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[RP] Puisqu'elle a promis...

Lison_bruyere
Ce jourd'hui, Fanette avait dix sept ans. Enfin, possiblement, car, si le douze mai avait depuis longtemps été retenu, la date exacte restait incertaine, et même son oncle ne savait être plus précis. Un azur sans nuage s'était levé sur la cité bourguignonne, promettant quelques heures agréables à flâner au bord de l'eau, d'autant que le sieur Kelmet avait précisé à la jeune fille que cette journée était pour elle et qu'il ne saurait exiger qu'elle la passe à travailler derrière le comptoir de son auberge.

Fanette, l'âme légère et le sourire aux lèvres, comptait donc bien profiter du chant des oiseaux, et du clapotis des eaux du lac. Sauf que, rien ne se passe jamais comme on le prévoit, et un courrier de la brune en quelques instants, avait suffit à couvrir ses frêles épaules d'une chape de plomb qui l'avait clouée sur place. Celle qu'elle aimait comme une sœur avait besoin d'elle, et la jeune fille aurait tant voulu l'assurer de son soutien, faire route dans l'instant vers la Normandie, mais elle était terrifiée à l'idée de croiser encore celui dont la danoise était éprise. Elle ne pouvait ignorer la mise en garde du mercenaire qui avait promis de la tuer quand il recroiserait sa route. Elle avait passé quelques heures, désemparée, à tourner et retourner la lettre dans ses mains, avant d'y apporter réponse, espérant que ses mots suffiraient à apaiser son amie.

Ses tristes pensées s'étaient égarées, par delà les murs de la cité, cherchant quelques raisons de sourire encore. Presque instinctivement, ses doigts glissaient sur le parchemin roulé dans sa besace, celui d'un danseur italien qui faisait route vers Nevers. C'était une imprudence peut-être, mais l’irrépressible envie de partir s'imposa soudain comme une ultime solution pour laisser derrière elle ses chagrins et ses inquiétudes. Et si elle allait demain retrouver ce presque inconnu, regagner l'insouciance d'un soir en glissant de nouveau dans son regard de lichen ?




Roman,

Je ne sais si je dois me réjouir de ne plus vous savoir au service de Dame Isaure. Je regrette que votre réputation ait à souffrir de cette tâche que vous n'avez pas assurée ainsi que vous l'auriez voulu. Et pourtant, j'ai honte à vous l'avouer, mais égoïstement, je me plais à croire que vous pourrez à présent disposer de votre temps comme vous le voulez.
Roman, j'ai bien étudié ma carte, et je crois savoir à vos indications, par où vous passerez. A quelques lieues de Bourges, les bois s'ouvrent sur une large clairière. Vous la reconnaîtrez car en son centre s'élève un grand frêne qui doit bien faire plus de trente cinq toises de haut, et à ses pieds, chante un ruisseau. Je connais cet endroit car c'est là que j'ai dis au revoir à Yohanna et à son fils il y a quelques jours, quand Nevers devenait dangereux pour lui. J'ai tenu à les accompagner un bout de chemin, au nom de l'amitié qui nous lie. Je sais que je peux l'atteindre en quelques heures de marche, et si vous vouliez, je pourrais me mettre en route dès ce soir, pour vous y retrouver demain. J'ai souvent voyagé sans escorte Roman. A la faveur de la nuit, il est aisé de se dissimuler, je l'ai déjà fait, et j'ai ainsi toujours évité les mauvaises rencontres à chaque fois que j'étais seule sur la route.

Acceptez Roman, vous n'avez qu'un mot à dire et vous me trouverez sur votre chemin dès demain.
Je pense à vous.
Fanette

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Roman.
La journée était déjà bien avancée et la fatigue commençait à ralentir le pas de la monture de Roman. Il finit par laisser le cheval s'arrêter à un endroit qui semblait lui convenir, puis mit pied à terre pour s'installer pour la nuit. La lettre de Fanette lui était parvenue une petite heure plus tôt; il était temps de lui répondre afin qu'elle ne manque pas son départ à cause du délai de transmission.

Roman a écrit:

Fanette,
Oui, je serais bien à l'Est de Bourges demain matin, et je vois de quelle clairière vous parlez, j'y suis passé il y a quelques mois. C'est avec une grande hâte que je vous réponds, en espérant vous revoir au plus tôt demain, car vous semblez parvenir à me manquer.
Soyez bien prudente sur la route.
Et à demain !
R.C.

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Nannou
Un Corléone!

Nannou avait posé un tas de questions, dont beaucoup n'avait d'ailleurs pas obtenu de réponse car Fanette n'avait pas passé beaucoup de temps avec celui qu'elle appelait "le danseur".
Et comment il s'appelle, et il arrive quand et il fait quoi...
Il faut dire que Nannou plaçait un peu d'espoir dans ce danseur. Fanette avait traversé des moments difficiles, et la pensée de ce garçon semblait lui ramener le sourire. Bien sûr elle le connaissait peu, bien sûr rien ne disait que ce jeune homme était celui destiné à la jeune vagabonde. Mais même une toute petite chance d'amener un peu de joie dans la vie de Fanette était à prendre.

Mais voilà... Fanette avait lâché the nouvelle, l'information primordiale et que pourtant qu'elle avait omise de transmettre jusque là!
Roman n'était que son prénom et son nom de famille...
Corléone.
Nannou avait légèrement pâlit. Demandé à Fanette si elle savait qui était cette famille.
Puis elle avait tâché de se calmer. Car oui Nannou avait changé. Depuis la dispute avec son frère, elle tentait de ne plus s'emporter. Alors elle avait tempéré, relativisé, dit que ce jeune homme n'avait pas à porter le poids de fautes de sa famille, qu'il était sans doute différent, soutenue par Mortemer qui était, ou pas, de cet avis.

Mais au fond d'elle même, elle se faisait un sang d'encre. Déjà parce qu'elle était comme ça, et un plus là c'était Fanette. Fanette qui avait le chic des mauvaises rencontres, qui avait eu son lot de peine, et sans doute était-ce pour ces raisons que Nannou déjà surprotectrice avec ses proches l'était encore plus avec son amie.

Mais elle se tût, se contentant de remarquer le regard songeur de la jeune femme.

Elle le soir dans sa roulotte, elle réfléchit aux diverses options, avant d'en discuter avec son mari.
Elle tomba d'accord avec elle même pour ne rien dire à Fanette, le seul risque serait de l'éloigner.
Restait le jeune homme. Déjà lui dire que Fanette avait des tas d'amis ici.
Puis :
- Ne rien dire et observer pour se faire une opinion
- Lui faire de discrètes allusions pour lui sous entendre qu'il avait intérêt à faire gaffe. Mais pour ça il fait dire qu'elle n'était pas très douée, plutôt du genre franco, Nannou.
- Lui parler franco. Le prendre entre 4 yeux voire plus mais sans Fanette. Lui demander qui il est vraiment, menacer, interroger, passer à la question...

pfff
N'importe quoi!
Nannou alla se coucher. Plus que trois jours pour décider d'une attitude. Demain elle en parlerait avec Mortemer.
Lison_bruyere
Nuit du 13 au 14 mai 1465, quelque part en Berry.

La lune pleine baignait le sentier d'une lueur opalescente, et l’œil qui doucement s'était habitué à cette clarté peinait à distinguer autre chose que des ténèbres entre les troncs des grands arbres qui se refermaient autour d'eux. Les lèvres restaient closes, pour ne pas distraire l'oreille aux aguets. Trois heures déjà qu'ils cheminaient en silence, ils avait passé le guet de l'Aubois, le prochain serait sur la Loire. Ils sauraient alors Nevers toute proche. Mais pour l'heure, on ne percevait rien d'autres que les bruits de la nuit, et le pas régulier de la jument qui battait la terre du chemin. Son fer teintait parfois sur une roche affleurante.

Les doigts enroulés sur la crinière de Brume frôlait parfois la main du cavalier qui tenait les rênes, ses bras encadraient la jeune fille, lui interdisant une chute. Fanette les sentait effleurer sa taille au rythme du balancier de l'encolure de la grise. L'homme était si près dans son dos qu'elle pouvait sentir son souffle sur sa nuque. Mais elle n'avait pas peur. Elle le connaissait si peu, et pourtant, elle avait choisi de marcher au devant de lui, de le rejoindre sur la route qui le menait à elle. Imprudence peut-être, car la jeune fille avait parfois fait les frais de ses erreurs de jugement, jusqu'à manquer d'en mourir, un soir de novembre, dans le Poitou.

Plus tôt dans l'après midi, elle avait hésité un peu, avant de le questionner sur ce nom qui semblait faire frémir ses amis. La franchise de la réponse aurait pu la surprendre, mais Fanette ne savait pas jauger trop vite. Après tout, certains de ses proches conservait une part d'ombre, une noirceur qui pouvait les rendre violents ou dangereux. Elle le savait, ne s'attachait pourtant à ne voir que le bon qu'ils lui offraient, et sa conscience ne s’embarrassait pas de ce qu'ils pouvaient faire quand elle avait le dos tourné. Ce n'était sans doute pas très aristotélicien, mais qui était-elle pour les juger ? N'était-il pas un temps où, jeune adolescente, enfuie de sa Touraine natale, elle vivait de rapines ?

Silencieuse, abandonnée aux pensées qui virevoltaient aussi légèrement qu'une robe de soie et de dentelle, elle ferma les yeux, se laissant bercer par les amples foulées de la jument. Roman avait raison, elle finit par sentir le mouvement de l'animal et son corps s'appliquait à le suivre sans qu'elle n'ait à y songer. Et la robe de soie avaient cessé de virevolter, Fanette s'était légèrement affaissée contre le cavalier. Il rassembla les deux rênes dans une main pour enrouler un bras autour de sa taille, afin de la maintenir en selle, ainsi qu'il l'avait promis. Mais de cela, la jeune fille ne perçut rien. Gagnée de confiance pour un bel italien, elle s'était endormie.
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Lison_bruyere
Tonnerre, le 17 mai 1465

Les vieux volets disjoints de l'auberge du centre laissait entrevoir le jour naissant. La lumière, feutrée et douce comme l'aube mauve qui chassait les ténèbres au dehors, se répandait dans la pièce. Fanette, encore embrumée de songes, en sentait la caresse derrière ses paupières closes. Ses derniers sommeils s'étaient enroulés dans une couverture humide, calés contre le tronc d'un chêne, ou adossés au mur d'une vieille ruine, alors, il était bon d'étirer sa paresse sur un matelas de laine, de profiter des braises encore rouges d'un feu qui mourait dans la petite cheminée de la chambre et d'oublier dans la rue en bas, le son étouffé d'une cité qui s'éveille. Lentement, ses doigts se nouaient pour s'étirer au dessus de sa tête, puis, dans un soupir d'aise, elle se tourna sur le côté, dos à la clarté qu'elle ne voulait pas.

C'est là que ses mains, revenant sous sa joue l'avait rencontré. Cet autre, fait comme elle de chair et de sang, d'os et d'une peau tiède. Dans un affolement subit, cinq doigt agrippaient la couverture, s'assurant qu'elle couvrait ce que son chainse de nuit ne parvenait à dissimuler de ses jambes blanches, tandis que les cinq autre rabattaient le pan de l'encolure que la nuit avait un peu trop échancré sur sa gorge.

Les sourcils s'étaient imperceptiblement froncés, et la robe de dentelle s'était remise à tourner dans ses souvenirs. Ceux de la veille, quand la main doucement avait effleuré son visage, quand les lèvres s'étaient posées aux siennes, quand les doigts s'étaient glissés derrière sa nuque ... Et ses joues dans la pénombre de la chambre, venaient de nouveau de se farder de rouge.

Je dois admettre aimer être avec vous, lui avait-il confié hier.
Je dois l'admettre aussi Roman. C'est troublant ... C'est grisant et terriblement effrayant à la fois.

Elle avait fait silence, juste un instant.

Et j'ai osé vous dire cela !

Il se plaisait à la frôler, à poser ses mains, en caresse légère à sa joue, sa taille, sa hanche, et, à chaque fois, sa peau s'animait d'un frisson, son cœur s'affolait un peu plus. Elle aurait presque deviné la lueur d'amusement qui s'était logée dans le lichen de ses yeux quand il affirma qu'il la ferait sans doute encore rougir bien souvent.

Rougirez-vous, si je vous demandai de dormir ce soir à mes cotés ?

Devant cette jeune fille, tant surprise qu'elle en avait oublié de respirer, il s'était empressé de préciser qu'il parlait bien de dormir, rien de plus que cela.
Elle avait hésité un peu, avant d'admettre que oui, elle en rougirait encore, d'ailleurs, ses pommettes avait encore cette teinte plus rosée qu'à l'ordinaire, estompant presque les taches de rousseurs discrètes qui les parsemaient.

Mais je crois que je dirais oui, avait-elle ajouté dans un souffle presque inaudible, baissant les yeux pour ne pas croiser les siens.

Et la raison criait prudence, quand le cœur criait confiance. Profiter un peu de quelque tendresse offerte, ne pouvait-elle pas penser à elle pour une fois ? Grisant ... Et s'en remettre à la parole d'un presque inconnu pour partager chastement une couche et des rêves ... Effrayant.
Dès l'instant où elle avait accepté, la jeune fille avait bien failli regretter mais il l'avait attiré à lui, puis l'avait soulevée pour la faire tourner.

Vous êtes une petite plume ! Alors Fanette s'était laissée tournoyer en riant, renouant avec l'insouciance qui lui avait tant manqué ces derniers jours.
Une plume oui ... mais je ne me perdrai pas au vent ... Vous me retiendrez n'est-ce pas ?
Je vous piquerai sur une oie !


Et Fanette avait répondu, s'amusant de l'idée.

Sur une fauvette, ce sont mes préférées...

Il ne la piquerait pas sur une fauvette, mais il ne la laisserait pas s'envoler au gré d'un mauvais vent. Quand il serait en Normandie, si les retrouvailles étaient trop difficiles, si la brise devenait tempête, il l’emmènerait ailleurs. Oie ou fauvette, peu importe, toutes deux allaient au même endroit chercher des jours meilleurs quand l'hiver venait.

L'aube mauve s'était effacée, cédant la place au soleil de printemps, qui dardait ses rais dans un azur sans nuage, et dans la chambre d'une taverne municipale, l'ébauche d'un sourire s'étaient posée sur les lèvres de Fanette. Elle avait eu raison de lui faire confiance. Elle s'était recroquevillée un peu, sur le bonheur paisible de ce moment, se déplaçant à peine, pour le sentir encore, là, tout près d'elle, comme il l'avait été sagement tout au long d'une nuit qu'ils n'avaient pas passé sur les routes.
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Roman.
La tiédeur d'un sommeil serein enveloppait encore les sens de l'Italien, assoupi sans états d'âme dans le lit qu'il partageait avec la délicate Fanette.... Les yeux clos, le souffle tranquille, il avait abandonné toute la méfiance habituelle de son état de veille, environné, pour une fois, par quatre murs et une porte bien close. Bien à l'abri. C'était la première fois depuis des mois qu'il s'abandonnait aussi complètement à un sommeil total, sans la crainte d'être attaqué dans son sommeil. Cela faisait des semaines qu'il n'avait dormi qu'à la belle étoile avec en mémoire les visages de certains des sbires de ses ennemis... Ses derniers contrats n'avaient pas été des plus simples; les enjeux politiques des meurtres qui lui étaient commandés le dépassaient; aussi se savait-il menacé par les assassins qui lui étaient rivaux ou opposés politiquement.

Mais ce matin-là, il dormait, sans un songe, le souffle calme, et il ne sentit pas tout de suite que Fanette le scrutait. Cependant, il finit par battre lentement des paupières, et ses yeux s'accommodèrent à la lumière pour trouver un petit visage observateur dont le regard était fixé sur lui. Il se souvint qu'elle avait dormi auprès de lui malgré sa timidité. Un sourire apparut lentement sur ses lèvres, non carnassier, mais doux et tranquille.


- Que voilà une aube agréable...

Sa main lentement s'éleva, faisant glisser de son épaule le drap de lin qui s'écoula en découvrant son torse sans l'embarrasser de pudeur, et se posa sur la joue de Fanette. Son pouce suivit avec lenteur la courbe d'une pommette.

- Voyez que je ne vous ai pas dévorée toute crue. Avez-vous bien dormi ?

Sa voix, basse et douce, légèrement moqueuse, fit frémir les particules de poussière qui dansaient dans les rais de lumière matinaux. Il espérait qu'elle ait vraiment aimé ces heures de partage qu'il lui avait proposées, et il ne doutait aucunement qu'elle apprécie la retenue dont il faisait preuve. N'avait-il donc pas de désir pour elle ? Bien sûr que si ! Et il espérait qu'elle ne devine pas l'embarras masculin qu'il cachait soigneusement sous les draps. Mais il ne souhaitait pas l'embarquer tout de suite dans cette autre aventure... il serait bien temps de l'évoquer plus tard. Il avait envie cependant de la tenir contre lui, là, comme elle était, avec ses boucles désordonnées et sa chainse de nuit, qu'elle se sentît impudique ou pas. Il n'avait cure de la quantité de tissu qui pouvait bien la couvrir ou non... Mais il s'abstient de l'attirer à lui.
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Lison_bruyere
Conflans-lès-Sens, le 18 mai 1465

Non, il ne l'avait pas dévorée toute crue. Bien au contraire, il s'appliquait à ne pas la brusquer, à la couvrir de tendresse, patiemment, et elle s'étonnait de se laisser si vite apprivoiser, justement par celui là, ce fameux Corleone dont le simple nom semblait inspirer la méfiance et la crainte chez bon nombre de gens. Ils avaient passé une journée de plus dans la petite cité bourguignonne, pour ralentir l'échéance normande, pour se raconter un peu, se connaître davantage, jusqu'à cette petite phrase prononcée au soir, et que Fanette avait répété pour mieux en réaliser le sens. "Maintenant que vous faites partie de ma vie."
Depuis la veille, depuis ces quelques mots, Fanette en était étourdie. Ses prunelles s'étaient nimbées d'une espérance nouvelle, comme d'une crainte ancienne, mais des deux, elle ne voulait retenir que la première.

Et ils avaient ajouté une nuit à leur voyage, rythmée par le pas énergique de Brume, et quelque repos emmitouflés dans une couverture. Et aux laudes, ils avaient passé la barbacane qui protégeait la porte de Bourgogne et confié la jument aux soins d'un palefrenier. La cité semblait vivante, et les rues plus animées que celles de Tonnerre. C'était la première fois que Fanette venait en Champagne, alors, une fois débarrassée de ses vêtements de voyage, et passée sa jupe de toile, elle avait entraîné Roman à la découverte des venelles. Elles n'étaient guère différentes de celles de Bourgogne, avec leurs maisons à pans de bois, leurs étages en encorbellement qui empêchaient presque le soleil de pénétrer l'étroitesse de certaines ruelles. Quand tierce sonnait, ils s'étaient fiés au son pour les guider jusqu'à l'église. Bâtie sur une large place, les camelots du marché haranguaient les passants à qui mieux mieux, pour les attirer vers des étals colorés. C'est le chant d'un coq qui attira la jeune fille sur le côté de l'église. Elle tira un peu sur le bras d'un Roman amusé pour lui faire presser le pas. Aussitôt le coin de la maison du Très Haut passée, ce n'était que cris, mugissements, bêlements ...
Un large sourire accapara ses traits, tandis qu'elle tournait vers l'italien un regard rieur.

Venez Roman, allons voir les animaux, qui sait, il y a aura peut-être un tout petit cheval maladroit ...

Sa main passait dans la laine grasse des moutons, caressait le mufle humide des génisses, s'émerveillait même du plumage aux reflets métalliques de certaines volailles. Puis, dans l'une des allées, un maquignon, chapeau vissé sur la tête, ample blouse bleue, se tenait, appuyé les deux mains sur la canne qu'il utilisait parfois pour empêcher une croupe vagabonde d'aller taper son voisin.

Là Roman, regardez, ce sont les chevaux !


Les animaux étaient attachés à une ligne, par deux ou trois. Lourds roncins, rosses faméliques ou élégants palefrois, il y avait là quantité d'animaux en plus ou moins bon état. Fanette les observait, des bais, des gris, des alezans. Ceux aux attaches les plus grossières perdaient encore leur épais poil d'hiver, rendant leurs robes un peu ternes. Les plus légers, ceux dont on devinait les veines sous la peau fine, avaient déjà le poil court et soyeux de la belle saison.

Fanette avisa une jument à la jolie robe grise pommelée assortie d'une longue crinière noire. Elle ressemblait à Brume. A son flanc, une pouliche couleur de châtaigne semblait perchée en équilibre sur de longues jambes graciles. La jeune fille s'en approcha doucement, présentant au petit animal curieux le dos de sa main, avant de tendre les doigts pour gratter son large front orné d'une étoile. Fier de sa trouvaille, elle se retourna vers l'italien.

Je suppose que celle-ci est un peu jeune encore, mais, elle est jolie, ne trouvez-vous pas ?
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Roman.
Conflans-lès-Sens était une ville bien calme, peut-être même un peu trop... mais ce défaut était devenu une qualité lorsque Fanette avait prié Roman de l'accompagner en promenade parmi les ruelles. Au départ un peu réticent à l'idée de se montrer en public au milieu de la foule, l'Italien avait finalement accepté, ayant constaté que vu le peu de monde dans les rues, il aurait le temps de voir venir n'importe quel assassin. Sa paranoïa le taraudait plus ou moins selon les jours; ce jour-là étant parmi les moins concernés depuis un moment. Ils ne risquaient probablement rien.

Aussi Roman tenait-il tranquillement le bras de Fanette, laquelle devisait gaiement, pour ne pas dire qu'elle devisait pour deux. Roman tentait de suivre le rythme de ce joyeux babillage de son mieux, mais il avait besoin d'une élocution moins rapide pour ne pas se tromper dans la langue française. La jeune fille parvenait cependant à le faire parler assez aisément.

Après un moment de déambulation, ils se trouvèrent dans un marché aux bestiaux et Fanette l'attira vers les chevaux. Quelques instants plus tard, elle caressait un jeune animal, les yeux brillants d'une adoration assez enfantine qui amusa l'Italien. Cependant, il fallut la raisonner :


- C'est une belle pouliche, je l'admets. Mais ses jambes sont encore trop frêles pour vous porter, même si vous êtes légère. Sa mère ferait une meilleure monture pour vous. Cependant, ne serait-ce pas dommage de les séparer ?

Il détourna son regard des deux juments pour en chercher d'autres, s'invitant avec aisance au milieu des chevaux. Ceux-ci ne parurent pas s'inquiéter de sa présence, probablement parce qu'il respirait le calme et l'assurance, et il put ainsi s'avancer tranquillement vers une autre jument. Il gratta des doigts le poil brun qui partait par poignées, déplorant à part lui le manque de soin apporté au pelage de l'animal et s'apprêtant à en faire le reproche au maquignon.

- Fanette, venez voir cette jument. Elle est assez jeune mais ce n'est plus une petite pouliche. Elle semble bien formée, son dos pourra porter une selle avec une jeune fille comme vous dessus...

Il se tourna vers Fanette pour voir sa réaction, ne sachant si elle allait rester fascinée par la pouliche ou si elle saurait tout de même observer ailleurs.
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Lison_bruyere
Fanette, les yeux rivés sur le petit front bombé de la pouliche se retourna en entendant Roman l'appeler. Elle ne tarda pas à le repérer, à quelques toises, au milieu d'un piquet de chevaux bruns. A son tour, elle s'avança vers eux, sans se départir de son sourire émerveillé.

Vous avez raison pour la pouliche, elle est sans doute bien trop jeune pour être sevrée et plus encore pour être montée.

Fanette leva les yeux vers la jument qu'il lui indiquait. Elle devait bien toiser dans les cinq pieds et trois pouces. On devinait une jolie robe baie sous le poil encore grossier et poussiéreux qui couvraient ses flancs et sa croupe. Son dos était large et court, ses membres semblaient secs et robustes, mais dans l'ensemble, elle ne présentait pas de lourdeur excessive et se trouvait plaisante à regarder. Puis surtout, sa jolie tête au chanfrein rectiligne s'ornait de grands yeux d'un brun assez clair qui accentuaient la douceur de son expression.
C'est surtout à cela que s'attacha la jeune fille, car à vrai dire, si elle aimait les chevaux, elle n'y entendait rien.

Elle est magnifique Roman.


Fanette s'approcha d'avantage, se glissant parmi les chevaux pour se faufiler entre l'italien et la jument. Elle laissa courir une main sous la crinière noire tandis que l'autre, saisissant le licol, ramenait doucement à elle la tête de l'animal qui se laissa docilement faire. Elle s'appliqua à la caresser longuement, jusqu'à ce qu'un bout de nez curieux et confiant ne la bouscule légèrement, cherchant dans les plis de sa jupe s'il n'y avait pas quelque gourmandise dont les chevaux raffolent.
La jeune fille la repoussa en riant.

C'est une maligne, elle a du sentir l'odeur de la pomme que j'avais dans la poche ce matin, mais elle arrive trop tard, c'est Brume qui en a profité.

Puis, elle releva un sourire vers Roman. Le regard noisette, nimbé de quelques paillettes dorées ne laissait plus rien voir des inquiétudes qui étaient siennes il y avait si peu de temps encore. Là, si proche de l'italien, qu'elle le frôlait à chaque respiration, rien d'autres que l'instant présent ne l'occupait, que l'insouciance de cette journée de printemps. Elle lui en fut soudain tant reconnaissante, que, dans un élan de bonheur, elle saisit sa main, et, se haussant sur la pointe des pieds, vint furtivement déposer un baiser au coin de ses lèvres, avant de cacher le fard qui habillait sans aucun doute ses joues dans la crinière de la jument.
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Roman.
Le Corleone contemplait, amusé, sa délicate compagne en pleine séance d'adoration. Comme il s'y était attendu, elle ne se préoccupait pas vraiment des caractéristiques techniques de sa future monture, mais plutôt de son apparence et de son caractère, et bien qu'il dut admettre que le caractère d'un cheval était important pour mettre en confiance une cavalière débutante, il ne fallait pas se fier entièrement à lui. Ses réflexions furent interrompues par un baiser, inattendu, qui saisit ses lèvres en un souffle trop rapide. Il n'eut que le temps de saisir Fanette par la taille pour lui rendre la pareille en prolongeant le contact, histoire de lui montrer qu'il en appréciait davantage.

- Cette jument vous plait-elle ? On dirait qu'elle n'a pas peur de vous. Je pense qu'elle pourrait s'entendre avec Brume, que je garderai, dans ce cas.

Il avait eu l'intention, au départ, de donner Brume à Fanette et de s'acheter un autre cheval pour lui. Il en voulait un plus vif que la (trop, à son goût) placide Brume. Mais après réflexion, le temps que Fanette s'habitue à monter seule son propre cheval, il ne lui servirait à rien d'avoir un coursier rapide puisqu'il faudrait marcher au pas et s'arrêter souvent. Il décida de repousser cet achat au profit de la monture de Fanette. D'une voix qui portait, il héla le maquignon :


- Signore ! Combien pour cette jument ?
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Lison_bruyere
Vous voulez l'acheter Roman.

Elle se retourna pour lui faire face, plantant un regard étonné dans le sien.

Je veux dire, vous voulez l'acheter pour moi ?


Elle ne savait plus que dire, tant l'attention était délicieuse, mais c'était là un achat bien onéreux pour une jeune vagabonde. Bien sûr il avait évoqué la veille la fatigue qu'accumulerait Brume à les porter tous les deux pour un si long voyage, mais elle craignait d'avoir l'air de profiter de sa générosité. Alors, partagée entre le bonheur de pouvoir s'occuper d'une aussi belle jument comme si elle était sienne, et l'embarras de ne pouvoir en assumer les frais d'achat, la bavarde s'était faite muette. Ses doigts discrètement étaient revenus se nouer à ceux de l'italien, quand ses yeux, brillants d'émotions contenues ne parvenaient à se détacher des siens.

C'est la voix rocailleuse du maquignon appelé par Roman qui la ramena à la réalité du moment.
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--Maquignon
Le maquignon avait froncé un sourcil pour étudier le couple qui semblait s’intéresser à sa jument. Il avait rapidement évalué la qualité des vêtements de l'homme, sa posture, l'assurance de sa voix quand il l'avait hélé, pour se faire une idée de la somme qu'il serait capable de débourser pour s'offrir une monture.
Il agita le bâton devant lui pour engager les chevaux à se pousser, et, accrochant un sourire affable à son visage, s'avança vers la jument.

Très bon choix Messire. Elle vous mènera au bout du monde.

Le ton se fit quelque peu flagorneur, le sourire enjôleur.

Vous avez l'air d'être homme à savoir ce que vous voulez, je suis bien certain que vous avez déjà noté toutes les qualités de ma bête.

Du bâton, il pointait la jument, tantôt son dos, ses membres ou son poitrail …

Voyez son dos, large et court, celle-ci vous pouvez la charger sans crainte, elle est porteuse. Toute jeune qu'elle est, regardez moi ce poitrail déjà bien ouvert, ses larges naseaux, et cette belle épaule oblique, qui lui donne de belles allures bien amples. Et elle n'a jamais été boiteuse.

Ce faisant, il détachait la jument et la sortait du lot, pour la trotter sur quelques foulées avant de revenir au devant du couple. Il avait saisit l’œil intéressé de la jeune fille et lui colla d'office la longe dans les mains pour attraper la tête de l'animal et montrer sa dentition à l'acheteur potentiel.

Examinez vous même, elle a juste cinq ans, les coins sont bien développés mais l'angle est encore assez droit. Et puis, c'est une gentille jument même pour son âge.

Il se tourna vers la demoiselle avec un large sourire en ajoutant qu'elle pouvait aisément convenir à une dame.
Enfin, il laissa passer un moment, laissant au jeune homme le temps d'examiner une fois de plus l'animal, avant de récupérer la longe de la main de la jeune fille. Relevant le nez vers son client, qu'il espérait avoir ferré, il ajouta d'une voix qui se voulait toujours aussi aimable.

Alors Messire, ferons nous affaire ? Combien me donneriez-vous pour cette merveille ?
Roman.
Roman avait laissé le maquignon déballer sa marchandise et ses belles phrases, et tandis que celui-ci se tournait vers Fanette pour essayer de l'amadouer, il s'intéressa au reste du cheptel. Il s'approcha d'un vieux cheval, visiblement en âge d'être tranquillement laissé dans un champs, pour lui caresser légèrement l'encolure. Il murmura avec pitié :

- Povero vecchio, si meritano di essere lasciato in pace.... *

[Pauvre vieux, tu mériterais qu'on te laisse en paix.]

Juste à côté, un animal plus jeune attira l'attention de Roman. Il dégageait une odeur nauséabonde qui provenait d'une plaie suppurante au jarret. Roman grimaça et jura à voix basse, passant une main compatissante sur le dos du cheval blessé. Quel homme était-ce là, qui osait mettre en vente des bêtes blessées, malades ou âgées, au lieu de leur donner les soins et le repos qu'elles méritaient ?! Il se tourna vers le maquignon qui revenait vers lui, et il le dévisagea en lui montrant son plus profond mépris. Son accent italien, très marqué, n’adoucissait en rien la froideur de son ton :

- Vos chevaux sont très mal traités. Je n'aurais aucune confiance en une monture achetée chez vous. Venez, Fanette, partons. Nous irons vous trouver un cheval chez un vrai éleveur.

Il prit d'office le bras de sa jeune compagne et l'éloigna du maquignon et de ses chevaux, sans lui laisser le temps de protester. Mais à peine disparus à l'angle d'une rue, il s'arrêta et se tourna vers elle pour lui chuchoter :

- Attendez-moi ici. Je vais libérer ses chevaux. C'est une honte ! Certains sont trop vieux, d'autres sont blessés ou en mauvaise santé. Il est inacceptable de le laisser se faire de l'argent en vendant des animaux qui ont besoin d'être soignés.

Décidé, il n'attendit même pas qu'elle lui réponde et la planta là, geste très inhabituel de sa part, pour aller se glisser vers le petit enclos qui maintenait les chevaux rassemblés. Il s'accroupit d'un côté où le nombre d'animaux le cachait à la vue du maquignon, sortit son poignard, et scia rapidement les cordes qui maintenaient les poteaux de l'enclos. Doucement, il souleva la barrière et la posa sur le sol. Les chevaux ne remarquèrent tout d'abord pas l'ouverture et Roman s'inquiéta de leur manque de réaction. Pour accélérer les choses, il se glissa entre eux, surveillant le maquignon qui discutait avec un autre potentiel acheteur. Il retrouva la jument repérée avec Fanette et glissa doucement la main dans sa crinière. Le cheval qui se trouvait à côté de lui renâcla ... Roman se tourna vers lui : ç'aurait pu être un bel étalon mais il avait une claudication marquée, et une oreille abîmée.

- Mi dispiace. Vattene! *

[Je suis désolé. Va-t-en !]

Et de la pointe de la dague, il piqua fermement l'arrière-train de l'étalon, qui, les yeux soudain exorbités par la surprise et la douleur, rua en poussant un hennissement de peur. La réaction ne se fit pas attendre et l'effet boule de neige fut immédiat : tous les chevaux, pris de panique, se mirent à ruer ou à chercher à s'enfuir, et le chaos survint en quelques secondes. Les premiers animaux trouvèrent la brèche ouverte par Roman dans leur enclos: ils s'y engouffrèrent, suivis par les autres. Roman, quant à lui, s'était accrochée à la crinière de la jument et l'avait montée à cru en se couchant entièrement sur elle pour se faire le plus discret possible. Il s'échappa en même temps que les autres.

Après une folle cavalcade dans les rues de la ville, suivant la course effrénée du groupe de chevaux effarouchés, Roman se redressa, ivre de rire et de satisfaction, et talonna doucement sa monture pour lui impulser un rythme et une route à sa convenance. Il la fit rapidement bifurquer pour quitter le troupeau et partir en direction de Fanette qui, à plusieurs rues de là, devait se demander où il avait disparu. Il s'arrêta devant une auberge et profita de la vieille longe de l'animal pour l'attacher devant l'auberge, ayant glissé une pièce dans la main du gamin chargé de les surveiller. Ceci fait, il courut chercher Fanette et c'est un Roman tout essoufflé mais ravi de son action qui se présenta à son amie :

- Me revoilà !! Votre nouvelle monture vous attends devant le "Sanglier farci", à l'angle de la rue voisine.
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Lison_bruyere
Fanette l'avait regardé tourner au coin de la rue, sans avoir le temps d'opposer la moindre remarque. Et après tout, si la forme n'était guère conventionnelle, sur le fond, elle ne pouvait qu'abonder dans son sens. Son cœur s'était cependant mis à battre quand elle entendit, un peu plus tard le chahut dans la rue principale. Le martèlement des sabots trahissait la débandade qui se jouait à quelques pâtés de maisons. S'y mêlaient les cris des simples passants craignant de se faire piétiner et celui des commerçants furieux d'avoir vu leurs étals chambardés et leurs marchandises perdues. Ce n'est pas l'envie qui lui manquait de s'avancer de quelques toises pour assister à la scène, mais elle n'osa pas contrevenir au ton décidé de l'italien, qui l'avait invitée à l'attendre à cet endroit. La jeune fille s'amusait d'imaginer le vilain tour joué au maquignon, mais son cœur s'était mis à battre, à la simple idée qu'on puisse prendre Roman. Il passerait à coup sûr pour un voleur de chevaux. Les yeux rivés sur l'angle du mur où elle l'avait vu disparaître, elle tentait de se rassurer. Après tout, si elle s'efforçait de ne pas voir l'italien comme un assassin, elle n'avait aucun doute sur les qualités que réclamait son activité, le sang froid, la discrétion, l'habileté ... Les mains jointes, elle serrait ses doigts nerveusement en attendant son retour, guettant les voix qui à présent s'éloignaient derrière la horde affolée.

Quand elle l'aperçut enfin revenir à elle, l'air satisfait, les cheveux bruns bousculés par la course, ses yeux s'éclairèrent d'une lueur amusée. L'homme essoufflé l'invita à rejoindre une taverne un peu plus loin, où l'attendait ... La surprise vint saisir l'éclat de ses noisettes, tandis que ses lèvres ébauchaient un sourire joyeux.

Oh ! Roman, c'est la jument baie ?

Elle s'interrompit sur ces quelques mots. A quoi bon savoir s'il l'avait volée. La jeune fille s'était déjà accommodée de quelque malhonnêteté, qu'elle en fut jadis l'auteur, où qu'elle les ait pardonnées à ses amis. Elle noua son bras à celui de Roman, impatiente de découvrir cette jument qui, pour les jours à venir, serait presque à elle. Levant vers celui qui marchait à ses côtés un regard admiratif et reconnaissant pour ce bonheur de plus, son pas venait d'hésiter un fugace instant, tenaillé par l'envie soudaine de s'arrêter. Si elle avait été moins timide, sans doute l'aurait-elle enlacé, là, dans l'encoignure d'une porte, pour mêler ses lèvres aux siennes en un baiser rendu fiévreux par ces émotions qui venaient de la submerger, la crainte, l'amusement, la gaieté, et peut-être aussi parce que, même si elle ne manquait pas d'en rougir, elle aimait toute ces fois où elle le sentait tout contre elle.
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Nannou
C'est Amin, le martinet de confiance de Nannou qui fut chargé d'acheminer la précieuse missive.
Elle avait finalement passé plusieurs jours à l'écrire, tant les enjeux étaient importants. Parfois elle la faisait lire à son mari, scrutant sa réaction, il approuvait.

Des mois que Nannou avait espéré que son amie s'attache à un homme, se disant que seul un amour lui ferait oublier ses peines et la protègerait des galères dans lesquelles elle avait le chic d'aller se fourrer.

Pendant plusieurs jours, elle avait tenté d'en savoir plus sur un certain danseur dont elle sentait bien que Fanette ne le considérait pas comme un quelconque ami. Jusqu'au soir où le nom de famille avait été lâché : Corléone!

Petit espoir à Nevers, le Corléone était annoncé, Nannou allait pouvoir le jauger, se faire son opinion, surtout que l'arrivée du messire semblait grandement émouvoir son amie.

Mais voilà, Svan appelait Fanette à ses côtés, d'une manière d'ailleurs un peu douteuse selon Nannou, mais bon, un problème à la fois! Le Corléone n'était pas disponible pour discuter en taverne, le départ se précipitait, laissant une Nannou dépitée et surtout très inquiète.
Il l'avait vue cependant, et probablement suffisamment pour ne pas prendre au sérieux le ton menaçant de la missive.

Tant pis, elle aurait essayé.




Cher Roman

Il se trouve que par divers concours de circonstances, nous n’avons pas pu faire vraiment connaissance lors de votre passage à Nevers.

Je ne vais pas y aller par 4 chemins, vous venez de partir en voyage avec une amie qui m’est chère et qui de surcroît semble s’attacher beaucoup à vous.

Alors ce n’est pas mon genre mais je vais devoir me montrer directe. En fait pour être honnête c’est tout à fait mon genre. Je ne suis pas à l’aise avec les sous-entendus et les phases à lire entre les lignes. C’est un style, on aime ou on n’aime pas.

En général je suis assez douée pour me faire une idée sur les gens quand je les rencontre mais là j’ai tout de même assez peu d’éléments. Déjà vous n’avez pas caché votre nom de famille en taverne, un bon point. Vous n’avez pas non plus caché votre défaillance comme garde du corps, 1 bon point et un mauvais point. Sachez que je vous considère comme le garde personnel du corps de Fanette alors laissez vos défaillances de côté dorénavant !

Vous n’avez pas hésité quand Fanette a décidé de partir sur le champ retrouver son amie, encore un bon point.

Vous voyez, le bilan est positif finalement. En fait vous vous en fichez peut-être de mes bons et mauvais points, tant pis.

Bon voici maintenant les questions que je comptais subtilement vous poser en taverne. Et vous l’aurez compris, la subtilité n’étant pas mon truc, cela m’avais demandé un gros travail. Travail en fin de compte inutile, quel gâchis !

Sans plus attendre, voici les questions que j’aimerai vous poser :

Avez-vous de près ou de loin participé aux activités illicites qui ont fait la réputation de votre famille ? Si oui, lesquelles ? Avez-vous déjà tué un homme (ou une femme)? Si oui dans quelles circonstances ?

A la réflexion, je pense que ce n’est pas plus mal que vous fassiez partie de la famille Corléone, ça impressionnera sans doute le gugusse qui a épousé l’amie de Fanette.

Prenez bien soin d’elle, passez lui mes amitiés mais surtout ne lui faites pas lire cette lettre.

Bien à vous

Nannou
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