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[RP] Sur la lande : le manoir des Kermeur

La_vieille_margaux


    Au manoir, fin janvier 1461


La vieille nourrice s'activait dans la maison, Roxane installée à califourchon sur sa hanche. Margaux avait aidé Mergat à faire la lecture de la lettre que sa maman lui avait envoyée la veille, et elle avait décidé de prendre les choses en main en attendant le retour de madame, de façon à ce que les enfants soient bien mis à l'abri des maladies. En effet, Annaell, qui était partie deux semaines plus tôt rejoindre d'autres soldats, avait écrit à Mergat de bien prendre soin de ses frères et soeurs, car elle-même avait pris la maladie. La lettre n'en disait pas plus. Madame n'avait sans doute pas voulu alarmer davantage son fils aîné, qui déjà s'inquiétait de la savoir en mauvaise santé, mais cela avait suffit à la nourrice pour en déduire quelques précautions élémentaires. Monsieur de Kermeur étant lui aussi très occupé, Margaux avait pris la direction des opérations, se contentant d'un bref signe d'assentiment de la part de son maître quand elle lui avait exposé sa proposition.

Les plus jeunes servantes étaient nerveuses et désordonnées, inquiète à l'idée de voir rentrer madame malade et peut-être contagieuse, et il fallut toute la patience et la poigne des femmes de maison pour que les petites se remettent correctement à leur ouvrage. Tout le monde avait entendu parler au marché des maladies qui se répandaient actuellement dans le royaume de France, et l'on disait qu'elles avaient commencé à toucher la Bretagne... et madame qui était sur les routes ! Margaux secoua la tête pour elle-même. À quoi bon donner son avis sur la chose ? Annaell avait toujours été une fonçeuse, prête à réagir à la moindre occasion de servir le pays, de mettre une raclée à un brigand ou de se mettre un politique à dos. Au grand désespoir de la nourrice, ce caractère, bien qu'il se fût quelque peu atténué, ne s'était pas vraiment changé avec l'âge adulte.

Tout en écoutant le babillage de Roxane calée sur sa hanche et en changeant les draps d'un landau de sa main libre, Margaux se remémora Annaell toute petite, à l'époque où elle l'avait prise sous son toit, un automne grincheux lors duquel sa maman était tombée gravement malade et avait confié sa première-née à sa proche amie, feue la soeur de Margaux. Annaell Kerloc'h était alors fille de paysans, comme eux tous, née bâtarde d'une aventure entre Marie et un soldat français... Ho, oui, Margaux le savait ! Quant à savoir si le père Kerloc'h était au courant que la jolie Marie était enceinte lors de leurs noces, c'était une autre père de manches. Heureusement, si Marie possédait de banals cheveux châtains, Annaell était dotée d'une épaisse chevelure d'un noir de corbeau, tout comme le père Kerloc'h, qui n'avait peut-être finalement jamais soupçonné qu'Annaell n'était pas de lui. Les hommes ne connaissaient pas grand-chose aux cycles de la femme, et à deux ou trois mois près, probablement ne s'était-il pas étonné de voir un enfant naître assez rapidement après le mariage. Annaell avait porté le nom de l'époux de sa mère, et la petite aventure de la ronde et généreuse Marie n'avait jamais fait beaucoup de bruit.

Fatiguée par le remue-ménage ambiant, et sentant le bébé peser de plus en plus sur sa hanche, la vieille nourrice plia sa carcasse au creux d'un bon fauteuil, le dos bien calé pas trop loin de la cheminée. Elle prit Roxane dans son giron et la petite s'y lova sans rechigner, habituée à la présence de la vieille. La main ridée caressa le petit front orné de boucles noires. Ses yeux se portèrent avec nostalgie sur le petit landau de bois, puis elle vit, comme sous un jour nouveau auquel elle n'avait pas encore passé, les belles décorations de la chambre. Boiseries, tentures et tapisseries était de belle qualité; la cheminée était grande et ronflait d'un feu généreux, et Margaux savait que le tas de bois dehors aurait pu servir à construire une maison en plus d'alimenter les cheminées de tout le manoir. Ses yeux se baissèrent sur Roxane qui s'endormait, et elle se revit chez elle, dans sa vieille masure, la petite Annaell sur les genoux. Elle avait à peine quatre ans et s'agitait avec une moue toute froissée, cherchant à descendre des genoux de Margaux, réclamant sa maman avec forces plaintes. Elle avait passé plusieurs semaines chez Jeanne et Margaux, les deux soeurs vieilles filles, sans pouvoir retourner chez elle : Marie était tombée gravement malade et la petite avait été confiée à Jeanne. Leur pauvreté de l'époque ne leur permettait pas de faire venir un médecin, et il avait fallu attendre de longues semaines que Marie se remette. Elle qui, avant cela, avait toujours été dotée de rondeurs généreuses, elle s'était amaigrie et affaiblie. L'hiver avait été très difficile et le père Kerloc'h avait manqué de se tuer à la tâche pour pouvoir nourrir à la fois sa femme et sa fille.

Et puis, enfin, après des années de pauvreté dans le petit monde des paysans pêcheurs de Plougonvelen, sur les terres de la famille Kermeur, la Providence avait fait son apparition. Le frère de Marie était décédé brutalement, emporté par une fièvre, et le clerc de la paroisse voisine avait fait porter le testament à l'épouse Kerloc'h. Son frère lui léguait sa ferme, ses quatre champs et l'ensemble de ses animaux, puisqu'il n'avait eu aucun descendant et que sa propre épouse était morte deux ans auparavant. L'on avait pu alors racheter des vêtements chauds à tout le monde, refaire la cheminée, et Marie avait vendu l'ensemble des biens de son frère afin d'en tirer une somme qui, pour elle, était colossale. L'occasion ne se représentait pas deux fois dans une vie : le curé encouragea la mère à envoyer sa fille chez les nonnes pour apprendre à lire et à écrire, lui fit rencontrer un neveu marchand qui se rendait en Champagne, lui vanta les mérites d'un couvent lescurien, et Annaell fut envoyée en France, loin de la misère et des travaux des champs. Elle ne revit jamais ses parents, et les quelques lettres qui parvinrent aux époux Kerloc'h ne purent recevoir de réponse, puisque personne ne savait lire au village à part le vieux curé qui avait rendu l'âme l'hiver passé.

Et, une dizaine d'années plus tard, l'on avait vu revenir une jeune femme fière et blessée, tenant fermement en son poing une lettre du Duc d'Ouessant l'autorisant à revenir de France reprendre possession de la ferme familiale, et qui se présenta comme Annaell ap Kerloc'h. Elle cherchait à rencontrer le seigneur de Plougonvelen, qui était maître des terres sur lesquelles vivait auparavant sa famille. Personne n'avait été témoin de la rencontre entre Annaell et le seigneur, Trilo de Kermeur, mais ceux qui avaient indiqué à la jeune femme le chemin du manoir, non loin de là, l'avait vue revenir sur le cheval du vicomte, et par-dessus le marché, il la tenait entre ses bras ! Ho, que cela avait jasé ! Mais l'on avait su par la suite que la fille Kerloc'h revenue de France avait été gravement blessée par une armée, et que le fait que le seigneur la tienne dans ses bras n'avait pas eu grand-chose à voir avec une quelconque histoire de fesse. Et cependant... au fil des semaines, tandis qu'on voyait souvent la jeune femme marcher sur la lande et sur les sentiers des bois à la recherche de ses souvenirs, l'on avait vu le vicomte redevenir d'une humeur moins désagréable. Et personne ne s'était vraiment étonné de le voir accorder l'hospitalité à la fille Kerloc'h, sous prétexte que la ferme de ses parents se trouvait à l'abandon et inhabitable, et que sa blessure nécessitait des soins.

Deux ans avaient passé... peut-être trois ? Et Margaux tenait dans ses bras la fille d'Annaell et du vicomte, qui s'étaient finalement pris en épousailles et ne savaient cacher l'affection et la tendresse qu'ils avaient l'un pour l'autre. Annaell avait adopté Mergat comme son propre fils, bien qu'il fût né de feue la première épouse de Trilo, puis avait donné trois enfants à son mari. Trois beaux petits Kermeur, qui à présent égayaient le manoir de leurs cris, de leurs pleurs et de leurs rires, et avaient nécessité l'embauche de quelques gens supplémentaires. Et Annaell avait retrouvé Margaux par hasard, en la rencontrant au marché, se souvenant d'elle comme la gentille soeur de Jeanne que sa mère aimait bien.

La petite paysanne était revenue de France à la fois blessée et triomphante, éduquée, lettrée mais aussi encore plus imprévisible qu'auparavant. Comme la mer, on la voyait le plus souvent calme et douce, agitée seulement de quelques mouvements comme ceux d'un sommeil léger, et soudain elle tempêtait, furieuse et outrée, et ses joues rougissaient d'une colère bien trop prompte. Six années de couvent n'avaient pas su adoucir ces explosions de caractère, et Margaux soupçonnait qu'elles avaient plutôt contribué à lui donner un peu trop envie de s'exprimer, une fois sa liberté retrouvée au sortir du couvent. Mais comme le vicomte, bien que son caractère fût loin d'être celui d'un agneau, elle trouvait en sa compagnie une douceur et une tendresse qui sans doute n'avaient jamais été exprimées par elle. Margaux sourit en son for intérieur. Parfois l'on voyait l'un ou l'autre des époux tendre la main pour entrelacer ses doigts à ceux de l'autre, et les regards qu'ils s'adressaient en temps de paix ne cachait aucunement leur affection mutuelle. Mais quand l'un se mettait en colère, l'autre ne tardait pas à faire de même, et le manoir bénéficiait alors d'une ambiance électrique. Mais heureusement, Annaell semblait s'être attendrie depuis la naissance de ses enfants, et les coups de colère se faisaient fort rare ces derniers temps.

Elle était partie à dix ans de de Plougonvelen sans la moindre richesse, fille de paysans et descendante d'une famille de serfs, et elle était revenue lettrée, petite bourgeoise tisserande, une épée et un bouclier dans sa carriole, et une petite fille à son côté, adoptée en Champagne. Et là voilà à présent mère de famille, vicomtesse par mariage, et disposant d'une fortune dont sans doute elle n'aurait jamais pu rêver plus jeune. Et par-dessus tout, Annaell avait trouvé l'amour en la personne de Trilo de Kermeur, un marin breton de renom que l'on savait être aussi compétent que caractériel.

Un soupir envieux s'échappa des lèvres de la vieille Margaux... Ha, mais pourquoi était-elle donc vieille fille, elle ? Elle n'avait plus l'âge d'être courtisée, hélas... Et tandis que Roxane s'endormait paisiblement au creux de son giron, la vieille nourrice se laissa emporter par le doux souvenir de ce brave Paol Kermadec, avec qui elle avait eu quelques aventures de jeunesse...

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"Je suis vieille, mais j'ai encore la main leste et le sermon facile !"
Annaell
    [Sur les routes, à l'est de Vannes, quelques jours plus tard]

Annaell et Monmi avaient quitté Chabada un peu avant Nantes, chacun s'était souhaité mutuellement bonne route et bon retour. Annaell souffrait encore de fortes douleurs qui lui faisait maudire le moindre mouvement de travers de son cheval, mais elle ne pensait plus à présent qu'à rentrer chez elle. Monmi et Chabada l'avaient suivie à son départ de ce simulacre de mission qui avait tourné en eau de boudin avant même d'avoir commencé. Annaell n'avait jamais vu une telle désorganisation des forces et se prit à regretter le temps où elle gérait l'ost champenois avec une efficacité bien plus raisonnable que cela. À cette époque, tout allait comme sur des roulettes, et pas un de ses soldats n'était mal informé sur la route à prendre ou sur les consignes à suivre. Enfin bref... elle était venue comme volontaire civile, et n'avait donc aucun état d'âme à rentrer chez elle. De toute façon, la maladie qu'elle avait contracté lors du trajet avec les hommes l'aurait empêchée de faire quoi que ce soit d'efficace. Elle désirait plus que tout retrouver son mari, ses enfants, et la chaleur de son foyer. Prendre du repos... et se soigner.

Les remparts de Vannes apparurent dans le lointain, et elle laissa sa monture accélérer le pas. Sans doute l'animal reconnaissait-il l'odeur d'une écurie déjà fréquentée... La cavalière, suivie de son ami et soldat Monmi, se demanda si elle aurait l'occasion de croiser le suzerain de son époux, ou bien sa femme... Cela faisait bien longtemps qu'elle ne les avait pas vus tous les deux, et elle aurait plaisir à les retrouver.

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Annaell
    [Au manoir, début février 1461]


Annaell empaquetait une partie de ses possessions avec l'aide de la vieille Margaux. Depuis plusieurs semaines déjà, son époux Trilo avait pris la fièvre mauvaise de l'hiver, et avait été éloigné de sa famille pour être calfeutré dans l'abbaye de Plougonvelen, aux soins du moine médecin qui officiait sur ces terres. Il était difficile pour sa jeune épouse de n'être pas autorisée à le visiter... il lui manquait terriblement, elle désirait pouvoir se blottir contre lui le soir, sentir ses bras et son torse l'enserrer en étreintes tendres ou passionnées... Mais hélas, elle n'avait pu le voir depuis des semaines. La vie sans lui perdait de sa saveur, et sans l'amour qu'elle portait à ses enfants et qu'ils lui rendaient bien, Annaell aurait sans nul doute dépéri.

Alors, puisque l'abbé lui avait dit que Trilo ne pourrait pas revenir au manoir avant encore de longues semaines de convalescence et de confinement, la jeune femme avait décidé d'emmener ses enfants en voyage et de prendre la route avec quelques amis. Elle avait l'intention d'aller rendre visite à Guigoux, à Rohan, et aussi à Lallie et Grand-Sage à Vannes. Ce serait l'occasion de faire découvrir la Bretagne aux petits Kermeur, et aussi de prendre un peu l'air... la maladie de Trilo l'inquiétait, et si elle restait au manoir à tourner en rond elle avait le sentiment de devenir folle d'angoisse.

Les enfants, excités par la perspective d'un voyage, étaient tout énervés et criaient, riaient ou pleuraient pour un rien. Mergat heureusement, aidé de Bullea, aidait tout ce petit monde à s'occuper, pendant que les adultes préparaient les bagages.

Dans quelques jours, ils prendraient la route...

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Agathe_de_kermeur
Pas mal de temps lovée dans des couvertures, emmitouflée dans des langes, au chaud et comme à l'abri de tout... Le confort était à la perfection mais imaginez un instant...

Vous êtes confiné dans un couffin et vous voyez deux bambins courir et explorer le monde, faire des bêtises, et voir des choses que vous ne pouvez pas voir, vous!

L'apprentissage avait pris du temps, mais les sollicitations avaient rendues Agathe bien débrouillarde par rapport aux autres bébés de son âge.

Un jour elle avait su tenir assise en équilibre, et alors, elle avait attrapé et glissé dans sa bouche chaque petit objet à sa portée!

Le monde s'était agrandi, lorsqu'elle avait su marcher à quatre pattes... Ou plutôt ramper d'une façon... Peu élégante au grand regret de sa nourrice, qui voulait en faire une petite fille distinguée. Heureusement ses attendrissantes mimiques faisaient qu'elle faisait facilement craquer son entourage.

Aujourd'hui, Agathe avait 11 mois. Onze mois à explorer le monde qui l'entourait, Elle était agrippée à une des nombreuses malles qui jonchaient le sol du chateau. ou plutôt, maintenait la malle pour se rassurer.

Aujourd'hui, elle avait décidé une chose: elle marcherait!

Autour d'elle les vas et viens incessants des valets et des nourrices empilant coffres et sacs de lin remplis au maximum. Ils surveillaient les enfants du coin de l'oeil mais moins attentivement qu'ordinairement.

L'enfant en profita, et... Respira un bon coup. Lacha la malle, se retrouvant debout. L'équilibre n'était pas facile à maintenir, mais elle faisait tout pour y arriver.

Un pied qui se détache du sol... Qui se pose, peu assuré.Puis un second... Un troisième et... Une fillette qui se retrouve au milieu d'une pièce sans appui. Une grimace sur son visage:


-Mama...

Un autre pas... Et un regard qui cherche la rassurante présence maternelle.

-Mama!!!!

Elle observe un peu ensuite, remarque la distance qu'elle a parcouru et sourit l'air de dire "Et voilà, je marche!!!" Enfin, ça fatigue, tout de même... Un petit séant se posant sur le sol, attendant quelqu'un...
Annaell
Annaell, un mantel de fourrure entre les bras, tentait de faire tenir les vêtements d'hiver de Mergat dans la malle qui lui était dédiée. Peine perdue, elle avait beau pousser, tirer, replier, réarranger, ce mantel était impossible à faire entrer. Avec un soupir, les joues rougies par l'effort constant de la journée, elle se redressa pour masser son dos endolori à force d'être penché. Une petite voix attira son attention, petite voix bien connue qui se faisait un devoir de toujours rappeler au bon souvenir des adultes sa présence discrète. Annaell se retourna. Surprise !

Agathe se tenait là, debout au milieu de la pièce, en équilibre précaire mais dressée sur ses deux jambes avec un ravissement visible. Petite fille minuscule, immobile et toute contente, au milieu des domestiques qui allaient et venaient à grands pas, les bras chargés de vêtements, comme un phare au milieu de la tempête.


"Mama !"
- Ho, Agathe ! Tu t'es mise debout toute seule ?


Et au grand étonnement de la jeune vicomtesse, voici la fille Kermeur qui se lance en avant, petit pas par petit pas, les bras tendus vers sa maman. Annaell s'accroupit, ravie, tendant les mains vers sa fille.

"Mama !"

L'enfant, visiblement fière de son exploit, acheva un dernier pas et se rassit sur le sol, ce qui paraissait probablement plus prudent pour elle. Annaell, lui sourit avec tendresse et se releva pour aller prendre sa fille par la taille et la soulever bien haut.

- Bravo ma petite princesse ! Te voilà une grande fille ! Tu vas bientôt pouvoir jouer à chat avec tes frères et soeurs !

Agathe reçut un baiser sur le front, et sa maman la prit dans ses bras pour la cajoler avec beaucoup d'amour. Elle était fière de sa fille, fière de ses enfants et heureuse de les voir grandir en bonne santé, dans une maison saine et où ils ne manquaient de rien. Ses enfants avaient la chance d'être nés dans une famille riche, tandis qu'Annaell était née pauvre, fille de paysans, et avait connu le froid et la faim avant de découvrir le confort, gagné à force de travail et d'études.

- Et si nous allions montrer à Roxane et Johann que tu te tiens debout et que tu marches ?

Calant la fillette sur sa hanche, Annaell abandonna la préparation des malles pour descendre au salon où jouaient les jumeaux. À son entrée, ceux-ci se tournèrent vers elle, et elle posa Agathe debout sur le sol.

- Johann, tend les bras à ta petite soeur !

Mission : franchir seule le chemin de maman à grand frère !

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Roxane.
Lorsqu'un enfant grandit, ses bêtises grandissent avec. Roxane et son jumeau étaient deux petits diables qui ne cessaient de faire tourner en bourrique Margaux.
Mais ce jour-là n'était pas un jour comme un autre. Les deux crapules jouaient sagement dans le salon laissant un peu de répit à leur nounou qui avait d'autres chats à fouetter.
Son regard vert se tourna lorsque la porte s'ouvrit et voir ainsi Maman entrer avec Agathe qu'elle posa au sol. Elle va encore rester le popotin collé au sol pensa-t-elle.
Mais Maman fit une demande à son frère pour accueillir la petite. Oohhh qu'allait-elle nous montrer? Un exploit ????
Johann pouvait bien faire çà il était plus costaud qu'elle.
Quant à Roxane elle l'aiderait avec des encouragements et tout en tapant des mains


Agat !!! Agat !!!!!!!
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Agathe_de_kermeur
Qu'il était épuisant de marcher! Et quelle concentration il fallait avoir!
La bienveillante maman était arrivée à temps et avait pu se rendre compte des exploits de sa fille.
L'enfant se blottit dans les bras maternels, un sourire sur les lèvres. Elle était heureuse et avait hâte de jouer avec les grands!

Elle se laissa guider par sa mère qui l'emmenait plus bas, retrouver les jumeaux. Ils étaient sages et calmes, chose plutôt rare. La petite les observa, presque avec étonnement.

Marcher jusque Johan, voilà la mission que lui donnait Annaell. Agathe se concentra, observant son frère.

Maman déposa l'enfant sur le sol. Agathe s'efforça de garder l'équilibre sur ses deux pieds, ce qui n'était pas si facile, tout de même.


-Ho Aaaaaa!! (traduire: Johan)
Une fois l'attention du grand frère captée, un premier pied vint se placer devant l'autre. Agathe se sentait comme un troubadour, en plein spectacle. Elle n'avait pas le droit à l'erreur et une chute les décevrait tous! Elle revint de quelques millimètres à droite, pour garder l'équilibre et souleva son second pied.

Un pas, deux pas... Une hésitation, une légère perte d'équilibre... Un bébé qui se reconcentre... Trois pas, quatre... Et une petite main potelée qui attrape celle de son grand frère alors que son regard se plonge dans le sien, l'air de dire:

"Alors, t'as vu? Je marche!!"
Annaell

    { Un autre jour... en avril }


L'aube se leva sur la chambre silencieuse d'Annaell. Assise à sa table, encore en déshabillé de nuit, ses cheveux noirs traînant en boucles éparses et indisciplinée, la jeune femme respirait avec une lenteur inhabituelle. Ses doigts déplaçaient lentement, sans bruit, les petits flacons de verre qui contenaient les remèdes qu'elle tenait dans son armoire, en tant que médecin. Elle en effleura les bouchon polis, pensive, n'écoutant que le bruit assourdi de son coeur.

La fatigue. La fatigue était là. De ses tentacules poisseux et impalpables, elle rongeait peu à peu la vicomtesse. Une main légèrement tremblante se posa sur un flacon, le déboucha. Une essence de plante. Annaell savait ce que c'était et quelles en étaient les propriétés.

Elle porta le petit flacon à ses lèvres et le liquide coula dans sa gorge, sucré, écoeurant. Le verre fit un petit bruit mat en retrouvant la table. Annaell soupira en fermant les yeux... Elle sentait son coeur ralentir doucement, tranquillement.

Elle aurait voulu se lever de cette chaise pour aller s'étendre. Mais déjà elle ne s'en sentait plus la force. Sa respiration était calme. Elle ne s'était pas trompée de fiole.

Sa tête se posa mollement sur le dossier de son fauteuil. Ses bras alanguis se croisèrent à demi sur son giron. Ses yeux se fermèrent.

Et, tout doucement, elle sombra.


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Roxane.
Roxane dormait peu ces derniers jours encore du remue ménage dans la maison des Kermeur mais que se tramait-il encore ?

Sortant de son petit lit douillet et chaud, le soleil ne rayonnant pas encore, elle sortit de sa chambre.
La maison était calme à cette heure là.
Parfois elle filait voir Johann dans sa chambre mais elle en décida autrement ce matin-ci.
Se recoucher ? Pourquoi pas avec Maman et se glisser à ses côtés pour un petit câlin ?
Petits petons qui s'avancèrent jusqu'à sa porte qu'elle ouvrit sans faire de bruit. Passant sa frimousse pour voir si ça dormait encore.
Roxane ne vit pas sa mère dans le lit, ses yeux la cherchèrent dans la chambre. Puis ils s'arrêtèrent vers un fauteuil. La voilà assise...que faisait-elle ? Elle se serait endormie ?
Tout doucement elle s'approcha d'Annaell et vit sa Maman affalée sur ce fauteuil.
Le dilemme se posa. La réveiller ou la laisser dormir ? Elle avait l'air bien fatiguée sa Mamounette. Autant ne pas la déranger. L'enfant alla s'allonger sur son lit et resta ainsi à la regarder et guetter le moindre mouvement.



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Trilo
Que les femelles étaient difficiles à supporter, surtout lorsqu'elles formaient une ligue. Dans ce cas-là, il ne reste qu'à s'enfuir et attendre que les hormones qui les contrôlent diminues.

Le vicomte se trouvait donc sur les chemins, profitant de ces premières journées de soleil accompagnées d'un peu de chaleur. L'hivers fut long et rigoureux, manque plus que la mer pour l'accompagner et ce serait parfait.

Sifflotant pour se donner de l'entrain, le vicomte appréciait cette paix retrouvée loin des problèmes des homm... heu que constituent les femmes.

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Manon_laouenan
Manon remonta du salon où elle était occupée à apprendre à la jeune Fanchon l'art du reprisage de chaussettes. Il était l'heure de manger et madame ne descendait toujours pas, alors qu'après la naissance de ses trois enfants, elle avait pris quelques habitudes de table dont celle d'avoir toujours assez faim pour un bon souper. Le temps de remettre en place coiffe et corsage, et Manon toqua à la porte.

Madame ? L'heure du souper est venue.

Pas de réponse. Quelques petits coups supplémentaires sur la porte : pas mieux. Manon ouvrit. Annaell était toujours sur le fauteuil.

Madame, est-ce que... Madame ! Ho par tous les Saints !

Il ne fallut pas plus longtemps pour que Manon attrape la main de sa maîtresse et y mette de petites tapes tout en l'appelant, sans avoir vu la petite Roxane qui s'était couchée sur le lit.

MARGAUUUUX !

Au cri de la servante, on entendit un choc sourd à l'étage supérieur, accompagné du raclement d'une chaise sur le plancher, puis un pas lourd et claudiquant rejoignit l'escalier. Douze secondes plus tard, la vieille nourrice entrait dans la chambre de la vicomtesse, ayant deviné au ton strident sur lequel on l'avait appelée que madame avait un problème. Ni une ni deux, découvrant la scène et étant coutumière des soins à donner aux jeunes femmes évanouies, elle poussa Manon, prit entre ses vieux doigts tordus le poignet d'Annaell inconsciente, et tout en scrutant le visage aux traits alanguis...

Non... c'est impossible...

Un couinement terrifié échappa à Manon qui couvrit immédiatement sa bouche de ses mains, les yeux agrandis d'horreur.

Ma... madame est morte ??

La grand-mère fronça encore plus les sourcils et tira sur le châle qui couvrait les épaules de la vicomtesse pour plonger la main jusqu'à son cou. Elle y chercha le battement d'un coeur qui s'était étiolé. Manon la regardait faire, les larmes déjà au bords des yeux. Inutile de chercher plus loin : la vieille femme retira sa main de la gorge tiède, lentement, les yeux fixés sur le visage détendu.

Madame est morte.

De la porte parvinrent soudain des cris et des exclamations épouvantées, immédiatement suivies de pleurs : les filles de maison qui étaient assez proches pour avoir entendu l'appel de Manon s'était empressée de venir voir ce qu'il se passait, et pour le coup, elles avaient absolument tout vu. Certaines pâlirent et se turent, d'autres devinrent rouges et se mirent à pleurer, d'autres encore crièrent affolées tandis que les plus petites tâchaient de comprendre de quoi il s'agissait. La voix tonitruante de la vieille Margaux ramena tout le monde à un calme plus respectueux :

SILENCE ! Madame est morte. Faites quérir monseigneur de Kermeur.

Et, tandis que les filles bouleversées soulevaient la vicomtesse et la portaient sur son lit, où l'on découvrit la petite Roxane qui fut confiée d'office à la matrone, on envoya le coursier sur le cheval le plus rapide que l'on trouva dans les écuries, pour quérir monsieur de Kermeur. Il trouva le vicomte en pleine promenade, sauta de sa monture et se jeta à ses pieds :

Monseigneur ! Monseigneur... Prenez mon cheval pour retourner au plus vite au manoir, une chose terrible est arrivée... !
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Agathe_de_kermeur
Des petits pas d'une enfant de plus en plus autonome. Agathe est: une 'rande! (comme elle dit.)

Ce matin là, la plus jeune de la famille s'était réveillé tôt. Contrairement aux autres jours où elle s'agitait dès le réveil, elle avait posé les yeux sur une poupée de chiffon et s'amusait à la bercer. Le jeu devenait de plus en plus intéressant, alors qu'elle imaginait que l'enfant de tissu pleurait. Hélas, un cri strident se fit entendre encore plus fort que les pleurs imaginaires du poupon de chiffon.


MARGAUUUUX !

Une enfant qui sursaute, grimace et pâlit. Agathe se demande ce qu'il se passe, terrorisée! Elle veut comprendre et quitte sa chambre, tentant de se rapprocher. Ses petits pas se font entendre sur le parquet du manoir, mais elle reste près des murs, souhaitant être vue le moins possible. Maman n'est pas descendue?

L'enfant en chemise de nuit blanche poursuit sa route, et arrive au couloir qui mène à la chambre de la vicomtesse. Là, c'est un peu compliqué à décrire.
*Maman est partie?* Elle voit Roxane, emmenée au loin avec une dame. Les domestiques restent sans voix ou pleurent. Agathe est paniquée, très paniquée et ignore que ce souvenir là la marquera toute sa vie.

Une larme coule le long de sa joue. Il se passe quelque chose, et c'est grave.


-Madame est morte. *Morte? Mais elle peut pas mourir Maman! Pourquoi ils pleurent tous, elle va revenir de toutes façons!*
Elle ne comprend pas le désordre ambiant et s'assoit au sol, contre le mur, les jambes pliées contre son ventre. Elle observe sans mot, tout en reniflant bruyamment.

Aux yeux d'un enfant de 3 ans, la mort est réversible et ne peut pas toucher ceux qu'on aime...
Trilo
Le chef de maison arriva en trombe dans la pièce. Cela faisait plusieurs heures qu'il avait été prévenu et n'avait pas voulu en croire ses oreilles.

Il arriva directement sur sa femme pour l'examiner, elle et son environnement.

Il remarqua des fioles de drogue ouverte posé sur la table de nuit. Il posa ensuite sa tête au niveau de son nez.


Bande d'imbécile, elle n'est pas morte, je peux sentir son souffle. Vite, amenez moi une cruche d'eau. La boniche s'exécuta rapidement.

Le vicomte boucha le nez de sa dame et lui fit ingurgiter toute l'eau. Il recommença deux autre fois l'opération. Il termina ses soins en collant deux baffes monumentales sur chaque joues, comme ça pas de jalouse. De l'eau jaillis de sa bouche sous les coups mais il ne restait plus qu'à voir les résultats de ses soins délicats.

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Annaell
Dans un brouillard cotonneux et silencieux, Annaell dérivait. La douce drogue qu'elle avait prise pour se reposer n'était pas de celles qui faisaient sombrer un adulte de bonne constitution... il n'était pas normal qu'elle ait eu cet effet sur la jeune femme. Plongée dans un sommeil bien plus profond que ce qu'il devait être, il lui était impossible de refaire surface. Comme si la drogue avait agi de manière décuplée sur son organisme. Il ne s'agissait après tout que d'une décoction de plantes un peu améliorée, remède souverain contre les insomnies ou les crises d'angoisse. Elle en consommait de temps en temps... une petite quantité suffisait toujours à la faire glisser vers un sommeil tranquille. Pourquoi ce jour-là avait-elle sombré dans un état littéralement comateux ? L'inconscience profonde et dangereuse qui l'avait submergée n'avait rien de la bonne petite sieste qu'elle avait prévue. Alors, dans le silence, immobile, elle dérivait, aveugle, sourde et muette.

Elle n'entendit pas son mari auprès d'elle, pas plus qu'elle n'avait entendu les cris de ses servantes, mais quand il lui versa dans la gorge le contenu de la cruche, un réflexe de survie prit le pas sur le coma artificiel provoqué la drogue et elle se mit à tousser et à tourner la tête pour se débarrasser de l'agresseur. Elle n'avait pas la force de faire davantage, pas encore consciente, car seul son corps réagissait pour la protéger de la noyade.

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