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Info:
Voleurs, mendiants, miséreux, bourreaux... Venez voir le Languedoc vu d'en bas.

[RP ouvert] Le Languedoc vu d'en bas

--Alissandre
Bonjour !
Ce RP est un RP ouvert, faisant suite à l'idée de LJD Mordric de créer en Languedoc un espace pour les personnages atypiques, de classes sociales défavorisées ou peu représentées (mendiants, voleurs, brigands, pauvres de toutes espèces, etc.). Âmes sensibles, s'abstenir.
http://forum2.lesroyaumes.com/viewtopic.php?t=572898
PJ et PNJs sont bien entendu les bienvenus Bon jeu !


[Lengadòc, lo meu amor]*
(Musique d'ambiance)



La potence l'attendait. Là, debout sur ces planches en bois vermoulu, en tête à tête avec le nœud coulant qui serait son dernier compagnon de route, il tentait encore de résoudre le mystère de son parcours.

Quelques semaines avant, il n'était encore qu'un bourgeois confortable, marié à une jeune donzelle qui lui avait apporté une dote assez ronde pour lui assurer de beaux jours et l'asseoir comme un notable incontournable de sa ville.
Peut-être que cela avait commencé à ce moment-là, ce jour où il était rentré un peu plus tard qu'à l'accoutumée et s'était attardé dans une taverne. En fait de taverne, on aurait plutôt dit un bouge de troisième zone, sombre et sale.
Pourquoi y était-il entré ? Il ne le savait même plus. Par contre, il savait pourquoi il était resté.

Une paire d'yeux noisettes entourés d'une cascade de boucles rouges feu. Voilà ce qui l'avait dévoyé. Il ne savait plus trop par quel sorcellerie il s'était retrouvé entre ses cuisses, sur une paillasse au fond d'une chambre de ce minable bâtiment, mais il se souvenait encore de sa jouissance, de son sentiment de pouvoir et de liberté. De son sentiment de virilité invincible. Ce jour-là, il était enfin un homme. Il avait pu oublier, l'espace d'un soir, son épouse aussi laide que frigide, qui lui donnait tant de fois envie de la frapper à mort.

Et il en était devenu dépendant. Chaque soir, il venait là, comme un assoiffé près d'une source d'eau claire, quémander sa part de fierté, mendier sa dose de luxure, vendre un peu de son âme contre une heure ou deux de puissance illusoire, en échange de quelques largesses en bijoux ou en écus. Ces yeux noisettes avaient quelque chose d'indéfinissable. Les gestes félins de cette catin, la plénitude de sa croupe, la fermeté de sa poitrine, sa voix rauque et ses soupires quand elle se donnait à lui avec un art consommé du plaisir, avec ce mélange de retenue et de vice, tout lui donnait l'impression d'un envoutement indicible. Sans avoir recourt à ces artifices grossiers qu'utilisaient les catins ordinaires, la féline l'avait possédé. Il était aux anges.

Bien entendu, il avait tout fait pour que ses frasques demeurent cachées : corruption, menaces, tout était bon pour assouvir son vice en toute tranquillité. Puis un jour, l'animale lui avait refusé ses faveurs. Il en tremblait encore de rage et de frustration. Qui était-elle pour se refuser à lui, l'un des plus riches notables de la ville ?
Elle avait alors demandé, de cette voix rauque à laquelle ses sens obéissaient plus vite que sa raison, de la protéger. Elle disait que certains avaient eu vent de leur liaison, et que sa vie était en danger.
Il avait ri. Oh, comme il avait ri ! Une liaison ? Cette catin croyait-elle donc qu'il l'aimait ? Il avait ri, puis il l'avait à nouveau chevauchée avec fougue. Non, il ne l'aimait pas, mais il en était fou. Il ne laisserait personne la lui prendre. Personne !

Sa passion n'eut plus aucune prudence. Il venait la voir, de jour comme de nuit, pour s'assurer qu'elle était encore sienne. Il avait engagé des gardes étrangers pour protéger la taverne, qui patrouillaient en permanence. Les habitants de la ville avaient commencé à gronder : était-il devenu fou ? Sa femme commençait à faire scandale. Les rumeurs courraient bon train, et ses pots-de-vin n'y pouvaient plus rien.
C'est alors qu'il perdit pied. Les élections auxquelles il venait de se présenter tournèrent au désastre et au massacre politique. Tous ses soutiens et ses partenaires commerciaux le lâchèrent d'un coup, l’opprobre populaire le condamna à la faillite. Et lorsqu'il vint retrouver un peu de réconfort dans les bras de la féline, elle avait disparu. Disparu !

Maudite ! Sorcière ! Catin des enfers !

Fou de rage, il s'en était pris au propriétaire de cette taverne et l'avait tué par accident, sous le regard des quelques clients rassemblés là.

Le nœud coulant balançait indolemment sous le souffle d'un vent du nord glacial et nerveux. En s'avançant, il repensa à ce mot que les gardes du cachot lui avaient fait parvenir, peu avant qu'on l'emmène.




Et depuis lors, il ne cessait de chercher à comprendre. "Votre honneur pour une vie" ? Quelle vie avait-il pu prendre dont il ne se souvienne plus ? Il n'avait jamais été un meurtrier jusqu'ici. Évidemment, on ne devenait pas un homme comme lui sans se salir les mains, et les faillites sur son passage ne se comptaient plus.

Un coup dans ses côtes le fit avancer en direction de sa fin. Non, décidément, il ne savait pas. Mais pouvait-il dire en toute certitude qu'il était innocent ?
Il passa la tête dans le nœud, les yeux fermés. Le grincement du bois ne se fit pas attendre, et soudain le sol se déroba sous ses pieds. Il rouvrit brusquement les yeux, paniqué, se débattant contre l'inéluctable.

C'est alors qu'il les vit. Deux yeux noisettes le fixaient, là, dans la foule. Elle était de retour. Un violent mélange de douleur, de rage et de désir le traversa une dernière fois, tandis que son dernier souffle le quittait.


"A..A..li.."

La rousse lui sourit, de ce sourire qu'elle lui offrait après l'extase. Dans un dernier sursaut, le corps du mourant lui rendit un dernier hommage involontaire. Le sourire de la rousse s'élargit tandis qu'elle se détournait du spectacle d'un pas tranquille pour disparaître à nouveau.

* Languedoc, mon amour.
Anduin
Le jeune Exécuteur des Hautes Œuvres aux traits fins se frottait les mains d'aise. Finalement, quitter son village natal de Minerve et le pays Cathare pour côtoyer les grosses bourgades proches de Montpellier lui avaient procuré un maigre confort qu'il n'espérait plus.

Finies, les batailles avec les marchands qui refusaient de lui vendre les quelques victuailles qui garnissaient leurs étales pitoyables! La surproduction qui sévissait dans tout le royaume faisait son affaire, et lui permettait de faire vivre ses deux valets et lui-même assez bien. Il avait même pu se payer un gros roncin qui le portait quand il allait faire son office.

Ce matin-là, Anduin Venelle, Bonnemort pour ses patients, allait justement accomplir son œuvre, fendant les rues bondées avec aisance. A son passage, chacun détournait le visage, fuyant cette cagoule noirâtre, comme si elle avait le pouvoir d'apporter la malédiction en un regard.
L'affaire qui allait intéresser Bonnemort lui semblait singulière. Un riche bourgeois pris de lubie pour une puterelle, selon quelques ragots des hommes du bailli. La fille aurait disparu du jour au lendemain, laissant le bougre complètement fou. Enragé, il avait trucidé le patron de l'auberge qui abritait ses frasques.

Anduin écoutait ces rumeurs avec le sourire, avec un semblant de froide indifférence. Non pas qu'il s'en moquait, ou bien qu'il était insensible à l'âme humaine, mais il n'aurait pas aimé sentir sa main trembler pendant qu'il torturait, exécutait, massacrait au nom de la loi du talion. Sobre, discret et cultivé, il avait bonne réputation auprès des petits baillis qui aimaient son détachement et son humilité. Arrivé sur la place, il laissa son cheval à la garde d'un de ses valets qui l'attendait, avant de rejoindre la potence qui s'offrait aux regards de tous, vieille amie de la civilisation. Il vérifiait la corde tandis que des huées s'élevèrent du parterre de badauds amassés en contrebas.
Le condamné arrivait déjà, poussé sans ménagement par les gardes. Anduin n'avait pas eu à le soumettre à la Question, tant les témoignages étaient accablants.

Le jeune éphèbe s'en était pincé les lèvres de voir sa paye maigrir à cause de l'indiscrétion de ce meurtrier pathétique, mais il ne s'en formalisa que peu. Réfléchir ou contredire n'étaient pas dans ses attributions. On lui apporta un dernier pli portant le sceau du Juge. Point de retentum* pour l'animal. La mort risquait d'être moins rapide que prévue.

Le bourreau passa machinalement la corde au cou, avant de s'incliner pieusement devant le condamné:


- Messire, mon frère en Aristote, j'ai la charge de vous ôter la vie. Je vous mande le pardon. Me l'accordez-vous?

Nulle réponse. L'autre semblait à mille lieux de là. Anduin ne s'en formalisa pas, en paix avec son âme, et assena un violent coup de pied sur le levier de la potence. La trappe s'ouvrit d'un coup, trou béant qui avala brusquement la moitié du corps du commerçant. Comme le jeune homme l'avait prévu, la mort n'arriva pas tout de suite. Sous le choc, le robuste cou ne s'était pas brisé, et l'autre agonisait. Avec un peu de chance, il perdrait connaissance avant de crever pour de bon, et Anduin n'aurait plus qu'à aller le porter et le pendre au grand gibet hors de la ville.

"A..A..li.." s'étrangla l'homme avant de sombrer pour de bon. Le jeune Anduin, toujours masqué, décida de laisser le corps encore quelques temps. Profitant de ce répit, il s'assit dans un coin de l'estrade et fixa la foule qui hurlait sa cruauté à la face d'un homme qui, de toute évidence, n'entendrait jamais plus rien de ce monde. Un instant, il crut percevoir un éclair roux dans la masse, mais alors qu'il s'était redressé, il ne vit plus rien.
La mystérieuse donzelle était-elle donc venue souhaiter bon vent à son fanatique?



*Retentum: "faveur" qu'accordait un juge à un condamné à mort lorsqu'il passe sous les mains du bourreau. Le condamné est alors mis à mort rapidement (étranglé, par exemple), avant de subir l'exécution initiale.

_________________
"Longévité: Prolongation inconfortable de la peur de la mort."
--Alissandre


La bière dans ce trou minable était pathétiquement mauvaise, mais elle n'y pouvait pas grand chose. C'était ici qu'elle avait rendez-vous, c'était donc ici qu'elle resterait jusqu'à ce que sa proie se décide à entrer.
Il lui avait fallu beaucoup de temps pour préparer cet instant : filer discrètement sa cible, noter ses habitudes, ses manies, ses préférences, ses contacts... Enfin, elle était parvenue à se glisser dans son réseau d'une manière si subtile qu'il était impossible de déterminer qu'elle en était la source. De bouche à oreille, quelqu'un avait fini par recommander à ce commerçant aussi riche que laid de passer un soir dans cet endroit mal famé, pour y trouver un trésor surprenant.

Et le trésor, c'était elle. Du moins, c'est ce qu'elle allait s'échiner à lui faire croire pendant les semaines suivantes. Au début, elle avait joué la femme discrète, disponible et avenante. Puis au fil de la soirée, tandis que l'ivresse commençait à emporter le jugement de l'homme, elle les avait isolés pour achever sa parade de séduction en une danse passionnelle dont elle avait le secret, et qui avait apparemment réussi à subjuguer l'homme. Elle avait vu juste : comment aurait-il pu résister à une femme comme elle qui prétendait l'adorer, alors que sa propre épouse, laide de surcroix, ne provoquait en lui que le désir de fuir ou de frapper ? C'était de notoriété publique, toute la ville s'en gaussait quand la nuit tombait. La frustration sexuelle couplée à l'évidente aisance de la Rousse avait fait le reste.

Au début, elle ne demanda rien, prétextant que seule une attirance véritable motivait ses faveurs. Puis, devant l'insistance du marchand à vouloir acheter son temps et son silence, elle avait fait semblant de céder à ces cadeaux. En vérité, elle avait évidemment prévu de se récompenser ainsi depuis le départ, mais savait aussi que caresser l'orgueil de sa proie étofferait d'autant sa passion pour elle. S'il pensait qu'elle l'aimait, il ne se méfierait pas.

Elle avait ainsi enduré ses assiduités avec un sens consommé de la comédie, soupirant et s'extasiant tant et si bien qu'il ne douta bientôt plus du tout de son affection.
L'heure approchait à grand pas : elle savait qu'elle devait se hâter de le détruire avant la fin des élections prochaines. C'était le contrat.

Car la Rousse n'était pas une simple catin. En vérité, elle n'en était pas une du tout. Cependant, elle n'avait absolument aucun scrupule à user des cadeaux de Dame Nature pour gagner sa croute, lorsqu'il le fallait. Il lui était bien arrivé d'avoir des ennuis avec les bordels locaux dans certaines villes, qui prétendaient qu'elle allait les forcer à fermer boutique. Ce genre de déclaration la faisait sourire de fierté, sans pour autant l'inquiéter. Jamais elle ne restait bien longtemps au même endroit, ce qui limitait notablement les problèmes sur le long terme.

Elle se mit à répendre des bruits sur les agissements du notable, parlant du cocufiage de son épouse, des terribles insultes qu'il proférait envers sa femme, lui préférant une catin à sa couche cousue d'écus. Une catin à laquelle il offrait les richesses de sa dote, quelle belle ironie !
Jamais, bien entendu, elle ne décrivit ladite séductrice, essayant tant que faire se pouvait de se couvrir contre les éventuelles représailles qu'elle était en droit de craindre. Le tenancier de la taverne où elle oeuvrait ne savait rien d'elle non plus; ni son nom, ni son adresse, ni son âge. Il ne connaissait d'elle que son visage et sa croupe, et s'en satisfaisait très largement. Quoi de plus pratique pour acheter le droit d'oeuvrer en secret chez lui ? Chaque soir, lorsque le commerçant repartait, la Rousse repartait de même et disparaissait dans les ruelles de la ville tel un fantôme, pour réapparaître le lendemain soir à la même heure que la veille.

Le jour des élections arriva. Et avec elle la victoire de la Féline, et la déchéance de sa proie.
Le soir-même, elle reçu deux bourses tintinabulant d'écus : le contrat était rempli, l'adversaire du commerçant était généreux à la mesure de sa satisfaction. Elle ne s'attarda pas davantage en ville. A quoi bon ?

Quelques jours plus tard, elle entendit d'étranges rumeurs : un commerçant notable était tombé en disgrâce totale et allait être pendu pour le meurtre d'un tavernier. Apparemment, cet homme avait trompé sa femme, et avait tué le tavernier dans une folie passionnelle pour une catin rousse qui ne se trouvait nulle part. Peut-être l'avait-il rêvée, mais le meurtre, lui, était bien réel, comme l'avaient attesté les quelques clients témoins ce soir-là.

La Féline fut prise d'un rire irrépressible à ces nouvelles : quelle apothéose ! Non content de sombrer dans la disgrâce, il avait également embrassé la folie. Elle n'avait pas voulu ça, pas plus que son employeur, mais qu'à cela ne tienne ! Le spectacle méritait d'être vu.

Le jour dit, elle était là, dans la foule, observant cette proie qui s'était elle-même condamnée à trop se débattre dans son piège. Leurs regards se croisèrent quelques secondes alors qu'il embrassait la mort. Elle lui sourit, de ce sourire onctueux et presque tendre qu'elle avait appris à lui offrir lorsque, essouflé comme un vieux baudet, il s'affalait sur elle, convaincu de l'avoir comblée alors qu'elle s'empêchait de bailler d'ennui.


"A..A..li.."

Sale vieux débris... Au moins, grâce à lui, personne ne connaîtrait son nom, et puisque le tavernier l'avait précédé dans la mort, il ne restait plus aucun témoin ni complice pour la reconnaître. Elle avait été idiote de le lui révéler, et se promit de ne plus refaire cette erreur.
Le sourire de la Rousse s'élargit tandis qu'elle observa une dernière fois la scène. Le bourreau s'était assis, attendant que le condamné finisse de se débattre dans cette mort cruellement longue. Puis elle se détourna et repartit : la souris était morte, le jeu était fini.
A ses hanches, pressées et dissimulées sous sa large chemise d'homme, battaient trois bourses remplies d'écus et de bijoux.
--Alissandre


Elle boudait.
Pour un peu, elle aurait bien tapé du pied, mais elle avait décidé depuis belle lurette que cela ne collait pas à son image - image dont tout le monde à part elle se moquait bien - donc elle se contentait de balader sa moue boudeuse dans les ruelles les moins fréquentées de la ville. Lèvres ourlées en une mimique de défi, mi-sérieuse mi-moqueuse, tête crânement relevée, regard noisette brillant à travers ses cils d'une sourde agressivité et qui disait à peu près "viens-y, viens-y pour voir!", démarche rythmée et énergique d'un animal en chasse : tout y était. Un caillou eut l'audace de se trouver dans son chemin; elle le fit valdinguer d'un coup de botte bien placé. Le claquement sonore du caillou contre une porte en bois sembla l'appaiser un peu.

Elle cherchait.
Ses yeux noisette fouillaient les ruelles, à la recherche de quelque chose qui puisse la distraire de son humeur. Oh, elle n'était pas spécialement en colère, juste frustrée de s'être faite avoir comme une oie blanche. Idiote !
Elle passa une main nerveuse dans sa chevelure de flammes, tandis que sa mémoire - un peu trop fidèle à son goût - lui rappelait vivement les traits de sa "distraction" : deux yeux presqu'aussi malicieux que les siens au milieu d'un visage à la virilité indiscutable, surplombé d'un chapeau, le tout trônant sur une silhouette pas désagréable du tout à regarder. Intéressante distraction, en vérité. Ses lèvres boudeuses s'étirèrent en un sourire. Il fallait reconnaître qu'elle l'avait mérité, à trop taquiner la chance, elle aurait pu se faire prendre n'importe quand. Elle avait été naïve de se croire en sécurité. Mais de là à penser qu'il la dénoncerait ! Macarèl ! Il ne perdait rien pour attendre...
Son regard tomba sans le voir sur un mendiant, qui lui sourit de ses trois chicots en secouant son écuelle. Elle passa sans lui prêter attention.

Elle s'ennuyait.
L'excitation de ces dernières heures faisait apparaître son quotidien encore pire qu'avant, par contraste. Quel ennui !
Son dernier contrat avait été juteux. Très juteux. Trop juteux pour son propre bien. Elle avait gagné de quoi vivre à son aise pendant près de trois mois. Au bout d'une semaine seulement, elle s'ennuyait à en crever.
Un autre caillou fit les frais de son passage, manquant de peu d'éborgner un paresseux qui sommeillait au bord de la route. Elle gromella de vagues excuses et poursuivit sa route, avec un soupire désenchanté.

Elle guettait.
Passée l'ivresse de la richesse ne demeurait que la tristesse de l'ennui. Alors chaque jour, elle arpentait ainsi les rues de la ville, guettant de tous ses sens, utilisant son instinct pour tenter de trouver les coins les plus prometteurs pour tromper son ennui...
La nuit tombait sur la Féline en chasse, seulement parée de sa couronne flamboyante et de ses hardes masculines mal ajustées. Les mains dans les poches, le nez en l'air, l'esprit ailleurs et les sens en éveil, des heures durant, elle marchait. Tout simplement.
--Lifthrasir


Fichtre que tu es bien faite ma Rouquine !
Tu ne voudrais pas donner un peu de plaisir à un homme en mal d'amour?


Mon gars, c'est fou comme tu sais bien causer ! Pour sûr qu'elle va dire oui ! Fais la rire maintenant !

Je te file le contenu de cette bourse, si tu me débarrasses du contenu de deux autres ! C'est tout bénèf pour toi ! Trois pour l'prix d'une !

Bon, elle est rousse, mais c'est mieux que rien; ça plait pt'être à certains, mais moi j'peux pas m'empêcher d'y trouver un goût bizarre à la rousse.
C'est fort, amer.
En plus celle là elle à l'air revêche vu comment elle m'regarde... Pour un peu elle m'ferait peur.
Mais j'vais lui montrer moi !
Regarde comme je bombe le torse, et surtout regarde bien les manches nacrés qui dépassent de ma ceinture. Deux belles lames pour toi si tu fais trop la maline !


Allez, fais pas la gueule la Rouquine ! J'déconnais va ! Je voulais juste te dérider... Tu fais une tête qu'on croyrait que tu vas bouffer l'premier qui t'parle ! T'as des soucis ?

Bah quoi ? On peut plus faire la causette ? Pourquoi il me regarde comme ça l'avorton ? Si j'veux alpaguer une fille en pleine rue, j'l'fais. Rien à faire de savoir si j'bloque le passage !
Rho et puis il m'intéresse plus, j'préfère regarder la minette. Elle est pas mal quand même. Rousse et habillée comme un mec, mais y a p't-être de quoi s'amuser là dessous...


J't'paye un verre ça te tente ? Y a une taverne sympa là-bas...

Même que j'suis gentil et que je le lui montre du menton le boui-boui. F'pas oublier que c'est une femme, et que les femmes des fois les là-bas, elles situent mal.
--Alissandre


Elle interrompit son élan et s'arrêta pour se retrouver face à... ça.
La grimace qu'elle fit involontairement exprima très clairement ce qu'elle pensait de son invitation, mais elle l'exprima tout de même à toutes fins utiles.


"J'suis bien trop chère per la teuna boursonada*."

Ce n'est qu'alors qu'elle aperçu les deux manches de poignards; elle pinça les lèvres avec méfiance, faisant un pas en arrière en portant une main sur son flanc droit.

"Allez, fais pas la gueule la Rouquine ! J'déconnais va ! Je voulais juste te dérider... Tu fais une tête qu'on croyrait que tu vas bouffer l'premier qui t'parle ! T'as des soucis ?"

Sans se détendre d'un pouce, elle l'observa avec un peu plus d'attention. Les passants commençaient à les guetter avec inquiétude. La Rousse gromella : quand c'était pas une dénonciation, c'était un plan drague à la va-comme-j'te-pousse; bonjour la discrétion ! Elle soupira, dépitée. Et l'autre la dévisageait toujours, ses crocs de métal bien en évidence. Ses intentions étaient claires comme de l'eau de roche.

"J't'paye un verre ça te tente ? Y a une taverne sympa là-bas..."

Elle fit une petite moue indécise. Ouais, ça la tentait, mais avec lui ? Ca méritait réflexion. Sauf qu'elle n'avait pas le temps de la réflexion.
Elle hocha la tête, reprenant une allure détendue pour tromper sa vigilance.


"Pourquoi pas. J'espère qu't'es pas pingre sur la cervesa**."

Elle suivit son geste et observa la taverne en question. Elle réprima un soupire et dégaina son plus soyeux sourire.

"Après toi, Tombaire***.

*pour tes bourses (ouais... celles-là, ouais)
** la bière
*** tombeur
--Lifthrasir


Non, non non !
Après TOI la Rouquine. J'suis pas assez fou t'laisser dans mon dos.
J'ai pas envie que tu me plantes de la ferraille...


Et puis bon, avec une croupe pareille, faut être fou pour ne pas en profiter. Un p'tit coup d'oeil, ça ne peut pas faire de mal !
T'façon à la manière dont les clients du bauge nous matent alors qu'on s'installe, j'crois pas être le seul à me régaler d'elle.


Taulier ! De la bière et pas d'la pisse !

Mieux vaut préciser, parce que je les connais ici. S'ils peuvent gagner un peu de marge, il préféreront baisser les braies pour finir de remplir une chope plutôt que de percer un autre fût.

J'regarde vite fait autour de nous. C'est calme encore à cette heure. Et puis je lance quelques regards mauvais aussi. Ça calme les envies des queutards. Y en a déjà un ou deux qui regardent un peu trop à mon goût, la donzelle.


Bon alors, la Rousse. Il t'arrive quoi ? Tu es en mal de quelque chose ?
Demande à ce bon Lifth et il pourra pt'être t'aider... J'suis pas mage, mais j'peux trouver tout ce qui t'feras plaisir...


Bon, tout, c'est un peu mentir. Disons pas mal de trucs... Mais des beaux...
--Lo_bostiquejaire


[Quelques instants plus tôt]

La journée n'avait pas été mauvaise : il avait encore tous ses doigts et pouvait sentir ses orteils pulser dans les haillons ficelés qui lui servaient de chausses. Bref, il était vivant.

Pour le reste, c'était plutôt le néant. Sa bourse sonnait aussi creux que son estomac, pas une miette à se mettre sous la dent, et pas un morceau de ferraille à échanger contre un broc de quoique ce soit de potable.
Rien, quoi.

L'homme, dissimulé sous une espèce de cape à capuche qu'il avait volée il y avait un bon moment, semblait assez grand, voire bien bâti, même s'il s'évertuait à se tasser sur lui-même pour se diminuer.
Il poussa la porte de la taverne où il avait ses habitudes, engourdi par la soudaine chaleur qui l'envahit, et incommodé par son nez qui, revenant à la vie, le fit soudainement profiter de son propre fumet : un savant mélange de sueur rance, de crasse et des odeurs qu'il avait glanées en trainant en ville. Il n'y était toujours pas habitué...

Le tenancier l'accueillit d'un regard interrogateur et méfiant : l'homme lui répondit d'un sourire sans quitter le couvert de sa capuche et continua tout droit jusqu'au fond de la pièce, diffusant derrière lui son parfum "ôde aux égouts". Il s'installa dans ce coin-là et n'en bougea plus.


[Un peu plus tard : la Rousse et le Gueulard]

Il se réveilla en sursaut, non pas à cause des cris ou des disputes, mais à cause du quasi silence.
Relevant un peu sa capuche, il remarqua la cause de ce changement d'ambiance : une Rousse, qui avait l'air assez appétissante de loin, était entrée avec un gars qu'il avait déjà apperçu dans le coin, et dans cette taverne. Une grande gueule.
Y en avait qui avaient de la chance. Il lui semblait avoir déjà vu cette rousse quelque part, mais où ?
Tandis qu'elle s'installait, il eu une vision privilégiée de son postérieur. Hum. Il leva les yeux pour profiter un peu du paysage et tomba sur le regard furibond du Gueulard. Il baissa immédiatement la tête, rajusta sa capuche par précaution et fit mine de retourner à sa sieste, tout en tendant une oreille attentive.
--Alissandre


Elle s'installa sans prêter attention aux autres clients du bouiboui où ils étaient entrés, du moins c'est ce qu'elle voulait faire croire. Du coin de l'oeil, elle veillait tout de même à ce que personne ne s'approche de trop prêt. Elle fit mine de s'épousseter et vérifia que son petit couteau était toujours contre son flanc, sous la chemise d'homme qui l'habillait. Ce n'était pas une taverne où elle avait l'habitude d'aller, mais elles se ressemblaient toutes un peu.

"Bon alors, la Rousse. Il t'arrive quoi ? Tu es en mal de quelque chose ?
Demande à ce bon Lifth et il pourra pt'être t'aider... J'suis pas mage, mais j'peux trouver tout ce qui t'feras plaisir..."


Elle haussa un sourcil, réprimant la réplique cinglante qui lui serait venue spontanément ("tu m'prends pour une dinde ?!" ) pour lui préférer sa version diplomatique.

"Et pourquoi qu'tu voudrais m'aider ? J't'ai d'jà dit qu'j'étais trop chère pour toi."

Le tenancier leur apporta deux bières, qu'elle se mit en devoir de renifler attentivement. Elle attendit que son "hôte" goûte le premier, histoire de diminuer les risques.
--Lifthrasir


Pourquoi j'voudrais t'aider ?
Bah par bonté aristotélicienne pardi !


Pour pas éclater de rire, je préfère boire une belle gorgée de bière.
Moi, aristotélicien... La blague...


Non plus sérieusement, même si t'es trop chère pour moi, j'm' dis que si j'te rends service, toi tu peux m'en rendre un en retour...
Pas que j'ai une idée en tête hein... Juste que j'aime faire des affaires... Et toi t'as l'air d'en être une sacrée...

Et puis, t'imagine pas comme ma fin de nuit va être douce... rien qu'en te regardant j'en ai la main qi me démange. Pour parler que d'elle. Alors ne serait ce que le Temp d'une bière j'ai de quoi de me faire de beaux souvenirs...

J'connais pas mal de monde, mais ta tête j'l'ai jamais vu... alors ça me curiotise...
Tu fais quoi dans la vie ? Tu cherches des associés ?
Et puis tu vas m'l'dire ce qui te tracasse ? On est entre amis ici...
--Alissandre


La première réponse de son interlocuteur lui arracha un sourire aussi froid que la glace. Aristote, vraiment ?

La seconde réponse lui fit à nouveau hausser un sourcil, cette fois sincèrement surpris. Une lueur d'intérêt s'éveilla dans son regard.
Les yeux de l'homme en face d'elle se mirent à étinceler également, tout en glissant sensiblement vers la chemise de la Rousse. Elle s'autorisa un sourire condescendant : en voilà un qu'elle tenait par le fond des braies, sans même avoir eu à faire quoique ce soit. Un pouvoir aussi puissant que dangereux, surtout avec des énergumènes aussi sanguins, mais il fallait bien qu'elle fasse avec ce que la fortune lui donnait.

Elle se dandina légèrement, pour lui donner plus à voir, faisant mine d'avoir chaud pour entrouvrir sa chemise avant de répondre.


"Mmmoui... faire affaires, ça s'pourrait. Ca s'pourrait bien.
T'occupes pas de c'qui m'tracasse, ca m'tracasse d'jà plus."


Elle porta la chope a ses lèvres et retint une grimace en goûtant le liquide qui usurpait le nom de bière. Elle la reposa sèchement sur la table.
"Infecte.

Moi, dans la vie, j'suis... Mmmmh..."

Elle porta un doigt à ses lèvres en une mimique très étudiée de réflexion, tout en se dandinant un peu à nouveau. Autour d'elle, elle sentait que certains clients réagissaient déjà positivement à son petit jeu.

"Un peu ci, un peu ça, j'touche à tout."
Elle reprit un air sobre et fixa son interlocuteur dans les yeux : point trop n'en faut, sans quoi elle n'allait pas pouvoir gérer la situation.
"Et toi, Tombaire, t'fais quoi dans la vie ? Dis-moi tout."


Sa voix rauque avait pris des accents de suavité étudiée, ni trop, ni trop peu, juste de quoi signaler un intérêt qui le rendrait peut-être plus locace. Avec un peu de chance, son orgueil parlerait pour lui.
--Lifthrasir


Ah ouais tu touches à tout ?
Vraiment ? Non parce que j'ai des trucs à te faire toucher ma belle...


Là franchement j'rigole. D'un beau rire gras, même.
Elle me fait rêver la p'tite. Son décolleté aussi d'ailleurs. J'en perds pas une miette, guettant même si un cercle plus foncé n'ferait pas son apparition par hasard...
Mais bon, faut que j'm'reprenne. Et puis autour ça louche et ça jase.
Un regard mauvais par dessus la chope que je goûte à nouveau, une poitrine bombée et ça devrait les calmer.


Moi, j'soigne ma vérole...
Sinon, bah j'm'occupe. D'mes affaires, d'celles du patron...
Rien de bien folichon, mais ça rapporte. Assez pour que les gojatas deviennent assez conciliantes avec un type comme moi si tu vois c'que je veux dire...


Et il y en a des poules qui ferment les yeux quand je me mets à les toucher. Oh ça oui... Suffit que je fasse jaillir des pierres ou des bouts de chiffons de ma besace et ça se mets à genoux. Sans même qu'il y ait de prières à la clé.

Mais dis moi, y a peut être des trucs qui t'intéressent... J'suis sur que moi ou l'patron on peut te trouver ça...

Si jamais il revient le gars... Ça fait longtemps qu'il a pas traîné ses bottes rouges dans l'coin... Ça se trouve il est mort... Ça s'rait pas étonnant même...
--Alissandre


Elle accueillit sa plaisanterie d'un sourire satisfait : au moins, il était tombé dans le panneau.

"Moi, j'soigne ma vérole...
Sinon, bah j'm'occupe. D'mes affaires, d'celles du patron..."


Le reste de sa vantardise lui passa au dessus de la tête, car elle venait d'entendre une information qui lui mit la puce à l'oreille. Son patron ? Ce gars-là n'était qu'un sous-fifre. Elle aurait pu être déçue, mais ce fut tout le contraire : un sous-fifre, ça se manipule encore plus aisément; ça voulait dire un patron assez puissant pour s'attacher ses services.

Elle passa la langue sur ses lèvres, en un signe involontaire de nervosité et d'intérêt croissant. Elle baissa la tête , pensive, avant de relever les yeux pour fixer l'homme à travers ses cils. Son attitude laissait entendre une certaine soumission, comme si les rodomontades de son interlocuteur avaient fini par l'impressionner et l'amadouer.


"P'tèt bien qu'oui... Ca s'pourrait.
Et ça s'pourrait bien que j'sois très reconnaissante si tu m'les obtiens."


Elle marqua une pause, le temps de trouver la formulation juste.

"J'veux des informations. Sur une personne, et sur ... mh... disons, une opportunité.
Au fait, comme tu t'appelles, joli-coeur ?"
--Lifthrasir


Rho qu'elle est mignonne. Elle doit en faire fondre des coeurs la bougresse.
Pour sûr même qu'elle a un beau tableau de chasse. Le genre de gojata qui sait se servir de son c... corps.
Mais si elle m'prend pour un d'ces bellâtres qu'elle soulage de leurs écus, elle s'trompe.


Reconnaissante ? Mouais... A voir...

Maintenant j'm'penche, bien plus sérieux, lorgnant le poitrail débraillé avant de fixer les yeux d'la biche.

M'prends pas pour un imbécile... J'ai pas l'air, mais j'suis malin.
A mon âge donzelle, même si on est né con, on ne l'est plus...

Dis moi c'que tu veux sur ton opportunité et surtout à quoi il ressemble.
C'est quoi ? Un joli coeur que tu veux dépouiller ? Tu veux savoir de quoi tu peux l'soulager?


Et appelle moi Lift... Ca ira pour toi, t'as pas b'soin d'en savoir plus pour le moment...
--Alissandre


Ne pas rire, surtout ne pas éclater de rire.
La Rousse pinça légèrement les lèvres pour masquer son illarité, tandis que ses yeux se plissaient délicatement de rire contenu. Alors comme ça, il était malin ? Il se permettait de faire la fine bouche alors qu'il était en train de baver littéralement sur une simple chemise un peu entrouverte ? Alors qu'il l'avait abordée dans la rue comme la plus fauchée des catins ? A d'autres !

Elle lui dédie un de ces sourires onctueux dont elle a le secret, tout en recoiffant d'une main ses cheveux pour dégager sa gorge.


"Lift...
J'veux juste rendre la monnaie d'sa pièce à un badinaire* de ma connaissance. Et lui damer le pion. J'ai besoin d'en savoir plus sur c'type."


Le regard de la Rousse se mit à étinceler, son sourire devint prédateur.

"J't'en dirai plus si t'acceptes l'boulot.
Pour l'opportunité que j'recherche... Disons qu'j'ai quelques pièces d'or et qu'j'aimerai les placer dans quelque chose d'intéressant."


Elle regarda autour d'elle avec circonspection et baissa la voix en se penchant à son tour vers Lift.

"Je cherche un coin pour d'venir le quartier général d'une affaire dont j'ai l'projet. Quelque chose qui pourrait rapporter gros. P'tèt même que ça peut intéresser ton patron..."

*plaisantin
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