop nombreux. Avec une infime précaution, l’Anaon se tourne sur le dos. Son crâne est pareil à un ballon gorgé d’eau, menaçant de se déchirer au moindre mouvement trop brusque. La dextre vient presser ses tempes puis la tête pivote pour en rencontrer une autre. La mercenaire dévisage l’homme étendu à côté d’elle comme si elle le voyait pour la première fois. A la mémoire alors de faire son office. Une coupe de vin, un regard, un poison… Judas.

    Les traits de l’homme se redessinent sous les azurites placides. Il semble serein. Il semble bien. Durant sa contemplation, l’Anaon recompose les fragments de sa nuit. Terrible et passionnante. Les prunelles féminine ne quittent pas le visage d’albâtre dont les long filins lui font une auréole sombres. Il est plaisant. De visage. De corps. Durant de longues minutes, indénombrables, elle demeure immobile à fixer l’être qui sommeille tout près d’elle. Puis le corps féminin s’ébranle. Délicatement. D’un pas qui se veut léger, elle enjambe les chiens étendus au bas du lit les laissant lever une oreille paresseuse à son passage. La main prend appuie sur le chambranle de la porte. Diable! Son crâne va éclater! La mercenaire se retourne pour goûter à un dernier regard sur l’homme assoupie. Un instant. Puis elle disparait dans les dédales de la demeure.

    Une main en soutient sur les murs, elle arpente chaque couloir dans l’espoir de retrouver son chemin. La vieille, elle n’était pas en état d’enregistrer le moindre itinéraire. Elle erre alors entre les pierres silencieuses, penchant parfois la tête par une fenêtre pour tenter de trouver un quelconque repère. Quant bien même un domestique effacé peut passer près d’elle, elle n’aura pas la jugeote de demander son chemin. Dans sa tête il n’y a plus qu’elle et les pierres. Et la main qui les caresse cherche à se souvenir de chaque aspérité, chaque défaut. Un souvenir à graver. Comme si elles faisaient partit intégrante du Von Frayner.

    Pendant un temps indéterminé, elle flâne de pièce en pièce avant de réussir enfin à retrouver la Grande Salle. Vide. Seuls quelques subalternes s’affairent à effacer les derniers affres de la nuit. Le Petit Bolchen est bien calme. Mort. Mise à part la présence des chiens et des domestiques transparents, la bâtisse semble n’avoir aucune âme qui vive. Outre le Maistre des lieux.

    Les pas de l’Anaon la mènent à la porte et de sa simple chemise accompagnée de son gilet de cuir, elle sort. La peau accueille la morsure du froid dans un frisson que la balafrée savoure. Aucunement frileuse, l’hiver à toujours été la saison qui à sut la mettre la plus en émoi. Bien qu’elle ait mille raisons de le haïr, elle accueille toujours ses prémices avec le même sourire.

    Les azurites s’empressent alors de chercher la robe doré de son palefroi. Elle trouve l’étalon attaché, le nez dans un amas de foin, toujours sellé. Pauvre gamin, la nuit n’a pas du être toute rose. Une main affectueuse vient flatter l’encolure de l’ibérique et son front vient rencontrer celui de l’équidé. Doucement, elle souffle dans les naseaux dilatés puis sourit quand il lui offre une même réponse vaporeuse. Si le Von Frayner aime la compagnie canine, l’Anaon ne peut se passer de celle de son seul compagnon de route.

    Le froid ambiant vient gèle leurs souffles. La mercenaire contourne sa monture pour descendre un étrier de la selle. Une grimace vient alors déformer ses lèvres. Dans son état la route va être difficile. La tête pivote pour contempler la demeure froide qui se dressent dans leurs dos. Et au fond d'une chambre, un Judas endormi... Le visage vient se nicher dans les crins abondant de l’étalon. Laissons lui le temps de se gorger du froid… Avant de songer à reprendre la route...

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Judas.
« Dans les affaires, comme en amour, il est un moment où l'on doit s'abandonner. »
Bernard Grasset

Elle s'est glissée hors de la couche, prenant la poudre d'escampette avec un naturel désarmant. Et ces cabots paresseux n'ont pas même bronché pour la retenir, pour lui barrer le passage ou la distraire de sa fuite. Décidément, les chiens ne sont pas toujours si parfaits. Les mouvements de la Reyne de la veille le ramène à la dureté de l'aujourd'hui. Elle s'enfuit. Judas s'éveille, sans ciller, la tête dans un étau pernicieux et tenace. Prévisible, quand on sait la teneur des lendemains. Ils sont blêmes comme la saison, souvent silencieux et penauds, peu loquaces et vaguement lâches. Mais...

Non! Il ne l'avait pas touchée! Alors quoi? Elle fuyait comme si c'était le cas. réalisant la chose dans le tumulte brumeux des restes de la veille il se dressa. Et ce ne fut pas le seul. Pour la peine... Il attendrait un peu avant de se lever. Toute virilité matinale dressée n'est pas bonne à exhiber sous l'oeil affamé de la meute et la fausse indifférence des esclaves. Mais attendre, quel ennui. Quelle erreur. Voilà que la fuyarde s'offrait déjà au froid de décembre, sans qu'il ne s'en doute. Au diable les précautions, le Frayner était bien trop peu patient pour ce folklore. D'un mouvement sec, il jette sur le coté courtepointe et paresse, saute de la couche pour traverser la chambrée. Corridor, courant d'air. Une fenestre ouverte, il la maudit mais l'embrasse, s'y penche pour mieux constater sa déveine.

Quoi que. La roide est là, dans son élément. Sur le départ.


Anaon! C'est donc de cette façon que tu salues ton hôte!!

Plus qu'une question criée au bon vouloir de la brise, un état de fait. Un museau curieux se prend une latte au pied de la fenêtre, Judas croise les bras. De froid, ou de désarroi. Elle s'enfuit comme si l'on avait découplé les limiers à ses trousses. Comme si l'égo de Judas pouvait le lui permettre.

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Anaon
"Une femme repousse parfois ce qui la charme le plus. "
    - William Shakespeare -


    …Ou pas


    Dans l’abondance des crins, un sourire se dessine. Le corps se tourne et le visage se révèle doucement au Von Frayner. Les yeux cherchent alors la fenêtre d’où il la hèle et ils le trouvent, aussi peu vêtu que la veille. A elle d’élever la voix sans une aucune once d’agressivité.

    _ Je ne me serais pas permise de te quitter sans te saluer…. Je ne suis pas si ingrate.

    Menteuse qui ne cherche même pas à se rendre crédible. La position de l’Anaon se calque en tout point sur celle de Judas et le dos vient prendre appuie contre le flanc de son cheval tandis que les bras à peine couverts se croisent sur sa poitrine. Les regards se toisent. Judas est fier, et elle, elle se fout de trop de chose. Elle pourrait monter sur l’ibérique et partir ainsi, sans grand remord. Mais si le Von Frayner n’a pas touché son corps, il a sut piquer à vif son intérêt le plus enfoui. Ainsi il sera l’écueil à ses principes. Et encore heureux que l’Anaon n’ait pas l’égo d’un Judas...

    Désinvolte, elle lui tourne de nouveau le dos pour prendre le temps de remonter son étrier et dessangler la selle de quelque trous.

    _ Je prendrais tout le temps de te saluer comme il convient si tu as encore quelque chose à m’offrir. Quelque chose de chaud.

    La peau glacée ne bronche pas, mais le corps ne refusera pas une boisson brulante. Et de toute manière, si elle venait à prendre la route elle finirait à terre dix mètre plus loin, muscles en coton et crâne vrillé par un mal de but à lui soulever le cœur. Voilà le prétexte qu’elle se donne pour justifier sa conduite. Sa main gauche vient flatter le poitrail chaud de l’animal et sans attendre une quelconque réaction de son fameux hôte, la balafrée reprend le chemin de la Grande Salle.

    La glace veut se réchauffer. Ainsi l’Anaon vient s’ancrer près de la cheminée dans l’attente que Judas la rejoigne. Les azurites se perdent dans les flammes alors qu’elle réajustent de ses mains songeuses sa tenue relâchée. Les manches de la chemises sont fermement tirées, les cuissardes remontées sur les baie grenas qu’elles surmontent. Impeccable Anaon. L’épaule vient chercher appuie contre l’embrasure de la cheminée et les bras se croisent de nouveau. Le rougeoiement des flammes semble lui rappeler quelque visions fantasmagoriques vécues dans la nuit, mais les souvenirs qui lui parviennent ne sont que bribes décousues ponctuées de quelque murmures échangés.

    La mercenaire patiente. Sage Anaon. Conciliante en dent de scie… N’est-ce pas?

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Judas.
« Mange Anaon, tu ne sais pas qui te mangera. »
Judas.

Un sourire s'ébauche, au coin de sa bouche. Satisfait ou apaisé? Un peu des deux certainement. Elle n'est pas partie. Un imperceptible mouvement , le poing qui se serre derrière le triceps, et le saillant d'une veine palpite le long du bras clair bientôt parsemé d'une fine chair de poule. Quelque chose à lui offrir. Oui, il a.

Anouk! Un bliaut!

Anouk se débrouillera pour le lui faire enfiler dans sa course jusqu'à la grand salle, où il déboulera comme un enfant, sourire sagement rangé cette fois. Dans sa progression il aura mandé à boire et à manger, de quoi réchauffer peut-être la femme qu'il désire. Sans trop de cérémonie, Judas ouvre ses bras à l'Anaon qu'il enserre doucement.

Reste. Tu es chez toi ici, si tu le veux.


L'accolade n'a rien de virile, elle est plus tendre qu'amicale. Il éprouve enfin le plaisir de la sentir contre lui, aussi fugacement soit-il. Il faut être furtif pour ne pas effrayer la biche, aussi ne s'attarde-t-il pas dans ce contact qui l'agacera peut-être. Qui trop embrasse, mal étreint, qui vite se lasse, mal éteint. Il regarde son visage à la lueur du jour qui est entré dans sa demeure , très sérieux.


Viens avec moi dans les cuisines, je préfère manger dans les casserons.


Il lui offre enfin un chaste sourire, comme un " pas toi?" puéril. Un mouvement de tête pour qu'elle lui emboite le pas , et les cuisines s'offrent à leur mains curieuses. La pièce est encore vaste, et une autre cheminée cette fois tres large et aménagée pour les cuissons domine l'endroit. Judas pite, ici et là, au gré des marmites et des plats que trois grosses suivantes dressent mécaniquement. Il tend une coupe de vin chaud à la mercenaire dont il ignore encore tous les passes-temps, mais soit, si elle daigne rester encore un peu il aura tôt fait d'en savoir un peu plus. Il vient porter à sa bouche quelques mets gras, qu'il partage immédiatement avec sa voisine. Qui aime bien nourrit bien. Etre au service de sa dame, à l'affût de ses désirs, de façon prude sinon chaste mais non platonique. L'attitude du Frayner à cet instant pouvait s'assimiler à l'amour courtois, si l'on omettait que l'Anaon était d'un rang qu'il devinait déjà, et qu'il - Judas - n'était pas totalement désintéressé. Il remarqua sous cette lumière nouvelle la clarté de ses iris, il la trouva fort belle. Un index délicat vint chasser une mèche de cheveux de sa joue, et sans détour entre la gorgée et la bouchée il la questionna.


Qui t'a fait ça?

D'un mouvement de main battant l'air emplit de fumets, il ordonne aux femmes le congé. Ces dernières s'exécutent, les laissant seuls dans le silence de la grande pièce, juste éprouvé par le léger bouillonnement d'un gros chaudron suspendu à la crémaillère de l'âtre.
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Anaon
" Éternité est l’anagramme d’étreinte. "
      - Henry de Montherlant -


    Coup de maillet dans la glace. Elle se fait poupée de chiffon entre ses bras. Le cœur loupe un battement. L’étreinte la paralyse, la phrase la fauche. Le contact est furtif, mais l’Anaon est ébranlée et se sont deux azurites perdues qui parcourent le visage qui l’observe. Est-il sincère? Ou a-t-il le cerveau encore empêtré dans quelques états seconds qu’il n’aurait pas encore digéré? L’Anaon est surprise, interdite. D’un air presque innocent il l’invite aux cuisines et le sourire qu’il lui offre finit de la désarmer. Judas aux deux visages. Chasseur la nuit et berger le jour. Et l’Anaon, femme avant d’être infâme.

    Il la devance et il faut un instant de latence à la balafrée avant de se mouvoir à sa suite, songeuse et pantoise. La cuisine se révèle et avec elle l’entrain d’un Judas qui lui tire un sourire, inexplicable. D’un pas hésitant, elle se rapproche de la cheminée bras serré contre son ventre. Puis elle accueille le vin chaud qu’il lui sert d’un œil ironique. Ma parole! Il veut la clouer ici! Après une telle soirée et au vu de l’état de son crâne, une infusion inoffensive aurait été la bien venue. Mais l’Anaon ne crachera pas sur du vin et présentement, elle aurait bien du mal à refuser quoi que se soit à Judas. La boisson qu’elle n’avait pas but depuis bien longtemps vient honorer son palais. Et son gout si particulier font couler en elle quelques douces réminiscences. Souvenir d’une place sous son manteau de neige, d’un sapin en son centre, d’une foule de visage… d’eux.

    La mémoire s’arrête là, l’esprit se raccroche au présent. Tout ce que l’homme goute, elle y goute aussi, azurites rivées sur lui, prêtes à déchiffrer le moindre battement de cil. Il a l’air presque angélique, alors qu’elle a pu constater qu’il n’en est fichtrement rien. L’Anaon reste pensive. La pupille pétille, le sourire se trace sur ses lèvres. Quel genre d’homme es-tu donc, Judas?

    Comme un animal sauvage dont la curiosité est plus forte que la crainte, elle le laisse frôler sa joue sans broncher. Mais l’inévitable se pose.

    Le sourire se fige. Azurites immobiles. Puis le regard vient se noyer dans la coupe sous son nez. Silence. S’il a bien une question qu’elle aurait souhaiter qu’il ne lui pose jamais, c’est certainement celle-ci. Pas maintenant, pas si proche de cet "anniversaire" funeste. Le sourire se fait timide, navré et les prunelles n’osent pas venir trouver les siennes. Elle fait doucement rouler la coupe dans ses doigts fins. Répondre ou ne pas répondre.

    _ Les mains d’Aristote… L’Inquisition n’est pas tendre…

    Les doigts se font nerveux sur le pied de la coupe. Le sourire de l’Ange n’est pas sa seule plaie, mais s’il n’y avait que celles du corps, elle serait femme heureuse.

    _ Epargne-moi ta pitié ou ton mépris… s’il te plait…

    Et elle attend que tombe le couperet. Elle a connut des courtisans pieux. Elle ne se surprendrait pas à découvrir un Judas fidèle. Il faut dire qu’elle n’a jamais connu autant de parjures que parmi ces faux-croyants. Comme pour se redonner un semblant d’assurance, elle relève la tête et vient plonger son regard dans le sien.


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Judas.
« Oser et faire. Il est plus facile de demander le pardon après, que la permission avant. »
Grace Hopper

Sa réaction se résumerait à un air d'incompréhension. Non pas sur le pourquoi des mains de l'inquisition sur ce visage, mais plutot sur le pourquoi du mépris qu'elle pourrait lui inspirer. Ses sourcils s'arquent, lui qui ne cesse de l'observer depuis que, fière et imperméable aux regards qui se sont posés sur elle, elle a franchi le seuil de sa demeure. L'Anaon est une cathédrale dont les fissures sont à fleur de pierre. Dieu est grand, et le désir qu'elle lui inspire à l'instant où elle détourne le regard l'est encore plus. Comme un réflexe, il plaque ses doigts sur les lèvres de la confessée. Un besoin de ne plus laisser franchir aucun mot qui fâche, aucun mot qui ne se méprend. car c'est elle qui s'est méprise.

Judas n'est pas un enfant de choeur. Non, assurément. Pourtant, la versatilité de ses actes et attitudes ne tient parfois qu'à un mot. Ce profil effraie, déstabilise, c'est d'ailleurs certainement pour cela qu'à trente et quelques années le seigneur n'a toujours pas célébré d'épousailles ni donné descendance. Les choses les plus simples sont parfois les plus compliquées à aborder. Ils sont seuls, loin de l'agitation de la veille ou de regards dérangeants, loin du tumulte et de leur délire. Ils se jaugent, gentiment, chacun essaie de savoir ce que dissimule l'autre. Chacun s'attend à mettre le pied sur un piège. Elle, sur le départ, le sur qui-vive. Lui, sur les dents, sur la pointe des pieds.

Il sent toutes les questions qui ne franchiront jamais les lèvres de cette femme, par pudeur ou par fierté. La madone de glace a des failles. Judas aime mettre le doigt dessus. Il réitère, implacable.


Reste.


Judas a perdu à cet instant toute sa légèreté. Le silence qui les entoure est soudainement pesant, lourd. Son sourire frivole s'est brisé sur la bouche de cette femme, qu'il fixe sans plus une once d'innocence. Il déglutit, la lippe entrouverte, presque béate. Les doigts se retirent lentement, le rempart tombe pour céder la place à un baiser, volé. Frôler la pulpe pleine et brillante comme une burlat bien mûre, voilà une audace qui lui donne le plaisir de la bousculer à sa façon. Le souffle se cadence imperceptiblement, qu'elle le gifle! il n'en serait que plus électrisé. La voix cassée souffle une question, qui donnera au Frayner le droit de la bousculer un peu plus... Ou pas.

De quoi as-tu peur?

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Envie de jouer?.
Anaon
" Ceux qui contrôlent leur désir, c'est que leur désir est assez faible pour être contrôlé ; et la raison qui contrôle prend la place du désir et commande à l'insoumis. "
      - William Blake -


    Tous ses sens se braquent sur les doigts qui se sont posés sur ses lèvres, seul ses yeux demeurent dans ceux de Judas, surpris, interrogateurs, charmés. L’Anaon a renié depuis longtemps le contact humain et l’intérêt qu’il lui témoigne la laisse troublée, comme s’il était injustifié. Elle est la souris qui contemple son serpent, incapable de fuir, échine tendue dans l’attente de la morsure qui suivra la fascination. Paranoïaque l‘Anaon.

    Reste…

    Le ton est inflexible et Judas change de visage. Aurevoir l’enfant et bonjour l’homme. L’Homme sévère, si attirant et inquiétant. Le silence pèse, galvanise l’atmosphère. Les lèvres frémissent sous les doigts qui les dominent. Et comme une seconde claque, l’Anaon se prend l’audace du Von Frayner en pleine face. Et ses lèvres viennent voler les siennes. La tension est immédiate et la crispation se fait presque sursaut. La main se referme férocement sur le pied de la coupe. La balafrée réagit avant de ressentir.

    Le murmure lui tire un frisson, les azurites viennent chercher la bouche aventureuse. L’Anaon jauge sa réponse. Peur? Je ne sais pas, je ne sais plus… De tout et de rien. Peur de partir, de rester. Peur de céder ou de gifler. Peur de moi…

    _ De toi…

    Et de ce que tu pourrais devenir. La mâchoire tremble de sentir sa voisine si proche. Une inspiration plus profonde. La mercenaire se braque alors qu’elle ressent ce vertige au creux du ventre et ce nœud dans la poitrine. Fuis maintenant, ou tu ne fuiras jamais! Dans l’esprit de l’Anaon c’est un joyeux bordel qui se manifeste. Raison de l’âme contre la pulsion qui lui vrille les tripes. Envie de mordre par désir, envie de gnaquer par violence.

    Le visage tailladé se meut alors, subtilement et le nez vient frôler le sien. Geste hésitant, lèvres frémissantes. Elle n’achève pas son entreprise. Regain de bon sens qui la freine dans son envie. Quel bon sens y a-t-il pourtant dans le fait de refouler sa tentation?

    Dans l’esprit de l’Anaon la question reste sans réponse et les lèvres balafrées se suspendent au souffle de Judas.

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Judas.
« Il faut être soi-même simplement, pleinement, sans abdication comme sans désir de diminuer autrui. »
Victor Serge


Judas s'attendait à cette réponse. La peur de cette femme est évidente. Sans quoi elle ne se forgerait pas une telle armure, sans quoi ses yeux ne serraient pas si vides et si fols à la fois. Sans trop mots dire, l'homme qu'il était avait tenté de décortiquer l'Anaon. Il avait regardé ses gestes et ses audaces, avait soupesé sa rétivité, cherché entre les lignes. Elle avait peur. Il sait quelle attitude tenir avec les bêtes craintives, les chats échaudés. Il faut les apprivoiser doucement, jusqu'au moment où ils ne se recroquevillent plus devant la main tendue. Puis au moment le plus opportun, lorsque leur désir de s'échapper se heurte à celui de s'abandonner, les attraper avec force. L'esprit acéré du chasseur s'éveille, aussi terre à terre que celui de ses braques. L'homme n'est jamais rien qu'un animal avec de l'initiative.

L'arête du nez frôle la sienne, la réponse est... immédiate. Judas viens mordre les lèvres de l'Anaon, assez pour les faire rougir, pas assez pour lui faire mal, et ses mains masculines empoignent les hanches qu'il pousse avec force vers le meuble le plus proche où il la hisse, sur un piédestal. Celui de son envie. L'envie, péché si capital, et elle veut fuir? Un homme exalté ne connait pas le bon sens, mais il connait l'importance de céder aux bas instincts. Faire sauter les sutures pour épancher le mal de devoir toujours paraitre trop bien. Irréprochable, droit, sérieux. S'abandonner.

Il garde néanmoins une voix égale pour lui parler, dissimuler quelques instants encore la discorde de ses sens. La scène est étrange, le dialogue s'il n'était pas entrecoupé d'une bien drôle de façon ressemblerait à celui de deux personnes qui savent se tenir...


Peur de moi? Ou du qu'en diras-t-on?


Il se place entre ses cuisses dans un léger coup de rein, lui debout, elle assise, fais courir ses mains sur le charnu de ses flancs et le haut de ses cuissardes.


Ou du qu'en diras-tu?


Car il a aime mettre le doigt sur ces failles encore douloureuses, et sur ces non-dits qui ébranlent. Les cuirasses ne peuvent tomber que si tous les liens qui les baillonnent se délient, comme autant de langues interdites qui déversent leur flots de cris et de mots trop longtemps tus. Là où il y a de la gêne... Se meurt le désir. La culpabilité d'une femme libre n'a d'égale que la cupidité d'un homme affamé, le Frayner le sait, mais l'Anaon?


Allons ma mie, tu n'es pas femme facile, qu'on se le dise. Et tu ne perdras pas de ta superbe parce que tu as cédé à quelques pauvres hommes qui n'auront eu que l'heur de te garder un instant en leur joug.

Et le joug de ses bras se referme sur ses épaules, des épaules qu'il languis déjà de mettre à nues. La langue insolente serpente sur le pavillon de son oreille, amenant encore des paroles, qui s'envolent... Les doigts coulant dans son dos se fourchent au travers de l'étoffe, inscrivant des griffures et froissant la peau, comme des mots qui restent.

Personne ne te prendra ta liberté, l'Anaon. Laisse moi te donner de la mienne...

Car s'il est des choses que les protagonistes ignorent, c'est bien leur mode de vie. L'une est mercenaire, de sang et de fer, l'autre est libertin, seigneur adultérin. On se doute que l'homme est volage, on n'imagine à quel point. Ses blessures sont passées, et peut-être bien aussi sombres. Aimer les femmes, le payer le prix fort, lorsqu'entre les cuisses de sa soeur il se plaisait à aggraver son sort. L'amour n'est rien quand c'est politiquement correct...*

*M.Farmer
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Envie de jouer?.
Anaon
" Une femme pardonne tout, excepté qu'on ne veuille pas d'elle. " 
      - Alfred de Musset -


    Ainsi elle lui pardonne son audace et son insolence. L’homme entreprenant, on veut le claquer et lui céder. Il révulse comme il séduit. Contradiction qui font le paradoxe des étreintes passionnées, à la fois aimantes et virulentes. Douloureuses et doucereuses.

    Si elle hésite, Judas lui, agit. Lèvres prisonnières, elle n’a pas le temps d’émettre la moindre objection qu’elle se voit juchée sur le haut d‘un meuble. La coupe est soudainement lâchée, teinte le métal sur le froid de la pierre, et elle plaque violemment ses mains sur le torse de Judas dans un réflexe, comme si elle pouvait encore le repousser à une distance convenable. Montée d’adrénaline. Respiration qui s’échauffe. Il la touche, elle frémit, et les muscles se crispent sous les doigts impérieux. Insolent!

    Le menton se relève d’un air spartiate, comme une bravade inutile, une menace désespérée. Quand la défense cède, l’offensive prend le relais… à sa manière. Et les mains se resserrent avec hargne sur le bliaud quand l’impertinent vient jouer de sa langue sur l’oreille sensible. Un soupir entre les dents serrés. Les mains dans son dos lui impriment une vive cambrure, non de plaisir mais de révulsion, de cette peau trop fragile marquée à vie des séquelles de son hérésie. Baiser du feu, morsure du fouet. Le frisson suit la tension, pourtant. Quémande d’un côté repousse de l’autre. Aime dans un baiser, hais dans un caresse.

    La senestre remonte le long du cou masculin dans un geste appuyé, presque agressif et les doigts viennent se nicher dans les cheveux qu’ils empoignent avec ardeur.

    _ Crois-tu que je sois femme à me soucier du regard d’autrui?

    Bien sur que non il ne le croit pas. La suite de son discours l’a prouvé, mais l’Anaon ne le laissera pas avoir le monopole de la parole. Judas à sut voir les plaies qui lui gangrène l’âme et il se plait à appuyer dessus avec un plaisir sadique. Et comme toute autre douleur, on veut y échapper, mais quand on est un être qui se détruit, on la savoure.

    Il a cherché à la faire céder par ses paroles, et l’Anaon se donne l’illusion de pouvoir encore lui résister alors que tout son corps abdique dans la tension ou le frisson.

    _ Je ne suis pas qu‘un jouet… Si tu me donnes de ta liberté je ne te la rendrais pas.

    Si tu me prends, je te gardes. Une heure, une nuit, un jour ou une année. Et si tu ne voudras plus de moi, laisse moi la prétention d’avoir marqué ta vie comme tu graveras la mienne.

    La mains crispée sur le bliaud vient rejoindre sa consœur dans les cheveux de Judas. Et à la balafrée d’agir venant chercher la bouche aventureuse de ses nacres qui s’y plantent sans douleur. Les talons s’ancrent sur le rebord d’un tiroir et un murmure qui passe de bouche en bouche.

    _ Viens donc petite ordure…

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Judas.
« La pensée contraire est érotique. »
Roland Topor

Délivres-toi de ta ceinture... Délivres-toi de moi, si tu l'oses. Le cinglant de sa réaction est révélateur. Judas perçoit la hargne, réaction épidermique à la boue qu'il remue. Pouliche effarouchée, femme touchée. Les zygomatiques se crispent, encadrant d'un trait nerveux les mâchoires du Frayner lorsqu'elle lui tire les cheveux. Outrageuse créature, ne t'as t-on jamais appris la luxure? C'est un combat perdu d'avance d'où s'en sortent usés deux vaincus. Ne pas lui lever la main dessus, ne pas dépasser les limites qu'elle est toujours entrain de remettre en question. Garder sa place d'homme, lui rendre sa place de femme. Parole persifflée entre une rangée d'émaux aux canines menaçantes.

Si je suis autrui, alors je dis oui.

Elle le provoque, puis l'embrasse, comme un gosse qu'on consolerait de lui avoir joué un vilain tour. Mais où commence l'amour, où se termine le jeu? Dans les questions qu'amènent ses mots, balancés comme s'ils étaient sans consistance, sans importance et sans promesses? Pour la première fois depuis leur rencontre, le Frayner se trouble. Elle est dérangeante lorsqu'elle s'éveille et joue à son propre jeu. Elle lui tient des propos qui le déstabilisent. Me suffiras-tu? Judas, homme d'une seule? Echappe-t-on à son destin? Pourrais-je concilier nos libertés, j'en doute, bien que le jouet n'est certainement pas celui qu'on croit. Le jouet qui te fuit et qui te nargue, le jouet qui t’obéit pour mieux te trahir".

Ainsi tu me feras la guerre.


Est-ce un avoeu?

Encore un léger coup à l'égo de la roide. Un léger coup de rein aussi, pour lui rappeler qui est en position de faire le mariole, et qui ne l'est pas. Son crane le lance, la garce n'y est pas allée de main morte. Judas tire sur le cuir, la déleste de ce gilet qui lui va si mal. La chemise cède aussi dans un craquement, puisque nous en sommes à nous échauder... Il n'a même pas l'air navré d'abîmer ce qui ne lui appartient, elle le sera bien assez pour lui. Dévoiler ce qu'elle cache, le galbe d'une poitrine à la lueur du jour mêlée de celle du feu. La mettre à nue, et laisser courir de sa poigne gauchère mais point gauche les doigts fins et doux qui font sa réputation dans le léger halo d'or qui les ceignent. La droite vient s'arracher au baiser qu'elle reprend pour pincer cette bouche en cul de poule, hargneuse. Il a vu les cicatrices. Un fugace instant, un infime instant. Mais il les a vu, et s'est arrangé pour qu'elle s'en aperçoive. Il la veut, toute entière il la veut et il malmène le rempart grenat qui les sépare encore. La thérapie est brutale, la manoeuvre l'est aussi.

ça te pique hein le contact l'Anaon... ça te claque dans les mains et te fouette dans le coeur.. Toi qui n'a pas touché une seule personne depuis que tu es arrivée, évitant soigneusement la proximité de tous, contournant le Problème. Crois tu que je ne l'ai pas remarqué? Sens tu comme je te touche? Sens tu comme je t'empoigne? Et le désir qui darde en dessous, le sens tu?


Prend garde aux mots que tu emploies...


Leur portée n'est pas à la tienne.

Les doigts impriment une pression gourmande sur l'arrondi d'un sein blanc où vient s'échouer une fine tresse brune. Tant de stigmates, et tant de charme pourtant. J'arrive, ma mie.
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Envie de jouer?.
Anaon
" La violence de la femme est dans ses charmes. "
      - Jean-Jacques Rousseau -


    Tu n’es pas autrui. Tu es moi, le moi que je n’ai pas. Je suis la torture, le bourreau insensible qui s’exécute quand tinte l’écu. Tu es la luxure, animal de la nuit, qui brise les cœurs comme je lacère les corps. Toi que je n’assume pas. Toi que je veux en moi.

    Il y a l’amour qu’on fait avec amour. Il y a l’amour qu’on fait comme à la guerre. Il sont comme deux chiens affamés, crocs en dehors près à gnaquer l’enragée qui fera preuve de trop d’audace. Et elle est la plus prompte à mordre bien que son comparse ne soit pas en reste. Elle accuse la question comme le coup de rein dans un air hautain.

    _ Ne fais pas le malin Judas. Ce n’est pas moi qui te courrais après au petit matin…

    Ne l’oublis pas. Tu te sens puissant maintenant. J’aurais pu l’être d’autant plus en préférant la porte, te laissant sans remord en train de ronger ton frein. L’Anaon joue à la condescendante et çà lui plait. L’amour est un combat dont on sort à la fois vainqueur et à la fois vaincu*. Oui. Mais chacun veut ployer la tête haute. Mets le doigt dans la faille, je m’appliquerais à le broyer le plus possible. Fais-moi mal et je te rendrais ma douleur.

    Le cuir cède tout comme la chemise qu’il achève et il le voit, l’Immonde et il ne se cache pas de le lui faire savoir. La mercenaire garde pour elle ses blessures les plus enfouies, mais les autres lui sont révélées au grand jour. Elle soutient le regard, la mains sur ses lèvres. Elle ne lui montrera pas de crainte, que des crocs, à ce Judas dominateur. La respiration s’emballe et le dos se creuse quand les doigts viennent jouer sur sa poitrine. Aussi brulants qu’une langue de feu. Des arabesques se tracent sous la douceur de la pulpe, pareils à des écorchures. De chaque caresse il lacèrent un peu plus la glace qui englobe encore le désir brut, animal, viscéral et des sillons tracés s’épanche une envie qui se fait de plus en plus affirmée.

    Il la prévient comme on menace et un sourire des plus narquois fend les lèvres tailladées. Les mains féminines s’appliquent à défaire le corps du seigneur du bliaud qu’elle jette sur le pavé. Les bras se noue à l’encolure de Judas et d’un geste pressé elle vient défaire les liens qui retiennent le poignard fixer à son propre-avant bras. L’Anaon fait tomber les armes. La bouche fougueuse s’empare de celle de l’homme alors qu’elle tire sur les muscles de ses bras pour se soulever un bref instant, laissant tout le loisir à la main masculine de libérer ses reins des étoffes qui les entravent.

    _ Mes mots t’insurgent?

    Laisses moi en jouer. La dextre reste ancrée sur le cou alors que la gauche se fait inquisitrice. A elle de parcourir le buste dont elle redessine chaque muscle de la caresse de ses doigts jouant parfois de griffures indolores. Elle cherche le saillant du bassin, effleure l’os sculpté sous la peau hyaline et les doigts terminent naturellement leurs chemin sur le galbe des braies.

    Le visage se recule, les azurites accrochent l’acier. L’index parcoure la pomme d’Adam puis se cale sur une veine palpitante. Sentir l’envie sous ses doigts. La vie qu’elle veut lui prendre dans une belle petite mort.


* Dominique Lévy-Chédeville

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