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[RP] Errons, errons, petits patapons

Loh
[En Champagne. A Compiègne plus exactement. Début janvier 1460.]


Sans avoir réellement compris, je me retrouve protégée. 14 ans. Sortie fraîchement d'un couvent où j'ai été mise à la porte. Cette flammèche sur le bas de la soutane de cette Soeur n'était qu'une toute petite farce de rien du tout! Si elle avait cessé de s'agiter, le feu ne se serait pas attisé! Est-ce ma faute?

Seurn Eriksen. C'est ainsi que son nom entier se prononce. L'orthographe exacte? Je n'en sais rien! Et je m'en fiche. Il m'a embrassé. Je l'ai repoussé. Je l'ai giflé. Et je ne m'en fiche pas. Un conte ne peut devenir réalité. La princesse doit rester dans sa tour et le prince doit se faire dévorer par le dragon! Il ne peut aimer une fillette qui ne sait pas qui elle est! Et pourtant. C'est ce que je désire le plus dans ce Royaume. Prendre soin de lui comme il le fait pour moi en ce moment.

Syuzanna NicDouggal. Connue ni d'Eve, ni de la pomme. Elle est rousse. Je suis brune. Elle est saxonne. Je ne suis rien. Elle flamboie. Je crépite. C'est une femme. Je suis une fillette. Elle est belle. Je n'ai aucune confiance en moi. Elle m'apprend à chasser, à manier les armes. Je n'ai pas ma langue dans mon carquois. Elle non plus. Je lui apprends la proximité affective. Elle est devenue ma protectrice et amie. Je suis en admiration.

J'ère dans les rues de Compiègne. Je sors du château de la noblesse champenoise. En courant. Je viens de baffé le guerrier danois. Mon coeur s'agite comme les battements d'ailes d'un bourdon en plein travail. La héraut y était. Sa chevaucheuse aussi. Enceinte jusqu'au bout du cou. Mon médaillon doré semble venir d'un Comté non loin d'ici. Le Maine. Gorron. Chaudière. Quelque chose comme ça. Jamais entendu parler. Je ralentis la cadence. Les évènements me rendent perplexe. Mes doigts fins glissent pensivement sur le métal précieux. Ma cape sombre agencée ainsi sur mes épaules et ma caboche me font passer pour une frauduleuse marchande. Mon regard abyssal et plissé en dit long.

Trois têtes de loups arrachées de sable sur champ d'argent.

Les blasons nobliaux sont-ils offerts aux possesseurs en fonction de leur caractère? Ma mère est-elle un tyran? Car oui, la héraut royale a bien parlé d'une détentrice. Le sable représente-il les marécages? Les jeux malsains qu'une Dame de la Haute exercent pour mettre à jour ses désirs et ses humeurs capricieuses? Et l'argent, fait-il référence à ses contes et légendes sur ses loups assoiffés de tueries lors d'une lune ronde et étincelante? J'ai hâte! Et j'ai si peur! Ne ferai-je pas mieux de rester orpheline? Auprès de Seurn et Syuzanna? Nous vivrions heureux, tous les trois!

Non, je dois en avoir le coeur net. Arrivée à l'auberge du Chat Perché, je monte en vitesse à l'étage. Quatrième chambre à droite. Mon guerrier n'est pas là. Ouf! J'empoigne une plume d'oie. Un vélin de bonne qualité. Je pose mon popotin sur une chaise. Face à une minuscule table en bois. Et je perds mon regard azur aux travers des vitraux colorés avant de commencer à tracer des lignes sinueusement noires sur le parchemin. Avec application. Comme Soeur Marie-Clarence me l'a appris.




Madame la Duchesse de Champagne,
Yunab Cardofer d'Asceline,


Vous ne me connaissez pas. Pas encore. Ne soyez pas sur vos gardes. J'ai besoin de vous. J'ai besoin que vous me rendiez un service.

Qui suis-je pour oser cela? Je n'en sais rien moi-même. Là est le centre brûlant de ma demande. Je possède un médaillon doré. Apparemment, de noblesse. Selon votre héraut royal, Dame Maltéa Wagner di Favara, il provient du Maine. Il est associé au territoire des Gorrons. Je n'en sais pas plus. Mais j'aimerais!

Pourriez-vous perdre quelques grains de sablier de votre temps et prendre contact avec la Comtesse du Maine? De dirigeante à dirigeante, la solution ne peut que se trouver.

Demandez-moi ce que vous voulez en échange, je m'y attellerai. Je ne suis peut-être qu'une adolescente mais ma parole est d'or. Mon silence est de diamant.


Avec tout mon respect,


Le message semble clair. Mon écriture est soignée. Le pli aussi. Je descends quatre par quatre les marches en bois.

- " Marjo? Marjo! J'ai besoin de toi! J'ai une lettre à envoyer! Pourrais-tu m'aider? "
_________________
Syuzanna.
Une fois n'est pas coutume, la rousse prend un bain. Un vrai bain. Dans le baquet, avec du savon et de l'eau chaude. Elle a plutôt l'habitude des rivières glaciales, la Saxonne. Mais cette fois, elle avait envie d'un bain, comme les Dames bien élevées.
Elle a dû s'endormir, car à son réveil, ses habits ne sont plus là. Elle se redresse dans le baquet, se campe sur ses deux pieds. Et commence à pester. Où est passé son kilt ? Et sa chemise ? Et son écharpe ? Et son béret ?
Elle bondit hors de l'eau, et s'apprête à sortir, nue comme un ver, de la salle d'eau, lorsqu'elle aperçoit la maudite robe blanche. Elle peste de nouveau. Mais qu'est-ce qu'ils ont, à vouloir la transformer ?
Sans cesser de grogner, elle coiffe ses longs cheveux, qui cascadent jusqu'à ses reins. Elle les laisse libres, et enfile la robe. Elle est blanche, les ourlets sont rebrodés de fils d'or. Le tissu est doux sous ses doigts. Les manches se terminent en pointe sur le haut de ses mains. Elle noue la ceinture, fait d'un tissu épais, doré, et brodé.
Elle enfile ses bas, ses bottes, glisse sa dague dans l'une d'elles.

La rousse s'apprête à sortir, et aperçoit son reflet dans la vitre de la fenêtre. celle-ci lui renvoit l'image d'une femme d'une vingtaine d'années, aux yeux noisette, aux lèvres pleines et au teint pâle. Elle soupire, regrettant que les dieux l'aient également munis de ces formes féminines que son père aborrait tant, chez elle.

Elle ouvre la pièce, bien décidée à être furieuse et à réclamer ses vêtements. Loh, songe-t-elle, doit certainement être dans sa chambre.
Elle dévale les marches, prenant garde à ne pas s'empêtrer dans sa tenue.
Alors qu'elle allait se mettre à brailler après Marjo, elle se fige soudain, étonnée de trouver son apprentie dans la salle.
La Saxonne se reprend, et se dirige vers elle. Sa formidable chevelure ondule à chaque pas, sur ses épaules menues et dans son dos.


- Loh ? Que fais-tu là ? Et seule ?

Elle avise la lettre, que la demoiselle tient dans ses mains.

- A qui écris-tu donc, si je puis me permettre ?
_________________
Loh
Je regarde le comptoir de bois reluisant. La propriétaire en prend grand soin. Mes mains sont à plat. La missive aussi. Sous celles-ci. Mon esprit s'égare vers Seurn. Irrésistiblement. Il ne m'a jamais autant obnubilé que présentement. Je me surprends même à m'imaginer dans une robe vêtue de blanc. Un bouquet de lys entre les paluches. Un voile semi-opaque devant le visage. Déambulant une allée religieuse. Et lui qui me regarde envieusement.

- " Syu! "

Je sursaute. Je la regarde de mes mirettes de hibou. Si je m'y attendais! Une robe blanche? Ne porte-t-elle pas une robe quasiment identique à celle de mes pensées? Drôle de hasard!

- " C'est la première fois que je t'aperçois en robe! Tu es... époustouflante!

J'en profite pour changer de sujet. Je la vois rire. Je ne l'ai jamais vue autre qu'en kilt bleu et vert, en chemise, bottes fauves et en béret saxon incliné. C'est... époustouflant, oui!

- " J'aimerais devenir une vraie femme, tu sais. Pulpeuse. Envieuse. Séduisante. Charismatique. Belle. "

Mon regard passe de l'amusement à la tristesse. Si j'avais une maman, m'aurait-elle appris? Ou aurait-elle engagé une nourrice? Avec des si, on refait le monde paraît-il. Et si je le faisais? A ma manière? J'ai mon destin en main. A portée de missive. La plupart de mes choix sont à venir. Je regarde alors le vélin sous mes doigts fins. Lorsque ma voix porte dans la pièce, mes mirettes sont fixées sur celui-ci.

- " Cette lettre est destinée à la Duchesse de Champagne. Je suis passée à l'hérauderie cette après-midi. Je sais d'où je viens. Je pense qu'elle peut m'aider. Regarde! "

Alors que ma protectrice dévore mes mots, je la toise avec discrétion. Je garde mes commentaires pour moi.

- " Marjo se fait désirer. Je ne sais trop ce qu'elle traficote. Elle doit mener une bataille bien rude avec une dinde selon moi! "

J'imagine la scène. Un regard féminin avide de pouvoir. Un rictus de confiance. Une lame cuisinière. Une tentative de meurtre. Une esquive. Un juron. Une seconde tentative. Une prise d'otage. Une menace. Une tignasse en pagaille. Une rire de fillette qui scinde le tout. Je ne peux me retenir plus longtemps. J'ai l'imagination fertile!

- " Sais-tu où je pourrai trouver la Duchesse? Je pourrai peut-être lui remettre ce pli en main propre! As-tu vu Seurn au jour d'hui? Et qu'as-tu fait de ton affublement traditionnel?"

Je ne cherche pas à savoir s'ils passent du tout ensemble. J'ai simplement une toute petite minuscule chose à lui dire. Et puis, je suis très curieuse!
_________________
Syuzanna.
Epoustoufflante ? Ainsi déguisée ? La vérité est qu'elle se sent vulnérable. Même si la dague est glissée dans sa botte. Vulnérable et faible. Comme si coeur était mis à nu. Le simple fait d'être une femme... Cela l'intimide. Comment se comporter dans le monde avec cet aspect ? La tenue saxonne la protège. Protège des hommes. De l'amour. De la faiblesse.
Elle secoue la tête, ses cheveux épais, roux, flamboyants, lui tournant autour des épaules, du menton, des reins.

La jeune fille lui dit qu'elle a retrouvé sa famille. Qu'elle sait d'où elle vient. Et qu'elle aimerait être une femme. Une vraie femme. Elle l'étudie. Loh est si jeune... Quatorze ans... Ses formes ne sont pas encore complètement développées. Elle parait si peu confiante en elle ! Prise d'une impulsion, elle la serre contre elle, et lui baise le front. La jeune fille ne le sait peut-être pas, mais la Saxonne, grâce à elle, a laissé les sentiments pénétrer son coeur. Pour la première fois. Elle qui n'a jamais connu que la guerre, le sang, les combats, le maniement des armes... La voilà qui s'ouvre enfin. Et ce flot d'émotion la terrorise autant qu'il la grise. Est-on plus fort ou plus faible, lorsque l'on aime ?
Elle aimerait lui apprendre à devenir une femme. Elle se promet, sans pourtant l'avouer à sa jeune amie, qu'elle fera tout pour.


Elle s'écarte de la demoiselle, et lui sourit doucement.

- Je ne sais guère où trouver ta Duchesse. Mais lui écrire est un bon moyen de la faire venir. Où du moins, d'apprendre où la trouver. Je suis heureuse que tu saches d'où tu viens, ma Loh.

Elle perd son sourire, qui se change en grimace, lorsque l'adolescente lui parle de ses habits quotidiens.

- Marjo... Elle me les a fauché. Elle voudrait que je m'habille en dame. Et j'allais justement protester et récuper mes affaires.

Elle enchaîne :

- Soren ? Aujourd'hui, je ne l'ai pas vu. Je le croise de temps en temps en taverne, mais point en ce jour.
_________________
Soren
[Compiègne, Champagne, Domaine Royal de France. Maison des miliciens. Début 1460.]

La lampe dégage une lumière faiblarde, éclairant à peine l'immense pièce où je me trouve. Dans un coin, deux femmes discutent entr'elles. Elles se nomment Blackat et Pearla. Elles se sont présentées en arrivant pour prendre leur poste de milicien. Je ne sais rien d'autre d'elles. Ce soir je serais avec donc avec trois femmes. Acantha, elle, est partie faire la première ronde de nuit.

Loh a raison. Je suis bel et bien un homme à femmes. J'en ai la preuve irréfutable cette nuit. Hé! Trois femmes pour moi seul ce soir! Je lui cacherai juste qu'elles sont payées pour être avec moi ce soir. Je joue nerveusement avec mon couteau. Ce pauvre morceau de bois ne m'a rien fait, mais il risque de n'être plus qu'un tas de copeaux au petit matin. Oui... un tas de copeau qui disparaitra d'un revers de la main ou d'un coup de balai. Triste fin pour un morceau de bois. Il n'aura servi à rien. Il rêvait de se transformer en meuble, en bouclier, ou de chauffer une famille dans une cheminée. Il rêvait de faire partie d'un enclos ou de devenir une pipe. Il ne deviendra rien. Tout simplement. Il faut bien que je passe mon humeur massacrante sur quelque chose.

Je tourne la tête vers la fenêtre. Au travers j'aperçois le ciel étoilé et un petit morceau de lune. Cette vision, c'est tout ce qui me reste de mon pays. Jørgen, Niels, Svend et tous les autres... En cet instant, ils ont la même vision du ciel que moi. Le ciel... Depuis mon départ forcé du Jutland, c'est tout ce que je peux partager avec eux... le ciel! Mon pays me manque. Le Jutland me manque. J'ai envie de courir dans les rues d'Aalborg, sentir l'odeur du pain frais sortir des échoppes des boulangers, me promener sur le bord de mer. J'ai envie de faire la paix avec mon père, le convaincre que cette affaire de mariage était malvenue. J'ai envie de tourner la page.

Ici, je ne suis qu'un étranger. Tout comme le tavernier du refuge des ivrognes, les deux dames qui me tiennent compagnie ce soir doivent me prendre pour un artichaut pur et dur. Les champignons ne comprennent pas que je ne suis pas plus artichaut que champignon. Je suis danois par les mille enfers de Hel! Danois! Me comprenez-vous à la fin? Non, sans doute pas. Mon accent ne m'aide pas. Sans doute. Je dois parfois encore me tromper de mots, utiliser une expression mal à propos. Quand on quitte son pays pour aller vivre ailleurs, on est un étranger partout. Là où l'on va. Là d'où l'on vient. Il faut que j'oublie le Jutland. Je ne suis plus le bienvenu là-bas. Et je ne suis pas le bienvenu ici. Je ne défends plus mes terres. Je suis un mercenaire. Quelqu'un qui demande salaire pour se battre. Je ne défends plus une cause. Je défends une vie. Ma vie... Ma vie et celle de Loh...

La petite ne l'a sans doute pas encore compris. Comment l'aurait-elle pu d'ailleurs quand moi, je viens à peine de le comprendre? Cette gifle m'y a t-elle aidé? Sans doute oui! Elle m'a remis les idées en place. Je ne peux me contenter de défendre qu'une vie, et la mienne de surcroit. Je n'ai plus de terre à défendre? Alors il me faut défendre autre chose... autre chose ou... quelqu'un d'autre! Elle est arrivée dans mon existence à un drôle de moment. Une défaite... une énième blessure, plus sérieuse que les autres. Je l'ai trouvé belle, un brin casse-pied mais tellement attachante du haut de sa jeunesse. Elle débordait de vie quand la mienne s'écoulait au travers de cette blessure. Elle a stoppé l'hémorragie, au propre comme au figuré. Je m'y suis attaché, trop attaché. Elle était, dès lors, devenue un danger pour moi. Un mercenaire, un noble déshérité et banni, ne doit pas s'attacher. A personne! Je n'avais d'autres solutions que de quitter le couvent où elle m'a soigné. Pour elle et pour moi. Mais quand je l'ai retrouvé à Compiègne, par le plus grand des hasards, j'ai compris qu'elle pouvait m'aider. Je ne peux me contenter de ne défendre que ma vie. Elle est jeune, fragile et seule. Pendant quelques semaines, quelques mois, je redonnerai un sens à cette vie d'errance, à ma vie. Je la protègerai des multiples dangers qu'elle croise chaque jour sans s'en rendre compte.

Où ai-je fait une erreur bon sang? Où? Je savais qu'elle constituait un danger pour moi. Je le savais et je n'ai pu l'éviter. Pfff... La gifle a fait mal, très mal. Oh, pas physiquement bien sur, mais mentalement. Je ne suis pas un fils de duc Loh. Ici je ne suis rien, rien ! Juste un étranger, un mercenaire, un homme qui peut mourir sur un champ de bataille dans l'anonymat le plus complet. Je l'ai choisi. Oui, ça plutôt que le mariage! Et si c'était à refaire, malgré tout ce que cela me coute encore aujourd'hui, je le referais.

Je ne l'ai pas revu depuis cette fameuse gifle. J'avoue que je n'ai pas cherché à la retrouver. Je sais que Syu est avec elle, qu'elle la protège. Je dois laisser passer le temps. Je veux qu'elle oublie. Il faut qu'elle retrouve le Søren qu'elle a connu avant. Avant ce baiser. Je redeviens son protecteur et uniquement son protecteur. Là est ma place, elle a raison. En attendant, j'ai commencé à étudier le trajet qui nous mènera dans le Maine. J'ai déjà aussi acheté les chevaux. On ira plus vite à cheval et on voyagera plus en sécurité.

La porte s'ouvre, me permettant de sortir de mes réflexions pour reprendre pied avec la réalité. Acantha a terminé sa ronde et vient se réchauffer près de la cheminée. Il fait froid ce soir. Oui, il fait froid mais il ne fait pas aussi froid qu'au Jutland... Le Jutland... Comment cela se fait-il que je reviens toujours au Jutland? Dis-moi Loh, viendras-tu danser avec moi au Jutland? Avec les lames, entre les lames?

J'enfile mon manteau, rabaisse la capuche sur mon visage et sors faire ma ronde. C'est mon tour. Je suis payé pour ça. C'est ce que je sais faire de mieux. Le métier des armes, c'est la seule chose que je sais faire, oui! Parfois, je me demande si je n'aurais pas mieux fait de savoir mieux embrasser.

_________________
Loh
[Auberge du Chat Perché. Avec Syuzanna. Toujours.]

Ma protectrice sent la lavande. Son baiser sur le front est du même acabit. Cette odeur émane des habits de Marjo. Elle ne se doute de rien. Si elle venait à l'apprendre, le spectacle serait des plus divertissants. Je souris sans me retenir. Mes prunelles pétillent.

- " Je suis très curieuse, tu me connais. J'ai repéré des tonneaux de calva dans la cave. Tes habits traditionnels y sont peut-être posés. Toutefois... "

Ma bouche se resserre en un séant de volaille. Je plisse les mirettes. Mes lèvres torchent vers la droite en une réflexion intense. Mon buste est totalement tourné vers ma préceptrice. Même si ma main droite est toujours posée sur la missive ducale. Celle-là même toujours posée sur le bois poli du comptoir. Bref. J'en viens à analyser le tissu soyeux de ma paluche libre.

- " ... Si tu découpes la robe au niveau extérieur des jambes, tu peux acquérir une meilleure mouvance. A mon avis. Tu serai ainsi féminine et féline. Je ne suis hélas pas assez agile de mes doigts pour m'en occuper mais... attends un grain de sablier! "

Je dois absolument envoyer cette lettre. Une pigeonne? Personne dans les parages à duper. Un hibou? Ils dorment tous à cette heure avancée de la journée. Une hirondelle? Ce n'est guère la saison. Un bourdon? Une libellule? Une grenouille? Je dis n'importe quoi.

- " Marjo? Marjo! MARJOOOOOO! "

Je m'impatiente. Nom d'une baguette de pain brûlée, mais que fait-elle?! Son fiancé doit en être la cause à mon avis! Les hommes sont toujours présents au mauvais moment! Ils agissent comme des manches à balai troués incapable de ramasser la moindre parcelle de poussière lorsqu'on a besoin d'eux. Et ils s'évaporent... lorsqu'on a besoin d'eux aussi! Bah. Tant que la propriétaire soit satisfaite. Ça suffit!

Je croise le regard de mon amie saxonne. Elle reste calme. Elle semble éberluée. Je m'agite. Je tente de chercher un objet qui me permettrais d'envoyer ce maudit parchemin. Une sonnette? Non. Une paire de couverts? Hum. Une serviette! Raah! Un gamin! Oui! J'en aperçois un dans la rue devant l'auberge. Il est blond comme le sable froid de Bretagne. Il a les yeux verts d'un chat de gouttière. Et il sent la balayette. Tant pis!

- " Petit! Petit! "
- " Hé! T'es pas plus grande que moi d'abord! "
- " Je ne t'ai pas demandé la couleur de tes sous-vêtements que je sache! "
- " On ne parle pô comme ça à un plus jeune que soi! "
- " Mais tu es désagréable ma parole! "
- " Je ne m'appelle pas "ma parole", mais Godrieck! T'as qu'à passer ton chemin si t'es pô contente! "
- " Je vais l'étriper... Hum! Non, non, reste ici s'il-te-plaît! "
- " Ça fera 10 écus! "
- " Quoi? "
- " Ça fera 10 écus pour la course. Si tu me fais répéter une troisième fois, ça fera 15 écus. "
- " Sale petit... C'et les deux tiers d'une paie! D'accord! "
- " Les sous d'abord! "


Pas de bol. C'est le seul gamin de sortie ce jour-là. Personne en vue. C'est désert. Pas le choix!

- " Ah ça non! Je t'explique avant! "
- " T'es pas en droit de négocier. Les pièces! "
- " ... "
- " Merci la vieille! Alors cette course? "
- " Nom d'un gras cancrelat écrasé son mon pied avec force... J'ai une missive pour la Duchesse de Champagne. C'est urgent. "


Pas un "d'accord". Ni un "merci". Ni tout autre chose. Il est déjà parti. C'est mieux ainsi! Même en pleine bêtise, je n'ai jamais été aussi insolente. Des grenouilles dans le bénitier, c'est gentil!

- " As-tu confiance en moi? "

Me revoici à l'intérieur. Je me poste face à la guerrière féline. Et sans attendre une réponse de sa part, je m'abaisse. Je me retrouve face au bas de la robe blanche. Mes genoux sont pliés. Je coince ma langue entre mes dents. J'ai besoin de toute ma concentration.

CRACK. CROUNCH.

Je fends le tissu de chaque côté de ses cuisses. C'est élégant. On peut ainsi admirer l'extérieur de ses gambettes. Du bas jusqu'en haut. Enfin presque. C'est rudimentaire. Mais Dame Tribun ou Marjo pourra peut-être peaufiner le tout. En espérant que cette initiative ne m'attire pas les foudres de la porteuse. Ou de la donneuse!

Ce qui pourrait me foudroyer, à la limite, serait l'arrivée d'une personne. Connue. Inconnue. Et nous voir ainsi positionnée. Elle, debout, à me regarder faire. Et moi, penchée, à hauteur de sa ceinture. Hum!
_________________
Soren
[Compiègne, Champagne, Domaine Royal de France. Auberge du chat perché.]

Il est temps pour moi de rentrer au bercail. J'ai repoussé cet instant le plus que je le pouvais. Il va me falloir présenter mes excuses à Loh et je n'ai jamais été bon dans ce domaine. Ça ressemble trop à de la diplomatie. Les rues de Compiègne sont bondées. Il y a foule. Qu'est-ce qui justifie une pareille activité? Une foire à l'andouille? Un concours de lancer de chopine? Un montreur d'Ours renommé? Une maison close itinérante célèbre faisant halte dans la ville? Il me faut zigzaguer sans cesse pour avancer.

Certaines personnes semblent très pressées, comme ce mioche pré-pubère qui détale à toutes jambes en se faufilant entre les grandes personnes. Enfin, entre toutes les grandes personnes sauf....moi! Mon ventre s'en souviendra pendant longtemps, mais c'est lui qui se retrouve devant les quatre fers en l'air. Je l'aide à se relever. Je le sermonne un peu. Didiou! Quand il y a tant de monde, il faut faire plus attention. Il est sur le point de partir, se foutant littéralement de mon discours moralisateur lorsque je l'intercepte par l'épaule. Le gamin n'est d'ailleurs pas loin de faire un autre vol plané tellement mon geste est preste et sa vélocité excellente.


Tu as fait tomber ce vélin gamin! Il est à toi! Fais attention à ce que tu fais! Sans cela, ce sont tes braies que tu oublieras la prochaine fois.

Je souris. Visiblement, ce gamin est porteur d'une missive d'une personne A à une personne B. Mon esprit vagabonde. Une missive diplomatique? Un rendez-vous entre brigands? Une lettre d'amour? J'essaie d'imaginer ce qu'un gamin si jeune peut bien transporter comme message. Bah! De toutes façons, s'il continue à se comporter ainsi, ce message n'arrivera jamais à destination.

Le chat perché pointe enfin le bout de son museau. Je souffle lourdement. Je suis prêt à affronter Loh de la Chaudière. La porte grince à mon entrée. Je reconnais dans la salle commune la fleur blanche de Loh dans ses cheveux. Je l'entraperçois par là. L'heure est venue de s'excuser. Je rassemble mes forces. J'aurais préféré me retrouver en plein cœur d'une bataille sanglante, j'aurais eu plus de chances de m'en sortir indemne.


Loh, je tiens à m'...

En avançant, Je relève la tête. Un drôle de spectacle s'offre à moi... Loh accroupie devant une dame que j'ai du mal à reconnaître. Pour une surprise, c'est tout une surprise! J'avais déjà entendu parler d'histoires de dames aux mœurs déviantes, je croyais que c'était des histoires de vieilles nan ça! Mais il faut croire que non! Tout s'explique maintenant! Je suis peut-être un homme à femmes... mais je ne suis pas le seul à être.. à femmes!

Une deuxième surprise m'attend au détour de cette scène surréaliste. La... comment dire.. partenaire de Loh, c'est... Syu!!!! For Fanden! Tout s'explique! Tout s'éclaire! L'amitié entre les deux donzelles, leur complicité, le fait que Syu désire se prendre pour un homme, cherche sans cesse à éviter tout ce qui peut la faire passer pour une femme. Pas de doute, elle est sa protectrice, sa protectrice rapprochée, sa garde du corps. Est-elle aussi sa garde du cœur?

Inutile de tergiverser. Je fais demi-tour et monte l'escalier le plus discrètement possible. Tout ceci ne me regarde pas. Pas du tout. Mais je comprends mieux désormais pourquoi Loh m'a repoussé.

_________________
Syuzanna.
CRAC ! Et voilà que la robe se retrouve fendue jusqu'à mi-cuisses. Et les prunelles de la Saxonne qui s'agrandissent de surprise. Elle s'observe, un peu étonnée, mais si satisfaite du résultat qu'elle en sourit.
La porte s'ouvre à la volée, cédant la place à Soren. Il s'apprête visiblement à dire quelque chose, mais s'arrête net. Eh bien ? Qu'a-t-il ? Elle jete un coup d'oeil à Loh. Oh ! Vue de l'extérieur cela peut préter à confusion... Par les Dieux ! D'un geste de la main, elle remonte Loh sur ses deux pieds. Mais trop tard, le voilà qui s'échappe.
Elle éclate de son rire cristallin, tandis qu'une porte, à l'étage, claque sur ses gonds. Comment a-t-il bien pu songer que...
Elle secoue la tête, et laisse tout bonnement Loh en plan. Il faut qu'elle explique au Danois que c'est un incroyable malentendu.
Elle monte les marches, la démarche souple. L'adolescente à raison, elle se meut bien mieux ainsi. Sa démarche même en est rendue plus féline.
Ils avaient raison, finalement...Elle s'est trouvée. Elle est elle-même, dans cette robe blanche. Bien plus qu'elle ne l'a jamais été auparavant.
Sans peine, elle arrive devant la porte de Soren. Elle toque, et entre sans y être invitée. Elle le trouve assis sur le lit. Il a un air hébété qui fait sourire la Saxonne. Elle s'avance vers lui, et s'agenouille à ses pieds. N'ayant pas encore trop conscience que certaines positions offres des vues sur des endroits auparavant dissimulées, la rousse le regarde gentiment, sans cessé de sourire, terriblement amusée par ce que le Danois a imaginé.


- Elle arrangeait ma robe, fait-elle. J'aime énormément Loh. Comme une soeur à qui je dois tout apprendre. Vous comprenez ?

Il avait raison. Mais elle ne le lui dira pas. Il avait raison en la poussant, l'autre soir, à quitter ses vieux habits. Grâce à lui, et à Marjo, elle vient de comprendre qu'elle peut concilier ses talents de guerrière avec les talents d'une femme normale. Qu'elle n'a pas besoin de choisir entre la violence et la douceur. Que s'attacher de rend pas faible. Qu'aimer est une force, et non un poids mort attaché à ses bottes. Sauf que malgré tout, les mots, l'étalage de sentiments, ce n'est pas trop son truc, à Syu.
Elle se contente de lui sourire, en essayant de le lui faire comprendre ainsi.
Elle se redresse lentement, et l'observe. Il faudrait qu'ils redescendent, Loh doit se demander ce qu'ils fabriquent. D'un geste, autoritaire malgré elle, elle lui attrape une main, et l'entraine jusque dans les escaliers, puis dans la salle de l'auberge. Elle le relâche, et va se jucher sur le comptoir, les observant tour à tour, heureuse enfin, de les avoir trouvé, et de s'être trouvé elle-même
.
_________________
Loh
Loh, je tiens à m'... quoi? M'enquiquiner? M'délester? M'ramener au couvent? Pourquoi est-ce si compliqué? Il avance. Je recule. J'avance. Il recule. Un duo accordé. Une danse. Le tout est de ne pas se marcher sur les petons. De se coller l'un à l'autre. Sans s'étouffer.

Appuyée sur ma préceptrice, elle s'est esquivée sans que j'ai eu le temps de me rattraper dignement. Rejoignant le guerrier danois à l'étage. Je me suis retrouvée le nez presque entre deux planches de bois. A plat. Comme une peau d'ours devant un feu de cheminée crépitant. Mais qu'a-t-il de plus que moi? Pourquoi est-elle si pressée de le rejoindre à l'étage? Pourquoi ne s'est-il arrêté? Même après ce qu'il venait de se passer? N'imagine rien Loh! N'imagine rien!

Je toussote d'innocence. Pourvu que personne ne m'aie vue! Surtout pas ce sale garnement!

Je me suis relevée. Avec le peu de dignité qu'il me reste. Plus de peur que de mal. Le choc est mental. Non physique. Je passe mes paluches sur ma robe aux couleurs du ciel. Je la déplisse. J'enlève quelques grains de poussière fictif. Et je pense. Je suis seule. Je n'ai donc que cela à faire.

Je m'avance vers l'unique fenêtre de ce coin de l'auberge. Le verre est légèrement opaque. Un tantinet coloré. Mais il est possible de discerner les formes et histoires personnelles des passants. Tiens, celui-là! Avec son sombre chapeau pompeux et strict. Il a un air si mélancolique. Ses hautes fonctions lui pompent tout son temps. Je suis presque certaine qu'il a perdu son épouse récemment. Et qu'il n'a su avoir aucune descendance. Un autre. Cette petite fille aux deux nattes noir de jais. Elle sautille. Une bourse à la main. Celle de sa maman. Ou de son papa. Ou des deux! Elle a été sage. Alors, elle a droit à une récompense. On l’envoie s'acheter des bonbons. Ou encore. Cette vieille dame. Avec sa canne chancelante. Elle a eu une vie bien remplie. Elle en est fière. Elle y repense sans cesse. Sa jeunesse à tomber amoureuse d'un riche baron. Demeure somptueuse. Sept enfants. Dont trois héritiers. Voyages à travers le Royaume de France. Ces balades en calèches. Elle sourit, heureuse. Ça se voit!

Je souris à mon tour. J'aime observer. Imaginer. Créer mes propres histoires. Dommage que je ne puisse en faire de même avec la mienne, comme bon me semble.

Je me retourne. Les revoilà! Je les regarde de mes mirettes océan. Je suis debout. Droite comme un i. J'ai les mains jointes. Devant moi. Comme une fillette obéissante. Je ne dis rien. Je n'ai pas eu l'occasion de parler depuis l'entrée de Seurn à vrai dire. Je les vois main dans la main. Mon cœur se serre. Mais je ne laisse rien paraître. Toutefois, ma mâchoire se crispe. Malgré moi. N'imagine rien Loh. N'imagine rien! Tu n'es pas en droit de réclamer! Tu n'es qu'une fillette! Ah, ils se lâchent!
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Soren
A peine arrivé dans la chambre que je tourne en rond comme un fauve. Mon esprit fonctionne à toute vitesse. La révélation d'en bas m'a en quelque sorte réconforté… mais il ne m'a pas déculpabilisé. Je me suis conduit comme un chef de guerre en terrain conquis. J'ai pris ce que je désirais. Mais je l'ai pris car je croyais aussi répondre à un désir partagé. Je me suis trompé, c'est évident maintenant. Oui, elle est amoureuse, je le lisais dans ses yeux. Oui, elle est amoureuse... mais pas de moi! Mon orgueil de mâle un instant écorché retrouve son éclat: je ne peux lutter à armes égales dans cette bataille. C'est tout simplement contre nature. Je n'ai donc pas de regrets à avoir. Aucun. Non, aucun! Il n'en reste pas moins que je dois lui faire des excuses… Et je ne veux pas mal paraître non plus! J'ai une dette envers elle, une dette qui remonte à bien plus loin que cet incident.

Assis sur le lit, mon esprit est complètement plongé dans ces réflexions. J'ai envie de faire valser les bottes au loin. Je suis sur le point de me mettre à l'aise, de m'étendre quand Syu débarque à l'improviste sans même attendre que je l'autorise à entrer. J'en reste littéralement coi. Je dois lui offrir un regard bien niais tellement la surprise est grande! Hé quoi! N'ai-je plus le droit à mon intimité? Même dans la chambre? Hé quoi! Il va falloir que je fasse attention la prochaine fois que je m'asperge d'eau partout partout. Ou alors, il va falloir que je bloque la porte avec une chaise, pousse l'armoire devant la fenêtre et vérifie qu'aucun vilebrequin n'a fait de trou dans le plancher ou dans le plafond!

Elle parle, elle parle. Je l'écoute mais mon esprit n'arrive tout simplement pas à s'accrocher aux phrases qu'elle prononce. C'est comme si nous étions dans deux mondes parallèles différenes. Parfois certaines bribes cognent au bon endroit.


Syuzanna. a écrit:
J'aime énormément Loh…à qui je dois tout apprendre. Vous comprenez ?


Mais pourquoi me raconte t-elle ça? Manque t-elle donc à ce point de pudeur pour me raconter tous ces détails intimes? D'ailleurs, à propos de pudeur, avant son kilt ne lui cachait pas grand chose des cuisses.. Mais maintenant, c'est pire! Elles sont mises en valeur par une robe fendue juste à propos! Moi un homme à femmes? Si j'étais vraiment un homme un femme, je trousserais une telle créature, dans un tel accoutrement, et ce sans autre forme de procès! Heureusement, je ne suis pas un homme à femmes. Et elle, elle n'est attirée que par une donzelle… fort jolie au demeurant. Mon esprit est cependant toujours occupé à trouver ce que je vais bien pouvoir dire à Loh lorsque Syu me prend la main et m'oblige à descendre les escaliers avec elle. Hé, elle est autoritaire la saxonne! Autoritaire! Hum… je me demande si elle est aussi autoritaire quand… Soren! Elle t'a perturbé bien plus que tu ne le penses la scène tout à l'heure pour imaginer de telles choses sur un simple mot comme…autoritaire! Je me demande même si elle implique la fill… Non! Non! Coupe ça tout de suite au montage! Que ça ne paraisse plus! Ton esprit ne doit pas chevaucher ce genre d'idées, ce n'est pas le moment surtout que….

…Loh est là! Elle est plantée devant moi, elle attend visiblement que je parle. Et dire que je n'ai pas fini de préparer mon discours! Un jour, il va vraiment falloir que j'apprenne l'art de la diplomatie, le discours et tout ça quoi… Je la regarde droit dans les yeux. La dernière fois, ce regard portait désir et passion. Maintenant, il se doit de porter honneur et confiance. Mais que lui dire? Que faire? Supplier en rampant à genoux? Lui rendre sa gifle? Quelque chose entre les deux peut-être?


Damoiselle de Gorron, j'ai commis une erreur, je me suis montré irrespectueux envers votre personne….

Mais si tu m'avais dit dès le début que tu préférais les femmes, on aurait facilement évité tout ce tracas!

… J'ai commis un affront à votre rang et à votre éducation…

Éducation, éducation, je comprends maintenant comment s'évaporent toutes les frustrations que ressentent les sœurs cloitrées dans un couvent!

Je respecte votre choix…

Enfin même si je n'arrive toujours pas comprendre comment une femme peut choisir d'aimer une autre femme!Syu est une jolie femme oui mais en principe, ce sont les hommes qui remarquent ça...

… Comptez sur moi pour vous amener saine et sauve à vos parents.

D'ailleurs pendant le voyage, je ne prendrai même pas une chambre contiguë à la tienne et à celle de Syu. Ça vaut mieux si je veux pouvoir fermer l’œil.

Vous savez damoiselle, vous aviez raison, je suis un fils de duc et je dois me comporter ainsi.

Mais où as-tu été péché que je suis un homme à femmes? Combien de dames ai-je mis dans mon lit depuis que je suis à Compiègne? Demande donc à Ananke si je l'ai courtisé? A Fraisexotik si je l'ai basculé? A Lacienda Auclair si j'ai cédé à ses avances peu subtiles? A Syu si j'ai déjà eu des gestes déplacés envers elle?

Quand à vous, il est vrai que vous êtes…une damoiselle qui a un bel avenir devant elle.

Tu sais, tu n'es plus vraiment une fillette. Regarde-toi dans un miroir. Regarde ces formes de femmes ça et là. Regarde le désir que tu inspires quand tu passes dans la rue

Je vais vous conduire dans le Maine damoiselle de Gorron, et ensuite je retournerai au Jutland, j'écouterai mon père et me marierai avec celle qu'il a choisi pour moi.

Elle est presque aussi belle que toi tu sais, mais si tu l'entendais glousser quand un jouvenceau sort une bêtise d'une platitude à en pleurer. A croire qu'elle a un chou-fleur dans le ciboulot!

Que diriez-vous de trinquer à notre avenir qui s'annonce sous les meilleurs auspices?

Ça m'a donné soif de parler moi, mais ce soir, j'ai envie de boire. Plus que de raison. A en rouler par terre. A danser sur les tables. A embrasser toutes les serveuses et à tripoter les plus jolies. Je suis un homme à femmes Loh? Je te montrerai à toi, la femme à femmes, ce que cela veut dire! Bon sang, comment ai-je pu croire un instant que toi et moi...
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Loh
Pourquoi me vouvoie-t-il? Je l'observe de mes yeux azurs en amande. Lui aussi à de magnifiques mirettes claires. A s'y perdre aisément. Ou s'y noyer. Péjorativement.

Pourquoi est-il si distant? A-t-il enlacé ma protectrice pour agir ainsi? Pourquoi semble-t-il si guindé? Sont-ils ensemble? Essaie-t-il de me l'avouer? Pourquoi me parle-t-il d'éducation et de rang? Ne suis-je pas assez bien pour lui? Pourquoi se marier avec une donzelle que l'on ne connaît guère? Pire, que l'on n'aime pas? Tu as Syu à présent, non? Pourquoi trinquer? Je ne vois pas ce qu'il y a à fêter.Veut-il à nouveau prouver que c'est un guerrier à la boisson féminine facile?

Je suis malheureuse. J'en viens à baisser les yeux vers le sol. Je regarde mes pieds. Mon regard s'embue. Je n'arrive à rien dire. Ma gorge me brûle. J'étouffe. Mon corps entier se dérobe. Comme si je n'étais plus rien. Je me sens sale. Inutile. Hideuse. J'ai envie de me cacher. Je n'ose regarder personne. J'ai envie de partir. Bonne idée!

Un pied devant l'autre. J'avance. Non. Je recule. Doucement. Je me dérobe. Je profite de ma longue chevelure ondulée pour cacher mon visage. Je cogne la porte de bois de l'entrée. Rapide comme un poisson attrapé entre deux mains, je glisse hors de l'établissement. Et je me mets à courir. Courir. Courir! Le plus loin! Le plus vite possible! Sans vraiment regarder devant moi.

[A l'orée de cette maudite forêt.]

Nous sommes en plein jour. Que peut-il m'arriver? Quand bien même, je m'en fiche. Bordée de quelques rayons lumineux hivernaux, la forêt a l'air accueillante. Rien avoir avec les quelques nuitées précédentes. On dirait même qu'elle me sourit. Des oiseaux chantonnent. Un vent léger chatouille les épines des pins. Ils rient. Assise sur un tronc coupé, je ferme les yeux. J'écoute le chant de la forêt. Elle m'apaise. Je ne pense à rien.

J'ouvre les yeux. Lentement. De l'herbe. Encore de l'herbe. Je n'entends aucun bruit du village . Pas d'épée forgée. Aucun cri d'enfants. Nul marchand tentant de vendre ses fruits ou autres denrées.

Une flaque gît à mes pieds. Étrange que je ne l'ai pas vue. Je ne l'ai pourtant pas évitée. Mes bottes en sont témoins. Je m'y penche. Mes coudes sur mes genoux. Les jambes légèrement écartées. O bonheur de robe longue! J'y vois mon reflet. Lisse. Une peau de velours. Claire. Une bouche pulpeuse. Un regard mélancolique. Aussi bleu que l'océan baigné par un soleil d'été. Un nez fin. En trompette. Des cheveux ondulés aux reflets auburn. Ou flamboyant selon l'humeur. Tressé dans le bas. Le haut laissé rebelle. Une belle harmonie. Même si je ne suis pas en pleine possession de mes formes de femme, il est vrai que je n'ai pas à me plaindre.

Et cette fleur blanche dans ma tignasse. Je l'attrape. Je la regarde. Je la fais valser entre mes doigts fins. Au couvent, Seurn la remettait souvent en place lorsque je lui posais une question indiscrète. Il me regardait. Il me souriait. J'aimais ça. J'aime ça.

Et cette lettre à cette Duchesse. J'espère qu'elle sera arrivée à bon port! Sale gamin!

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Syuzanna.
Par les Dieux ! A-t-il perdu l'esprit ? Pourquoi ressemble-t-il à l'un de ces guerrers Saxons ? Pourquoi est-il distant et froid ? Et voilà qu'il les invite à trinquer ! Il y a quelque chose à fêter ? Est-on censé célébrer l'idiotie des hommes ? Mais voilà que Loh se recule. L'air de rien. Puis s'échappe. Aussi vite qu'un chevreuil poursuivit par un chasseur. Syu saute du comptoir, et se plante devant Soren, furieuse, et inquiète.

- Non mais, regardez un peu ce que vous avez fait ! s'écrie-t-elle.

Tout ceci est un peu compliqué, pour la Saxonne. Pourquoi Loh les a-t-elle regardé comme ça ? D'un air accusateur. Par les Dieux, aurait-elle cru que... Elle jete un regard agacé au Danois. D'abord lui qui s'imagine qu'elle-même et Loh... Puis voilà que Loh croit que Soren et elle... Mais où vont-ils chercher tout cela ? C'est à ni rien comprendre. A croire qu'ils veulent absolument se trouver des excuses pour ne pas s'avouer leurs sentiments.

Elle a une furieuse envie de le gifler. Mais pourquoi se retenir ? Peut-être parce que cela ne servirait pas à grand chose. Elle détaille le visage de Soren. Essaye de rendre son regard menaçant. Se détourne et se dirige vers la porte. Que faire ? Retrouver la jeune fille, ou la laisser aller en solitaire ?
La suivre. De toute façon, désormais, elle doit être loin. Elle ouvre la porte, tourne la tête vers Soren. L'inviter ou y aller seule ? Elle hausse les épaules. Il fait ce qu'il veut. Elle sort, mais se fige, et se tourne de nouveau vers lui.


- Alors ? lance-t-elle, exaspérée. Vous venez ou vous prenez racine ?

[Sur la trace de Loh]

Les yeux rivés au sol, la Saxonne examine les traces. Le chemin de terre battue, humide, est couvert de centaine de traces. Un gamin la bouscule. Elle l'attrape par le col et le foudroie du regard. Il doit avoir compris car il repart en courant et sanglotant. Tant mieux, elle n'a jamais supporté les marmots.
Elle croit reconnaître une empreinte. La même taille, la même façon de positionner les pieds. Elle suit les pas. Cette personne se déplaçait en courant. Il y a des chances pour que ce soit elle. Elle poursuit son chemin, sortant peu à peu du bourg, jouant des coudes pour imposer sa présence. Un sifflement admiratif, à sa gauche, lui fait redresser la tête. L'homme la regarde. Il est vêtu comme un nobliaux. Il s'approche d'elle, l'air sûr de lui. Tend la main vers sa joue. D'un geste rapide, elle enferme les doigts du fat dans son poing, et serre. De sa main libre, elle le gifle. Elle en a envie. Ca défoule. Pauvre homme, il n'y est pour rien. Il recule en protestant, invectivant, prenant les autres à témoins. Il commence à lui échauffer les oreilles. Elle quitte la piste, s'avance vers l'individu, et lui balance son poing dans le nez. Un crac ! Du sang. Il ne fallait pas l'énerver. Il tombe à la renverse, au milieu des pommes de terre et des citrouilles. Autour de lui, le peuple se gausse. Un homme, vaincu par une femme... On en fera des gorges chaudes durant longtemps.
Elle reprend son inspection des lieux. Les traces deviennent plus claires alors qu'elles quittent les endroits fréquentés.
La Saxonne s'arrête brusquement. Regarde autour d'elle. Devant elle. Sourit. Les pas se dirigent vers la forêt
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Erraa
[chateau de Gorron, Maine, Domaine Royal, Royaume de France, Europe, Terre, Système solaire...]

Assise à son bureau, à faire et refaire les comptes des coffres, la bailli ne voyait pas le temps passer. Les chiffres c'est tellement plus amusant que les humains! Au moins eux ils font ce qu'on dit sans se plaindre. Elle était sûre que si elle le décidait elle pourrait prouver que deux et deux ça fait 6! Mais bon quel intérêt? Si encore ça servait à nourrir les bêtes...Mais même pas!
Et la voila perdue dans ses pensées, le regard par la fenêtre à contempler sans le voir le magnifique paysage que lui offrent ses terres.

D'associations d'idées en vagabondages de pensées tout y passe. Dans l'ordre, dans le désordre et si vous veniez à la déranger maintenant elle ne se souviendrait plus de ce à quoi elle réfléchissait à l'instant. Et à l'instant se qui passait devant ses yeux c'était la guerre. Son choc à la tête, le sang partout, le combat entre la vie et la faucheuse. Ses cheveux qui ne repousseraient jamais. Son chignon toujours impécablemeent et stratégiquement placé sur son crane pour camoufler la clairière.

Puis son mari...Cet homme qu'elle avait tant aimé, qui la faisait rire jusqu'aux larmes. celui qui avait un jours pété les plombs et quitté la maison en emportant leur fille chez leur amie Eva puis qui s'était ravisé pour l'emmener dans un couvent. Ensuite pris de remords il était revenu presque en rampant pour s'excuser...mais sans le bébé. Et il ne se souvenait plus ni du nom du village ni de celui du couvent. Mais elle devait bien avoué que cela l'arrangeait. Ce bébé lui prenait tout son temps et elle ne pouvait plus travailler correctement. Alors elle avait fermé ce chapitre et passé à autre chose. La brune avait repris son mari et la vie avait continuait.

Toutes ces années où la pensée de sa fille ne lui faisait qu'un léger pincement au coeur. Après tout cette petite aurait été malheureuse avec une mère qui ne pense qu'au travail et un père qui disparaît régulièrement pendant des mois. Elle était loin la famille modèle du début.

Au suivant des souvenirs aller aller on se dépêche on a pas toute la journée! le prochain c'est LE rêve. Celui qui la hante depuis des semaines. Celui qui, dans un délire mystiquo-pyrétique lui a fait apparaître toute sa famille. Sauf que tous les personnes présentes étaient mortes. Elle avait vu ses parents, son frère et...sa fille. Sa fille! Sa Audrey. Elle aurait 14 ans aujourd'hui. La dernière fois qu'elle l'a vu la petite avait à peine un an.

Son regard se perdit encore plus. A ce moment précis les troupes ponantaises dans leur intégralités auraient pu débarquer chez elle que la baronne n'airait pas réagit. Quand elle pensait à sa fille, rien ne pouvait la distraire.

Son petit poupon aux yeux bleus..
Son bébé si joyeux. Si espiègle aussi. Elle ne cessait d'attrapait tout ce qui passait à sa portée. Avec un sourire Erraa pensa qu'elle aurait pu devenir une sacrée chipie. Etait elle vraiment morte comme le faisait croire son rêve? Non! Impossible!

Elle se secoua la tête comme l'aurait fait un chien qui s'ébroue en sortant de l' étang, insensible à la douleur toujours présente au niveau du choc. Il fallait faire quelque chose! Son mari avait encore disparu et cette fois et cette fois il n'y avait plus guerre d'espoir de le retrouver. Cette petite était tout ce qui lui restait. Et puis...La baronne commençait seulement à se l'avouer mais son instinct maternelle s'était réveillé la nuit ou sa vie n'avait tenu qu'à un fil. Elle voulait plus que tout retrouvé cet enfant et lui donner tout ce qui lui avait manqué.

Mais quoi? Et surtout comment? En ce moment la Bretagne depuis le Maine c'est...inaccessible. Problème? Il parait qu'il n'y a pas de problème, juste des solutions. Et cette fois la solution s'appelait Karyaan. Elle elle saurait. Elle sait toujours tout. Ni une ni deux la voila en route pour le chateau comtal. Comment ça il fait presque nuit? Ben pas grave la comtesse y est surement encore. Arrivée la bas la bailli pourrait se déplacer les yeux fermés. Un coup à gauche, deux coups à droite, troisième étage et hop on arrive devant la bonne porte.
Elle toque et entre-ouvre la porte.

Comtesse? Vous êtes là?
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Karyaan
[Le Mans, Palais des Comtes du Maine, bureau de la Comtesse]

Debout, face à la grande baie vitrée, verre de vin chaud à la main, la brune semblait perdue dans ses pensées. Le visage de marbre, son petit page attablé à son bureau, finissait de ranger le bordel de la journée. Quand il eut fini, il reporta son attention sur elle et fronça les sourcils.
Il l'avait vu plus d'une fois perdu dans ses pensées, mais rarement la mine aussi grave. La nuit tombait et le froid hivernal drapait la ville qui allait doucement s'endormir.
Quelque chose n'allait pas, c'était certain, il le sentait le petit homme. Depuis le temps qu'il la suivait, il commençait à la connaitre.
Il resta un long moment silencieux à tenter de déchiffrer ce visage d'opale, yeux rivés sur les jardins comtaux. Elle avait les bras croisés la Comtesse, et sirotait son verre, ailleurs.


Natha priqual, Malla Jabbress ?
(Un souci, Votre Grandeur ?)

Hum ?

Natha priqual... ?
(Un souci... ?)

Elle reporta alors son attention sur lui et lui sourit tendre.

Nau, ele ?
Non, pourquoi ?

Usstan xun naut zhaun...
(Je ne sais pas... )

Xun naut eszak, Ussta Bela...
Ne t'inquiète pas, Mon Trés...

Rare étaient les moments de véritable quiétude, de véritable tranquillité. Elle allait devoir attendre encore un mois avant qu'elle puisse enfin avoir un moment à elle. Et encore... pas sure sure.
Tous deux reportèrent leur attention sur la porte qu'on venait de cogner. Le petit homme se leva et se dirigea vers celle-ci pour l'ouvrir.
Souriant de voir qui venait d'entrer, la Comtesse fit volte face et déposa son verre presque vide sur son bureau, puis s'approcha de sa Baronne préférée. Bref regard au petit Paul, lui signifiant qu'il pouvait disposer.
Il s'inclina et s'éclipsa en silence.


Que me vaut l'honneur de votre visite si tardive Baronne ? Venez, allons nous assoir...

Mêlant le geste à la parole, elle s'approcha des fauteuils et se vautra dans l'un d'eux, invitant son amie à faire de même.

Je vous écoute.
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"La parole est l'arme du faible, l'épée l'arme du sot, j'ai choisi d'être faible et de m'entourer de sots."
Erraa
[Le Mans, bureau de la comtesse]

Y a quelqu'un c'est déjà ça. En même temps la comtesse est toujours là. Elle travaille trop. Elle se donne trop. Mais elle est comme ça. C'est pas faute d'avoir essayé de la freiner. Mais bientôt elle pourrait prendre des vacances plus que méritées.

Bonsoir comtesse. Excusez moi oui il est bien tard.

Imitant la comtesse, elle se laissa aller dans un fauteuil. Pour ça la croyance populaire avait raison. Les sièges des conseillers comtaux sont très confortable. Faut bien des compensations.

Je n'arrivais pas à dormir. j'étais en train de faire les comptes et je me suis mise à pensée. A tout et à rien...bref vous savez peut être que j'ai une fille? Elle est dans un couvent breton. Mais je ne sais pas le quel. Et la Bretagne en ce moment...C'est loin d'être la destination à la mode. Je me disais peut être que...enfin si vous avez un peu de temps vous pourriez m'aider à la retrouver. Ou au moins me donner une idée de comment faire parce là j'y arrive plus. J'ai passé 13 ans à me dire que cet enfant était la pire chose qui m'était arrivée et voila que maintenant elle me manque. Vous me trouvez horrible n'est ce pas! Moi en tout cas c'est se que je pense.

Une goutte salée coula sur sa joue. Il y avait encore une chose qu' Erraa voulait dire, mais c'était surement la phrase de trop. Osera? Osera pas? Bon vous serez pas étonné de savoir qu'elle osera. Parce que ça lui brûle la langue depuis un moment.

Et...Hum...Vous n'auriez pas par hasard...Enfin...un peu...de...de cette pâte brune qui m'aide à m'endormir?

Accro au travail, trop aimante de la pâte de pavot, presque veuve, es-tu sûre de vouloir retrouver ta mère petite Loh?
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