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[RP] Voyager c'est naître et mourir à chaque instant *

Ode...
O fortune
Comme la lune
Tu es variable
Toujours croissante
Et décroissante


Quelque part en Magyar Királyság 
Samedi 3 août 1467


    Le duo traverse la pampa hongroise suivant les traces de la Duduche, ils ont un jour de retard, il est prévu qu'ils se retrouvent tous à la prochaine ville qui se trouvera en Pologne.
    Alors, ils voyagent de nuit, en début de journée, ils se reposent. Dans l'après midi ils conversent un long moment puis chacun vaque à ses occupations en se donnant rendez vous le soir pour poursuivre le voyage.
    Cet après midi là, la jeune femme part en promenade avec son équidé pour quelques heures de pseudo liberté entre galop et trot, profiter les cheveux dans le vent de sa monture et des paysages sublimes qu'offre la nature.
    Il fait chaud, il fait soif, pas une rivière à l'horizon, pas un point d'eau mais une grande ferme.
    C'est vers cette dernière qu'Ode se dirige en ralentissant l'allure, passant du trot à un pas serein.
    Deux gros chiens blancs viennent les accueillir et en s'en approchant, la jeune femme voit attendrie cinq chiots qui les suivent à bonne distance en jouant.
    Les parents ne semblent pas agressifs, elle en a déjà vu des comme ceux là au cours de son voyage mais jamais vu de chiots qui ressemblent plus à des boules de poils qu'à des petits animaux. Quoi que petit, pas tant que ça. Le male doit pas peser loin de cinquante kilos et la femelle dix de moins mais de jolies bestiaux, alors les chiots ne sont pas minuscules même s'ils sont encore patauds.
    Lentement, elle fait stationner son cheval avant de mettre pied à terre.


      ki megy oda?


      A nevem Ode, utazom és szomjas vagyok, a lómat is !

    Son hongrois s'arrête à peu près à ces simples mots, la jeune Kerloc'h découvre le fermier qui vient vers elle en tentant de ne pas marcher sur les chiots qui trottinent devant lui. L'homme maugrée mais ça ne perturbe nullement les bestiaux qui viennent vers elle.
    Le fermier l'invite à le suivre, les chiens à sa hauteur, les parents probablement sont salué d'une caresse gratouille entre les deux oreilles alors que les petits ne s'approchent pas d'elle pour le moment.

    Guidée jusque l'abreuvoir, le fermier ne cesse de lui parler et elle tente au mieux de le comprendre et de lui répondre. Son équidé s'abreuve longuement alors que l'homme d'âge mûr se rend au puits pour offrir à Ode de quoi se désaltérer.
    Elle s'exprime de geste et du peu de vocabulaire hongrois qu'elle connait mais sait le remercier sincèrement en lui souriant.
    Un chiot, plus téméraire que les autres ou tout simplement attiré par la jeune femme vient lui renifler les bottes et enfoui son museau entre ses cuisses.
    Ode rit en s'accroupissant pour caresser le petit malou qui apprécie les caresses ce qui fait s'approcher d'autres chiots qu'il repousse jalousement.


      Ő választott téged!

      Hein?

    Tout en s'amusant avec les chiots et particulièrement avec le premier venu à elle, la jeune femme tente de comprendre ce que l'homme lui baragouine quand ils sont rejoint par son épouse qui sourit en saluant la Kerloc'h.
    Le couple l'invite à entrer dans leur habitation afin de lui offrir de quoi se sustenter sans arrêter de lui parler.
    Les chiens n'entrent pas à l'intérieur pourtant le chiot pleure à l'entrer devant la porte ce qui fait rire le couple qui prend le temps d'expliquer à Ode où elle se trouve et qui ils sont.

    En partageant un morceau avec eux, la jeune femme tent de les comprendre au mieux et papote ave ceux doucement. Son regard est attiré vers l'extérieur où l'attend toujours le chiot et elle leur demande si il est à vendre.
    Elle comprend que la plupart seront donné aux fermes alentours car ils sont de bons gardiens de troupeau et de maison, mais ils n'ont rien contre lui en laisser un.
    Aussi la négociation est assez rapide, et la jeune femme leur donne ce qu'il lui reste dans sa bourse pour l'obtention du chiot qui est sevré et en âge de quitter ses parents, ils refusent autant d'argent et lui en garde juste un peu pour ne pas la vexer plus que parce qu'ils escomptaient le vendre.
    Les fermiers la raccompagnent dehors, le petit malou lui fait la fête.
    Ils retournent vers l'abreuvoir pour récuperer son équidé, puis l'accompagnent à l'entrée de leur domaine humble mais agréable.
    Ode remonte sur sa monture, l'homme lui tend le chiot qu'elle pose devant elle, quelques mots échangés, et ils se séparent.
    Le chiot voyagera dans sa charrette mais pour l'instant elle n'a pas d'autre choix que celui ci pour le transporter.

    La jeune femme remercie le couple pour son hospitalité, étrangement les parents canins ne disent rien alors que les frères et soeurs de sa nouvelle acquisition tournent autour du cheval. Un dernier au revoir, un signe de la main et la voilà qui s'éloigne tranquillement non sans se retourner pour leur faire un grand signe de la main.
    L'hospitalité hongroise n'est plus à prouver.
    La jeune femme rejoint l'ami qui s'amuse de cette acquisition mais en même temps avoue qu'avec pareil bestiaux, elle sera bien gardé!
    Le malou dans la charrette, il est temps de reprendre la route pour passer la frontière hongroise et se retrouver en Pologne en milieu de nuit.


Księstwo krakowskie Dimanche 4 Août 1467


    Les paysages ont peu changé, ils sont toujours aussi beaux mais désormais ils sont en Pologne.
    Dans une dizaine de jours, si tout se passe bien, ils seront sur l'Horizon pour rentrer sur Tréguier.
    Début septembre, ils pourraient être en Bretagne!
    Même si Ode sait d'ores et déjà qu'elle repartira assez rapidement en voyage avec son ami.
    Pour le moment, la jeune femme profite de chaque instant passé de ce périple qui restera à jamais gravé dans sa mémoire.
    En ce dimanche, la jeune femme prend le temps de jouer avec le chiot qui doit peser déjà pas loin de cinq kilos alors qu'il doit avoir trois ou quatre mois à peine, joli bébé.
    La jeune Kerloc'h sait qu'il lui faudra lui trouver un prénom, Ambre la petite chienne qu'elle avait avec Nathaniel resterait avec lui et les enfants auxquels elle est grandement attachée. Lui, ce nounours blanc la suivra partout à compter de ce jour sauf qu'il lui faut un prénom et là... Odinette l'observe afin de lui en trouver un qui correspondrait à son caractère.
    Le soir, le chiot devra rester sage dans la charrette pour le voyage alors qu'ils ne seront qu'à un jour ou deux de la prochaine ville où ils retrouveront le reste du groupe.
    En attendant, elle profite de le câliner, de l'apprivoiser, de s'occuper de ce joli animal très câlin et apparemment assez possessif.

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Ode...
Quelque part en pleine pampa
de Księstwo krakowskie
Lundi 5 Août 1467

Transcendance...


    Cette première nuit sur la charrette a été compliqué pour le chiot, Ode l'a attaché afin qu'il ne saute pas en cours de route. Mais surtout, le chiot aurait préfère être contre elle plutôt que l'observer occupée à chevaucher pendant qu'il est là sans pouvoir sortir de l'engin roulant. Mais finalement, il a fini par s'endormir de fatigue ou de dépit, Ode ne sait pas mais le voyage a été moins stressant une fois l'animal endormi.
    Au petit jour, ils décident de s'arrêter pour se reposer et se restaurer, ils trouvent un endroit sympathique à l'orée d'un petit bois, juste une source comme point d'eau mais un brin d'ombre pour pouvoir dormir un peu.

    Pour éviter que le chiot se blesse, Odinette le prend dans ses bras pour le poser au sol, ravi, il sautille autour d'elle avant de courir comme un petit fou en la suivant partout qu'elle descende quelques affaires de la charrette ou qu'elle aille remplir de l'eau fraîche dans leurs gourdes. La jeune femme installe une couvrante à même le sol pour s'y allonger, son chiot vient se coller à elle et place sa tête sur sa hanche alors qu'elle s'adore les doigts dans ses poils blancs et doux.
    C'est une grosse léchouille qui la fait se réveiller presque en sursaut, elle retient un cri puis un rire afin de ne pas réveiller l'ami qui dort encore pas loin d'elle.
    D'un bond, elle se redresse et s'étire longuement en baillant, le petit chien s'étire aussi avant de lui tourner autour en remuant la queue.
    Quelques pas nonchalants jusque la source pour une rapide toilette et ouvrir pleinement les yeux en éclaboussant l'animal du bout des doigts, ce dernier recule et revient à elle d'un bond puis recommence ce jeu quelques fois jusqu'à ce qu'elle arrête et décide d'effectuer quelques pas suivie du Kuvasz.
    Quelques foulées pour observer sa réaction puis elle stoppe net et lui, s'écrase totalement derrière ses genoux la faisant fléchir et s'agenouiller au sol. Le chiot la contourne en secouant la tête pour venir chercher des câlins en se collant à elle.


      Ahem ! Brigand, coquin il me faut te trouver un nom.
      Tu es blanc comme neige, un gros flocon... Mais alors un très gros flocon!

    Lui dit-elle en riant le caressant et jouant avec lui.

      C'est joli un flocon de neige, mais t'appelle flocon... c'est moyen à moins que.... Laisse moi réfléchir.

    La laisser semble impossible, il n'arrête pas de passer sa tête sous ses avant bras pour qu'elle le caresse ou il la pousse du museau pour obtenir d'elle ce qu'il désire.
    Ode songe à comment se dit flocon de neige dans les différentes langues qu'elle apprend peu à peu à Rome, c'est l'avantage de Rome il vaut mieux parler d'autres langues pour se faire comprendre, sinon on reste vite sur le carreau... Bref !
    « malzenn erc'h, Copo de nieve, snowflake, fiocco di neve,.. » ses azurs pétillent, sa tête se balance doucement, son nez se plisse légèrement puis en le serrant tout contre elle.


      Copo, tu es un sacré Copo de nieve toi !

    Le chiot la regarde sans comprendre, puis il pose ses grosses pattes sur ses épaules pour tenter de la léchouiller.
    Ode se laisse tomber sur le dos en riant pour éviter que sa langue fasse un lavage complet de son minois. Quand enfin, elle parvient à s'évader des attentions du chiot, la jeune femme se redresse prestement et se met à courir dans la plaine polonaise.


      Viens Copo !

    Début de l'éducation de la bête, l'apprentissage de son prénom, mais aussi qu'il apprenne doucement à ne plus lui sauter dessus car si pour le moment il pèse pas encore très lourd dans quelques mois quand il aura sa taille adulte, il sera presque aussi lourd qu'elle alors... Vaudrait mieux qu'il soit habitué à cela autrement, elle risque d'avoir souvent les quatre fers en l'air et franchement ça ne fait pas toujours bon genre selon le contexte en fait jamais c'est le plus simple !

    La journée se passe tranquillement entre écriture, jeux avec Poco et lecture, un moment de sérénité qui ne lui fait pas de mal. Alors que Poco s'allonge à ses pieds pour une petite sieste bien méritée, la Kerloc'h se met à écrire pour ses offices, tout en songeant à l'avenir proche.
    Un nouveau voyage est prévu aux côtés de son ami, dès qu'ils poseront pieds à terre à Tréguier, ils repartiront tous les deux pour d'autres aventures. Aussi, elle étudie la carte pour programmer leur futur périple, Poco fera partie de l'aventure lui aussi même si en grandissant il prendra bien plus de place, mais elle ne le laissera pas seul à la baronnie. D'ailleurs elle prendra le temps de passer sur ses terres et à son atelier de botaniste.
    Odinette commence à être pressée d'arriver en Bretagne pour profiter un peu et mieux repartir.
    Des plans elle en fait, en veux tu , en voilà !
    Mais surtout, elle étudie beaucoup pour ne pas être totalement perdue dans le pays où ils se rendront.
    Nouveau pays, nouvelles aventures, nouveaux paysages, nouveaux visages, tout ça lui plaît de plus en plus. Tout est prévu, laissant malgré tout au hasard la suite car il faut toujours une belle part de hasard ! Le Très Haut veille toujours sur eux de toutes façons, cela , elle y croit dur comme fer.

    Après avoir rangé ses outils d'écriture, Odinette scrute le ciel et laisse son esprit partir dans des souvenirs en caressant le pelage de son chiot tout en fredonnant doucement


      Humm...MMmmm..
      Pour vivre le souvenir que j'ai de nous 
      On n'oublie jamais rien, on vit avec...

    Légère déglutition puis un fin sourire en observant la forme des nuages, comme avec les enfants de Nath, elle imagine des animaux, des objets. Ces petits font et feront toujours plus ou moins partie de sa vie, tous comme les seuls hommes à qui elle s'est offerte corps, cœur et âme, même si aujourd'hui ce temps est révolu. Ode n'oublie pas ni son premier amour, ni celui qui a su l'épauler quand pour des raisons évidentes, elle a préféré quitter le premier... C'est la vie, mais elle ne peut imaginer qu'on la soupçonne de choses qu'elle est bien incapable de faire.
    Parfois, il vaut mieux tout cassé quand un des deux a des doutes, même si elle ne pourra jamais enterrer ces histoires qui ont fait d'elle ce qu'elle est aujourd'hui, une femme ordonnée qui ne laissera plus d'homme entrer dans sa vie comme ces deux là.


    Le temps passe agréablement à flemmarder, rêvasser, mais le soleil entame sa course vers l'horizon, le ciel rosit légèrement, il va être l'heure de rejoindre l'ami pour se préparer au départ. Tendrement, elle réveille le chiot et lui glisse à l'oreille.


      Il est temps de reprendre les chemins mon Copo.
      Lève toi...
      Suis moi...

    Une caresse entre ses deux oreilles, la jeune femme se redresse doucement et d'un pas lent dans de grandes enjambées, ses affaires en besace, elle rejoint Cath afin de manger un bout avant de reprendre le voyage.
    La ville est proche, bientôt ils seront avec les autres, une nuit de route et ils se retrouveront tous les sept.
    Mais ces derniers ont donné un avant goût à ce duo de le voyages futurs, car c'est à ses côtés qu'elle parcourra les mers, les océans, les pays... Ils se sont plutôt bien entendu, de cela, elle ne doutait pas un instant.
    Une amitié vraie, sans jugement, sans question à la con, juste être ensemble pour avancer.

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Ode...
Nowy Targ (Księstwo krakowskie)
Mardi 6 Août 1467



La jeunesse est le sourire de l'avenir devant un inconnu qui est lui-même.

Victor Hugo




    Coucou c'est RE Moi!

    On est arrivés!
    Alors tout le monde dans ma lance et on suit le mouvement, d'ici une semaine nous devrions être pas loin de l'Horizon notre navire qui n'attend que nous pour rentrer en Bretagne!

    Zou, je vous donne rendez vous au plus vite et on me suit,
    YALLAAAaaaaa!!

    C'est parti mon Kiki!

    Bisous

    Ode
    Odinette
    MéchantOde
    BarbarOde
    et tout et tout!


    Telle est la missive qu'elle a fait porter à chacun à peine sont ils arrivés à Nowy Targ, jolie ville Polonaise où les attendent le reste du groupe.
    Presque cinq jours qu'ils ne se sont pas vus et déjà le départ est sonné, c'est qu'ils ont tous à faire en Bretagne ou ailleurs, et qu'il n'est plus le temps de traîner trop longuement.
    Des envies d'aventures, Ode en a à la toque, ce qui n'est pas le cas de tous ses compagnons de voyage, car certains n'ont qu'un désir, rentrer chez eux et reprendre le cours de leur vie avec ce long voyage et cette expérience en plus.
    Pour la Kerloc'h qui a reçu des noires nouvelles concernant sa jumelle, l'envie de fuir la Bretagne est plus d'actualité et ça tombe plutôt bien puisqu'elle avait déjà en tête un voyage avec l'ami.
    Ces quelques jours seule avec lui, lui ont permis de confirmer qu'ils s'entendent bien au quotidien et que voyager avec lui serait un plaisir sans prise de tête. C'est donc acté !

    Mais pour l'instant elle décide de dormir quelques heures avant de partir à la recherche de sa Duduche, de l'autre Barbar et des autres aotrous dont la relique vivante qui est parfois chiante mais qu'elle adore tout de même, le seul avec qui elle papote moins facilement c'est le fils de sa suzeraine adorée et ce pour diverses raisons nullement graves, juste une question de feeling. Oui, elle fonctionne aussi comme ça, comme bon nombres de personnes d'ailleurs.
    Copo s'installe tout contre elle quand elle s'allonge pour faire un petit somme, un repos rapidement écourté par des cris qui la font tressaillir alors qu'elle rêvait d'instants perdus d'avec sa sœur jumelle. Son chiot est perturbé par cette agressivité ambiante et se presse contre elle en grognant malgré son jeune âge, il se montre déjà gardien et protecteur de sa récente maîtresse comme quoi un animal choisit son maître sans qu'on ne puisse expliciter pour quelles raisons.
    Ode le caresse pour le calmer en écoutant la conversation vive même si elle ne pige que dalle de cette langue, puis quand l'orage est passé, la jeune femme se lève et entraîne dans son sillage le chiot qui la suit comme il devait le faire avec sa mère.

    Un passage sur le marché plus par curiosité que nécessité, histoire de se mettre dans l'ambiance de la ville et de chercher du regard un visage connu. Odinette n'aperçoit personne du groupe, aussi elle fait le tour des tavernes environnantes et apprend que Zak doit se trouver en forêt.
    Un franc sourire, des remerciements et la voilà partie en direction de la forêt afin de rejoindre sa suzeraine.
    En forêt, elle se promène longuement avec son petit flocon qui ne s'éloigne pas trop d'elle et il lui faut un certain laps de temps afin de trouver des bûcherons qui lui indiquent que Zak est retournée en ville peu avant son arrivée. L'endroit est tellement boisé et grand qu'il est bien possible qu'elles se soient croisées sans se voir, ce qui fait sourire la jeune femme.

    Après les avoir remerciés, la jeune femme s'engouffre plus loin dans la forêt et se met à courir pour se défouler et dégourdir les pattes de Copo, qui les oreilles dans le vent, pataud à souhait l'attendrit. Elle court pas trop longtemps car le chiot est encore jeune et n'a pas l'endurance nécessaire pour de longues durées. Doucement elle ralentit, il la rattrape maladroitement et quand elle s'agenouille à même le sol, il s'affale littéralement sur elle. La jeune femme le câline en lui parlant doucement.


      Il paraît qu'un jour de tempête Mari s'en est allée...
      Il paraît que sur le port elle a voulu secourir un petit chat et a été emportée par une grosse vague...
      Il paraît qu'elle n'est plus...
      Copo...
      Tu aurais aimé Mari, joueuse, câline …
      Elle aurait adoré te câliner...

    Une déglutition le regard dans le vide, le cœur serré, elle ne veut y croire... La nouvelle lui est arrivée ce matin et franchement, Ode a du mal à y croire.
    Certes parfois les orages d'Août sont terribles mais elle a grand mal à imaginer que sa jumelle ait perdu la vie à peine sortie du couvent.
    Le deuil passe par le dénie...
    Le deuil est une chose terrible à porter..
    C'est sa tante , celle qui héberge sa mère qui lui en a fait part...
    Par quels moyens l'a-t-elle appris ?
    Ode ne sait plus... La missive brève est restée sur la charrette et jusqu'à cet instant, elle n'y songeait plus pour dire à quel point elle refuse l'annonce de la mort de sa sœur jumelle.
    C'est impensable pour elle, même si elle savait bien que quelque chose ne tournait pas rond...
    Que Marikani n'allait pas bien est une chose, mais non, elle n'imaginait pas qu'elle puisse être emportée par la grande faucheuse.
    Depuis l'aube, Ode fait totalement abstraction de cette nouvelle qui semble la rattraper malgré elle.
    La jeune femme enfouit son minois dans le pelage du chiot pour pleurer à chaudes larmes sans aucun retenue.
    La douleur est tellement vive qu'encore elle ne peut y croire d'autant qu'il semblerait que pour le moment le corps de sa sœur n'a pas été retrouvé... Il a fallu près de trois semaines à la missive pour lui parvenir alors cet intolérable espoir qui lui prend les tripes l'empêche d'imaginer qu'elle ne pourra plus jamais voir sa sœur.

    Quand ses larmes ne coulent plus, quand son chiot se blottit contre elle c'est ua Très Haut qu'elle s'adresse simplement et humblement


      Une image*, une date
      C'est à n'y pas croire
      C'était pourtant hier
      Mentirait ma mémoire
      Et ces visages d'enfants
      Et le mien dans ce miroir

      Oh, c'est pas pour me plaindre
      Ça, vous n'avez rien à craindre
      La vie m'a tellement gâtée
      J'ai plutôt du mal à l'éteindre
      Oh mon Dieu j'ai eu ma part
      Et bien plus à tant d'égards

      Mais quand on vit trop beau trop fort
      On en oublie le temps qui passe
      Comme on perd un peu le Nord
      Au milieu de trop vastes espaces
      À peine le temps de s'y faire
      À peine, on doit laisser la place
      Oh si je pouvais...

      Encore un soir
      Encore une heure
      Encore une larme de bonheur
      Une faveur, comme une fleur
      Un souffle, une erreur

      Un peu de nous, un rien de tout
      Pour tout se dire encore ou bien se taire en regards
      Juste un report
      À peine encore, même s'il est tard

      J'ai jamais rien demandé
      Ça, c'est pas la mer à boire
      Allez, face à l'éternité
      Ça va même pas se voir
      Ça restera entre nous
      Oh, juste un léger retard

      Y'en a tant qui tuent le temps
      Tant et tant qui le perdent ou le passent
      Tant qui se mentent inventant les rêves
      En des instants de grâce
      Oh je donne ma place au paradis
      Si l'on m'oublie sur Terre
      Encore hier...

      Encore un soir
      Encore une heure
      Encore une larme de bonheur
      Une faveur, comme une fleur
      Un souffle, une erreur

      Un peu de nous, un rien de tout
      Pour tout se dire encore ou bien se taire en regards...
      Juste un report
      À peine encore, je sais, il est tard

      C'est pas grand chose
      Rien qu'une pause
      Que le temps les horloges se reposent

      Et caresser
      Juste un baiser, un baiser

      Encore un soir
      Encore une heure
      Un peu de nous, un rien de tout
      Un soir...

    Excédée, en colère, c'est un cri du cœur qui fend le silence

      Mari!!!!!

    C'est un réel déchirement, qu'elle a occulté quelques heures mais qui l'assomme de douleurs à cet instant précis.

      Tu n'as pas le droit!
      Ne me laisse pas seule...
      Marikani...

      Mari...
      Non...
      C'est pas possible...

    Ode prend le chiot entre ses bras et se lève brusquement pour courir à en perdre haleine en pleurant.
     Submergée par l’annonce de la disparition de sa sœur jumelle, imprévisible, subite … Après l'état de sidération de la lecture de la missive, est survenu le déni.
    Étape courte, quelques heures mais nécessaire à la suite...
    Maintenant qu'elle a conscience de la réalité de la nouvelle survient la phase de la colère, et elle en veut au monde entier et surtout à elle même.
    « Je n'aurai pas du quitter la Bretagne... » tant de pensées négatives se heurtent violemment en son esprit... La colère explose en elle mais s'est en serrant l'animal contre son cœur qu'elle ne cesse de courir jusque l'épuisement physique et morale qui va la plonger dans un sommeil de quelques heures quelque part perdue dans cette immense forêt polonaise.


*paroles à peine transformée pour coller à l'époque

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Ode...
Les habits de deuil ont beau s'user et blanchir : le coeur reste noir.

Victor Hugo



Częstochowa (Księstwo wielkopolskie (Domaine Royal)) 
Jeudi 8 Août 1467


    Quelques échanges avec le prévôt polonais concernant leur voyage, et les brigands qui se trouvent sur les routes.
    Pourtant ils avancent doucement mais sûrement, sans réellement croiser du monde mais surtout sans faire de mauvaises rencontres.
    Une arrivée à la ville, Ode laisse ses amis avant de partir avec son chiot sur le port afin de laisser sa peine s'évanouir au rythme des écumes ou simplement de l'humidité ambiante.
    Des mots tournent en boucle en son esprit depuis qu'elle a pris acte de la disparition de sa jumelle. Des mots qui sont ses maux du moment.
    Difficile de rester souriante toute le journée, aussi, il lui faut des moments où elle s'isole.
    Assise au bord de l'eau, son chiot blanc lové entre ses cuisses, hors de question qu'il se noie lui aussi. Elle laisse les mots s’enchaîner doucement :

        « C'est pas vraiment des fantômes, mais leur absence est tellement forte,
        qu'elle crée en nous une présence qui nous rend faible, nous supporte.
        C'est ceux qu'on a aimé qui créaient un vide presque tangible, car l'amour qu'on leur donnait est orphelin, il cherche une cible.
        Pour certains on le savait, on s'était préparé au pire, mais d'autres ont disparu d'un seul coup, sans prévenir.
        On leur a pas dit au revoir, ils sont partis sans notre accord, car la mort a ses raisons que notre raison ignore.
        Alors on s'est regroupé d'un réconfort utopiste. A plusieurs on est plus fort mais on est pas moins triste.


        C'est seul qu'on fait son deuil, car on est seul quand on ressent. On apprivoise la douleur et la présence de nos absents. Nos absents sont toujours là, à l'esprit et dans nos souvenirs. Sur ce film de vacances, sur ces photos pleines de sourires.
        Nos absents nous entourent et resteront à nos côtés, ils reprennent vie dans nos rêves, comme si de rien n'était.

        On se rassure face à la souffrance qui nous serre le cou, en se disant que là où ils sont, ils ont sûrement moins mal que nous.
        Alors on marche, on rit, on chante, mais leur ombre demeure, dans un coin de nos cerveaux, dans un coin de notre bonheur.
        Nous on a des projets, on dessine nos lendemains. On décide du chemin, on regarde l'avenir entre nos mains. Et au coeur de l'action, dans nos victoires ou nos enfers, on imagine de temps en temps que nos absents nous voient faire.


        Chaque vie est un miracle, mais le final est énervant. J'me suis bien renseigné, on en sortira pas vivant. Faut apprendre à l'accepter pour essayer de vieillir heureux, mais chaque année nos absents sont un peu plus nombreux.
        Chaque nouvelle disparition transforme nos coeurs en dentelle, mais le temps passe et les douleurs vives deviennent pastelles. Ce temps qui pour une fois est un véritable allié. Chaque heure passée est une pommade, il en faudra des milliers.

        Moi les morts, les disparus, je n'en parle pas beaucoup. Alors j'écris sur eux, je titille les sujets tabous. Ce grand mystère qui nous attend, notre ultime point commun à tous. Qui fait qu'on court après la vie, sachant que la mort est à nos trousse.
        C'est pas vraiment des fantômes, mais leur absence est tellement forte, qu'elle crée en nous une présence qui nous rend faible, nous supporte. C'est ceux qu'on a aimé qui créent un vide presque infini, qu’inspirent des textes premier degré. Faut dire que la mort manque d'ironie.
         »


    Copo commence à s'impatienter, le besoin de se dégourdir les pattes ou de faire ses besoins tout simplement, il bouge contre la jeune femme dont les larmes roulent le long de ses joues. Il lèche les gouttes salées avant de geindre comme pourrait le faire un bébé désireux qu'on s'occupe de lui. Il sait déjà se faire comprendre d'elle malgré le peu de temps qu'elle l'a.
    Doucement, elle se relève pour débuter de marcher le long du quai suivie de Copo qui va et vient autour d'elle.
    Ils s'éloignent du port plus prestement, Ode sort de la ville n'ayant nulle désir de faire la conversation, ni de faire l'effort de sourire. Marikani ne lui manquait pas terriblement jusque là, car persuadée de la retrouver mais maintenant... La sensation est différente, désormais elle ressent un vide en son coeur...

    Souvenirs des mois passés toutes les deux à la Rochelle, la plage, le port, les rires, les conneries dans leur petite maison. Les taquineries allaient bon train, Ode ne cherchait pas l'amour contrairement à sa soeur et pourtant c'est elle qui l'a trouvé... Son premier Amour, un grand amour même s'il ne le saura jamais... plus tard il y a eu Nath qui a su l'émouvoir et la comprendre... Merde!
    Sa soeur lui manque plus qu'elle n'aurait pensé...
    Savoir une personne vivante qu'on ne voit pas, le manque est là mais l'espoir et la certitude de la retrouver le dissipe.
    Mais quand on parle de disparition, il n'y que peu d'espoir de la revoir, alors le manque déjà présent devient béant. Vraiment!


      Elle t'aurai trouvé mignon mais trop encombrant et trop poilu.

    Le chiot tourne la tête vers elle sans comprendre, Ode poursuit malgré tout, les larmes ruisselantes sur ses joues roulent sans retenue, à quoi bon? Elle en a besoin de toutes façons.

      Il paraît qu'elle a rejoint le Très Haut...
      Je ne peux ni ne veux le croire...

    Il remue la queue alors qu'elle lui parle, certes il ne comprend pas, mais il est présent et sa seule présence fait du bien à Odinette.
    Désormais elle a conscience que cette absence va lui porter peine et que jamais cette plaie ne sera totalement pansée.
    Alors la colère revient en force comme une déferlante incontrôlable
    Une colère qui explose comme le ferait un ouragan emportant tout sur son passage, là c'est la raison qui est prise .
    Et quand son corps est au prise de ce mal invisible, ce sont ses jambes qui l'emportent en une course folle sans qu'elle puisse se raisonner ou s'arrêter.
    Le petit chien blanc, la suite comme il peut et parviendra à la retrouver quand elle se sera effondrée dans un écrin de verdure pour laisser sa folie dévastatrice s'estomper doucement, lentement...
    Cette fois, elle est pressée de rentrer en Bretagne afin de vérifier par elle même la disparition de sa soeur... Passer dans sa petite maison.... Longer le port et les quais...Besoin de preuves qu'elle n'aura jamais et pourtant... Ce putain d'espoir est toujours là.

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Zakarine
Skwierzyna (Księstwo wielkopolskie (Domaine Royal)) Mardi 13 Août 1467






Ils étaient en route vers le port où était amarré l'Horizon. L'ambiance de la fin du chemin était différente de celle de l'aller où les Trégorrois avaient tout à découvrir. Même si certains étaient heureux d'enfin rentrer, une certaine nostalgie s'était installée. Les souvenirs et les bons moment déjà passés les submergeaient de partout. Ode, la rieuse, l'attachiante même parfois, n'était plus que l'ombre d'elle-même suite à une mauvaise nouvelle qui lui était parvenue de Bretagne. Copo, le petit chien blanc qu'elle avait adopté en route, faisait tout pour amuser sa maîtresse, il y arrivait de temps en temps, mais la perte d'un membre de sa famille était trop terrible à supporter. Zakarine espérait pour sa BarbarOde que la disparition de Marikani n'était qu'une rumeur de plus et que son amie allait retrouver sa sœur une fois arrivée en Bretagne.

BarbarTitia, quant à elle, était plus que pressée de rentrer à la maison. Son Rico l'attendait. Zakarine plaisantait avec elle en imaginant les retrouvailles explosives, pour ne pas dire autre chose. Voilà plus de sept mois qu'ils avaient tous quitté Tréguier. La Duduche, elle se languissait de rentrer à la maison, même si personne ne l'attendait à part certains de ses proches, dont son Chevalier qui lui donnait régulièrement des nouvelles de ce qui se passait en Bretagne. Bien qu'elle eut largement apprécié leur voyage, adoré les gens et les paysages rencontrés ci et là, son pays commençait à lui manquer. Il lui tardait se prendre la relève d'Arthur qui s'était démené pratiquement seul pour maintenir la mairie à flots et, de ça, Zakarine le remerciait grandement. Elle estimait qu'il avait grand besoin de repos mais qu'il aurait toujours sa place au sein du conseil municipal s'il désirait toujours s'investir quelque fut le poste qu'il désirait avoir, même celui de maire. Mais, à ce moment-là, il serait bien encadré et surtout aidé convenablement dans sa tâche par des conseillers présents et actifs.

Et tout ça, elle le ruminait durant le trajet qui les menait jusqu'à Skwierzyna: toujours regarder droit devant! Le merveilleux voyage allait encore la hanter longtemps, sans doute dans ses rêves, les jours où elle ne se sentirait pas bien, mais là, pour le moment, elle ne pensait presque plus qu'au Trégor et à son avenir. Lorsqu'ils passèrent les portes de la ville, la rouquine ressentit un léger pincement au coeur. Voilà.. cette fois, c'était bien fini... Les gens étaient toujours aussi accueillants, le paysage toujours aussi beau, la neige en moins. En fait, Zakarine redécouvrit une nouvelle ville, en ce 13 août 1467. Elle fit un tour sur le marché et trouva que le maïs était beaucoup plus cher qu'ailleurs. En parlant de maïs, la Trégorroise se mit à rire en pensant que sa grange devait sans doute déborder d'épis de cette précieuse plante depuis son absence. Le soc rapporté du Camps du Khan n'allait pas arranger la chose puisque ses récoltes allaient être encore plus abondantes qu'autrefois.

Visite au port avant d'aller boire une dernière chope de l'alcool local. Alors qu'elle avait écrit au maire de la cité polonaise pour le prévenir de leur arrivée, elle n'avait reçu aucune réponse de sa part.. Elle ne savait donc pas dans quelle état elle allait retrouver la Cogue que Rico leur avait gentiment prêtée pour le voyage. Elle inspecta chaque bateau amarré sur les quais mais il ne semblait pas être là.. Depuis le temps, elle ne se rappelait plus où il se trouvait. C'est après une balade sur le dernier ponton qu'elle découvrit un Horizon quasi neuf. Bien entendu, il faudrait certainement le nettoyer à l'intérieur, mais l'extérieur était parfait. Ce qui la rassura grandement. Maintenant, elle pouvait aller boire un coup avec ses amis et faire un dernier tour en ville.

En discutant avec ses Barbars, le sujet de la taxe portuaire revint sur le tapis. Les quinze premiers jours étaient gratuits mais, pour le reste du temps, ils devaient s'acquitter d'une taxe dont les Trégorroises ignoraient le montant. Ce qui était très angoissant étant donné l'état de leurs finances de ces derniers jours. Zakarine leur demanda de monter à bord afin de s'occuper de cette affaire avant de monter, à son tour. Elle avait donné rendez-vous à tous pour désamarrer au plus vite et laisser une place vacante sur le port qui était déjà bien surchargé. Les filles montèrent et firent signe à Zakarine que certains hommes étaient déjà là, eux aussi.

Ravie, la Rousse se dirigea vers la mairie. Elle se fit annoncer et un secrétaire la reçut, le maire étant absent si tôt le matin. Elle lui donna une bourse de 50 thalers, monnaie locale, pour remercier Skwierzyna d'avoir pris soin de son bateau et griffonna un mot à l'attention de Aotrou Vukosav auquel elle expliqua la cause de ce don et elle scella le document. Une grand sourire se dessina sur ses lèvres en sortant du bâtiment municipal. Elle se dit qu'ils s'en étaient sortis à très bon compte. Elle se dirigea à nouveau vers le port et, cette fois, monta sur le pont rejoindre ses amis.



L'Horizon, 11h50



Zakarine regardait l'état du pont. En effet, un bon nettoyage était plus que nécessaire avant de reprendre la mer. En attendant que tous soient montés, elle ressortit les clés de la cabine de pilotage, du mess ainsi que celle de la cale pour voir ce qu'il y avait dedans. Elle fut déçue de n'y voir que des carcasses de viande qu'elle avait acheté à bon prix et qui, heureusement, avaient été salées pour les conserver. Point de nourriture en plus de ce qu'il y avait au mess. Elle espérait que tous avaient des réserves sur eux. Il n'y avait de pain et de maïs que pour un mois à partager. La disette, certains la connaissaient. Les solutions ne manquaient tout de même pas pour y remédier, sur un bateau. Ils verraient bien le moment venu. La Momie était trop vieille pour travaillait autant que les plus jeunes, ou bien c'était le poil qui avait poussé dans sa main qui avait trop épaissi et qui l'en avait empêché... Allez savoir!

La Capitaine retourna dans la cabine afin de s'assurer que tout était en ordre. Le bateau était prêt à partir. Tout le monde attendait.. attendait.... Nathaniel manquait toujours à l'appel à plus de 16h00 passée.. Zakarine espérait qu'il monterait assez tôt pour qu'ils puissent partir avant la nuit. La manœuvre de jour dans un port était plus efficace. Elle n'avait nulle intention de défoncer les quais ou bien les pontons du port. Elle entendait déjà les sobriquets et les réflexions machistes de ses compagnons de route du style: Femme à la barre, Homme qui se marre! Pour les éviter, elle préférait être prudente et partir le soleil éclairant encore le port.

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Ode...
Même jour,
Même endroit,
Même moment ou presque
que sa duduche.

Un retour à leur point de départ.

Skwierzyna


    Quelle étrange sensation d'être de retour dans cette ville... Quand sont-ils arrivés? Ode ne le sait plus... Mais elle s'installe contre une arbre pour sortir son carnet de voyage de sa besace qui ne la quitte jamais.
    Copo vient se coller à elle, s'allongeant à ses côtés, la tête sur ses cuisses.
    La Kerloc'h feuillette son carnet et sourit largement en découvrant la date...


      Mercredi six Mars mille quatre cent soixante sept, trente septième jour de voyage, débarquement à Skwierzyna en Księstwo wielkopolskie .

    Odinette caresse la tête du chiot qui la regarde sans comprendre mais qui remue vivement la queue malgré tout.

      Il y a cinq mois et quelques jours...
      Tu sais mon chien quand on est arrivé, tu n'étais pas né encore et il y avait de la neige partout.
      Regarde aujourd'hui comme le soleil brille comme le paysage est magnifique.

    Une profonde inspiration, son carnet de voyage si précieux est rangé avec précaution en sa besace. Le chiot réclame encore quelques caresses avant de désirer bouger.

      Nous allons te dégourdir les pattes un peu avant de monter à bord, car après tu n'auras que le pont comme terrain de jeu.

    Ode se redresse rapidement puis se met à marcher de plus en plus vite jusqu'à allonger sa fouler et partir en courant aux extérieur de la ville afin de fatiguer le chiot et elle aussi par la même occasion.
    La jeune femme est partagée, il lui est difficile de se dire que ce voyage arrive à son terme et même temps il lui tarde de retrouver Tréguier pour se faire une réelle idée de la santé de sa sœur.

    Quand ils sont arrivés en mars, ils avaient des rêves pleins la tête, l'envie et le désir de découvrir, la curiosité de tout visiter, des projets en veux tu en voilà … Ils ont tout fait !
    Tout ce qu'ils avaient prévu.
    Ils ont tout vu.
    Tout ce qu'ils désiraient voir.
    Ils ont découvert différentes cultures, différents langages, différentes personnes.
    Ils se sont fait plaisir.
    Ils ont galéré aussi.
    Ils en ont chié même parfois.
    Ils ont eu tous types d'émotions.
    Ils ont vécu leur rêve.
    Ils ont partagé.
    Ils ont eu faim.
    Ils ont eu soif.
    Mais jamais, ils n'ont renoncé !
    Ceci est une certaine fierté.

    Mais là, c'est fini !
    C'est la fin du voyage.
    Ils sont comme épuisés mais heureux.
    Chacun à ses raisons d'avoir hâte de rentrer en Bretagne.
    Ils ont à jamais des souvenirs gravés dans leur esprit, ils auront toujours ses images qui reviendront lorsqu'ils songeront à ce périple.
    Chacun est riche de ce qu'ils ont vécu.
    Le retour semblera-t-il plus long qu'à l'aller ?
    Aucune idée...

    Ode est déjà partie depuis qu'elle a reçu la missive annonçant la disparition de Marikani, si elle parvient à sourire à ses amies et amis c'est qu'elle les aime comme sa famille pourtant elle n'est plus la jeune femme à raconter des conneries à tout va pour faire marrer l'assistance, ni celle qui titille pour être la chieuse qu'elle est. Non... Là , les choses sont différentes et la colère est toujours présente.
    Sa colère , celle qui gronde au plus profond de ses entrailles... tout en courant elle crie quelques paroles


      C'est les yeux qui s'effritent et le poing qui se blesse
      Au tranchant des caresses, au baiser de la vitre
      "Patron, une dernière, à la santé du diable !"
      Et je casse mon verre sur le bord de la table
      C'est un rire qui balance sous le ciel des gibets
      Et son sexe bandé en haut de la potence
      C'est le cœur éclaté mais c'est mieux que se taire
      De pouvoir la chanter, comme hurler de colère,
      Sa colère

      C'est sauter à deux pieds sur l'édredon des ronces
      La rage qui défonce les portes enfoncées
      C'est l'opéra du cri, l'orage de tes bras
      C'est cracher du lilas à la gueule des orties
      C'est un hymne de fou, c'est l'étincelle noire
      Qui porte à la victoire l'agneau contre le loup
      Un baiser en dedans à l'amitié complice
      Qui mord à pleine dents le cul de l'injustice,
      La colère

      HAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAA

    Sa course ralentit progressivement, alors que ses larmes coulent, roulent, dégoulinent de plus en plus abondantes le long de ses joues.
    A genoux, elle s’effondre, le cœur meurtri, la tristesse et à mille lieux de l’indolence de la souffrance.
    A chaudes larmes, Ode est là, au milieu de nulle part, loin de la ville.
    Copo vient lécher ses gouttes salées en tournoyant autour d'elle, se demandant probablement ce qui lui prend.
    Ode enlace le cou de l'animal enfouissant son minois dans son pelage, ils restent un long moment avant qu'elle cesse de pleurer et se décide à se lever non sans avoir caresser le chiot qui tire une langue d'au moins dix pieds de long.


      Viens Poco !
      Direction l'horizon pour d'autres horizons.
      Dis au revoir à tes terres qui t'ont vu naître...
      Moi, je vais te montrer d'autres lieux.

    C'est en marchant qu'elle regagne le port.
    Un dernier regard à la ville avant de faire ses derniers pas sur le plancher des vaches.
    Bientôt , ils vont partir, quand tous seront à bord.
    En marchant sur la trappe qui les mène sur le pont du navire, Poco hésite un instant.
    Il va devoir se faire au bateau, il va devoir apprendre à avoir le pied marin, mais pour le moment, il tremble de tout son corps.
    Aussi après l'avoir encouragé, félicité, tenté de le rassurer, la jeune femme le prend dans ses bras ce qui risque de ne pas durer encore pendant des mois car adulte il fera au moins son poids.


      N'aie pas peur, je suis là.
      Tu verras ça va bien se passer.

    Elle l'espère.
    A peine à bord, elle va déposer ses affaires dans sa cabine avant de rejoindre la capitaine Zak pour savoir ce qu'elle a à faire dans l'immédiat... Sûrement nettoyer un peu le pont qui a été sans soin durant ces mois passés à terre.
    Mais sans déconner, nombreux sont ceux qui avaient cru que jamais ils n'y arriveraient, quel pied de nez à la vie et à ceux là.

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Zakarine
Horizon, sur l'Oder, Mercredi 14 Août 1467







Le bateau sommeillait, tranquille.. la fatigue de ces derniers jours avait gagné l'équipage qui semblait somnoler sur la cogue encore amarrée au ponton du port de Skwierzyna. L'inquiétude gagnait Zakarine qui attendait Nathaniel qui tardait à monter à bord. Elle supposait que ses autres amis devaient être également dans le même état mais chacun avait rejoint sa cabine à l'heure où le retardataire grimpa enfin. De sa cabine de pilotage où elle avait élu domicile en espérant partir aussitôt, à son grand soulagement, la Rousse aperçut la silhouette silencieuse sur le pont. Elle le rejoignit, heureuse qu'il ne lui fut rien arrivé de grave, et lui demanda de larguer les amarres. Le bateau détaché de son point d'ancrage, elle put enfin doucement manoeuvrer dans le port et libérer la place qu'il prenait alors que le port était surchargé. La pleine lune l'y aida fortement. Elle y voyait presque comme en plein jour. Une fois assez éloignée du quai, elle fit jeter l'ancre et alla, elle aussi, se coucher dans sa propre cabine pour un repos bien mérité.

Le matin, tout le monde était en forme. Tous les membres d'équipage se retrouvèrent au mess pour prendre un bon petit-déjeuner avant d'entamer une journée à naviguer, pêcher, dormir.. Enfin, journée normale de marin d'eau douce qui ne durerait pas très longtemps, le temps de voguer sur le fleuve. Ils riaient en racontant les exploits des uns et des autres. Les souvenirs resteraient marqués à vie dans la mémoire collective. le petit chiot, devenu la mascotte du groupe, jappait en espérant une caresse un ou un petit truc à grignoter. C'était plutôt vorace à cet âge. Quoiqu'il valait mieux qu'il fit ses dents sur du pain rassis plutôt que sur le mobilier!


Allez zou! C'est l'heure! Il faut monter les voiles et moi, je dois barrer. On se retrouve plus tard, même endroit!

L'Horizon ne souffrait pas trop sur l'Oder. Le vent n'était pas au rendez-vous. Les Trégorrois durent ramer pour le faire cheminer le long des berges peu profondes. Une véritable croisière fluviale d'où ils pouvaient admirer le paysage et la ville portuaire fortifiée qui s'éloignait doucement. Rien n'était à signaler. Ils prirent leur repas du midi ensemble. Certains allaient vérifier les filets qu'ils avaient jetés pour améliorer l'ordinaire de l'équipage. En fait, tout le monde se la coulait douce. ils savaient que, sur la mer, ils chanteraient une autre chanson avec le risque de tempête et autre cataclysme. Ils profitaient du calme ambiant et ils avaient bien raison.

En fin de journée, la vigie signala deux bateaux, plus au nord. Réunion de crise...


Nous allons devoir les croiser, nous n'avons pas le choix mais il faudra être très prudents cependant. Les Polonais semblent être pacifiques. Je ne pense pas que des pirates s'aventureraient par ici, vu le peu de marche de manœuvre qu'ils ont pour s'échapper. Ils se feraient couler aussitôt.

Chacun reprit sa place et vogue le navire, les yeux braqués sur les bateaux qui allaient les rejoindre dans quelques heures, en essayant de deviner au loin les types de navires que c'était, les pavillons qu'ils battaient..


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Zakarine
Horizon, mer Baltique, Jeudi 15 Août 1467









Le premier bateau que la vigie avait repéré n'était pas bien dangereux. Ils le croisèrent dans la nuit du 14 au 15 août. De loin, on ne pouvait pas bien voir mais de près... Ce n'était qu'un simple foncet appartenant au maire de Kalisz , celui-là même qui les avait aidés à manœuvrer sur l'Oder à l'aller. Rassurés, ils continuèrent à remonter le fleuve en se méfiant du deuxième qui se profilait à l'horizon.



Alors qu'il aurait dû se retrouver à leur hauteur, Zakarine eut la surprise de s'apercevoir que le navire avait reculé, au lieu de descendre l'Oder comme il semblait vouloir le faire quelques heures plus tôt. Intriguée par les intentions du capitaine de l'autre navire, elle demanda à ses amis de continuer à ramer pour sortir du chenal malgré tout, mais gardant un oeil à la nave génoise qui s'éloignait. Une partie de cache-cache s'engageait. L'un contournait les petits îlots qui faisaient face à l'embouchure du cours d'eau, l'autre traçait sa route, ne cherchant même pas à l'éviter. Le Capitaine trégorrois pensait que si celui d'en face avait des intentions belliqueuses, il avait eu tout le loisir de l'attaquer. Se faire craindre la fit sourire. Lorsque, autour de 18h00, elle fut assez proche du Vega qui battait pavillon espagnol. La Rousse fut tentée d'envoyer un message au Capitaine d'en face pour le rassurer sur ses intentions et, à la limite, lui donner des conseils pour voyager à pieds, une fois le bateau accosté dans le port. Mais elle se ravisa très vite. Elle pensa que chaque aventure était différente et que chacun devait faire sa propre expérience. Et puis... après tout.. on ne lui avait rien demandé! De plus, elle ne connaissait pas ce bateau. S'il avait été breton, peut-être, mais ibère..




Montez les voiles et continuez à surveiller ce navire pendant que je tiens la barre, mar plij. Nous devons profiter du vent! Cela ne durera peut-être pas longtemps.

Branle bas de combat parmi l'équipage. La vigie qui ne ratait rien de la scène du haut de son mât, les autres qui tiraient les cordages pour mettre les voiles en place. A la grande joie de nos marins bretons, les vents leurs étaient favorables, pas besoin de ramer avec un temps pareil! L'Horizon poursuivait sa course sur les flots sans traîner. La nave avait sans doute moins de chance puisqu'elle n'avait pas bougé durant de longues heures. Toujours aux aguets, la longue vue vigilante était restée braquée sur elle, au cas où...



Le danger avait été définitivement écarté. Après un passage rapide au mess pour voir ses amis, Zakarine prit une bouteille de chouchen qu'elle gardait dans sa cabine. Cela faisait ce qui lui avait semblé être une éternité qu'elle n'avait pas goûté à son breuvage favori. Elle voulait fêter un anniversaire seule. Un an.. un an déjà qu'elle était célibataire.. Elle sourit et trinqua.

Bon anniversaire Liberté Chérie!

Malgré tout l'amour qu'elle avait éprouvé durant tant d'années et le mal qu'elle avait ressenti lors de sa rupture, Zakarine appréciait grandement sa liberté retrouvée. Aucun compte à rendre! Surtout faire les voyages dont elle avait toujours rêvés sans attendre l'approbation de qui que ce soit! Des années de chaînes sans voir le jour, ça avait été sa peine forçat de l'amour et qu'en restait-il, au final? Plus rien. Pas même de l'amitié, à son grand dam.. Contrairement au début, cette fin d'année de renaissance fut un très grand bonheur. Dans son ensemble, cette période fut très bon millésime... Elle ne regrettait plus rien. Elle refusait de mourir d'amour enchaînée désormais.. C'est sur ces pensées que la Duduche s'endormit comme un bébé.
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Zakarine
Horizon, eaux danoises, Samedi 17 Août 1467






Le temps de repos fut bref. Zakarine fut réveillée très tôt le matin par le fracas des vagues qui se jetaient sur la coque du bateau qui tanguait dangereusement. Elle se précipita pour se lever et s'habilla à la hâte. Elle sortit de sa cabine et frappa à toutes les portes pour réveiller ceux qui ne l'étaient pas déjà et qui avaient le sommeil lourd.

Tout le monde debout! Il y a une tempête! Il se pourrait qu'il y ait des dégâts à réparer!

Derrière la porte de Ode, la Rousse entendait le chiot aboyer de peur et Ode qui le rassurait. Zakarine sourit et se dit qu'elle aussi devrait reprendre un animal, au fond. C'est câlin et, surtout, c'est fidèle, un chien.. à l'opposé des hommes, quoi!

Elle courut sur le pont en direction de la cabine de pilotage. Tous les autres membres de l'équipage vérifiaient que tout allait bien. Les vents les menaient droit vers les îles du Danemark, presque à l'opposé de leur objectif qui était le canal de Kiel (Nord-Ostsee-Kanal) qui se trouvait, quant à lui, en Allemagne.


Abaissez les voiles! Le vent nous pousse trop fort vers le Nord-Ouest!

Cheveux au vent, la capitaine hurlait pour se faire entendre tout en tenant fermement la barre en se faisant aider par un de ses compagnons pour maintenir le gouvernail dans la bonne direction. Elle craignait de rater l'entrée du canal par la faute de la tempête qui sévissait sur eux ce matin-là. Elle calculait, recalculait par où il fallait passer pour atteindre leur but, évitant parfois de justesse des îlots au risque de s'échouer. C'eut été dommage de finir leur vie après avoir vécu une telle aventure! Voir Venise et mourir... diraient certains mais Zak n'était pas d'accord avec cette maxime. Pas encore, du moins. Elle n'était pas encore trop âgée pour vivre d'autres aventures, même d'un genre différent: ne serait-ce que le travail qui l'attendait dans le Trégor, son fief.

Après des heures de dur combat entre les éléments et le navire, le vent adonna. Il devint tout à coup plus favorable pour la route, laissant un peu de répit aux marins. Les voiles durent être levées de nouveau et tous prirent un peu de repos bien mérité au mess, en priant le Très-Haut qu'il ne changeât pas de cap. Tout le monde était épuisé.

En soirée, Zakarine retourna à son poste et dirigea l'Horizon vers le canal, tout en souplesse. Il entrait dans les eaux teutonnes avec une facilité qu'elle n'aurait pas imaginée quelques heures plus tôt. Il faisait nuit noire quand ils furent à mi-chemin du canal tranquille. On jeta l'ancre. Il était temps de dormir. Demain serait un autre jour.

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Zakarine
Horizon, mer des Wadden, Lundi 19 Août 1467






Le 18 août, au matin, l'équipage en son entier avait passé une douce nuit, bien reposante. Les amis trégorrois s'étaient retrouvés au mess pour discuter et prendre un bon repas qui devait les faire tenir une bonne partie de la journée car même paisible, la navigation prenait du temps. Je rajouterais même : surtout si elle est paisible! Les marins devaient mettre la main à la pâte et ramer dur pour faire avancer le navire par temps calme. De sa longue vue, Zakarine scruta l'horizon. Ils étaient arrivés au bout du canal de Kiel. Elle remarqua que, d'après le flux marin, les courants semblaient être très violents.

Préparez-vous à voir les éléments se déchaîner, les amis! Pour le moment, c'est tranquille, ce qui ne semble pas être pareil dans le Détroit qui nous attend.

Le Nord-Ostsee-Kanal rejoignait la mer des Wadden qui se jetait dans le fleuve Elbe. La Cap'tain Zak continuait à surveiller attentivement tout en maintenant le cap. Elle espérait qu'ils n'allaient pas trop galérer pour atteindre la mer et voguer vers les Pays Bas sans trop de souci.



La silhouette d'une nave génoise attira son attention. Elle semblait ne pas avoir bougé de position depuis qu'elle l'observait. La Rouquine ne savait pas encore si la cause était la mer qui était démontée ou bien fut-elle tout autre.



La matinée était bien entamée lorsqu'ils arrivèrent à sa hauteur. Ils stoppèrent et jetèrent l'ancre pour voir s'ils pouvaient aider. Tout était calme à bord. Aucun signe de vie n'émanait du Jenny Pirwin II . Le navire était abandonné en pleine mer! Après concertation, la plus grande majorité de l'équipage fut d'accord. Ils allaient tenter de forcer la cale pour trouver un éventuel trésor. Voilà nos Trégorrois apprentis pirates sur un bateau fantôme! Une cogue marchande contre une nave de guerre, l'histoire n'était pas aussi simple.. Tous s'y étaient mis. Aucun ne ménageait ses effort pour couler le rafiot. Il leur fallut toute une journée complète pour en venir à bout. C'est que c'est costaud, ces petites bêtes mais ils y parvinrent malgré tout.

Une fois la coque bien abîmée, c'est vers midi le 19 août qu'elle céda et que le Jenny Pirwin II coula à pic. La Cap'tain Zak et les membres de l'équipage plongèrent chacun à leur tour afin de récupérer ce qui pouvait l'être. Malgré la chaleur de l'air, l'eau était glaciale. Plonge et remonte! Au bout de quatre heures de temps, les Pirates en herbes étaient épuisés, en plus d'être frigorifiés. Par chance, il y avait du bois dans la cale.. Les nageurs le déposaient sur le pont avant de replonger aussitôt. Pas vraiment un trésor mais, au moins, ils ne rentraient pas bredouilles! Ce bois allait servir aux réparations des dégâts que le bateau avait subis lors de leur attaque. Les rochers proches de la côte avaient été pervers et les avait heurtés sournoisement alors que l'équipage s'occupait du navire fantôme. Ils avaient tenté, ils avaient réussi à récupérer un peu de bois. C'était toujours mieux que rien. Ce serait sans aucun doute leur dernière aventure avant de retrouver la monotonie de la Bretagne.

Chacun reprit sa place: Zak à la barre, les autres se partageaient les tâches pour éviter l'ennui. Et l'Horizon reprit la route en direction de Tréguier. La vigie, sur le mât, se mit à hurler:


Un bateau arrive! Un bateau arrive!

Ne le lâche surtout pas des yeux! Avec ces courants, nous avons du mal à avancer. Alerte-moi s'il s'approche d'un peu trop près, mar plij!

En effet. Comme elle l'avait prévu lorsqu'elle était sur le canal, l'endroit n'était pas serein. Les courants étaient plutôt violents et Zakarine avait du mal à les dompter avec le gouvernail. La soirée allait être longue...
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Zakarine
Horizon, mer des Wadden... toujours, Mercredi 21 Août 1467







Ils avaient réussi à semer le bateau qui les avait suivis en dépassant les îles du Danemark. Peut-être avait-il tenté sa chance auprès de l'épave que les Trégorrois avaient abandonnée? Peut-être avait-il pris un autre chemin? Cap'tain Zak ne le saurait probablement jamais. Alors que le vent les avait gâtés jusque là, il se mit subitement à tourner et, là, impossible d'avancer. Ils avaient beau abaisser les voiles, ramer comme des malades, les rafales venant du nord les poussait inéluctablement plus au sud vers la côte rocheuse de Germanie, au risque de fracasser le navire. La dernière heure de nos amis était-elle arrivée? Certainement pas! Le bateau tanguait dangereusement, comme ivre. Ivres de liberté; incontestablement, ils l'étaient tous. Ivres morts; parfois. Morts tout court; non! Chacun avait quelqu'un ou quelque chose qui l'attendait à Tréguier et ils mettait tous leur coeur et leurs muscles pour contrecarrer le funeste destin que leur promettait ce fichu vent en formant des vagues impressionnantes qui leur avait faits perdre de très longues heures de propulsion.

Zakarine profita d'avoir son charpentier de fils sous la main pour que Robin colmatât comme il pouvait la coque endommagée. Les réparations définitives, ce serait pour plus tard, en cale sèche de Tréguier. En l'instant présent, place au rafistolage pour se dépanner. La houle continuait à s'amuser avec l'Horizon comme si c'était une coquille de noix. De temps en temps, Zakarine voyait passer son fils près d'elle qui grognait en marmonnant que, cette fois-ci, c'était bel et bien la dernière fois qu'il montait sur un rafiot. Malgré la tempête qui sévissait et la crainte d'une catastrophe, elle ne pouvait s'empêcher de rire chaque fois qu'elle observait le visage renfrogné de Robin qui lui lançait des regards assassins.

C'était en fin de journée que leurs efforts furent récompensés. Ils avaient fait de leur mieux et ils avaient réussi à sortir de la turbulence météorologique. Cap'tain Zak tenait bon la barre et les voilures étaient entre de bonnes mains avec le reste de l'équipage. Le navire avait enfin pu dévier sa route vers l'Ouest. La côte hollandaise se profilait au loin devant eux.


Cap Sud-Ouest! En avant toute!

Le vent soufflait encore fort mais c'était sans compter sur la détermination des Trégorrois. Ils n'avaient pas pris le chemin le plus facile à l'aller et, pourtant, ils avaient réussi à visiter les trois lieux à la mode du moment bien qu'ils croisèrent quelques embûches inhérentes aux voyages en groupe. Le retour n'était pas de tout repos mais c'était de la gnognotte pour nos courageux marins, complètement aguerris aux amis, aux amours et, surtout, aux emmerdes.
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Zakarine
Horizon, mer du Nord, Jeudi 22 Août 1467







La mer est haute, la terre est basse.... chantait le troubadour Philippe Thivet. C'était exactement ce que vivait l'Horizon. Alors qu'il longeait la côte hollandaise afin de mettre le cap vers les Flandres qui se trouvaient Sud-Ouest, il se trouvait face au vent qui soufflait en venant de cette direction, vers le Nord-est. Evidemment, tout l'équipage avait beau se démener, rien n'y faisait. Pour plus de sûreté, l'ancre fut jetée. Plus rien ne bougeait. Les sept aventuriers en profitèrent pour se reposer en pêchant ou bien en buvant un coup au mess. Les plus jeunes et les plus adroits se relayaient à la vigie, sur le mât, pour surveiller la direction que le vent prenait. Dès qu'il aurait changé, il donnerait l'alerte aussitôt.

La France n'était plus qu'à quelques jours. La France et, ensuite, la Bretagne. Après tout ce temps, Zakarine se demandait comment elle allait reprendre sa vie d'avant, bien qu'elle ne se fit pas trop de souci à ce sujet. Elle allait sans doute très vite se réadapter, comme chaque fois qu'elle était partie loin de Tréguier. Le Trégor, c'était chez elle. Il n'y avait que là où elle se sentait le mieux même si elle avait apprécié connaître d'autres cultures de part le monde. Pat, son ami et confident, lui envoyait régulièrement des nouvelles de Breizh. Elle sentait dans ses messages qu'il n'était pas en accord avec la politique menée par le Conseil actuel et parlait même d'éventuels nombreux départs. Sur ce, elle lui avait répondu que ceux qui, au lieu d'essayer de faire changer les choses préféraient la fuite, prouvaient qu'ils n'agissaient que pour leur intérêt personnel et non pas pour la Bretagne. Sa Grâce Lemerco était peut-être maladroite en faisant des bêtises mais, au moins, il essayait de faire bouger les choses. Le Chevalier était un pacifiste dans l'âme. Il était opposé à toute guerre déclarée par la Bretagne, hormis sa défense. La Duchesse du Trégor, quant à elle, regrettait le temps où la Bretagne était crainte par les Français. Les barbares, nommait-on les Bretons à l'époque de son arrivée. Etant provençale de naissance, donc pas française, elle ne pouvait que comprendre la nature bretonne. Il y avait de très grandes similitudes entre les deux civilisations. Elle était très fière d'appartenir à un tel peuple pour qui sa Liberté n'avait pas de prix. Aujourd'hui, la Bretagne semblait comme endormie. Même la Grande-Duchesse semblait avoir abandonné, ce qui étonnait fortement Zakarine vu le caractère bien trempé de Lallie qui avait fait d'elle sa renommée. Lassitude, quand tu nous tiens... Mais la fuite, la Trégorroise y était farouchement opposée. Pour elle, ceux qui faisaient ça, c'était qu'ils n'aimaient pas vraiment la Bretagne. La preuve en était c'était qu'ils se présentaient à des élections françaises aussitôt leur patrie quittée. Pour certains, le prestige personnel prévalait sur le prestige de leur terre et ça, elle ne pouvait le cautionner.

Sa Bretagne commençait à lui manquer même si tout, là-bas, n'était pas idyllique. De sa longue vue, elle essayait de scruter l'horizon pour essayer de l’apercevoir mais c'était peine perdue. Ils étaient encore beaucoup trop éloignés et, de plus, avec ces fichus vents qui les poussaient dans le sens inverse!



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Zakarine
Horizon, mer du Nord, Dimanche 25 Août 1467









Après trois longues, affreusement longues, journées à batailler pour faire avancer le bateau contre vents et marées, l'équipage au complet était épuisé. Personne n'a pu fermer l'oeil durant cette période de peur que le bateau ne se fracasse contre la côte hollandaise. Les muscles endoloris de ramer, de barrer pour essayer de maintenir le cap malgré tout, ils avaient pourtant vaincu les éléments avec la force et le courage des désespérés, de ceux qui n'avaient plus rien à perdre.

Les vents commençaient à faiblir et ils en profitèrent pour voguer vers les côtes flamandes. Là, le vent était un peu plus clément mais il ne fallait pas s'y fier. Les derniers jours étaient si éprouvants qu'ils en avaient gardé des stigmates de mains quasi en sang à force de pagayer. Comme ils étaient assez proche de Dunkerque, puis de Calais, Cap'tain Zak notait tout ce qu'elle voyait dans son carnet de bord une fois le brouillard levé dans la journée. En se servant de sa longue vue, elle put même voir les noms des bateaux dans les ports. Ainsi, bien qu'elle ne les connaissait pas personnellement, l'Amirauté pouvait vérifier les rapports de la Trégorroise et comparer avec leur liste noire de pirates ou de persona non grata en Bretagne. Joindre l'utile à l'agréable avait toujours été le Credo de la Rousse. Garder les bras croisés, très peu pour elle. Il fallait qu'elle agisse pour se sentir vivante. Les momies, elles les avait visitées en Egypte et puis, elles étaient mortes..

Profitant d'un moment d’accalmie, elle prit du temps pour elle et descendit au mess boire une chopine. Elle y croisa la Relique, vivante celle-ci, qui les avait accompagnés dans cette folle aventure. Tuck et elle burent quelques tournées en papotant et en riant. La pire blague qu'il lui ai dite, c'est qu'il voulait attaquer les bateaux qu'ils croisaient à ce moment-là. L'Angleterre étant toute proche, il y avait pas mal de trafic à cet endroit de la mer du Nord. La Duchesse avait failli s'étouffer quand il lui fit cette réplique. Lui qui ne désirait pas s'attaquer à un bateau fantôme, voilà qu'il se mettait en tête de se battre contre des vivants! Dont un navire de guerre, cela dit! Zakarine savait pertinemment que son ami plaisantait. A aucune seconde elle ne le prit au sérieux mais tout de même! L'idée lui avait traversé l'esprit! Ils passèrent un bon moment à discuter de choses et d'autres mais le temps passait très vite en bonne compagnie. Il fallait retourner au travail s'ils voulaient rentrer à la maison pour septembre. Zakarine espérait faire entrer l'Horizon dans la manche le lendemain. Espoir que les courants n'allaient pas s'en mêler au beau milieu de la nuit.

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Zakarine
Horizon, la Manche, Lundi 26 Août 1467










Les voeux de Capt'ain Zak avaient été exaucés. Bien que les vents ne soufflaient pas vraiment dans la bonne direction, le bateau était tout de même entré dans la Manche. Il avait fallu manoeuvrer à plusieurs reprises, s'approchant de Douvres, en Angleterre , pour se frayer un chemin. Profitant d'un instant de repos, la Rousse s'était munie de sa longue vue pour capturer ce moment en notant tout dans son carnet de bord. Elle n'avait jamais vu autant de navires de guerre de toute sa vie, hormis lorsque la troupe avait suivi la marine royale jusqu'au Sanctuaire Taurin, en compagnie de l'Amirale Tanissa qui les avait pris sous sa coupe en les dépannant de nourriture alors qu'ils n'avaient plus rien à manger. Les bons gestes de ce genre, la Trégorroise ne les oublierait jamais. Autant elle était rancunière avec ceux qui lui avaient fait du mal, autant elle se sentait redevable à vie avec ceux qui lui avaient fait du bien. Avec elle, pas de demi-mesure..

Hissez les voiles, Moussaillons! Nous devons absolument y arriver!

Bien que ce ne fut pas la tempête qu'ils avaient connue ces derniers jours, les vents les poussait dangereusement vers la côte Est alors qu'ils désiraient se rendre au large, côté Ouest. L'Artois, si la Duduche ne la voyait pas de près, cela n'allait certainement pas la contrarier, bien au contraire. Les éléments en avaient décidé ainsi cependant. La météo s'était sans doute dite : Toi, ma vieille, tu vas faire noter tous les ports que la Rouquine croisera, quitte à la retarder de quelques jours! . Oui, bon d'accord.. C'est vrai que cela aurait pu s'avérer utile de savoir quel bateau était amarré dans quel port mais le temps passait et la patience avait ses limites. Ils étaient presque arrivés. Il était grand temps de rentrer à la maison. Revoir les gens qui avaient manqué à leur vie, reprendre leurs activités, ils ne pensaient plus qu'à ça pour la grande majorité d'entre eux.
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Zakarine
Horizon, la Manche, Jeudi 29 Août 1467









Après avoir dépassé les Flandres, l'Artois. Entre les deux, les eaux anglaises. L'Horizon visitait toutes les zones côtières qu'il croisait par la faute des courants et des vents mauvais qui l'entraînaient de parts et d'autres, sans compter sur les blocages nécessaires en pleine mer pour ne pas sombrer à cause des fortes tempêtes qu'il essuyait. Les Trégorrois mirent plusieurs jours pour parcourir quelques milles. C'était cela les aléas de la navigation. Quelquefois, les bateaux filaient vite, d'autres moins.

Zakarine, toujours sa longue vue collée à son œil droit, notait tout les bateaux qu'elle observait dans son carnet de bord. Il y en avait une tartine. La Normandie et ses mauvais souvenirs. Lorsqu'ils furent tout près de Fécamp, deux bateaux l’intriguèrent, celui de sire Maël de Kerdraon et, surtout, celui de sire Eliott, prévôt de l'époque, qui les avait traités pire que des chiens en les faisant poireauter plusieurs jours pour, au final, les empêcher de descendre du bateau à Honfleur. La rage lui monta au nez en voyant ce navire là, accosté tranquillement. Cet homme était dans sa liste écarlate et il ne valait mieux pas pour lui que l'idée de venir en Bretagne lui vînt! Une terrible envie de bousiller son navire lui était venue en tête mais elle ne désirait aucunement faire du tort à Rico, alors, elle passa très vite son chemin et respira un bon coup. Cet homme ne valait pas la peine de prendre des risques inutiles. Certaines gens n'avaient aucun savoir-vivre et il faisait partie de ce groupe d'individus, voilà tout. Elle ne voulait donc pas revoir la Normandie mais alors pas du tout!


Jeudi 29 Août, Pointe du Cotentin






Après les ports normands, il fallait remonter la pointe du Cotentin. Tout l'équipage s'y mit et deux fois plutôt qu'une. La Bretagne n'était plus si loin. Les marins ramaient comme des galériens. Le périple tirait à sa fin. Ils mettaient tant de coeur à l'ouvrage que le soir venu, l'Horizon faisait face à leur maison. La vigie se mit à hurler:

Tréguier en vue! Tréguier en vue!!!!


Zakarine sortit de sa cabine. Ceux qui se trouvaient dans le mess pour prendre un peu de repos remontèrent sur le pont. La nuit tombait. Les douces lumières des rues de la ville ainsi que des maisons dont les volets n'étaient pas fermés parvenaient jusqu’à eux. En cherchant bien, le Capitaine aperçut la silhouette de sa demeure, sur la plage. Ils jetèrent l'ancre. Il était trop tard pour réveiller le chef de port et pour faire les manœuvres d'amarrage. Après sept mois d'absence, ils n'étaient plus à une nuit près. Le lendemain, le bateau irait aussitôt en cale sèche pour y faire les réparations dont il avait besoin. La baie était très fréquentée. Elle nota tout ça, par habitude et alla rejoindre ses amis dans le mess, fêter la presque fin de leur voyage.


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