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chez Rollin...

[RP/IG] - Ruelle Derrière les Murs, 2e masure sur la droite

Rollin
La ruelle Derrière les Murs était déjà envahie par les ombres du crépuscule lorsque la silhouette de Rollin déboucha du coin de la rue de la Trésorerie. Le brouillard, qui n’avait jamais vraiment quitté la capitale savoyarde en cette froide journée de décembre, s’épaississait à vue d’œil et ajoutait quelque chose d’irréel à la pénombre qui régnait dans cette partie de Chambéry. L’épais tapis de neige qui couvrait le sol craquait sous les pas du paysan et, tel un large fil d’Ariane déroulé à ses pieds, lui indiquait tant bien que mal la voie à suivre pour rejoindre son nouveau domicile.

Le froid piquant s’insinuait partout et le paysan sentait sa morsure implacable sur sa peau. Pourtant Rollin semblait se moquer de ce que son corps pouvait subir… Depuis des années, un feu inextinguible couvait dans son cœur et rien ne pouvait l’éteindre. Il avait enduré l’ignominie et la justice sauvage des hommes, il avait survécu à l’impensable… que pouvaient donc bien lui faire les caprices de Mère Nature ?.. Rien… Même à l’article de la mort sa volonté indomptable n’avait jamais failli et l’avait guidé jusqu’en cette terre rude et belle, c’était là tout ce qui lui importait.

Le mois précédent, il était arrivé à Chambéry et avait décidé d’y poser son maigre baluchon pour y passer l’hiver. Dans l’espoir de gagner quelques écus pour survivre, il avait proposé de louer ses bras à la journée sur la place de la Mairie et sur le parvis de la Basilique. Le Tribun du peuple de l’époque, Layina, lui avait offert une pinte de la goudale locale et il avait trouvé quelque occupation à des tâches insignifiantes. Le peu de deniers qu’il avait gagné lui permirent de reprendre un peu des forces, mais il n’avait toujours pour abri que la grange d’un Chambérien bienveillant.

Le jour où il fut informé que la Mairie mettait en tenure certains champs du Faubourg Maché, Rollin eut une idée saugrenue et un peu folle… En tout cas pour lui. Il économisa chaque denier de chaque écu patiemment et se présenta auprès du clerc qui officiait pour les Conseillers du Duc. Il était parfaitement conscient que son air farouche et sa mise débraillée, déchirée et crasseuse, ne plaidaient pas en sa faveur, mais pour la première fois depuis longtemps, il se prit à croire que les hommes de biens ne devaient pas tous avoir déserté cette terre.

Le regard suspicieux et la moue dégoûtée du clerc avaient fait l’effet d’une véritable giffle à Rollin, pourtant il ne s’était pas démonté. Il avait présenté sa requête, les yeux rivés sur le sol dallé du bureau du gratte-parchemin, puis il avait déposé les 50 écus requis pour la tenure. Le clerc eut l’air étonné lorsque le paysan lui avait dit d’un air grave : « Voici tes 13 deniers… accorde-moi le passage, sombre nautonier… ». Rollin avait reconnu sans difficulté la lueur familière qui vacillait dans le regard du clerc à cet instant : les brandons de la peur de l’autre et de la haine. Le préposé lui avait pourtant remis les actes et lettres patentes officialisant le nouveau statut du vagabond. Rollin était désormais paysan, soumis au cens, preneur d’une tenure pour un quart d’arpent et d'une masure dans l’enceinte.

Le paysan s’était immédiatement mis à l’ouvrage, l’hiver savoyard ne lui permettait pas de travailler aux champs, mais il avait tenu à vérifier la qualité et les mesures de son lopin de terre avant de se rendre à son nouveau logis. C’était une construction, de deux toises de côté, à pans de bois et torchis appuyée sur la face interne de la muraille occidentale de la cité. Elle était enclavée entre deux étables et, de ce fait, était en retrait par rapport à la chaussée, ce qui permettait au paysan de disposer d’une ère de battage pour son blé. Sa construction avait été soignée, mais la masure avait été inoccupée durant de longues années et avait quelque peu souffert. Rollin avait réparé les lézardes qui zébraient la façade et il avait également rependu l’huis délabré. Quelques tavaillons de mélèze du toit durent être remplacés et les fenêtres furent garnies de vessie de porc huilée tendue sur cadre de bois. Pour parachever la réfection, le paysan avait rafraichi le sol de terre battue avec son râteau de bois flambant neuf.

Après quelques jours de labeur harassant, tout était remis en état. Ainsi, après huit longues années d’errance… Rollin était enfin chez lui.
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Rollin, membre de la corporation des cueilleurs de fruits de Chambéry.

"Toujours Fidèle et Dévoué"
Rollin
Quelques mois après son arrivée à Chambéry, Rollin réapprenait à vivre. Au travers des gestes du quotidien, il renaissait au monde des Hommes. Son champ était très fertile et rendait un setier de blé pour chaque boisseau semé.

Les premières dépenses accessoires que le paysan avait engagées avaient été pour sa garde-robe. Vêtu de neuf et rasé régulièrement, il paraissait aujourd’hui un autre homme. Seul l’éclat indéfinissable de son regard sombre trahissait encore le fossé qui séparait Rollin du commun des mortels.

Peu à peu, il avait meublé sa masure, achetant une table à tréteaux, deux paires de tabourets, un coffre, un cadre de lit à sommier de corde, un demi-tonneau aménagé en fauteuil et quelques récipients en bois et en terre pour la cuisine. Le strict nécessaire pour le citain moyen, en somme, mais un luxe indescriptible pour celui qui avait connu la misère et l’indigence.

Le jour de Noël 1456, Rollin avait gravé un symbole à la pointe de son couteau sur le linteau de sa porte. Un signe abstrait pour la plupart des gens, mais pour lui le témoignage de son intégration, comme un second baptême, la reconnaissance de son nom : +R+
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Rollin, membre de la corporation des cueilleurs de fruits de Chambéry.

"Toujours Fidèle et Dévoué"
Rollin
Rollin était venu vérifier l’état de certains arbres du verger. Les neiges tombées cet hiver-là n’avaient pas été extraordinairement abondantes et le gel persistait depuis plusieurs semaines, aussi craignait-il des dégâts aux branches frêles des basses-tiges. La campagne aux alentours de la capitale savoyarde était couverte d’un brouillard étonnamment dense et donnait au paysage un air morne et lugubre dans la pâle lumière de l’après midi.

Les branches les plus basses semblaient avoir quelque peu souffert des conditions climatiques mais dans l’ensemble, les arbres paraissaient s’accommoder du froid intense. Rollin se félicitait que les générations précédentes de cueilleurs de Chambéry aient planté des haies vives pour enclore le verger. La masse de leurs houppiers protégeait les arbres fruitiers des assauts parfois sauvages de la bise hivernale et leur permettait de ne pas trop souffrir des rigueurs de l’hiver.

Rollin, qui avait laissé les arbres pour rejoindre sa masure, luttait à chaque pas pour ne pas déraper sur la neige tassée de la venelle qui serpentait vers le bourg-neuf et la baille occidentale de la ville. Il avait atteint un passage particulièrement difficile où la neige compactée par le passage incessant avait gelé et glissait comme un lac couvert de glace. De part et d’autre du chemin, des buissons d’aubépine denses formaient une sorte de rempart lugubre et inquiétant long de quelques toises. Le paysan se réjouissait de dépasser les branches mortes et noircies des arbustes lorsqu’une silhouette sombre surgit sur le chemin.

De taille moyenne, le chaperon abaissé pour dissimuler ses yeux et le bas du gueuluron remonté sur la bouche et le nez, l’homme tenait une dague à la main droite. Sa voix rauque et sifflante s’éleva dans le silence hivernal. On eut dit une complainte s’élevant d’un sépulcre profané tant elle paraissait déplacée dans cet endroit.

- Donne ta bourse, Jean Vilain, et je serai clément avec toi !

Rollin s’était planté au milieu du chemin, fermement campé sur ses jambes écartées, les poings sur les hanches. Sa voix, si calme et posée en temps normal, avait tonné haut et fort sous le ciel savoyard.

- Passe ton ch’min, Compère, Jean Vilain n’a pas maille à bailler. Le regard sombre du paysan brillait d’un éclat sauvage.

Le brigand, quelque peu décontenancé, avait plissé les yeux et serrait nerveusement le poing autour de la fusée de son arme.

- Ne t’avise pas de me tenir tête, paysan… Je n’ai pas pour habitude de me répéter.
- J’peux t’proposer un brouet au lard et l’gîte pour la nuit, mais j’ai pas pour habitude de m’défaire d’mes deniers.


Le brigand s’était avancé, lame au clair.

- Tu insistes, vilain ? Alors, crève ! Le détrousseur avait reculé sa main, prêt à frapper le paysan au gras des trippes.

Rollin cultivait les blés et cueillait les pommes de Chambéry, mais c’était là sa nouvelle vie. Réagissant instinctivement, il avait abattu sa main à plat au milieu de la face de son agresseur. Décontenancé et sonné par la formidable claque, le brigand, le regard embué par les larmes, avait porté les mains au visage.

Profitant de la diversion, le paysan avait saisi la main armée de son adversaire et, lui tordant le pouce, l’avait forcé à lâcher son arme. Rollin avait ressenti une étrange sensation, lointaine et familière à la fois, il avait lutté contre lui-même lorsqu’il s’était rendu compte qu’il cherchait un point faible où enfoncer la lame pour occire le brigand… Le malandrin avait hurlé lorsque l’acier mordit profondément sa chair.

Rollin avait laissé l’homme tomber au sol, sa dague enfoncée dans la cuisse jusqu’à la garde. Le visage fermé et dur, il regardait la scène avec dégoût.

- Les vilains aussi savent mordre… Compère !

Le paysan avait craché son dernier mot avec haine. Il s’était ensuite éloigné, l’estomac au bord des lèvres, laissant le brigand se débrouiller seul. Il savait que son agresseur survivrait, mais il était furieux contre lui-même… Il y a bien longtemps, alors qu’il avait été contraint de quitter les siens, il s’était juré de ne plus jamais porter le fer contre un autre homme.

Parjure… Le mot résonnait à l’infini dans sa tête. Avant d’arriver aux abords du bourg-neuf, il avait vomi, dégoûté par ce qu’il venait de vivre et ce qu’il avait fait. Ce soir-là, Rollin avait fait la fermeture de l’Antre des Chambériens… Il avait bu pour oublier.
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Rollin, membre de la corporation des cueilleurs de fruits de Chambéry.

"Toujours Fidèle et Dévoué"
Rollin
Rollin, accroupi dans l’ombre, les genoux engourdis au contact du dallage froid, priait avec ferveur. Les mains jointes à hauteur du visage, les yeux clos, le corps tout entier dévoué à sa dédicace. Comme tous les dimanches matin, le paysan était venu aux aurores rendre hommage à la très Sainte et Bienheureuse Mère de Christos.

Au chant du coq, il avait quitté sa masure et était parti en direction de la Basilique Sainte-Nitouche. Dans la fraicheur matinale, il s’était hâté, prenant garde d’éviter les lieux de passage et les endroits où quelque molosse aurait pu donner l’alarme et éveiller les soupçons, ombre fugace parmi les ombres, courant d’air insaisissable mêlé au souffle la bise légère.

Le paysan avait appris la façon de pousser la lourde porte ferrée pour qu’elle ne grince pas sur ses gonds et connaissait l’itinéraire à accomplir au travers des travées pour être sûr de ne croiser personne, fut-ce le bedeau attelé à quelque tâche ingrate.

La première fois qu’il avait osé pénétrer dans le Temple chambérien, la peur au ventre, il avait erré sans autre but que d’admirer la Maison Sainte et apaiser son esprit tourmenté. Il y avait maintenant plus de huit années qu’il n’avait marché dans la nef d’une demeure d’Aristote, fut-ce une simple chapelle. Au travers des immenses vitraux, la douce lumière inondait la nef et baignait le lieu d’une myriade de taches colorées. Il y avait longtemps que son âme n’avait pas connu de répit, et ce fut dans une des chapelles latérales dédiée à la Mère de Christos qu’il retrouva cette délicieuse sensation de paix et de repos. Son âme exultait, car même s'il agissait comme un voleur, il chantait à nouveau les grâces du Divin.

Depuis ce jour, il était revenu tous les dimanches, exprimer sa foi et retrouver un peu de sérénité. Bravant l’interdit des hommes et l'anathème, il s’en remettait à la bonté de la Mère Éternelle et au jugement du Très-Haut.


Ave, Maria gratia plena
Dominus tecum
benedícta tu in muliéribus
et benedíctus fructus ventris tui, Christos.
Sancta Maria, Mater Dei
ora pro nobis peccatóribus
nunc et in hora mortis nostræ

Amen

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Rollin, membre de la corporation des cueilleurs de fruits de Chambéry.

"Toujours Fidèle et Dévoué"
Rollin
Rollin s’accordait rarement du répit, aussi les jours où il décidait de chômer sa journée en profitait-il pleinement. La paresse était un péché… mais devait-il vraiment s’en soucier, lui qui avait été mis au ban de l’Eglise Aristotélicienne ? Après tout, il ne s’octroyait que peu de moments de détente, le Très Haut le savait et il ne lui en tiendrait certainement pas rigueur.

En cette belle journée de mars, le paysan avait décidé de faire le tour de la ville en empruntant le chemin de ronde des remparts. La Porte Sainte-Barbe, qui ouvrait sur le Faubourg Maché, était la plus proche de sa masure, aussi avait-il imaginé débuter sa promenade en ce lieu. C’était la baille occidentale de la cité et la route qui passait sous ses voûtes menait au Royaume de France. Rollin emprunta l’escalier à vis qui grimpait au travers de la maçonnerie du châtelet. Quelques dizaines de marches plus haut, un peu ivre à force d’avoir tourné, il déboucha sur la courtine. Quelques miliciens débonnaires montaient la garde ça et là, qui avachi sur sa hallebarde ou paisiblement assis sur le rebord d’une archère. La muraille de bonne pierre savoyarde était épaisse de plusieurs toises et portait des créneaux chemisés de hourds de bois. Un prédécesseur du Duc actuel avait jugé bon de remettre ce supplément de défense en place au regard des tensions qui agitaient le Duché à son époque. Le long des poutres d’ancrage, il restait encore assez de passage pour que deux hommes en armes se croisent sans que leurs hastes ne s’entrechoquent.

Rollin regarda vers l’occident. Au-delà des douves qui ceinturaient la ville, le Faubourg Maché, avec ses ruelles tortueuses et ses petites maisons à pans de bois s’étendait sur quelque distance pour laisser finalement la place aux cultures. Ce bourg-neuf était un lieu de passage quasi obligé pour les Chambériens, qu’ils soient citains ou aforains, puisque nombre d’auberges y fleurissaient, encadrées par des échoppes d’artisans. Dans un bourdonnement incessant, les artisans, coursiers, portefaix et brassiers s’y croisaient dans un va-et-vient continu. À une quinzaine d’arpents de là, Rollin pouvait voir son champ soigneusement entretenu où le blé commençait à pousser dru. Sa parcelle allongée convenait parfaitement à la culture, puisque les longues lignes droites lui évitaient d’incessants changements de direction lorsque le temps des labours était venu. Tournant les yeux vers le cœur de la cité, le paysan vit distinctement le toit des Halles, sises entre la Ruelle Derrière les Murs où il logeait et la Place de l’Hostel de Ville que les Ducs avaient concédés deux siècles plus tôt aux Chambériens par une charte de franchises. Les rues étroites de la ville et les hautes maisons de bois, de torchis ou de pierre donnaient une impression d’étroitesse et de verticalité. Rollin avait toujours une impression particulière lorsqu’il voyait ainsi la ville d’en-haut, comme s’il admirait quelque immense forêt pétrifiée.

Le paysan continua sa promenade sur la coursive en direction du midi, vers le château des Ducs. Sa silhouette massive semblait être sortie du sol d’un seul tenant, comme creusée à même une montagne. L’immense donjon carré dominait la ville et seule la lointaine flèche de la Basilique Sainte Nitouche pouvait rivaliser avec sa stature et lui disputer la domination du ciel de Chambéry. Les hautes tours du système défensif du château l’encadraient comme des pinacles aux angles d’une châsse mosane et donnaient à l’ensemble un air de puissance et d’éternité. Au cœur du palais, Rollin repéra aisément le chevet de la Sainte-Chapelle. Dans un réflexe pieux, vestige de son ancienne vie, il se signa en apercevant le bâtiment sacré car il abritait depuis quelques années seulement le Suaire de Très Saint Corps de Christos, relique bénie entre toute… Et peu étaient les Chambériens qui en faisaient grand cas. Rollin, lui, aurait bien aimé poser les yeux sur le linceul maculé du sang et de la sueur du Sauveur. Mais cet honneur lui était désormais interdit.

Le paysan inspira profondément, peu à peu s’affirmait en lui le sentiment qu’il avait trouvé sa nouvelle patrie et il remercia le Très Haut de l’y avoir amené. Lentement, il reprit sa marche, quittant les abords austères du château de la Mesnie de Savoie pour se rendre à la Porte-Reine qui gardait la route de Lyon. Le châtelet massif, à double herse et assommoir, en faisait l’accès le mieux gardé de la capitale savoyarde. La grande voie commerciale qui y aboutissait devenait, passé les portes ferrées, une artère à double voie débouchant sur la Place Saint Léger, berceau de Chambéry, où se trouvent rassemblé une grande part des bâtiments de l’Université. Rollin aimait regarder le flot incessant des marchands, voyageurs et paysans qui, tels d’industrieuses fourmis, poussant ou trainant charrettes, tombereaux et brouettes, amenaient mille denrées dans la cité ou en repartaient pour porter en quelque terre lointaine les productions locales.

Las de scruter la marée humaine, le paysan continua plus avant et, dépassant la poterne de dégagement de la Rue de Roche, il finit par atteindre le point le plus oriental de la muraille. En ce lieu, le mur faisait un angle pour remonter vers le septentrion et rejoindre la Porte d’Italie. A l’instar de la Porte-Reine, la baille orientale était le lieu de passage obligé des commerçants au long cours qui faisaient des affaires au-delà des montagnes et on pouvait y voir le même grouillement, les mêmes scènes cocasses que sur la Route de Lyon. En tous sens, marchands et paysans cheminaient, lourdement chargés, apportant ou emmenant leur précieuse cargaison. La Route d’Italie, qui partait de cette porte, traversait le Faubourg Montmélian, un ancien marais asséché depuis que le cours de l’Albanne et sa confluence avec la Leysse avaient été canalisés et que les fossés de mise en eaux des douves de la ville avaient été creusés. Étendu sur les deux berges de la Leysse, ce Faubourg avait la réputation d’être le quartier de Chambéry comptant le plus grand nombre d’hostels bourgeois. Sans doute était-ce parce que les friches y étaient encore nombreuses et peu chères. Les grosses maisons entourées de hauts murs et de jardins y poussaient ça et là et écrasaient de leur opulence les petites maisons d’artisans ou de bourgeois moins fortunés. Le paysan suivit des yeux le cours paisible de la Leysse, son entrée dans Montmélian, sa rencontre avec l’Albanne, ses détours vers les chenaux amenant aux douves, sa progression le long de la face septentrionale des murailles, sa traversée du Verney, et, enfin, le lacet argenté qu’elle dessinait dans le lointain. Rollin aimait bien cet endroit de la ville, non pas pour la vue sur Montmélian, mais pour la perspective qu’il offrait, lorsqu’on se tournait vers la ville, sur la grande Basilique Sainte-Nitouche enclavée au milieu de la myriade de maisons qui comblaient l’espace entre la porte et l’Université. Rollin scruta ses murs élevés et savamment ornés, comme une dentelle de pierre, sa haute flèche, symbole fièrement dressé de la dévotion des Chambériens, ses toits dont les plombs s’accordaient parfaitement aux teintes douces des cieux savoyards. C’était un véritable chef-d’œuvre entièrement voué à chanter les grâces du Très-Haut et le paysan aimait s’y rendre, même s’il enfreignait l’interdit qui lui avait été signifié huit années auparavant.

Lorsqu’il eut assez admiré l’édifice sacré, il continua toujours plus avant. A quelques arpents de là, la Rue Vieille Monnaie perçait la muraille et, au travers de la porte du même nom, menait au Faubourg de Nézin, paisible bourg parsemé de masures basses et de pâtures. Puis il atteignit la Porte Saint-Antoine qui gardait le chemin venant du Faubourg Reclus, le plus jeune des bourgs de la capitale et qui s’étendait chaque jour un peu plus. Saint-Antoine avait la réputation d’être la baille la mieux défendue lors d’une attaque de la ville, et pour cause puisque dans son ombre se dressait le dédale des bâtiments du Sénat, à la fois Maison de Justice et cœur administratif de Chambéry. Il était donc normal que les autorités n’hésitaient pas à y porter le gros de leurs effectifs en cas d’échauffourée.

Passé ce point, Rollin atteignit le point le plus septentrional de la muraille, celui d’où l’on pouvait apercevoir au mieux le Jardin du Verney. Cet hortus public avait été offert par un Duc bienveillant à la ville près d’un siècle auparavant et faisait toujours la joie des citains. De longues allées bordées d’arbres vigoureux et de massifs foisonnants de vie s’y déployaient à perte de vue et par beau temps on pouvait voir sous les ramures majestueuses le tout Chambéry s’ébattre et respirer un air plus pur qu’à l’intérieur des murs de la cité. Sur la gauche du Verney, le regard du paysan s’attarda sur un lieu familier, une grande parcelle entourée de hauts arbres : le Verger communal.

Il y avait maintenant un long moment que Rollin marchait et il était satisfait du loisir qu’il s’était accordé dans la suite sans fin des jours de labeurs. Fatigué, mais content, il descendit de la courtine par l’escalier de la Porte du Verney et, en longeant les Halles, il rejoignit sa masure de la Ruelle Derrière les Murs. C’était la seconde sur la droite, en venant de l’Hostel de Ville…



[HRP] [Remerciements aux Archives Départementales de Savoie pour ce joli relevé cadastral de 1729 détourné par les soins de LJD Rollin]
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Rollin, membre de la corporation des cueilleurs de fruits de Chambéry.

"Toujours Fidèle et Dévoué"
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Chambéry avait bien changée... Des personnes de son temps, il n'en restaient plus que quelques unes. Sortant du Conseil Ducal comme à son habitude vêtu de sa robe de Haut Magistrat, Chandin se baladait dans la ville à la recherche peut être d'un vendeur de pommes, bien que le temps ne permettait presque plus la production de ces exquis fruits. Etait-ce parce que ce fut le fruit Interdit que le Baron l'adorait ? Personne ne le saurait.

Bientôt Chandin passa dans les arrières fonds de Chambéry. Puis il remarqua très vite une boîte aux lettres avec le nom "Rollin". Bien qu'il eût déjà entendu très peu ce nom, il se rappela qu'Yzalba lui avait confié quelque peu la mairie en son absence.

Le Baron Sanglant hésita. Pourquoi aller le voir ? Faire passer le temps ? Rencontrer cette génération si inconnue à son esprit ? Voilà une bonne idée. Il s'avança vers la porte et frappa troip coups. Il décida en premier lieu de ne pas dire son nom et ses véritables fonctions. Aussi serait-il un simple homme du village... Seulement le Baron en avait totalement oublié sa toge...

Très vite des bruits de pas parvenèrent. Qui pouvait bien frapper à une heure pareille ?...

Rollin
*De grand matin, après sa visite incognito à la Basilique, Rollin s'était rendu au verger puis au bureau de la Corporation des Cueilleurs de fruits. Non point que la saison se prêtât à la cueillette, mais il aimait à vérifier sans cesse que tout se passait pour le mieux.*

*Le paysan avait coutume de se lever aux aurores, aussi était-il encore tôt lorsqu'il rentra chez lui après sa tournée dominicale. Un en-cas frugal posé sur la table, quelques noix et une pomme de l'automne précédent, il préparait de l'osier pour réparer un de ses paniers de cueillette lorsqu'on frappa à la porte. Rollin n'avait pas l'habitude qu'on vienne ainsi chez lui. Il se leva, ajusta sa mise en resserrant les aiguillettes de ses chausses et de son doublet puis alla ouvrir. Avisant l'homme qui patientait devant l'huis, Rollin fut quelque peu surpris mais parvint à garder sa contenance. Que diable lui voulait le Juge du Comté par un dimanche matin de mai? Le paysan pencha la tête vers le sol, courba légèrement l'échine et posa la main droite sur son cœur pour saluer avec déférence son visiteur matinal.*

Messire Chandin, ah, ben ça! Que m'vaut l"honneur?

*Le paysan n'était pas à proprement parler un nouveau venu puisqu'il était arrivé à Chambéry à la fin de l'année 1455, mais il aimait à vivre sans faire de vagues et peu de gens le connaissaient réellement.*
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Rollin, membre de la corporation des cueilleurs de fruits de Chambéry.

"Toujours Fidèle et Dévoué"
Rollin
*Le paysan garda longtemps le regard rivé au sol. Une éternité s'écoula et Chandin n'avait toujours dit mot. Levant timidement les yeux, il jeta un regard furtif à l'homme de loi. Le nez en l'air, Chandin observait le ciel sans rien dire, l'air absent. Avait-il seulement vu que Rollin avait ouvert la porte? N'y tenant plus et bien qu'il savait qu'il enfreignait les règles de bienséance, le paysan toussota légèrement. *

Ahem!..

* Dans un murmure, comme s'il avait peur de faire sursauter Chandin, le paysan glissa quelques mots, les yeux à nouveau dirigés vers le sol.*

Messire Chandin... Vous... Vous désiriez me dire quelque chose?

*Attendant désespérément la réponse du juge, Rollin commença à éprouver une sensation désagréable qu'il pensait ne jamais devoir à nouveau ressentir. Il se remémora la dernière fois qu'il avait du croiser la route d'un représentant de la loi et il frissonna bien involontairement. Sa poitrine était oppressée et son cœur battait à tout rompre. Un nœud au creux de l'estomac, le paysan sentit ses mains devenir moites et son esprit passer en revue à toute vitesse ses faits et gestes depuis son arrivée à Chambéry le vingt-cinquième jour de novembre, jour Sainte Catherine, de l'an de grâce 1455. Il n'avait pourtant rien à se reprocher mais c'était plus fort que lui, il avait vécu trop de choses pour ne pas ressentir une certaine méfiance... à moins que ce ne fut de l'angoisse? Stoïquement, il ne bougea pas d'un iota et attendit la réaction du Sieur Chandin.*

[HRP : LJD Chandin, merci de ne pas trop tarder à répondre, mon topic reste inactif depuis près de 15 jours et ça commence à devenir long, je n'ai rien contre une visite de courtoisie, mais j'ai des choses à y poster. Donc, sans vouloir te brusquer... ]
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"Cosà, che, gné hum ?

Devant l'attente de Rollin, le Baron Sanglant s'était assoupi le laissant rêver de choses plus au moins... diaboliques. Lorsqu'il reprit ses esprits, ce fut pour voir un homme, face à lui, légèrement intimidé et certainement appeuré par la regard vide de Chandin. Ce dernier lui sourit.

"Bonjour cher Rollin ! Voilà un plaisir que de voir un Chambériens s'investissant pleinement et nouvellement! dans la gestion de la ville... Pouvons-nous entrer ?

Le Juge cherchait à réconforter le jeune homme. Les simples visites de courtoisie manquaient trop dans Chambéry...

"Sinon, comment vous portez-vous ?

Rollin
*Le paysan sursauta lorsque le Juge reprit ses esprits mais il garda résolument les yeux baissés en signe de respect. La visite impromptue et improbable de Chandin le perturbait mais il essayait de rester digne et de ne rien laisser transparaitre de la fébrilité qui l’agitait.*

En… Entrer ? Mais, euh… bien sûr ! J’manque à tous mes d’voirs ! S’cusez moi, Messire !

*Le paysan fit un pas de côté pour laisser entrer le Juge dans sa modeste masure. Tenant la porte usée par le poids des ans, il fit un signe pour inviter Chandin à passer le seuil.*

*Le logis de Rollin ne comportait qu’une seule pièce assez sombre de deux toises de côté, mais c’était là sa demeure et pour rien au monde il n’aurait trouvé à s’en plaindre. Le sol en terre battue était entretenu avec soin et couvert d’une jonchée fraîchement coupée. Sur la droite une petite table trônait, entourée de quatre tabourets ronds. Non loi, une archelle supportait des ustensiles de cuisine, un ensemble de récipients à cuire en terre grise et de la vaisselle de bois. Au fond de la pièce, il y avait une large cheminée pesant sur le seul mur de pierre de la masure - mur qui était en fait une partie de la muraille occidentale de la ville sur laquelle le logis de Rollin prenait appui. Cette cheminée était flanquée d’un tabouret tripode et d’une sorte de fauteuil aménagé dans un tonneau. Un lit pratique et sans fioritures occupait le coin à droite de l’âtre et était surplombé d’une perche fixée au mur servant au paysan pour entasser les quelques vêtements qu’il possédait. Au pied du lit, un coffre solide contenait sans doute les quelques objets auxquels il accordait un peu de valeur. Sur la gauche de l’âtre, un espace servait à l’entreposage des outils et de la récolte de Rollin. Au dessus de cette petite zone, un plancher accessible par une échelle avait été construit pour permettre d’entreposer du foin, du bois et les pommes à conserver pour les mois d’hiver. Le logis de Rollin n’était pas luxueux, mais il avait réaménagé, entretenu et réparé avec un goût sûr et un esprit pratique certain. Loin de gêner, la pénombre qui régnait dans la pièce lui donnait un certain charme et une sensation de bien-être et de bon vivre se dégageait de chaque parcelle de cette modeste maisonnette.*

Citation:
"Sinon, comment vous portez-vous ?


*Le paysan fut étonné de la sollicitude du Juge. Il pouvait compter sur les doigts d’une seule main les nobles ou les notables qui, faisant fi des conventions, s’étaient enquis de sa personne de la sorte. Hochant de la tête pour appuyer ses mots, Rollin répondit :*

Je… Euh… J’vais bien, Messire, j’vous r’mercie ! Mais, j’vous en prie, installez-vous… Juste le temps d’trouver d’quoi poser votre séant.

*Le paysan se dirigea vers le fond de la pièce, près de la cheminée et fit rouler le tonneau aménagé en une sorte de trône pour l’amener près de la petite table proche de l’entrée. Il épousseta quelque peu puis se dirigea vers les petites fenêtres et en ôta les cadres tendus de peau pour laisser entrer plus de lumière. Empoignant un tabouret, le paysan invita Chandin à s’asseoir d’un geste de la main. Le paysan attendit que le Juge s’installe avant de s’asseoir à son tour, préséance oblige.*

Or, donc, que m’vaut l’honneur, Messire ?
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Rollin, membre de la corporation des cueilleurs de fruits de Chambéry.

"Toujours Fidèle et Dévoué"
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Le Baron Sanglant avait suivi Rollin jusqu'à l'intérieur. Effectivement ce n'était pas le vie de château que Chandin menait... Mais d'être là, lui rappelait son enfance au Poitou, où il vivait aussi à même le sol, dans une petite masure qui ne manquait pas de charme. L'homme apporta même au Juge un tabouret. Le Baron sourit en le remerciant et, prenant soin de faire passer sa robe sur le côté, s'installa.

"Fort bien. J'ai appris il y a peu que lors du départ quelque peu... précipité d'Yzalba en retraite, vous aviez pris en quelque sorte, les rênes de la mairie ?

Le Baron attendit sa réponse. Il avait sans cesse la main dans sa poche et regardait Rollin avec tant de malice qu'il dût paraître fou. Lentement, Chandin s'attarda sur chaque objet de l'unique pièce se disant que peut être, grâce à lui, Rollin pourrait... Ne gâchons pas l'histoire !

Rollin
*Rollin observa du coin de l'œil son invité impromptu. Le regard du Juge brillait d'un étrange éclat, entre joie enfantine, malice et... folie. Le paysan se reprit. Après tout qui était-il pour oser porter un jugement sur le comportement d'une personne aussi influente que Messire Chandin? Il se dirigea vers son archelle et y prit deux petits gobelets de bois tourné qu'il posa sur la table. Le paysan sourit lorsque Chandin aborda son mandat pour la Mairie.*

Les rennes d'la Mairie? Hoho, com' vous y allez, M'sire Chandin! Disons que j'ai apporté ma modeste contribution à not' bonne capitale. Dame Yzalba m'a juste mandaté pour les achats d'fruits et la vente de quelques denrées d'base comme le bois ou l'pain. J'suis quelqu'un d'sérieux et j'suis honnête donc j'imagine que son choix était logique. D'toute façon, si elle avait eu l'moindre doute elle m'aurait rien d'mandé, vous la connaissez, hein?! Comme j'suis plutôt entier comme bougre, j'ai pris soin qu'tout reste en ordre jusqu'à son retour de r'traite, mais j'pense que ça outrepassait un peu mon mandat. Pour le reste j'imagine qu'elle a veillé à ce que la sécurité, les achats en foire, la gestion d'la milice et tout ça soient accomplis pendant son absence, mais j'sais pas trop à qui elle a d'mandé... C'que j'sais c'est qu'j'suis pas capable d'faire ça, moi... Donc on m'la pas d'mandé. De tout'façon, là, c'est moi qui aurait refusé...*

*Rollin fit un sourire bonhomme. Il avait pris le dessus sur ses appréhensions, après tout le juge savoyard ne venait sans doute que pour une simple visite de courtoisie. Mais au fond de lui, il avait l'impression désagréable que son passage s'apparentait quand même à une sorte d'interrogatoire. Le paysan fit toutefois de son mieux pour recevoir Chandin avec les honneurs dus à son rang. Il déposa sur la table un tranchoir de bois avec un beau morceau de Tome qu'il avait ramené de Thoiry et une coupelle de céramique grossière contenant des noix et des raisins secs. Il sortit de la huche un joli pain doré de Maître Augis.*

Vous désirez grignoter queuqu'chose?

*Le paysan posa un tonnelet sur la table.*

Un peu d'Mondeuse? Elle est particulièrement bonne c'est d'la cuvée de 1452.

*Rollin s'assit sur le tabouret qu'il avait posé à quelque distance du Juge. Il avait choisi le moins haut de ceux qu'il possédait pour que, une fois assis, il donne l'impression d'être plus petit que son invité, étonnante manifestation du respect de l'Etiquette et du protocole pour un paysan qui cultivait du blé et cueillait des pommes...*
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Rollin, membre de la corporation des cueilleurs de fruits de Chambéry.

"Toujours Fidèle et Dévoué"
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Chandin regardait avec surprise les bonnes initiatives de son hôte. Peu de personnes paysannes en ce monde connaissant les bonnes manières quand devait aux nobles. Etonné, le Juge n'avait encore jamais vu pareil fidèle à l'Etiquette. Ne voulant pas le froisser, il essaya de suivre à son tour, de manger un petit peu de tout ce qu'il lui donnait, buvant une choppe de ce qu'il présentait.

"Rollin, merci de votre chaleureux accueil, je découvre avec joie les plaisirs de vivre simplement avec les mets que nous pouvons découvrir tout seul dans la nature. J'aimerais maintenant vous faire un présent. Un présent qui vous remercierait de votre modeste et humble travail pour la mairie.

Le Juge sortit d'une poche de sa grande robe, un bourse en cuir d'où provenait quelques cliquetis. Il la posa sur une petite table avant de faire un clin d'oeil à Rollin.

"Ce n'est qu'un maigre salaire, mais je suis sûr qu'il pourra vous aider, peut être à ouvrir une boutique ? A acheter un animal ou quelques bijoux pour votre douce amie...

Le Baron lui sourit et s'approcha de la sortie attendant Rollin.

Rollin
*Le Juge s’était restauré en prenant soin de goûter à chacune des choses que le paysan avait mises sur la table. Il fit honneur comme il se doit à la Mondeuse que Rollin lui avait proposé et le remercia pour ce qu’il avait accompli pour la Mairie en portant la main à sa robe. Il en retira une bourse qu'il posa sur la table en faisant un signe de connivence au paysan.*

*Dans un premier temps, Rollin n’avait pas compris ce que cela signifiait, puis, en entendant le cliquettement caractéristique de pièces de monnaie, tout s’éclaira dans son esprit. Ainsi Messire Chandin lui baillait quelque argent. En d’autres temps, le paysan se serait offusqué, il aurait pris la mouche en admonestant le Juge et son aumône… Mais depuis qu’il s’était installé à Chambéry, il avait décidé de ne plus s’emporter que pour les choses qui en valaient la peine. Il laissa la bourse sur la table et se leva. Il adressa un sourire plein de gentillesse au Baron, et pencha la tête vers le sol en signe de remerciement. Les yeux rivés sur la terre battue de son intérieur, il s’adressa à Chandin :*

Messire, j’vous r’mercie pour tant de bonté… Soyez assuré qu’vot’ geste est apprécié à sa juste valeur.

*Le Baron s’était levé et se dirigeait maintenant vers la vieille porte de la masure. Rollin lui emboita le pas, le sourire aux lèvres.*

Vous vous en allez déjà ?.. Ah oui, j’comprends, j’vous ai déjà trop retenu loin d’vos affaires… Je… Ce fut un honneur, Messire !

*Rollin ouvrit la porte et s’effaça pour laisser le Juge sortir. Lorsque celui-ci passa la porte, le paysan pencha la tête respectueusement en guise de salut. D’une voix basse où l’on pouvait déceler quelque chose qui ressemblait à de la déférence teintée de gratitude, suivant en cela les usages des maisons nobles, il adressa un simple mot à Chandin. Un mot par lequel le paysan reconnaissait être l’obligé du Juge :*

Serviteur…

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Rollin, membre de la corporation des cueilleurs de fruits de Chambéry.

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Rollin
*Quelques jours s’étaient écoulés depuis la visite du Sieur Chandin, Seigneur de Pont-Saint-Martin, Baron d’Aix-les-Bains et Juge de Savoie. Le paysan s'interrogeait toujours sur les raisons qui avaient poussé une personne de si haut rang à venir le voir, lui, vilain insignifiant et anonyme, dans sa minuscule masure appuyée sur la muraille. *

*La bourse que le Juge avait si généreusement offerte à Rollin fut déposée par ses soins au tronc des pauvres de la Basilique Sainte-Nitouche. Le paysan entendait bien ne pas vivre d’expédients, mais cet argent pouvait servir à d’autres qui se trouvaient dans le besoin. C’était là la manière de vivre de Rollin : le strict nécessaire pour lui et tout le reste pour aider les autres.*

*Heureux de son geste, il était revenu chez lui et avait continué à préparer la structure de coudrier du couffin de Valentin, le filleul de sa bien aimée Yzalba.*
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Rollin, membre de la corporation des cueilleurs de fruits de Chambéry.

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