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Info:
Les suites du pillage de Sarlat...où quand une Corléone traine trop loin de sa caravane, il lui arrive toujours des bricoles.

[RP] Pour le glamour, vous repasserez!

Soren
[ Juin 1461 - Quelque part dans la campagne sarladaise...]

- Où est-elle?

L'homme en face de moi ne parle pas. D'un geste, il me montre l'une des galeries dont l'ouverture apparait à la lueur de ma torche vacillante.

- Elle est consciente?

- J'en sais rien… mais il me semble avoir entendu du bruit il y a peu.

- Qu'elle ne manque de rien. Couvertures car il fait très frais ici, nourriture, eau… Mais à leur strict minimum. Si on veut obtenir quelque chose d'elle, il va falloir casser sa volonté. Et pour ça, faites-moi confiance. j'ai eu un bon professeur!

Visiblement, mes questions l'agacent. Ou alors, c'est ma présence qui ne lui plait guère. Je ne le connais pas assez pour prendre position. Il a combattu sur les remparts de Sarlat pour reprendre la ville. Il a fait partie des volontaires que nous avions recrutés pour donner la chasse aux pilleurs. Il habite Sarlat. C'est tout ce que j'en sais. Mon intuition me dit de me méfier mais je n'ai pas le choix. Et puis, je ne suis pas plus son chef qu'il n'est le mien. Le manque de structure, c'est l'ennui avec ces opérations non officielles. Que celui qui a le plus de charisme s'impose aux autres. Ensuite, que chacun fasse preuve d'esprit d'initiative. Savait-il que je ne faisais plus partie de la maréchaussée? Plus prévôt! Plus maréchal! Plus rien! Mais cette histoire me concerne au premier plan. C'en est devenu une affaire personnelle. Le pillage proprement dit passerait même au second plan.

Oui, il fait frais ici. Il faut dire qu'on se trouve à plusieurs pieds sous terre. Dehors, l'été est à son apogée. Pour le danois que je suis, il est à la limite de l'acceptable. Trop chaud. On dit que la nuit est sombre et pleine de terreurs*? Ici, la nuit est permanente. Il n'y a personne aux alentours exceptés nous. Personne sous terre pour entendre des cris ou des plaintes. Personne pour intervenir. L'endroit est facilement défendable au besoin. C'en est presque une prison idéale et il semblerait que le sol du Périgord-Angoumois en soit plein. Avec Anne, on en a trouvé une par hasard du côté de Castillon**. Et maintenant, en voici une autre à Eyzies-de-Tayac, du côté de Sarlat. Divine providence! Pour une fois qu'elle est de mon côté celle-là!

Les flammes grésillent alors que je débouche dans la salle principale. J'y apporte la lumière et même le peu que ma torche éclaire doit agresser ses yeux. Depuis combien de temps est-elle ici? Deux jours! Les Corleone ne se sont pas arrêtés. Ils ont poursuivi vers le Limousin, en dehors de la juridiction du Périgord. Pffff… Fichus trouillards de traqueurs qui ne voulaient pas passer à l'Est! On parle des Corleone, on parle du pillage de Sarlat, on parle de l'honneur perdu du Périgord-Angoumois et eux pensent aux respects des frontières? Ouais… Fichus trouillards!

Elle est là, entortillée dans sa corde comme un saucisson, allongée sur le sol froid de la caverne. Je la toise de haut. Syu s'est défilée, Manu s'est défilé… Pauvre elle! Elle risque de payer pour tout ce monde. Ma mâchoire est serrée. J'en ai même mal aux dents tellement la haine que je ressens crispe ma bouche. Ma main droite joue nerveusement avec le pommeau de mon poignard. Surtout garder le contrôle et laisser l'Autre croupir dans sa tanière, enfermé et enchaîné. Car s'il venait à parler, il se pourrait qu'elle passe un mauvais moment bien trop tôt. Or, ce n'est pas elle que je veux. Elle n'est qu'un moyen pour arriver à mon objectif.


[Flashback... Quelques jours plus tôt, non loin de Sarlat]

- Joli brin de fille…

- Je te rappelle que c’est une de ces mauvaises herbes de Corleone! Elle vient de piller Sarlat et elle n’hésiterait pas à te mettre l’entrejambe en miettes si elle en avait envie… ou encore à te planter son poignard dans la gorge!

- N’empêche que je la basculerai bien dans l’herbe folle moi…

- On n’est pas là pour ça! Et s’il faut que je te coupe net les envies qui te montent à la tête, je te rappelle qu’elle a tous ses petits amis là-bas, à quelques centaines de pas d’elle!

- N’empêche qu’elle me fait envie…Bon! On procède comment pour ne pas se faire étriper par cette bande de malades?

- Elle a l’air d’être bien occupée avec son livre! Ça doit sans doute être de la poésie. Toutes les filles aiment la poésie. Ça leur fait croire qu’elles sont plus séduisantes qu’en réalité. Toi, tu te faufiles par là et tu l’assommes. Toi, tu vas par là…et tu t’assures qu’aucun Corleone ne vient par ici. Et moi…Je vais… là! … Au cas où…


Au cas où…il manquerait son coup?


* Mélisandre - Le trône de fer - G.R..R Martin
** Cf le RP Un chêsne et un coudrier

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Umbra
L’Ombre, à l’abri de la lumière, n’existe pas. Elle n’est rien dans ce néant ambiant. Vêtue de sombre parmi la pénombre, Umbra a disparu du monde. Elle même ne saurait pas se situer. Ses iris de charbon se sont habitués à l’obscurité et les torches qui, parfois lui rendent visite, l’agressent. Les cordes de chanvre lui rongent les articulations et le sol dur la blesse. L’atmosphère est plus que fraiche et ses muscles se tétanisent par le froid et l’effort. Un mal de crâne tiraille sa cervelle, ne lui laissant aucun répit pour réfléchir.

Recroquevillée dans le noir, Ombeline ferme les yeux et affine son ouïe. La pièce où elle se trouve doit être une cave vu l’humidité régnante. Les pans de pierre qui la cernent sont surement très épais car aucun son ne s’échappe de l’extérieur. Cependant, le plafond est obligatoirement voûté aux résonances que les bruits émanent. Ce compte-rendu, elle le connait par cœur depuis qu’elle le rumine mais les vraies interrogations, elles, restent sans réponse: Où est-elle ? Que fait-elle ici ? Est-elle la seule dans cette maudite situation ? Un grognement retentit dans le silence total.


Détachez-moi ! Vous entendez ?! Libérez-moi !

Mais ce cri de détresse s’écrase contre les murs sans réaction.

Foutue vierge…

Combien de temps s’est-il écoulé depuis son enlèvement ? Sans doute, les passages de celui qu’elle considère comme son ravisseur devraient l’aider à retrouver la notion du temps mais l’immobilité, l’obscurité et le silence font de chaque instant une éternité.

La Bâtarde s’est résignée à ne plus parler à son visiteur. Ce dernier ne répond jamais tant est si bien qu’elle a cru qu’il était muet. Il n’est pas si méchant, il lui donne une maigre pitance et ne la roue pas de coups. Ces attentions ont tendances même à déstabiliser la jouvencelle qui n’arrive pas à se faire une opinion de lui. Si ses sens sont tourmentés par son environnement, ses nerfs ne sont pas encore atteints. La patience et l’espoir luisent encore au fond de son esprit peu clair. A ce stade, s’il la libérait maintenant, peut-être serait-elle clémente...

Quand ses maux de tête s’apaisent, l’Ombre ferme les yeux et oublie sa situation un bref temps. Souvent c’est une crampe qui la réveille et la martyrise. La soif aussi assèche sa gorge quand il lui prend le courage de s’époumoner pour demander de l’aide. Hélas ce qui lui manque le plus dans cette solitude constante, c’est l’alcool.

Un verre de prune ! Je demande pas la vierge ! Un tord boyau ! Vous devez bien avoir ça au fond de votre cave…

Un soupir s’échappe de sa bouche déshydratée puis le néant.
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[Mode Tamago du 20/12 au 02/01, si RP urgent me contacter par courrier IG Bonnes fêtes à tous et à l'année prochaine!]
Soren
[Dans la caverne des bisons… avec un prisonnier un peu moins poilu tout de même.]

- Oh! Pas la peine de crier comme ça. Il n’y a pas grand monde pour écouter ta jolie voix ma belle. Et puis ici, sous terre, la voix porte loin sans même qu’on la force.

Il n’y a pas grand-chose ici. L’endroit n’a guère eu le temps d’être aménagé. C’est visiblement la première fois que l’endroit est utilisé comme cellule de détention. Ce n’est sans doute pas la dernière. Je l’adore moi cet endroit. De plus en plus. Outre un peu de paille fraiche – Enfin fraiche… d’il y a deux jours - sur laquelle la prisonnière a été posé, l’hospitalité de la pièce se résume en deux éléments essentiels. Le premier est un porte-torche fixé à même la paroi irrégulière des… « murs » de l’enceinte. Je viens y déposer mon flambeau. Il se peut que j’ai besoin de mes deux mains, puis je m’approche de la Corléone et je m’accroupis devant elle. C’est plus intime. Pas besoin d’élever la voix ainsi. Et puis…le loquace dehors n’a pas besoin d’entendre ce que j’ai à lui dire.

- J’espère que tu es bien installée. Tu n’as pas trop froid? Pas trop faim? Soif peut-être? Ah oui…Soif! Mais si j’étais toi, je demanderais un peu d’eau plutôt de la prune. Et la moins croupie possible. C’est meilleur pour le gout. Et puis la prune…avec ce que tu as dans le ventre, ça risque de te faire tourner la tête. Et moi…je veux que tu sois en pleine possession de ton esprit.

Possession…Esprit… Ça ne fait pas un peu trop religieux à ton gout ce discours-là Søren?

- Mais il semble que je manque à tous mes devoirs d’hôte. Je ne me suis même pas présenté. Je m’appelle Seurn… Seurn MacFadyen Eriksen. Je suis maréchal à Bergerac, la ville voisine de celle que vous venez de piller, toi et tous les Corleone!

Maréchal toi? Vraiment? Aurais-tu oublié une certaine lettre de démission que tu as donnée à Sybille? Bah… Qu’importe que ça soit vrai ou pas. Lorsqu’on interroge quelqu’un, tout est dans le paraître. Connait-elle seulement ton nom? Sait-elle vraiment qui tu es? Je veux dire en dehors du fait que tu es maréchal à Bergerac… A-t-elle déjà entendu mon nom? Sait-elle ce qui se dit sur moi? Se doute t-elle que, toujours d’après ce qui se dit, elle est venue à Sarlat à cause de moi? A cause d’une de mes décisions? Une décision presque insignifiante dans l’histoire d’une ville…Enfin…qui aurait dû rester insignifiante pour Sarlat!

- Et toi? C’est quoi ton petit nom? Lilas? Silvia? Falafel? Paglop? Fleur de lys?

C’est grisant l’impression de domination après toute cette période difficile que je viens de passer. La vie est ainsi faite : par moment, il vaut mieux éviter de penser. L’heure est à l’action. En y repensant bien, je me suis comporté comme un abruti en allant seul défier les Corléone pour simplement assouvir ma soif de vengeance envers Manu. C’était stupide de risquer ainsi ta vie parce que tu n’aurais pas mis fin aux exactions dans la ville. Ni en tuant Manu, ni en mourant. Ton sacrifice aurait été vain. Totalement. C’était quoi ce geste? Une façon de montrer que tu n’avais pas peur? Une façon de faire travailler ton esprit sur autre chose? Pour qu’il évite de trop cogiter sur toute cette affaire? Oui, ça, c’était stupide. Poursuivre les Corleone, c’était risqué. Tu as lancé un écu en l’air et il est retombé du bon côté. C’est de la chance. Juste de la chance.

- Je suis désolé pour ta botte gauche. Un de nos hommes a fait preuve d’une trop grande maladresse. J’espère que tu la retrouveras… mais malheureusement je dois te dire qu’on n’a pas vraiment eu envie de s’attarder dans le coin quand on a remarqué sa disparition.

Attachée comme elle est, elle doit vraiment être mal installée. Et dans cette pénombre relative, elle ne doit pas avoir bien pris la mesure de sa situation. Elle a besoin d’aide…parce que si elle ne comprend pas dans quel pétrin elle se trouve, elle risque fort de ne pas être très coopérative. Ma main vient se poser sur son genou et descend lentement vers sa cheville. Je souris lorsque mes doigts entrent en contact avec ce que je viens chercher.

- Tu vois mes doigts. Tu entends ce bruit métallique lorsque je brasse un peu tout ça. Eh oui… J’ai le regret de te dire qu’une chaine entrave ta cheville dénudée, le pied même qui a perdu sa botte. Et tu entends le bruit que cela produit si je tire dessus? Gagné! Tu es bien attaché à la paroi de l’endroit par cette chaine qui doit, au bas mot faire environ une trentaine de pieds de long. Juste de quoi te balader un peu dans ton nouveau chez toi. Tu veux que je te dise comment tu es arrivée ici? Alors écoute…


[Flashback...Aux abords du campement Corleone, tout juste après sa capture]

- Tu es un abruti!

- Mais elle a bougé au dernier moment?

- Et alors? Tu croyais quoi? Qu’elle allait te laisser faire sans rien dire?Qu’elle allait t’ouvrir les bras et te donner une galoche? Tu sais ce que c’est la discrétion? Et tu as été éclaireur pour la COPA? Vraiment? Quand t’ont-ils renvoyé? Avant ou après les tests d’aptitude physique? Si je n’avais pas été là, elle nous filait entre les pattes. Elle ameutait toute la racaille et c’est nous qui aurions terminé dans de beaux draps! En attendant, va préparer les chevaux! On file…et vite!

Yoren? Pas de bruit du côté du camp?


- Au contraire! Il y a tout un tas de bruits. On dirait que c’était un simple arrêt de convenance. Ils repartent déjà.

- Alors, il faut juste espérer qu’ils ne vont pas remarquer qu’ils en ont perdu une. Quoi qu’il en soit, elle a su son compte! Un seul coup! Dans la précipitation j’y suis peut-être allé un peu fort…

- Les chevaux sont rassemblés. On peut partir.

- Dites… c’est quoi ce qu’il y a au pied de l’arbre?

- Le livre qu’elle lisait… J’espère au moins qu’il valait la peine! Allez, on s’en fout du livre! Filons!


- Si toi tu te fous du livre, moi pas!


[De retour dans la caverne des bisons… penché au dessus d’elle.]

- … Et voilà résumée toute l’histoire. Ah! Et si tu veux savoir, c’est Yoren qui a gagné le pari. Il pensait bien que tu lisais un livre sur les plantes. Dutilleul, lui, pensait que tu avais volé le cadastre de Sarlat pour y trouver tous les souterrains et autres passages secrets. Du coup, il t’en veut! Moi, si j’étais toi, j’éviterais de faire ma maligne quand il est de garde. Et maintenant, passons aux choses sérieuses…

Le poignard glisse lentement de son fourreau et vient pointer son abdomen. La lame froide passe sous l’épaisseur des cordes, puis sous la couche de vêtements, à même la peau. Frissonne t-elle au contact du métal? De peur ou du froid?

- Tu es notre prisonnière. Et moi, je veux deux choses de toi. Une fois que je les aurais eu, tu pourras retrouver ta liste. Pas avant. La première…

Un geste sec! Le poignard glisse de haut en bas. La corde cède sous la pression de la lame. Un coup! Un seul. La voilà plus à son aise pour se déplacer. Enfin…Disons qu’elle ressemble un peu moins à un saucisson désormais. Ne reste que les mains à délier, mais pour ça, je vais attendre encore un peu.

- Je veux savoir comment et quand vous avez décidé du pillage de Sarlat. Et pourquoi Sarlat? Hasard ou préméditation?

Sous-entendrais-tu que tu veux savoir si c’est Syu qui a commandité le pillage ou pas blondinet? Tu sais que parfois tu manques de subtilité?

-Voilà! Tu peux maintenant vaquer à tes occupations. Enfin, ce que tu trouveras ici, dans le noir…et ce que la longueur de cette chaine te permettra. Oublie la prune. On te donnera un peu d’eau. Quand à la nourriture, tu en auras. Mais sache qu’on est très restreint. Sarlat a été pillé et il ne reste plus grand chose à manger!

Ah ça, c’est ce qu’on appelle un coup bas danois! C’est mesquin! Qui t’a donc appris ce genre de coup vicieux ? Hum?

- Va falloir que tu te contentes de ce qu’on aura à te donner. En attendant, je vais te laisser. Tu dois avoir les oreilles fatiguées à force de m’entendre. Tu vas vite découvrir mes défauts. Bavarder fait partie de ceux-là. Sur ce, je vais te laisser méditer sur mes désirs. Comble-les si tu veux partir rapidement et continuer à piller avec tes petits amis. Avec moi, c’est… donnant-donnant!

Je suis sur le point de repartir lorsqu’un détail me revient à l’esprit. Suis-je bête… j’allais oublier! Je reviens sur mes pas et d’un geste, j’écrase ses mains sous ma botte. De un, la douleur va lui éviter de penser à un coup tordu. De deux, ses mains sont coincées sous mon poids. Mais l’avantage, c’est que maintenant, elle a aussi les mains déliées.

- Réfléchis bien à mon marché. Je reviendrais te visiter demain pour voir dans quel état d’esprit tu te trouves. D’ici là… bonne nuit!

Rideaux sur cette scène qui, vous en conviendrez avec moi, manque singulièrement de glam’attitude!
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Umbra
A force d’hurler, quelques pas se font entendre : bien sûr, la réponse n’est pas celle espérée. Le halo de la torche rétracte violemment les pupilles charbonneuses dilatées dans l’obscurité ambiante. Les flammes ondulantes déforment la pièce. Les murs semblent vagues, creusés d’ombres et bosselés de lumières car l’environnement reste mal éclairé. L’Ombre se tasse contre le mur, se cachant de la faible clarté trop vive à son goût. L’homme qui s’adresse à elle est autre que son « geôlier », celui-ci parle et même sans répondre, c’est lui qui pose les questions. Ce nouveau visiteur se tient à contre-jour de sorte qu’Umbra ne distingue rien de son apparence hormis son imposante stature. La frêle, quant à elle, a beau voiler son visage blafard sous ses boucles brunes, elle n’en reste pas moins à découvert. Les interrogations se succèdent mais la Noiraude sent qu’elles sont rhétoriques. Quand bien même aurait-elle l’audace de manifester son inconfort, cela changerait-il quelque chose à l’histoire ?

Les mâchoires crispées, Ombeline écoute son interlocuteur. Elle lui collerait bien des baffes à ce maréchal mais la carrure de ce dernier l’en dissuade et les liens l’en empêchent. La voix de ce dernier bruit dans la cellule et bourdonne au fond des oreilles de la Bâtarde. Elle ne cherche pas à se détacher. Se tortiller la torture davantage alors pour se soulager, elle s’immobilise. Comme gravés dans le marbre, ses traits restent stoïques. Ni la peur, ni la haine, ni la pitié, rien n’habite le regard de la jouvencelle. Sa respiration est lente et profonde. D’apparence, l’Ombre semble si calme qu’on se demanderait si elle mesure réellement l’ampleur de sa situation.

A vrai dire, son arrivée ici-lieu est encore confuse dans sa mémoire comme pas mal de choses d’ailleurs. Une brève amnésie a effacé les dernières heures de son existence. Intimement, Umbra espère que ce ne sont pas ses ultimes. Sa vie est parsemée d’ombres, elle est un tableau inachevé où le clair-obscur prédomine sur une palette de couleurs fades. Non, son existence est loin d’être rose. Vouée à vivre cloîtrer au fin fond des Flandres à l’abri du monde sans raisons valables. Voilà qu’un beau jour, cette interminable routine se brise et elle découvre qu’elle a un nom, une infime part d'identité. Perdue dans ses songes, la voix du maréchal retentit :

…C’est quoi ton petit nom? Lilas?...

La bouche de la Noiraude remue en un inaudible murmure :

Lisreux..

Un courant frais s’immisce dans la pièce, attisant un frisson douloureux le long de sa carcasse, l’extirpant pour de bon de ses pensées. Il est maintenant question d’une histoire de bottes. Aurait-elle loupé un épisode dans le monologue ? Ce qu’elle n’apprécie guère, c’est l’intrusion tactile. Les sourcils d’Ombeline se froncent et ses muscles se contractent sous les doigts de l’homme. Un grondement s’échappe de ses lèvres contrastant avec le cliquetis aigu des maillons. Il se moque d’elle et ce genre de condescendance a tendance à passablement l'énerver. Tout à coup, c’est le déclic dans sa caboche : Où sont ses effets ? Sa bâtarde ? Sa rondache ? Et sa botte ?! Au fur et à mesure du récit, des évènements lui reviennent : La prise de Sarlat, le pillage réussi de la mairie, sa trouvaille au fond d’une étagère poussiéreuse, un livre d’herboristerie sorti de nul part, la énième pause après le départ…Pour quelle raison, au faite ? Oh surement, la Malédiction qui faisait encore des siennes… Ah ! Et puis le bouquinage au pied de l’arbre et soudain, le trou noir. Oui, la voilà qui divague encore de son côté. Question attention, ça fait un bail que la Bâtarde a perdu le fil des babillages de l’homme. Encore un peu qu’elle baillerait sans doute aux corneilles. Alors que la jouvencelle s’apprêtait à étirer ses membres engourdis, un contact glacé la raidit. Cette sensation, même si elle n’y voit pas grand-chose, l’Ombre sait exactement de quoi elle provient. En effet, il serait peut-être temps de le prendre au sérieux.

Toujours muette, elle redouble de concentration au discours du visiteur. Cependant, son écoute est parasitée par le passage de la lame sur son cuir d’albâtre. Qu’attend-il d’elle exactement ? Un court instant, Umbra est prête à donner de la voix mais une première entaille libère ses jambes. De justesse, elle retient un coup de pied nerveux. Faudrait pas lui casser les dents tout de suite… Enfin, le moment tant attendu arrive ! Son interlocuteur formule sa réelle requête. Heureusement qu’elle s’est retenu de lui faire manger sa botte pour le coup. Pourquoi ne l’a-t-elle pas deviné plutôt : un maréchal…suite à un pillage, forcément qu’il désirait des détails sur les activités de la Famiglia ! Mais pourquoi passerait-elle aux aveux ? A peine, a-t-il imposé ses conditions qu’elle est à moitié détachée. Sans doute, serait-il moins patient qu’elle ? A voir son inertie, céderait-il plus facilement qu’elle ? Première chose : mettre sa patience à rude épreuve…mais avant tout garder son propre sang-froid.


L’homme allait enfin la laisser souffler, son ombre se redressait déjà sur celle de la Noiraude quand un cri féminin mêlant surprise et douleur remplie la cellule. Les pas s’estompèrent alors jusqu’à se confondre dans le silence pesant. A nouveau noyée dans l’obscurité, Ombeline se massa longuement les poignets écorchés par le chanvre avant de se redresser lourdement. L’ascension du haut de son mètre cinquante parut interminable. Chaque muscle s’étira douloureusement et il lui fallut un certain temps avant que sa carcasse atrophiée ne reprenne forme. A pas lents, les mains légèrement avancés, la Bâtarde progressa à tâtons dans le noir béant. Parfois, ses paumes rencontraient un mur plus lisse qu’un pan de pierres mais aux aspérités rugueuses, sinon le cliquetis métallique la rappelait à l’ordre. Après une bonne heure à tourner en rond, la jouvencelle revint se coucher sur sa paillasse humide et ferma les yeux. Elle ressasse certaines brides de conversation, notamment son nom qu’elle susurre plusieurs fois afin de l’ancrer dans sa mémoire. Finalement, les dernières paroles du maréchal résonnèrent dans sa tête et elle conclut à haute voix pour se donner contenance:

Demain, ça fera deux jours…

Mais officiellement, ça fait déjà soixante douze heures qu’elle n’est plus qu’une ombre effacée…
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Plumenoire
[Quelques heures dans une journée …]

Seurn lui avait fait entendre que bientôt il saurait. Une de ces vermines avait été capturée d’après ce qu’elle avait compris. Qui ? Aucune idée … En tout cas pas ce lâche au nom duquel le pillage avait été effectué. Non … sinon le danois aurait ramené sa tête, la louve en était presque certaine.

Allait-elle suivre le danois dans ces interrogatoires ? Allait-elle réussir à « résister » à cela ? Pas sur … mais elle voulait savoir. Peut-être était-elle poussée par la haine ? Peut-être pas. Les questions dansaient dans l’esprit de la jeune maréchale, la narguaient, l’empêchant de se concentrer. Sur quoi ? Après tout, que faisait-elle à part broyer du noir ? Il lui fallait agir. Elle voulait des réponses ? Elle les obtiendrait elle-même.
Son blond ne cautionnerait surement pas, mais elle s’en fichait.

Suivant les indications données par le danois, elle se rendit sur le lieu où était retenue la captive. Evil, son chien-loup sur les talons, une dague à la ceinture, une autre probablement cachée ailleurs. Vêtue de sombre pour ne pas changer, son insigne de maréchale caché pour ne pas attirer l’attention. Qui sait … Cela pourrait toujours servir ...

Un homme surveillait l’entrée de la caverne. Il la regarda approcher. Le danois devait arriver bientôt … En tout cas elle l’espérait. Ce serait surement plus prudent que de s’y aventurer seule … Enfin « seule » … Tout es relatif. Elle avait Evil, et le garde serait là au cas où. D’ailleurs …. Cet homme la laisserait il entrer ? Pas sur … Elle s’approcha de l’homme et lui fit face.


‘Suis Plume, Maréchale de Sarlat. Une courte pose … J’dois voir …

Hésitation. Une ? Un ? On tranche.

L’détenu … j’ai l’autorisation du grand blond.

L’avait-elle vraiment ? Surement ! Dévoilant son insigne de maréchale pour appuyer ses paroles, son loup sur les talons, une main sur le manche de sa dague, la brune allait entrer, jetant un dernier regard vers l’extérieur.
Peut-être Seurn arriverait-il …. ?
Soren
Dehors, il fait un temps magnifique. Le soleil baigne la campagne périgourdine de toute sa vigueur et tout son éclat! Pour un peu, cela donnerait envie de tout oublier et d’aller se baigner dans la Dordogne avec une fille aux cheveux blonds, trouver une crique à l’écart du monde et… Oui, enfin arrêtons-là! N’oublions pas que des oreilles chastes se tendent vers nos pensées. Et puis l’heure n’est pas encore aux réjouissances estivales. D’autres ne l’ont pas voulu ainsi. Les Corleone ont disparus quelque part du côté du Limousin. Certains pestent contre le travail de reconstruction qu’il y avait à faire à Sarlat, d’autres sortent déjà leur argumentaire pour se faire élire au poste de maire. Bref, la vie a repris son cours plus ou moins normal dans le Périgord. Sauf pour moi. Le cours de MA vie a été brutalement détourné ce soir où Laell est entrée dans la mairie de Sarlat. Depuis ce soir-là, il y a le dit et le non-dit. Il y a trop de questions sans réponse acceptable dans ma tête. Trop pour que je puisse savourer totalement ce petit coin de paradis qu’est cette petite crique au bord de la Dordogne.

- Merci d’être venue Plume! Viens avec moi, je vais te la présenter!

Joignant le geste à la parole, je passe devant la maréchale de Sarlat, une torche à la main. Je lui explique ce qu’est ce lieu, comment il a été découvert, et ce qu’on y a aménagé pour le transformer en prison non officielle. D’ailleurs j’insiste auprès de Plume. Ici, il n’y a rien d’officiel. Le Périgord-Angoumois n’a capturé aucun Corléone. La maréchaussée n’a pas poursuivi les brigands. Et personne ne garde une grotte où il n’y a personne dedans. Ce qui se passe dedans, reste dedans. Les ténèbres restent dans les ténèbres. Nous longeons la mince galerie creusée à même la terre. Depuis combien de temps existe-t-elle? Je n’en ai aucune idée. Qui a réalisé ces peintures sur les murs? C’est le moindre de mes soucis. Je n’y prête même pas attention.

- Elle s’appelle Lisreux. Elle a été capturée aux abords du camp Corleone. J’ai demandé que son eau et ses vivres soient rationnées pour casser sa volonté. Ah…Plume? Je ne peux te garantir qu’elle a réellement participé au pillage de Sarlat et jusqu’où a été son implication. Et je m’en fous. Je veux savoir ce qu’elle sait. Le reste importe peu. Ah! Et garde ton arme à disposition. Elle est attachée à la paroi de la caverne par une chaîne de métal…mais j’ai délivré ses liens pour qu’elle ait un peu plus de confort. Ses bras sont libres de toute entrave. Alors…prudence!

Si j’avais procédé à l’interrogatoire lors de ma dernière visite, sans doute eut-il été très différent de l’approche que je m’apprête à prendre aujourd’hui. Réagir à chaud, c’est dans mes habitudes. Là, j’ai envie de tenter une autre approche. On verra si c’est payant ou pas.

- Bonjour Lisreux! Tu vas bien? Je suis venue t’apporter un peu de compagnie féminine. Elle s’appelle Plume. Elle est maréchale à Sarlat. Oh….Ne fais pas attention au loup, il ne te fera pas de mal si tu ne fais pas de mal à sa maitresse. Enfin… il parait.

D’un signe de la tête, je demande à Plume de s’installer confortablement de l’autre côté de la caverne aux bisons. Comme lors de ma dernière visite, je viens accrocher la torche pour éclairer l’endroit.

- C’est bon de voir un peu de lumière non? Et cette chaleur? Confortable? Alors, dis-moi Lisreux, as-tu réfléchi à ma proposition? Es-tu prête à collaborer et à répondre à mes questions ? Tu veux que je te les répète? Je veux savoir tout que tu sais sur la préparation du pillage de Sarlat. Avez-vous eu des commanditaires? Quand ont eu lieu les premiers contacts? Où? Qui a décidé du moment? Pourquoi Manu n’a pas montré sa tête à Sarlat? Les Corleone ont-ils entendu parler de moi avant le pillage? Par qui?

Je sais, ça fait un peu égocentrique comme interrogatoire. Mais que voulez-vous, on ne se refait pas. Je viens prendre appui contre la paroi à ces côtés comme le ferait un ami compatissant. Mon ton est alors moins péremptoire, plus amical. C’est ça, l’autre stratégie!

- Tu es bien traitée au moins? Tu n’as pas trop faim? Pas trop soif? Tu sais, ça va mieux à Sarlat. Tout le monde a repris le travail et on pourrait sans doute te trouver un peu plus à grignoter et à boire… à condition bien sûr que tu te montres conciliante et que tu me donnes ce que je désire.

Je lève la tête en direction de Plume et mon regard se fait interrogateur. Penses-tu, maréchale, que cette stratégie puisse fonctionner? Et si oui, penses-tu qu’on puisse avoir de meilleures réponses dans des temps plus courts? Moi, je l’espère. Tu sais Plume, je puis être totalement inhumain parfois. J’ai ça dans mon sang. C’est l’héritage des Eriksen. Mais contrairement à ce que tu peux peut-être penser, je ne considère pas ça comme un avantage que la nature m’a doté. Ça serait plutôt une malédiction parce que quand je libère ces forces destructrices que j’ai en moi, je ne contrôle plus rien. La moindre petite poussière peut bloquer la machine et la faire devenir folle. La moindre brindille peut embraser la cheminée qui se nourrit de cette haine que j’ai en moi. Tu n’as jamais vu l’état des lieux après une de mes crises rouges, n’est-ce pas Plume? C’est assez répugnant crois-moi. Même pour quelqu’un qui est habitué aux carnages lors d’âpres batailles. Je sais que je suis capable de suffisamment l’abimer pour qu’elle parle… mais je n’en n’ai pas envie parce qu’elle n’aurait rien à gagner et moi, je pourrais y avoir plus à y perdre qu’à y gagner.

- Ensuite, avec ton aide, on prendra contact avec tes amis et on organisera un échange de prisonniers : toi contre Syuzanna NicDouggal.
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Plumenoire
Alors qu’elle allait entrer, son ami arriva.

De rien Seurn, heureuse de te r’voir, amusée

Observant les lieux, et les paroles du blond. Un sourire au coin des lèvres, Plume acquiesçait.
Bien entendu, de toute façon, avec lui, c’était toujours dans l’illégale … Comment ça ? Ce n’est pas du bon homme que nous parlons ? Ha voui, celui qui accompagne Plume est blond, non brun.
Donc rien d’officiels pour les deux maréchaux. Evil la suivait, reniflant, humant les odeurs, visiblement à l’aise aux côtés de sa maîtresses.

T’inquiète Seurn …. Soit prudent toi aussi …

Un masque plus froid qu’a l’accoutumé pare son visage, un sourire tout aussi froid s’installe sur les lèvres. Les yeux sombres pétillent, observant la prisonnière. Pas de joie, pas de tristesse. Rien que les ténèbres.

Bonjour. Comme il l’a dit, mon loup ne te fera rien … sauf ordre de ma part … bien entendu.

L’amusement luit dans ses yeux un court instant, et la brune va s’asseoir de l’autre côté de la caverne, observant attentivement l’endroit et les moindres gestes de la prisonnière, de son ami. La louve est prête à bondir s’il le faut. Evil vint s’asseoir à côté d’elle, observant lui aussi.
Hochant la tête par moment sous le discourt du blond, grimaçant a d’autre, Plume était plutôt d’accord avec les questions qu’il posait. Sauf à la fin ou elle sourit, amusée. Ça c’était la touche danoise. Ce qui faisait qu’elle adorait son mentor et son protecteur.
Oui … la ville se reconstruisait lentement … mais cela n’effacerait pas la colère de certains Sarladais. Pas la sienne en tout cas, ni celle de Seurn … Levant le regard vers lui, elle s’aperçut qu’il la regardait.
Elle ne savait pas lire dans les pensées, ne le sait pas, et ne le saura surement jamais, mais le regarde du danois l’interroge.
Ne serait-il pas entièrement confiant en lui ?

Si le sourire ne bouge pas d’un poil, le regard se fait rassurant.
Elle a confiance en lui, elle sait qu’ils obtiendront les informations qu’ils souhaitent. Si elle est là c’est pour entendre, et pour l’aider. Peu importe la situation. Même s’il entrait dans une crise, elle serait là, quitte à être blessée, elle savait qu’elle resterait. Pour la simple et bonne raison qu’il est son ami.
Le sourire s’étire légèrement, en un sourire confiant.
Se redressant silencieusement elle s’approcha, restant à distance prudente.

Ne t’inquiète pas … Personne ne sera maltraité … Du moment qu’il coopère bien entendu.

Il faut dire qu’elle ne s’attendait pas à cet échange de prisonnier, mais pour pouvoir faire suffisamment pressions sur la prisonnière, elle devait faire comme si tout était parfaitement prévu.
Soudé sur tout, indissociable, comme une meute de loups ….
Umbra
Au cachot, l’Ombre ruminait ses jeunes années, bien qu’elle ne fût pas âgée encore. Adossée contre le mur du fond, ses iris charbonneuses fixaient un point imaginaire dans la pénombre. Le noir ambiant devint alors le théâtre de son existence. De nulle part surgirent la mère supérieure du couvent de Dunkerque ainsi que Sœur Marie-Claire*, elles conversaient à voix basse du sort d’Ombeline, ne prêtant pas attention à elle, recluse sur sa paillasse.

- Que devons-nous faire, ma Mère ? demanda la Sœur d’un ton hésitant.
- Pour le bien de tous, nous devons suivre les instructions du courrier, ma Sœur…
- Mais… Sa place n’est pas dans ce couvent, ma Mère. Je le sens. Ombeline est une jeune fille avide de connaissances, elle pourrait aller loin dans la vie. Son intéressement pourrait faire d’elle, une grande personne…
- Qu’insinuez-vous, Marie-Claire ? Ombeline peut aisément servir le Très-Haut toute sa vie durant. Depuis sa naissance, nous nous occupons d’elle. Elle a passé plus d’un tiers de sa vie entre ses murs. Elle pourra la terminer tout bonnement ici aussi. Nous manquons de bras et d’argent… Le donateur nous fournira sa "dot" chaque mois qu’elle passera ici jusqu’à sa fin. C’est noté sur la missive, ma Sœur. Et Ombeline, quant à elle, nettoie très bien…
- Cessez, ma Mère. Je vous en conjure, je ne veux plus entendre vos…leurs souhaits !


Les paupières d’Umbra se refermèrent, elle non plus, ne voulait pas en savoir davantage. Les Sœurs disparurent et la Noiraude bénit le silence qui suivit la scène. Étalée sur sa couche vieille de quelques jours maintenant, elle respirait l’air moite. L’atmosphère était tellement chargée d’humidité qu’ Ombeline avait l’impression d’inspirer de la vapeur d’eau. Ses vêtements et la paille semblaient mouillés. Surement pleuvait-il à quelques mètres au dessus de sa tête. La Bâtarde tentait d’imaginer ce qu’il pouvait bien se passer pendant son absence. Le Clan avait-il au moins remarqué sa disparition ? S’inquiétaient-ils de son sort ou s’en contentaient-il voyant en cette occasion une part de butin à rediviser ? Ses songes devinrent de plus en plus et la jouvencelle balaya toutes ses pensées d’un vif mouvement de tête. Des bruits de pas parvinrent à ses oreilles affûtées et elle se redressa afin d’accueillir ses visiteurs comme il se doit.

Une lueur perça lentement les ténèbres, leur démarche était lente ce qui permit à l’Ombre d’habituer légèrement son regard à la lumière. Le son des bottes s’amplifia et à ce dernier s’ajouta les bourdonnements de voix. Le discours était confus mais au fur et à mesure que la procession avançait les syllabes devinrent plus claires. Umbra finit même par distinguer les derniers mot alors qu’ils franchirent le seuil de sa cellule :


Sois prudent toi aussi …

Son intuition était bonne, aujourd’hui, les visiteurs étaient nombreux. La torche, une fois installée sur le porte-flambeau irrita sa vue, l’empêchant de discerner les silhouettes entrantes. La Noiraude cligna plusieurs fois des yeux avant de s’adapter à la soudaine clarté. Son regard plissé n’avait rien de certain. De nature éteint, à la lumière des flammes agressives, il brillait. Le charbon d’origine se transformait en obsidienne tandis que l’albâtre de sa peau se dorait sous le halo jaune du feu. Les profils des hôtes se remplirent jusqu’à obtenir l’apparence d’un grand homme blond et d’une jeune femme brune. Aux pieds de cette dernière, un loup tenait la garde. Ombeline resta inerte bien que la présence de l’animal la dérangerait fortement. La désagréable impression de devenir une attraction de foire, une bête en cage la fit rager intérieurement. Silencieuse, elle écouta le maréchal à l’accent nordique. La Bâtarde réprima un rictus en entendant l’appellation du Danois. Sans doute, avait-elle pensé trop haut, voilà qu’il la nommait par son nom dit "de famille". Cela l’aiderait surement à ne pas prendre pour elle, touts les propos qui pourront lui être adressé par cette nomination. La jouvencelle ne se sentait pas plus Lisreux que reyne de France et elle prit ceci comme un atout.

Plume…Drôle de nom songea-t-elle intimement. Par pure ironie, Umbra se serait bien présentée à elle, en retour. Hélas, l’homme continua de parler et au lieu de lui couper la parole et prendre le risque de passer pour une malpolie, elle se contenta d’incliner la tête en faux respect. S'ils jouaient dans la provocation, la Noiraude se plaisait dans le sarcasme. La lumière lui piquait les yeux, le froid lui glaçait les os et l’inconfort lui brisait le dos. Devait-elle réellement prendre la peine de lui répondre ? De toute façon, qu’elle l’eut voulu ou non, il enchaîna. L’interlocuteur renouvela sa requête avec plus de précisions cette fois-ci. Ombeline se divertissait à l’écouter : son débit de paroles incessant, son ton teinté de menaces, son accent brut venu de loin et ce timbre rauque. Il y avait quelque chose d’amusant à l’entendre se trahir lui-même. Sans qu’elle n’ait besoin d’ouvrir la bouche, les réponses découlaient petit à petit des lèvres masculines. Avait-elle prononcé le nom de Manu ou celui des Corleone ? Soit le Nordique était déjà bien informé et cherchait une chose bien plus précise que ce qu’il semblait vouloir. Soit, et à cette idée, les traits de la Bâtarde se durcirent, quelqu’un avait parlé entre temps. Au final, peut-être n’était-elle pas seule ici. D’autres personnes du Clan avaient-elles été enlevées ? Ces dernières seraient passées aux aveux bien rapidement, songea-t-elle.

A rester assise trop longtemps sur le sol dur, sa carcasse s’engourdissait. Sans un geste brusque, craignant d’effrayer le loup ou l’un des interlocuteurs, la jouvencelle se massa un poignet après l’autre. Elle profita de la lumière pour observer sa chair meurtrie. Rien de grave, les liens trop étroits avaient brûlés superficiellement sa peau. Dans quelques jours, toutes les traces disparaîtraient. Si l’eau n’était pas rationnée, l’Ombre en aurait profité pour se débarbouiller. Le strict minimum qu’elle recevait épanchait à peine sa soif alors il n’était pas question d’en gaspiller une goutte. Vint l’interrogation sur le traitement, peut-être s’attendait-il à ce qu’elle approuve sa condition et demande même à rester ? Non mais sérieusement, le maréchal était soit un peu simplet soit vraiment sadique. On ne sait pourquoi, Umbra pencha plus sur la seconde hypothèse. Bien sûr qu’elle avait faim et soif ! Un bout de pain noir et un bol d’eau, vous trouveriez ça suffisant, vous ?! Rien qu’imaginer une mie blanche et moelleuse, sans même parler de viande ou de légumes, la faisait saliver. La piquette du coin, le vinaigre détruisant les papilles, serait autant la bienvenue que le sang d’Aristote lui-même. Un soupir d’agacement ponctua sa pensée tandis qu’un sursaut d’inconfort secoua son corps décharné. La soudaine agitation eut l’air d’attirer l’attention de l’animal aux pieds de sa maitresse. Ramenant calmement l’entrave métallique à ses pieds, la Noiraude tentait faire le vide dans son esprit. Elle ne devait pas craquer. Pas maintenant, il était encore tôt, elle pouvait s’en sortir. Intérieurement, elle se persuadait encore que le maréchal craquerait avant. Il parlait déjà trop, il finirait par la relâcher sans même qu’elle lui adresse un mot.

Ombeline ferma les yeux un bref instant, sentant son cœur battre dans ses tempes puis quand la voix nordique reprit, son pouls s’était apaisé :


Ensuite, avec ton aide, on prendra contact avec tes amis et on organisera un échange de prisonniers : toi contre Syuzanna NicDouggal.

Voilà, un nouveau nom ! L’espoir renaquit dans la tête de la Bâtarde. Elle ne pouvait pas céder, la fin était proche ! Un sourire de satisfaction fendit sa bouche lippue. Bientôt…Bientôt, il abandonnerait. Ne prêtant plus attention à ses visiteurs, la jouvencelle commença à cogiter. Il fallait trouver le rapport entre Manu et Syu. D’abord, que savait-elle de ces personnes ? Pas grand-chose, à vrai dire. Elle avait croisé Manu, par pur hasard aux épousailles Corleoniennes. Jamais, elle ne lui avait décroché un mot, elle pouvait à peine mettre son nom sur son visage. Quant à Syuzanna, bien, l’Ombre l’avait croisé quelques fois en tavernes. Cette dernière écorchait toujours son nom : "Un bras". Mise à part, ça, leurs conversations n’allaient guère plus loin que les banalités. Avec ces piètres informations, comment pourrait-elle aider le Danois ?

C'est à tour de son acolyte de surenchérir, celle-ci avait su se montrer discrète tout au long du monologue. Assez transparente pour qu'Umbra en vienne parfois à oublier sa présence. La brune s'avança près de la captive et c'est ainsi que cette dernière put la détailler du regard. Elle n'avait rien de sévère, elle semblait simplement droite et loyal. Dire qu'elle était juste serait émettre un jugement sur ces actes et ça, la Noiraude s'en gardait bien. Tout est subjectif, n'est-ce pas? Voilà que la maréchale jouait la carte du "méchant flic". Après tout, peut-être cet interrogatoire était-il prémédité? L'un passerait pour le vilain méchant pas beau afin de la déstabiliser et en dernier recours, Ombeline accepterait d'aider le gentil. C'est une mise en scène qui fit sourire la Bâtarde. Bien pensé mais à d'autres... Pour seule réponse aux menaces, la jouvencelle feignit l'indifférence totale. L'ignorant de tout son être alors qu'elle était postée à quelques pas de sa personne. Les iris de jais fixèrent intensément le Nordique.

L'Ombre profita de la clarté ambiante pour mémoriser le visage masculin. Seurn, qu’il s’appelait. Était-ce qui avait commandité son enlèvement ? Ou avait-il un supérieur ? N’était-il qu’un pion ou était-il le roi ? Surement, un fou sous l’apparence d’un cavalier.

Aller Seurn, parle encore un peu, mets-moi sur une piste…


* Se référer au RP: Les vieux péchés ont de longues ombres.

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[Mode Tamago du 20/12 au 02/01, si RP urgent me contacter par courrier IG Bonnes fêtes à tous et à l'année prochaine!]
Soren
C'est une soirée de merde! Assis devant une bière fade, je n'entends même pas les braillages, les cris et les rires à côté de moi. La taverne est animée et à cette heure avancée de la nuit, l'alcool commence déjà à faire son oeuvre dans les esprits des hommes et leurs mains, comme leurs regards se font plus entreprenants avec les dames. Anne est occupée ce soir et mes souvenirs viennent jouer les trouble-danois. Non, ça ne va. Je cogite trop. Beaucoup trop. Je ne suis pas un homme qui se sent bien dans la réflexion. Je préfère l'action. D'un geste agacé, je repousse un voisin qui prend un peu trop ses aises. Va donc cuver ton vin ailleurs et laisse-moi faire de même avec la bière.

    Cela fait quelques jours que je ne suis pas retourné à la caverne. J'ai besoin de prendre du recul avec la Corléone. Ma dernière visite n'a pas du tout été à mon gout. J'ai tenté une autre approche. Plus conciliante. Je me suis retrouvé le bec dans l'eau. Elle ne parle pas. Elle se fout de ce que je dis. Elle est fermée comme une huitre, bien plus que je ne l'aurais imaginé à priori. Je savais en la capturant que la faire parler ne serait pas facile. Mais je n'imaginais pas qu'aucun dialogue ne s'instaurerait. Je m'attendais à la même réaction que ses semblables lorsque je suis allé bêtement les défier dans Sarlat occupé : arrogants, surs d'eux, sans aucun compassion, sans aucun sentiment humain presque. C'est ça le gout qu'ils m'ont laissé en bouche. Cette gamine-là, c'est tout le contraire. Je la sens fragile. Je la sens à ma portée. Je sais qu'elle a encore un côté humain… et ça m'exaspère d'autant plus de ne pas réussir à la toucher. Pas même un mot. Rien! Son esprit est recroquevillé sur lui-même.


Dans la taverne, les esprits s'échauffent de plus en plus. L'individu que j'ai repoussé tout à l'heure tente sa chance auprès de la servante. Enfin, disons carrément qu'il lui met les mains aux fesses et que son regard libidineux en dit beaucoup sur la suite de la soirée qu'il envisage avec elle. Qu'il aille au Sans-Nom ce con!

    Ce qui m'a le plus déplu lors de ma dernière visite, ce fut cette faiblesse dont j'ai fait preuve. Je lui ai lâché la bride à l'Autre! Il s'est engouffré dans les failles créées par mes doutes. Il a tiré sur sa chaine pour se donner un plus d'aisance…et je ne l'ai pas vu venir. Il a ricané dans son coin alors que je quittais la caverne excédé. Derrière moi, j'ai laissé la petite en un sale état. Le côté Eriksen a eu le dernier mot. Je l'ai frappé au visage. Une fois! Deux fois! Et comme si cela ne suffisait pas, j'ai lacéré ses bras et ses jambes. Le sang a coulé. Il s'est répandu sur ses membres. Oh rien de bien grave. Pas de grosses hémorragies non! Même l'Autre ne voulait pas la tuer. Il voulait simplement faire preuve de cruauté. Il voulait montrer à tous ce dont je suis capable. Moi aussi, j'ai un côté inhumain, un côté que je n'arrive pas à maîtriser… Un côté qui me fait parfois sentir si faible.


Ça y est! L'ivrogne est au prise avec un autre saoulaud qui lui aussi trouve cette servante bien à son goût. Pauvre fille! Elle n'a rien à espérer ni de l'un, ni de l'autre. Je doute même qu'elle puisse y prendre un peu de plaisir. Avec tout l'alcool qu'ils ont dans le sens, cela ne m'étonnerait pas qu'ils soient incapable de toucher la cible…

    Lorsque j'ai croisé le garde à l'entrée, mes consignes furent clairs: Plus de nourriture. Humecter ses lèvres de temps à autre et rien d'autre. Le minimum d'eau possible pour la garder en vie, juste pour ne pas qu'elle…crève! Ces mots-là étaient inspirés par l'Autre. Il avait le contrôle total sur mes faits, mes gestes, mes paroles. A cet instant précis, je ne pouvais qu'essayer de le contenir. Sa chaine était bien trop longue. Il aurait pu en profiter, il ne l'a pas fait comme il s'en amuse parfois. Aucune crise noire, mais plutôt un état latent d'insatisfaction et de haine. Il sait que je déteste ça. En cet instant, je ressentais une proximité d'esprit avec la prisonnière. Je l'avais torturé juste ce qu'il faut pour briser son opposition. Et je l'ai laissé mariné dans son propre sang. Casser sa résistance oui, petit à petit. C'est exactement ce que l'Autre essaie de faire avec moi. Il ne pousse pas trop fort. Il distille son venin dans mon esprit comme je l'ai fait avec elle. Ses blessures? J'ai souhaité qu'elles s'infectent. J'ai souhaité que les miasmes y pénètrent, qu'elle doive avoir recours à un médicastre… ou que la gangrène ne s'installe et que l'amputation ne soit le seul choix à part la mort. Oui, j'ai voulu ça. L'Autre m'a inspiré cette idée.


Ma table vole soudain en éclats, me sortant des idées noires dans lequel mon esprit s'embourbait. L'un des séducteur venait de se faire balancer par son concurrent. Sur ma table? Quel fou! Ce n'est pas la soirée pour faire ça tu sais? Pas vraiment! Je peux parfois trouver ça amusant mais ce soir… Mon poignard sort de son fourreau et alors que je me retrouve le genou contre la poitrine de l'emmerdeur, la pointe de la lame vient jouer avec la gorge de l'impétrant.

- Tu m'ennuies! Et tu ennuies la dame! Je ne pense pas que la dame veuille s'allonger dans le foin avec toi, c'est compris? ….Tais toi! J'ai dit… tais-toi!

et puisque visiblement il ne comprend pas, le pommeau du poignard vient frapper durement sa joue qui se fissure sous l'impact.

- C'est compris? Dégage! Et vite!

Je le relève brutalement et le pousse sans ménagement vers la sortie. Le message est passé. J'imagine que son concurrent aura compris aussi. J'ai besoin de calme. Je veux broyer mon noir tranquillement. M'installant à une autre table, je commande une nouvelle bière. Je réfléchis mieux sous l'effet de l'alcool. La serveuse me ramène le précieux breuvage et me fait grâce d'un petit sourire timide, sans doute en guise de remerciement. Pourtant, je n'ai pas fait ça pour elle…mais pour moi! Quelques gorgées plus tard, je replonge mon esprit dans ce qui le préoccupe actuellement. Il faut que j'arrive à me mettre à la place de la victime. Si on voulait quelque chose de moi, comment devrait-on s'y prendre? Comme quand… on a essayé de… me marier par exemple? Lars Eriksen! Il n'y a pas plus pourri sur terre que lui! Même Flex est un petit joueur comparé à lui. Lars Eriksen… Lui avait essayé de me faire fléchir. Et il avait à moitié réussi. Qu'est-ce qui m'avait fait cédé à l'époque? La cellule basse, tellement basse que je ne pouvais tenir debout? Le manque d'eau? De Nourriture? La noirceur avec la vermine? L'absence de soutien? Ou…la crainte que la cellule soit ensevelie sous l'eau comme ce fut déjà le cas une fois dans le passé? *. J'y ai réfléchi ces derniers temps. Souvent. je crois qu'au final c'est un peu tout ça. Ce que Lars Eriksen a cherché en agissant ainsi, c'est m'ôter tout espoir, me faire comprendre qu'il n'y avait plus de salut pour moi. Plus de salut…sauf lui. C'est ça qu'il faut que je fasse. Montrer à cette Corléone que ses différentes chances de salut disparaissent les unes après les autres. Ouais… Je vais lui laisser la possibilité de s'évader. Je vais lui donner ce fol espoir… et je vais contrôler cette évasion pour qu'on la récupère et qu'on la ramène à sa "cellule". Et je recommencerais. Autant de fois qu'il le faut! Jusqu'à temps qu'elle comprenne que son seul salut… c'est moi! **. Je me surprend à sourire sardoniquement. Serais-je moi aussi entrain de devenir un Lars Eriksen? Ouais… N'oublie pas danois que la folie des Eriksen est présente dans ton sang et dans ton esprit. Son venin se distille en toi à chaque jour, que tu le veuilles…ou pas!

* voir le RP "La cellule des soupirs"
** Scène inspirée de "La grande évasion", un film de John Sturges avec Steve macQueen, James Garner, Richard Attenborough, James Donald, Charles Bronson, Donald Pleasence, James Coburn

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Umbra
Recroquevillée tel un fœtus sur sa paillasse, l’Ombre gisait dans sa torpeur. Sa langue pâteuse l’empêchait de déglutir sans douleur. Ses lèvres écorchées s’asséchaient fur et à mesure que l’air s’y engouffrait puis s’en échappait. Sa respiration fébrile et bruyante s’étouffait entre les murs de son cachot. Le nez bouché par le sang coagulé inhibait son flair de la puanteur régnante : mélange de l’immonde fragrance de moisissure due à l’humidité stagnante, de l’infâme odeur de ses déjections et de la senteur répugnante de sa propre sueur. Seul le parfum ferreux de son hémoglobine parvenait à son odorat. Heureusement, la pénombre béante lui cachait la vue de son état.

La fraîcheur ambiante glaçait les os d’Umbra dont le corps s’agitait de violents spasmes pour se réchauffer. Le moindre mouvement était une torture pour sa carcasse ankylosée. Elle avait froid et pourtant, la masse brune de ses cheveux se collait, de transpiration, à son visage. La Noiraude n’en avait pas conscience mais elle était fiévreuse. Son organisme luttait contre l’infection de ses plaies. Ses vêtements, imbibés de sang et de suée, moulaient sa peau cadavérique.

Après avoir tanné le cuir de son faciès à coup de poings, le danois avait saigné les membres d’Ombeline comme ceux d’un animal avant de l’abandonner inerte sur sa couche. Il voulait qu’elle parle, elle s’était époumonée à s’en briser la voix. Muette comme une tombe en une fraction de seconde, voilà qu’elle hurlait à la mort. Cherchant à attiser la colère du maréchal, il avait fini par sombrer dans une rage noire et la foudre s’était abattue sur la frêle carrure de la bâtarde. Le Nordique s’était déchainé et à y réfléchir, on pourrait se demander s’il restait encore quelque chose d’humain en lui à cet instant. La jouvencelle l’avait jugé simplet et pas très rusé mais en quelques minutes, il lui avait prouvé l’exact contraire. Son visiteur était déterminé, il voulait ses réponses et il les obtiendrait par n’importe quel moyen. L’Ombre avait compris la leçon, on ne la reprendra plus à sous-estimer son adversaire.

Pour finir, la douleur avait eu raison d’elle. Umbra, en ultime recours, s’était évanouie pour échapper à ce massacre. Son massacre. Combien de temps resta-t-elle comateuse ? Des heures, des jours ou des semaines s’était-il écoulé dans son état léthargique ? La Noiraude n’avait plus aucune notion du temps, son esprit embrumé faisait abstraction de toutes idées, de toutes sensations. Pendant un long moment, elle resta paralysée sur la paille. Son être ne réagissait plus aux ordres de son cerveau. Ses muscles tétanisés la clouaient au sol. Vidée de toute force, de tout espoir, de tout envie, Ombeline souhaitait qu’il vienne l’achever maintenant. Cette douloureuse attente torturait davantage son âme et pour résister son esprit divaguait. Avec la fièvre, la Bâtarde hallucinait. Elle riait nerveusement avant de fondre en larmes. Elle gesticulait, rouvrant par l’occasion ses plaies, puis criaillait avant de retomber dans l’inconscience. Cet accès de folie dura une longue journée avant que la jouvencelle ne soit complètement annihilée.

L’Ombre finit par s’accommoder de la douleur lancinante. Elle réduisait ses gestes au strict minimum, c'est-à-dire se traîner lentement dans un coin pour ses besoins et soulever la pauvre écuelle d’eau pour s’hydrater. Depuis le courroux du danois, les rations avaient été réduites au minimum de survie : pas de nourriture et un pauvre bol d’eau changé tous les deux jours. Chaque goutte était comptée mais insuffisante pour combler sa soif. La faim tordait son estomac qui grondait sans cesse. Umbra ne recevait pas de visites non plus hormis celle du geôlier pour l’eau. Elle s’était faite une raison et ne s’adressait jamais à lui, même pour le supplier. Le maréchal voulait l’épuiser et ce fou y arrivait !

Le silence se faisait pesant et la solitude devenait insupportable même pour cette asociale. Personne ne viendrait la sauver, elle finirait par mourir ici, sous terre. Paradoxalement, la Noiraude avait du mal à admettre son triste sort. Il voulait des réponses, non ? Il reviendrait donc pour les quérir. Mais dans combien de temps ? Tiendrait-elle jusqu’alors ? Maintes interrogations tenaillaient sa pensée entre ses courts sommeils de répit. Cette grotte serait son caveau et cette idée la fit éclater d’un rire emplie de détresse :


Je suis née pour vivre dans l’ombre..J’y mourrais aussi ! Sans famille, sans amis ! Oui, je suis seule ! SEULE ! Éternellement seule…

Sa voix brisée se choquait entre les murs de sa tombe et après la disparition de l’écho de son cri de détresse, un infime grattement se fit entendre. Un rat. Dans l’obscurité totale, Ombeline se redressa et tendit l’oreille.

Tu penses pouvoir me manger…Mais tu seras mon repas, sale rat !

La menace retentit alors qu’elle se relevait douloureusement. Il y a bien longtemps que sa carcasse ne s’était pas levée. Le dos courbé, la faim au ventre, la Bâtarde traina sa chaine dans la cellule à la recherche de l’animal.

Petit…Petit…

Le murmure malsain encourageait la jouvencelle errante dans les ténèbres. Percutant quelque chose de son pied gauche, elle se jeta à terre et tâtonna avec violence le sol.

Tu es à moi ! Tu es fait, sale rat !

Suite aux coups répétés, se dressa dans les airs, un nuage de poussière qui la saisit à la gorge. L’Ombre toussa un bon moment en se frottant les yeux. Les soubresauts de sa quinte réveillèrent la douleur de sa carcasse et instinctivement, Umbra se roula en boule, gémissante.

Au bout d’un moment, désespérée, la Noiraude rejoint sa couche et mordilla quelques brins de paille usagée pour apaiser sa faim. Ses iris fixant un point imaginaire, Ombeline patienta encore indéfiniment, se demandant si les heures s’écoulaient toujours au dessus de sa prison intemporelle car au final, le temps est l’image mobile de l’éternité immobile…*


* De Platon

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.opaline.
Et tu étais là dans un coin. Elle ne t'a pas vu, elle ne pouvait pas te voir. Personne ne te voit jamais, au début.

Tu aimes observer, repliée dans un coin tu observes leurs faits et gestes. Tu apprends à connaître ceux qui t'entourent sans jamais ne te mêler de leurs histoires. Tu as assez des tiennes. Pourtant depuis le temps tu les connais. Tu la connais.
Tu es aussi blonde qu'elle est brune. Tu es aussi soignée qu'elle est pouilleuse, même si ton corps tatoué ne laisse que peu d'imagination sur ton passé. Tout est gravé là, à même ta peau. Tu te demandes comment elle peut se laisser aller, et l'état de ses cheveux te laisse pantoise, personne n'a du lui apprendre l'utilité d'une brosse. Tu te promets de lui montrer un jour... Un jour, quand enfin elle t'aura vu. Elle va te laisser prendre ses aises, avec le temps tu réussis toujours à imposer tes envies.
Laisses mon esprit s'étaler, mes pensées divaguer. Laisses moi m'imposer...

Tu sais que ça sera long mais tu es prête. Tu te nourris de son mal être. Tu te repaîs de son état. Tu fantasmes sur son malheur et jouis de sa solitude. Tu sais que c'est comme ça que tu finiras par l'assujettir. Parce que c'est toi. Parce que c'est elle.
Tu ères depuis des jours, des années même. Et en cherchant au plus profond de tes souvenirs, il te semble avoir toujours été là. Aussi tu souris lorsqu'elle hurle qu'elle est seule. Tu aimerais lui dire que tu es là, mais patience est mère de sûreté et si tu veux sortir de l'ombre, tu dois pour le moment... y rester.

Tu avais vu le rat. Tu l'avais admiré. Sa démarche. Sa manière de se lécher les pattes. De boire cette eau croupie. Sa manière d'évoluer dans une atmosphère inhumaine. Tu avais souligné la croupe de la bestiole en te demandant au bout de combien de temps Elle, l'aurait vu. Tu savais la faim qui la tenaillait. Tu avais parié sur ce massacre. Tu es mesquine, la condition d'Umbra t'est orgastique. Tu pourrais agir. Tu pourrais parler. Tu pourrais.


Mais tu ne feras rien d'autre qu'observer.
Car c'est dans l'ombre d'une ombre qu'est ta place.
Pour le moment.
Tu es à moi, et tu es faite...
Plumenoire
Leur dernière entrevue c’était mal passée, très mal …
Elle avait craint la crise, c’était éloignée et avait observée. La louve avait quitté la caverne en silence.
Seurn avait perdu le contrôle.

Un soupire s’échappa des lèvres de la brune. Observant le ciel du crépuscule, elle marchait vers la caverne du bison, tête dans ses pensées.

[Pendant ce temps …Caverne du Bison …]

Les gardes étaient longues. Pourquoi surveiller une prisonnière que personne ne voulait faire échapper ? Elle était inerte, il s’ennuyait réellement. Une torche à la main, il apporta de l’eau a la prisonnière. Quelques gouttes, selon les ordres des patrons. Rien de plus.
Il humecta ses lèvres, puis le remède qu’il cherchait arriva …

Un corps, frêle, a sa merci, que demander de plus ?

Le garde se pencha pour allonger la captive dans une position ou il pourrait faire son affaire plus facilement. Mais voilà, la chaine au pied de la pauvre femme se mit à cliqueter.
Sa main chercha fébrilement les clefs de la chaine de la captive, la trouvant enfin, il détacha sa future victime, envoyant cogner la chaine contre le mur dans un bruit métallique.
S’installant à califourchon sur la blessée, il sourit, observant le corps qui s’offrait désormais à lui, bloquant ses possibilités de se débattre.


[à l’entrée de la caverne … ]

Plume était arrivée, elle avait l’habitude d’échanger quelques mots avec le garde lorsqu’elle passait. Au moins pour connaitre l’état de la prisonnière. Mais là rien. Personne.

Il y a quelqu’un ici ?

Pas de réponse, la brune entre. La lueur de la torche éclairait le tableau.
Le garde ? Sur la prisonnière ?

Hurm … !

Evil se mit à gronder sourdement sur un geste de la brune. Il allait la violer ?!
Attrapant le garde par la nuque, Plume l’envoya voler plus loin.

Nan mais ….. ! SORTEZ D’ICI IMMEDIATEMENT !

La brunette se pencha ensuite vers Lisreux

Lisreux … ?

Etait-elle encore en vie ? Consciente ? Palpant doucement son visage, cherchant son souffle a sa bouche la brune sourit doucement.

Seurn ne t’as pas raté hein … Tu devrais répondre à ses questions …

Plume observa chacune des blessures … elles n’étaient pas belles … Peut être qu’elle cèderait bientôt …
Soupire de la brune, elle adossa la prisonnière a la parois.

Repose toi … demain, Seurn reviendra, tu as intérêt à être en forme …

La louve se releva souplement et siffla Evil.
On y va, j’ai un garde à sermonner !

Grognant, elle l’observa alors qu’il sortait en vitesse. Le loup vint, la suivant sagement. Laissant la torche à la prisonnière, plume disparu dans la nuit, suivant le garde.
De l’intérieur de la caverne, on pouvait entendre des éclats de voix, la brune semblait être en colère.

Bon sang, ce n’est pas possible d’être aussi idiot ! Vous me dégoutez, vous les hommes !

Marmonne un « vous m’dégoutez … » Un sourire naquit au coin des lèvres de la brune, hochant doucement la tête

Vous serez sage ? j’peux r’partir chasser sans problèmes ?
Moui m’dame …

La brune hocha la tête et repartit en courant dans les bois, le garde lui, s’éloigna, puis qu’il ne pouvait se soulager avec la prisonnière …
Umbra
Prostrée sur sa couche, l’Ombre avait tant déliré ces dernières heures que même respirer devenait un gros effort pour elle. Un court instant, dans sa folie, elle ne s’était plus sentie seule. Dans un coin baigné d’obscurité, l’impression d’une présence apaisa son âme tourmentée. Umbra se calma donc et regagna sa paillasse. Elle resta un long moment, silencieuse, appréciant sa compagnie. La Noiraude ne souhaita pas lui adresser la parole de crainte de la faire fuir. Elle se contenta simplement de la ressentir. Divaguait-elle encore ou une personne l’observait-elle réellement ? Qu’importe, pour une fois qu’on ne lui demandait rien… C’est ainsi, quelque peu soulagée de sa solitude, qu’Ombeline s’endormit. Après avoir erré un bon quart d’heure à mi-chemin entre la conscience et l’inconscience, elle sombra profondément.

La Bâtarde, usée, percevait sa carcasse comme une enclume même pendant son sommeil: lourde, ankylosée, douloureuse. Ses maigres forces la tenaient à peine assise. Vautrée sur la paille moisie et mâchouillée, la jouvencelle, sous ses paupières closes, devina l’arrivée du geôlier mais se garda du moindre mouvement. Elle savait qu’il venait lui apporter une écuelle à moitié vide, qu’elle aurait beau lui lancer une phrase la plus agréable ou anodine soit-elle, il ne répondrait pas. Hélas, une fois de plus son jugement fut trop précipité.

Les yeux toujours fermés, l’Ombre sentit le souffle lourd du gardien près de son visage. Feignant toujours de dormir, son corps s’agita d’un frisson quand les mains bourrues se posèrent sur son cuir violemment tané. Que faisait-il au juste ? Tentait-il de la libérer ? Etrange manipulation pour ôter une chaine tout de même. Umbra n’avait pas la force de se dresser ni même de sortir quelques mots. Elle entendit seulement le cliquetis de sa chaine puis le fracas de ses liens contre le sol. Ce son aurait pu être merveilleux si le poids du garde ne vint pas l’écraser. Dans un sursaut de terreur, la Noiraude essaya de se débattre tandis que les doigts inquisiteurs se frayaient à tâtons un passage sous sa tenue. Ombeline avait trop hurler précédemment pour que, même en ultime recours, aucun son ne puisse s’échapper de sa gorge. Le calvaire devint réellement l’enfer à partir de ce moment-là. La corpulence du geôlier l’oppressait jusqu’à la faire haleter bruyamment, une vaste douleur ébroua son être : l’immonde sensation d’avoir tous les os réduit en poussières et l’âme avec.

Heureusement, il n’en fut rien. Plume arriva et stoppa le massacre cette fois-ci. La dernière fois, quand Soren l’avait battu, la brune s’était bien gardée de la moindre intervention : Peut-être le craignait-il ou peut-être consentait-elle à sa rage ? Qu’importe, quand sa voix salvatrice retentit pour briser le silence infâme, la Bâtarde se laissa choir à nouveau. Seule l’adrénaline la maintenait en vie. La jouvencelle s’enfuit à nouveau dans son inconscience, laissant la prévôt s’occuper du gardien. Certain qu’on ne l’y reprendrait plus à ronger les os de l’Ombre, du moins, c’est ce qu’elle espérait.


Lisreux … ?

Quel est ce nom déjà ? Ah oui, Son nom de famille. De la famille qui l’a abandonné loin de ses terres bretonnes afin que jamais elle ne retrouve le chemin de la maison. Celle qui l’a rendu orpheline de plein gré. Celle qui lui a brisé son identité dès le plus jeune âge. Celle qui a fait d’elle, Umbra, l’Ombre d’elle-même. Bien évidemment, la Noiraude n’allait pas répondre à cette appellation. Elle fit mine de dormir, se demandant ce que désirait la visiteuse.

Seurn ne t’as pas raté hein … Tu devrais répondre à ses questions …

Certes, à voir son état, s’il l’avait loupé, c’est qu’il tentait tout bonnement de la tuer. Son corps en charpie n’était plus qu’un amas douloureux sans énergie. Plume redressa Ombeline mais cette dernière garda le regard bas et les lèvres closes. Répondre à des interrogations dont on ignore complètement le sens. Autant l’achever tout de suite. La Bâtarde, même si elle le voulait, ne pourrait rien avouer. Allait-il encore s’en prendre à elle ? Pas sûr qu’elle résiste une seconde fois à la fureur danoise mais que faire en somme ? La jouvencelle émit un soupir plaintif.

Repose toi … demain, Seurn reviendra, tu as intérêt à être en forme …

Demain ? Que signifiait réellement "demain" dans cette interminable attente ? "Demain", "Aujourd’hui", "Hier" n’avait plus de sens dans l’esprit chamboulé de l’Ombre. Il n’y avait simplement que le supplice latent de l’éternité et le soulagement de la suspension du temps lors des brides de sommeil. La maréchal abandonna Umbra au fond de sa cellule mais libre de ses gestes. Son pied entravé était enfin libéré de ses liens métalliques. La chaîne avait rongé se cheville, laissant la peau à vif. Le simple fait de faire un rond de pied lui tirait les larmes aux yeux. N’était-ce qu’une entorse bénigne ou une véritable fracture ? La Noiraude ne tenta aucun mouvement brusque et laissa son membre meurtri choir sur la paillasse.

Plume, dans son inattention ou dans un élan de bonté, avait oublié sa torche sur le mur de la grotte. Cette dernière éclaira les ténèbres ambiantes comme une lueur d’espoir. A l’extérieur, des éclats de voix résonnèrent un instant puis plus rien, elle était à nouveau seule. Ombeline fixa le coin de la géôle où plus tôt une présence était apparue, cherchant à la ranimer encore quelques instants. L’angle restait baigné d’obscurité. Pendant un instant, la Bâtarde fut tiraillée entre le désir d’illuminer le recoin et la crainte de n’y rencontrer personne. Finalement, elle se résigna à ses rêves, elle, qui habituellement, n’imagine rien et exige que des preuves tangibles, des choses concrètes. Maintenant, elle se prenait à espérer, à envisager de nouveaux horizons, à créer un nouveau monde…

La flambée avait quelque chose de réconfortant, ses faisceaux chaleureux s’agitaient. Ils vivaient, tuait l’immobilité constante. Les iris de jais s'accommodèrent à la luminosité et même l’apprécièrent. Adossée, la jouvencelle prit une maigre gorgée d’eau avant de mâcher un brin de paille de sa couche. Ainsi, les heures défilèrent. Le temps d’un flambeau, l’Ombre reprit gout à la vie, s’émerveillant du moindre crépitement. Le temps s’écoula de nouveau pendant que la flammèche dansa vivement, vacilla, trembla puis s’étiola. Une odeur de soufre se mêla à l’infection environnante puis plus rien.

Le noir, la solitude, encore et toujours jusqu’à la prochaine visite. Umbra se consola en se disant qu’il n’y a pas longtemps de cela, "demain" n’était qu’à une pincée d’heures du présent. Le néant, la mort, à combattre encore des centaines de minutes et des millièmes de secondes. Que le temps est long…

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[Mode Tamago du 20/12 au 02/01, si RP urgent me contacter par courrier IG Bonnes fêtes à tous et à l'année prochaine!]
Soren
En sortant de la taverne cette nuit-là, je m'étais précipité vers l'abreuvoir, dans l'écurie attenant aux Amazones. Par des spasmes violents, mon estomac s'est libéré d'un poids qui ne lui tenait pas à coeur. Mon estomac… et mon âme? La bête qui se trouvait devait se demander quelle étrange animal était venu ainsi venu souiller sa boisson. Avez-vous déjà ressenti cette impression de vide qui nait au coeur de vos entrailles et qui semble vous aspirer tout entier dans le néant? C'est une sensation bien particulière que celle de se sentir happer par soi-même. C'est comme si l'on auto-digérait… mais à une vitesse phénoménale. Comme si l'araignée se faisait avaler et étouffer par sa propre toile. Ce soir-là, j'avais trop bu. Oui. Mais j'avais aussi trop pensé. Beaucoup trop! Manu avait raison : je m'étais ramolli depuis mon arrivée en Périgord. Il y a à peine deux ans, j'arpentais les routes du royaume avec cette compagnie de mercenaires. Des abominations, j'en avais vu des tas. Pendant les batailles. Mais aussi, avant les batailles… Et après aussi! Cette carapace qui s'est petit à petit formée autour de moi pendant tous ces combats s'est élimée au contact de la vie citadine que j'ai vécu depuis plus d'un an. On ne peut imaginer, lorsque l'on ne l'a pas vécu, les affres de la guerre : la violence qui ravage les humeurs des combattants pendant l'assaut, cette capacité que l'on a à mettre sa vie en danger en permanence. Ne plus penser que chaque instant peut être le dernier que l'on vit, mettre son esprit de conservation en veilleuse pour accomplir ce qui doit être accompli. Jouer avec le mort. La voir à l'oeuvre devant, derrière, à gauche, à droite. Effectuer un pas de deux avec elle quand une lame frôle votre gorge à un grain de maïs et lui lâcher subitement la main pour aller embrocher autrui pendant qu'elle va jouer ailleurs. Ne même pas s'étonner quand la tête de l'homme à votre côté vient de se transformer en une bouillie infâme et gluante, alors que les esquilles d'os appartenant à ce qui était jadis son crâne ornent maintenant votre armure. La guerre est faite par des humains, contre des humains, mais elle est totalement dénuée d'humanité. Comme voulez-vous qu'ensuite il n'y ait nulle exaction? Jouer avec la mort, cela se paie…comptant!

Aujourd'hui encore, je me rappelle cette nuit passée dans mon lit, à lutter contre ce sommeil qui ne veut pas venir frapper à ma porte, à tenter d'oublier ces entrailles nouées par toutes ces images qui me dégoutent. Le Seurn que j'étais n'aurait pas eu de remords à faire ce qu'il a fait. C'était une Corléone! Les Corléone ont pillé Sarlat sans aucune scrupule! Les MacDouggal, MacDowell et MacAvoy se sont ligués avec les Corléone parce qu'ils n'ont pas apprécié se faire prendre la culotte baissée par la comté? Et Syu a organisé tout ça pour se venger de toi. Parce qu'elle n'a pas accepté que nos idéal de vie divergeaient… Alors pourquoi en aurais-tu toi à te faire justice toi-même? Non…. Ce n'est pas vrai! Pas Syu! Elle n'est responsable de rien! Elle a retrouvé son amour d'enfance! Il lui a fait l'enfant qu'elle désirait. Elle a une famille, sans doute une maison… Elle a tout ce qu'elle voulait. Tremper dans la prise de Sarlat, ça n'a tout simplement aucun sens! Aucun! Cette question est revenue me hanter toute la nuit, de manière lancinante. Elle me hante. Je dois savoir la vérité pour tirer un trait définitif sur toute cette histoire. Mais pour ça, je dois connaître TOUTE la vérité. Malheureusement pour elle, ça passe par cette Corléone qui git au fond de cette caverne. Oui… Comment s'appelle t-elle d'ailleurs? Il me semble que j'ai oublié son nom. Qu'importe d'ailleurs. Je me fous de son nom. Elle n'est rien, juste une prisonnière qu'il faut faire parler. Tu ne dois pas connaître de détails sur elle. Rien. Ni son nom que tu as oublié. ni ce qu'elle a vécu, ce qu'elle peut ressentir, torturée physiquement et mentalement, abandonnée des siens. Elle n'est rien! Elle est moins qu'un cheval, moins qu'un chien ou même un rat qu'on massacre sans vergogne d'un coup de bâton! Le danger est là. Tu le sais, tu le sens. Elle ne doit avoir aucune saveur d'humanité. Sans ça, tu n'arriveras pas à tes fins. C'est une guerre que tu mènes Seurn. Et elle, c'est l'ennemi. Comme dans les batailles Seurn! La personne en face n'a rien d'humain. Tes gestes meurtriers ne s'en prennent pas à un être humain. C'est une Corléone, de ceux qui ont pillé Sarlat en n'ayant aucune considération pour sa population. Les Corléone Seurn! Ceux qui n'ont même pas eu le courage de leur acte et qui se sont cachés derrière les prétendus injustices de Manu MacDowell. Trouve ta motivation ici! Dans ce qu'elle est réellement : une pilleuse! Et s'il le faut, remets-toi dans l'ambiance de la ville pendant le règne de Laell.


[Alentours de Sarlat, dans la caverne aux bisons.]

"Il marchait à côté de moi. Quelques instants auparavant, on avait eu une discussion. J'avais eu l'impression de lui offrir un bonbon au gamin qu'il était. Gamin… Oui, c'est l'impression qu'il m'avait donné. Ses yeux pétillaient d'envie au fur et à mesure que mes mots venaient caresser le fond de son oreille. Il devait en avoir rêver depuis qu'on l'avait capturé. Et moi, je profitai de lui pour obtenir ce que je voulais. Il faisait mon sale travail et il adorait ça. Des restrictions? Aucune… Excepté qu'il ne la tue pas. Il avait acquiescé. Pendant que nous logions ce long couloir qui menait à la caverne aux bisons, je ne l'ai pas regardé un seul instant. Il m'écoeurait à baver ainsi d'envie. Il me dégoutait alors. J'essayai de faire le vie en moi. Surtout ne pas trop réfléchir parce que sinon, j'arriverai irrémédiablement à me dire que le plus salaud des deux, c'était moi. Lui il voulait quelque chose et il l'aurait. Moi je voulais quelque chose et il m'aiderait à l'avoir. Nous sommes entrés dans la caverne. Elle gisait là, au sol, immobile. L'odeur qui se dégageait d'elle était infecte. Un mélange de sueur, de crasse et d'excréments. Je l'ai regardé lui et j'ai juste acquiescé du menton. Il est allé accrocher sa torche sur la paroi de droite. J'en ai fais de même sur la paroi de gauche. Jamais la pièce n'avait été aussi éclairé qu'aujourd'hui. Son regard lubrique croisa le mien. J'ai interposé ma main entre lui et elle.

- Bonjour toi! Je suis venu avec un ami qui te veux du bien. Beaucoup de bien. Il m'a demandé de vous laisser un moment en tête-à-tête et j'ai accepté. Tu sais,ça fait longtemps qu'il te garde. Il a pris pitié de toi. Il me trouve trop dur envers toi. Il aimerait bien égayer un peu tes mornes journée. Tu sais peuvent être les hommes qui sont torturés par leurs humeurs? Je ne sais pas ce qu'il te trouve, mais lui, il le sait. Tu devrais être flattée. Tu es bien à son goût. Il n'a pas arrêté de me vanter tes qualités. Il parait que tu es jolie, que tu prends soin des autres, que tu as beaucoup de conversation et surtout que tu lui fais de l'effet! Alors je lui ai autorisé à te retirer les chaînes pendant qu'il s'exécute. Enfin…Tu vois ce que je veux dire n'est-ce pas? Inutile de te faire un dessin! D'ailleurs il ne s'harmoniserait pas du tout avec ceux qui t'entourent. Tu as encore une chance. Parle! Parle! PARLE si tu ne veux pas que je laisse cette bête concupiscente se repaître de ton intimité!

Il me regarda un instant, stupéfait et inquiet. Il ne s'attendait pas à cette proposition de dernière minute. Pour lui, l'affaire était dans le sac. Nul besoin de dernière chance à lui offrir. Pour toute réponse, c'est un lourd silence qu'elle m'offrit. Pauvre folle! A croire que elle aussi, elle en avait envie.

- Comme tu veux…mais je te rappelle que ça fait des semaines qu'il n'a pas vu de femmes!

Je lui ai jeté un dernier regard dépité. J'ai laissé les torches crépiter dans la caverne, et je me sorti. Je n'avais pas encore rejoint le couloir que j'entendais sa masse lourde s'abattre sur son corps frêle Ses grognements de porc se répercutaient en écho dans toute la grotte. Ça me faisait mal dans les oreilles, dans la tête. Les mâchoires étaient serrés au point que mes gencives en devenaient douloureuse. Jusqu'à la sortie, j'ai massacré trois fois mon poings contre la paroi de pierre. J'ai la main droite toute contusionnée et c'est tout juste si je ne me suis pas claqué la tête dessus aussi. For fanden! Il la viole! Et sur mon ordre! Pire avec… avec ma propre bénédiction! Dehors, le soleil était à son zénith. Je voulais oublier ce qui se passait à l'intérieur. Oublier… même si je savais que j'aurais moi aussi mon rôle à jouer par la suite. Allongé sur le sol, le regard vague perdus dans les nuages aux formes bizarres, je l'ai vu sortir de la caverne. Il remontait ses braies, serrait sa ceinture et se nettoyait la bouche du revers de la main. Il avait l'attitude du gars repus, satisfait, de celui qui est ivre du plaisir qu'il vient de prendre en se foutant totalement des souffrances qu'il vient de lui infliger et de l'ignominie qu'il vient de commettre. Lui, il n'a même pas l'excuse d'avoir eu les humeurs toutes retournées par la folie meurtrière du combat. Il ne vient pas de risquer sa vie à chaque instant. Il s'est conduit en pilleur. Les Corléone pillent les villes, lui pille le corps des Corléone. Il n'est pas mieux qu'eux… et moi non plus!

Je me suis levé et sans un mot pour celui qui venait d'accomplir la mission que je lui avais confié, je suis rentré à nouveau dans la caverne aux bisons. De nous deux, qui est le plus salaud? Celui qui exécute ou celui qui donne l'ordre? Suis-je simplement un lâche de ne pas avoir exécuter le travail moi-même? Elle était là, recroquevillée sur elle-même. Elle pleurait, gémissait. Les flammes des deux torches léchaient son corps avec une indécence rare. Ses vêtements étaient en lambeaux. Elle grelottait. De froid ou de peur, cela n'avait plus d'importance. Je me suis approché. et je l'ai frappé. Une fois, deux fois.. Je l'ai frappé à la tête encore et encore jusqu'à ce qu'elle parle enfin. Je l'ai frappé et…"


[Sarlat - Auberge des Amazones]

… et l'oreiller de plumes d'oies du Périgord a volé en éclat, étalant son contenu partout dans la pièce. Je me suis réveillé en sursaut. Des gouttes de sueurs perlaient sur mon front. Ma respiration était haletante, ma bouche ouverte, mes yeux exorbités. J'avais froid. Je grelottais. Autour de moi, il y avait des plumes partout. Certaines n'avaient même pas encore terminées leur chute tellement mon redressement dans le lit avait été brusque. J'ai passé mes mains dans mes cheveux. Un rêve. Tout ceci n'était qu'un rêve. Enfin…disons plutôt un cauchemar inspiré par les pires démons qui hantaient mon esprit depuis cette naissance brutale. Tout venait-il de là? De cette naissance où mon père fracassa la hanche de ma père avec son épée pour me libérer de ses entrailles? Ou cela était-il tout simplement l'héritage maudit des Eriksen? J'étais prisonnier de ces entrailles. Jamais je n'aurais dû naitre! Jamais1 Mon père a contrarié le destin en me faisant naître. Ce dernier s'est vengé en lui offrant une descendance pourrie et maudite… Ce soir-là, à l'auberge des amazones, je n'ai pas pu retrouver le sommeil. Les démons s'étaient réveillés. Ils faisaient la fête en moi. Ils faisaient un boucan infernal. Je n'avais pas le droit à un peu de répit. Non, pas ce soir!

[Sarlat - Devant la caverne aux bisons]

Aujourd'hui, j'évite encore de me remémorer cette fameuse nuit. Ce rêve fut bien trop concret pour rester un simple rêve. J'aurais pu le toucher. Cet oreiller qui a éclaté, c'était sa tête qui cédait sous la violence de mes gouts. Ce n'était l'odeur des plumes qui planait ce soir-là dans ma chambre, c'était bien l'odeur âcre et le gout métallique du sang et des humeurs qui flottaient dans l'air.

Un vent d'ouest apporte les effluves de la ville jusqu'ici. Mes mèches de cheveux volent devant mes yeux. Le ciel est gris. La pluie s'annonce. Tapie à l'orée de la forêt sarladaise, j'attends. Si Plume a bien fait son travail, la Corléone devrait saisir l'occasion pour s'enfuir. Ses fers doivent être détachés et son garde doit se laisser faire. J'aurais pu l'écarter, le laisser "assoupi" dans un coin, mais je ne veux prendre aucun risque. Il faut qu'elle croit que cette évasion est de sa propre initiative. Si elle a un doute, tout ceci ne servira à rien. Alors, que chacun fasse les quelques sacrifices pour en arriver au résultat final.

Je me tourne vers la droite et je fais signe au petit groupe de traqueurs que tout est en ordre. Puis, c'est à gauche que je recommence le même cérémonial. Tout le monde est prêt, il ne reste plus qu'à attendre notre "invitée".

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.opaline.
Il fait noir et tu n'as jamais vu aussi clair. Le temps s'égraine avec la lenteur d'un matin d'hiver. Tu perçois la beauté où d'autres ne voit que désolation. L'humidité ambiante imprègne tes vêtements et l'odeur qui en résulte ne fait qu'agrandir ta soif d'en finir. Prendre possession. De ses faits. De ses gestes. De sa vie. D'elle.

Les cartes sont distribuées, le jeu commence, et c'est toi qui a la meilleure main. Tu es vivante. Tu as faim et seule la vengeance te comblera.
Tu tournes en rond. Tu cherches. Les possibilités. Les choix. Tout ce que ce fichu endroit te laisse comme marche de manoeuvre. Et tu sais qu'il y en a peu.


Le rat, tu vas t'occuper du rat pour commencer. Umbra est faible et c'est dans son apathie que tu puises ta force. Et tu en joues. Tu te mouves sur le sol, tu deviens bestiale, inhumaine. Ton odorat ne te trompe que rarement. Tes ongles s'enfoncent dans la terre battue et tu avances comme possédée. Tes yeux ne reflètent plus rien que la noirceur de ton âme. Tu l'as repéré, tes naseaux s'ouvrent alors que ta main s'approche du rongeur. Lentement ta tête se penche alors qu'il te repère. Il est à toi désormais et tu n'as qu'à cueillir de ta pince son énorme queue.
Tu te redresses, prenant soin d'épousseter ta robe. Tu es une fille, ne l'oublions pas.

Mange.


Tu sais qu'elle doit prendre des forces. Tu sais que vous n'êtes pas dans une cellule comme une autre. Tu as vu que son geôlier n'était pas un débutant.
Mais tu sais surtout qu'elle devra te faire confiance, car elle n'est plus seule désormais, pourtant elle ne sort pas de sa léthargie. Tu tentes de capter son regard en vain. Tu devras seule te charger ta trouvaille.
Tu soulèves le rongeur et le mires une dernière fois. Tu aimes voir avec quelle habilité il essaye de t'échapper tout en regrettant de devoir lui tordre le cou. Et pourtant...
Oui, sa chaire cédera aussi facilement que ses entrailles que tu aspires goulûment. Le liquide carmin qui coule sur ton menton sera la seule preuve de ton meurtre. Un bruit se fait entendre et tu dois déjà abréger ton repas.

Un souffle frais fend l'air.

Il faut t'enfuir Umbra.


Et c'est tout naturellement que tu mires la bâtarde, sourire élargi. Ton bras se tend, vers la droite.
C'est par là que tu vas partir, et c'est là qu'elle devra te suivre.
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