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[RP] Galère éphémère pour folie inassouvie

Mangarofw
Sur la Yemaya.




Manga s'était dévouée un soir où ils étaient presque au complet dans le mess du navire.

C'est donc parchemin sur le comptoir et plume en main que la rédaction du courrier à Toynette se fit. Après quelques gribouillages, un brouillon émerge... Le relecture se fait et enfin le courrier est prêt. Ni une ni deux... Un piaf et pafff... Le courrier part avec ce que sloan a donné à remettre aussi à Toynette...




Chères Toynou et Olympe,

Ici tout va bien on arrive demain.

Sowelo dit que Will est un con et Cerièra est d'accord...

Nous pensons fort à vous ! Nous te souhaitons plein de courage pour la fin de mandat !

La Yemaya te répond car on n’a pas réussi à couper en deux ton courrier pour qu'il arrive aussi sur l'autre navire !

Petit mot de sloan :

Tu me manques beaucoup, je suis désolée et j'ai plein de choses à te raconter et je t'aime fort. Je te ferais un courrier séparé pour tout te raconter. Bisous à Olympe.
De la part de sloan : http://i30.servimg.com/u/f30/15/40/16/95/bateau11.jpg


Petit mot de Cerièra :

Le trajet fut sans encombre mais j'ai hâte de poser le pied à terre. Nous ne nous sommes pas entretués, c'est une bonne chose. Merci pour tout, tu nous manques beaucoup. Embrasse Olympe de la part de Tata Cerièra.
J'espère que ton séminaire avance bien : tiens le coup car au final c'est ça qui te motive. Je t'embrasse, Cerièra. Merci pour les nouvelles de Doem.
Je te ferais un courrier pour tout te raconter.

Petit mot de sowelo :

Prends soin de toi et de ta fille, on pense à toi.

Nous remettons ton courrier à l'étoile ! En leur disant que nous avons déjà répondu de notre côté...

Je ne vois pas quoi ajouter, les autres ont déjà tout dit... On vous aime fort et on ne vous oublie pas... Sauf qu'en fait quand tu recevras ce message peut être qu'on sera en fait déjà arrivé hihi... bisous exceptionnels.

Sloan, Cerièra, sowelo et manga...

NB : j'ai pas pu voir le Bleu et Vera-Lucie désolée.


Un second courrier s'envole mais celui là vers l'étoile.



A vous amis de l'étoile,

Voici un courrier reçu de toynette, on vient d'y répondre, à votre tour de le faire ! A très vite. Manga.



Antoynette a écrit:


Mes chers amis,

Vos lettres individuelles m'ont réchauffé le cœur. Que de réponses pour un seul courrier que j'ai rédigé. Cela m'a beaucoup touché.
Tout comme le cadeau d'anniversaire que vous m'avez envoyé. J'ai aussi reçu ton bouquet de fleur, ma petite Sloan. Il est magnifique, j'en prends grand soin. Même de loin, vous me gâtez. J'en ai presque pleuré. De joie, bien sûr. Ça m'a donné l'impression que vous étiez si proches!

J'espère que le voyage se passe aussi bien que mon mandat. J'ai pris un bon rythme, même si j'ai encore tant de choses à apprendre. Olympe ne comprend pas ce changement. J'ai renoncé à lui expliquer. On est à la moitié. Et je trouve inutile de l'embrouiller.

Will est revenu. Mais il a bien mis les points sur les I: jusqu'à ce que la situation aille mieux... J'ai noté. Il a failli m'appeler "chérie". Il s'est repris, je n'ai pas relevé. J'étais trop lasse, et, je l'avoue, un peu déçue par sa dernière phrase.

Doemie s'en va vivre à Périgueux. Encore un espoir qui s'envole: Sleiii et moi avions espéré qu'elle reprenne la mairie. Il n'en sera rien. Mais nous trouverons une solution. Il y en a toujours.

Vous me manquez. Vous êtes toujours à mon écoute. Sachez que je serai toujours à la votre.
J'ai hâte de lire la suite de votre périple.

Je vous embrasse tous bien fort (oui oui, le bleu aussi).
A bientôt


_________________
MangaRofW, dicte Manga.
Nulle en orthographe, grammaire et histoire géo et.... Depuis toujours en plus, dsl.
Mais je fais des efforts.
Ceriera
Sur la Yemaya, le 18 juillet, soleil au zénith.


La petite île juste avant que le port soit en vue avait été aperçue la veille depuis le pont de la Yemaya. Cerièra avait sautillé partout, sentant que l'arrivée était proche. Bientôt ils accosteraient, bientôt elle pourrait faire autre chose de ses journées que scruter l'horizon et recalculer leur position et leur itinéraire.
Elle avait déjà une petite idée de ce qu'ils pourraient trouver là-bas : l'ex-montpelliéraine même si cette période était lointaine avait souvent jadis traîné dans le port languedocien pour rêvasser en regardant les bateaux, et avait pu voir arriver bon nombre de produits orientaux. C'est d'ailleurs là-bas qu'elle avait découvert l'Aker Fassi qui colorait ses lèvres de coquelicot et elle espérait bien «faire le plein», histoire de faire durer la rare touche de coquetterie qu'elle s'autorisait.
Que découvrirait-elle en plus de cela : fruits, épices, étoffes ?

C'était tout ceci qu'elle avait en tête, imaginant déjà un marché aux mille couleurs, alors que le port se présentait à elle et qu'elle s'apprêtait à faire accoster le bateau du mieux possible. Ici pas de chef de port, ce qui rends certes la chose plus simple mais aussi plus délicate : resterait-il de la place ? Seraient-ils seuls ? Et s'ils croisaient des navires hostiles… demi-tour, si près du but ? Pipo les avait doublés pendant la nuit, elle suivait et surveillait l'Étoile : en cas de souci il paierait les pots cassés et saurait les prévenir.
La brune espérait de toutes ses forces pouvoir amener tout son petit monde à bon port sur cette dernière étape : le contraire serait trop bête alors que tout le trajet s'était impeccablement passé !

Ils ne s'étaient pas entretués pendant ces trois petites semaines de huis-clos, pas de blessé, pas de malade, pas de noyé… seule une légère lassitude teintait leur journée, mais la perspective de mettre bientôt le pied à terre la dissipait. Quant à elle, elle trépignait d'impatience dans la cabine de pilotage qui était au fil des jours devenue «son antre». Bon, d'accord, elle le cédait parfois au Bleu, reconnaissante qu'il prenne son relais : certains jours de fatigue extrême c'était ça ou la voir craquer complètement. Elle n'avait d'ailleurs pas été exempte d'humeurs changeantes mais ses camarades de voyage ne lui en avaient pas tenu rigueur.



الإسكندرية /Alexandrie, au port.


Soudain l'étroite entrée du port… il ne fallait pas se rater et plissant légèrement le front, concentrée, elle engagea le navire. Une fois sa manœuvre réussie, il suffisait de laisser la Yemaya trouver sa place dans l'antique cité méditerranéenne.

Hihihiiiii ! poussa-t-elle enthousiaste avant de crier à qui voudrait l'entendre :
ON ARRIVE ! VOUS ENTENDEEEZ ? ON ARRIVE ! HIHIHIII !

Le soleil était haut mais la journée n'était pas si chaude qu'attendue, les trente degrés ne seraient pas atteints et il faisait parfois plus chaud à Foix au cœur de l'été. Cerièra en serait étonnée elle qui se serait attendue à ce qu'il y fasse beaucoup plus chaud, mais tant mieux : elle n'avait jamais bien supporté la chaleur, au moins ne serait-elle pas écrasée de fatigue pour préparer le débarquement.
Elle ignorait combien de temps ils resteraient dans la ville égyptienne, voilà qui devrait se discuter à tous lorsqu'ils se retrouveraient à terre. Ils n'avaient pas spécialement grand chose à prendre avec eux : de quoi dessiner pour les artistes ou naturalistes en herbe, quelques écus pour ceux qui voudraient s'offrir la panoplie orientale, du barracuda, des dattes ou quelques autres bricoles. Cerièra chercherait du khôl comme Asphodelle lui avait posé une fois, elle avait bien aimé comme il faisait le regard profond, et ramènerait certainement du henné à la Sainte-Rouquine. Elle espérait aussi trouver au marché de l'ail et de l'huile d'olive : l'aïoli avec les bulots c'est o-bli-ga-toire.
Quoi d'autre ? Pas grand chose ici. C'est à Séleucos qu'elle devrait ne rien oublier de son attirail de diaconesse : eau bénite, habit rituel blanc, cierge, médaille et tout le tralala… ici, à Alexandrie, elle parcourrait les rues en touriste et se contenterait de flâner le nez au vent, découvrant l'architecture de la ville, arpentant les pavés, les oreilles grandes ouvertes aux multiples langues qu'elle espérait entendre dans cette ville qu'elle attendait cosmopolite.

La perspective de tout ceci la mettait en joie. Et quand Cerièra est contente, elle en fait profiter tout le monde !
Un coup de corne de brume pour attirer l'attention de l'équipage, avant de s'égosiller :


ON ARRIIIIIVE ! TOUT LE MONDE SUR LE PONT ! OUVREZ VOS MIRETTES ! ON ARRIVE !

Que ça se sache, nom de nom…
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Πίστις, ἐλπίς, ἀγάπη Hey Jude, don't make it bad…
Manon
[Sur l’Etoile - 18 juillet]



La torpeur se ressent jusque dans le moindre organisme vivant qui semble suffoquer dans cet oxygène gorgé d'une excessive chaleur. Pourtant, sur cette terre si sèche, l'herbe pousse grassement, puisant ses besoins en eau dans la rivière qui coule en bordure du pré.
A l'ombre des arbres, de vastes nappes blanchissent ce sol de verdure et accueillent petits et grands autour de nombreux mets.

Elle ne remet pas le lieu et se sent étrangère sans vraiment l'être au milieu de ces visages inconnus qui pourtant lui sourit en la pressant de s'asseoir. Son oreille se berce du chant constant des cigales à peine troublé par cette femme qui hausse le ton pour rapatrier ses petits, ni même le cri qu'elle pousse en chassant l'araignée gentiment déposée sur son bras par les chérubins qui rient sans honte à présent tout en allant s'installer plus loin.

Le repas à peine terminé, les bras se croisent sous les têtes en vue d'une digestion par le sommeil pour les uns tandis que les enfants se hâtent de quitter leurs vêtements pour courir à la rivière suivi de près par la bienveillance maternelle. Un jeune homme s'approche d'elle et lui propose de remonter la source afin de trouver un endroit plus sablonneux et, sans même savoir pourquoi, elle accepte, bien vite rejoint par quelques pitchouns en mal d'aventures.

Malgré la chaleur accablante, les premiers pas dans le cours d'eau sont hasardeux tant l'eau est froide mais qu'importe, le petit cortège s'élance pied nu au milieu des rochers à la recherche d'une hypothétique plage de sable. Il faudra s'aider à traverser les profondeurs ou franchir les arbres tombés en travers, s'arrêter pour ramasser quelques cailloux aux formes originales, s'émerveiller des libellules qui se posent à même le bras tendu avant de stopper l'avancée pour laisser les gamins partir à la pêche aux innombrables vairons. Il ne faudra pas plus qu'un échec cuisant pour que les insouciants esprits décident de faire demi tour pour s'atteler à la construction d'un barrage dans l'espoir d'un meilleur résultat.

Dans sa vision, un pont de lourdes pierres sans âge se dresse à bonne hauteur envahi de lierres s'étirant jusqu'au ruisseau en contre bas qui serpente en nombreux filets formés par des formations rocheuses ici et là. Elle est assise sur l'une d'elles, vêtue d'une simple mais longue chemise lui semblant bien trop grande pour ce corps qui se tient entre ombre et soleil. Aucun son n'a encore franchi ses lèvres alors même qu'elle ne sait pas pourquoi elle est en ce lieu inconnu entourée de personnes tout aussi inconnues.


Mère, venez voir, venez voir! exulte un tout jeune garçonnet qui sautille tout en agitant les bras dans sa direction.

Sans réfléchir, elle se lève et marche prudemment sur la roche jusqu'à hauteur de l'enfant qui s'empresse de lui indiquer un point précis dans l'eau. Ses prunelles n'auront qu'une fraction de seconde pour apercevoir une écrevisse fuyant déjà loin des humains avant de sentir la minuscule main se glisser dans la sienne. Le regard se porte alors sur la petite tête blonde. Blonde? Aussi blonde qu'elle est brune. Seuls les azurs se reflètent à l'identique dans le miroir que sont les siens, bordés de long cils que souligne encore davantage ce regard. Elle lui sourit, comme jamais elle n'a souri auparavant.

Manon se réveille alors avec le même sourire sur les lèvres. Plus aucune douleurs ne l'étreint à présent grâce à la bénéfique médication. Seule la fatigue persiste encore mais il est grand temps de quitter cette cabine et ses rêves étranges qui peuplent son sommeil.

Une corne de brume au loin tout comme l'agitation qui semble régner sur le pont indique l'accostage imminent. Il est temps à présent de revêtir une apparence de circonstance avec un soupçon d'excitation à l'approche de cette terre étrangère.

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Lyviia
[ Le 18 Juillet en soirée à bord de l'Etoile de Mer]


Soirée arrosée pour fêter leur arrivée à Alexandrie ... un peu plus arrosée que les précédentes .. Lyviia ivre morte .. son compagnon, pouvant un peu souffler et lâcher la barre, dans un état comme elle ne l'avait vu depuis longtemps ce qui n'était pas pour lui déplaire .. Elle retrouvait enfin l'homme qu'elle aimait, celui qui la faisait sourire, qui s'amusait, partageait ses pêchés mignons .. Ils s'étaient rapprochés .. un peu plus encore .. se lâchant, allant même jusqu'à abandonner le vouvoiement pour le tutoiement .. signe d'un rapprochement bien plus important encore .. partageant leurs sentiments avec leurs compagnons, Pipo lui faisant même une très belle déclaration en public .. lui qui jusqu'à présent restait plutôt discret, ne lui faisant part de son amour que lorsqu'ils se retrouvaient seuls .. ce qui était plutôt rare .. voir même très rare depuis leur départ de Marseille .. Lyviia était heureuse, rassurée, sereine .. prête à aller de l'avant avec l'homme de sa vie ...

En fin de soirée, Pipo s'éclipsa pour aller vérifier que tout était en ordre pour le débarquement .. Lyviia le suivit de prêt et sans rien dire en profita pour aller le rejoindre ... déambulant comme elle pouvait, titubant à moitié ... Elle se faufila donc discrètement dans son bureau alors qu'il vaquait à ses occupations .. s'approcha et s'installa sur ses genoux .. passa les bras autour de son cou, se blottie contre lui et l'embrassa le plus tendrement possible .. profita encore de lui un moment avant de le prendre par la main .. prête à débarquer à son tour ..


En route Capitaine .. il est temps d'y aller !! Alexandrie nous attend !!

L'entrainant derrière elle, abandonnant enfin leur cabine, main dans la main, ils s'approchèrent de la passerelle, se regardant .. hésitant un instant à la franchir .. se demandant s'ils n'allaient pas tous deux finir à l'eau .. et être contraints d'appeler au secours pour se faire repêcher .. puis sourire aux lèvres, d'un pas vacillant, non rassurés .. traversèrent tant bien que mal ladite passerelle qui les séparaient encore de la belle ville d'Alexandrie ... ils allaient enfin retrouver les passagers de la Yémaya et avoir quelques jours rien que pour eux .. Pipo n'ayant temporairement plus en charge la sécurité des passagers .. Lyviia comptant savourer au mieux ses moments inoubliables à ses côtés ... espérant bien être sa priorité désormais.


[ Le 19 Juillet - Alexandrie]


Découverte de la ville .. Encore un peu guillerette mais suffisamment lucide, émerveillée par cette ville qu'elle découvrait enfin, après avoir pris le temps de faire un petit tour dans les ruelles, entrainant son compagnon dans le souk afin de faire leurs emplettes, ne résistant pas à l'envie d'acheter cette merveilleuse tenue orientale qui la faisait rêver depuis si longtemps, l'essayant, montrant comme par défit sa ligne parfaite à son homme ... improvisant une danse du ventre devant lui, s'amusant à le provoquer et le narguer .... elle se pencha vers lui et lui murmura à l'oreille ..

Alors .. tu me trouves toujours "lourde" ?

riant aux éclats de le voir grogner de contentement, son regard malicieux se perdant dans le sien ...

Emplettes effectuées, non sans l'avoir embrasser, le laissant poursuivre seul son petit tour, Lyviia abandonna son compagnon un moment et profita du calme pour rejoindre le port, se cala contre un muret, sortit son nécessaire d'écriture .. et s'apprêta à répondre à la lettre d'Antoynette .. tentant de se remémorer tout ce que ses compagnons lui avaient demandé de retranscrire ..

Citation:
ma Chère Antoynette et petite Olympe,

Tout se passe très bien pour nous. Tu peux être rassurée, nous venons enfin de poser pieds à terre et c'est un pur bonheur de découvrir enfin cette si merveilleuse ville d'Alexandrie .. Nous pensons rester ici quelques jours avant de rejoindre de nouveau le bateau et poursuivre notre découverte de la région, aller faire le grand plongeon .. le plongeon mortel pour voir si le Très Haut nous aime comme le dit si bien Aryanna .. et nous écraser comme des crêpes en bas de la falaise ..

En attendant, nous sommes impatients d'aller nous tremper enfin dans l'eau, la chaleur ici étant épuisante .. les tavernes vides de boissons !!!

Tu nous manques beaucoup et nous pensons souvent à toi qui t'es dévouée pour le Comté .. nous sommes contents de voir que tu t'en sors bien même si tu ne dois pas avoir beaucoup de temps pour toi du coup .. la pauvre petite Olympe doit être bien chamboulée de voir sa maman courir dans tous les sens mais .. ça n'est que temporaire .. bientôt sa maman sera de nouveau pleinement disponible et toute à elle .. Penses quand même à prendre soin de toi et te reposer un peu !!

Ah oui j'allais oublié .. souhaites tu que l'on te ramène quelque chose ? quelquechose dont tu aurais besoin ou envie ??? n'hésites surtout pas à nous le faire savoir !!

Voilà .. sur ce .. nous, les filles, t'embrassons toutes très fort ainsi qu'Olympe !!
Pipo et Ayo quant à eux te passent le bonjour !

A très bientôt !
Prends bien soin de toi et d'Olympe !

Lyviia, Manon, Aryanna, Pipo et Ayo ..


Lettre terminée, Lyviia rangea ses affaires dans sa besace, envoya son pigeon en lui recommandant bien de ne pas trainer en chemin, se leva et se dirigea .. presque en courant cette fois .. en direction des tavernes .. espérant vite retrouver ses compères de la Yémaya ...
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Ceriera
الإسكندرية / Alexandrie, 19 juillet soit “D-Day” au petit matin.


Au petit matin la plupart étaient sur le pont, leurs affaires prêtes pour débarquer faire un tour dans la Cité du Désert. Ne manquait que Véra qui n'avait pas dû sortir la veille et voir sur le panneau du mess l'avertissement de Cerièra «la passerelle est posée, préparez-vous à descendre». Qu'à cela ne tienne, elle prendrait tout le bric-à-brac du «camp» improvisé pour les nuits que Sowelo et elle passaient à la belle étoile et irait le déposer dans sa cabine, elle préviendrait Véra au passage.

Véra ? *ton toc toc* Véra c'est Cerièra, nous vous attendons tous sur le pont pour débarquer !

Elle la laisserait se préparer tranquillement et ils seraient rapidement tous prêts à débarquer. La ville les attendait.









Souk d'Alexandrie, dans la journée


Après s'être rafraîchie du voyage, surtout pour enlever le sel et démêler da crinière, Cerièra avait fait un premier tour au souk, pour repérer. C'est plein d'achats en tête qu'elle avait rejoint son vairon en faisant «gling-gling» des multiples petites perles accrochées à sa panoplie : elle avait craqué, pour l'instant, uniquement sur cette fameuse tenue de danse orientale si finement exécutée pat les artisans locaux.
Un bien bel ouvrage : l'ancienne tisserande l'avait examinée sous toutes les coutures, avait admiré le travail et s'était isolée pour la passer et lui faire la surprise. Gentleman, Sowelo l'avait complimentée et certes posé ses mains sur ses hanches mais était resté tout à fait correct. Peut-être à peine un peu trop au goût de la brune qui se disait toutefois que mieux vaut un homme trop respectueux que pas assez.

Mais le soleil grimpa dans le ciel et l'heure de songer à manger arriva vite : les deux prirent, cette fois ensemble, la direction du souk. Chaque étal criait à Cerièra «arrête-toi, regarde-moi !» mais elle ne se rendrait pas déjà insupportable à son brun et donna la priorité au marché alimentaire.






Au milieu des épices et fruits divers qu'ils auraient bien le temps de découvrir, les mets attendus dont Antoynette comme divers voyageurs leur avaient déjà parlé : dattes et barracudas. Cerièra connaissait déjà les dattes, bien qu'il soit très difficile de s'en procurer chez eux, elle avait déjà vu dans son enfance certains mettre de la pâte d'amande dans les dattes séchées pour confectionner des confiseries très appréciées dans la période des fêtes de la Saint-Noël. Ils firent leur repas d'un barracuda, la brune était ravie de changer du pain et du maïs… être capitaine, c'est la déprime gastronomique assurée. Et bien vous savez quoi ? C'est pas mauvais du tout le barracuda.





Un peu plus loin, l'échoppe du souffleur de verre. Ne vous fiez pas à son allure délabrée, l'échoppe est ouverte. Une pellicule de poussière ramenée par les vents du désert recouvre simplement la marchandise, que l'artisan fabrique et vend au compte-goutte. Cerièra mis a profit ses quelques bases d'arabe apprises à l'Université pour deviser un petit instant avec lui. En gros «j'ai un hôtel particulier à meubler un jour – et elle comptait bien profiter de l'escale pour ça – pourriez-vous me mettre ceci, et ceci… et encore ceci de côté, je repasse demain ?» suivi d'un chou-crâne de rigueur évidemment. Ne riez pas, c'est mnémotechnique.

Un œil sur les babouches, tout sauf rares sur les étals. Là, le vendeur lui expliqua que celles plus à l'ouest ont un bout pointu parfois, alors que celles d'ici ont un bout rond. Au fond Cerièra s'en fichait un peu, mais elle les essaya sous la pression du commerçant et trouva ces étranges chaussons de cuir fort agréables. Elle décida de revenir en acheter un bon nombre, elle les rendrait obligatoires à Tounis, à l'intérieur… le jour où il y en aurait un. Allez pas salir les tapis. Parce qu'elle espérait bien ramener des tapis.

Un étal de lampes ou photophores en métal travaillé. La brune resta un moment à admirer encore le travail des artisans, fascinée par la finesse des détails. Elle guettait la réaction de celui qui la suivait dans cette flânerie… comment trouvait-il tout cela lui ? Elle en aperçut une pendre à un mur et contrairement aux babouches qui se ressemblent toutes, celle-ci était assez unique pour qu'elle n'attende pas pour l'acheter. Certes elle pouvait accueillir une bougie, expliqua-t-elle à son homme, mais avec de l'encens dedans cela fera un merveilleux ostensoir pour consacrer la plage où elle baptiserait Pipo. Là-dessus elle se dit que ce baptême serait sans doute l'un des plus fous de l'histoire de l'aristotélisme et afficha un sourire amusé.






Rayon textile : enfin ! La brune savait ce qu'elle voulait, elle avait déjà fait son repérage au petit matin. Un bon nombre de ces coussins en patchwork et de tapis divers pour meubler les roulottes, si le tout était disparate c'était encore mieux !
Là aussi elle se contenta de passer commande, ne voulant pas s'encombrer. Elle régla le tout à l'avance, le commerçant y tenait pour les lui réserver. Une petite moue de sa part lui valut une ristourne, affaire conclue, chou-crâne.






Son périple de… d'acheteuse folle ? De rude négociatrice ? Un peu les deux ? En tout cas ce périple continua par des vases d'albâtre. Elle apprit à cette occasion que l'albâtre sculpté était typique d'ici. Elle traduisait au fur et à mesure à Sowelo les informations curieuses qu'on lui donnait, ou au moins ce qu'elle en comprenait, lorsque le commerçant ne parlait pas quelques langues des voyageurs ce qui était le cas ici.
Plus loin, un fabriquant de carreaux de céramique peints. Elle se laissa le temps de réfléchir, comme chez ce vendeur de lampes qui lui expliquait que certaines étaient spécifiques à la fête de leur période de jeûne. Soit.






Enfin le rayon indispensable : celui où elle ferait tout de suite ses réserves. L'Aker Fassi d'abord, et si elle en avait trouvé à Montpellier elle s'attendait à en trouver ici. En effet, les petites poteries recouvertes d'une couche de poudre de coquelicot et de grenade grâce à laquelle elle avait coutume de teinter ses lèvres l'attendaient en nombre conséquent sur l'étal. Ça ne s'use pas très vite mais la griotte en porte la plupart du temps, sauf pour les contextes très décontractés. Elle en prit donc suffisamment.

Elle admira les flacons de khôl tous plus beaux les uns que les autres : certains en métal ouvragé, d'autres en bois ou encore en albâtre, encore. «L'orange, il est teint au henné» lui dit-on. Elle remercia d'un signe de tête pour l'information et en prit plusieurs de différents styles : non seulement elle ne savait pas se décider tant chacun avait son charme, mais en plus cela ferait des cadeaux appréciés, sans doute. Mettez-moi de la poudre avec, un peu plus… voilà ! Chou-crâne encore.

C'est dans ce coin-là qu'elle recroisa la vendeuse de la tenue de danse orientale qu'elle portait. Elle lui fit un petit clin d’œil, celle-ci lui ayant promis de lui apprendre quelques rudiments de chorégraphie, mais ayant un homme à la main elle repasserait la voir plus tard.

Dernier achat de la journée : un narguilé qu'elle trouva très joli et qu'elle ramènerait pour le Central. Elle ne le sortirait peut-être pas tout le temps, l'endroit devant rester assez sérieux et ne pas perdre son esprit familial, mais en fin de soirée il saurait ravir les amateurs. Elle le confia aux bons soins de Sowelo avec un sourire, elle-même commençait déjà à avoir des affaires plein les mains. Et puis après tout il l'avait choisie, sa junkie…




Je me suis basée… sur ce que j'ai trouvé d'artisanat soit typiquement égyptien, soit du monde arabe mais pas typiquement marocain bien qu'on en regorge niveau iconographie. Pour l'époque par contre… j'en sais rien, mais c'est au moins techniquement probable.

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Manon
[En terre inconnue - Alexandria]


A l'humide chaleur se mêle la poussière de sable soulevée à chaque foulée de ce sol étranger. L'air marin chatouille encore les narines au milieu d'autres odeurs inconnues dont le regard cherche la provenance parmi une myriade de couleurs.

Les azurs scintillent devant la découverte des lieux tout en analysant chaque nouveauté afin de mémoriser le moindre détail pour en garder un souvenir à jamais gravé. Discrétion et humilité sonnent comme un évidence dans l'observation de l'autochtone envers qui elle se sent soudain aussi honteuse que décalée face aux longs drapés qu'ils arborent car les femmes icelieu ne se promènent pas le nombril à l'air, du moins pas en public.

Etrangement, ses pas la guident à la bibliothèque en premier lieu, avide d'en apprendre un peu plus sur cette partie du monde, sans compter sur le garde en faction qui interdit l'entrée de manière dissuasive.
Qu'importe. Le souk regorgeant de vie attise la curiosité de toutes personnes en quête de nouveautés.

A dépenser comme elle le fait, elle se doute bien que quelque part, elle doit payer le prix fort. Mais tel est justement le prix à payer lorsqu'on est seule face à un dialecte étranger où la barrière de la langue ne semble en rien gêner les marchands qui l'interpelle à qui mieux mieux.

A l'odeur, elle reconnaît quelques épices qu'elle achète par petit paquet à l'attention de Margot avant de se voir permettre de goûter quelques fruits orientaux dont elle fera provision pour son fervent consommateur de mari.
Des tapis bien sûr qui s'accompagneront de lourdes tentures de couleurs sombres pour éviter au soleil de troubler le sommeil de sa clarté.
A défaut de tenue qu'elle ne portera jamais - sauf celle que tout le monde s'arrache histoire d'être un peu à la mode le temps du voyage - la Lescurienne dépense largement en étoffes destinées à la couture. Le lin côtoie le coton pour un usage domestique tandis que les tissus de soies s'empilent au gré des différentes couleurs qu'elle ne portera probablement jamais mais qui fera sans le moindre doute le bonheur de Camille pour qui elle rajoute cette laine dont elle ne sait de quel animal elle provient.
Le dernier achat vestimentaire se fera auprès d'une marchande pour un large foulard blanc brodé or qui lui montrera comment le poser à l'orientale afin de se protéger d'une nouvelle prétendue insolation.

Si une multitude de choses plus ou moins utiles s'étalent devant elle, la brune s'arrête un long moment devant un étal de figurines en bois. Sous le regard curieux du marchand, elle ne peut s'empêcher de toucher le grain en imaginant déjà tout ce qu'elle pourrait sculpter à temps perdu. Non, elle ne veut pas les figurines mais le bois qui les compose. Du bois d'ébène. Il lui faudra force gesticulation pour se faire comprendre avant de faire porter au bateau plusieurs caisses débordantes avec la même excitation qu'un enfant devant un nouveau jouet.

Elle achète également un pot de taille moyenne de cet arbre si étrange qui semble pousser facilement ici sans même savoir ce qu'est un palmier, ni même s'il survivra en terres occitane.

Elle effectuera un tout dernier achat totalement futile dans quelques plumes d'autruches pour ensuite trouver un porteur qu'elle payera de ses derniers écus restants.

Retrouver ses compagnons de route en priant que Pipo ne rouspète pas trop du volume de ses achats clôturera sa journée nonobstant une fatigue réelle mais bienfaitrice de poser les pieds enfin sur la terre ferme.

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Sloan
DE LA YEMAYA A ALEXANDRIA




Sur la Yemaya, voyage, doutes et aléas !


La vénitienne passait le plus souvent son temps seule loin des autres à dessiner ou à écrire, si bien qu’elle avait retrouvé des petits mots de son frère et sa douce sous sa porte, elle avait douté en les voyants se disputer, elle avait faillit rompre une nouvelle fois avec Olivier et le fuir pensant ne pas avoir le droit au bonheur, puis au final elle n’en avait rien fait et les choses avaient repris leur place.

Pour la première fois depuis le début de son histoire de cœur elle n’avait pas voulu faire comme d’habitude, elle n’avait pas réussit à le quitter, elle avait essayé, mais elle avait écrit tout autre chose sur son Vélin et puis elle avait pensé à Dieu lui parlant seule dans sa cabine et elle s’était rappelé les paroles de Cerièra lors de la pastorale, qu’il fallait qu’elle cesse de trop penser aux autres et qu’elle pense surtout à elle parce que plus elle serait heureuse, plus ils le seraient tous pour elle. Puis manga lui avait aussi laissé matière à réfléchir lors d’un échange sur le tout. Du coup Sloan avait finit par accepter l’idée d’être amoureuse de son brun et d’oublier le reste autour.

Le voyage semblait long par moment, mais il faisait du bien à la demie blonde qui commençait à trouver sa place dans le monde et à savoir ce qu’elle voulait faire de sa vie, ça lui permettait une introspection d’elle-même et elle passait son temps à écrire à Olivier, et si elle s’écoutait le pauvre recevrait surement plusieurs lettre par jour tellement elle avait de chose à lui dire , ce qui était bizarre d’ailleurs car la blonde ne se confiait presque jamais à personne gardant souvent tout pour elle, mais depuis qu’il se connaissait avec lui c’était facile, elle avait une totale confiance en lui, elle lui avait fait confiance rapidement et il lui avait prouvé bien souvent qu’elle pouvait. Sloan avait surement plus confiance en lui qu’en elle, elle en avait même conclus que c’est pour ça qu’elle avait peur, et qu’elle se mentait depuis longtemps pour fuir ses sentiments pour lui.


Alexandrie, terre mystère franchie !

Sa réflexion prenait fin tout comme le voyage, les voilà qui foulait enfin la terre d’Alexandrie. Des étales de partout, pleines de couleurs, de bonnes odeurs, la jeune femme fit un premier tour pour tout découvrir, elle avait les yeux qui brillaient devant toutes les belles choses qu’elle pouvait voir, son seul regret ne pas vivre ça avec l’homme de son cœur. Mais ça ne serait que parti remise un jour surement et puis elle lui rapporterait des souvenirs de là bas pour lui faire découvrir par les saveurs et autres souvenirs. Dans l’après midi Sloan s’octroya une petite promenade à dos de dromadaire, puis elle retourna faire ses achats des tissus pour Toynou, pour Olympe elle lui faisait un joli carnet de dessin du voyage. Lui restait son amoureux à qui elle rapporterait une dague gravé de symbole égyptien et entre autre pour elle et eux des épices, des fruits, de l’alcool, du thé et de quoi peindre avec Olympe à son retour.

Une fois cela fait la petite aile s’en alla tout déposer dans sa cabine, puis elle avait décider de passer faire un bisou à ses amis avant de prendre la route pour le Nil à la sortie de la ville afin d’y faire une baignade nocturne avec Manga ayant prit soin de trouver un coin sans trop de risque pour elles.

Laissant sa folie, son amie rejoindre les autres, quand Sloan elle aura finit sa nuit dans la mer à se baigner et sur le bateau en solitaire afin d’écrire une nouvelle lettre à Olivier
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Aryanna





[19 de Julh – A l’abordage !]


Place à la découverte !
La descente de l’Etoile avait été un peu mouvementée. Dans la lune, la noire avait accroché très tôt – ou très tard, selon - son filin de pêche, espérant attraper un poisson, sans même réfléchir au fait qu’ils devaient descendre. Toutefois, Pipo lui avait bien fait remarquer. Quand bien même elle serait descendue avec Ayorjo, avait commencé une petite course poursuite avec le Capitaine Etoilé… Il voulait lui donner un coup de pied dans le derrière ! Elle, elle craignait que la cuite de la veille lui fasse mal doser sa force et donc que son séant se retrouve à souffrir légèrement.
A l’heure de poser le pied sur terre, l’oiselle s’était planquée devant Ayorjo, contre lui, comme s’il pouvait la cacher de tout son corps. Mais marcher n’était pas chose aisée, la coordination gestuelle n’étant pas son fort. Reculer, en même temps que le brun avançait, s’était révélé plus ardue qu’elle ne l’avait pensé. Aussi avait-elle fini par se détacher, à regret, du barbu. D’une part pour le laisser respirer et libre de ses mouvements, d’autre part parce qu’elle pensait que Pipo n’était pas dans les parages. Erreur d’observation. C’est le pied posé sur la passerelle qui menait à cette terre ensablée que le Capitaine Pipo refit son apparition. Ayorjo avait descendu quelques pas, alors qu’Aryanna regardait, songeuse, les habitations, les toits plats et ouverts, les enfants courant çà et là, les individus qui s’étaient arrêtés pour les regarder avec un peu de curiosité. Ho, ils en avaient déjà vu des gens comme eux, mais regarder les étrangers avait sans doute toujours un semblant d’intérêt inconnu. C’est donc songeuse, alors qu’Ayorjo l’attendait, qu’elle reçue un coup de pied aux fesses. Léger, pour la pure forme sans doute. Mais le fait est qu’elle gênait le passage à rester planter là. Aussi la fuxéenne rejoignit-elle le chaurien en quatrième vitesse, pour fouler avec lui ce lieu qui lui était inconnu.




[A terre - Alexandria]

La chaleur.
Cela faisait plusieurs jours que le soleil brillait déjà, sans discontinuité. Mais à la différence de la vie sur un bateau, la vie sur terre était tout de même plus étouffante. Impossible de profiter du vent, tout en haut du mât près des voiles, ou même de la fraicheur du mess et des cabines où flotte l’air iodé du sol marin. Dans la chaleur on étouffe un peu. Mais, malgré tout, l’excitation et l’impatience de découvrir cette terre inconnue, cette ville si différente, prenait le pas sur tout autre sentiment.
Accompagnée de son charmant guide privilégié, la donzelle ouvrait grand les yeux. Se repaitre d’une culture inconnue, découvrir les mystères de cette vie « exotique », s’intéresser à toutes les petites choses alentours, les hommes, les femmes, les enfants, les senteurs, les objets.

La première activité du jour avait été consacrée au souk. Comme à peu près tous les toulousains descendus à quai. Rien d’exceptionnel en soi.
Tout près d’Ayorjo, elle écoutait les voix qui s’élevaient dans les airs, les intonations, les inflexions vocales de cette langue qu’elle ne connaissait ni ne comprenait ; elle observait les alexandrins progresser dans les dédales du lieu, tout en regardant les divers objets et tissus posés sur les étals ou à même le sol. Elle se laissait transporter par les effluves des mets orientaux et les senteurs d’épices qui flottaient dans l’air. Parfois, elle relevait le nez vers le barbu et lui adressait un sourire. Parfois, elle serrait doucement son bras pour ne pas tomber, ses yeux ayant été retenus par la vesture d’une femme, par les gestes abracadabrants d’un marchand, par le pelage d’un animal qui semblait tout doux. Parfois elle se rapprochait aussi de lui, lorsqu’arrêtés par le trafic, par tous ceux qui déambulaient dans ce petit espace, elle essayait de les laisser passer ; protégée dans ses bras, la noire regardait le monde.
Elle s’émerveillait sur absolument tout, alors qu’elle réfléchissait à ce qu’elle pourrait acquérir, à ce dont elle pourrait se servir ou ce qu’elle pourrait ramener pour Amandine ou pour Montfa. Absorbée par une visualisation mentale de ce qui pourrait servir à qui et pourquoi, elle avait décidé d’attendre un peu avant de réellement plonger tête baissée dans des achats faramineux. La logique et la raison reprenaient toujours le dessus après tout. Excepté pour une chose, celui qui se tenait près d’elle. Ce brun barbu aux yeux clairs, Son héros-poneyer qui ne craignait rien ni personne. Depuis le départ de Foix ils ne s’étaient presque pas quittés une seconde, presque inséparables, même lorsqu’elle avait été malade, touchée deux fois par la fièvre.




[Thé à la menthe et petits coussins – le soir]

La journée avait continué comme ça jusqu’au soleil couchant*, chaude et entourée par les locaux. Après le souk, ils avaient parcouru la ville avec lenteur, mais toujours tous les deux. Jusqu’à ce qu’elle le laisse un instant à ses réflexions chamelo-dromadiques, pour rejoindre les Etoilés et les Yémayens de sortie, dans un débit de boisson local. Thé à la menthe, coussins et banquettes.
Le début de soirée avait commencé sereinement, Ayorjo était réapparu rapidement. Tous échangeaient sur quelques aventures de leurs bateaux respectifs. Ils étaient heureux d’être sur la terre ferme, de se retrouver après ces dix-sept jours marins. L’endroit était calme et confortable. Le thé à la menthe – faute de boissons plus fortes – coulaient « à flot », quand bien même Lyviia et ses bouteilles volées au Capitaine Pipo, partageait l’apéritif. Mais une fois qu’elle fut partie au bras du Villaréal, admirer le coucher du soleil, il n’y avait eu d’autres solutions.
Bientôt il ne resta plus que la Griotte, le Soleil, la Lune et elle, la Vilaine qui ne donne pas de nouvelles. Ils avaient parlé jardinage et décoration d’extérieur. Se demandant si Tounis accepterait la cohabitation d’un If et d’un palmier dans la seconde cour extérieure du futur hôtel particulier de Cerièra. Dessin sur calepin, échange d'impressions. La question était importante pour la suite. Le Sélène avait aussi ré-évoqué la possibilité de devenir chamelier, en remplacement de son statut de preux poneyer, mais emmener un grand dromadaire, ou un grand chameau était compliqué. A moins qu’un petit face l’affaire pour le moment ? La question était réelle et détenait son importance également.

Et tout se déroulait dans les rires, les brèves chutes de banquettes, les taquineries et la bonne humeur. Jusqu’à ce que ce soit Aryanna qui glisse et se vautre. Et qu’elle ne disparaisse, ni plus ni moins. Le passage éclair à l’air alexandrin s’était avéré plus long que prévu. La petite bande restée à l’étage après cette glissade avait fini par ne s’inquiéter en ne la voyant pas revenir.
Mais ce qu’ils ne pouvaient pas savoir c’est que l’oiselle avait glissé sur une marche et s’était cognée la tête contre le chambranle de la porte. Elle s’était redressée, mettant cela sur le compte de sa maladresse, avant de tomber un peu plus loin. C’est une femme qui l’avait trouvé la première, devant sa porte. Elle l’avait fait rentrer alors qu’elle était toujours inconsciente. Et quelques minutes plus tard ce fut un Ayorjo inquiet, qui sorti du bâtiment, pour retrouver la noire volatilisée.

Alors qu’Ayorjo continuait sa recherche, parmi les bosquets de plantes exotiques, sur les toits des maisons, ou encore au milieu des dromadaires, Aryanna n’était pas si loin. Et elle avait ouvert les yeux, avec un mal de tête incroyable. Sursautant devant les yeux noirs d’un enfant, penché sur elle, qui la fixait avec perplexité. Mais où donc pouvait-elle bien être ?
Essayant de se relever, une douleur fulgurante lui vrilla le crâne, suivie bien vite d’un vertige, aussi évita-t-elle de bouger. Elle n’osa pas non plus appeler, ne sachant ni ce qu’il s’était passé, ni où elle se trouvait, ni sur qui elle pourrait tomber. Un regard circulaire à la pièce lui fit constater qu’il était bien tard, aucune lumière naturelle ne filtrait par la petite fenêtre. La pierre ocre gardait la pièce fraîche, à moins que ce ne soit l’effet de la nuit alexandrine ? Les murs étaient recouverts de tissus colorés et sur le sol reposaient tapis et coussins. Coussins sur lesquelles elle était également assise. La porte, à quelques mètres, étaient voilée par un grand tissu presque transparent. L’oiselle pouvait distinguer quelques mouvements, sans savoir ce qu’il pouvait se cacher derrière. Un homme ? Une femme ? L’enfant à côté d’elle, lui, ne bougeait pas. Il continuait de la fixer avec intérêt et curiosité. Aussi finit-elle par murmurer un mot : «
Bonjorn », mot qui le fit détaler dans la pièce à côté, sans explications. Portant la main à sa tête, quelque peu perplexe, celle-ci n’entra pas en contact avec ses cheveux, mais avec un morceau de tissu qui semblait enroulé autour de son crâne. Mais qu’est-ce qui avait bien pu se passer ? On l’aurait assommé ? Elle aurait eu un problème ? Où étaient Ayorjo ? Où était Cerièra ? Alors qu’elle sentait la panique la gagner et les larmes lui monter doucement aux yeux. C’est à ce moment-là qu’une femme entra dans la pièce et vint vers elle. L’habit coloré, le regard sombre comme l’enfant, la peau mate et les cheveux noirs et longs. Un sosie sauce orientale.

"مساء الخير." **
[Masa’ Alkhir]


«
Bonjorn »

La barrière de la langue, quelle chose horrible ! Elle ne sait quoi ajouter, elle suppose. Aussi elle désigne sa tête en haussant les épaules et le sourcil haussé. La suite du dialogue se déroulera dans une langue des signes improvisée, car les deux femmes n’ont bien aucune idée de ce que l’autre raconte. L’alexandrine lui propose un miroir, celui-ci est pris avec un remerciement hésitant «
choukraan », alors que la femme lui sourit. Et là ! L’horreur ! Sur le foulard blanc enroulant sa tête on distingue clairement quelques tâches de sangs, petites mais présentes. Toutefois, alors que l’oiselle porte sa main à sa tête, la jeune femme vient retenir sa main. Elle la retient aussi lorsqu’elle cherche, à nouveau, à se relever. Il lui faudrait retrouver Ayorjo, elle ne sait pas où il est, il ne le sait pas non plus, mais elle est persuadée qu’il s’inquiète. Depuis combien de temps est-elle ici ? Alors Aryanna essaie de lui faire comprendre, par des gestes désordonnés, elle mime de gros bras et une démarche masculine, montre l’extérieur, lève la main haut, montre ses cheveux en remuant la main pour signifier l’a peu près, avant de faire de grands yeux et de remuer sa tête un peu dans tous les sens en soulevant les coussins et regardant dessous. Soit, pour traduction, que quelqu’un, un homme, dehors, grand, aux cheveux sombres, doit être inquiet et doit la chercher. L’alexandrine a l’air de comprendre parce qu’elle appelle l’enfant :
" نعيم " **
[Naeim]

Et elle lui parle, il hoche doucement la tête, mais ne parle pas, puis part en courant. Et Aryanna regarde la scène, se demandant bien si cette bien trop brève description sera suffisante. Parce qu'Ayorjo n'est pas le seul toulousain brun qui est descendu du navire. Dire qu’elle n’a même pas évoqué sa barbe, ses yeux, rien… Alors elle se maudit intérieurement.

L’attente débute, alors que la femme apporte du thé à la menthe. Et elles engagent tout de même une conversation. En langage des signes étrange. Ponctué parfois de mots arabes ou occitans. Elles se présentent même. Et Aryanna comprend qu’Ismat l’a trouvé par terre, à sa porte avec une blessure légère à la tête. Soignée, recousue, grâce à un médecin alexandrin, elle aurait attendu qu’elle se réveille pour être sûre que tout va bien. Ce qu’elle apprend aussi c’est que la femme vit seule, avec son fils, muet. Le mari ayant disparu quelque part, mort ? Elle ne sait pas, elle ne comprend pas tout. La vie semble dure, surtout pour une femme, ici. Et l’oiselle ne sait pas quoi dire, sa main vient se glisser sur celle de sa nouvelle comparse alexandrine, mais elle ne sait pas rassurer, ni s’exprimer autrement. Au nord la vie semble parfois bien plus simple. Et pas seulement parce qu’il fait plus frais ! La fuxéenne lui raconte aussi sa vie, en retour à la question muette que l’alexandrine lui pose. Le récit est court, concis, Entre son enfance, Cerièra, Ayorjo et tous leurs compagnons de voyage, il n’y a rien d’autre à dire, peu de choses à raconter.

Cette échange improbable s’arrête toutefois là, alors que la noire termine une phrase, la main en suspension dans l’air, Naeem est revenu et derrière lui se tient… Non pas Sowelo, Damsy voir même Julian ou Pipo, mais bien Ayorjo. En chair et en os. Allez savoir pourquoi il a suivit l’enfant et comment celui-ci a fait pour lui faire comprendre. Mais le fait est qu’il est là.

«
Aryanna !
- Ayorjo ! » - en choeur, youpla

Premiers mots. Soulagement. Oui, elle est soulagée - sans doute moins qu’il ne doit l’être lui-même, évidemment -, parce qu’il est là. Elle ne sait depuis combien de temps elle se trouve ici, ni depuis combien de temps il la cherche sans doute. Mais elle n’a pas le temps de se poser davantage de questions, déjà le brun s’approche. Les onyx viennent chercher leurs homologues alexandrins, alors que le chaurien soulève l’étoffe pour laisser découvrir des petits points de sutures près de la tempe fuxéenne gauche, réalisés avec... des petites bêtes qui s'accrochent à la peau. Ismat laisse faire, alors qu’elle sert à nouveau du thé, ainsi qu’une troisième coupe. Elles attendent toutes les deux un verdict, qui ne s’annonce pas si négatif, car, déjà, le barbu remercie la jeune femme et son fils.

A l’issue de cette « inspection » partielle mais néanmoins minutieuse, les deux toulousains n’ennuieront pas excessivement davantage l’alexandrine. Le dernier thé sera consommé, alors qu’Ayorjo demandera à rencontrer le médicastre local, puis «
laylatan saeida » ** sera prononcé, avant que le barbu n’embarque la tressée dans ses bras, au dehors.
D’un commun accord ils reviendront le lendemain, avant d’aller voir la mer...




*Oui c’est n’importe quoi, je sais.
** Bonsoir
** Naeem
** Bonne nuit

RP écrit avec l’aimable accord du JD Ayo’, ainsi que grâce à ses idées de conclusions.

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Devise - en sanskrit : Véda prasthâna dijvassia.
Le savoir est source de la vie. Ou la source de la vie est celle qui sait, soit : la femme sait
Ceriera
Alexandrie, l'après-midi du 20 juillet, chez Jalila.


Jalila était une femme surprenante : un sourire ensoleillait toujours son visage et elle était capable de parler de choses sérieuses de façon tout à fait décontractée. Cerièra l'avait trouvée avenante et avait sympathisé avec elle au fur et à mesure de leur conversation lorsqu'elle lui avait acheté la tenue de danse orientale. Elles avaient examiné ensemble la finesse du tissu, la qualité des finitions, le soin des détails. Pour le travail, c'était loin d'être hors de prix : certaines houppelandes grossièrement exécutées se trouvent plus chères sur les marchés du Royaume.
C'est que Jalila ne vendait pas de bêtes babioles aux voyageurs… danseuse elle-même, elle avait à cœur de proposer de bons accessoires, espérant créer des vocations, avait-elle dit à la griotte en commençant à lui expliquer dans un tutoiement naturel aux locuteurs d'arabe :


– Tu vois les perles là, c'est fait pour faire du bruit quand tu…

… et l'égyptienne s'était mise à enchaîner quelques pas en ondulant des hanches devant sa cliente, un foulard léger brodé de sequins noué autour de sa taille assurant le «gling gling» nécessaire à la démonstration. Cerièra l'avait observée un moment, fronçant un peu son pâle front… elle a beau ne pas être une mauvaise danseuse, voilà bien des mouvements qui ne lui sont pas naturels.

– Comment tu… fais ça ? lui avait-elle demandé prudemment, adoptant le tutoiement. D'habitude elle s'en tient à un vouvoiement d'usage mais dans le cas présent elle avait senti qu'elle vexerait davantage l'Alexandrine qu'autre chose.
– Viens chez moi demain Lamia, juste la maison là – dans un mouvement de bras vers une petite porte derrière le bras gauche de Jalila – je te montrerai. Sans homme, ça ne les regarde pas ! Eux ils en profitent après… si ils sont sages ! une invitation pour réponse donc, toujours dans un sourire radieux.
– Lamia ? Mais… je m'appelle Cerièra ! s'était étonné la brune avant de voir la danseuse partir d'un franc rire en bougeant les épaules sur un rythme imaginaire.
– Moi c'est Jalila, «la majestueuse», rien que ça ! avait-elle plaisanté avant de lui expliquer : Lamia pour tes lèvres rouges, c'est ce que ça veut dire. Que signifie ton prénom ?
– Cerièra veut dire cerise.
– Ah, je n'étais pas loin, ton prénom suggère le rouge. Tu es une femme rouge, tout feu tout flamme toi ? Tu vas beaucoup aimer notre danse. Je peux t'appeler Lamia ou tu préfères Cerièra ?

C'est là que le côté réservé de la griotte lui avait fait monter le rouge aux pommettes… elle, «tout feu tout flamme» ? Elle répondit à «la majestueuse» encore toute à ses ondulations :
– Comme tu veux.
Et Jalila avait encore ri de bon cœur avant de lui dire «à demain Lamia» et était passée à un autre client.

«Lamia» était donc au rendez-vous. Jalila l'avait faite entrer dans sa modeste demeure, une petite maison toute simple mais dans laquelle Cerièra se sentait franchement à l'aise : des objets qui n'avaient pas grand chose à voir les uns avec les autres faisaient un ensemble baroque mais harmonieux, comme pour donner un résumé de la vie de l'égyptienne. Les deux femmes bavardaient un peu autour d'un thé offert, toutes deux assises en tailleur sur un agencement de tapis au centre de la petite pièce ombragée.
Jalila lui racontait vivre ici seule et se débrouiller grâce à son commerce. Les hommes n'étaient admis que très temporairement car elle ne souhaitait être sous la coupe d'aucun, «ici ils croient que tu es leur chose» lui précisa-t-elle, et elle tenait trop à son indépendance. Cerièra écouta tout ceci, acquiesçant à ses propos : si elle-même avait eu une vie solitaire, farouchement attachée à son indépendance aussi et… bien gauche avec les hommes aussi, celui qui partageait sa vie désormais saurait respecter ça lui expliquait-elle, ce à quoi Jalila répondit «fais toujours attention quand même, l'amour ça peut faire accepter n'importe quoi».

Jalila appela Fathia, une fille d'une dizaine d'années, lui présentant «Lamia» et lui demandant de jouer du tambourin pour elles-deux dans un moment pour rythmer la leçon. Fathia alla attendre dans la cour et pendant que Jalila rangeait la théière elle expliqua à Cerièra la vie de la petite : orpheline, elle l'avait recueillie ici pour la protéger des hommes. «Lamia» ne fit pas de commentaire, se rappeler comment Jules avait récupéré puis traité Lara lui suffisait amplement à comprendre la démarche. La petite semblait épanouie, Jalila devait bien s'occuper d'elle.


– Il te traite bien ? lui demanda soudain la danseuse. La griotte s'étonna de la question mais voyant le sourire complice de celle à qui elle avait fait un clin d'œil la veille en la croisant au souk avec son brun elle comprit qu'elle parlait de lui. Dans un sourire elle la rassura :
– Oui. C'est quelqu'un de bien, je le connais.
«La majestueuse» se contenta de hocher la tête avant de l'inviter à passer dans la cour. Cerièra regarda attentivement les lieux, réalisant qu'elle avait devant les yeux l'état d'esprit de ce qu'elle racontait hier à son homme, sa sœur et son galant : le bâti autour de cours plus ou moins privées. Vivre dehors mais à l'abri des regards semblait être coutume ici. À Foix par contre, ville de piémont, les maisons étaient verticales et serrées les unes aux autres. Les jardins n'étaient pas à l'intérieur : il ne s'agissait pas de perdre la chaleur en hiver. Elle s'amusa de l'influence du climat sur l'architecture.

Fathia entama un rythme au tambourin et Jalila passa derrière «Lamia» lui expliquer comment se positionner, souplesse dans les jambes, remonte-moi cette hanche comme ça. Les mouvements décomposés un à un et puis… on accélère le rythme, maintenant lie-moi tout ça…


– Allez Lamia, mais qu'est-ce que vous êtes coincées les nordiques ! Imagine que tu veux le rendre fou, c'est comme ça que tu t'y prends ?

Jalila s'amusait définitivement à faire rougir la griotte. Le rendre fou… elle n'osait même pas le faire sachant très bien les limites qu'elle s'imposait et donc lui imposait, et la frustration que pourrait engendrer trop de sensualité pour l'un comme pour l'autre. Elle contenait même énormément de choses. Mais soit, elle travaillerait à savoir danser comme l'égyptienne, du mieux qu'elle pouvait, en se disant que cela lui servirait peut-être «un jour»…
Comment Cerièra avait pu s'avaler des tonnes de bouquins, suivre son cursus de Théologie, devenir doyenne, étudier à Belrupt, apprendre la navigation pour mener la nave, tout ça parfois en même temps ? C'est qu'elle aimait apprendre et était douée pour ça. C'est donc assez rapidement que, suivant les consignes de Jalila, elle put commencer à donner quelques jolis coups de bassin, évoluant sur le sol comme en glissant, puis rouler des épaules engendrant un «gling-gling» des perles de son bustier qui amusa la joueuse de tambourin. La satisfaction commençait à se lire sur le visage de sa professeure :

– Ah, voilà qui est mieux !

Puis les deux femmes finirent par danser ensemble un long moment. Lamia regardait faire Jalila qui ne lui donnait plus de consignes, voyant qu'elle devenait autonome dans son apprentissage par imitation. Le moment était à la détente, la transpiration se mêlait aux rires et Fathia lança quelques «youyous» qui furent repris d'abord par l'égyptienne, puis par la griotte.
Combien de temps était passé ? Difficile à dire, mais suffisamment pour que Cerièra en ait plein les jambes. Fatiguée mais heureuse, détendue… libérer l'énergie du bassin, la faire circuler, voilà qui l'avait «décoincée» un peu sans doute, limite émoustillée même, ce qu'elle se contentait de constater comme un effet secondaire curieux.
Le soleil avait tourné, il était temps pour elle de penser à aller retrouver les siens. Mais d'abord elle irait se baigner et se changer sans quoi elle risquait d'avoir des questions sur son après-midi. «Je vais discuter avec la marchande et je reviens en sueur», ça n'est pas très crédible.
Elle remercia Jalila et Fathia leur promettant de passer leur dire au revoir avant d'embarquer pour la suite du voyage et prit la direction du Nil dans une démarche encore ondulante de l'empreinte de la danse.

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Πίστις, ἐλπίς, ἀγάπη Hey Jude, don't make it bad…
Fathia
Cale de la Yemaya, le matin du 22 juillet.


Fathia se réveillait doucement sur le bateau qui tanguait. Ils avaient dû prendre la mer pendant la nuit mais elle s'était endormie avant, au fond, dans un coin, cachée derrière quelques caisses et tonneaux. Elle entendait des pas au-dessus d'elle, sur le parquet de ce qui devait être une pièce. Quelqu'un fredonnait. Son premier réflexe par peur d'être découverte fut de se recroqueviller dans le coin. Elle laissa passer quelques minutes, les pas cessèrent et elle se détendit un peu.

Bientôt elle découvrirait un nouveau monde, un monde où personne ne la connaîtrait et ne pourrait la ramener à son oncle. Un monde où elle ne serait plus obligée de rester cloîtrée chez Jalila pour lui échapper. Elle eut une pensée pour celle qui l'avait recueillie et lui avait évité un mariage en l'enlevant la veille de celui-ci. Le mariage, elle n'y pensait même pas à son âge et trouvait l'homme vieux et moche. Jalila lui avait confirmé qu'elle était trop jeune pour cela en lui disant «si tu n'as pas les hanches pour danser, tu n'as pas les hanches pour te marier».

Elle était partie sans la prévenir et regrettait de ne pas lui avoir dit au revoir, mais sa sauveuse aurait cherché à l'en dissuader en lui disant que son pays c'était ici, or Fathia étouffait à Alexandrie. Quand Lamia était venue à la maison elle avait appris qu'elle était une voyageuse, qu'elle venait du Nord avec ses amis et repartait bientôt. Alors elle s'était voilée pour sortir, comme les grandes mais dans le seul but de camouflage, avait pris son tambourin et un sac avec quelques menues affaires et était allée guetter au port. Il n'y avait que deux bateaux mais comment savoir lequel était celui de Lamia ? Elle ne connaitrait personne, autant être avec la seule qui pouvait, elle le savait, comprendre à peu près sa langue.

L'attente avait duré une partie de la nuit avant que la jeune égyptienne voie Lamia arriver vers l'un des navires avec un homme, sans doute celui que Jalila avait évoqué pendant la leçon. Elle avait attendu qu'ils montent pour s'approcher et grimper sur la passerelle. Observant le pont, elle les avait vu s'éloigner et était monté à bord silencieusement. Il lui avait fallu trouver rapidement une cachette avant qu'ils ne risquent de revenir : elle avait soulevé la grille sur le pont en veillant à ne pas réveiller la dame qui dormait dans une barque, l'accès menait à la cale par un petit escalier, elle en avait fait son coin pour la nuit. Peu de temps après elle avait entendu des pas et des voix sur le pont et s'était félicitée de ne pas avoir trainé, ouf !
Elle s'était endormie à même le sol la tête sur son paquetage recouvert du voile qu'elle avait ôté de ses cheveux, son tambourin dans les bras, faisant peu de cas de l'inconfort qui n'était rien à côté de ses rêves, en murmurant :


Je vais découvrir le pays de Lamia…


Qui va découvrir que Fathia est à bord ?
Sowelo

19 Juillet 1464 - Alexandrie -

Économisant l'eau pure sur la Yémaya comme d'autres, il avait plein de sel dans les cheveux suite aux baignades et, comme il l'avait signalé à Manga pendant que Cerièra faisait visiter la cabine du capitaine à Sloan, ils avaient tous besoin d'un bon décrassage… ce qu'il fit tout juste arrivé… c'est que juste l'eau de mer ne retire pas toutes les odeurs corporelles non plus. Cela fait, il alla s'installer au fameux "débit de boisson"… sans boisson. Juste des coussins et un narguilé qu'ils utiliseraient peut-être plus tard avec un peu d'herbe du Bleu… de quoi faire râler les fuxéens qui n'étaient pourtant pas en manque d'alcool, les stocks ayant été faits avant le départ et le mess ouvert à tous, ils pouvaient boire quand ils voulaient sur les navires.

Peu de temps après son arrivée, il vit sa cerise faire son entrée… dans sa nouvelle tenue, la fameuse tenue alexandrine dont tous le monde parle et… le Très-Haut savait à quel point il la trouvait belle ainsi. Cependant, autant par respect que par peur d'aller trop loin, il réfréna tout ce qu'il aurait pu dire ou faire si la retenue n'avait pas lieu d'être et se contenta de la complimenter et la regarder. Un jour, peut-être qu'il se laisserait aller… mais le vairon était plutôt de ceux à réfléchir longuement avant d'agir dans la majorité des cas… gardant son impulsivité pour les moments où il pense ne pas risquer de perdre des plumes.

Mais l'heure n'était pas à ces pensées, non… le soleil, rapidement haut dans le ciel, c'est en direction du souk qu'ils se dirigèrent tous deux. Elle pour la seconde fois mais lui pour la première, en quête d'un met local… qui sera un beau barracuda que tous deux apprécièrent. Puis vint le moment tant attendu de la visite touristique et des emplettes qui en découleraient… et pas qu'un peu. Tandis que le Vairon regardait à droite et à gauche, observant tout ce qu'il se passait autour et les étalages de marchandises, sa cerise les guidait… et le surprenait en parlant la langue du coin. Pour sûr que ça allait être utile, lui… ne connaissant pas un mot ! Plusieurs heures passèrent, mais le vairon ne trouva rien d'intéressant pour lui-même… il fouillerait plus en avant les autres jours.


20 Juillet 1464

Nouvelle journée et levé au bord de la mer… Cer et lui ayant pris le grand air et la plage en guise de lieu pour dormir, tout comme ils l'avaient fait sur le pont de la Yémaya… cheveux pleins de sables, c'était donc reparti pour un décrassage avant d'aller embarquer certains achats de la veille sur le navire, narguilé et tout, sauf les coussins et les tapis qui n'étaient pas encore disponible, puis il alla retrouver Cerièra et d'autres le midi avant de repartir avec elle vers le souk… et plus particulièrement vers la vendeuse des tenues alexandrines. Cerièra l'ayant prévenu qu'elles allaient sûrement parler chiffon, omettant de tout dire, le vairon la laissa donc sans grande hâte cependant… c'est que depuis quelques jours, quand il a cru la perdre, il n'aimait pas du tout la voir éloignée… mais elle semblait insister, et lui… il pourrait vaquer à quelques occupations.

Tout endroit où les marchandises étaient échangées contre de l'argent attirant les voleurs, le Vairon restait aux aguets, qu'on ne lui tire pas la bourse… ce serait dommage qu'il n'ait plus rien sans même avoir acheter quoi que ce soit. Surtout qu'il avait prévu quelques trucs dont il n'avait pas parlé à Cerièra. Non pas que "ça ne la regarde pas" mais plutôt… qu'un cadeau se doit de rester quelque chose de secret jusqu'au moment où on l'offre. Et un cadeau inattendu fait davantage plaisir qu'un cadeau que la personne s'attend à recevoir même si elle n'en connaît pas la nature… et si il ne trouvait pas, il n'y aurait pas de déception car elle ne saura certainement jamais qu'il lui en aura cherché un. Si il y a quelques mois, il avait offert un arc en if fait de ses propres mains à sa sœur, il se demandait ce qu'il allait pouvoir offrir à sa cerise… c'est qu'il n'était pas fort en cadeaux le Vairon et qu'en plus, ils continuaient tous deux à se découvrir les jours passant. Petit à petit mais sûrement, seulement, ça ne suffisait pas à lui donner confiance et il continuait à se poser des questions.

Il fit donc son tour, seul, regardant ça et là mais ne trouvant pas son bonheur pour autant… en fait, il se baladait plus qu'autre chose. Au pire, il lui resterait le lendemain pour trouver… là, il faisait tout pour visualiser ce qui était quoi et bien tout situer, pour s'y retrouver. Il faisait son touriste en somme, mais le touriste radin qui savait plus ou moins ce qu'il cherchait et qui ne s'arrêtait pas à tous les étals pour voir ce qui était proposé bien qu'un attira son attention après plusieurs longues minutes de marche sous un soleil radieux et brûlants. Rien à voir avec son cadeau cependant, non, absolument rien. Au contraire, là, il s'arrêtait même plutôt pour lui-même. Devant lui se trouvait un étal d'armes diverses, allant des lances, fauchards, machettes classique… aux épées qui attiraient elles, le regard du vairon. Celles-ci étaient courbées et à tranchant unique contrairement à celles qu'ils faisaient par chez eux, toute droite et à double tranchant. Il trouvait ça intéressant… et comme son épée à lui n'avait pas de nom et qu'il n'y tenait pas plus que ça, il la trouvait trop "classique", il commença à se dire qu'il allait en récupérer une tant qu'il était ici. Échanger son arme contre une autre… oui, pourquoi pas. Le marchand, voyant qu'il était intéressé, vint à sa rencontre et l'interpella dans sa langue natale… et le Vairon ne comprit pas un traître mot de ce qu'il racontait et resta là un peu… hébété ? Comment allait-il pouvoir acheter ou marchander si il ne pouvait même pas communiquer avec lui ? Il regrettait que Cer ait décidé de parler chiffon avec la marchande de tenue…

Il essaya tant bien que mal et inutilement de communiquer avec l'homme avec grand signe de bras et de main.. tout en finissant par dire à voix haute ce qu'il souhaitait dire dans toutes les langues qu'il connaissait. Le tout était assez comique, quelques enfants autour rigolant devant cet étranger cherchant à se faire comprendre par tous les moyens… devant un marchand qui commençait à s'impatienter. Après de longues minutes infructueuses, le Vairon allait abandonner ses efforts et repartir d'où il venait lorsqu'il vit un homme qui n'était pas typé du coin s'approcher et parler au marchand avant de se tourner vers le Vairon qui put le détailler : assez âgé, une barbe et des cheveux grisonnants bien que correctement taillés, une vilaine cicatrice barrant la joue gauche et une tenue non pas de riche mais plutôt sale, poussiéreuse et pleine de sable avec un sabre, identique à ceux que le vairon regardait, au côté


Gamin, c'est pas en f'sant l'pitre qu'il t'comprendra ! fit le vieux

Le Vairon ne sut pas vraiment quoi dire sur le coup, surpris d'entendre une langue familière. Le vieux, tout en reparlant à l'artisan, tendit son propre sabre et une bourse, celui-ci s'empressant d'aller l'aiguiser tout en gardant un œil dans leur direction.


Bien, j'm'occupe de toi. Y m'connait donc y m'fait confiance. Pas l'cas de tous par ici envers les étrangers comme nous, t'en es pt'être rendu compte ! il regarda à nouveau le Vairon, le jaugeant. Y m'dit qu'tu sembles intéresser par ses lames, c't exact ?
Le vairon opina avant de répondre. C'est ça… et comme toute arme, faut bien la choisir, donc je voulais les prendre en main, voir l'équilibre, leur maniement, tout ça…
Bien… t'vais l'air idiot, t'l'es p't'être moins que j'le pensais. Vas-y, tant qu'tu casses ou blesses rien, c'est bon, mais j'vais t'expliquer quelques p'tits trucs au passage.


S'ensuivit les essais et discussions autour des divers armements présents… et des corrections quand au maniement des armes ainsi que des grognements en entendant le vieux l'appeler "gamin". Il était pas mauvais le vairon, mais les épées et les sabres sont plutôt différents... et il aimait pas avoir l'impression d'être rabaissé, même si pour le vieux, tous le monde pouvait être un "gamin". Le vairon trouva finalement son bonheur après de longues minutes d'essais, si longues que l'artisan avait finit l'aiguisage depuis belle lurette. Il demanda donc le prix, le vieux faisant office de traducteur. Une somme rondelette fut donnée que le Vairon s'empressa de diminuer en marchandant, proposant un autre prix, plus bas. Si le vieux était amusé, il sentait le vieux marchand, et jouait le jeux du traducteur, le marchand, lui, commençait à perdre vraiment patience devant ce client à la fois étranger, difficile… et têtu, ne se laissant pas faire et continuant à demander un prix qu'il augmentait parfois très légèrement en signe de "bonne volonté" ou cherchant des défauts à l'arme et le marchand diminuant du coup jusqu'à un point que le Vairon trouva acceptable après avoir supposé avoir vu moins cher ailleurs. Il sortit sa bourse et paya l'artisan avant de passer l'arme désormais dans son fourreau à sa ceinture puis regarda le vieux en le remerciant.

Bah ! C'est rien gamin, j'te voyais de loin et j'me suis dis qu'fallait t'aider un peu… pas malin de s'trimballer seul quand on connaît pas la langue. Et puis ici, entre étrangers, faut s'aider. J'suis là depuis longtemps, mais étranger un jour, étranger toujours !
J'ai remarqué ça, oui… notamment à côté de la bibliothèque. Sont très agressif là-bas !
Ouaip… même moi malgré mes années ici, j'peux pas entrer. Aller… j'vais t'filer un coup d'main et t'traduire un peu tout c'qui se disent, ça fait plaisir de r'parler avec un autre étranger.


L'après-midi était désormais bien avancé… mais le vairon n'avait pas encore fini son tour et il continua sa route… avec le vieux, le vairon n'allait pas dire non à une aide linguistique. Ils finirent par passer dans une ruelle que le soleil n'atteignait pas et le vieux l'arrêta d'un coup en lui montrant le milieu de la ruelle… le vairon n'y vit d'abord qu'une sorte de corde enroulée sur elle-même jusqu'à ce qu'il s'intéresse à la couleur… pas une corde, un serpent. En plein milieu en plus. Habitué aux serpents constricteurs et donc non venimeux, le vairon regarda le vieux qui lui fit signe de faire demi-tour… en lui expliquant la particularité de celui-là, venimeux ainsi que partageant au passage ses connaissances sur ces animaux, complétant celles du Vairon… connaissances que ce dernier partagera, du coup, le soir même auprès des autres. Le soleil tombant, le vairon n'avait pas plus trouvé de choses intéressantes. Ni cadeau, ni autre et il rentra presque bredouille en laissant le vieux rentrer chez lui après l'avoir une dernière fois remercier.

21 Juillet 1464

Départ le soir… c'est ce qui avait été prévu la veille et ça ne l'enchantait pas forcément… pour la raison qu'il n'avait pas trouvé son "bonheur". Mais il n'en avait rien dit aux autres et encore moins à Cerièra, réquisitionnée par Manon en tant que traductrice… le vairon ayant même dit que ça l'arrangeait. Il ne lui restait donc que la journée pour trouver. Pas de vieux traducteur cette fois, il serait seul. Il parcourut donc une nouvelle fois les rues de la ville, seul… en réfléchissant à ce qu'il pourrait bien lui trouver. Pas d'animal… ils avaient déjà parler des préférences et avait quelques idées à ce sujet, mais de tout ce qu'il voyait, rien ne lui semblait bien. Trop pratique le vairon… ou alors, il aimait faire les choses lui-même ou demander à faire des choses précises. Il passa donc l'après-midi à déambuler dans le souk, à la recherche de choses et autres… il s'y prenait peut-être mal. Marchant, il réfléchissait aussi aux jours précédents, à tout ce qui avait été amené dans les discussions… et pensa au moment où ils parlaient de planter un palmier à Tounis. C'était une idée intéressante… une petite touche exotique au milieu de Toulouse, ça ne pouvait pas faire de mal… mais, est-ce que Cer avait pensé entre temps à prendre de quoi en planter ?

Mystère… le peu de temps qu'ils avaient passer ensemble, ils n'en avaient pas reparler ni même été en acheter. Le vairon se dit alors qu'il valait mieux en avoir trop que pas du tout et se mit en recherche d'un herboriste ou équivalent. Chose étrange, ses pas le menèrent jusqu'aux entrées de la ville, là où se trouvaient les marchands de dromadaires, ces drôles de bêtes bossues qui semblait ruminer toute la journée en vous regardant ensuite d'un air bête… si si ! Le Vairon se retrouva donc, au milieu de tout ça, entre dromadaires et autres élevages. Si au début du voyage, il aurait aimé ramener une de ces bêtes, après les avoir vu ainsi, il trouvait l'idée plus ridicule qu'autre chose et cette période lui était passée. Au bout d'un moment, il se demanda comment il avait réussi à arriver là-dedans, car il n'y avait absolument rien de ce qu'il cherchait par ici… c'est ça de laisser ses jambes le guider, il finit toujours là où il n'a pas lieu d'être ! Du coup… demi-tour, et il retourne vers la ville…

Plusieurs heures de recherche de tout et rien, en particulier d'un herboriste ou d'un potentiel cadeau… et c'est en finissant au port qu'il trouva un marchand vendant toute sorte de plante qu'il s'empressa d'aller saluer. Coup de chance, il parlait un minimum français, et le vairon put communiquer avec lui sans faire ses grands gestes ridicules du jour précédent… bien que la compréhensions soient compliquée, elle se faisait petit à petit et trouva ainsi les fameux futurs plants de palmier… ainsi que tout un tas de plantes venant du coin aux différentes vertus médicinales ou autre… c'est que le marchand était surtout plongé dans la verdure, quelle qu'elle soit. Lui demandant les propriétés de certaines, l'utilisation d'autre, le vairon, intéressé à la fois par la médecine et l'empoisonnement décida de se faire un petit stock de tout ce qui semblait utile… et une lui sembla un peu intéressante pour leur amie Manga. En effet, le marchand lui expliqua que, en plus de limiter les nausées et vomissements, le gingembre permettrait de prévenir, voire même guérir, le mal de mer, ce que subissait Manga depuis le début du voyage et qui semblait ne jamais vouloir s'arrêter. Le marchand lui rappela aussi le fait bien connu que le gingembre serait aphrodisiaque… ce dont le vairon se fichait, ne croyant pas à ces choses là, mais ça pourrait être amusant à tester bien que l'effet soit très certainement très moindre… ne dit-on pas que la laitue et le houblon sont anaphrodisiaque ? Le dernier s'utilisait dans la bière et pourtant il n'a jamais vu que ça stoppait les ardeurs de certains grands adeptes de la beuverie. "Bah, je vais faire un stock pour le mal de mer, on tentera, si ça marche tant mieux, sinon, tant pis…" se dit-il. Et il fit donc un stock de diverses plantes et autres qu'il fit amener directement sur le navire en séparant chaque herbe et plantes et se mettant un moyen mnémotechnique pour savoir ce qui est quoi, si jamais il venait à oublier. Dans le lot, il y avait des cactus, se souvenant du jeu de la Saint Valentin où il était tombé sur la case désert où fictivement, il avait dû boire l'eau d'un cactus et s'était retrouvé drogué… et rien qu'en souvenir de ça, il récupéra des cactus dans le lot, trouvant ça amusant !

Vint alors la fin d'après-midi… et toujours pas de cadeau ou d'idée pour sa cerise… ce qui le fit soupirer… il voulait lui offrir un truc mais ne trouvait rien et il était l'heure de retourner au débit de boisson avant de réembarquer sur le navire. Il s'y dirigea donc… mais passa une dernière fois devant la bibliothèque avec le garde débile juste devant, celui qui ne laissait même pas les étrangers s'approcher, les menaçant d'une… une quoi ? Une pique ? Hallebarde ? Fourche de guerre ? C'est qu'elle était bizarre son arme d'hast, le vairon n'en connaissait aucune du même genre… si ça se trouve elle était juste pour faire joli. Il regarda le garde qui lui lança un regard mauvais… oui, non, il n'allait pas tenter le Sans-nom. Il longea la bibliothèque en passant dans une petite ruelle… et remarqua une entrée dérobée. Il l'examina un peu tout en passant… pas de garde, rien. Il pourrait tenter d'entrer par là… dommage qu'il n'ait pas le temps, les autres pourraient se demander ce qu'il fichait. Il reviendra plus tard… après avoir prévenu sa cerise de ce qu'il comptait faire. Une petite virée nocturne… ça pourrait être intéressant.
Manon
    «À te voir marcher en cadence
    Belle d'abandon
    On dirait un serpent qui danse
    Au bout d'un bâton»

    C. Baudelaire




Alexandrie, le 21 juillet au souk.


«Si même Manon est cinglée, nous voilà bien !», se disait Cerièra en la rejoignant au bras de son brun. Ou en tout cas la comtesse avait le don pour choisir ses animaux de compagnie. Après un escargot angevin, la voilà qui bavait à son tour sur un serpent qui soi-disant dansait dans un panier lorsqu'on lui jouait de la flûte. Elle leur avait expliqué ceci la veille lors de la soirée : certains étaient dubitatifs, Cerièra quant à elle lui avait demandé si elle jouait de la flute. C'est bien mignon de vouloir un serpent qui danse, mais il perd bien de son attrait si on ne peut pas le faire danser. Au pire, ça peut faire une jolie ceinture.

Pourquoi l'accompagnait-elle, Cerièra, dans sa quête de reptile chorégraphe ? C'est que la griotte, avec ses rudiments d'arabe, était «pratique». Manon l'avait sollicitée la veille lui demandant si elle comprenait le dialecte local, et étant donné que son niveau lui avait permis de mener à bien quelques négociations simples, elle l'épaulerait pour celle-ci.
C'est qu'il y avait des choses à vérifier, Sowelo avait été formel : déjà que la bête n'était pas vénéneuse, pour cela il avait expliqué à Cerièra comment vérifier ses crochets et elle se demandait bien si elle trouverait le vocabulaire nécessaire à demander. Sinon, option latine : tout dans les mains !
Quant à Manon, elle souhaitait savoir s'il lui serait possible de vivre sous un climat occitan. L'été n'était pas très différent mais l'hiver y serait bien plus rude pour la bestiole. Et si ça se mange aussi, sachant qu'elle n'oserait sans doute pas poser cette question à quelqu'un qui aime sa bête au point de l'avoir dressée à danser. Elle dirait sans doute à Manon que non, dans le doute pour qu'elle ne prenne pas de risque, prétextant qu'on le lui avait répondu formellement. De toute manière elle n'y comprendrait rien, la griotte pourrait donc lui dire ce qu'elle voulait !

Lorsqu'elle retrouva Manon, elle la salua chaleureusement, laissant au brun le temps de faire de même avant qu'il aille vaquer à ses mystérieuses occupations. Il souhaitait faire un tour seul lui avait-il dit, et la brune s'amusait du fait qu'elle ne soit pas la seule cachotière du couple. Consignes avaient été données par celui qui ne perdait jamais de vue la prudence : «Manon... pas trop gros le serpent du coup... c'est moins dangereux pour nous tous... et vous même». Conseil qu'il avait développé à la griotte avant qu'ils n'aillent la retrouver : non-vénéneux, les serpents étouffent leur proie ou les broient. Un petit serpent éviterait ce désagrément à Manon, bien qu'il avait insisté sur le fait qu'elles devaient éviter de les laisser s'enrouler autour d'elles.
Malgré la petite inquiétude qu'elle décelait chez lui – sinon pourquoi tant de consignes ?–, il leur ferait confiance cet après-midi, à moins que la nécessité d'avoir du temps pour lui ne fasse loi. Une fois les deux femmes seules, Cerièra s'enquit de la suite :


Alors, où sont-elles ces merveilles ? Montrez-moi, je vous suis ! Et de blablater en chemin : c'est que j'en ai entendu parler mais je ne savais pas qu'ils en avaient ici, dire que j'ai raté ça en faisant mon tour ! Et papati et patata…



Juste à l’entrée du souk, côté ouest. lui répondit la Comtesse aux lubies étranges qui, au delà du besoin linguistique, était ravie de ce prétexte pour passer un petit moment avec Ceriera. Nonobstant ce besoin là et le fait de paraître totalement cinglée, elle l’entraîna près d’un charmeur de serpent qui s’empressa d’exercer son art. La mélodie de la flûte de l’homme assis en tailleur à même le sol emplit l’air des notes lancinantes tandis que le regard se pose sur le panier dans l’attente de l’apparition reptilienne qui ne tarde pas.

D’un bleu-noir, le “Naja haje” n’est autre qu’un cobra égyptien dont la coiffe reste le signe distinctif le plus frappant. L’animal s’extirpe de son panier par des ondulations qui semble rythmées par la musique si laconiquement que l’on pourrait croire qu’un marionnettiste le manoeuvre au dessus. Mais il n’en est rien et l’on ne saurait déterminer la taille du reptile tant il semble n’en jamais finir de s’élever. Il paraît hypnotisé par la mélodie tout comme la Lescurienne devant cette magie.

Le manque de crainte crée l’insouciance d’autant plus quand la veille, on lui permis d’en toucher un. Dans l’absolue, elle n’avait peur de pratiquement rien bien qu’elle n’appréciait que peu la compagnie des oiseaux et le tactile des insectes qui pouvaient vivre en paix autour d’elle tant qu’ils n’entraient pas en contact direct avec sa peau. Et puis, hormis le poids et la taille, il n’y avait pas grande différence avec un escargot. Sur le bras, il ne manquait que la bave.

Et d’énumérer alors toutes les questions à Ceriera.
Est ce que ça pourrait vivre chez nous? Qu’est ce que ça mange et en quelle quantité? Est ce venimeux? Dangereux? Peut on seulement en acheter? Et apprendre à jouer cette musique?


Il est magnifique… les iris de la brune ne quittaient pas le sombre reptile, dont le bleu-noir n’était pas sans lui rappeler les plumes de son fidèle corbeau. Si la veille elle avait pris la lubie de Manon pour un caprice de touriste, elle comprenait mieux son coup de cœur tant l’animal était fascinant. L’homme semblait en harmonie avec la bête et jouer, et bouger sa flûte selon ses ondulations, bien que ce soit certainement l’inverse. Peu importe : ils semblaient tout simplement en symbiose.

Comment amener des questions si prosaïques sans briser la magie de l’instant ? La griotte fit quelques hochements de tête à la lescurienne pour lui signifier qu’elle avait bel et bien les questions en tête, mais laissa l’homme finir son numéro avant de déposer un écu dans un couvre-chef étrange placé au sol visiblement à cet effet. Commençons par donner des raisons de nous faire apprécier.
شكرا (chou-crâne)


Évidemment, un extrait de sa langue avait interpellé l’homme. Tout ceci était beau et bon, restait maintenant à Cerièra à assurer les questions, ce qui était une autre histoire. Déjà, flatter l’animal, avec les quelques mots qu’elle avait, ce qui pouvait donner quelque chose comme «beau animal joli joli», en espérant qu’il ne lui tiendrait pas rigueur de son maigre niveau, l’intention était là. «Amie moi aimer beaucoup, vouloir» avec un joli sourire en espérant que ça passe et qu’il en raconte un peu plus. Ce qu’il fit, et heureusement il est toujours plus simple de comprendre une langue dont on a des notions que de la parler. Et la griotte de résumer à Manon :


Lui n’a que le sien, comme nous pouvions nous y attendre, il faut aller voir un éleveur. Le prendre jeune et entretenir une relation avec la bête pour qu’il réponde à la musique. Il avait eu un drôle de sourire en lui disant cela, la brune sentait l’entourloupe sur cette question musicale. C’est l’éleveur qui fait l’ablation des crochets lorsqu’on l’acquiert, mais il ne vivra que quelques mois. On lui demande s’il en connaît un à nous recommander ?

Elle attendait de savoir ce que voulait faire Manon au vu des nouveaux éléments. Les autres question suivraient, ou pas, en fonction.


La magie s’éteint sèchement aux derniers mots prononcés par Ceriera tandis que les azurs se teintent d’un bleu tempête. Il meurt prématurément à cause de l’ablation? Une question qui n’en est pas une mais qui choque grandement la brune. Comment peut on écourter une vie quelle quel soit simplement pour amuser des voyageurs en mal d’exotisme? C’est honteux… scandaleux... Ses mots résonnent dans un murmure désapprobateur alors qu’elle tente de masquer les marques de mécontentements sur son visage. Oh ça non, le charmeur de serpent n’aura pas un seul écu de sa part, elle ne cautionne pas ce genre de maltraitance… même si elle a pourtant fermé les yeux sur le marché d’esclaves… Les us et coutumes icelieu, ne sont de fait, pas les leurs. Et tant mieux!

Je vous remercie Ceriera mais non. Je ne vois aucun intérêt à ce genre de pratique dans ces conditions. Heureusement que vous m’avez accompagné…


Une moue sur les lèvres de la brune. Oui l’animal était beau, et comme bon nombre d’entre eux ils étaient mieux en liberté. C’est ce qu’elle ressentait vis-avis du loup du Bleu qu’elle avait rechigné à embraquer sur la Yemaya… la pauvre bête.
Elle hocha la tête, il était évidemment mieux de ne pas ramener ce qui nous posait des questions morales, mais il était triste aussi de conclure l’après-midi, sinon le voyage, sur une note aussi triste.
Elle prit donc le bras de la brune sans mot dire, mais non elle ne la laisserait pas là-dessus. Elle ne savait pas quelles emplettes Manon avait déjà bien pu faire et réciproquement, elles auraient le temps de se raconter cela en repassant devant les divers étals avant d’atteindre les belles fioles de khôl qu’elle voulait lui montrer pour ramener un sourire sur son visage. «C’est avant tout un soin des yeux, mais ça fait si joli…» lui expliquerait-elle dans un petit sourire en lui proposant d’en essayer.

“Pourquoi pas ma foi.” se dit celle qui ne porte pourtant que peu d’intérêt pour embellir son apparence. Si elle avait bien remarqué le soin que la griotte apportait à son maquillage, Manon était loin de ce qu’elle prenait pour de la futilité, cependant, il ne fallut pas plus qu’un essai et l’appréciation du résultat soulignant agréablement le bleu de ses yeux pour faire naître un sourire sur son visage.
Ainsi donc, la petite virée se terminera sur une note positive et en bien charmante compagnie avant de reprendre le chemin du port pour de nouvelles découvertes.

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Ayorjo





[le 19 Juillet, Alexandria]

"Terre ! Terre !"
Il l’avaient aperçu, déjà au loin, guettant ensemble sur le pont, comme ils se l’étaient promis, et voila qu’il y arrivaient, après un voyage des plus agréables, sans encombres, malgré quelques jours où l’oiselle s’était sentie quelque peu fatiguée. Mais tout allait pour le mieux en ce jour de débarquement, à part un lancer de ligne, due à une tête légèrement en l’air, de la brune, qui lui avait valu une petite aide pour débarquer, de la part d’un Capitaine à la botte motivée. Ayorjo garda l’oeil, un peu contrarié par ce coup de pouce, ou de botte, mais celui-ci fut finalement léger et le barbu put alors mettre pied à terre en compagnie de sa douce, après l’avoir sécurisée sur le planchon.
Ils étaient tous impatients de visiter la ville, Ayorjo ne l’était pas moins. Il était déjà venu, mais ne pouvait pas vraiment prétendre connaître la cité, en étant venu qu’une seule fois. C’est donc avec joie qu’il allait la (re)découvrir en compagnie d’Aryanna pour des balades en tête-à-tête, et avec l’ensemble des compagnons de voyages pour des moments de détente autour d’un breuvage local sur l’un de ces débits de boisson en terrasse.

Ce n’était pas tant de parcourir à nouveau les ruelles étroites et vivantes, pleines de senteurs et de couleurs exotiques, qui le rendait heureux d’être de retour dans ce coin de bout du monde. C’était bien la perspective de s’y perdre en compagnie de celle qu’il ne quittait plus d’une semelle depuis maintenant quelques semaines, avec qui il partageait avec bonheur presque chaque instant des jours et des nuits qui se succédaient, dans une perfection qui était leur, et qui se prolongerait bien au-delà du voyage.

Bras dessus, bras dessous, ils explorèrent donc une Alexandrie nouvelle pour l’un, et inconnue pour l’autre, le barbu aimant observer sa compagne aux yeux émerveillés par les dédales d’étals, par l’activité d’un souk rempli de ses originalités, ou par la singularité des bâtiments qui les entouraient. Il tentait, néanmoins, et sans prétention, de la guider quelque peu, en se remémorant parfois les images qu’il avait gardé en tête depuis son premier séjour.
Mais ce rôle de guide -incompétent- avait été décidé la veille, il ne pouvait pas se dérober, car le “contrat” avait été scellé, de façon tout à fait formelle par une poignée de main, et, il fallait l’avouer, d’une façon plus agréable par un doux échange.
La journée passa ainsi, entre découverte et curiosité, emplettes et dépaysement, et balades main dans la main à travers la ville, jusqu’au soir où, l’un après l’autre, ils rejoignirent leurs amis, dans le cadre d’une “taverne” du coin, perché au dessus d’une des places de la ville, profitant de la relative fraîcheur vespérale, afin de partager leurs aventures et découvertes respectives de la journée.



Parfois, il arrive, comme tout le monde le sait et en a l’habitude, de glisser d’un tabouret, d’une chaise, ou, si tant est que l’endroit est oriental, d’un coussin. Ayorjo et Aryanna étaient pourtant glués l’un contre l’autre, comme bien souvent, mais une relative maladresse de l’oiselle l’avait fait disparaître un instant.
Quelques instant passèrent, pas de retour d’Aryanna… L’inquiétude s’empara vite d’Ayorjo, accompagné dans la crainte de ne pas voir la brune revenir par sa soeur et son compagnon.

Il se décida alors rapidement de partir à sa recherche, d’abord aux alentours de la terrasse, un peu n’importe où d’ailleurs puisqu’il fouilla nombre de parterres de fleurs, comme si Aryanna avait pu se retrouver coincée dans un amas de plantes. Il descendit alors vers la place en contrebas, parcourant tous les recoins possibles et inimaginables, allant même jusqu’à déranger quelques dromadaires endormis dans leur enclos. Il continua son chemin, grimpant parfois en hauteur pour une vue d’ensemble sur les rues désertées, puis alla se perdre dans les ruelles alentours.
Sans succès.
Le barbu revint rejoindre Ceriera et Sowelo, qui le quittèrent ensuite, espérant que le retour d’Aryanna fut rapide et qu’il ne lui était rien arrivé de grave.
Il resta seul un moment, assis sur le parapet, les pieds dans le vide, regardant de partout, guettant le moindre mouvement d’une brune européenne, au loin, ou attendant de plus en plus inquiet son retour. Mais il ne pouvait pas rester à attendre, s’imaginant le pire, il fallait partir à sa recherche à nouveau.
De retour dans les ruelles, il la chercha de partout, et il n’arrêterait pas de chercher avant de la retrouver, c’était une évidente évidence. Alors qu’il ressortait d’une alcôve perdue au milieu d’une rue commerçante, où l’activité du jour avait fait place au calme et au silence nocturne, il remarqua une ombre, une silhouette qui s’approchait rapidement de lui. Tout d’abord sur ses garde, ne sachant pas à qui il pouvait bien avoir à faire, il se rendit vite compte que la personne qui courait vers lui n’était qu’un enfant. S’attendant à ce que celui-ci passe son chemin, il fut alors bien étonné quand le petit Alexandrin se planta devant lui, à l’observer à la lueur d’un jour prêt à se lever. Le gamin se mit alors à lui faire de grands gestes que le brun ne comprenait pas. Que pouvait-il donc bien lui vouloir, ce petit, à se toucher le front, à fermer les yeux en baissant la tête, comme s’il s’endormait ? Voyant sans doute que le barbu ne saisissait pas le message, l’enfant se mit alors à faire quelques gestes pour mimer l’information essentielle de son muet discours : c’est lorsqu’il toucha ses cheveux et en mima une longueur virtuelle qu’Ayorjo comprit alors qu’il parlait peut être d’Aryanna. Il prononça son nom, il tenta un
“aimra'a ?” -”femme ?”- en plaquant la main sur son torse.
Pour seule réponse, l’enfant l'agrippa par la manche, et commença à le tirer, l’invitant à le suivre, sans autre discussion possible.
Au bout de quelques virages et ruelles, ils arrivèrent devant une petite maison, sans prétention, dans laquelle ils entrèrent rapidement.
Ayorjo n’eut pas le temps d’étudier l’endroit, la seule vue de l’oiselle lui fit tout simplement oublier tout le reste.


"- Aryanna !
- Ayorjo !" - en choeur, youpla-

Il s’avança rapidement, se laissant tomber à genoux près d’elle, déposa sans réfléchir un léger baiser sur ses lèvres, puis l’observa tout simplement, heureux de l’avoir retrouvée, mais soucieux de savoir ce qu’il lui était arrivé. Bien qu’en la voyant l’angoisse qu’avait provoqué sa disparition fut quelque peu apaisée, il n’en restait pas moins inquiet de savoir ce qu’il s’était passé pour qu’elle se retrouve ainsi chez des gens inconnus. La réponse fut donnée rapidement par le bandage qui se trouvait sur sa tête. Il se permit alors de regarder la blessure, d’un oeil apprenti-connaisseur en la matière, une belle entaille néanmoins déjà bien traitée qui lui donna les premiers éléments de réponse quant à la longue disparition de la jeune femme. Mais elle lui expliquerait évidemment plus en détail cette mésaventure, le moment était pour l’instant l’heure de rassurantes retrouvailles, d’un moment échangé avec les sauveteurs du jour, qu’il tenta, par quelques baragouinages en arabe, de les remercier, de leur montrer toute sa gratitude pour avoir recueilli sans se poser de questions une étrangère blessée.shukraan, un merci, puisbark alllah fik”, que Dieu vous bénisse, des mots qu’il connaissait de son attachement à l’Averroisme, donc le nom de l'annonciateur Ibn Rochdsera aussi prononcé, sans vraiment savoir si cela aurait une quelconque importance...
Puis, dans des gestes, à défauts de mots, et avec l’aide d’Aryanna, Ayorjo comprit que les quelques points sur la tempe avaient été posés par un médecin local, et en recueillant de rapides informations, il était certain qu’ils leur fallait également aller le remercier, plus tard.
Ils partagèrent une boisson qui leur avait été servie, mais ils ne voulaient pas importuner plus longtemps la petite famille, qui avaient déjà bien donné de leur temps pour de simples étrangers. Les deux aimants s’excusèrent auprès de leurs hôtes d’un temps par des gestes respectueux, leur souhaitant alors une bonne nuit dans leur langue, le barbu ébouriffant au passage les cheveux de l’enfant, ne sachant lui montrer autrement le remerciement pour l’avoir retrouvé et ramené auprès de sa belle.
Il prit Aryanna dans ses bras, pensant sans doute qu’elle ne pourrait pas bien marcher en raison de sa blessure à la tête -logique-, et ils quittèrent la petite maison. Le barbu emmena l’oiselle non loin de là, dans ce qui pouvait ressembler à une petite palmeraie, petit coin de verdure où ils purent terminer cette nuit rocambolesque, sous un de ces arbres exotiques, profitant de la relative fraîcheur d’une nuit à la belle étoile. Et dans les bras l’un de l’autre, ils retrouvèrent un moment paisible et rassurant, comme toujours.



[Le lendemain…]

Ils avaient décidé de rendre visite aux porteurs de l’aide de la veille, dont l’homme qui avait recousu la blessure d’Aryanna.
La nuit avait été courte, l’aube ayant pointé rapidement le bout de son nez alors qu’ils s’étaient installés pour se reposer quelque peu. Au réveil, Aryanna semblait aller bien, ce qui était rassurant, mais l’occasion d’aller remercier le médecin Alexandrin serait également un bon moyen de prendre conseil, même si la barrière de la langue allait sûrement limiter la compréhension.
Ils retournèrent donc dans ce quartier où ils avaient passé la soirée de la veille, puis, après quelques renseignements hasardeux, en prononçant à tout vas le mot “tabib”, le médecin, et d’après les explications que le barbu avait tant bien que mal retenu, ils finirent par frapper à une porte qu’on leur avait désigné. Lorsque l’homme qui leur ouvrit leur fit un sourire alors qu’il semblait reconnaître Aryanna, tout en tendant une main vers sa blessure pour y porter rapidement un oeil bienveillant, ils comprirent qu’ils ne s’étaient pas trompé d’endroit. L’homme se recula d’un pas, en leur faisant signe d’entrer, dans sa petite maison où ils les invita à s’installer à même le sol, dans le confort de coussins, aménagement traditionnel comme ils avaient pu maintenant le constater. Le médecin arabe, un homme entre deux âges à la longue barbe soignée, leur servit un thé, puis s’installa avec eux. Il regarda L’oiselle, se toucha la tempe, puis désigna la jeune femme en tendant une main. Dans ces gestes, il devait sans doute demander comment elle allait. Ayorjo regarda tour à tour sa compagne puis l’homme en face de lui, et hocha la tête affirmativement, pour signifier qu’elle s’était remise de sa mésaventure, ce qu’Aryanna confirma elle aussi en le remerciant dans sa langue.
Ayorjo, qui n’était pas vraiment du genre à se mettre en avant, se décida tout de même à oser montrer une certaine curiosité sur l’activité médicale que leur hôte pouvait pratiquer, car il était impressionné par la qualité des soins qu’on avait apporté à la blessée.
Il tendit la main, prononça le mot
tabib”, puis se désigna lui-même en répétant le terme pour signifier ses connaissances en médecine.
Il ponta le doigt vers le front d’Aryanna, tenta le mot
kayfpour demander comment ?”.
L’Alexandrin opina du chef, semblant avoir compris l'intérêt d’Ayorjo, puis, après s’être relevé, disparut un instant dans une pièce adjacente. Il revint rapidement, les bras chargés de quelques livres, puis se rassit en leur compagnie. Après avoir tendu les ouvrages au barbu Européen, que celui-ci s’empressa de feuilleter, même s’il ne pouvait pas comprendre les mots dans lesquels ils étaient rédigés, le médecin local lui présenta sa main ouverte, où se trouvait un minuscule objet. Ayorjo s’en saisit, délicatement, tant la petite aiguille recourbée qu’il tenait maintenant entre ses doigts était fine.
Après un petit moment où il s’était perdu dans les pages des incroyables ouvrages, ce qui lui fit penser qu’un jour il se déciderait à continuer d’apprendre la langue Arabe, Ayorjo les repoussa alors vers le médecin, le remerciant d’un signe de la tête. Il lui tendit ensuite l’aiguille, mais l’Egyptien fit un geste de négation de la main, et repoussa ensuite les quelques volumes médicaux dans la direction des deux jeunes gens. Ayorjo fit de grands yeux, gêné, il était impossible d’accepter un tel don de la part de l’inconnu. Mais l’homme insista, avec un grand sourire, plein de générosité.
Se grattant la tête, cherchant dans les yeux noirs de sa voisine un soutien dans ce moment gênant, il fouilla ensuite dans sa besace, pour en sortir un tout petit coffre qu’il transportait depuis leur départ. Celui ci contenait une petite quantité de simples, dont il pouvait parfois se servir pour de petits soins. Cela n’avait que bien peu de valeur par rapport au cadeau de l’Alexandrin, mais il était impossible de ne rien offrir en échange, d’autant qu’il n’avait même pas encore trouvé comment le remercier d’avoir recousu la tempe de l’oiselle.
Après l’avoir ouvert, l’homme étudia avec curiosité et surprise les quelques poudres et brins, qu’il montrait parfois à Ayorjo, avec approbation, l’échange semblait avoir été bien perçu et le Chaurien en fut quelque peu rassuré…


Ils restèrent quelques instants, finissant leur boisson, échangeant des mots que ni l’homme, ni les deux invités ne comprenaient, mais cela n’avait pas d’importance, un sentiment de gratitude pour les uns, et de générosité pour l’autre avait empli la pièce, et cela restera un autre des beaux souvenirs qu’ils rapporteraient avec eux.

Ils remercièrent alors cet homme qu’ils ne reverraient plus jamais, et le quittèrent, pour poursuivre leur route, chargés des cadeaux qu’ils déposeraient sur le navire, avant de repartir pour un moment plus léger, pour profiter comme ils se l’étaient promis, de la plage et de la mer...


Merci à JD Ary' pour sa coopération ;)

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Fathia
Mess, pont, cabine du Bleu, de Véra puis de Sloan, la Yemaya, le 23 juillet.


Fathia ne s'était pas aventurée hors de la cale depuis la veille. Elle avait entendu des pas, des rires, même tard dans la nuit. Parfois la voix de Lamia, mais elle n'osait pas se montrer à elle : elle semblait gentille mais comment réagirait-elle si elle la savait sur le bateau ? Sans doute la ramènerait-elle chez elle, faisant faire demi-tour au navire qui n'était pas encore assez loin en mer pour qu'elle y renonce. Elle avait cherché à manger, examinant le contenu des caisses, écartant les tapis, coussins et objets divers mais n'avait trouvé que des épices, quelques plantes et des bouteilles d'alcool auxquelles elle ne toucherait pas… pas de quoi combler son estomac qui commençait à se manifester à elle.

Elle profita d'un moment de calme, sans trop de bruit, pour explorer le second accès de la cale : pas par la grille mais par une porte cette fois-ci. Celle-ci donnait sur une pièce avec une grande table, quelques sièges et un comptoir derrière lequel elle trouva un liquide qu'elle goûta. De la tisane froide, au goût de menthe : enfin elle pourrait épancher sa soif ! Elle en but une bonne quantité en veillant à rester cachée derrière le comptoir si jamais quelqu'un venait à fréquenter l'endroit.

Un petit escalier la mena jusqu'au pont qu'elle découvrait de jour : quelques tapis et coussins étaient entreposés dans un coin, la barque était vide et quelques personnes s'occupaient à pêcher. Elle ne perdit pas de temps à les observer ne voulant pas être vue elle-même et prit vite une autre porte jouxtant celle d'où elle venait et priant pour ne tomber nez à nez avec personne. Là, un couloir et plusieurs portes. Elle en poussa une et découvrit un animal qu'elle ne connaissait pas.
Aaaaaahhhh !
De peur elle poussa un cri et referma immédiatement la porte. Quelqu'un l'aurait-il entendue ? Prise de panique, elle regarda les deux extrémités du couloir et les portes de peur d'apercevoir une silhouette arriver. Rien, mais elle ne devait pas rester ici. Elle tenta une autre porte mais la cabine était occupée : elle faillit réveiller une dame aux cheveux de blé qui se reposait. Elle referma doucement la porte jusqu'à ouvrir une dernière cabine inoccupée. Ouf !

Elle observa un moment les lieux : une casserole, des écrits auxquels elle ne comprenait rien, et des dessins de la mer et d'un homme. Fouillant la cabine sans déranger les parchemins elle finit par trouver une belle quantité de pain. Elle prit trois miches de pain avec elle qu'elle ferait durer et s'empressa de détaler. Elle rouvrit précautionneusement la porte qui menait au pont mais ne passa pas par la grille : elle prendrait trop de risque en se rendant jusque là-bas. Elle repassa par le mess, fouilla le comptoir rapidement pour emporter un couteau et prit une chope qu'elle remplit de tisane pour plus tard. Son butin avec elle, elle regagna rapidement la cale où elle avait aménagé son coin plus confortablement avec tapis et coussins, déplaçant quelques caisses pour mieux se murer et fit ensuite d'un demi-pain son repas de fortune.



Vos personnages ont pu entendre crier, entendre des bruits, avoir aperçu une silhouette qui ne leur évoquait rien, Sloan peut constater qu'il lui manque du pain ou Manga qu'il manque un couteau et une chope dans le mess. De là à imaginer qu'il y ait quelqu'un dans la cale…
Manon
[Sur l’Etoile - 23 juillet]



Plume et encre pour un rapide pli à destination de Lyviia avant d'aller tenir compagnie à Pipo qui semblait bien malheureux sans sa compagne.



A toi,
Belle de mon coeur,
Soleil de ma vie.

Bonjour ma jolie,

Je devrais commencer cette missive par un semblant de crise de jalousie puisque je n'ai aucune nouvelle de toi à ce jour mais j'ai la cagne, doublée d'une dose d'alcool dans le sang point encore totalement dissipé par l'unique faute de celui qui m'a volé la place dans ton coeur.

Comment vas tu? Que fais tu? M'aimes tu toujours?

Ô toi qui ensoleilles mes jours et enivres mes nuits, ton absence est dure à supporter, bien plus que je ne l'aurais pensé.

Trêve de mielleries ma chérie, j'ai du potin tout frais à te raconter!

Voilà déjà quelques temps que la comtesse tressée et le discret barbu ne se quitte plus mais jusqu'alors rien ne laissait à soupçonner une évidente relation plus intime.

Alors cette nuit, je fis irruption au mess sous prétexte d'avoir oublié mon foulard et ....
Ho ma jolie, j'en suis si chamboulée que je n'arrive pas à trouver les mots.

En résumé, plus jamais je ne poserais un doigt sur cette table!
Tu ouvriras ton bouquin à la page cinq ou six de mémoire et tu comprendras plus aisément la gêne que j'ai à te raconter plus en détail.
Par chance, les tresses Aryannesque ont caché de ma vision de quoi devoir aller me confesser en rentrant.

Après, je t'avoue que j'étais si imbibée que peut être ma vue m'a joué des tours.

Il n'en reste pas moins que ces deux là sont ensemble depuis plus d'un mois et que nous n'en avons rien vu. Je ne sais pourquoi ils se cachent de la sorte mais espère fortement ne plus jamais être témoin de cette embarrassante scène qui n'en était peut etre pas une d'ailleurs.

Nous remettrons donc - encore - la faute sur Pipo dont la main ne cesse de faire couler l'alcool à flot.

Voilà donc pour les nouvelles du jour en espérant que tout se passe pour le mieux de ton côté.

Je t'embrasse bien fort.

Manon.

Ps : Bon d'accord, cette révélation est un peu - beaucoup - exagérée mais un potin non amplifié n'en est pas un, non?

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