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[RP] Entre peur et abandon...

Jazon
[Montbrison, rue du Vieil Ecotay]

La voix de Jazon sembla apaiser Gypsie.
La comptine s'arrêta.
Puis soudain, elle embrassa son fils sur tout le corps et se lèva, se rhabilla et fit de même pour Gandelin.

Que lui arrivait-il ?
Jazon était perplexe, s'attendant à tout. A moitié allongé sur le lit défait, il l'observait.
Elle se retourna enfin, Gandelin dans ses bras.
Jazon se leva.
Le visage douloureux, le regard pleins de larmes, Gypsie se redressa, fière, se voulant sûre d'elle. Mais sa voix ne l'était pas.

Emmène moi Jazon, emmène moi voir Alayn. Je veux le voir. Il faut que je le vois.

A cet instant, Jazon fut impressionné par la force que dégageait Gypsie.
"Le voir......."

Il ne pouvait pas lui refuser cela. Pourtant la vision qu'il en avait eu la veille dans la ruelle de Clermont ne cessait de le hanter. Ce n'était pas beau à voir, sans compter l'odeur.
Le corps devait s'y trouver depuis plusieurs jours, au moins une semaine.
Malgré que l'on soit en hiver, les intempéries étaient passées dessus, sans compter rats, chiens et chats errants.

Jazon ne pouvait pas lui dire non. C'était son droit en tant que mère de voir une dernière fois son fils.
Et puis, il serait temps de savoir quoi faire quand ils seraient sur place.

"Viens....."

Il la prit par les épaules et sortirent de la chambre.
Dans la pièce commune, Passepoil , Jehan et Lucie les attendaient, tristes à mourir.
Jazon donna des directives malgré sa fatigue et les derniers évênements éprouvants.

"Jehan ! Attelle la cariole.
Lucie ! Aidez Dame Gypsie à se couvrir ainsi que Gandelin."


"Oui Monsieur" dirent ils de concert.
Lucie alla chercher les bottines fourrées de dame Gypsie, un mantel et une couverture.

Jehan sortit et se rendit à l'écurie atteler un cheval à la carriole.

Jazon s'assit un instant, ses forces semblant l'abandonner.
Passepoil s'approcha et lui présenta un bol de tisane dans lequel il rajoute une lampée d'alcool de prune.
Il lui posa une main sur l'épaule.

"De la prune du Berry..... De chez nous M'sieur Jazon"

Jazon fit un sourire reconnaissant et but le bol de tisane.
Cela le réchauffa.

La porte s'ouvrit.

"La carriole est prête, Monsieur !"

Regard vers Gypsie. Lucie venait de lui poser son mantel sur les épaules. L'enfant enveloppé dans une couverture se trouvait dans les bras de sa mère."Allons y alors !"

Tout le monde sortit et les Duchesne grimpèrent dans la carriole.
Jazon allait claquer les rènes sur la croupe du cheval quand Jehan l'arrêta.
Il s'approchait en courant tendant un message.

"Monsieur ! Un message !"

Jazon le prit d'une main et la carriole s'ébranla.
Il le mit machinalement dans la poche de sa veste, préoccupé par l'état du chemin recouvert d'une légère couche de neige.



[Montbrison, demeure du duc Alayn ]

Le parcours entre les faubourgs et la maison d'Alayn se fit dans le silence. Même Gandelin ne disait rien comme s'il respectait le recueillement de ses parents.

Arrivés devant la batisse, un serviteur ouvrit la porte.
Jazon aida Gypsie à descendre.
Ils entrèrent. Une forte odeur d'encens les prit à la gorge.
Jazon toussota.
Quelle belle idée !
Cette vision du corps dans la ruelle. Cette odeur pestidentielle !
L'encens en couvrirait une partie.

L'un des serviteurs approcha. Et sur un ton de circonstances, de l'émotion dans la voix.....

"Dame Gypsie ! Monsieur le Vicomte !
Au nom des gens de maison, nous vous présentons nos condoléances. Notre maitre était tout pour nous et.........."

Il dut s'arrêter pour maitriser l'émotion qui montait en lui.
"Merci" répondit Jazon.

Mais le beau père était inquiet et regarda le serviteur puis Gypsie.
L'homme comprit et tout bas, il rajouta :

"Nous avons préparé Monsieur le duc, l'avons changé. Nous sommes allés quérir un cercueil. Nous venons d'y déposer le corps et nous l' avons fermé.
Vous comprendrez que dans l'état où il était......
Des bougies ont été installées autour de lui, le feu est éteint et nous avons placé un portrait de lui sur le cercueil.
Mais il ne faudrait pas tarder......"


Immense soupir intérieur de soulagement. Jazon n'aurait pas pu trouver mieux. Ces serviteurs étaient exemplaires.
"Vous avez très bien fait.
Nous allons le voir maintenant.
Puis je vais immédiatement aller demander à notre diacre Furax pour que l'enterrement se fasse au plus vite maintenant.
Je dois aussi écrire à dame Apolonie pour qu'elle revienne au plus vite."


En parlant d'écrire, il repensa au message que lui avait tendu Jehan en partant. Il le sortit de sa poche et l'examina.
*Pour Gypsie de la part d'Apolonie*
Il se tourna vers Gypsie qui attendait sans rien dire, le regard dans le vague, une larme glissant doucement sur sa joue. Il lui tendit le parchemin qu'elle prit machinalement et serra dans sa main.

"Viens Gypsie ! "
Il voulut lui prendre des mains Gandelin mais elle s'y accrocha. Pourvu que l'encens ne l'indispose pas.

Ils entrèrent dans la pièce qui servait de chambre mortuaire.
De la fumée remplissait la pièce. Un peu partout avait été placé des brules encens.
C'était étouffant. Malgré cela, Jazon frémit des narines percevant l'odeur de la veille. Il fit la grimace.
Machinalement, il fit un signe de croix.

Gypsie s'avança, seule, avec son fils dans les bras.

_________________
Jazon Duchesne de Marigny, Vicomte de Ravel, Seigneur de Viverols.
Gypsie
Pas le moindre mot échangé. Rien à dire, douleur trop grande qui noue estomac, coeur et gorge. Pas un son, pas un pleur, rien. Juste une larme qui coule. Impossible de l'empêcher de suivre son chemin sur la joue. Plus la distance se rétrécit, plus le mal se transforme en véritable torture intérieure. Alayn est là, chez lui. Elle ferme les yeux et l'imagine venir au devant d'elle, souriant. L'accueillir à bras ouvert et serrer contre lui ce frère alors inconnu.

Elle se remet entièrement à Jazon. Il est là, tout près d'elle, attentif et attentionné. Le regard échangé avec le serviteur n'échappe pas à Gypsie, et leurs paroles resteront murmure sauf un nom, furax. Elle aimerait qu'il soit déjà là, l'ami furax, l'ami si cher à son coeur. Elle aurait aimé l'entendre à cet instant, entendre sa voix grave et douce, certainement réconfortante comme ses mots. Envie d'avoir à côté d'elle les personnes qu'elle aime, pour partager ou départager le poids de ce malheur. Fufu le muet qui dispense ses paroles avec parcimonie mais justesse.


"Viens Gypsie ! "

Ils entrent dans cette pièce transformée en caveau et les jambes flageollent. Odeur surprenante qui titille les narines et fait éternuer Gandelin.
Elle va s'évanouir mais croise le regard d'Alayn. Là, une image posée sur le cercueil. Les jambes flageollent, un vertige, elle va s'évanouir mais sent Jazon derrière elle. Celui qu'elle refusait de lacher quelques secondes avant se retrouve dans les bras de son père et Gypsie avance doucement jusqu'à s'arrêter devant le cercueil, le souffle court. Alayn est mort. Il est là dedans, dans cette boite, ce si bel enfant qui la regarde en souriant. Du bout des doigts, elle caresse le sapin comme quelques jours avant sa main passait sur la pierre tombale d'Odin. Tel père, tel fils disait-on. L'histoire se répète disait-on encore. Et Gypsie pleure, elle fait le tour de cette boite ridicule qui enferme son fils, avant que la terre ne l'ensevelisse à jamais. Elle cherche une brêche, une ouverture, un petit rien qui lui permettrait de le regarder une dernière fois.

Un regard plein de tristesse à Jazon, une interrogation murmurée. Que lui est-il arrivé ? Dis moi ! Dans le chuchotement de son époux, elle ne rélève que " dépouillé ". Il ne sait rien d'autre et la raison devra s'en satisfaire. Par Aristote que c'est douloureux et Gypsie s'assied un instant. Regarde cette pièce sinistre, se revoit veillant la dépouille d'Odin, à Montbrison. Cierges allumés entourant cercueil, celui de son fils chéri, après le mari adoré.

Dans sa main un papier qu'elle découvre, déplie et lit. Apolonie... A Gypsie, sa belle mère. Mère avant tout. D'un fils de moins. Alayn est mort. Elle comprend, elle partage les sentiments de sa bru, déjà vécu tout cela hélas... Un autre va naître sans père. Hébétée, le regard vide, la dame de Viverols est abattue dans cette pièce étouffante. Là, sur ce siège sans vraiment l'être... plutôt dans la boite, à coté de son fils. Sa place à elle, pas celle d'Alayn. Les enfants ne meurent pas avant leurs parents, en voilà des façons....

_________________
Jazon
[Montbrison, demeure de feu le duc Alayn ]

Jazon assista aux tristes dernières retrouvailles. Il avait tellement de peine pour Gypsie.
Elle qui s'accrochait à son dernier né avant d'entrer dans la pièce le lui mit dans les bras et s'approcha du cercueil.
Main sur le bois, besoin de toucher ce qui était devenu intouchable.
La mère pleura son fils, ouvrant enfin les yeux, acceptant l'inacceptable.

Gandelin toussota. Pas évident pour lui tout cet encens.
Gypsie se tourna vers son époux, voulant savoir ce qui était arrivé. Il n'en savait trop rien mais à ce qu'il avait pu constater sur place, son fils s'était fait dépouiller.

Gypsie vint s'asseoir. Jazon pensa aller confier leur fils à une soubrette et se rendre au presbytère.
Mais Gypsie leva une main vers lui.
Reste avec moi
Il se pencha vers elle.
"Promis ! je ne suis pas loin !"

Il sortit avec l'enfant en laissant la porte entrouverte pour qu'elle puisse entendre sa voix. Il confia Gandelin à une soubrette et demanda au serviteur de quoi écrire.
S'attablant, il prit un parchemin et une plume qu'il trempa dans l'encrier.
Mais avant de rédiger, il dit au serviteur toujours présent:

"Allez quérir le diacre Furax au plus vite. Il faut que le duc soit enterré au plus vite maintenant.
J'écris à sa veuve pour qu'elle soit là demain. Dites le lui !"

"Oui Monsieur le Vicomte.... Bien Monsieur......"

Le serviteur sortit et Jazon se pencha sur le feuillet.

Citation:
Apo,
Nous t'attendons au plus vite pour l'enterrement.
Je sais que tout cela est dure mais vu l'état du corps, on ne peut plus attendre.
Gypsie est auprès de son fils et le pleure toutes les larmes de son corps.
Si je pouvais me dédoubler, je serais aussi auprès de toi.
Sois forte !
Nous t'attendons.

Un ami qui partage ta douleur,
Jaz


Il se relut et se dit qu'il avait été surement trop sec. Mais il n'était pas doué pour ce genre de choses, ne savait pas quoi dire dans ces circonstances.
Et puis la situation d'urgence l'exigeait.
Il fallait qu'elle vienne au plus vite.
Il sabla le parchemin, le scella et le fit envoyer aussitôt à Moulin.

Il jeta un oeil par la fenêtre. La nuit était tombé et une longue veillée commençait. Il se devait d'être auprès de Gyspie.
La soubrette vint lui dire que son fils était changé et au lit.

Il prit une grande respiration et entra dans la pièce. Il allait devoir subir cette odeur qui lui donnait l'impression de ne plus le quitter depuis la macabre découverte à Clermont, il y avait deux jours.
Il s'approcha des brule-encens et remit en quantité de la poudre dégageant à nouveau une épaisse fumée.
Puis il s'assit au côté de Gypsie lui prenant sa main dans la sienne.
La nuit allait être longue.

_________________
Jazon Duchesne de Marigny, Vicomte de Ravel, Seigneur de Viverols.
Gypsie
Comme bien des années auparavant, une pièce lugubre, une atmosphère sinistre, en prime une odeur exécrable. L'encens associé au relent émanant du cercueil est comme une puanteur, d'autant plus insupportable qu'il s'agit de son fils rendu à l'état de putréfaction. En boucle, les interrogations, où, quand, qui, comment, pourquoi. D'autres se rajoutent, mais toutes resteront sans réponses.

Alors, c'était tout Montbrison qui veilla l'un des siens, Odin, et près de Gypsie, les amis. Ou quand on est soutenu par tout un village. Quand amitié rime avec solidarité.

Là, la main de Jazon, Ô combien précieuse. La mère pleure son fils, doucement, en silence, à côté d'un époux impuissant devant cette peine. Elle a mal, tellement mal, douleur incommensurable. Elle se lève, s'approche du sapin, en fait encore le tour au ralenti, sans quitter les yeux de son fils merveilleux. Elle implore Jazon du regard... Ouvre... Ouvre s'il te plait... Il ne dit rien, se lève et derrière elle l'enlace tendrement, murmure


Non Gypsie, souviens toi de lui comme le dernier jour où tu l'as vu.

Il l'invite à se rassoir ; les yeux toujours fixés sur le portrait, elle raconte à Jazon. Tout. Toute la vie d'Alayn. Sa naissance, sa jeunesse à Ravel, les jours heureux à deux, ses désirs et ses ambitions. Certaines se réaliseront, les autres, il n'aura pas eu le temps. Sur le trône du duché, mais pas aussi bon duc qu'espéré. Il le savait, avait continué sa vie ailleurs. Premier amour, retour à Ravel, et premier coup du destin, la perte de Lucyle, blessure profonde, vilaine cicatrice. Vivant en ermite durant des mois et des mois, sortant rarement. Puis avec les 45, allant de guerre en aventure, en passant toujours par Montbrison.

Bref passage au bord de la mer, à Mimizan, envie de voir autre chose, mais non, toujours attiré pas ce duché aimé. Nouveau retour, et puis, Apolonie. Comment ces deux là avaient pu tomber en amour.
Et comment Alayn avait pu mourir ainsi.

Longue nuit, le temps d'une vie narrée, jalonnée de silences, de présence, d'absence. Les sentiments alternent, colère, rage, amertume, regret, reproche, amour, tout. Les questions reviennent, l'esprit est torturé autant que le corps, le ventre saigne comme le coeur. Un morceau de soi s'est éteint à jamais. Quand la fatigue gagne quelques secondes, l'imagination revient à la charge. Alayn marche, on le bouscule, on veut le voler, il se défend, ils sont trop nombreux, il tombe. Alors, au clair de lune brille la lame d'une épée brandie qui s'abat tel un couperet sur la gorge chérie. Cauchemar éternel...

Aux premières lueurs du jour, un serviteur se glisse dans la pièce, ouvre porte et fenêtre car l'air est irrespirable sans l'encens fumant. L'homme les extrait de leur morbide somnolence. Gestes doux, Jazon tire son épouse de son engourdissement. Il faut prendre un peu de repos, dit-il délicatement.
La journée sera longue à Montbrison, où se dérouleront les funérailles d'Alayn de Viverols.

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