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[RP] Galère éphémère pour folie inassouvie

Ayorjo




[ Au Sanctuaire Taurin - 25 de Julh ]


Après quelques jours d’une traversée entre Alexandrie et le sanctuaire Taurin, le groupe de voyageurs débarqua sur cette plage d’un bout du monde, où chacun partirait à quelques achats locaux, ou autre expérimentation de voltige, ou tout simplement pour profiter encore un peu de la dernière étape terrestre avant le grand voyage de retour vers des terres moins inconnues. A bord de l’Etoile, il y eut des moments de rire, des moments de révélations, quelques discussions sur la relation d’un barbu et d’une tressée, qui après s’être posés des questions sur une peut-être trop grande discrétion finirent par se rassurer mutuellement, continuant de trouver leurs moments partagés toujours aussi parfaits, comme ils aimaient à les qualifier.
En ce premier jour eut lieu un baptême, où tous étaient réunis autour d’un capitaine qui prendrait l’eau cette fois-ci. Ayorjo avait abandonné toute crainte à l’idée d’y assister, trouvant dans le contact de la main et dans le regard d’Aryanna toute la confiance, la complicité et le soutien qu’elle lui apportait dans la confidence de sa foi Averroiste, dont il lui avait fait part il y avait maintenant quelques temps. Ils ne se quittèrent que peu des yeux, lors de cette cérémonie, et ne se séparèrent que rarement -mais cela n’était pas vraiment inhabituel- alors qu’ils découvraient ensemble les lieux inconnus pour la fuxéenne.
Néanmoins, il était prévu qu’ils fassent partie de l’équipage de la Yemaya pour le retour, et il n’était jamais trop tôt pour entreprendre le petit déménagement de leurs affaires, entre la cabine Etoilée et leur prochain lieu de vie, où ils savaient déjà qu’ils passeraient de nouveaux moments paisibles, ensemble.
Il n’était pas question, pour le barbu, de laisser Aryanna l’aider dans cette tâche relativement pénible, et pour le moins fatigante, alors qu’elle avait été blessée à la tête à peine quelque jours plus tôt. Il insista pour qu’elle le laisse s’occuper du transfert de leurs effets personnels, et c’est ainsi que, même s’il ne pouvait que rarement, et pour de courtes périodes se passer de sa présence à ses côté, l’oiselle s’éloigna, sous le regard bienveillant du barbu.
Quelques instants plus tard, alors qu’il se dirigeait vers la Yemaya, les bras chargés de bric à brac, un cri lointain atteignit ses oreilles. Un appel à l’aide, long et perçant, qui le fit se tourner instantanément dans la direction du pied de la fameuse falaise, qu’il pouvait apercevoir au loin depuis les vieux quais Taurins. Sans y réfléchir, il lâcha tout ce qu’il avait dans les bras et commença à courir, vers ce lieu qui avait été témoin de tant de malheurs, lui même ayant connu un sort douloureux il y avait de cela quelques mois. Il ne pouvait donc y avoir aucun doute, quelqu’un avait sans doute du se blesser, et avait besoin d’assistance...



Les azurs de Manon oscillent entre son amie et le chemin qui longe le pied de la falaise en une régularité presque mécanique. La panique commence à s’insinuer dans son esprit devant ce corps que l’on pourrait croire sans vie si ce n’était une respiration digne d’un profond sommeil. Si l’instant était à de plaisantines pensées, elle aurait pu contrer quiconque insinuerait que la belle au bois dormant émettait de lourd ronflement sonore durant son sommeil puisqu’à l’évidence, tel n’était pas le cas. Peut être aurait ce été plus rassurant ceci dit…
En l’état, la Lescurienne ne savait que faire pour aider la belle hormis de lui murmurer doucement son prénom entre deux hurlements d’appel au secours jusqu’à ce que Manga, suivit de près par Ayorjo apparaissent dans son champ de vision, accourant comme s’ils étaient pourchassés par un énooooorme monstre marin.

Au bout de sa course effrénée, le barbu aperçut Manon, dont il avait reconnu la voix dans cet appel à l’aide, et Manga, qui avait sans doute déjà accouru, penchées sur un corps allongé sur le sable, apparemment inanimé. Un regard sur des jambes chaussées de bottes usées et son coeur sembla s’arrêter. Il s’approcha au plus près, sentant ses jambes se dérober et s’écroula alors, les genoux se plantant dans le sol, devant l’oiselle qu’il pensa alors sans vie.
Pendant un instant, il ne pu réagir, il ne vérifia même pas si elle respirait encore. Il ne pensa qu’au pire, elle était partie et son monde s’écroulait.
Mais en la regardant, les yeux embués et le coeur serré, il remarqua un léger mouvement animant encore le corps étendu, une lente respiration qui soulevait le haut de la frêle silhouette. Il se pencha doucement vers elle, le désespoir faisant place à un soulagement incommensurable quand il entendit ce léger souffle, témoin du signe qu’elle était encore en vie.
Mais il ne savait que faire, il restait tétanisé malgré tout, comme incapable de prendre la moindre décision face à cette situation qu’il ne comprenait pas. Il se tourna vers la Comtesse de Vénès, à la recherche d’aide, de compréhension, ou encore du déclencheur qui le sortirait de sa torpeur pour enfin réagir et venir en aide à sa bien aimée.


L’esprit enclenche une analyse de toutes les possibilités alors qu’encore une fois, Manon se gronde de n’avoir suivi plus assidûment son cursus médical. Que fait on des blessés sur un champ de bataille? On les “ramasse” et les rapatrie au plus vite sans même réfléchir à l’éventualité de dégâts supplémentaires dû au transport. La logique aurait voulu qu’à l’instant, l’on fasse de même avec la Comtesse de Montfa mais elle ne pourrait jamais s’en remettre si cette action avait des conséquences dramatiques d’autant qu’elle était bien placée pour se souvenir du double choc crânien. Or, devant la tétanie de l’amoureux, elle se devait de prendre ce genre de décision dont la moindre erreur pouvait s’avérer fatale.

Elle a trébuché du haut de la falaise” répond t’elle rapidement à Manga et Ayorjo pour qu’ils puissent analyser la situation avec elle. “Je … je n’ai pu la retenir que d’une main et nous sommes tombées toutes les deux.” Elle marque une légère pause avant de reprendre succinctement. “ Son corps a amorti ma chute mais nos têtes se sont percutées et …” Son regard revient sur son amie inerte. “ Elle est ainsi depuis…

Je propose de ne pas la déplacer… pour l’instant. Peut être simplement la tirer un peu vers le pied de la falaise.” Il ne manquait plus que la mer monte pour ternir un peu plus le tableau, ce qu’elle veut absolument éviter. “Qu’en pensez vous?

Ayorjo écouta le court récit, son esprit ayant encore du mal à mettre en ordre les événements et les décisions qu’ils se devaient de prendre. Une chute, un accident… Et une oiselle blessée et inconsciente au pied de cette falaise d’où certains sautaient, mais finissaient toujours par se relever. Mais elle, elle ne se relevait pas.
Il releva enfin la tête vers la lescurienne, puis tenta de se reprendre quelque peu.
Oui, amenons la un peu plus haut sur la plage…
Se redressant difficilement, encore secoué, le barbu vint alors glisser ses bras sous les épaules d’Aryanna, prenant soin de ne pas brusquer le corps endormi qui ne ressemblait alors qu’à une poupée de chiffon désarticulée, ajoutant encore l’impression de fragilité qui émanait de la frêle jeune femme, qu’il fit alors doucement glisser sur le sable, afin de l’installer à quelques pas de là.


Laissant entre les deux bonnes et sûres mains du Selène la Comtesse tressée, la brune courut au bateau nonobstant le martèlement incessant de son propre crâne et la douleur qui étreignait le côté de son front sous le cuir chevelu. Elle cala sous un bras quelques couvertures et fourra dans une besace toutes les gourdes remplit d’eau claire qu’elle pu trouver ainsi qu’une fiole d’un alcool quelconque et quelques linges à imbiber. L’espoir de croiser le capitaine-médecin Pipo s’évapora devant son évidente absence, la faisant repartir tout aussi vite jusqu’au pied de cette - définitivement - maudite falaise.

La Comtesse de Vénès ne s’était éloignée qu’un court moment, lors duquel Ayorjo s’était alors penché sur l’oiselle, tentant de percevoir la moindre réaction en lui murmurant à son oreille “
Aryanna, ma chère, m’entendez vous ? ”, mais sans le moindre résultat espéré. Désemparé, il lui avait simplement pris la main, action illusoire pour lui indiquer une présence dont elle ne pouvait pas se rendre compte en cet état, mais geste évident de l’homme aimant envers celle qu’il pensait avoir perdu quelques instants plus tôt.
Quand la brune revint chargée d’un attirail nécessaire aux quelques premiers soins qu’ils pourraient lui apporter, ils entreprirent alors ensemble d’installer le plus confortablement possible la belle endormie.
Ayorjo la releva précautionneusement, pour laisser à Manon le soin de glisser quelques couvertures sous son amie. Le barbu, dans un éclair de lucidité, profita de l’opération pour vérifier tout indice d’une blessure ouverte, mais l’absence de marque de sang laissa présager que la seule conséquence de cette chute accidentelle était cet état d’inconscience dont Aryanna était victime. L’inspection rapide et médicale fut renouvelée alors qu’il fit légèrement rouler l’oiselle sur son autre flanc, afin de terminer l’installation de ce matelas de fortune.
Ils déposèrent ensuite sur son front un linge humide, dans l’espoir que ce frais contact puisse aider à faire sortir la tressée de son sommeil forcé et inexpliqué.
Mais elle n’ouvrit pas les yeux, elle n’eut de réaction à aucune des attentions qu’ils lui portèrent, et ils finirent par rester tous deux impuissants devant l’état de la fuxéenne allongée sans autre signe de vie qu’une lente respiration.
Mais il suffisait sans doute d’attendre, quelques instants, qu’elle se réveille simplement.
Ou quelques heures, il savait que cela était possible après un choc, après une telle chute.
Mais…
Une terrible angoisse s'empara de lui. et si… et si elle ne se réveillait pas ? Et si il ne la retrouvait pas ? Une effroyable perspective qu’il ne pouvait même pas imaginer. Alors il se retourna vers Manon à qui, dans un regard sans nul doute plein de détresse témoignant de l’inquiétude du barbu dans toute son apogée, il demanda :
Elle va se réveiller, n’est-ce pas ?

Tout aussi impuissante que lui, Manon tenta de ne rien laisser transparaître de sa propre angoisse à travers un regard qu’elle imagina ferme et rassurant. "Oui, sans le moindre doute."
Aryanna n’avait d’autres choix que de se réveiller, il ne pouvait en être autrement. Si le Très-Haut avait eu compassion des suicidaires toulousains, il paraissait évident qu’il n’emporterait pas la noire par abus de maladresse Aryannesque. Au fond d’elle, une lueur d’incertitude refrénée par un caractère affirmé toujours aussi dépourvue de mots réconfortants à l’égard de ceux qui ne lui était pas extrêmement proche… comme l’homme désespéré qu’elle avait en face d’elle.



RP écrit à quatre mains, entre ljds Manon et Ayorjo

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Sowelo
Sanctuaire taurin de Séleucos, le lundi 25 juillet en fin d’après-midi


L’après-midi était bien avancée lorsqu’ils commencèrent l’ascension de la falaise, le baptême ayant prit une bonne partie de celui-ci. Terminé, il ne leur restait à tous qu’une chose à faire ici si ils le souhaitaient : sauter dans le vide depuis le haut de la falaise… et s’écraser dans le sol. Une épreuve de foi à laquelle s’adonnent certains afin, paraît-il, de rencontrer leur Créateur, et les deux êtres montant pour s’y livrer étaient très différents dans leurs visions et les attentes de celle-ci.

Sowelo, lui, ne voyait là, le plus souvent, qu’une pure folie suicidaire depuis quelques mois. Si l’on voyait le Créateur, dont il doutait parfois de l’existence même, pour lui c’était qu’on était mort et que la vie s’arrêtait. Une folie… mais il était surtout curieux, et le nombre de personnes qui ont déjà tenté l’expérience et s’en sont sorties pour en parler est assez élevé pour qu’il se laisse tenter… mais avec beaucoup d’appréhension, sa soeur étant revenue en rampant vers leur feu de camp. La peur de mourir était sans doute ce qui le tétanisait le plus… peur qu’on ne pouvait lui reprocher au vu de l’épreuve.


Cerièra avançait d’un pas assez lent mais confiant, s’efforçant d’être «dans l’instant» et de graver dans sa mémoire ce moment qu’elle avait attendu, après tout c’est pour cette expérience qu’elle avait tenu la barre une vingtaine de jours plus que pour quelques emplettes… le reste, tout le reste, c’était la cerise sur le gâteau si l’on peut dire. Ce qui avait changé pour elle c’était Sowelo à ses côtés : si il y a quelques mois elle se fichait de l’issue du saut «le Créateur fera ce qu’il voudra de moi», cette fois-ci elle ne souhaitait pas mourir. Pourquoi sauter alors ? Ça s’appelle la confiance, la confiance dans le fait qu’une vie ne lui serait pas refusée… mais qu’elle pourrait sans doute toucher à une quelconque vérité qui valait bien tous les voyages du monde.
Un pas assez lent aussi, plus prosaïquement car elle cherchait à éviter de se faire mal aux pieds sur les pierres. Elle jeta un rapide regard en coin à Sowelo et dans un sourire amusé lui glissa :
J’aurais dû mettre des chaussures ! Avant de reporter son regard sur le sol, histoire de ne pas faire de bêtises…


Souriant amusé, Sowelo lui répondit :
C’est une manière de demander “Peux-tu me porter ?” ou je rêve ? Cerièra lâcha un petit rire, amusée par sa réponse. Même si il savait que ce n'était pas pour ça, il n'avait pas pu s'empêcher de le dire. Il le faisait de plus en plus depuis qu'il fait la formation d'avocat… interprétation des phrases, tout ça tout ça, et disait à son entourage comment il pouvait comprendre les choses. La porter ne l'aurait pas dérangé, après tout elle est légère Cerièra, mais elle lui signala qu'elle préférait monter elle-même. C'est donc côte à côte et main dans la main qu'ils montèrent tranquillement, prenant leur temps, jusqu'au sommet de la falaise, arrivant quelques minutes plus tard pour que Cer découvre la vue, Sowelo ayant déjà grimpé plus tôt dans la journée, espérant ainsi calmer ses peurs.


Le piton rocheux surplombait la plage à l’ouest, au nord il donnait directement sur la mer. Même si la vergue faisait parfois pour Cerièra un plongeoir idéal, sauter dans l’eau de cette hauteur serait stupide étant donné le peu de profondeur de la mer sur la côte. Et une baignade n’était pas l’objet de cette ascension. Le soleil semblait comme désigner l’ouest, chose logique en cette fin d’après-midi. C’était le sable qu’il fallait viser pour décrocher un entretien avec le Créateur. C’est donc face à l’astre qu’ils se tiendraient en rassemblant leur courage.

«Ça y est, nous y sommes…», voilà ce qui passait à travers le crâne de la griotte alors qu’un vent léger venait balayer ses cheveux et la houppelande blanche dans laquelle elle avait baptisé Pipo plus tôt. N’avait-elle pas eu le temps de se changer ? Évidemment que si, mais garder sa tenue d’officiante pour ce moment lui avait paru couler de source. Depuis qu’Antoynette lui avait raconté son voyage elle était déterminée à sauter, elle ne faillirait pas, mais voilà : une fois l’endroit et le moment venu, elle ne savait pas comment faire. C’est qu’elle s’était préparée à sauter seule, pas à deux, même si étrangement, dès que Sowelo lui avait dit que c’était pure folie alors qu’ils n’étaient encore qu’amis, le voir s’inquiéter pour elle avait fait naître en elle le souhait qu’il soit à ses côtés à ce moment-là. Mais main dans la main, ça, elle ne l’aurait pas imaginé…
Main de son brun qu’elle serra doucement devant le panorama qui s’offrait à eux de là-haut : la vue était à couper le souffle, ils pouvaient apercevoir les pêcheurs minuscules en bas espérant faire quelques sous de leurs bulots, les deux naves côte à côte amarrées tant bien que mal dans la soirée de la veille et les traces noires des divers feux de camp, éteints à cette heure, comme ponctuant la plage à perte de vue. Elle releva le regard vers son vairon pour lui dire simplement dans un sourire ému :
Je t’aime de tout mon cœur. Pourquoi ces mots ? Parce que quoi que ce soit d’autre lui aurait semblé complètement décalé.


Dans la tête de Sowelo, c’était “Dans quelle galère me suis-je encore fourré… quelle folie ais-je tout à coup ?”. Car lui, il était loin, très loin d’être venu pour ça… mais à force d’écouter certaines personnes, la curiosité prend le dessus. Serrant la main qui était dans la sienne et profitant du superbe panorama auquel ils avaient droit, il se posait des questions… jusqu’au moment où il entendit sa cerise. A sa phrase, il lui rendit son sourire puis lui dira
“Moi aussi je t’aime ma chérie”

Puis vint l'heure du grand saut après quelques minutes de contemplation méditative. Ils décidèrent de prendre un peu d'élan et reculèrent donc… ils se mirent en place, toujours main dans la main et commencèrent à courir ensemble, d'un même pas, d'une même volonté en direction du vide devant eux, le vide donnant sur la plage en contrebas, le vide… vers le saut de la foi. Ils continuèrent jusqu'à arriver au bord, plus qu'un pas, un saut… et ils plongeaient. Mais, si Cerièra n'eut aucun mal à le faire, Sowelo, lui, ralentit d'un coup, ralentit à cause de la peur, une peur qui le prit d'un coup, au plus profond de ses entrailles… mais pas assez pour s'arrêter, non… il ne pouvait plus et malgré le manque d'élan, voyant Cerièra sauter, il sauta sans lâcher sa main. Un saut minime… pas assez fort pour éviter une extension rocheuse en contrebas, étrangement très coupante et s'enfonçant dans le dos de Sowelo, coupant tant la chemise que la chair jusqu'à l'épaule droite, lui, poussant un cri de douleur avant que son esprit ne plonge dans l'obscurité.


RP avec les quatre mains et les deux cerveaux lents des Jd Cer & Sow
Manon
[Sanctuaire Taurin - Nuit du 27/28 juillet]



Une heure du matin.

S’il n’était pas dans les habitudes de Manon de veiller si tardivement, les derniers évènements avaient contrarié son cycle de sommeil habituel, tant et si bien qu’elle pu trouver compagnie nocturne auprès des oiseaux de nuit Yemayens encore éveillés autour d’un feu de camp. Quelques nouvelles quant à leur rétablissement avant de se voir informée qu’aucun changement n’était apparu pour la Comtesse tressée. Laissant alors les Fuxéens à leur intimité, Manon s’était dirigée vers la Yemaya afin de tenir chevet à la belle endormie.

Le léger bruit de la porte de la cabine ne réveilla pas Ayorjo qui n’avait pas du quitter son poste depuis. Elle s’était alors assise sur le bord de la couchette, glissant dans sa main celle d’Aryanna pour partager avec elle l’énergie dégagée d’une longue prière silencieuse. Elle déposa un léger baiser sur le front de l’oiselle et s’apprêtait à quitter la pièce lorsque son regard tomba sur la petite boule de pics roulée sur le mouchoir d’Antoynette. Elle saisit délicatement les bords du tissu pour faire glisser le hérisson dans sa main sans lui faire quitter son lit de fortune et murmura à Ayorjo qui se réveillait “Je vais m’en occuper. Prenez soin d’elle en paix.” Non point qu’il n’aurait su en prendre soin mais c’était la moindre des choses qu’elle pouvait faire pour son amie dont elle était certaine qu’elle aurait eu son accord. La main de la Lescurienne se posa sur l’épaule du Selène en un geste de réconfort et de courage avant de prendre la direction de l’Etoile avec la petite bête.

A la faible lueur qui filtrait sous l’huis de sa cabine, le soulagement de savoir son époux encore éveillé. Le sortir de son sommeil juste pour pouvoir s’occuper du monde animal l’aurait exposé à une colère certaine, or, en l’état, elle avait autre chose à penser. Par chance, elle n’eut droit qu’à un regard dépité et un soupir étouffé. Parfait.

Aux azurs posés sur la piquante bestiole s’accompagnait le questionnement doublé d’une possible fugue dont elle aurait été fortement honteuse si au réveil de la noire, elle devait annoncer l’avoir perdu. Il suffit alors d’un coup d’oeil sur l’habitat de son escargot pour s’en emparer et le déposer sur la petite table.
La cage faite de ses mains de bois et de fer entremêlé était largement assez grande pour accueillir les deux animaux tout en limitant la promiscuité, laissant un espace suffisant à chacun pour se dégourdir les “pattes”. Elle déposa donc délicatement Boulapic dans l’enclos de la Flêche non sans oublier le mouchoir brodé offert avant de rajouter morceaux de pommes et eau fraîche. La cage fut soigneusement refermée et une chaise tirée devant elle pour se laisser aller à la découverte d’une peut être amitié naissante.

Alors qu’elle contemplait à la lueur d’une bougie le mammifère et le gastéropode se déplier chacun à leur façon, elle sentit deux mains se glisser sur ses épaules puis défaire le grossier noeud du foulard qu’elle portait pour dissimuler le renflement dû au double choc crânien de la chute dont le violacé commençait à s’étendre légèrement à la lisière du cuir chevelu.


Ils sont si mignons… murmure t’elle à celui qui dépose déjà ses lèvres dans son cou dans un je m’en foutisme certains. Regardez Julian comme sa petite patte semble aller mieux. enchaîne t’elle en ignorant les avances du brun. Croyez vous qu’il finira par guérir? Oh regardez son petit museau! Et blablabla insipide de bonne femme que le ténébreux n’entend même plus, trop occupé à tenter de détourner l’attention de la brune de ses sottises puériles. Il ne faudra pas plus que le blocage de sa main se faufilant sous la robe pour lui faire émettre un grognement agacé. Agacement qui se lit sur son visage tandis qu’il abandonne le parcours de ses mains pour frapper du poing sur la table et s’exprimer d’une voix sèche.

Escomptez vos délaisser vostre devoir conjugal pour… geste dédaigneux vers la cage.... ça?
Devant le sursaut suivi du regard noir de la brune et avant qu’elle ne parte dans un grand discours qui n’entraînera que dispute et rejet définitif, il se pencha à son oreille pour lui susurrer dans un sourire machiavélique... Vos troublez leur tranquillité en leur infligeant telle lumière et vos avez autant besoin de sommeil qu’eux.

Elle qui avait décidé de passer la nuit en une surveillance continue ne pu que se rendre à l’évidence d’une possible vérité dans les paroles de son sombre époux. Elle acquiesça et s’apprêta à se préparer pour la nuit sans compter sur la rapidité de son double à repartir aussi sec dans son ardeur, faisant tout de même preuve de douceur face à la saillie crânienne qui, par chance, ne la faisait pas souffrir hors du touchée. S’il n’avait jamais été brute, elle devait bien reconnaître qu’il se montrait encore plus délicat depuis la malheureuse fausse couche tout en attendant patiemment qu’elle puisse être de nouveau physiquement sa femme.

Le corps transpirant se détache de celui de son brun tandis qu’elle rallume une bougie afin de trouver de quoi se réhydrater. Un coup d’oeil curieux à la cage puis un cri aiguë.


Julian!! Il… il... Le regard horrifié est scotché devant le hérisson qui se délecte du baveux dont il ne reste plus qu’une coquille brisée. ... le hérisson a mangé mon escargot !!! Lui qu’elle traînait depuis l’Anjou venait de périr à cause de son manque de connaissance du monde des piquants.

Les larmes étaient proches devant cette fatalité mais aucune n’eut le temps de couler.
Le rire de Julian s’étala dans toute la cabine. D’un rire qu’elle n’avait jamais entendu, spontané, irrépressible, tant et si bien que l’on du l’entendre jusque sur le pont.
Elle découvrait encore une nouvelle facette et, même si celle ci était plus moqueuse que d’habitude, elle ne pouvait s’empêcher d’assimiler chaque rides provoquées par cette hilarité qui semblait jamais n’en finir.

En oubliant jusqu’à la perte de sa bestiole tandis qu’il riait et riait encore.

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Aryanna




[ Au fin fond des limbes aryanesques - au-dessus du temps ]


Au loin un cri qu’on pousse. Au loin elle entend qu’on appelle à l’aide. La voix distincte de la Comtesse de Vénès s’élève dans les airs et elle l’appelle, elle, Aryanna. Alors elle regarde, tout autour d’elle, à travers cette étendue de sable et d’eau. La falaise se tient derrière elle, mais elle ne sait d’où proviennent les cris.
Elle se sent flotter dans les airs, emmitouflée dans une douceur et une chaleur veloutée comme elle se sent enveloppée par les bras du brun, comme elle se sent lorsqu’avec lui elle glisse sur un petit nuage.
Les cris perdurent aussi part-elle à la recherche de leur origine. Quelque chose se serait-il passé ? Ses pieds nus glissent sur le sable chaud alors qu’elle prend la direction des vieux quais, de l’Étoile de Marseille. Ayorjo y est-il toujours, ou lui aussi a-t-il entendu les cris ? Elle marche lentement, à petit pas, alors qu’elle ne voit personne encore. Les cris se sont arrêtés et son nom, tel un murmure, une litanie douce et envoûtante, résonne dans sa tête «
Aryanna, Aryanna ». Elle a beau regarder alentours pourtant, elle ne voit rien ni personne. Aussi poursuit-elle lentement son chemin. A bord de l’Étoile, elle ne trouvera personne. La cabine occupée durant le voyage avec le barbu n’a pas changé, mais quelque chose semble différent. Tout semble vide, sans vie. Boulapic a même disparu de son petit lit improvisé, le mouchoir d’Antoynette qu’il affectionne tant. L’aurait-on emmené pour une balade à l’air pur ? Tout est possible, même si cela l’ennuie. Aussi après un tour du bateau vide, elle fini par redescendre. La même recherche serait effectuée sur une Yémaya toute aussi vide. Dans sa redescente lente et prudente, elle emprunta le chemin pour se rendre autour d’un feu de camp éteint..
Elle ne veut pas se perdre, alors elle ne s’éloigne pas trop. Elle s’interroge sur leur absence à tous, peut-être sont-ils partis dans une excursion sans elle. Que faisait-elle d’ailleurs pour avoir raté leur départ ? Sont-ils partis pour Jérusalem ? Dans son souvenir, la ville ne se trouve pas très loin d’ici. Mais l’hypothèse paraissait improbable. Que ce soit Cerièra, Ayorjo ou Manon (même tous les autres), jamais ils ne la laisserait en arrière comme ça, sans aucune explication qui plus est. Aussi reste-t-elle là, assise dans le sable, genoux repliés en dessous de sa tête. Elle attend.
Elle ne sait pas combien de temps elle est restée ici, immobile. Rien n’a bougé. A croire que le temps s’est suspendu, c’est la dernière réflexion qui lui vient à l’esprit alors qu’elle ferme les yeux, sans toutefois pouvoir trouver le sommeil. Elle attend.
Tout à coup, elle entend la voix d’Ayorjo qui l’appelle, il est tout près, mais elle ne rouvre pas les yeux, pas tout de suite, l’oiselle le laisse approcher. Or, son «
Oui ? » enjoué finit par mourir sur ses lèvres, alors que trouvant qu’il met du temps à venir se glisser près d’elle, elle finit par rouvrir les yeux. Le constat est sans appel : Il n’est pas là. Ses onyx balayent le paysage à la recherche d’une âme, à la recherche du barbu, mais force est de constater qu’il n’est définitivement pas là. Aurait-elle rêvé ? Aurait-elle imaginé cette voix ? Ou l’aurait-elle même confondue avec une autre ? Impossible. Inconcevable. Insensé. Confondre cette voix grave de baryton aux notes chantantes et douces n’est tout simplement pas imaginable. Cette voix qui l’enveloppe toute entière à chaque mot, cette voix profonde et claire qui la rassure aussi sûrement que lorsque sa main aux longs doigts fins vient prendre la sienne, recouvrir ses petits doigts et les serrer avec délicatesse. Cette voix qui a la douceur et la chaleur d’une étreinte. Cette voix qu’elle reconnaîtrait entre mille tant son esprit n’entend plus que lui lorsqu’il ne prononce même qu’un mot. Aussi a-t-elle du rêver. La solitude la rendrait-elle folle ?
Mais, peu à peu, alors que parfois elle entend qu’on lui parle, alors qu’elle regarde tout autour d’elle, la montfanéenne se rend compte que tout cela est bien le fruit de son imagination. Ces voix lointaines lui demandent parfois de se réveiller, alors elle comprend que tout ça n’est bien qu’un rêve.
Rêve étrange dans un désert de solitude infini.
Elle aimerait bien se réveiller toutefois et accéder à la demande de ses amis qu’elle entend, mais elle n’y arrive pas. Dort-elle profondément ? Est-ce là juste une autre partie de son rêve ? Son corps est-il juste blotti contre celui de son brun, alors que son esprit s’amuse à la tourmenter par un rêve qui revêt davantage des airs de cauchemar inquiétant que des notes joyeuses et colorées ? Elle s’interroge, alors qu’à nouveau elle ferme les yeux, elle écoute le silence environnant. Ce silence assourdissant qui n’est pas même rompu par le ressac des vagues, par le bruit d’un oiseau, ou celui du vent qui glisse dans les feuilles de palmiers et soulève le sable. Tout ici respire le calme, la tranquillité, la sérénité même. Mais tout ici exacerbe la solitude, le sentiment d’abandon, la… mort ? Cette simple pensée la convainc qu’il n’est pas temps de s’endormir ici. Car, ne dit-on pas que s’endormir dans ses propres rêves est le gage d’un sommeil éternel ? Aussi ne s’endormirait-elle pas, non seulement parce qu’elle préférait Cent Ans de Solitude* plutôt que d’imaginer même ne jamais revoir ses amis et les abandonner à jamais.

Elle avait fini par se relever de son coin de sable. Le temps était venu pour elle d’explorer davantage cet endroit étrange et pourtant si apaisant. Elle avait franchi la palmeraie sans une seule découverte, avant de se décider à faire demi-tour. La falaise avait été gravit avec rapidité et sans anicroches et arrivé à son sommet elle avait regardé le lointain un moment… Ce soleil qui ne décroît jamais, cette chaleur bienheureuse sans être étouffante, l’eau calme et scintillante avec les reflets du soleil. Ses yeux avaient fini par se poser sur la petite cabane du marchand de filets et de bulots. Pourquoi est-elle toujours là ?
Après avoir hésité un instant à sauter pour regagner le sol - car c’était bien son rêve, ne pouvait-elle pas y être immortelle ? -, l’oiselle avait préféré regagner la plage par une descente bien plus traditionnelle et réfléchie. La voie terrestre et sûre plutôt que la voie aérienne et dangereuse.
Elle poursuivait ses pérégrinations délirantes avec lenteur, toujours. Ne sachant réellement où tout cela pourrait la mener. Mais, quoi qu’il en soit, elle irait. N’importe où. Jusqu’à ce que son sommeil paradoxal ne s’arrête et que l’instant du réveil se fasse sentir. Elle suivait le chemin que traçait son inconscient avec perplexité. Pour sûr, le lendemain, au réveil, elle aurait quelque chose d’improbable à raconter au brun. Et elle y songeait déjà. S’éveiller dans ses bras, le regarder ouvrir ses yeux gris et glisser à nouveau sa tête au creux de son épaule avant de lui souffler, tout doucement : «
Vous ne devinerez jamais quel rêve étrange j’ai fait cette nuit, Ayorjo ! ». Mais pour l’heure, plutôt que de songer à ce qu’elle pourrait bien lui raconter comme histoire farfelue, aux mots qu’elle pourrait bien utiliser, elle était arrivée devant l’antre du marchand. Devant cette petite porte de bois sombre qu’elle hésitait à pousser. Elle ne savait ce qu’elle y trouverait derrière, aussi cela l’inquiétait-elle.
Prenant finalement son courage à deux mains, elle avait poussé la porte de cette cabane et était entrée. Happée par l’obscurité intérieure, elle avait eu la sensation de tomber. Tomber dans le vide. Elle ne sait pas combien de temps avait durée cette chute, ni combien de temps elle était restée à terre, mais lorsqu’elle ouvrit les yeux force était de constater que la chaleur de l’endroit était étouffante. Il faisait sombre, la seule source de lumière provenait d’un peu plus loin, à l’issue d’une sorte de couloir. La jeune femme s'était relevée avec lenteur et précaution, avant de s’aventurer vers cette source de lumière. Ce rêve évoluait de plus en plus étrangement. Et au fur et à mesure qu’elle avançait l’air devenait irrespirable, lourd et chaud, presque suffocant. Elle avait avancé à petits pas, jusqu’à cette lueur vive, jusqu’à faire face à une scène bien étrange, scène où elle ne pouvait intervenir, comme retenue par une force invisible. Devant elle, dans cette salle prise par les flammes, une enfant allongée sur le sol, recroquevillée à terre, cramponnée à une étoffe rouge. Un morceau de tissu rouge sang, qui lui rappelait étrangement celui qu’elle détenait toujours sous sa ceinture. Le linge de sa naissance. Et alors qu’elle ne pouvait courir rattraper la noiraude, elle laissa échapper, dans un souffle, un : «
Relève-toi ! ». Sa vision se trouble alors qu’une douleur fulgurante lui traverse le crâne, à cet instant précis, elle ne voit plus rien, jusqu’à ce que cette sensation d’étouffer la reprenne.
Elle sanglote, tout doucement. Sa respiration est difficile alors qu’entre deux gémissements de douleur, elle tousse. Son épaule la fait souffrir et blotti contre son éternel compagnon de tissu elle n’arrive plus à bouger. La fumée âcre s’infiltre dans ses petits poumons d’enfant, elle n’arrive pas à se relever, pourtant il le faudrait. Elle s’est tordue la cheville en se prenant le pied dans le chambranle de la porte, dans sa précipitation à vouloir sortir. L’oiselle se sent seule, abandonnée, alors elle se replie un peu plus sur elle-même et pleure toujours, comme si la peur des flammes se déversait dans un flot ininterrompu de larmes. A cinq ans elle ne comprend pas ce qu’il se passe, réveillée par l’absence d’air, la chaleur et le son du feu qui fait craquer le bois, elle n’a pas réfléchi longtemps avant de courir dans le couloir pour essayer de rejoindre l’extérieur. L’air se fait rare lorsqu’elle respire et c’est bien davantage de fumée qui franchit la barrière de ses poumons que de quoi alimenter ses poumons et son corps en oxygène. Doucement elle se sent glisser dans le sommeil, un sommeil bienvenu et bienveillant qui engourdit ses membres, anesthésie son cerveau et l’enveloppe toute entière. Mais c’est alors qu’elle ferme lentement les yeux qu’elle sent deux bras la soulever dans les airs. Aussi la petite fille rouvre-t-elle les paupières pour fixer de ses grands yeux noirs reconnaissants le visage d’Anselme. Et alors que le petit corps s’affaisse dans les bras salvateurs, alors qu’il l'entraîne jusqu’au dehors, un souffle, une flamme. Ses yeux s’écarquillent devant la vision d’horreur d’un visage atteint par les flammes, alors que les larmes continuent de couler sur les petites joues rebondis. Mais l’enfant n’a pas le temps de réagir, déjà Anselme s’écroule avec lenteur sur le sol après l’avoir lâché. Ce visage à la peau en liquéfaction sera sa dernière vision avant que la jeune Aryanna ne tombe sur le sol de la cour intérieure du couvent des Grands Augustins et ne se cogne lourdement la tête contre la pierre...


Stupeur. Les yeux se rouvrent.



[* Gabriel Garcia Marquez]

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Devise - en sanskrit : Véda prasthâna dijvassia.
Le savoir est source de la vie. Ou la source de la vie est celle qui sait, soit : la femme sait
Ayorjo
 
 
 
[ « Il n’y a pas de longue journée qui ne se termine par une nuit »* - après-midi du 28 de Julh, dans une cabine yémayenne ]


Le réveil en terre inconnue.
Trois jours, elle était restée trois jours isolée du monde. Trois jours seule avec elle-même, à écouter les uns et les autres, à répondre même sans qu’on ne la comprenne. A l’issue de son délire pyromane, de sa course folle dans un couloir interminable, elle avait toutefois rouvert les yeux brutalement dans… un lit ? Elle ne se souvient plus de sa rencontre avec ses souvenirs, de l’aventure qui a eu lieu dans son cerveau, mais elle est éveillée. Et alors qu’elle se redressait, non sans étouffer un gémissement douloureux, l’oiselle avait regardé tout autour d’elle. Le bois, l’humidité ambiante, un hublot ? Il ne lui fallut pas longtemps pour que son cerveau comprenne qu’elle était sur un bateau. Mais que faisait-elle donc ici ?
Tout à ses interrogations, elle cligna doucement des yeux pour s'accommoder à la lumière de la petite pièce, et ceux-ci s’étaient posés sur… Ayorjo ? Elle n’y comprenait absolument rien, que faisait-elle ici, qui plus est avec le brun. Et alors qu’elle retenait une grimace de douleur, sa tête et son dos la faisant souffrir, elle comprit. Même si elle ne savait pourquoi elle se trouvait ici, ou même quel jour on était, sans oublier l’endroit où elle se trouvait, son mal de crâne pouvait expliquer la présence du chaurien non loin d’elle. Se demander si elle était tombée n’était pas excessivement pertinent, car à n’en pas douter elle avait du se prendre les pieds dans quelque chose, ou glisser. Dans un cas elle devrait commencer à faire attention à où elle mettait les pieds, dans l’autre Il faudrait donc qu’elle finisse un jour par changer cette paire de bottes, tâche qu’elle remettait toujours au lendemain. Si elle était tombée, Ayorjo étant médecin, sa présence paraissait donc tout à fait indiquée. Aussi est-ce dans un souffle qu’elle finit par le saluer :

«
- Bonjorn...
- Aryanna !
»

Prononcer son nom, dans un mélange de surprise et de soulagement, fut la première réaction d’Ayorjo, alors qu’il entendit l’oiselle prononcer ce léger son, un simple bonjorn, comme si elle se réveillait simplement après une des nuits paisibles qu’ils avaient partagé tout au long du voyage.
Il l’avait veillée à son chevet pendant trois jours, trois longues journées d’angoisse alors qu’elle ne sortait plus de son état d’inconscience, prisonnière d’un sommeil sans fin, mais où elle semblait pourtant si paisiblement installée. Cerièra et Sowelo avaient été de précieux soutiens en ces moments difficiles, mais rares avaient été les moments où il avait quitté ce petit tabouret, assis à proximité, guettant toute réaction, et, il devait bien l’avouer, avec cette peur que la vie finisse par s’échapper du corps de la fuxéenne. Parfois, il lui avait semblé qu’elle allait se réveiller, un léger mouvement se faisant remarquer, mais jusque là, elle était restée immuablement inanimée.
Alors, quand il entendit le son de cette voix qu’il avait tant désespéré d’entendre à nouveau, il s’approcha, s’agenouillant au pied de la couchette, lui prenant les mains et fixant ses yeux noirs, il afficha sur son propre visage un léger sourire qu’il voulut rassurant, lui glissant tout doucement :
Bonjorn…
Et il ajouta :
Ne vous relevez pas trop vite, le choc a été important, il faut prendre votre temps…

Interdite. Elle était restée interdite alors qu’elle l’avait regardé s’approcher, puis s’agenouiller près d’elle. Au contact de ses mains sur les siennes, elle l’avait regardé sans comprendre. Et elle se questionnait sur cette proximité improbable et incroyable, alors que ses yeux noirs oscillaient entre les yeux clairs et ses mains sur les siennes. Elle sentait ses joues se colorer tout doucement alors que, gênée, Aryanna ouvrait et refermait la bouche sans qu’aucun son ne s’en échappe. Toutefois, au bout d’un instant, elle finit par souffler, tout doucement :

«
Où… sommes-nous ? »

Parce que si elle avait compris qu’elle se trouvait sur un bateau, évidemment, il fallait maintenant répondre à toutes les autres questions laissées sans réponses. Combler les vides, assembler les morceaux de puzzle jusqu’à donner un tableau tout entier.
Et les onyx étaient revenus fixer le barbu. Son cerveau était peu à peu arrivé à la conclusion qu’il y avait eu quelque chose d’assez inquiétant pour qu’il soit nécessaire de laisser un médecin près d’elle.

Aux yeux du barbu, l’oiselle semblait complètement perdue, ce qui s’expliquait facilement après ces quelques jours d’inconscience.
Les hésitations dans son attitude, la façon dont elle avait réagi alors qu’il s’était approché d’elle, et enfin, la timide question qu’elle venait de lui poser ne faisait aucun doute sur le fait qu’il fallait lui laisser le temps de remettre ses idées en place.

Nous sommes sur La Yemaya, Aryanna” lui répondit-il d'abord simplement.. Il se redressa et s’installa ensuite au bord du petit lit, et continua son court récit.
Nous avons préféré vous installer ici, car vous voyant ne pas vous réveiller, vous laisser allongée sur la plage semblait peu confortable lors de votre… convalescence…

Ayorjo avait prononcé ces mots doucement, il se doutait que la tressée devant lui ne pouvait pas se rendre compte du temps qu’avait duré son absence, et lui annoncer tout ce qui s’était passé après sa chute pouvait être surprenant pour qui se réveillait dans un endroit qu’il ne se rappelait plus avoir rejoint, et il ne voulait pas l’inquiéter alors qu’elle venait à peine de rouvrir les yeux. Ainsi avait-il pesé ses mots, le récit des événements attendrait encore quelques instants.

Sur la Yémaya ? Et alors que la montfanéenne suivait les mouvements du médecin prévenant, avec attention, elle l’écoutait avec tout autant d’intérêt. Était-elle restée endormie aussi longtemps pour qu’elle ne remarque pas le chemin effectué depuis Foix jusqu’à la Yémaya ? Ayorjo avait-il fait tout ce voyage jusqu’ici parce qu’elle s’était sentie mal et parce qu’il était le seul à avoir bien voulu les suivre jusqu’à ce qu’elle retrouve ses esprits ? Elle ne comprenait pas. Lorsqu’elle pensait à la plage elle ne se souvenait pas avoir glissé ses pieds dans du sable depuis bien des années. Son nez s’était froncé tout doucement, alors qu’elle essayait de se souvenir. Mais rien ne lui revenait, un trou noir. Depuis le retour à Foix en compagnie de Cerièra et Sowelo, le retour de Tounis, elle ne se souvenait pas. Aussi c’est le visage blême et la voix mal assurée, presque tremblante, qu’elle posa les seules questions qui lui venait à l’esprit :

«
Nous sommes donc sur le départ pour Alexandrie ?
Je me suis reposée si longtemps depuis… Foix ?
Pourtant...
»

Voix altérée, en suspension dans l’air, elle essayait de se souvenir. L’une de ses mains avaient quittés celles d’Ayorjo pour venir se glisser sur sa tresse, maigre aide à sa tentative d’appel désespéré aux souvenirs. Or, mis à part un mal de crâne immense, le constat était clair : elle n’arrivait à rien.

«
Pourtant… je ne me souviens pas que... nous en soyons partis. » - conclue-t-elle dans un souffle, alors que sa respiration se fait plus saccadée et que la panique la gagne lentement. Aussi sont-ce des yeux mi-interrogateurs, mi-effrayés qui retrouvent ceux du chaurien.

Sur le départ…depuis Foix ?
A ces mots, Ayorjo leva un sourcil, ne comprenant tout d’abord pas où elle voulait en venir.
Il remarqua que l’oiselle était particulièrement pâle, l’inquiétude se lisait sur son visage.
Elle ne comprenait donc pas qu’elle se trouvait à bord de la Yemaya suite à sa chute mais… ne savait-elle donc pas qu’ils étaient arrivés au sanctuaire ?
Le cerveau du brun se mit à fonctionner, revoyant Aryanna allongée sur le sol au bas de la falaise, son sommeil inexpliqué, la chute, le choc…
Le barbu sentit son coeur se serrer lorsqu’il comprit, du moins supposa, que la noire venait de subir l’une des séquelles qui, d’après ses maigres connaissances, pouvait faire suite à ce genre de traumatisme : des souvenirs disparus, une perte de mémoire. Il la regarda, ne sachant comment lui expliquer, lorsque tout à coup une idée terrible lui traversa le crane. Une nouvelle réflexion, une recherche rapide dans ses propres souvenirs pour refaire le fil des semaines écoulées, “sur le départ”, “Foix”...
Et si elle ne se souvenait en rien de leur rapprochement ? Et si elle ne comprenait même pas sa présence en cet instant, à ses côtés ? Il reporta son regard vers leurs deux mains unies, et dans un réflexe, il laissa glisser la sienne pour ne plus qu’effleurer le bout des doigts de l’oiselle. Il releva les yeux vers son visage, la voyant qui commençait à paniquer quelque peu, et ainsi, si elle ne pouvait pas s’expliquer la prévenance d’Ayorjo, si elle ne pouvait comprendre cette proximité, et si elle ne se souvenait plus des heures et des heures passées ensemble depuis les préparatifs de ce voyage, il ne pouvait lui expliquer tout cela pour le moment sans lui ajouter une vague troublante de révélations.

Oh, ne vous inquiétez pas Aryanna” lui dit-il doucement, sur un ton qu’il voulut rassurant.
Nous allons vous expliquer ce qu’il s’est passé, je vais de ce pas aller chercher votre soeur, elle sera heureuse de vous voir ainsi éveillée !”.

Il se redressa de la couchette, la regardant encore un instant avant de quitter la cabine. Dans l’étroit couloir, il s’appuya lourdement contre une cloison, se sentant alors totalement désemparé, oscillant entre la joie d’avoir vu sa Comtesse à nouveau éveillée, et la peine éprouvée pour l’oiselle apeurée.
Se ressaisissant, au bout de quelques instants, il s’empressa de regagner la surface de la Yemaya, pour aller chercher Cerièra et lui annoncer la bonne et la mauvaise nouvelle.




Pendant ce temps dans la cabine de pilotage…


Et Cerièra dans tout ça ? Elle n’était pas bien loin d’Aryanna : depuis la veille elle oscillait entre la plage et la Yemaya. Ne pas voir sa sœur le 25 au soir, passait encore… mais deux soirs de suite ? Jusqu’à ce qu’Ayorjo vienne – enfin ! – les voir Sowelo et elle pour examiner la blessure du vairon et leur apprenne la nouvelle : l’oiselle était inconsciente depuis sa chute. L’aspirant médecin avait les traits tirés de l’amoureux qui avait veillé sur elle à chaque instant et Cerièra prit le relais la nuit suivante pour le laisser se reposer un peu. Voilà comment avaient débuté ses allers-retours entre le site du Sanctuaire et le navire…

Elle avait aidé le chevalier-carotte** Manga et «les hommes» à installer sa cadette dans une cabine puis, comme elle l’avait assuré à Ayorjo qui lui avait demandé ce qui coulait de source pour elle, elle avait fait sa toilette et l’avait changée pour la laisser se reposer dans une de ses larges chemises propre avec simplement une paire de braies : il faisait chaud à Séleucos, les journées étaient étouffantes et la température ne baissait que peu la nuit. Son temps passé à bord de la Yemama était à la veiller en relais du chaurien, aidée par Sowelo, priant souvent à son chevet pour qu’elle trouve la force de revenir : elle le savait bien Cerièra que passer du temps en Sa présence, avec Celui qu’elle avait vu là-bas, rendait le retour difficile et que seule une bonne envie de vivre et quelques proches auxquels on tient plus que tout pouvaient avoir raison du désir de rester dans cette douce lumière, dans cet infini Amour.

Mais à cet instant elle était dans «sa cabine». Oh, pas celle où elle était censée dormir, du reste elle n’y dormait jamais, préférant le coin de pont que Sowelo et elle s’étaient aménagé avec quelques tapis et coussins ramenés d’Alexandrie afin de dormir ensemble sans être trop tentés, «sa cabine» c’était la cabine de pilotage où elle était sérieusement occupée… à regarder l’horizon, comme elle l’avait fait de nombreux jours à l’aller, se demandant quand ils se remettraient en route. Si les jours précédents elle n’avait aucune envie de repartir, se satisfaisant d’être au bout du monde entourée des siens et pas pressée de retrouver leur Comtat, depuis la veille elle était enthousiaste à l’idée de reprendre la mer pour fouler à nouveau leurs terres et elle souhaitait en partager la raison avec sa chère sœur dès qu’elle apercevrait ses onyx.

Bref. Ayorjo la trouva dans la cabine de pilotage les yeux au large et un chapeau-bateau en papier sur la tête – c’est normal sur la Yemaya – lorsqu’il lui apprit la bonne nouvelle : l’oiselle avait ouvert les yeux. Il s’en fallut de peu pour qu’elle ne saute au cou du chaurien à cette annonce, heureusement pour lui elle ne le connaissait pas assez pour se le permettre.


Oh Dieu merci ! C’est formidable ! Elle reposa derechef le chapeau-bateau sur la carte étalée entre autres choses sur la table et prit sans tarder la direction de la cabine d’Aryanna. Elle dévalait les marches sans lui laisser le temps de continuer à donner des nouvelles, vérifiant à peine d’une rapide rotation de la tête en arrière qu’il la suivait bien.

Merci Ayorjo, merci d’être venu me prévenir ! Elle va bien ? Elle n’est pas trop sonnée ? Questions qui lui sortaient toutes seules, peut-être se les posait-elle à elle-même au fond. Sa course folle fut interrompue lorsque le brun lui apprit… Perdu la mémoire dites-vous ? Mais, elle vous reconnait ?

Oui mais… elle se pensait partie de Foix. Les questions viendraient plus tard pour déterminer ce dont se souvenait son oiselle, pour l’heure elle ne pensait qu’à la voir, les yeux ouverts, enfin. Elle pénétra dans la cabine à tout allure pour aller la serrer dans ses bras, plus doucement de son épaule droite qui se rappelait encore à elle lorsqu’elle forçait trop. Tu m’as fait peur… lui glissa-t-elle en la balançant tout doucement.


Restée seule, la noire s’était plongée dans un foultitude de questionnements. Elle avait replié ses jambes contre, y enroulant ses bras, alors que, la tête posée sur le sommet de ses genoux; elle fixait un point lointain de cette cabine yémayenne. Elle essaya désespérément de se souvenir, de se raccrocher à un élément de sa mémoire qui lui permettrait de comprendre. En vain.
Elle ne sut pas combien de temps elle resta seule, toutefois, lorsque Cerièra entra et vint la prendre dans ses bras, c’est un sentiment de soulagement qui prit la place de ses dernières craintes. La cadette avait serré doucement son aînée contre elle, avant de se rendre compte qu’elle était blessée, elle aussi. En témoignaient les éraflures présentent sur son visage.

«
Que nous est-il arrivé ? »

Et c’est ainsi qu’elle comprendrait qu’ils étaient déjà arrivés au Sanctuaire Taurin, que tous avaient sauté dans le vide déjà. Plus tard c’est Sowelo qui lui apprendrait la date du jour, Manon lui apprendrait qu’elle avait glissé du haut de la falaise et l’avait entraîné dans sa chute. Plus tard elle apprendrait qu’ils étaient partis depuis plus d’un mois et qu’Alexandrie avait été visitée quelque jours plus tôt. Mais, à cet instant précis, elle préféra profiter de la présence réconfortante de sa soeur, sous l’oeil attentif d’Ayorjo, présent non loin de là.




* En attendant le vote des bêtes sauvages, Ahmadou Kourouma

Petit RP écrit à “watmil” mains, avec des vrais bouts des jds Cer, Ayo et Ary dedans.]

** défi stupide

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Ceriera
Sur la plage, le lundi 25 juillet en début de soirée.


Un monde de pur amour



J'ai mal, j'ai mal, j'ai si mal…

… je n'ai plus mal. Je suis légère, je flotte comme une plume soulevée par un léger vent. Je suis au-dessus de la plage, je vois cette femme en blanc sur le sable. Mais, c'est moi ? Je ne me reconnais pas tout de suite. Je suis blessée ? Il semblerait, mais moi je n'ai plus mal, je ne suis plus dans ce corps étendu, je suis comme un nuage. Je cherche à me mouvoir mais je n'ai plus de poids, je cherche à parler mais je n'ai plus de voix. Rapidement je me rends compte que je n'en ai pas besoin, je suis une nuée, je vais où je veux, je vois tout, je n'ai plus de contrainte. Je me rapproche de ce corps, je veux le réintégrer… je suis Cerièra, ramenez-moi là-dedans ! Je ne me suis jamais trouvée particulièrement jolie mais c'est moi, c'est ma place ! C'est là où je dois être !

Mais je me sens bien. Je n'ai mal nulle part, je me sens envahie par une douce chaleur… que c'est paisible ! Je n'ai jamais éprouvé un tel bien-être. J'oublie peu à peu se corps terrestre et ma réticence à le laisser s'évanouit. Je perçois comme un tintement de cloches, la plage disparaît peu à peu… que se passe-t-il ? Que m'arrive-t-il ?

Je ne suis pas seule. Je ne vois personne, mais je ressens des présences, des présences de même nature que moi, des transparences, des ondes. Elles me rassurent. Je n'entends pas leur voix comme j'en suis dénuée, mais nous parlons sans obstacle, bien plus clairement qu'avec des mots. D'esprit à esprit. J'ai une foule de questions, elles ne me laissent jamais sans réponse. Je suis en train de mourir me dit-on, mais bientôt je me sentirai très bien. Je n'ai aucune angoisse, je suis accompagnée, elles ne laissent pas ma pensée tourner à vide.

Une brillante lumière vient à moi. Elle brille, est elle claire mais elle n'éblouit pas : elle réconforte. Elle n'a pas de corps mais elle est quelqu'un, elle est une personne, une présence, un être. Un esprit de chaude tendresse, tout vibrant d'amour. Je me sens si bien…
Je comprends que c'est Lui, que je suis en Sa présence. Il m'accueille dans Sa paix. Aucune voix n'émane de Lui non plus et pourtant il me parle, d'une façon si claire et si précise qu'elle ne laisse aucune place au mensonge ou à la dissimulation.

Qu'ai-je fait de ma vie ? Qu'ai-je envie de Lui montrer ? Il m'aide, Il s'efface pour me donner une vision instantanée de plusieurs événements de mon existence terrestre. Je ne Le vois plus, je ne vois plus cette lumière mais je sais qu'Il est là, avec moi. Nous les examinons ensemble dans un échange dénué de tout jugement, de toute condamnation. À chaque occasion Il insiste sur l'importance de l'Amour et même lorsque j'ai pu être égoïste, Il attire mon attention sur la leçon que j'ai pu en tirer. Il est si compréhensif, si bienveillant…
Il réapparaît à moi et m'amène un instant à réfléchir sur cette vie passée, mais ces questions que je ressens qu'il me pose n'attendent aucune réponse, sinon de moi en moi-même.

– M'aimes-tu ?
– Oh oui je T'aime, j'ai passé ma vie à T'aimer, à Te chercher… et maintenant je suis là avec Toi…
– Si tu m'aimes, retourne sur tes pas et achève ce que tu as commencé
– Mais je ne veux pas retourner au monde, je veux rester auprès de toi dans Ton Amour !

La connaissance. J'ai encore beaucoup à apprendre et même lorsqu'Il reviendrait me chercher, j'aurais encore ce besoin de savoir. Je comprends, mais comment quitter un être d'un si parfait Amour ? Ici tout est si simple, tout est si pur, tout est si beau… tout en moi refuse l'idée d'un retour. Alors Il s'éclipse à nouveau tout en restant à mes côtés pour me guider et me donne la vision de deux visages. Évidemment. Je dois vivre ma vie avec le premier et être là pour la seconde. Je n'ai nul besoin de le Lui dire, Il n'a nul besoin de me le préciser, c'est chose entendue. Je finis par accepter ce retour mais c'est si dur de Le quitter, de quitter ce monde de pur Amour…

La lumière disparaît laissant peu à peu la place à la plage. Je suis comme aspirée vers ce crâne de cheveux bruns aux légères ondulations que je connaissais si bien. Je ne peux décider de rien, je ne contrôle rien, je rentre douloureusement par la tête dans ce corps lourd qui m'est devenu étranger. Je ressens une vive souffrance.





Un retour difficile



La diaconesse gisait sur le sable, étendue sur le flanc droit, sa houppelande blanche maculée d'une belle tache rouge. Peu à peu elle revenait à elle et ressentait la douleur de ce corps meurtri par la chute : c'est de son épaule qu'elle prit conscience en premier, celle-ci lui faisant atrocement mal. Sa jambe vint se manifester à elle à la suite, ouverte par un bâton qui traînait sur la plage et l'avait blessée sur le haut de sa cuisse. Il était encore en partie logé dans la plaie, elle l'écarta par réflexe. Aaahhh… Mais elle se fichait bien de tous ces affres physiques. Le vrai déchirement était de retourner à la matière, de quitter cette indicible paix qu'elle avait ressentie pour retrouver un monde de matière : le contact du sable brûlant, ce corps qui ne lui appartenait plus et la torturait, cette lumière agressive et surtout… elle avait dû Le quitter Lui…
Sans même chercher à en savoir davantage sur son état et les environs elle se roula en boule sur elle-même et partit d'un long sanglot.


Noooon… nooooooooon… c'est trop dur… je n'ai pas le courage…

Revenir était pour elle un supplice. Impossible de dire combien de temps elle resta là, vautrée sur la plage à pleurer cette infinie douceur qu'elle venait de laisser derrière elle. Elle mit un long moment à trouver la force de se lever, elle se sentait si pesante. C'est la pensée de Sowelo qui finit par l'arracher au sable : lui qui avait tant hésité à sauter mais qui l'avait accompagnée, lui dont elle ne pourrait plus jamais douter quand il disait «je serai toujours là pour toi» même dans un instant pareil, lui comment allait-il ?

Elle ouvrit les yeux et tenta de se redresser, prenant machinalement appui sur son bras droit : la vive douleur lui signala qu'elle ne pourrait pas compter dessus.
Aaahhhhh ! La respiration s'accéléra et le visage se crispa alors que prenant appui sur le bras gauche et se soulevant un peu elle constata la tache de sang. Donc… Elle souleva sa houppelande pour examiner la plaie sur le haut de sa cuisse, son visage se crispa, puis alla d'un soupir de lassitude : et quoi d'autre ? Rien ne lui faisait beaucoup plus mal sinon sa tempe droite qui lui tirait, mais elle passa sa main gauche à divers endroits de son corps pour s'en assurer. Enfin elle la mit à l'épaule qui lui lançait dès qu'elle essayait de bouger le bras et fut prise d'un spasme de douleur. Au toucher son épaule n'était plus «à niveau» : tant pis pour le bras droit.

Sowelo. Se lever sans compter sur ses parties blessées. Après deux bonnes minutes à avoir mobilisé le peu de force qui lui restait, elle balaya des yeux les alentours, haletante et en appui sur sa jambe gauche. C'est plus haut sur la plage qu'elle l'aperçut allongé sur le sable. Ils avaient sauté main dans la main : pourquoi était-il si loin d'elle ? Aurait-elle lâché sa main à un moment de leur chute ? Elle boita jusqu'à se rapprocher assez de lui pour l'apercevoir à plat ventre, sa chemise déchirée tachée de rouge. Elle hâta le pas la main gauche sur sa cuisse pour comprimer la plaie qui n'aimait pas sa vive allure.
Soweloooo !

Arrivée à son niveau elle se laissa choir dans le sable près de lui. Sa tête reposait sur son côté droit et elle fut prise de panique à le constater inconscient, lui, son amour, inanimé… était-il… mort ? Quelques mois plus tôt elle avait déjà dû enterrer celui qu'elle aimait et eût une peur bleue de revivre ce qu'elle ne voulait plus jamais avoir à affronter : Non… non… non… ne me laisse pas, pas toi, pas là… de grosses larmes perlaient à nouveau sur ses joues alors qu'elle allait pour l'enlacer et que son épaule se rappelait à elle. Encaissant la douleur d'une affreuse grimace qui lui rappela que sa tempe aussi réclamerait de l'attention, elle prit la main de son brun et la serra fort. Elle était chaude. Mais combien de temps avait-elle pu passer inconsciente, elle ? Sa tête se tourna brusquement pour observer les ombres : le soleil n'avait que peu tourné, la chaleur de son corps n'était donc pas une indication. Le côté rationnel de Cerièra était en train de reprendre le dessus, elle devait en avoir le cœur net et colla son oreille dans son dos. J'entend rien ! Dans sa panique elle mit un moment à enfin trouver le son des battements de son cœur et prit confirmation en mettant un doigt sous son nez. Son souffle était perceptible et elle poussa un long soupir de soulagement : Oh merci Seigneur, il est en vie… Sa crainte s'apaisait alors qu'elle restait un instant ainsi, contre lui, soulagée de ne pas avoir à pleurer tous les rêves qu'ils avaient partagés la veille. Ils pourraient les vivre, car il ne tarderait sans doute pas à reprendre connaissance. Réveille-toi mon cœur… lui dit-elle doucement en se redressant vers son visage qu'elle caressait doucement.

Et s'il était en train de vivre la même chose qu'elle ? Elle ne pouvait que souhaiter qu'il connaisse lui aussi cette grâce mais… et si lui non plus n'avait pas envie de revenir ? Et s'Il lui présentait Sloan et elle mais qu'elles ne suffisaient pas à le ramener ? Je ne veux pas vivre sans toi moi, alors reviens… reviens… Mais elle savait qu'il ne l'entendait pas, elle ne faisait que verbaliser se angoisses et s'angoisser ne servait à rien. Elle prit une grande inspiration pour retourner à la réalité, à ce cruel présent, et examiner sa blessure. Car il était vivant certes, mais s'il était trop blessé, peut-être ne pourrait-il pas revenir quand bien même il le voudrait.

Elle aurait aimé s'en prendre à sa chemise dans une plus romantique circonstance mais nécessité fait loi. Elle souleva donc précautionneusement le tissu imprégné de sang pour découvrir une entaille au milieu de son dos et qui semblait continuer plus haut. Faisant fi de sa pudeur habituelle, remonta jusqu'à trouver la fin de sa blessure… en haut de son épaule droite. Le regard inquiet, elle se mordit la lèvre en constatant la longueur et la profondeur de sa plaie. Plaie qui était pleine de sable et Cerièra entendait bien prendre soin de lui. Il fallait à tout prix qu'il revienne, et agir calmerait son angoisse de le perdre.
Avant tout : nettoyer cette blessure mais… avec quoi ? La mer était encore ce qu'il y avait de plus proche et une simple tentative de se relever lui confirma vite qu'elle ne galoperait pas loin. Elle boita péniblement jusqu'à l'eau pour en prendre au creux de ses mains. Plusieurs interminables allers-retour furent nécessaires pour enlever tout le sable qu'elle pouvait, et son cauchemar prit fin lorsqu'elle l'entendit grogner alors qu'elle versait l'eau salée sur son entaille. Un sourire radieux illumina ses traits tirés et elle s'exclama :
Il grogne ! Il grogne ! Il revenait… elle l'accueillerait en ramenant son visage près du sien et en lui tenant doucement la main : Je suis là mon cœur…
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Πίστις, ἐλπίς, ἀγάπη Hey Jude, don't make it bad…
Sloan
A BORD DE LA YEMAYA




Retour des aventuriers, au détour d'un courrier !


Après avoir essayé de tenir tête à son frère, concernant l'état de son poignet la vénitienne avait fini par lui céder et demander à Ayorjo d'y regarder de plus près ce dernier lui avait répondu qu'il passerait la voir plus tard dans la journée au mess.

La petite aile une fois seule avait défait les attelles de fortune faites sur la plage et regardais ça de plus près si elle pouvait bouger sa cheville avec un minimum de douleur il en était tout autre pour son poignet qui lui était toujours un peu gonflé bleu et difforme sa main n'était pas dans l'axe de son bras et elle ne pouvait pas non plus bouger se dernier qui lui faisait mal à en pleurer.

Sloan qui avait été surprise à pleurer par son frère et consolé et rassuré légèrement par se dernier décida de se changer les idées en prenant le temps d'écrire à sa marraine chose qu'elle n'avait toujours pas prit le temps de faire. C'est donc blottie dans les bras consolateur et surtout rassurant de son frère qu'elle laissa glisser sa plume sur le vélin.







Marraine,

J’espère que tu vas bien ? Tu me manque je pense fort à toi chaque jour qui passe. Ne t’en veux pas de ne pas avoir été au bout, on sait tous combien s’est difficile d’être dans un conseil. Prend soin de toi c’est tout ce qui importe que tu sois heureuse et bien. Je suis contente pour toi que le vœu de ta mini déesse rousse ait fonctionné. J’espère que ça se passe bien.

J’avais dis que j’avais des choses à te dire dans notre réponse collective et je n’ai pas vraiment eu le temps de le faire. Ça va peut être, être décousue, mais le principale et que tu sois au courant.

Alors voilà il n’y a pas que toi qui ai retrouvé ou trouvé en ce qui me concerne l’amour, suite à une conversation avec Manga, Griotte et Sowelo j’ai moi aussi aussi décidé de laisser mon cœur voguer vers l'amour.

J'ai demandé à ses trois là ce qu'il fallait pour être amoureux, tout du moins comment eux savait, ce qui faisait que eux savait être amoureux. Par la suite j'en ai aussi parlé à Lyviia et je suis convaincu que toi aussi tu me donneras ta connaissance selon toi enfin je l'espère.

Donc Manga me disait que avec Berm c’était différent d’avec les autres et que c’est pour ça qu’elle avait plus ou moins foncé, Sow lui m’a dit qu’il fallait bien connaitre la personne pour en tomber amoureux , et Griotte m’a conté l’histoire d’Aspophelle en me disant qu’elle était sauvage que personne ne pouvait lui prendre son cœur véritablement, un peu comme moi et que seul son mari avait réussit parce qu’il avait été tenace avec elle.

Ce à quoi j’ai répondu que j’en connaissais un d’homme tenace. Et de la tout est parti, ils m’ont convaincu de lui écrire et d’arrêter de lutter à contre courant avec lui. D’autant plus que en plus d’être tenace puisqu’il me fait la cours depuis le début de l’année, avec lui c’est différent des autres et je le connais très bien. Il a toutes les qualités requises pour faire mon bonheur. J’ai une confiance aveugle en lui et il m’a prouvé à plusieurs reprises que je pouvais avoir confiance. Il me connait mieux que personne parce qu’il est mon confident et mon protecteur et j’ai toujours fuit devant lui par peur parce que je savais, je sais qu’il peut me rendre heureuse et ça me faisait peur, j’ai plus confiance en lui qu’en moi et ça me foutais une trouille monstre. Il est attentif, il sait me rassurer et il est toujours là pour moi, malgré ce que j’ai pu lui faire vivre, je l’ai éconduit plusieurs fois et pourtant il persiste, il m’avait demandé en mariage et je n’ai pu lui répondre, j’ai fuis à nouveau, mais j’ai toujours gardé sa bague à mon doigt. Il a toujours fait le premier pas dans nos disputes même quand j’avais tors.

C’est le seul qui est toujours revenu vers moi et vers qui je suis retourné bien malgré moi.

Depuis je lui ai ouvert mon cœur, je lui ai même confié, on s’écrit chaque jour qui passe, il m’a dit qu’il savait que j’étais la femme de sa vie depuis le début, qu’il ne pouvait pas y’en avoir une autre que moi et qu’il n’avait jamais reculé et qu’il ne reculerait jamais parce que j’étais l’élue de son cœur.

Il s’appelle Olivier, tu l'as peut être surement déjà du le croiser à Foix.

Sinon nous sommes sur le trajet du retour, nous avons sauté de la falaise, et je t’avouerais que ce n’est pas la grande forme pour moi, Je me suis tordue une cheville et surement cassé un poignet, les autres vont bien, quelques petits bobos par ci par là. J’ai refusé d’embêter Ayorjo qui étudie la médecine et j’en fais les frais maintenant, j’espère qu’il pourra quelque chose pour moi quand je le verrais.

Ah nous avons, enfin j’ai bien trouvé ton étendard et j’en avais fabriqué un ou j’avais brodé toutes nos initiales et ainsi que Yémaya et des étoiles pour représenter les deux bateaux et tout le monde je l’ai planté juste à coté du tiens.

Voilà je crois que je t’ai tout dis ou presque possible que j’ai oublié des choses que j’avais à dire avec le temps. Ah si le joli dessin que Manga t’a fait parvenir de moi c’était pour Olympe.

Tu me manque ma belle, je pense fort à vous et vous fait plein de Gros bisous nous seront bientôt de retour.

La petite aile



La missive écrite la demie blonde en fit plie qu'elle ligota à une mouette direction Antoynette.
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Lyviia
[Sanctuaire Taurin - Baptême de Pipo - 25 juillet]



Habituellement, Manon se contentait d’être le halo de lumière entourant le couple Pipo/Lyviia (traduction : tenir la chandelle), or ce matin, la fuxéenne prenait le relais tandis qu’elle se rendait en compagnie des Calderon sur la plage consacrée pour le baptême du capitaine de l’Etoile.
Chose rare que de voir ces trois là réunis et plus surprenant encore, la présence de Julian dont aucune objection n’avait franchi les lèvres, lui qui, pourtant, préférait la solitude aux mondanités.

Vêtue d’une légère robe claire rappelant la couleur de ses yeux, la Lescurienne s’était déchaussée pour profiter du contact si peu familier du sable sur sa peau. Humeur joyeuse et contrariété ne pouvait s’empêcher de s’entremêler tant s’opposait la joie du baptême à la perspective de voir ses amis sauter de cette maudite falaise.
Il ne fallut pas plus que la vision lointaine de Sloan se tenant à l’aide d’une béquille pour augmenter inquiétude et agacement. Si Manon était habituellement pleine de compassion, elle devinait déjà qu’il lui serait bien difficile d’en offrir ce jour là.

Un hochement de tête poli à l’estropiée avant de gratifier d’un sourire la diaconesse et le futur noyé suivi des salutations d’usage.

En attendant que la cérémonie commence, le panier de bulot attira la curiosité de la brune qui inspectait déjà l’animal mort de deux bouts de doigts. En effet, n’étant pas très adepte des produits de la mer, elle n’y avait jamais porté grand intérêt, découvrant à présent la ressemblance frappante avec son gastéropode. Assez pour lui faire reposer le bulot dans son panier et s’en retourner à la solennité du moment.


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Petit tour matinal de Taurin terminé, ses affaires transférées de la Yémaya sur l’Etoile de mer, Lyviia fila se préparer dans la cabine qu’elle partageait habituellement avec son homme.

Pipo ayant déjà quitté les lieux pour rejoindre la plage consacrée par Ceriera pour son baptême, elle se dépêcha donc d’enfiler sa houppelande blanche, remit un peu d’ordre dans sa coiffure puis admirant son reflet dans le miroir, esquissa un sourire. Elle se pressa enfin de rejoindre Manon et le Pitaine avant de ne les faire trop attendre.

Une bise à sa douce, un salut de la tête au Pitaine, prenant la direction de la plage en leur compagnie, se retenant pour ne pas sautiller afin de ne pas agacer le grincheux, profitant du paysage alentour, impatiente de voir son aimé enfin baptisé, rassurée sur le fait qu’il ne sauterait pas sans avoir été accepté dans la grande famille des Aristotéliciens, ils arrivèrent ainsi tous les trois …

Prenant sur elle pour ne pas aller sauter au cou de son compagnon qu’elle n’avait pas revu depuis plusieurs jours, faisant un petit signe de la main à Sloan au passage, Lyviia se dirigea vers la diaconesse et son Pipo, tous deux déjà là. Le temps de biser Ceriera, déposer discrètement un baiser dans le cou de son compagnon, là voilà qui prend place attendant sagement que les autres invités arrivent.



RP à quatre mains avec JD Manon

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Pipo
[La Plage, la Falaise le soir du 25 Juillet 1464 au sanctuaire]


Lyviia et Pipo avait eu une grande discussion ensemble sur le pourquoi sauter et pourquoi ne pas sauter… Pipo savait combien Manon était inquiète pour eux à ce sujet et en fit part à Lyviia qui était malgré tout très déterminée.
Lors de cette discussion, sa compagne le questionna sur la santé de Manon, se demandant si, maintenant que Pipo l’avait ausculté, elle était guérie de tout problème… Pipo lui fit alors le récit de ce qu’il avait fait pour Manon, afin d’être certain que sa compagne comprenne bien que son Pipo était malgré lui, le médecin du bord… et c’est en médecin qu’il avait agit et qu’il agirait tant que le voyage ne serait pas terminé…


Lyviia, lorsque j’ai rejoint Manon ce matin là, elle était dans un sale état et j’ai dû la rassurer. Je lui ai administré une décoction que tu m’as aidé à lui donner par la suite…
Je lui ai aussi fait un examen, une simple palpation de son ventre, de manière à être aussi certain que possible que tout aille bien pour elle et qu’elle ait pu tout expulser…
C’est pour cela que je lui ai interdit de sauter, même si c’est plutôt elle qui ne veut pas le faire, j’ai préféré le lui dire.


Pipo dû se rendre à l’évidence, sa Lyly était entêtée…
Que pouvait-il faire ? Se résoudre à devoir sauter avec sa compagne, juste pour ne pas qu’elle le fasse seule ? Ou alors, sauter avec elle, pour lui prouver tout l’Amour qui l’anime, lui prouver que où qu’elle aille, il serait de la partie ? Il décida donc de monter avec elle en haut de la falaise et de lui prendre la main pour pouvoir franchir cette étape importante pour elle, mais aussi importante pour eux.


Lyviia, je viens sauter avec toi, je te tiendrais la main et nous sauterons ensemble les yeux dans les yeux…

Ce sont là les dernières paroles que Pipo lui dit avant le grand saut…

Ils s’éloignèrent du feux de camp et montèrent main dans la main la falaise, ne partageant que de furtifs regards…
Un dernier baiser échangé en haut, face à l’obscurité du néant, de l’inconnu, du vide…
Un dernier regard, les mains entrelacées, une course d’élan et un
je t’aime lancé dans le vide...
La chute lui parue interminable… si longue, si rapide, si dure à la réception. Le premier impact fut rude, et lorsqu’il prit sa compagne sur le dos, il sentit son flanc droit entrer encore plus dans le sable venant s’ajouter aux douleurs causer par son genou et sa cheville qui avaient tout deux céder lors de l'atterrissage...

Ils avaient pu, tant bien que mal, se poser dans un des nombreux feux de camp au ‘No Pasaroun” ouvert par des provençaux, dont sa soeur et son frère. Ils avaient rejoint Ceriera et Sowelo qui, eux, avaient sauté juste avant et été en train de se soigner quand l’envie de sauter leur avait pris !

Alors que Sowelo se faisait soigner par Ceriera, Lyviia annonçait sa douleur par de grand cris. Pipo pensait que l’ensemble des amis devaient savoir que Lyly avait sauter, tant elle criait, pour rien… ou presque rien…
Sa compagne avait le Nez éclaté et l’épaule démise…
Il prodigua ses conseil à Ceriera qui s’est immédiatement, malgré ses propres blessures, portée au secours de son amie de toujours.

Pendant ce temps là, Lyviia passait du baume sur le flanc droit de son Pipo d’homme… tout en n’arrêtant pas de s’excuser de l’avoir entraîné dans cette galère…

Après une bonne nuit de sommeil dans leur cabine, Lyviia et Pipo pure terminer les derniers soins restant à faire…
Remettre l’épaule de Lyviia et la cheville ainsi que le genou de Pipo. Tâche pas aisée, mais oh combien salvatrice !!
Pipo
Sanctuaire, plage consacré au Baptême


Pipo vit arrivé Lyviia, sa compagne depuis l'Anjou, Manon son amie et Julian, notre Pitaine au grand coeur...

Lyviia et Manon avait la lourde tâche de l'accompagner dans ce passage important de sa vie, et il était heureux de les compter avec lui en ce grand jour.

Lorsque Lyviia vint dire bonjour à Ceriera, elle déposa un baiser dans le cou de son homme...


Bonjour toi... content de te revoir enfin... et merci d'être ce que tu es pour moi...

Pipo la regarda s'éloigner et reporta son attention sur Ceriera, il était prêt !
Ceriera
Baptême de Pipo, Sanctuaire taurin de Séleucos, le 25 juillet sur la plage en début d'après-midi.


– Non, vraiment ? Ah… la diaconesse ne comprenait pas vraiment comment on pouvait bouder de si bons bulots à l'aïoli monté avec amour, mais chacun ses goûts après tout. Manon et Lyviia étaient arrivées toutes deux de clair vêtues… qu'ils seraient beaux, tous, pour ce baptême sur une plage au bout du monde ! Une bise à son amie, chérie-marraine de l'aspirant, dont elle d'étonna qu'elle témoigne si discrètement son affection à Pipo : on n'avait pas vraiment encore commencé et… il est passé où l'«air de vacances» ?
Elle profita de les avoir toutes les deux pour donner le panier de bulots à Pipo dans un grand sourire :
Mangez-en quelques-uns, je reviens tout de suite ! alors que celui-ci même attendait le début de la cérémonie. Elle prit les deux super-marraines chacune par un bras pour les entrainer un peu plus loin leur chuchoter quelques consignes*. Des cachotteries, tout à fait ! Un coup d'œil furtif fut porté aux pieds de la lescurienne qui n'avait heureusement pas de chaussures. Mais avec ce qu'elle leur expliquait, ç'aurait fini de toute manière par être le cas.

De retour avec les deux brunes vers ce petit bout de plage consacré, cette sorte de chapelle de sable à tous vents. L'assemblée était pour l'heure très réduite : le baptisé, les marraines, l'avenant «pitaine», les jumeaux… et elle la griotte bien évidemment, sans laquelle il n'y aurait pas de baptême. Elle humait l'air, doux bien que le soleil commençait déjà à cogner sévèrement, et regardait la plage, le contexte, les gens : quelques mois plus tôt elle n'aurait pas imaginé ça. Mais… Pipo. Sortir de la rêvasserie, c'est l'heure du bain on a dit.

Nous allons commencer, arrivera qui voudra quand il voudra. *Aryanna certainement, et… en retard certainement* se dit-elle, rassurée de voir que certains fondamentaux dans ce monde ne changent pas. La suite se ferait dans un tutoiement au baptisé qu'elle avait toujours vu pratiquer, même par Henriques qui l'avait elle-même arrosée. Quand bien même le tutoiement n'est pas évident à Cerièra, c'est le privilège du clerc, qui plus est en vacances.
Liturgie minimale cette fois : si la petite aile avait pu bénéficier de la totale à Montfa, cette fois-ci l'endroit, la chaleur, se prêtaient mal à un long baptême tout complet et codé comme défini suite au concile… bon, d'accord, on s'en fiche.

Pipo, tu es aujourd'hui ici au pied du piton rocheux, entouré de gens aussi fous que toi. Certains s'apprêtent à sauter, d'autres non, certains l'on déjà fait. Tu as souhaité le baptême avant ce saut de la foi, nous y sommes. C'est un long trajet en mer qui nous a menés ici, tous. Ce long trajet tu as grandement contribué à son succès, ne comptant pas ressources et savoir-faire que tu as mis au profit de la petite communauté de voyageurs doux-dingues que nous sommes.
Oh évidemment tu as vu des choses en pastotale : le sens de la communauté qui est le cœur du message qu'Aristote, notre premier prophète, nous a laissé. La vertu du don de soi également. Mais toutes ces choses te sont déjà naturelle, aussi c'est un grand plaisir pour moi d'accompagner ton entrée dans la famille aristotélicienne, cette nouvelle communauté d'âmes où tu as toute ta place.

Pipo c'est une vie de vertu et une vie d'amour qui s'ouvre devant toi, c'est le chemin que tu prends aujourd'hui. Pour t'aider sur ce chemin tu as choisi les deux meilleurs marraines qui soient : la douce et généreuse Lyviia qui a tes côtés dans la vie saura t'épauler, et la sage et mesurée Manon qui saura t'éclairer de ses précieux conseils. Et ce sont elles qui vont te guider… tout de suite !

Et la diaconesse prit le chemin de la mer et commença à entrer dans l'eau, confiante dans le fait que les marraines la suivraient en emportant le capitaine de l'Étoile. Elle s'arrêta quand elle eut de l'eau jusqu'aux hanches, gardant sa fiole d'eau bénite disponible à la taille, et attendit les trois compères.


* évidemment tout ceci est dans un MP, sinon c'est pas drôle !

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Πίστις, ἐλπίς, ἀγάπη Hey Jude, don't make it bad…
Ayorjo
 
[Mess de la Yemaya - Au matin du 1er Août]


“Une maudite falaise”, comme il l’avait qualifiée à plusieurs reprises, qui avait laissé des marques, des blessures, des traumatismes… Ayorjo n’avait pas sauté, il l’avait déjà fait, un jour. Et si certains pouvaient chercher dans cette chute une expérience spirituelle, lui même ne se souvenait plus que d’un terrible mal de tête, de quelques contusions, et le flou total sur un saut et un atterrissage. Ce jour là, il ne s’était rappelé d’aucune impression Divine, et aucune question existentielle sur sa propre vie ne lui était restée.
Et aujourd’hui, il était certain d’une chose, il ne voulait pas disparaître. Car il menait une existence qu’il trouvait parfaite, et l’avenir qui se trouvait devant lui ressemblait à un ciel dégagé, sans défauts, limpide et paisible, hormis un petit nuage mais uniquement là pour y flotter depuis maintenant quelques semaines en compagnie d’une oiselle.
Sauter, ensemble, pour risquer la mort et abandonner cette vie ? Disparaître et l’abandonner ? Survivre seul et perdre sa moitié ? Non, cela était inconcevable, et insensé. Ils avaient tant à faire encore, et les occasions de risquer sa propre vie pour elle pourraient bien arriver, plus tard. Et le jour où il se retrouverait face à sa dernière destinée arriverait bien un jour, un jour lointain, comme l’on pouvait l'espérer.
Maudite falaise, satanées bottes.
Un accident, une maladresse, mais avant tout de la malchance, un coup du sort. Même s’il n’y pouvait plus rien, il s’en voulait, d’avoir laissé Aryanna monter en haut du promontoire sans l’y accompagner. Ils ne se quittaient pas beaucoup durant de ce voyage, sur terre ou sur mer, ou lors d’une visite Alexandrine, et l’une des rares fois où il pensait bien faire en l’invitant à ne pas l’aider alors qu’il se chargeait de transporter leurs affaires entre les deux navires, c’était bien là que le drame était arrivé. Bien sûr, il n’aurait peut être rien pu faire de plus, et aujourd’hui la tressée était sur pieds, sans graves blessures, bien vivante malgré les quelques jours d’inconscience angoissantes et là était déjà le plus important. Mais son esprit, lui, restait dans l’oubli de ces dernières semaines, et il l’observait, alors qu’elle se sentait perdue, troublée, parfois même à se sentir coupable, sans qu’il ne trouve le moyen de l’aider, sans réussir à la sortir de ce brouillard qui s’était installé depuis son réveil quelques jours auparavant, et il se sentait bien inutile et impuissant face à cette malheureuse situation...


Mais la Comtesse de Montfa n’était pas la seule a avoir subi quelques dommages, bien que pour la plupart des autres voyageurs, les blessures étaient physiques et parfois assez importantes pour que des soins furent nécessaires. Et s’il n’avait encore su venir en aide à celle qui lui était le plus proche, bien qu’il veillait sur elle comme il le pouvait, il avait finit par pouvoir se rendre au moins utile envers les autres. Les études et les quelques notions de médecines qu’il possédait, devenaient finalement, ou enfin, pratiques, et ayant profité de leur escale à Alexandrie pour en revenir avec quelques notions nouvelles, ainsi que de quelques plantes ou matériel, le barbu pouvait alors proposer son aide à ceux qui cherchaient une aide médicale.
Ainsi, il avait pu soigner une blessure assez conséquente dont souffrait Sowelo. Ayorjo avait tenté de paraître plus assuré qu’il ne l’était, car recoudre une plaie, de cette ampleur qui plus est, n’était pas du tout pour le jeune médecin une évidence. Mais cela s’était bien passé, et l’opération semblait avoir été une réussite, du moins à ce jour, mais il était assez confiant quand à la guérison du jeune homme.
Il avait pu faire profiter également de ses connaissances en herboristerie, avec quelques préparations de breuvages constitués des simples qu’il avait embarqué avec lui lors du voyage, ce qui se transformait également en conseils pour soigner les quelques petits désagréments habituels dont chacun pouvait souffrir.

Ainsi, la veille, il avait également reçu une note, de la part de Sloan, qui semblait elle aussi souffrir de quelque blessure, et qui, après conseils fraternels sur la nécessité d’y apporter quelques soins, lui demandait alors son aide à l’apprenti-médecin. Il n’avait pu la rencontrer au plus vite, mais lui donna rendez-vous le lendemain. Elle lui avait expliqué les symptômes, et décrit les blessures qu’elle portait au poignet et à la cheville. Sans même le voir de ses propres yeux, il avait pu prévoir, ou du moins deviner, ce dont elle pouvait souffrir, et il avait pu commencer à préparer ce qu’il imaginait utile au soin d’un poignet cassé et d’une cheville abîmée.
Quand il la rencontra ce matin là, dans le mess de la Yemaya, il examina les deux articulations de la blessée, pour constater ce qu’elle lui avait bien expliqué dans son mot, une cheville bien foulée, mais surtout un poignet inquiétant.
Un os brisé ? Une articulation démise ? Les compétences d’ayorjo restaient limitées, mais le fait était que la main de Sloan semblait ne pas suivre le bon axe de son bras. Non sans la prévenir qu’il risquait de lui causer une certaine douleur, il palpa l’endroit qui lui semblait poser problème, avec la désagréable perspective qu’il fallait remettre cela… en place.
Le bras fut posé à plat sur la table, le médecin lança un regard compatissant à la patiente -ou victime- du jour, lui annonçant que ce qui allait suivre n’allait pas être une partie de plaisir. Il continua de lui parler alors qu’il saisit fermement l’avant bras de la jeune femme de sa main gauche, puis attrapa de son autre main celle de la blessée. En s’adressant à Sloan, il lui fit relever la tête, lui annonçant qu’il allait compter jusqu’à trois....

“un...d…”
Bien sûr, Ayorjo n’attendit pas la fin du compte, se préparer à la douleur ne la rendant jamais moins… douloureuse.
Dans un geste sec, il tira sur la main de la blonde, en la dirigeant vers l’axe de l’os de son bras. Sous ses doigts, il sentit une sorte craquement, ou comme la sensation de deux pièces de bois qui s'emboîtaient, même si l’on était loin d’une activité de menuiser ! Lui même fut impressionné par la facilité dont les os et les membres pouvaient se déplacer, à n’en pas douter la médecine réservait bien des surprises.
La pauvre Sloan avait bien du souffrir, pouvait-il se dire en la regardant, mais il lui apporta quelques paroles réconfortantes, car le plus dur était maintenant passé.
Il se chargea ensuite de lui appliquer un premier bandage, enduit d’un mélange de camphre -pâte blanchâtre qu’il avait déniché à Alexandrie- et d’huile de rosat, qui servirait à réduire l'inflammation et à calmer la douleur, puis une deuxième bande de tissue destinée à maintenir les attelles de bois fin qu’il avait disposé le long du bras réparé. Le tout devait fermement entourer le poignet blessé, mais sans que le bandage soit trop serré. Enfin, il recouvrit le tout d’un troisième tissu, une longue bande de lin préalablement trempée dans du cérat, mélange d’huile et de cire qui durcirait quelque peu pour maintenir le tout en place pendant les jours qui suivraient.
Il appliqua ensuite la même méthode autour de sa cheville meurtrie, bien que le traumatisme de celle ci était de moindre gravité, mais précaution fut gardée.

Il regarda la pauvre Sloan, lui ayant expliqué qu’elle allait être bien gênée dans ses déplacements et dans la plupart de ses activités pendant un petit moment. Elle pouvait poser le pied au sol, avec précautions, mais l’usage de son bras était bien sur proscrit, et de toute façon impossible pendant quelques temps. Mais il se voulut rassurant, car même si le désagrément de ces blessures allait être présent un moment, elle s’en remettrait bientôt -du moins l’éspérait-il ! -.



Un peu plus tard, il retourna sur le pont, et s’appuya au bastingage, le regard se perdant sur l’étendue bleue. Il restait encore une blessure à guérir, mais pour celle-ci, il ne pouvait qu’attendre. Mais au moins avait-il pu se rendre utile, et ces études de médecine finalement servaient à quelque chose, ce qui le rassura quelque peu sur le choix de cette voie, dont il avait pu douter un jour...

 
 
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Fathia
Pont, cabine de Cerièra et cale de la Yemaya, le 3 août au petit matin.


Depuis quelques jours Fathia n'était plus seule : c'était un jeune dromadaire femelle qui lui tenait compagnie. Familière à l'animal, cela ne lui posait aucun problème, par contre le rat qui se promenait parfois jusqu'à sa couche de fortune ne lui plaisait pas du tout. Elle avait par précaution mis le peu de pain qui lui restait dans une caisse afin qu'il ne grignote pas tout, ni que la dromadaire ne se serve dans ses réserves. Réserves qui s'amenuisaient peu à peu, il lui fallait remonter «à la surface». Ce qu'elle fit en soulevant légèrement la grille qui menait au pont afin de voir si la voie était libre : il était suffisamment tôt pour visiter les filets de pêche, peut-être un poisson améliorerait son ordinaire.

Le navire n'était pas très agité ce matin-là, elle n'avait encore entendu personne marcher ou parler. La dame de la barque semblait encore finir sa nuit dedans, Lamia était étendue à l'autre bout du pont sur un assemblage de tapis avec celui qui devait définitivement être son amoureux – comme quoi Jalila exagérait, il semblait gentil lui – et le barbu au dromadaire était absorbé à guetter l'horizon dans la cabine de pilotage.

Elle décida de se rapprocher des filets de pêche accrochés à la rambarde mais déjà l'homme de Lamia s'étirait. Mince, un lève-tôt ! Dare-dare Fathia courut vers la grille, la souleva et la laissa retomber un peu lourdement derrière elle, de panique, pour se cacher dans l'escalier qui menait à la cale. Des pas : il se levait. Elle souleva un peu la grille pour regarder discrètement : il relevait les filets et mettait les poissons un par un dans des petits tonneaux. La gamine attendit qu'il finisse et prenne la direction du mess pour aller piquer un poisson dans un tonneau qui semblait bien garni : cinq ou quatre, la différence passerait peut-être inaperçue, en tout cas lèserait moins le pêcheur

Il était temps de revisiter les cabines. Si ces trois-là dormaient sur le pont, leurs cabines étaient délaissées la nuit. En observant lesquelles étaient vides à cette heure très matinale, elle saurait où aller chercher des victuailles désormais. La première qu'elle trouva libre fut celle «au carnet», avec ces drôles de plumes, de pierres et de brindilles… elle y trouva quelques pains de plus et en prit quatre, et retourna vite fait dans la cale avant que tout le monde se lève. Il faudrait bien qu'elle trouve à cuire ce poisson, mais elle y songerait plus tard dans la journée si le mess se libérait.



Donc pour le moment :
- un poisson de moins pour Cerièra, elle l'a constaté avec Sowelo
- du pain de moins pour elle aussi, mais d'ici à ce qu'elle s'en rende compte…
- une odeur de poisson dans la cale si ça continue…
- et comment Ayorjo nourrit Marie-Bière sans tomber sur la gamine ? d'accord, elle se cache…
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